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Faut-il rapprocher les assiettes de la contribution sociale généralisée et des cotisations sociales ?

CPO

La Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale a demandé au Conseil des prélèvements obligatoires d’émettre un avis sur l’opportunité de rapprocher les assiettes de contribution sociale généralisée (CSG) et de cotisations sociales et sur les modalités de leur rapprochement. Le présent avis rendu par le CPO le 23 octobre 2025 vise à expliciter les différences d’assiette de la CSG et des cotisations sociales, à rappeler le coût des dispositifs existants d’exemptions de cotisations sociales et de CSG et leurs conséquences sur l’évolution de la structure des rémunérations avant de préciser les modalités qui sembleraient les plus adaptées par grandes catégories de dispositifs en vue de limiter les exemptions d’assiette si le législateur en décidait ainsi. 

De nombreux dispositifs dérogatoires au droit commun des prélèvements sociaux, communément appelés niches sociales, se sont stratifiés au fil des années. Ils ont pris la forme d’exonérations, c’est-à-dire des réductions totales ou partielles des montants dus, ou d’exemptions, totales ou partielles, de certains revenus de l’assiette sur laquelle les prélèvements sont dus. Les dispositifs d’exemption d’assiette affectent, à la différence des exonérations, les droits sociaux contributifs des salariés. Depuis 2018, l’assiette de la CSG sur les revenus d’activité est devenue l'assiette de référence pour l’ensemble des assiettes sociales. L’assiette des cotisations sociales comporte donc les mêmes exemptions que l’assiette de la CSG, auxquelles s’ajoutent des exemptions spécifiques établies par la loi. 

En 2024, 41 dispositifs affectaient l’assiette de contributions et cotisations de sécurité sociale sur différents types de revenus. 

Sont exemptées de contributions et de cotisations sociales les aides directes des entreprises aux salariés (titres-restaurants, chèques vacances, etc.), les indemnités de rupture, les attributions gratuites d’actions et les options d’attribution d’actions. Les indemnités de rupture, les attributions gratuites d’actions et les options d’attribution d’actions font l’objet de contributions spécifiques au taux de 30%. Le PLFSS 2026 prévoit de soumettre les aides directes aux salariés à une contribution spécifique au taux de 8%.

Sont exemptées de cotisations sociales et non de contributions sociales la protection sociale complémentaire, la participation et l’intéressement. Les employeurs sont redevables d’une contribution appelée « forfait social », censée représenter le montant des cotisations aux régimes universels (famille, maladie), pour les revenus soumis à la CSG mais exemptés de cotisations sociales, dont les taux peuvent varier de 8 à 20 %. En outre, des déductions forfaitaires spécifiques s’appliquent à certaines professions.

Hors dispositifs catégoriels, le manque-à-gagner pour la sécurité sociale s’élevait à 14,6 Md€ de cotisations et 2 Md€ de CSG et de CRDS en 2024. Les exemptions de cotisations dans le cadre des dispositifs catégoriels ont un coût estimé à 1,3 Md€ en 2023. 

Le Conseil des prélèvements obligatoires formule l’avis suivant, adopté à la majorité de ses membres.

Les exemptions d’assiette de contributions et de cotisations sociales non compensées nuisent au financement de la sécurité sociale. Leur efficacité pour remplir les objectifs de politique publique qui leur ont été assignés n’est souvent pas évaluée ; quand elle l’est, ces évaluations sont rarement positives.

Le rapprochement du droit commun des prélèvements sociaux sur les compléments de salaires passe par une limitation forte des exemptions de contributions sociales : la CRDS devrait être totalement universalisée, sans exception. Les aides directes aux salariés (titres restaurants, chèques vacances, etc.) et les dispositifs aujourd’hui soumis à des contributions spéciales (attributions gratuites d’actions, intéressement aux plus-values et indemnités de rupture conventionnelle et de mise à la retraite) pourraient en outre être assujettis à la CSG, voire au forfait social, en contrepartie de la suppression de ces contributions.

Les exemptions de cotisations dont les évaluations existantes ne démontrent pas l’efficacité au regard de leurs objectifs de politique publique devraient être supprimées. Les exemptions jugées efficaces ou en attente d’évaluation seraient soumises au forfait social, dispositif fiscal compensatoire à privilégier. Les modalités possibles de rapprochement des assiettes entre CSG et cotisations dépendent des objectifs que souhaite se donner le législateur :

  • dans une logique de rendement financier, une hausse du forfait social sur les dispositifs d’intéressement et de participation et les dispositifs de protection sociale complémentaire rapprocherait leur taux d’imposition du droit commun ;
  • l’accélération de la suppression des dispositifs catégoriels assurerait un traitement uniforme entre les professions en termes de prélèvements, mais aussi d’accès aux droits sociaux. ;
  • un critère d’équité verticale conduirait à prioriser, parmi les dispositifs aujourd’hui évalués négativement, la soumission aux prélèvements sociaux de droit commun de ceux dont le bénéfice est concentré sur les plus hauts revenus.

Pris isolément, les élargissements de l’assiette des prélèvements sociaux renchérissent toutefois le coût du travail. Leurs effets économiques globaux dépendent de l’utilisation finale du rendement financier dégagé sur laquelle le CPO ne se prononce pas dans le cadre de cet avis : baisse des taux de ces mêmes prélèvements, réduction du déficit public ou financement de dépenses sociales supplémentaires.

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