SYNTHESE
Station balnéaire de la côte de Nacre dotée d’un casino municipal et située à une vingtaine de kilomètres au nord de Caen, la commune de Saint-Aubin-sur-Mer compte 2 200 habitants et voit sa population multipliée par quatre durant la saison estivale. La commune emploie une quarantaine d’agents, pour la plupart appartenant à la filière technique, et plusieurs saisonniers durant les deux mois d’été.
Elle est dotée d’un budget principal et de deux budgets annexes, l’un consacré à une zone d’activité et l’autre relatif au bâtiment abritant le casino qui est loué à une société privée, dans le cadre d’une délégation de service public (DSP).
La fiabilité des comptes présentés par la commune doit être améliorée, notamment en ce qui concerne la sincérité des inscriptions au budget primitif, le rattachement de certaines charges, la valorisation de l’inventaire et la comptabilisation des restes à réaliser en investissement.
La commune maîtrise ses charges de gestion qui sont restées stables durant la période 2009-2013, alors que ses produits augmentaient de 2,6 %, avec un effet positif mais limité sur l’excédent brut de fonctionnement. Les recettes tirées du casino ont été divisées par deux en quelques années pour atteindre un peu plus de 410 000 euros (€) en 2013, soit 14,7 % du total des recettes de gestion (19,9 % en 2008).
La situation financière de la commune reste fragile, eu égard à un endettement important constitué, en partie, de produits structurés risqués dont elle cherche à se défaire moyennant le paiement d’indemnités élevées. Au 31 décembre 2013, l'encours de la dette total était de 5 241 473 € (67 % d’emprunts à risques), soit un montant de 2 401 € par habitant. En ce qui concerne plus particulièrement un prêt basé sur le taux de change Euro/franc suisse, le passage à des produits à taux fixes sécurisés entraînerait le paiement d’une indemnité compensatrice estimée, en septembre 2014, à un montant de deux millions d’euros (2 M€), à la charge de la commune[1].
Le montant des intérêts et du remboursement du capital de la dette reste important, ce qui réduit d’autant la capacité d’autofinancement nette de la commune qui était de 290 000 € en 2013. Cette faiblesse de l’autofinancement se traduit par une diminution du montant des dépenses d’équipement, en baisse de 30 % entre 2010 et 2013. En 2013, la commune consacrait 118 € par habitant à ses dépenses d’équipement, alors que la moyenne de sa strate démographique s’établissait à 360 €.
Au cours de l’année 2015, la commune devrait faire face, notamment, à une nouvelle diminution du montant de sa dotation globale de fonctionnement versée par l’Etat, à une baisse de l’aide pour le financement des rythmes scolaires, à la poursuite des travaux de réhabilitation de l’ancien marché couvert et à des travaux de voirie. Elle doit donc impérativement envisager une diminution de ses charges de fonctionnement afin de dégager un autofinancement.
La commune de Saint-Aubin-sur-Mer possède sur son territoire un casino dont l’exploitation est confiée à un opérateur privé, au travers d’une délégation de service public. Celle-ci a été renouvelée en 2011 pour une période de douze ans, après un appel à concurrence qui n’a recueilli qu’une seule candidature, celle du délégataire sortant.
Outre des imprécisions, l’offre initiale du candidat ne respectait pas les prescriptions du cahier des charges sur plusieurs points et présentait un caractère incomplet au regard de nombreux critères. L’offre était très en-deçà des attentes de la commune, notamment en matière de redevance d’occupation (loyer), de prélèvement sur le produit des jeux, de budget consacré à l’animation et au développement touristique de la commune et de travaux à la charge du délégataire.
La phase de négociation qui s’est déroulée au cours du premier semestre 2011 a permis à la commune d’obtenir quelques avancées limitées avec un loyer fixe pour sa totalité, un taux de prélèvement communal sur le produit brut des jeux progressif conditionné à l’offre de stationnement, qui l’amène à assumer de fait une partie du risque commercial revenant normalement au délégataire, et un programme d’investissement arrêté à 2,55 M€ sur 12 ans contre 2,4 M€ initialement proposé, incluant l’embellissement de la salle du restaurant, la numérisation de la salle de cinéma et l’aménagement de nouvelles places de stationnement.
La commune a finalement accepté un taux de prélèvement progressif éloigné du taux maximum de 15 % autorisé par les textes et le délégataire n’a souscrit aucun engagement chiffré, ni en matière de contribution à l’animation et au développement touristique de la commune, ni en matière de promotion du casino.
