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Conseil régional de Provence-Alpes-Côte d'Azur (Bouches-du-Rhône)

CRC PROVENCE-ALPES-CÔTE D'AZUR

Rapport d'observations définitives

SYNTHESE

Le contrôle de la chambre a porté sur la qualité de l’information financière, la situation financière, les aides aux entreprises et trois domaines de gestion appréciés à travers un échantillon d’opérations sélectionnées en fonction de critères de risques : les concours aux associations, la commande publique et la gestion du personnel.

L’information financière manque de précision. En particulier, la collectivité fait un usage de la technique des autorisations pluriannuelles de programme ou d’engagement non conforme à la règlementation. Le contenu des autorisations est trop large et couvre abusivement les trois quarts des dépenses. Leur utilisation, qui a fait jusqu’à présent l’objet d’un suivi financier insuffisant, a contribué à alourdir la présentation du budget et à réduire en fin d’exercice les restes à réaliser en dépenses. Cette diminution s’accompagne de celle des rattachements de charges à l’exercice, ce qui n’est pas sans incidence sur la sincérité des résultats présentés.

Les résultats devraient par ailleurs être ajustés après apurement des comptes de tiers et de certaines créances dont le recouvrement a été ralenti par l’insuffisance des autorisations de poursuite.

Sous ces réserves, la chambre ne formule pas de critiques sur la situation financière de la collectivité pour la période examinée (2006-2010). Cette situation se maintient malgré l’impact de deux réformes qui affectent ses recettes - la réforme de la taxe professionnelle- et ses charges - les transferts de compétences inscrits dans l’acte II de la décentralisation de 2004-. Ces transferts se traduisent selon la collectivité par un déficit cumulé de 131,7 M€ en 2010. Les recettes sont soutenues par l’augmentation de la pression fiscale sur les cartes grises, suivie en 2012 par un prélèvement supplémentaire au titre de la taxe intérieure sur les produits pétroliers. En revanche la collectivité a pris en 2010 des engagements, notamment sur le plan salarial, qui augmentent et rigidifient ses dépenses de fonctionnement.

L’autofinancement dégagé par la collectivité a permis, mais avec une augmentation significative de l’endettement, le maintien de l’effort d’investissement entre 270 M€ et 380 M€ par an, dans la moyenne des régions de métropole hors Ile-de-France. La dette présente un risque faible ; la collectivité privilégie le remboursement in fine, ce qui conduit à reporter les échéances.

Les aides aux entreprises

Le soutien apporté directement ou indirectement par la région aux entreprises hors secteur agricole s’est élevé à environ 152 M€ au cours de la période 2006-2010. Ces dépenses ont été principalement engagées dans le cadre du schéma régional de développement économique (SRDE). Ce schéma, qui couvre tous les secteurs de l’économie régionale, entraîne une dispersion des efforts. Son articulation avec les nombreux instruments d’intervention et de programmation régionaux ou avec les mesures cogérées ou déléguées par l’Etat n’apparaît pas clairement. La multiplication des instruments d’intervention (prêts et subventions) ne facilite pas l’appréhension de l’action régionale.

Cette dispersion ne permet pas une analyse précise des actions régionales en fonction des axes des politiques ou selon les types de bénéficiaires des aides, d’autant qu’une partie des fonds transite par des mandataires (CNASEA, OSEO) dont l’utilité n’est pas avérée. Plus du quart des interventions gérées par le service d’appui aux entreprises est absorbé par des structures associatives de droit privé telles que l’institut régional pour la création et le développement des entreprises. Par ailleurs l’efficacité des pôles régionaux de développement économique et solidaire (PRIDES), trop nombreux et aux périmètres parfois redondants, est, dans certains cas, incertaine.

La région ne mesure pas l’efficacité et l’impact de ses aides aux entreprises, qui peuvent s’adresser à des secteurs pour lesquels il n’existe pas de difficultés particulières de financement. Il n’existe pas de réelle mesure des créations d’entreprises ou d’emplois dus à l’aide régionale, mais cet impact semble limité, au vu des statistiques de l’INSEE disponibles.

La région est donc invitée à mieux cibler son action et à se doter d’instruments pour mesurer les effets et l’impact de sa politique.

Les concours aux associations

Les aides accordées aux associations représentent 190 M€ en 2010. Dans les secteurs sportif et culturel examinés par la chambre, la région s’est dotée de cadres d’interventions mais ils manquent encore de lisibilité et n’empêchent pas une dispersion des interventions.

Les règles fixées par la collectivité pour sécuriser les processus d’attribution des subventions ne sont pas toujours respectées. Elles ne permettent pas de pallier les risques de multifinancement ou de s’assurer qu’une convention, obligatoire au-delà d’un seuil de subvention de 23 000 €, a bien été conclue. Les conventions passées sont peu précises et peu contraignantes, rarement pluriannuelles, et ne favorisent pas un contrôle d’exécution efficace. Les comptes rendus financiers et d’activité sont insuffisants.

