Les autres rapports seront publiés dans les prochaines semaines.
Présent sur le territoire de 150 communes, essentiellement de la petite couronne, le SEDIF distribue chaque année près de 240 millions de mètres cubes d’eau potable à plus de 4,4 millions d’usagers franciliens. Il est, à ce titre, le plus grand service public d’eau potable présent en France et en Europe.
En tant que syndicat mixte responsable du service public de la distribution d’eau, le SEDIF a choisi, depuis sa création en 1923, de gérer ce service sous la forme d’une délégation de service public, confiée depuis l’origine à la Compagnie générale de eaux, devenue Veolia. Les conditions de cette délégation de service public ont été très largement modifiées à l’occasion de la dernière mise en concurrence pour le nouveau contrat qui court pendant 12 ans depuis le 1er janvier 2011 .
A titre principal, la chambre a souhaité comparer les conditions de la gestion de cette délégation avec celles des deux autres très grands services publics de distribution présents sur le territoire de la métropole du Grand Paris : la gestion en régie directe par la Ville de Paris et la gestion en délégation par le syndicat des eaux de la presqu’île de Gennevilliers (SEPG).
En 2014, l’écart tarifaire entre ces trois gestionnaires était significatif, le prix du mètre cube étant, de 1,175 € à Paris, de 1,476 € pour le SEDIF et de 1,735 € pour le syndicat des eaux de la presqu'île de Gennevilliers.
L’écart de tarif entre le SEDIF et la Ville de Paris s’explique, pour moitié, par des différences structurelles. Notamment, le SEDIF recourt uniquement à des eaux de fleuve et de rivières, son réseau connait un étalement plus important du fait d’un habitat plus dispersé sur son territoire, ses canalisations enterrées nécessitent un renouvellement plus fréquent et le syndicat a retenu des choix innovants pour l’investissement sur son réseau et ses équipements.
Un sixième de cet écart est lié au régime fiscal applicable à la seule délégation de service public.
Enfin, les charges liées à la gestion déléguée (coût du pilotage et rémunération du délégataire) représentent le tiers de cet écart. Sur ce plan, la chambre a constaté que l’évolution et le montant des diverses rémunérations du délégataire pouvaient poser question : sa rémunération principale est ainsi passée de 7 millions d’euros en 2011 à plus de 20 millions d’euros par an en 2014, les frais de siège, à hauteur de 7 millions d’euros, n’ont pas été justifiés. En 2015 , la non prise en compte du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi dans l’actualisation des tarifs a rapporté 3 millions d’euros à Veolia . De plus, les prestations commandées aux filiales de Veolia, ou les économies réalisées par centralisation de trésorerie (« cash-pooling ») constituent des sources potentielles de marge non prises en compte dans les comptes de la délégation.
La chambre constate cependant que les éléments qu’elle a relevés lors de son contrôle concernant les diverses rémunérations du délégataire ont largement été pris en compte dansun avenant négocié par le Sedif à la fin de l’année 2016. Celui-ci a permis de réduire de 10 centimes le prix du mètre cube pour l’usager.
Ainsi l’écart tarifaire entre les trois services franciliens comparés par la chambre s’est sensiblement réduit en 2017, les tarifs du SEDIF et du syndicat des eaux de la presqu'île de Gennevilliers passant respectivement à 1,37 et 1,324 €, alors que le prix du mètre cube à Paris est globalement resté stable (1,193 €).
Prix total du mètre cube d’eau facturé au 1er janvier 2017 (pour 120 m3)
En € |
Sedif |
EDP |
SEPG |
Eau potable HT |
1,37 |
1,19 |
1,32 |
Assainissement HT (moyenne*) |
1,82 |
1,30 |
1,72 |
Redevances |
0,78 |
0,77 |
0,78 |
TVA |
0,27 |
0,24 |
0,29 |
Total |
4,24 |
3,50 |
4,11 |
Source CRC à partir des RPQS (* : redevance assainissement moyenne sur le territoire)
Les écarts sont tout aussi sensibles en matière d’assainissement.
La chambre assortit son rapport d’une recommandation visant à sécuriser le plafonnement de la rémunération consentie par le SEDIF à son délégataire.
Par ailleurs, dans le cadre de la mise en œuvre de la réforme territoriale et de la création de la métropole du Grand Paris, la chambre régionale des comptes Île de France a examiné les conséquences prévisibles et les opportunités potentielles qu’offre cette réforme pour l’avenir du service public de l’eau.
Ainsi, sur le périmètre de la métropole du Grand Paris, la réforme territoriale récente déroge à la règle nationale commune d’une gestion métropolitaine de l’eau potable.
Elle confie de plein droit cette compétence obligatoire aux douze établissements publics territoriaux qui la composent.
Toutefois, l’absence d’usine de production propre et d’accès à la ressource va contraindre la plupart de ces territoires à n’exercer que très partiellement cette compétence.
Dans ce contexte, la question du rôle que la métropole pourrait être amenée à jouer à l’avenir dans l’organisation de ce service doit être posée.
Il serait logique, comme c’est partout le cas ailleurs en France, que la mise en œuvre d’un prix unique de l’eau à l’échelon métropolitain soit envisagée.