SYNTHESE
Une offre sanitaire et médico-sociale à structurer
Au 1er janvier 2019, la Nouvelle-Calédonie compte 271 407 habitants, avec une croissance démographique plus faible qu’auparavant (+ 0,2 % par an entre 2014 et 2019, contre + 1,8 % entre 2009 et 2014). La population recensée en 2019 est concentrée à 75 % en province Sud, contre 18 % en province Nord et 7 % en province des Îles. La population calédonienne est au début de sa transition démographique avec un taux de personnes de
plus de 60 ans peu élevé (14,5 %) en comparaison avec la part que représente les personnes de plus de 60 ans en France métropolitaine (25,7 % de la population globale).
Le dispositif d’observation de l’état de santé est lacunaire, tant sur le plan sanitaire, social que médico-social. Le rapport de la situation sanitaire de Nouvelle-Calédonie date de 2018. L’actualisation de ce rapport est nécessaire pour adapter l’organisation du système de soins aux besoins de santé de la population.
Le taux de prévalence des personnes en situation de handicap en Nouvelle-Calédonie est de 3,7 % alors qu’il est de 18,5 % en métropole (et d'environ 10 % au niveau mondial selon l’organisation mondiale de la santé). En métropole, l’enquête Handicap-Santé menée par l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) permet d’évaluer le nombre de personnes handicapées ou dépendantes selon de multiples critères, donc d’évaluer le nombre de personnes potentiellement éligibles aux politiques publiques en leur faveur. La chambre invite la Nouvelle-Calédonie à mettre en place un dispositif statistique d’évaluation actualisé de la dépendance et du handicap sur le territoire.
Le dispositif d’observation des violences faites aux femmes, phénomène prégnant sur le territoire, s’est enrichi depuis 2021 avec l’enquête « Cadre de vie et sécurité » réalisée par l’ISEE. La chambre invite à renouveler périodiquement cette enquête. Enfin, la création d’un numéro calédonien de santé unique permettrait d’améliorer l’identification des usagers du système de santé. Ceci pourrait être réalisée en s’appuyant sur l’expertise de l’institut national de la statistique et des études économiques en rattachant ce numéro à un répertoire calédonien d’identification des personnes physiques (RCIPP).
La carte sanitaire et les schémas d’organisation sanitaire de la Nouvelle-Calédonie n’ont pas été mise à jour depuis 2016. Les indices d’équipements n’ont pas été réactualisés en tenant compte de la démographie (croissance et vieillissement de la population) ainsi que de la situation épidémiologique. La chambre invite la Nouvelle-Calédonie à mettre à jour ces outils de planification en tenant compte des estimations de projections de populations réalisées par l’ISEE à partir des recensements effectués.
L’offre de soin de premier recours et les programmes en matière de protection maternelle et infantile, de surveillance des grossesses, de suivi et vaccination des enfants, reposent sur les centres médico-sociaux, présents principalement en province Nord et province des Îles et le secteur libéral, présent principalement en province Sud.
L’offre de soins hospitalière s’appuie sur plusieurs centres hospitaliers répartis sur le territoire : le centre hospitalier spécialisé Albert-Bousquet, le centre hospitalier territorial, le centre hospitalier du Nord ainsi que sur la clinique Ile Nou-Magnin à Nouméa. La chambre note que certains centres médico-sociaux disposent de lits d’observation, étiquetés lits de médecine et d’obstétrique qui n’ont jamais fait l’objet d’une demande
d’autorisation au sens des délibérations modifiées n° 429 du 3 novembre 1993 portant organisation sanitaire et sociale de la Nouvelle-Calédonie et n° 171 du 25 janvier 2001 relative à la carte sanitaire et aux schémas d’organisation sanitaire de la Nouvelle- Calédonie. La chambre invite à clarifier leur statut.
Les dispositifs d’accueil et d’hébergement et d’accompagnement médico-social spécialisés dans la prise en charge des personnes en situation de handicap et des personnes âgées sont concentrés sur la province Sud. En Province Nord comme dans les Îles Loyauté, l’alternative au domicile personnel reste limitée. Dans ce contexte, la chambre invite la Nouvelle-Calédonie à définir les parcours de prise en charge des
personnes handicapées et des personnes âgées dépendantes en s’appuyant sur les acteurs locaux, dont les centres médico-sociaux, pour les actions de prévention, de suivi et de dépistage.
