Les équilibres bilanciels de Sciences Po ont évolué favorablement, avec une trésorerie passée de
34 M€ fin 2016 à 121 M€ fin 2023 et des fonds propres qui ont augmenté de 35 M€ fin 2016 à 90 M€ fin 2023. Ces bons résultats financiers ont permis de faire face aux échéances de remboursements d’emprunt et de paiements des intérêts financiers. Malgré les crises, notamment celles liées aux actions militantes sur les campus en raison du conflit israélo-palestinien, traversées récemment par Sciences Po qui ont conduit à la suspension de financements de certains partenaires (principalement la région Île-de-France et le mécène américain McCourt), l’exercice comptable de 2024 devrait être positif.
L’établissement est parvenu à financer sa croissance, ce qui lui permet d’accueillir 15 000 étudiants, soit un triplement en 20 ans, sur son campus parisien et ses six campus en région. De même, Sciences Po a fortement augmenté ses frais de scolarité (+27 % pour le bachelor et +31 % pour le master entre les années 2016/2017 et 2024/2025). Des opportunités de nouvelles augmentations pourraient être mises à l’étude, notamment pour les cursus les plus attractifs.
Alors que les droits d’inscription demeurent relativement élevés, l’établissement continue de bénéficier d’un soutien important des pouvoirs publics à hauteur de 99 M€ si l’on intègre à la subvention la mise à disposition de 122 enseignants et de 89 agents du CNRS et la mise à disposition de locaux en région, la caution de la Ville de Paris pour les emprunts. La pérennité de ce modèle dual n’est pas assurée, compte tenu des risques de distorsions de concurrence avec l’enseignement supérieur privé et de l’état général des finances publiques, qui pourrait conduire l’État à concentrer davantage son soutien sur les établissements disposant d’une capacité moindre que Sciences Po pour développer leurs ressources propres. Sciences Po a d’ailleurs démontré sa capacité à réduire sa dépendance au soutien financier de l’État, en augmentant massivement ses ressources propres qui sont passées de 33 % à 67 % des revenus en 25 ans.
La stratégie de financement de la croissance via l’augmentation des frais de scolarité est désormais à relativiser, au regard de la stabilisation des effectifs étudiants en bachelor et en première année de master. À cela s’ajoutent les perspectives limitées du soutien budgétaire de l’État. Il en ressort que selon la conjonction des tendances actuelles, Sciences Po devra dégager de nouvelles ressources et dégager des économies dans les années à venir pour maintenir un flux de trésorerie positif à moyen terme. Ainsi, des leviers potentiels de croissance à l’instar du développement de la formation continue ou des cycles spécifiques comme la Summer School sont à prendre en compte. Des opportunités de progression des financements sur appels à projets européens et nationaux existent également. Le renouvellement récent de la direction de Sciences Po doit enfin être l’occasion de formaliser une stratégie de développement des ressources issues du mécénat.
En 2023, les dépenses de personnel représentaient 127 M€ (58,7 % des charges), montant auquel s’ajoutaient 21 M€ au titre des 4 500 vacataires, qui assurent la plus grande partie des enseignements dispensés. Avec une rémunération plus élevée que dans les autres établissements de l’enseignement supérieur, et un nombre particulièrement important des personnels administratifs et techniques dans ses effectifs (59 % contre 49 % au niveau national), Sciences Po est atypique dans l’écosystème de l’enseignement supérieur français. Revoir l’utilisation actuelle des effectifs administratifs pourrait constituer une opportunité, tant pour effectuer des économies par réduction de personnels, que pour redéployer les moyens au profit des postes académiques et des fonctions nécessaires pour développer de nouvelles ressources.
Sciences Po a acquis un parc immobilier important dans le 7ème arrondissement. Pour autant, cette stratégie patrimoniale, conjuguée à la croissance des effectifs étudiants, n’a pas permis de dégager l’ensemble des économies de loyers initialement mises en avant pour justifier en partie le projet de campus de Saint-Thomas. En dehors du 28, rue des Saints-Pères, quatre sites ont d’ores et déjà été identifiés comme présentant des besoins importants en termes de travaux Des ressources devront être dégagées pour financer ces travaux.
Les dépenses liées aux locaux occupés par Sciences Po représentent plus de 20 M€ par an, ce qui correspond à l’un des principaux postes budgétaires de l’établissement après sa masse salariale. Dans la période récente, la politique immobilière de Sciences Po a été marquée par l’acquisition et la réhabilitation du site de l’Hôtel de l’Artillerie pour un montant total de 186,9 M€. Il en résulte un impact financier durable pour Sciences Po, dont les capacités d’endettement sont désormais contraintes. Le développement des campus en région a permis de soutenir la croissance des effectifs étudiants de Sciences Po ces dernières années, mais porte également en lui-même un risque d’augmentation des charges de ces locaux dans les années à venir.