La région a indiqué qu’elle allait modifier ses conventions afin d’y ajouter le détail et le format des pièces à produire et qu’elle allait mettre en place des actions complémentaires pour s’assurer de l’effectivité du contrôle a posteriori.

La faiblesse des dispositifs de contrôle interne mis en place par la région a ainsi conduit à diverses irrégularités : défaut de convention obligatoire, absence d’intérêt régional de la dépense, atteinte au principe de neutralité religieuse ou politique. Enfin, la région verse des fonds sans mise en concurrence à des structures qui réalisent des prestations relevant du champ concurrentiel ou à des structures d’intermédiation dont les compétences se superposent. Les dérives de fonctionnement, lorsqu’elles sont connues, sont inégalement sanctionnées.

La commande publique

La chambre a examiné les relations entre la collectivité et son principal satellite, l’agence régionale d’équipement et d’aménagement (AREA), société publique locale d’aménagement (SPLA) dont elle détient 96% du capital.

Sous réserve que la collectivité exerce sur l’agence régionale un contrôle analogue à celui qu’elle exerce sur ses propres services, l’AREA peut être chargée sans aucune mise en concurrence préalable, de toute opération de construction ou de réhabilitation immobilière. Elle fait réaliser ainsi, en tant que mandataire de la région, autour de 200 M€ de travaux par an et perçoit entre 8 M€ et 13 M€ d’honoraires pour son intermédiation ou pour ses propres prestations. La chambre note cependant qu’une part importante de ces travaux sont des grosses réparations isolées, voire du petit entretien, opérations qui n’entrent pas dans le champ des compétences dévolues aux SPLA par le code de l’urbanisme et devraient donc donner lieu à une mise en concurrence préalable.

Par ailleurs, le montant élevé des honoraires versés et la lourdeur des contrôles qu’impliquent les quelque 8000 à 10 000 paiements annuels effectués au profit de l’AREA devraient inciter la collectivité à s’interroger sur la pertinence et l’efficience d’un recours quasi systématique aux services de l’agence pour les opérations concernant les bâtiments et les gros équipements hors transports.

La région indique que la transformation de l’AREA en société publique locale est envisagée.

S’agissant des marchés passés directement par la collectivité pour son fonctionnement courant, le contrôle réalisé sur un montant de 68 M€ de marchés de fournitures et de services conclus entre 2009 et 2011 a révélé les insuffisances de l’organisation générale de la fonction achat. Le rôle du service des marchés se limite, en dehors des appels d’offres, à des tâches d’appui, les services restant très autonomes pour les marchés à procédure adaptée (de montant plus faible) avec une très grande dispersion des personnels habilités à passer des commandes.

La mauvaise définition des besoins qui résulte de cette organisation nuit à l’efficience des achats, avec des conséquences dommageables : l’atomisation des commandes, en particulier pour les fournitures de vêtements et pour les prestations de bouche, ou l’inadéquation des critères retenus pour sélectionner les offres. La culture insuffisante de l’achat public des services contribue à renchérir les coûts : le recours à la négociation prévue à l’article 28 du code des marchés publics est rare, et souvent l’acheteur ne demande pas aux soumissionnaires les précisions qui auraient été nécessaires à l’analyse des offres.

Certaines décisions interviennent en méconnaissance des principes de liberté d’accès et d’égalité de traitement des candidats aux marchés publics : absence de mise en concurrence pour des prestations de conseil juridique ou de restauration ; défaut de publicité pour des marchés passés selon une procédure adaptée ; exclusion injustifiée de certains candidats ou, a contrario, contrôle insuffisant de la production des attestations et certificats prévus par la réglementation ou les dossiers de consultation ; traitement discutable de certaines offres notamment en ce qui concerne l’utilisation des critères de choix.

La région indique qu’elle prévoit un diagnostic de l’organisation de sa commande publique et qu’elle en exploitera les conclusions en 2013.

L’organisation générale et la gestion des ressources humaines

Plusieurs organigrammes se sont succédé au cours de la période 2006-2010, qui a été également marquée par une importante mobilité des cadres dirigeants. Le dernier en date est complexe et renseigne mal sur la réalité de l’organisation et des ressources mobilisées par chaque grande fonction. Ainsi les moyens de certaines politiques (relations internationales, communication, politique de la ville, formation) sont dispersés entre plusieurs services.

La région a développé des implantations de proximité mais devrait s’interroger sur le positionnement et les moyens dévolus au bureau d’Arles qui ne figure pas dans l’organigramme et se confond en large partie avec la permanence parlementaire du président du conseil régional. L’emploi des chargés de missions territoriaux devrait être mieux encadré.

