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Le plan en faveur des demandeurs d'emploi de longue durée

COUR DES COMPTES

Le Gouvernement a annoncé le 27 septembre 2021 un plan de réduction des tensions de recrutement dans un contexte de forte reprise économique après la crise sanitaire, s’accompagnant de difficultés de recrutement dans de nombreux secteurs. Un volet de ce plan comprenait des actions spécifiques en faveur du retour à l’emploi des demandeurs d’emploi de longue durée (DELD) et de très longue durée (DETLD) d’ici la fin 2022. Ce volet était doté de moyens importants : plus de 400 M€ ont été mis à disposition de Pôle emploi pour augmenter le nombre d’actions d’accompagnement et de formation, ainsi que le maintien de 700 équivalents temps plein (ETP) supplémentaires pour la remobilisation des demandeurs d’emploi de très longue durée. L’audit flash publié ce jour par la Cour des comptes examine la conception et les conditions de déploiement du plan, les moyens mobilisés et les résultats obtenus, ainsi que les enseignements à en tirer.

Un plan massif et doté de moyens importants

Le plan en faveur des demandeurs d’emploi de longue durée visait à profiter d’un contexte de reprise économique favorable pour diminuer rapidement le nombre de personnes sans activité depuis plus d’un an, en orientant une part d’entre eux vers les secteurs d’activité les plus en demande de main-d’œuvre. Pour ce faire, ce plan s’appuyait à titre principal sur des leviers classiques : une prise de contact dans les trois mois avec tous les demandeurs d’emploi inscrits à Pôle emploi et sans activité depuis au moins un an (soit 1 534 000 personnes), puis l’orientation vers un accompagnement par des conseillers en agence de Pôle emploi, le cas échéant, sous la forme d’un atelier de remobilisation, une période de mise en situation professionnelle, des formations préparant directement à l’emploi ou un contrat de professionnalisation. Il comportait aussi quelques innovations parmi lesquelles un « parcours emploi-santé » pour mieux prendre en compte les difficultés de santé des demandeurs d’emploi, le versement d’une prime de 1 000 € aux demandeurs d’emploi entrant dans les formations préalables au recrutement et le versement d’une aide à l’embauche de 8 000 € pour les employeurs recrutant un demandeur d’emploi de longue durée en contrat de professionnalisation ou encore un challenge national pour financer des innovations à l’initiative d’agences de Pôle emploi. Pour mettre en œuvre ce plan, l’État avait prévu une enveloppe de plus de 400 M€ pour financer les aides, prestations et formations, ainsi qu’un renfort temporaire de 700 équivalents temps plein (ETP) pour Pôle emploi, afin d’animer des actions collectives au bénéfice des demandeurs d’emploi de très longue durée. Si l’enveloppe budgétaire n’a été consommée à hauteur d’un tiers seulement (133 M€), les moyens humains supplémentaires alloués à Pôle emploi ont été pérennisés avant que la mise en œuvre du plan et ses résultats aient été évalués.

Une forte mobilisation de Pôle emploi mais un recours décevant aux dispositifs déployés dans le cadre du plan

En grande partie à l’origine du plan dont il a assuré presque entièrement la mise en œuvre, Pôle emploi a mis en place un pilotage national tout en laissant aux équipes d’accompagnement des demandeurs d’emploi en agence une marge de manœuvre d’adaptation aux réalités locales. La quasi-totalité de la cible des demandeurs d’emploi de longue et de très longue durée a été contactée dans le délai annoncé. Un plus grand nombre d’actions de mobilisation a été réalisé en faveur des demandeurs d’emploi de longue durée par rapport à la période précédant la crise sanitaire et la part de ceux-ci dans les entrées en formations préparatoires à l’embauche, en particulier dans les préparations opérationnelles à l’emploi individuelles (POEI), a augmenté. Enfin, avec 3 000 cadres accompagnés dans le cadre du plan, l’Association pour l’emploi des cadres (Apec) a atteint l’objectif fixé. Pour autant, plusieurs dispositifs n’ont pas été mobilisés à la hauteur prévue comme les immersions en milieu professionnel, plusieurs actions de mobilisation telles que « valoriser son image professionnelle » ou « prépa compétences », et surtout les contrats de professionnalisation, malgré la nouvelle incitation financière à l’embauche (15 % seulement des presque 30 000 entrées en contrat de professionnalisation attendues ont été constatés). Enfin, l’organisation d’ateliers collectifs de remobilisation en faveur des 300 000 demandeurs d’emploi de très longue durée s’est heurtée à des taux d’absence toujours importants des demandeurs d’emploi convoqués.

Des enseignements pour mieux accompagner les plus éloignés de l’emploi

Bien qu’il ait été doté de ressources importantes, le plan n’a été assorti d’aucun objectif mesurable en matière de retour à l’emploi, ni de baisse du chômage ou des tensions de recrutement dans les secteurs particulièrement concernés, ce qui rendra délicate l’appréciation de la valeur ajoutée des moyens humains et budgétaires supplémentaires alloués à l’opérateur dans ce cadre. Au-delà, le bilan de ce plan, comme celui du précédent mis en œuvre en 2011, conduit à s’interroger sur la pertinence de recourir à des plans conjoncturels pour améliorer le retour à l’emploi des demandeurs d’emploi les plus éloignés du marché du travail. Le ministère chargé du travail et Pôle emploi doivent désormais tirer parti des enseignements du plan pour mieux accompagner ceux-ci dans la durée. L’opérateur s’y emploie, notamment en ce qui concerne les actions de mobilisation, les formations préparatoires à l’emploi et les immersions en milieu professionnel. Le réexamen plus fréquent des modalités d’accompagnement les plus adaptées aux demandeurs d’emploi les plus éloignés de l’emploi doit également être poursuivi.