Les organismes intervenant en faveur des victimes des violences conjugales sont nombreux et agissent sans réelle coordination. Les partenariats sont peu développés et souffrent d’un manque de mutualisation des moyens et des bonnes pratiques. La chambre invite à démultiplier le maillage territorial des structures d’accueil des victimes pour assurer une qualité d’accueil identique sur tout le territoire, en s’appuyant notamment sur les
centres médico-sociaux pour l’écoute, la prise en charge médical, le conseil et l’orientation des personnes victimes de violence.
Une régulation des dépenses qui reste à mettre en oeuvre
Conformément aux objectifs fixés dans le plan « Do Kamo ! », la Nouvelle-Calédonie s’est dotée d’un objectif calédonien d’évolution des dépenses de santé et de protection sociale (OCDS) décliné en trois sous-objectifs : un objectif calédonien d’évolution des dépenses de santé d’assurance maladie (OCEAM) ; un objectif d’évolution des dépenses de prévention (OCEP) et un objectif d’évolution des dépenses de protection sociale.
Cette démarche vise à recenser chaque année les dépenses dans chacun des domaines concernés, analyser les mesures d’économies possibles ou les dépenses nouvelles à prendre en compte pour l’année suivante et à permettre ainsi au congrès de déterminer le taux de progression des dépenses à respecter pour l’année suivante. Pour les dépenses d’assurance maladie, un comité de suivi a été mis en place afin de rendre périodiquement au cours de l’année un avis sur le respect de l’objectif ainsi fixé.
Le périmètre retenu pour recenser les dépenses de prévention ne couvre pas toutes les actions de prévention des provinces notamment dans le domaine de la santé scolaire par exemple. Les travaux préparatoires pour collecter les données relatives aux dépenses de protection sociale et encadrer les dépenses en fonction de l’évolution des ressources disponibles n’ont pas encore été menés.
La chambre invite la Nouvelle-Calédonie à renforcer sa capacité à collecter et consolider l’ensemble des données nécessaires à l’élaboration de l’objectif calédonien des dépenses d’assurance maladie et l’objectif calédonien des dépenses de prévention par la mise en place d’une cellule de synthèse au sein de la direction des affaires sanitaires et sociales de la Nouvelle-Calédonie ainsi qu’un système informatique de codification et de
transmission des données.
Une direction qui peine à remplir ses missions
La direction des affaires sanitaires et sociales est en charge de la mise en oeuvre de la politique de la Nouvelle-Calédonie en matière de protection sociale, hygiène publique, de santé et prévention de la santé, de contrôle sanitaire aux frontières et d’hospitalisation publique. Une nouvelle organisation de la direction devait entrer en vigueur le 30 juillet 2022 conformément à l’arrêté n° 2022-1705/GNC du 20 juillet 2022 mais elle n’était toujours pas effective à la fin novembre 2022. Cette situation est susceptible de créer des risques sur la validité juridique des actes pris par les personnes disposant de délégations de signature au sein de la direction. La chambre recommande donc de clarifier sans délais l’organisation de la direction.
Il n’existe pas de véritable code de la santé publique en Nouvelle-Calédonie. Le droit de la santé en Nouvelle-Calédonie comprend en effet les lois du pays, les délibérations du congrès et les délibérations des provinces concernant le domaine sanitaire et social. A cela se rajoutent les dispositions législatives qui en raison de leur objet sont applicables en Nouvelle-Calédonie comme les lois relatives à l'état des personnes et les dispositions relatives aux juridictions qui continuent à relever de la compétence de l'Etat. Un travail juridique de codification est nécessaire pour appréhender correctement le droit de la santé sur le territoire.
La tutelle sur les organismes oeuvrant dans le domaine sanitaire et social est à renforcer. Il n’existe pas de convention d’objectifs et de gestion entre la Nouvelle-Calédonie et la CAFAT ainsi qu’avec les autres établissements de santé. La chambre invite la Nouvelle-Calédonie à en établir une sans délai. La direction des affaires sanitaires et sociales doit aussi finaliser les prochains contrats d’objectifs, de méthodes et de moyens avec les
établissements et organismes du domaine de la santé.
Les actions d’inspection et de contrôles mises en oeuvre par la direction sont à l’initiative de chaque service sur la base des signalements ou dans le cadre d’un programme quand il existe. La chambre estime que la mise en place d’un programme annuel d’inspection et de contrôle avec des indicateurs de suivi, tenant compte des risques constatés permettra un meilleur pilotage de ces missions d’inspection et de contrôle et partant leur plus grande efficacité.
A l’issue de son contrôle, la chambre formule deux recommandations de régularité et neuf recommandations qui visent à améliorer la performance de la direction des affaires sanitaires et sociales de la Nouvelle-Calédonie.