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Syndicat mixte de gestion de l’aéroport de Clermont-Ferrand-Auvergne (Smacfa) (Puy-de-Dôme) - Enquête maillage aéroportuaire

CRC AUVERGNE-RHÔNE-ALPES

La chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes a procédé, dans le cadre de son programme de travail, au contrôle des comptes et de la gestion du syndicat mixte de gestion de l’aéroport de Clermont-Ferrand-Auvergne (Smacfa) à compter de l’exercice 2017. Les investigations ont porté plus particulièrement sur les thèmes définis par l’enquête nationale « maillage aéroportuaire », menée par la formation inter-juridictions commune à la Cour des comptes et aux chambres régionales des comptes.

Remontant aux tous débuts de l’aviation, l’aéroport a été créé en 1916 ; il est implanté sur la commune d’Aulnat, à six kilomètres de Clermont-Ferrand dans le département du Puy-de-Dôme.

Le syndicat mixte de gestion de l’aéroport a été créé en 2007 par la région d’Auvergne, la communauté d’agglomération de Clermont Communauté et le département du Puy-de-Dôme, avec l’objectif d’en développer l’activité. Dès l’origine, le syndicat mixte a confié l’exploitation au groupe VINCI Airports. Venue succéder en 2016 à la région auvergnate, la région Auvergne-Rhône-Alpes joue un rôle prépondérant dans la gouvernance du syndicat : elle en assure la présidence, est le principal financeur et lui met à disposition ses propres agents.

Un trafic en légère hausse de 2017 à 2019, réduit de près de 80 % lors de la crise sanitaire

L’aéroport de Clermont-Ferrand est soumis à une faible concurrence, à moins de 200 km de distance et de deux heures de route du plus proche aéroport. Il se caractérise par une forte dépendance à la compagnie aérienne Air France et à ses filiales, qui a transporté plus de huit passagers sur dix sur la période. De 2017 à 2019, le développement du trafic a résulté surtout du développement de l’activité de la compagnie Ryanair sur l’espace européen, soit un surplus de fréquentation de 37 325 passagers. Les principaux indicateurs de qualité de service se sont améliorés de 2017 à 2019, qu’il s’agisse du taux de remplissage des avions, de la ponctualité ou du nombre de vols annulés.

La crise sanitaire qui a conduit à l’arrêt total de vols sur certaines périodes a entrainé un effondrement de 73 % du nombre de passagers. La prévision de reprise d’activité à partir de 2022 reposait sur le redémarrage de la ligne Clermont-Ferrand-Orly, la mise en place d’une ligne régulière sur Porto et la reprise des charters estivaux. 187 643 passagers ont été enregistrés en 2022.

Un soutien public annuel d’environ 4,5 M€

Le mode de financement retenu par les collectivités repose sur des contributions statutaires de fonctionnement finançant les investissements, plutôt qu’un subventionnement à l’équilibre de l’exploitation complété au besoin de subventions d’équipement. Il permet aussi de s’exonérer de devoir informer et solliciter l’accord formel et exprès des assemblées délibérantes des collectivités sur les programmes d’investissement à soutenir, pour donner suite aux demandes spécifiques de subventions d’équipement. Un tel modèle de financement, qui aboutit à surfinancer l’exploitation et à dissimuler le soutien à l’investissement, doit être révisé.

Une délégation de service public favorable à VINCI Airports et sa filiale, conséquence du faible pouvoir de négociation du syndicat mixte

L’objectif ambitieux d’atteindre 600 000 passagers en 2019 n’a pas été atteint. Il en est résulté un moindre chiffre d’affaires réalisé par le délégataire, la SEACFA filiale de VINCI Airports, et une exposition aux risques d’exploitation inférieure aux prévisions. La rentabilité d’exploitation, relativement élevée (17 %) est conforme aux niveaux observés dans le secteur aérien. S’y ajoute un flux financier, chiffré à 1,2 M€ l’an, en direction de la maison-mère au titre de contributions, de missions d’assistance technique et des intérêts de la dette contractée auprès du groupe, assurant à ce dernier des ressources retirées de l’exploitation de l’aéroport clermontois.

Un avenant au contrat a été conclu récemment pour compenser l’impact de la crise sanitaire, chiffré à 5 M€ selon la déclaration faite par le délégataire. Il en est ressorti un résultat prévisionnel à nouveau excédentaire dès 2022. Pour autant, de 2015 à 2021, l’économie générale de la délégation n’apparaît nullement déséquilibrée, ne justifiant donc pas les conditions très favorables consenties au délégataire dans ce dernier avenant. La position de VINCI Airports, acteur majeur du marché de l’exploitation des plateformes aéroportuaires en France et dans le monde, conjuguée au contexte concurrentiel du secteur du transport aérien, place de facto le syndicat mixte gérant un aéroport de taille moyenne comme celui de Clermont-Ferrand dans une situation d’asymétrie en termes de pouvoir de négociation. En conséquence de quoi, l’aéroport se révèle largement soumis à la décision du délégataire.

Un syndicat assujetti à la bonne volonté des compagnies aériennes

De 2017 à 2021, le syndicat mixte a versé 3 M€ aux compagnies aériennes par l’effet de six contrats. Le manque d’explicitation des informations financières transmises, en particulier par la compagnie Ryanair, n’a pas permis au syndicat mixte d’en vérifier l’exactitude et la fiabilité. De même, les modalités de détermination du soutien public apporté à la compagnie aérienne Ryanair, ont été fort peu transparentes durant la période sous revue. Le syndicat mixte s’expose ainsi à un risque juridique nullement hypothétique, quant aux règles communautaires définissant le régime des aides d’État au secteur aérien.

Les compagnies aériennes demeurent, in fine, les véritables décideurs quand il s’agit de poursuivre l’exploitation ou de fermer une ligne considérée comme non rentable, quelles que puissent être les clauses insérées aux contrats de partenariats conclus avec le SMACFA. Pour corriger le déséquilibre patent entre parties prenantes, le syndicat mixte doit absolument renforcer ses capacités d’expertise en matière d’analyse financière et de négociation de contrats.

Nonobstant le constat d’une situation peu favorable au syndicat mixte gestionnaire, il reste que l’aéroport de Clermont-Ferrand demeure utile aux acteurs économiques du territoire, aux premiers rangs desquels la société Michelin créée depuis plus d’un siècle.

RECOMMANDATIONS

  • Recommandation n° 1 : Établir un inventaire d’entrée des biens de retour mis à disposition du délégataire.
  • Recommandation n°  2 : Se doter des compétences permettant au syndicat d’exercer sa responsabilité d’autorité délégante.
  • Recommandation n° 3 : Renégocier à la hausse le montant de la redevance d’occupation du domaine public inscrit dans le contrat de délégation de service public.