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Société d'investissement de la filière pêche de l'Archipel (Sifpa) (Saint-Pierre-et-Miquelon)

CTC SAINT-PIERRE-ET-MIQUELON

Synthèse

La société d’investissement de la filière pêche de l’archipel (SIFPA) est une société anonyme d’économie mixte locale, créée le 17 août 2009. Sa création s’inscrit dans le cadre de la réorganisation de la filière pêche pour Saint-Pierre-et-Miquelon (SPM), et plus particulièrement d’un plan d’actions élaboré par les partenaires institutionnels. Visant à la modernisation de l’outil de production des différentes entreprises de la filière halieutique, celui-ci a cherché à réactiver l’exploitation d’une usine de transformation des produits de la pêche de Saint-Pierre, construite en 1971, après la mise en liquidation judiciaire du précédent exploitant, la société Interpêche.
Le groupe canadien Louisbourg Seafoods LTD s’est porté repreneur des actifs de la société Interpêche et sa candidature a été validée par jugement du tribunal de commerce de Saint‑Pierre-et-Miquelon, le 21 avril 2009. L’intervention de ce groupe a été faite dans le cadre d’un holding réunissant deux sociétés constituées en droit français, une société d’exploitation et une société d’investissement actionnaire de la société d’économie mixte.
La SIFPA associe donc principalement la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon et l’investisseur privé canadien. Sa vocation est de réunir dans une seule structure les équipements industriels existants de l’usine, afin de sécuriser la capacité fonctionnelle du site en cas de nouvelle défaillance de l’exploitant. Les emprises foncières et les bâtiments appartiennent respectivement à l’État et à la collectivité territoriale.
Si ce nouveau contexte industriel devait conduire à repenser le cadre juridique pour organiser la reprise des activités de la société Interpêche, les relations juridiques entre tous les acteurs concernés ont été établies de façon très insuffisante.
Ainsi, la convention entre l’État et la collectivité territoriale, portant sur le transfert de gestion des biens du domaine public maritime au profit de la collectivité, n’a pris effet qu’à la date du 1er janvier 2011.
Il en résulte qu’aucun dispositif juridique transférant les droits d’occupation des emprises foncières du domaine public de l’État à la collectivité n’avait été formalisé en amont ou en parallèle de l’opération, ni au moment de la création de la SIFPA, en avril 2009, ni davantage lors de la prise en charge par l’exploitant du matériel de l’usine pour un euro symbolique, quelques jours plus tard, ni non plus lors de la fermeture de l’usine, le 23 juillet 2009, après la découverte d’une fuite d’ammoniac dans le système de refroidissement.
Cette convention a été résiliée, après la mise en liquidation judiciaire de la société Saint‑Pierre-et-Miquelon Seafoods International, le 9 septembre 2011, la collectivité considérant qu’il ne lui incombait pas d’assumer la mise en conformité de l’usine aux normes d’installations industrielles classées exigée par le code de l’environnement, mais que cette responsabilité était celle de l’État.
En l’absence d’une nouvelle convention de transfert de gestion des biens du domaine public maritime entre ces deux partenaires, les autorisations d’occupation, qui avaient pris effet au 1er janvier 2011, sont devenues caduques. La collectivité territoriale et la SIFPA ne bénéficient toujours pas à ce jour de nouvelles autorisations d’occupation du domaine public de l’État.
En ce qui concerne les relations juridiques entre la SIFPA et son exploitant (SPM Seafoods International), aucun acte les formalisant n’a été conclu, même si un projet de bail semble avoir été validé par le conseil d’administration de laSIFPA.
De ce constat, il ressort que l’exploitation de l’usine par l’entreprise SPM Seafoods Internationalsemble s’être exercée, au cours des années 2009 et 2010, sans titre d’occupation des emprises foncières supportant les installations industrielles.
À ce titre, le projet envisagé d’une sous-location ne correspondait pas, au plan juridique, à la réalité des relations envisagées entre la SIFPA et son exploitant, dès lors que ce dernier devait se voir confier la réalisation de travaux et le renouvellement de matériels.
Pour la chambre, ces opérations s’inscrivaient, pour la société d’économie mixte, dans le cadre juridique fixé par l’ordonnance n° 2005-649 du 6 juin 2005 relative aux marchés passés par certaines personnes publiques ou privées non soumises au code des marchés publics.
La réalisation des travaux et des équipements précités a mobilisé un soutien financier de l’État d’un montant de 1,760 M€, suivi d’une nouvelle subvention de 1 M€.
Au-delà de ces graves faiblesses juridiques, la chambre a également relevé plusieurs dysfonctionnements importants dans la gestion de ces financements publics.
