Un cadre et une définition juridique des violences faites aux femmes
Adoptée par l'Assemblée générale des Nations-Unies en 1993, la Déclaration sur l’élimination de la violence à l’égard des femmes définit celle-ci comme « tous actes de violence dirigés contre le sexe féminin, et causant ou pouvant causer aux femmes un préjudice ou des souffrances physiques, sexuelles ou psychologiques, y compris la menace de tels actes, la contrainte ou la privation arbitraire de liberté ». En droit français, les violences faites aux femmes, lorsqu’elles sont caractérisées, relèvent de la délinquance. Ces infractions sont passibles de poursuites pénales. Le volet répressif et le suivi des auteurs relèvent de la compétence de l’État. La prise en charge des victimes rentre dans le champ sanitaire et social, compétences dévolues aux collectivités locales en Nouvelle-Calédonie (gouvernement et provinces) et en Polynésie française (gouvernement). L’étude du phénomène qui comprend la tenue de statistiques est partagée entre l’État (police, gendarmerie, justice) et les collectivités (services sociaux, santé publique, sécurité sociale, emploi, etc.) en partenariat avec les acteurs associatifs.
Un état des lieux des violences préoccupant de façon similaire dans les deux territoires
Les statistiques produites sur chaque territoire sont récentes. Elles traduisent une prise de conscience tardive par les pouvoirs publics locaux, alors même que les acteurs de terrain sont impliqués depuis longtemps. Les données disponibles indiquent en effet que la situation dans ces deux territoires est particulièrement dégradée : les femmes en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie sont davantage victimes des violences qu’ailleurs. D’après un rapport publié en 2017 par le Conseil économique, social et environnemental national (Cese), le taux de femmes victimes d’agressions physiques commises par leur conjoint ou ex-conjoint durant les douze derniers mois s’établit à 2,3 % dans l’hexagone contre 19 % en Nouvelle-Calédonie et 17 % en Polynésie française. Un premier constat porte donc sur un besoin accru de connaissances qui doit s’inscrire dans un cadre formalisé et partagé entre toutes les parties-prenantes. D’autre part, bien que les acteurs publics locaux commencent à appréhender le coût social élevé d’une telle situation, ce dernier reste à évaluer avec précision. Sur le plan budgétaire, les deux collectivités et l’État sont invités à chiffrer le montant total des crédits qu’ils mobilisent pour lutter contre les violences faites aux femmes. Si l’enquête a permis d’estimer que la Polynésie française a mobilisé près de 6,6 M€ entre 2017 et 2022, aucun chiffre n’est disponible en Nouvelle-Calédonie.
Des actions déjà engagées qui restent à conforter
Les deux collectivités ont pris des mesures, conscientes de l’importance et de l’impact de ce phénomène. Cependant, chacun s’accorde sur la nécessité de renforcer les dispositifs pour encourager la révélation des faits et mieux prendre en charge les victimes. Une dépendance économique forte des conjointes et une pression de l’entourage qui favorisent le silence, sont aussi deux facteurs aggravants dans le Pacifique Sud. L’accompagnement des femmes dans les parcours judiciaires et de sortie de violence doit être renforcé afin de les rendre davantage accessibles et rassurants. Les modalités de traitement des suites et des séquelles commencent à être mieux définies par les collectivités concernées, même si des marges de progrès demeurent, surtout dans les espaces isolés. Pour l’avenir, il s’agit à la fois de prévenir et de combattre sans cesse ce phénomène, en assurant une présence constante des services auprès des publics cibles. À ce titre, un maillage territorial plus dense, un développement des dispositifs d’écoute, une meilleure coopération entre les acteurs publics et associatifs sont autant de pistes d’amélioration à développer. Les outils qui fonctionnent comme les dispositifs d’alerte ou ceux d’aide à la décohabitation peuvent servir d’exemples. L’expérience néo-zélandaise montre la nécessité d’inscrire cette politique publique dans un temps long.