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La gestion des absences des enseignants

COUR DES COMPTES

Avec plus d’un million d’agents – soit près de la moitié des effectifs de la fonction publique d’État –, dont 900 000 enseignants, le ministère de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports consacre une large part de ses activités à la gestion de ses ressources humaines, et doit, dans ce cadre, gérer les absences des professeurs. Le rapport publié ce jour souligne que ces absences, loin de constituer un phénomène global, recouvrent en réalité deux catégories bien distinctes : les absences pour motifs personnels (liées notamment à la santé), et celles relevant de l’organisation scolaire elle-même (formation continue, examens, sorties scolaires…). Alors que la crise sanitaire a mis en lumière l’importance de la continuité du face-à-face pédagogique, la Cour des comptes formule six recommandations visant à mieux appréhender le phénomène, à améliorer la prévention en matière de santé, et à limiter et compenser les absences de courte durée.

Absence au travail et absence devant les élèves : deux réalités distinctes

Les spécificités du métier des enseignants, en particulier les obligations hebdomadaires de service et le calendrier scolaire, complexifient la mesure de leurs absences et faussent les comparaisons avec d’autres catégories de salariés. À titre d’illustration, un enseignant qui n’est pas en capacité d’assurer un cours parce qu’il est appelé par sa hiérarchie à une autre tâche – telle que la participation à un jury d’examen – est considéré comme absent par les familles de ses élèves. Or, il contribue par cette activité au fonctionnement de l’institution scolaire. La Cour relève que, dans le premier degré, le remplacement des professeurs des écoles est assuré dans près de 80 % des cas dès le premier jour d’absence. Ce qui n’est pas le cas dans le secondaire : en 2018-2019, près de 10 % des heures de cours y ont été « perdues », soit une perte en progression de 24% par rapport à l’année précédente. Les absences dites « de courte durée », c’est-à-dire inférieures à 15 jours, représentent à elles-seules près de 2,5 millions d’heures, dont seules un peu plus de 500 000 ont été remplacées. Alors qu’il est de moins en moins toléré par les parents d’élèves et par les élèves eux-mêmes, ce temps d’enseignement non assuré reste mal identifié par le ministère de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports (MENJS).

Mesurer et comparer le phénomène : une démarche préalable indispensable

A ce jour, le ministère manque encore d’outils robustes et accessibles à distance pour mesurer ces absences et les rapporter aux obligations de service. Si la majorité des établissements secondaires est désormais équipée de logiciels de vie scolaire permettant notamment d’informer les familles, l’absence d’interface entre ces logiciels et les applications nationales du ministère prive l’institution d’une information nécessaire. Faute d’outils, le ministère diligente une enquête sur les heures d’enseignement perdues dans le second degré, qui ne fournit que des données approximatives.

Consolider la politique de prévention du ministère en matière de santé

Par ailleurs, la Cour souligne que le ministère ne conduit pas de politique de prévention structurée, alors même que les raisons de santé sont la première cause d’absence. Le ministère, en tant que garant de la vision nationale, doit retrouver des fonctions de stratège et de régulateur, et ne pas cantonner son action aux seules initiatives de prévention déployées dans certaines académies – comme, par exemple, dans le cadre de la lutte contre l’épidémie de grippe.

Réduire drastiquement et compenser les absences institutionnelles

Chaque année, le coût des absences des enseignants s’élève à près de 4Md€, dont plus du tiers a pour origine le fonctionnement même du système éducatif, cause principale des absences de courte durée, mal remplacées dans le second degré. La Cour estime que, de façon générale, l’écart entre les obligations réglementaires de service (ORS) et le temps de travail annuel dû par les enseignants en qualité d’agents publics (1 607 heures) laisse des plages temporelles suffisantes pour que les absences dues à l’institution ne s’imputent pas sur le temps d’enseignement. La mise en place d’un forfait annuel d’heures de remplacement et le renforcement des prérogatives du chef d’établissement, ajoutés à l’inscription du remplacement dans les missions des enseignants (recommandation formulée par la Cour dès 2017) donneraient une assise solide au remplacement de courte durée. La crise sanitaire a, par ailleurs, rappelé la nécessité pour le ministère de doter tous les niveaux de l’institution scolaire d’un cadre général d’élaboration des plans de continuité administrative afin d’améliorer le suivi de l’activité des enseignants.

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