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La contribution de vie étudiante et de campus

COUR DES COMPTES

La contribution de vie étudiante et de campus (CVEC) a été instaurée par la loi du 8 mars 2018 relative à l’orientation et à la réussite des étudiants. Ce dispositif, mis en place il y a six ans, entre désormais dans une phase de maturité. Cette taxe a permis de financer diverses initiatives visant à améliorer la vie étudiante au sein des établissements d’enseignement supérieur et des Crous (Centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires). Pour l'année 2023-2024, le montant total de la CVEC collecté auprès des étudiants a atteint 170 M€. En six ans, près de 900 M€ (nets des remboursements) ont été récoltés et redistribués. La présente enquête sur la CVEC résulte d’une demande exprimée sur la plateforme citoyenne ouverte par la Cour. Celle-ci dresse un bilan globalement positif des premières années de mise en œuvre de la CVEC, tout en soulignant la complexité du dispositif. À ce titre, elle propose plusieurs pistes pour en renforcer l'efficacité : simplifier sa gestion, accroître les avantages directs pour les étudiants et assurer la transparence concernant l’emploi de cette taxe.

De réels bénéfices pour les étudiants, en dépit d’une incomplète utilisation des crédits

La création de la contribution a coïncidé avec un gain de pouvoir d’achat pour la majorité des étudiants par rapport à la situation antérieure, en raison de la réforme du régime de sécurité sociale étudiant. Cette taxe a permis la mise en œuvre d’actions diversifiées des établissements et des Crous en matière de santé, de culture, de sport, d’accueil et d’accompagnement social. Ainsi ont été créés, dans des universités, de nouveaux lieux de vie étudiante, des services d’écoute psychologique et de soutien aux étudiants, des épiceries solidaires, des « frigos zéro gaspi » ou encore des ateliers sportifs et de bien-être. Les reliquats, qui résultent d’une utilisation incomplète des crédits CVEC, atteignent aujourd’hui 100 M€ sur les quelques 900 M€ perçus de 2018 à 2024. Ainsi, une meilleure gestion doit être recherchée, afin de les employer sans délai et au bénéfice des étudiants.

Une gestion complexe et source d’imprécisions

Malgré des efforts de simplification, la gestion de la CVEC demeure complexe, reposant sur une double distinction entre étudiants (assujettis ou non) et établissements (bénéficiaires ou non), et entraînant une redistribution par péréquation horizontale, sans compensation de l’État. La sous-évaluation du plafonnement de ses produits pendant trois années a conduit à des reversements au budget général de l’État pour un total de 14 M€, empêchant leur affectation à la vie étudiante. Une meilleure estimation des produits et de leurs plafonnements est donc nécessaire. Les établissements perçoivent la CVEC en deux temps : un droit initial et une part variable. Cette dernière a fortement augmenté depuis 2018, réduisant la visibilité des établissements en début d’année. Un rééquilibrage en faveur du premier versement serait bénéfique. Le code de l’éducation prévoit que 30 % du droit initial finance les projets associatifs et l’action sociale, et 15 % la médecine préventive. Ces seuils, appliqués de manière inégale, doivent être clarifiés. Des indicateurs seraient utiles pour s’assurer du bon usage de la taxe.

Un mécanisme de collecte difficile à simplifier

Des efforts ont été déployés en 2023 pour rationaliser les calendriers de paiement, de collecte et de distribution, et en 2024 pour homogénéiser les montants versés aux établissements. Le réseau des œuvres universitaires, au cœur de ces missions, a démontré son efficacité, sans engendrer de frais de collecte additionnels. Toutefois, des clarifications restent nécessaires pour améliorer le recouvrement et faciliter la mise en œuvre du dispositif. Pour ces travaux de collecte et de redistribution, l’instauration d’un comité réunissant le ministère chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche et le Cnous (Centres nationaux des œuvres universitaires et scolaires) serait utile. Ce comité aurait pour mission de bâtir des indicateurs de suivi, de partager un plan de maîtrise des risques, de fixer des objectifs pour la campagne à venir et d’en évaluer les résultats. Six ans après la mise en place de la CVEC, ni le ministère, ni le réseau des œuvres universitaires ne connaissent le nombre exact d’étudiants assujettis, ce qui ne permet pas de s’assurer que tous s’en acquittent. Le recensement des établissements non-bénéficiaires doit être poursuivi afin de parvenir à un recouvrement complet. Le ministère doit également notifier formellement au Cnous, chaque année, les montants de la taxe et des droits à percevoir par établissement. La question de la prise en charge des frais de collecte par le réseau doit être abordée dans le cadre du futur contrat d’objectifs et de performance entre l’État et le Cnous.

Un bénéfice pour les étudiants à conforter, une transparence à renforcer

Une définition claire de la vie étudiante et de campus est nécessaire pour mieux déterminer les thématiques financées par la CVEC. Les étudiants doivent être associés aux décisions concernant l’utilisation de cette taxe, avec des commissions comprenant au moins 50 % d’entre eux. Il est important de sécuriser les financements récurrents liés au personnel, notamment dans les établissements qui en consacrent une part importante. Le réseau des œuvres universitaires doit également accroître les financements pour les étudiants des établissements non bénéficiaires. L’effet multiplicateur des partenariats entre établissements et collectivités, ainsi que les cofinancements du Crous, doit être renforcé et mesuré. Pour éviter toute confusion, l’appellation « FSDIE », qui désigne le Fonds de solidarité et de développement des initiatives étudiantes, devrait être supprimée. Une communication renforcée sur le fonctionnement de la CVEC et ses projets est indispensable pour améliorer la compréhension et l’implication des étudiants. Les bilans des actions financées doivent être mieux structurés et les réponses à l’enquête ministérielle plus fiables. L’information transmise au Parlement doit également être optimisée. Enfin, bien que la CVEC soit utile, elle ne peut répondre à tous les besoins des étudiants, notamment économiques, alimentaires, sanitaires et de logement, qui nécessitent une approche interministérielle.

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