La ville de Thiers, commune sous-préfecture du département du Puy-de-Dôme, compte de l’ordre de 11 600 habitants. Sa population est relativement âgée, plutôt pauvre, et le taux de chômage important. Son économie est marquée par l’industrie de la coutellerie. Organisée entre une ville haute et une ville basse, elle se caractérise par une superficie importante influant sur l’étendue des réseaux d’eau et d’assainissement.
La commune a décidé de reprendre en régie directe, la production et la distribution de l’eau potable, ainsi que l’assainissement des eaux usées, au 1er janvier 2020, à l’échéance des deux contrats par lesquels elle en avait délégué la gestion. La chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes s’est notamment penchée sur les conditions et effets de cette reprise en régie en procédant au contrôle des comptes et de la gestion des services de l’eau et de l’assainissement collectif pour les exercices 2018 et suivants.
La décision de reprendre en gestion directe les services s’est appuyée sur une étude préalable
La décision de remunicipaliser les services d’eau et d’assainissement, avant tout motivée politiquement par la préoccupation de maîtriser complètement ces services, s’est appuyée sur une étude préalable complète. Celle-ci a permis à la collectivité d’appréhender les différents modes de gestion envisageables, et d’identifier les impacts d’une telle décision. Elle a permis de prendre également en compte des considérations techniques et surtout d’ordre économique et financier.
La collectivité n’a en revanche fixé aucun objectif précis au changement de mode de gestion : elle n’a pas déterminé le niveau de ses attentes, notamment en termes de qualité du service.
Le changement de mode de gestion n’a pas affecté la continuité du service, malgré les difficultés inévitables
Si la commune a choisi de recourir à un cabinet conseil pour l’accompagner, elle n’a pas mis en place d’organisation spécifique, du type mode projet, pour conduire cette opération complexe. Les actions à mener à bien ont pesé sur quelques agents ; pour une part, elles ont pu être conduites dans l’urgence ou dans des délais tendus. Il en a été ainsi de la recherche de locaux, pour abriter les services et assurer l’accueil des usagers, de la conduite des négociations pour aboutir à un accord de transition couvrant les agents employés par le délégataire et transférés à la collectivité, de l’externalisation de certaines activités, ou encore du lancement des procédures de recrutement.
Le changement de mode de gestion, qui a été anticipé, n’a pas affecté la continuité du service et peut être ainsi considéré comme une réussite.
Certains sujets n’ont toutefois pas été traités, comme la question des biens dédiés aux services, lors de la période de transition avec la gestion déléguée, et d’autres pas anticipés comme les impacts en termes de ressources nécessaires sur les fonctions support, notamment financières et comptables. La chambre a encore constaté que s’agissant des agents de droit privé antérieurement employés par le délégataire, et repris par la commune, un accord collectif n’a succédé que très tardivement à l’accord de transition qui n’était applicable que jusqu’au 31 décembre 2022.
L’activité des régies reste focalisée sur la continuité du service
Les régies (production et distribution d’eau potable et assainissement des eaux usées) se sont approprié les outils nécessaires à l’exercice de leurs activités. Les indicateurs de performance normés ne font pas apparaître de dégradation ou d’amélioration significative, preuve que le changement de mode de gestion a été convenablement intégré.
Les services disposent de données relatives à leur activité et une série d’indicateurs normés, mais ces éléments restent très peu utilisés dans le pilotage de l’activité. De même, les services municipaux n’apparaissent pas toujours en capacité d’assumer leurs obligations dans les délais impartis, dont plusieurs demeurent non accomplies à ce jour : démarches relatives à la protection de la ressource en eau ; autorisations de déversement d’eaux usées non domestiques ; ou encore étude diagnostique du réseau d’assainissement. D’autres ne le sont pas toujours dans les délais impartis, telles que la présentation des rapports sur le prix et la qualité des services, qui mériteraient par ailleurs d’être enrichis dans leur contenu.
Une situation financière qui ne présente pas de difficultés, mais un effort d’investissement insuffisant, sans vision pluriannuelle
La commune a fait le choix de maintenir les tarifs lors du passage en régie et depuis lors.
La situation financière relative aux services d’eau et d’assainissement ne fait pas apparaître de difficultés particulières, même si certains traitements comptables, effectués à l’occasion du changement du mode de gestion, sont venus affecter l’analyse qui peut être faite d’exercice en exercice. Le niveau des investissements apparaît en revanche insuffisant ; surtout, la collectivité ne s’est dotée d’aucune vision pluriannuelle permettant de les ordonner par priorité. Pour ce faire, elle ne dispose pas d’un état des infrastructures et des équipements, qui reste à établir et conditionne directement l’effort d’équipement à consentir ainsi que les arbitrages de financement à arrêter.
RECOMMANDATIONS
- Recommandation n° 1. : Enrichir le contenu des rapports publics sur le prix et la qualité des services de l’eau et de l’assainissement, en apportant des éléments d’explication circonstanciés sur l’évolution et le niveau des indicateurs.
- Recommandation n° 2. : Veiller à autoriser le déversement d’eaux usées autres que domestiques dans le système d’assainissement.
- Recommandation n° 3. : Mettre un terme à la situation dans laquelle l’usager de l’assainissement collectif finance les charges relatives à la gestion des eaux pluviales.
- Recommandation n° 4. : Élaborer une programmation pluriannuelle des investissements, pour le service de l’eau potable et celui de l’assainissement collectif.