La délégation de service public s’articule autour de deux conventions signées entre la commune et l’opérateur privé, l’une relative à l’exploitation du casino et l’autre à l’occupation des locaux dont la commune est propriétaire. Nombre d’articles souffrent d’un caractère flou, les obligations du délégataire n’étant pas chiffrées précisément et/ou ne s’inscrivant pas dans un calendrier de réalisation. Il en résulte une réelle difficulté pour la commune à s’assurer du respect par le délégataire de ses obligations.
Les rapports d’activité annuels du délégataire ne comportent pas toutes les informations prévues dans la convention d’exploitation. En outre, les données relatives aux investissements réalisés par le casinotier au cours de l’exercice écoulé ne renvoient pas aux articles correspondant des conventions d’exploitation et d’occupation. Dès lors, il est difficile pour la commune de vérifier à quel type d’engagement correspondent les investissements mentionnés.
Certains investissements à la charge du délégataire ont finalement été financés par la commune (numérisation de la salle de cinéma) ou n’ont pas respecté le calendrier de réalisation prévu dans les conventions (rénovation de la façade de la maison à usage de bureaux), alors que certains investissements qui devaient être financés directement par le délégataire l’ont été par le prélèvement à employer (compte 471). Il en résulte une modification substantielle de la nature du contrat de délégation de service public dans lequel le risque d’exploitation est de moins en moins supporté par le délégataire.
L’essentiel du chiffre d’affaires du casino est constitué par le produit brut des jeux et plus particulièrement par les machines à sous, les autres activités étant marginales (restaurant, bar et cinéma). Entre 2008 et 2013, le chiffre d’affaires a baissé de 5,7 % pour atteindre 2,7 M€ en 2013, avec une diminution du produit brut des jeux de 5,1 % et des activités annexes de 43 %.
Pour faire face à la baisse de son activité, la société exploitante a comprimé ses charges de gestion, ce qui s’est traduit par un redressement du résultat d’exploitation. Toutefois, les dotations aux amortissements pour 2012 et 2013 sont très inférieures aux dotations enregistrées précédemment, ce qui devrait amener la commune à s’interroger sur la volonté de l’exploitant d’investir dans la durée pour développer l’attractivité de l’établissement et son chiffre d’affaires[2].
[1] Une partie de cette somme pourrait être prise en charge par le fonds de soutien aux collectivités territoriales ayant souscrit des produits structurés, créé par l’article 92 de la loi de finances pour 2014. A cet effet, la commune a déposé un dossier de demande d’aide, fin 2014. Le montant de 2 M€ a été estimé avant les mouvements qui ont affectés le franc suisse début 2015.
[2] Fin 2014, le groupe propriétaire a connu une modification de son actionnariat qui pourrait avoir des répercussions sur l’avenir de l’établissement de Saint-Aubin-sur-Mer.
PRINCIPALES RECOMMANDATIONS
Fiabilité des comptes
- Veiller à la sincérité des inscriptions budgétaires au budget primitif et des restes à réaliser de la section d’investissement ;
- prendre une délibération sur les durées d’amortissement des immobilisations et régulariser les écarts constatés sur les écritures comptables relatives aux amortissements de l’exercice 2013 ;
- procéder au rattachement des intérêts courus non échus à l’exercice ;
- produire un état valorisé de l’inventaire en fin d’exercice et vérifier la concordance de son montant avec les chiffres du comptable public ;
- identifier et régulariser l’écart sur le montant de la dette au 31 décembre 2013 entre le compte administratif et le compte de gestion.
Achats
- Solliciter systématiquement plusieurs devis auprès d’entreprises différentes avant d’arrêter le choix d’un fournisseur ou d’un prestataire ;
- revoir les contrats en cours avec les fournisseurs de télécommunications sur la base d’une juste estimation des besoins de la commune.
Délégation de service public (DSP) du casino
- Se rapprocher du délégataire afin d’uniformiser d’une année sur l’autre la présentation, dans le rapport annuel d’activité, de sa contribution à l’animation et au développement touristique ;
- demander un état mensuel des opérations d’animation et de développement touristique mentionnant, notamment, les associations locales bénéficiant de sponsoring ;
- réunir une fois par trimestre la commission de suivi sur l’exécution des obligations contractuelles des parties ;
- demander au délégataire de compléter le contenu de son rapport annuel d’activité sur la base des dispositions de l’article 26 de la convention d’exploitation ;
- demander au délégataire d’indiquer dans son rapport annuel d’activité les articles de la convention concernés par les informations produites, notamment en matière d’investissements ;
- se rapprocher du délégataire pour raccourcir les délais de production du rapport d’activité afin qu’il puisse être présenté au conseil municipal plus tôt dans l’année ;
- dresser un bilan des investissements déjà réalisés via le comité de suivi et élaborer un nouveau plan pluriannuel d’investissement de concert avec le délégataire ;
- procéder à des contrôles sur place et sur pièces des comptes du délégataire.