À la différence d’autres domaines d’intervention, les ARS sont toujours libres de déclencher ou non une inspection-contrôle face à une situation donnée. Selon les cas, l’accomplissement de ces inspections-contrôles se fait, soit, dans le cadre d’un programme régional de travail, pour l’élaboration duquel l’ARS dispose d’une certaine latitude pour mettre en œuvre les orientations nationales d’inspections-contrôles (dénommées ONIC) diffusées par le ministère, soit de manière non programmée, en réaction à une situation d’urgence sur le plan sanitaire.
La Cour a par ailleurs constaté qu’un Ehpad était contrôlé, en moyenne, une fois tous les 20 à 30 ans et a conclu à l’absence de surveillance minimale standardisée. Il est vrai que l’activité de contrôle peut être délicate à exercer lorsque la priorité, sinon l’exclusivité, des modes d’action des ARS est accordée aux partenariats et aux coopérations avec les organismes placés sous leur tutelle. C’est au cours des deux dernières années que l’activité d’inspection-contrôle a connu un regain, nettement marqué en 2023 (4 951, contre 2 598 en 2022). Ce regain de l’inspection-contrôle des ARS est lié à la mise en œuvre du plan gouvernemental de contrôle de l’ensemble des Ehpad (7 500 au total) évoqué précédemment. Cependant, cet accroissement de l’activité résulte de contrôles exclusivement sur pièces. Dans ces conditions, les inspections-contrôles de type habituel, comportant un déplacement des inspecteurs, ont atteint un niveau d’activité en 2022 inférieur à ce qu’il était en 2018, même s’il s’est quelque peu redressé en 2023. Le recours à ces inspections-contrôles a décliné jusqu’à récemment pour des raisons qui tiennent, à la fois, à une réduction d’effectifs et au choix de privilégier des modes d’action moins orientés sur la dimension de contrôle.
De plus, c’est suite à la révélation médiatique, en 2022, de cas de maltraitance de personnes âgées dépendantes dans certains établissements médico-sociaux du groupe Orpea : le ministère de la santé a demandé aux ARS de procéder à l’inspection-contrôle de l’ensemble des 7 500 Ehpad existants sur le territoire national avant 2024. Cette demande ministérielle a constitué une inflexion sur trois points. D’abord, alors que l’examen par le ministère des conditions de mise en œuvre de ses ONIC est traditionnellement assez relâché, l’application de celle relative au contrôle des Ehpad a donné lieu à un suivi très resserré. Ensuite, la conduite d’inspections-contrôles sur l’ensemble des Ehpad dans les délais fixés par le ministère n’a été possible qu’au prix d’aménagements importants des modalités d’inspection-contrôle. La majorité d’entre elles ont ainsi pris la forme d’un contrôle exclusivement sur pièces au lieu de donner lieu à une visite in situ. Enfin, pour la réalisation de ce plan, 120 équivalents-temps plein ont été créés dans le but de renverser la tendance à la réduction des moyens humains se consacrant aux inspections-contrôles, limités à environ 230 ETP en 2022 sur un effectif total des ARS proche de 7 900 ETP.
Alors que le ministère prépare une nouvelle ONIC prévoyant un contrôle des établissements médico-sociaux prenant en compte les personnes handicapées au cours des années à venir, une méthode plus sélective serait à préférer à l’ambition d’exhaustivité, de manière que les inspections-contrôles, moins nombreuses mais plus approfondies, permettent de mieux appréhender la qualité de la prise en charge des résidents dans les structures les plus à risque. La pérennisation de ce nouvel engagement des ARS dans les activités d’inspections-contrôles ne sera donc possible que si elles concentrent leurs interventions, moins nombreuses mais plus approfondies, sur les cas les plus critiques, au terme d’une analyse des risques solide. Le moindre risque pour les opérateurs d’être contrôlés serait compensé par une rigueur renforcée et à valeur d’exemple, tant dans la réalisation de ces inspections que dans les sanctions prononcées en cas de manquement avéré.