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Régie des transports de Marseille (RTM) - Marseille (Bouches-du-Rhône)

CRC PROVENCE-ALPES-CÔTE D'AZUR

Rapport d'observations définitives

SYNTHESE

Organisation et gouvernance

La régie des transports de Marseille (RTM) est une régie de transport, constituée en établissement public industriel et commercial conformément aux dispositions de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d’organisation des transports intérieurs dite loi LOTI et aux dispositions du décret n° 85-891 du 16 août 1985 relatif aux transports urbains de personnes et aux transports routiers non urbains de personnes. Elle agit en tant qu’opérateur de la communauté urbaine Marseille Provence Métropole (CUMPM), autorité organisatrice des transports (AOT). Elle occupe une place historiquement prépondérante dans l’activité de transport sur ce territoire.

Le transfert de la compétence relative aux transports de la ville de Marseille à la CUMPM s’est concrétisé par la mise en place, à compter de 2007, d’une démarche de contractualisation visant à rééquilibrer et clarifier les rôles respectifs de l’autorité organisatrice et de son exploitant.

Après une première étape de contractualisation sur la période 2007-2010, le contrat d’obligation de service public pour les années 2011 à 2018 s’inscrit dans le cadre d’un règlement intérieur renouvelé et de la mise en conformité, à compter de la gestion 2011, du budget communautaire à l’obligation de création d’un budget annexe des transports.

Le contrat organise les rapports entre la communauté urbaine et la régie selon une logique différente du contrat précédent, avec le transfert de propriété des recettes du réseau vers l’autorité organisatrice, qui en assume seule les risques, ainsi qu’une valorisation précise et systématique de l’ensemble des prestations.

Si la nouvelle économie du contrat constitue un progrès, elle ne garantit cependant pas la complète maîtrise des coûts (304,5 M€ en 2012 pour 101,4 M€ de recettes). Les coûts des prestations pris en compte pour calculer la rémunération versée à la RTM ont ainsi été établis sur la base du constat de l’existant mais aucune trajectoire d’économies à atteindre n’a été définie dans un contexte de tensions sur le financement du budget transport de l’AOT et, plus généralement, au regard des enjeux du plan de déplacement urbain. Par ailleurs, l’élargissement des prestations donnant lieu à rémunération n’a été que partiellement compensé par le rehaussement de l’objectif de recettes attendues, pour lequel les marges de progression apparaissent limitées. Certaines prestations largement déficitaires (Mobi Métropole, navettes maritimes) appellent donc d’autres mesures d’équilibre.

Dans ce contexte, la chambre note l’engagement pris par la régie de poursuivre la recherche d’amélioration de l’équilibre initial du contrat par des gains de productivité permettant, à qualité de prestation égale, une réduction des coûts unitaires, au travers notamment de la maîtrise de la masse salariale, et par l’accroissement des recettes de billetterie, en adaptant la politique commerciale, en luttant contre la fraude et en faisant évoluer la politique tarifaire définie par l’AOT. Des mesures concrètes d’économies seront ainsi prises en 2015.

Dans le cadre du nouveau contrat, le périmètre d’intervention initial de la régie s’est élargi, sans modification de l’organisation de la RTM. Le schéma de reprise du réseau Ciotabus à compter de juillet 2014 prévoit en revanche la création d’une filiale dédiée de la régie dont elle serait l’unique actionnaire. Ce montage juridique n’apparaît toutefois pas suffisamment sécurisé au regard des dernières évolutions voulues par le législateur en 2010 concernant les régies de transports publics locales. La perspective de dupliquer ce schéma pour d’autres villes, dans le cadre de la future métropole, renforce la portée de cette lacune.

Offre de services et performance du réseau

L’offre globale kilométrique a progressé de 11,9 % entre 2006 et 2012, avec une accélération depuis l’entrée en vigueur du nouveau contrat. Les déplacements sont également en progression de 13 % sur la période, portés par les modes de transport en site propre (métro, tramway).

Les gains de déplacement constatés sur les dix dernières années résultent surtout de la fidélisation des usagers par le développement des propositions d’abonnement et, à partir de 2009, de la mise en place de la prime transport (+ 26 % d’abonnés entre janvier 2009 et mars 2013).

D’autres éléments d’amélioration de l’offre de services, plus qualitatifs, peuvent avoir également une incidence sur la fréquentation du réseau.

Il en est ainsi de la mise en œuvre d’une politique qualité portant sur la performance des trois modes de transport (tramway, métro et bus). Cette politique, amorcée en 2007 par la RTM, est désormais prévue par le contrat d’obligation de service public pour la période 2010-2018, qui fixe un objectif de conformité de qualité de service par rapport à des exigences prédéterminées et un objectif de satisfaction des clients mesuré par une enquête annuelle. Ces résultats sont pris en compte dans le montant versé par MPM à la RTM en application d’un système improprement qualifié de bonus/malus puisque le malus n’est en réalité qu’une minoration du bonus maximum. Il serait par ailleurs utile de faire évoluer ce dispositif d’intéressement financier afin de favoriser l’extension de la démarche de certification aux lignes de bus en site propre puisqu’il ne concerne actuellement que le métro et le tramway.

