L’appel était interjeté par le comptable mandataire, l’une des deux personnes condamnées à l’amende en première instance, au titre de l’infraction prévue à l’article L. 131-9 du code des juridictions financières. Il leur était reproché d’avoir payé près de 800 000 € à un escroc qui, se faisant passer pour un nouvel affactureur, s’était substitué au véritable créancier.
Sur la forme, la Cour d’appel financière n’a pas suivi l’appelant, qui reprochait notamment à l’arrêt d’être insuffisamment motivé. Elle a notamment jugé qu’il ressortait des motifs du premier juge que celui-ci rattachait les faits reprochés à la méconnaissance, par le comptable, des contrôles de la validité de la dette et du caractère libératoire du paiement prévus par le décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique (GBCP).
Sur le fond, le juge d’appel a confirmé la solution donnée à l’affaire par la Cour des comptes.
Si elle a reconnu que certains éléments à charge retenus par le premier juge étaient imprécis ou inexacts, la Cour d’appel financière en a noté le caractère surabondant. Elle a relevé que le manquement aux règles précitées était suffisamment établi par ailleurs : au titre du contrôle de la validité de la dette, le comptable n’a pas suspendu le paiement face à des pièces justificatives manifestement incohérentes ; et s’il n’est pas resté inactif, il n’est pas allé au bout des diligences qui auraient permis d’établir si le paiement était ou non libératoire.
Le juge d’appel a confirmé l’existence d’une faute grave, jugeant que l’importance des sommes en jeu pouvait être retenue pour établir cette gravité, et indiquant qu’une faute isolée pouvait être grave, tout en relevant qu’en l’espèce l’intéressé avait en la matière manqué de façon multiple à ses obligations.
La Cour d’appel financière a également été conduite à apprécier si le préjudice financier avait été significatif ou non. Elle a d’abord précisé que, dans la mesure où les manquements du comptable portaient – comme ceux de l’ordonnateur – la totalité du préjudice, celui-ci n’était pas à répartir entre coauteurs de l’infraction, mais devait être retenu dans sa totalité. Elle a ensuite confirmé la nécessité d’apprécier le caractère significatif du préjudice en regard d’un agrégat financier, et non dans l’absolu. En l’espèce, la Cour d’appel financière a estimé, comme le premier juge, qu’un préjudice de près 800 000 € revêtait un caractère significatif, en regard de dépenses d’investissement de 161 M€, ou même d’un budget total de 677 M€. Elle n’a pas écarté la possibilité pour le juge de retenir comme référence des agrégats financiers plus fins, sous réserve toutefois d’échanges contradictoires sur ce point, ce qui n’avait pas été le cas en première instance.
Enfin, la Cour d’appel financière a reconnu à l’intéressé, comme l’avait fait le premier juge, des circonstances atténuantes : escroquerie sophistiquée en bande organisée, usage de documents falsifiés très bien réalisés, mauvaise organisation du poste comptable. Appréciant souverainement ces circonstances, elle a confirmé le montant de l’amende décidé en première instance (2 500 €). La requête a donc été rejetée.
L’arrêt, en cours de publication au Journal officiel, est disponible sous forme anonymisée sur le site internet de la Cour des comptes, ou sur demande auprès du greffe de la Cour d’appel financière (à l’adresse greffecaf@ccomptes.fr).
La Cour d’appel financière rend compte de chacun de ses arrêts par un communiqué de presse.