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Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers

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La crise sanitaire a récemment rappelé combien la gestion des déchets, et en particulier, le service public de gestion des déchets (SPGD), constitue un service essentiel, assuré par les communes ou leurs groupements. La très grande variété de matières et d’objets qui composent les 39 millions de tonnes de déchets ménagers et assimilés (DMA) produits en France rend leur collecte et leur traitement à la fois plus complexes et plus coûteux que ceux des autres déchets - dont le volume est pourtant plus significatif. Avec des dépenses annuelles de gestion des DMA de 10,9 Md€, soit 61,5% des dépenses totales de gestion des déchets, les enjeux financiers sont majeurs. Dix ans après la publication d’un précédent rapport qui pointait des insuffisances, il est apparu utile aux juridictions financières de réexaminer la pertinence et l’efficience de la politique de prévention et de gestion des DMA. Le rapport publié ce jour s’est appuyé sur une analyse nationale et internationale de la Cour des comptes et sur 51 contrôles menés par les chambres régionales des comptes.

Une réduction des déchets contrariée par un pilotage insuffisant

Si le volume d’ordures ménagères produit par habitant en France tend à se stabiliser sur la dernière décennie, il reste à un niveau élevé, tant pour sa quantité globale (583 kg de DMA par habitant en 2019), que pour sa part non triée - représentant 249 kg d’ordures ménagères résiduelles (OMR) par habitant. Notre pays se situe, au regard des principaux indicateurs (quantité de déchets produite, recyclage, élimination), légèrement en deçà des performances de la moyenne européenne, et plus loin encore des pays les plus avancés (Allemagne, Autriche, Pays-Bas et pays scandinaves). Or, 80% des OMR collectées en France pourraient faire l’objet d’une valorisation adaptée à leur nature si elles étaient triées par les usagers et orientées vers leurs filières de traitement spécifiques, en particulier les déchets organiques et ceux relevant d’une filière à responsabilité élargie des producteurs (REP). Comme les juridictions financières l’avaient déjà souligné en 2011, la prévention et la gestion des déchets nécessitent en premier lieu un recueil et une présentation des données pertinentes afin d’orienter l’action publique. Or, les indicateurs réglementaires actuels, à la fois trop nombreux et publiés trop tardivement par l’Ademe à partir de données locales incomplètes, ne parviennent pas à jouer ce rôle. Pour mobiliser citoyens, collectivités territoriales et entreprises autour de priorités partagées et accélérer la mise en œuvre des objectifs nationaux, les indicateurs devraient être recentrés sur des tableaux de bord synthétiques regroupant les principales données utiles. S’ils représentent 12% de l’ensemble des déchets produits en France, les DMA mobilisent 61,5 % des dépenses - qui augmentent de + 4,3% par an au cours des 20 dernières années. S’agissant de la part financée par l’usager, les juridictions financières estiment que la part faite à la tarification incitative est insuffisante. Alors qu’elle devait concerner 15 millions d’habitants en 2020, elle n’en atteint aujourd’hui que 6 millions. Les collectivités chargées de mettre en œuvre cette tarification incitative - qui a pourtant montré son efficacité dans la réduction des tonnages collectés et des coûts de gestion - lui reprochent d’être à la fois complexe, coûteuse dans sa gestion et inadaptée aux objectifs poursuivis.

Le dispositif opérationnel : une transformation à accélérer vers l’économie circulaire