La RTM met également en œuvre une politique de sécurisation axée sur la présence humaine, des dispositifs techniques de surveillance et une collaboration avec les acteurs locaux de la sécurité du réseau (police, justice…) dans le cadre d’un contrat local de sécurité dans les transports (CLS-T).
Le pilotage et l’évaluation des actions inscrites au contrat apparaissent cependant défaillants

Enfin, la lutte contre la fraude, qui participe également à l’amélioration du sentiment de sécurité ressenti par les voyageurs, est un enjeu majeur car elle contribue à améliorer les recettes d’exploitation. Le taux de fraude dit réel, mesuré par enquête, s’élève à 22,4 % sur l’ensemble des réseaux, en hausse par rapport à 2011 (18,1 %) mais en baisse par rapport à 2009 (23,3 %). La RTM envisage de mettre en œuvre en 2014 un dispositif innovant pour améliorer sa connaissance du phénomène et par conséquent l’efficacité de ses contrôles.

Comparée aux principaux réseaux de province de même taille, la RTM présente des écarts significatifs, avec un coût de production de l’offre au kilomètre beaucoup plus élevé que la moyenne (9,32 € en 2011, contre 6,16 € en moyenne pour les réseaux de même catégorie). Si une partie du surcoût constaté trouve son origine dans les caractéristiques particulières du réseau exploité par la RTM, il résulte aussi du poids trop important des charges de personnel, qui appelle des efforts de rationalisation.

Il convient enfin de noter une érosion du taux de couverture des dépenses par les recettes, qui est passé de 48 % en 2006 à 42 % en 2012.

Situation financière et sécurisation des procédures comptables

La situation financière est satisfaisante avec, fin 2012, un résultat de l’exercice (8,98 M€) et une capacité d’autofinancement (24,9 M€) en progression et qui se situent à un niveau supérieur aux exercices précédents, offrant des marges de manœuvre à l’autorité organisatrice pour réajuster sa contribution.

L’endettement a significativement progressé du fait des transferts de contrats intervenus entre l’autorité organisatrice et l’exploitant afin que la répartition de la dette reflète celle des actifs entre les deux entités. Toutefois, les contrats de prêts représentent une exposition au risque mesurée (indice zone euro).

A la suite des désordres observés lors du dernier contrôle de la chambre, différentes actions ont été entreprises pour sécuriser les opérations comptables de recettes, notamment les opérations de maintenance financière sur les distributeurs automatiques de billets et l’encaissement des recettes de ventes de titres de transport par les conducteurs.

La fiabilisation des bases de liquidation du chiffre d’affaires a significativement progressé notamment avec la mise en place du nouveau système billettique Transpass.

Cependant, la régie doit encore se mettre en conformité avec la réglementation comptable pour l’encaissement du produit des infractions tarifaires constatées lors des contrôles.

Gestion du personnel

Les charges de personnel conservent un poids important dans les charges d’exploitation. Elles se sont élevées à 190,5 M€ en 2012, représentant 72,2 % des charges d’exploitation hors dotations aux amortissements et provisions. Entre 2006 et 2012, les effectifs ont progressé de 9 % alors que les dépenses de personnel ont connu une augmentation globale soutenue de 31,9 %. Le rythme de progression des effectifs et des charges connait toutefois un ralentissement depuis 2010.

La maîtrise des effectifs et de la masse salariale constitue donc un enjeu très important pour la performance de la régie. Cet objectif est d’ailleurs affiché dans le projet d’entreprise pour la période 2011-2018.

Les départs en retraite, dont le nombre diminue depuis 2011, constituaient en 2012 la deuxième cause de départs des salariés en CDI, après les ruptures conventionnelles qui ont dépassé la centaine depuis 2009. Il conviendrait, compte tenu de l’ampleur du dispositif, que la régie gère à l’avenir ces ruptures conventionnelles selon des critères plus objectifs, effectivement appliqués de manière plus homogène et plus économe entre les salariés, protégés ou non.

Le principe d’indexation automatique du traitement de base et de la majorité des primes et indemnités sur le point d’indice négocié annuellement contribue à l’inertie de la masse salariale, peu conforme avec les objectifs de performance affichés par l’établissement. Par ailleurs les accords sur l’aménagement du temps de travail, outre qu’ils dérogent à la loi (ils prévoient un temps de travail hebdomadaire de 33 heures pour le personnel roulant), sont assortis de conditions de mise en œuvre trop rigides.