Ainsi la subvention de l’État de 1,760 M€ aurait dû être intégrée totalement dans le bilan de la société d’économie mixte, par le biais de la revalorisation des actifs corporels, car elle avait pour objet le financement de la réfection du système de congélation de l’usine, affecté par des fuites d’ammoniac. Elle ne l’a été que partiellement. Il est apparu, lors de la comptabilisation de ces actifs que l’exploitant, la SPM Seafoods International, ne pouvait justifier l’utilisation de la subvention de 1,760 M€, conformément à son objet, qu’à hauteur de 0,505 M€.
La SIFPA ne semble pas avoir exercé son rôle de maître d’ouvrage, qui consistait à suivre et à vérifier les travaux réalisés par l’exploitant et pour lesquels elle apportait, par le biais de subventions, une partie conséquente de leur financement. En l’absence de service au sein de la société et de recours à des prestataires extérieurs, la SIFPA qui n’a pas exercé sa fonction de maître d’ouvrage, ne s’est pas non plus assurée du bon emploi des financements publics. Une action judiciaire est en cours concernant l’utilisation de ces fonds et leurs justifications infondées.
La société d’économie mixte a également validé la cession des titres de son actionnaire canadien à la collectivité territoriale, sur la base d’une évaluation non finalisée. Cette évaluation a été contestée lors d’une expertise maritime et industrielle des actifs de la SIFPA réalisée entre les 20 et 27 janvier 2011.
La valeur des actifs cédés a été fixée en référence à un projet de valorisation réalisé par le cabinet NSO Externalisation, avec des conséquences majeures pour le budget de la collectivité territoriale.
Selon l’expertise maritime, la cession à la collectivité territoriale des titres de la société d’économie mixte détenus par l’actionnaire canadien aurait dû s’établir sur une base de 942 150 €, alors qu’elle s’est élevée à 1,865 M€. La collectivité a donc payé 922 850 €, en sus.
La chambre considère que la SIFPA a particulièrement manqué de rigueur et d’attention aux fonds publics, en prenant comme référence, pour l’évaluation coûteuse des titres cédés, un projet très imparfait.
Au plan de sa situation financière, la SIFPA a toujours dégagé, pour chacun des exercices de la période 2009 à 2012, un résultat net négatif (de 57 662 € en 2009 à 70 756 € en 2012). Le déficit d’exploitation de 2010 est lié à l’inscription d’une dotation pour dépréciations d’actifs. La SIFPA a dû en effet réagir, à titre conservatoire, à la cessation de paiement de la société SPM Seafoods International, bénéficiaire de la subvention publique de 1,760 M€.
En marge des dotations, l’exploitation est structurellement déficitaire, tout au long de la période examinée. Les résultats d’exploitation négatifs sont liés à l’absence de produits d’exploitation entre 2009 et 2011. La SIFPA ne développe aucune activité suffisamment lucrative pour générer un chiffre d’affaires couvrant ses frais de fonctionnement. Toutefois et en dépit des résultats d’exploitation négatifs enregistrés tout au long de la période, la société conserve un équilibre financier global, les recettes équilibrant les dépenses.
Une amélioration du solde d’exploitation de la société peut difficilement être envisagée sans nouvelles recettes, alors que les charges d’amortissement immobilier et mobilier vont continuer à progresser.
Depuis sa création, jusqu’au 31 décembre 2012, les pertes cumulées se sont élevées à 1,843 M€, dont 1,653 M€ sont la résultante d’opérations d’ordre, sans incidence sur l’état de ses disponibilités (dotations aux amortissements et provisions – reprises sur provisions). La SIFPA conservait, au début 2013, un volant net de trésorerie de 103 670 €, soit un taux de liquidité immédiate couvrant la totalité du passif circulant exigible au profit des fournisseurs (51 933 €).
Pour que des perspectives de redressement de la société puissent être dessinées, il conviendrait que soit d’abord assainie la situation laissée à l’issue de la défaillance de la société SPM Seafoods International,car elle pèse encore sur le bilan de la SIFPA.
Cependant, la société d’économie mixte ne dispose pas de capacités fonctionnelles lui permettant de rechercher de débouchés commerciaux. Dans ces conditions, le choix des opérations de portage patrimonial industriel que la SIFPA serait appelée à exercer, les montages financiers qui pourraient en découler et les hypothèses de recettes inscrites dans les bilans prévisionnels doivent être effectués avec la plus grande prudence et après de solides études de faisabilité.
En effet, alors que l’autre usine de Saint-Pierre, les Nouvelles Pêcheries, a été mise en liquidation judiciaire, en novembre 2010, seule demeure en activité l’usine de transformation de Miquelon, mais sa capacité est réduite.

 

 

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