Le service accueil, qui emploie officiellement près de 70 personnes, se caractérise à la fois par des horaires réduits par rapport aux autres services de la collectivité et un nombre d’heures supplémentaires payées très élevé.

Les effectifs de la région ont triplé au cours de la période essentiellement à cause de l’intégration des personnels techniciens ouvriers et de services (TOS) de l’éducation nationale, mais des décisions de gestion (recrutements supplémentaires de personnels de gestion, amélioration du niveau des primes des nouveaux arrivants) ont alourdi la charge de ce transfert. Des recrutements importants ont également eu lieu dans d’autres secteurs et sont encore envisagés.

Le régime indemnitaire des agents est de plus en plus coûteux, du fait de son extension à l’ensemble des agents non titulaires en juin 2006, de la généralisation de la nouvelle bonification indiciaire et de la progression des niveaux de primes. Des irrégularités ont par ailleurs été relevées dans l’attribution de certaines indemnités (garantie individuelle du pouvoir d’achat, prime informatique, collaborateurs de cabinet).

Les conditions de recrutement et de déroulement de carrières des agents contractuels sur emploi permanent, en nombre important dans la collectivité, appellent de nombreuses observations.

Beaucoup de recrutements méconnaissent les conditions permettant de déroger au recrutement de fonctionnaires territoriaux. Le mode de recrutement intuitu personae privilégié par la région pour les collaborateurs de groupes politiques est d’autant plus critiquable que les embauches sont parfois pérennisées à l’issue des mandatures.

Plusieurs agents contractuels ont bénéficié de transformations abusives de leur contrat en contrat à durée indéterminée, voire de titularisations discutables. D’autres ont été gratifiés de conditions de rémunération et de déroulement de carrière très favorables voire meilleures, en dépit de la loi et des délibérations adoptées par le conseil régional, que les agents titulaires de niveau équivalent ayant une ancienneté comparable voire plus importante. Enfin, une concentration de montages juridiquement fragiles et destinés à maintenir les intéressés sur un emploi permanent de la collectivité, tout en leur assurant un niveau de rémunération élevé, a été observée pour les collaborateurs de cabinet.

RECOMMANDATIONS

Recommandation n° 1:
Revenir à une application conforme des textes légaux et réglementaires en matière de gestion pluriannuelle des investissements et à la détermination des restes à réaliser au sens des articles R. 4312-5 et R. 4312-6 du code général des collectivités territoriales.

Recommandation n° 2
Utiliser le compte 1632 pour anticiper annuellement la charge de remboursement des emprunts obligataires.

Recommandation n°3:
Définir, dans les cadres d’intervention de la région à destination des associations, des critères et des modalités d’attribution conformes à l’intérêt régional et préciser les indicateurs et les informations qui permettent d’apprécier leur utilisation

Recommandation n°4 :
Préciser dans les contrats les actions subventionnées, les modalités de leur compte rendu et les critères de leur évaluation.
 
Recommandation n°5 :
S’assurer de la mise en œuvre effective des procédures d’instruction des demandes et d’attribution des subventions et garantir la traçabilité des interventions à chaque étape de la procédure.

Recommandation n° 6 :
Revoir le champ et l’économie des contrats conclus avec l’AREA.

Recommandation n° 7 : Veiller à une meilleure définition des besoins :

7-1- Définir précisément les besoins en fonction de l’état des consommations de l’année précédente, par type de prestations, au regard de la nomenclature établie par la région, tous services confondus afin de bénéficier notamment de prix plus intéressants sur des quantités plus élevées.
7-2- Redéfinir les lots, articuler les consultations les unes par rapport aux autres, en homogénéisant les durées d’exécution afin d’avoir une cohérence d’ensemble par type de prestations.

Recommandation n° 8 :
Mutualiser la fonction achat afin d’éviter des commandes identiques par plusieurs services.

Recommandation n° 9 :
Recourir plus systématiquement à la technique de l’accord cadre pour les marchés dont les prix sont marqués par une forte volatilité.

Recommandation n° 10 :
Mettre en place, pour les prestations de restauration, après mise en concurrence, un système d’accords-cadres à bons de commandes, tel que prévu à l’article 76 du code des marchés publics définissant un cahier des charges particulier pour les fournitures courantes et services détaillant le type et le niveau de prestations souhaité.

Recommandation n° 11 :
Opérer des rappels de facturation et des demandes de remboursement des avances lorsque les prestations ne sont que partiellement voire pas réalisées.

Recommandation n° 12 :
Renforcer la formation des agents en charge de la commande publique.

Recommandation n° 13 :
Clarifier l’affectation des agents du service accueil et revoir l’organisation de ce service afin de réduire, à effectif constant, le recours aux heures supplémentaires et aux services extérieurs.

Recommandation n°14 :
Clarifier et rationaliser l’organigramme et définir les fonctions occupées par les agents pour assurer une meilleure allocation des ressources.