Une rénovation des principes fondant la rémunération, et plus particulièrement ses accessoires, s’avère nécessaire. Elle passe par une rationalisation de l’empilement historique des multiples dispositifs existants, souvent redondants et accordés parfois sur des bases irrégulières, mais aussi par une prise en compte effective des résultats de la régie en substitution au principe d’indexation automatique.

La chambre recommande donc à la RTM de définir, en lien avec l’AOT, une stratégie globale de réduction des dépenses de personnel conforme aux objectifs de performance du service, à la fois par des gains de productivité (temps de travail du personnel roulant), la maîtrise des effectifs, et par la refonte du système indemnitaire.

Cette amélioration de la productivité des agents passe par un assouplissement des conditions de mise en œuvre des accords sur l’aménagement du temps de travail.

Gestion de la commande publique

Au sens de l’article 135 du code des marchés publics, la régie exerce des activités d’opérateur de réseau. A ce titre, c’est une entité adjudicatrice soumise aux dispositions de la deuxième partie du code des marchés publics (articles 134 à 175), qui prévoit des règles de procédures et de seuils de passation plus souples que celles qui s’imposent aux autorités adjudicatrices.

D’une manière générale, le déroulé des procédures des marchés supérieurs à 90 000 €, et notamment la traçabilité des différentes étapes de négociation, apparaît maîtrisé pour permettre des ajustements aux besoins des services, dans le respect des règles de concurrence.

La régie, qui cherche à optimiser ses achats, souligne les économies obtenues à l’issue des procédures négociées. La chambre ne conteste pas l’existence de gains de négociation, mais en relativise toutefois l’importance.

Concernant les achats inférieurs à 90 000 €, une démarche de rationalisation a permis d’amorcer une diminution de la dispersion des commandes de petit montant (-20% en valeur entre 2009 et 2012). Toutefois, des marges de progrès significatives sont encore possibles, notamment par le canal d’une plus grande standardisation des achats de même nature, permettant des regroupements de commandes.

Enfin, des anomalies ont été relevées dans le suivi de l’exécution des commandes, qui appellent la mise en place de procédures de contrôle interne beaucoup plus rigoureuses dans ce domaine.

La chambre adresse à la RTM les recommandations suivantes :

Organisation et gouvernance

Recommandation n° 1
Sur la base d’une actualisation des coûts constatés, construire une trajectoire d’économies conforme à l’objectif de maintien de l’équilibre financier.

Recommandation n° 2
Assurer la mise en œuvre pérenne d’une méthode stable et précise de répartition des immobilisations entre l’AOT et l’exploitant.

Offre de service et performance du réseau

Recommandation n° 3
Etendre la démarche de certification aux lignes de bus ayant vocation à offrir une qualité de service accrue (bus en site propre).

Recommandation n° 4
Effectuer des audits internes pour le réseau des bus, tels qu’ils sont prévus dans le dossier qualité et mettre en place un plan de suivi des dysfonctionnements constatés et des actions correctives réalisées pour y mettre fin.

Recommandation n° 5
Faire évoluer le dispositif d’intéressement financier dit de « bonus/malus » pour favoriser l’extension de la démarche de certification aux lignes de bus en site propre.

Recommandation n° 6
Remettre à plat les outils de mesure et de contrôle de la fraude utilisés par la RTM pour les rendre cohérents avec les objectifs qu’elle se fixe en ce domaine.

Recommandation n° 7
Evaluer la pertinence, l’efficacité et l’efficience de l’intervention des contrôleurs dans le cadre de la mission d’amélioration des conditions de circulation des véhicules en surface.

Recommandation n° 8
Conférer au plan de sûreté un caractère plus opérationnel en y traitant des points suivants : éléments de contexte, objectifs généraux, modes opératoires, conditions de mise en œuvre, calendrier d’exécution et critères d’évaluation.

Situation financière et sécurisation des procédures comptables

Recommandation n° 9
Procéder à la désignation, comme mandataires de la régie des infractions tarifaires, de l’ensemble des personnels amenés à percevoir le produit des infractions.

Recommandation n° 10
Organiser la fonction financière et comptable de façon à ce que l’agent comptable soit en mesure de procéder aux contrôles qui lui incombent (documentation complète des opérations comptables).

Gestion du personnel

Recommandation n° 11
Suivre l’indicateur de l’absentéisme permettant des comparaisons avec les autres réseaux de transports urbains (Bilan social UTP).

Recommandation n° 12
En lien avec l’AOT, définir une stratégie globale de réduction des dépenses de personnel conforme aux objectifs de performance du service, à la fois par des gains de productivité (temps de travail du personnel roulant), la maîtrise des effectifs, et la refonte du système indemnitaire.

Gestion de la commande publique

Recommandation n° 13
Mettre en place des procédures de contrôle interne en matière d’exécution des marchés publics et s’assurer de leur mise en œuvre effective.