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La contemporanéisation du versement des aides personnelles au logement

COUR DES COMPTES

La Cour des comptes rend publiques des observations définitives sur la contemporanéisation du versement des aides personnelles au logement.

L’aide au logement est une aide pécuniaire à la personne, destinée à financer la location d’une résidence principale en solvabilisant, sous condition de ressources, la demande des ménages selon des critères de taille et de localisation. Avant le 1er janvier 2021, le calcul du montant des aides au logement se fondait sur les déclarations fiscales établies en année N-2, avec une actualisation annuelle. Désormais, il se fonde principalement sur les ressources de l’année écoulée (du mois M-13 au mois M-2), appréciées au moyen d’une nouvelle base déclarative partiellement automatisée et actualisées de manière trimestrielle.

Cette réforme dite de contemporanéisation a eu pour objectif de mieux synchroniser le calcul du montant de l’aide et le niveau des ressources des allocataires, de façon à ce qu’elle soit la plus concomitante possible, dans un triple objectif : simplifier le parcours-usager des bénéficiaires de cette aide, réduire des différences peu justifiables entre allocataires et générer des économies budgétaires ne procédant pas d’une attrition du service rendu.

Le rendement de l'actualisation des ressources n’avait pas été une priorité dans les réformes précédentes du système des aides au logement. La réforme de 2021 s'est construite sur un consensus large, soutenue par les parties prenantes comme la caisse nationale d’allocations familiales (Cnaf), les administrations, et les bailleurs sociaux. Elle a été facilitée par la dématérialisation des procédures, notamment l'automatisation de la déclaration des revenus, ce qui a allégé les démarches des allocataires. Cependant, cette réforme s’est concentrée sur la modernisation de la gestion des aides, et non sur une refonte complète du système. Ainsi, elle a permis une meilleure synchronisation mais n'a pas corrigé les failles structurelles du dispositif, ni simplifié le mode de calcul complexe.

Le processus de réforme a été plus difficile pour la Cnaf, qui a choisi de développer un nouveau système d'information (SI), créant des retards et des complications. En dépit des difficultés techniques, la Cnaf a réussi à gérer les anomalies et éviter une perte de confiance publique. Cependant, les acteurs comme les bailleurs sociaux ont estimé qu’ils avaient été insuffisamment impliqués dans le processus. Le coût de la réforme, qui a nécessité l'adaptation des systèmes d'information, a dépassé 100 M€, mais l'économie réalisée sur les aides au logement a atteint 1,11 Md€ en 2021, principalement en réduisant le nombre d'allocataires dont les revenus en n-2 les rendaient éligibles alors qu’en année n ils dépassaient les plafonds. Le montant moyen de l’aide servie mensuellement par allocataire est resté constant.

Malgré ces économies, la réforme a entraîné de nouvelles vulnérabilités, telles que des problèmes avec la qualité des déclarations de revenus, des demandes d'information plus complexes et une insécurité accrue pour certains allocataires ayant une activité irrégulière. Le calcul en temps réel des aides a rendu difficile la prévision des budgets et les ajustements en fonction des variations économiques. En outre, la complexité croissante des dossiers a augmenté le risque de non-recours.

En termes de communication, les bénéfices de la réforme, notamment les économies réalisées, ont été atténués par des facteurs externes comme la crise sanitaire et les tensions internes à la Cnaf. Bien que la réforme ait permis de réduire certaines inégalités et de réaliser des économies budgétaires importantes, elle n’a pas simplifié de manière significative le parcours des usagers. Toutefois, cette modernisation peut être vue comme un processus de transformation réglementaire, offrant un modèle pour d’autres évolutions de la gestion des données administratives. Le système des ressources mensuelles (DRM), bien qu’imparfait, est désormais un élément central du dispositif, et ses futures améliorations sont attendues, notamment en matière de pilotage et de contrôle.