La prévention reste marginale dans les actions des éco-organismes et les collectivités territoriales - les deux principaux acteurs chargés de la prise en charge des déchets. Premières concernées, les entreprises ne peuvent pas s’exonérer de cette responsabilité par leur seule contribution financière : elles doivent aussi réduire les matières mises sur le marché (diminution des emballages, meilleure écoconception des produits, réduction des volumes). Du côté des collectivités territoriales, les actions - souvent limitées à une sensibilisation des citoyens en faveur des gestes de tri - touchent une population trop réduite. Or, l’éventail d’actions de prévention locales plus opérationnelles pourrait être élargi, avec notamment des formes concrètes d’éco-exemplarité comme la lutte contre le gaspillage alimentaire. Avec les investissements de modernisation et de mise aux normes, l’augmentation continue de la dépense consacrée au traitement (40 % de la dépense totale du service public) va se poursuivre. Par ailleurs, les déchets plastiques, qui font peser de fortes externalités négatives sur l’environnement, posent des difficultés de traitement particulières. La généralisation de leur collecte en poubelle jaune prévue pour 2022 n’est réalisée qu’aux trois-quarts. Pour réduire leur impact environnemental, de nombreux programmes de financement déployés par l’État depuis 2021 (parmi lesquels le plan de relance) visent à renforcer la filière de recyclage. Les juridictions financières estiment que, pour donner une cohérence à toutes ces actions, le plan national devrait notamment comporter une partie consacrée aux enjeux industriels prioritaires, en particulier la plasturgie et la valorisation énergétique. La valorisation énergétique des déchets non recyclés, grâce à une modernisation des installations, constitue l’alternative la plus crédible à l’enfouissement. Car si celui-ci recule, il occupe encore une trop grande place (21% du traitement des déchets), en comparaison des pays européens les plus performants en termes de recyclage.

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Prévention, collecte et traitement des déchets ménagers - Nos rapports en 180 secondes (ou presque)

Transcription de la vidéo sur les déchets ménagers

Les déchets ménagers représentent 12 % du volume des déchets produits en France, mais 61,5 % des dépenses publiques de collecte et de traitement, soit près de 11 Mds d’euros.

Les déchets ménagers sont pour l’essentiel, à 80%, les déchets produits chaque jour par vous et moi dans notre foyer et, pour les 20% restants, par les petits commerces et services. Ils sont principalement collectés en porte à porte.

Le cadre législatif et réglementaire français a été profondément révisé depuis dix ans en vue d’instaurer une économie dite « circulaire ». L’idée, c’est de considérer les déchets comme des ressources réutilisables et de favoriser, dans l’ordre, la prévention, le recyclage, la valorisation énergétique et enfin, seulement, le stockage en décharge.

Pourtant, aujourd’hui, la France n’est pas en mesure de rejoindre les pays européens les plus avancés en termes de maîtrise du volume de déchets produits et de recyclage. Elle n’est pas en mesure, non plus, d’atteindre les objectifs ambitieux qu’elle s’est fixée par la loi à l’horizon 2030.

Le volume d’ordures ménagères produit chaque année par habitant est de 583 kg. Ce volume tend à se stabiliser sur les dix dernières années, mais il reste à un niveau élevé comparé à la Belgique (490 kg) ou encore la Suède (443 kg).

La part non triée des déchets ménagers, ce qu’on appelle les ordures ménagères résiduelles, qui sont mises dans un sac poubelle puis jetées en vrac dans le bac vert, le « tout venant », pour être finalement incinérées ou enfouies en décharge, représente encore en moyenne 249 kg par an et par habitant alors que certaines villes, comme Besançon par exemple, parviennent, par leurs efforts, à les réduire à 136 kg.

Or 80 % de ces ordures ménagères résiduelles pourraient faire l’objet d’une valorisation si elles étaient triées par les usagers et orientées vers des filières de traitement spécifiques. C’est le cas en particulier pour les déchets organiques, le compost, qui pourraient être déposés dans une nouvelle poubelle comme cela se fait dans plusieurs pays européens et dans certaines communes françaises (5 millions de Français sont déjà concernés). C’est aussi le cas pour les déchets en plastique qui devraient tous et partout être admis dans la poubelle jaune.

Pour inverser la tendance, la Cour et les chambres régionales des comptes recommandent en premier lieu que la planification des actions menées par l’État, les régions et les intercommunalités soit simplifiée. Ainsi, il sera plus facile de vérifier que les actions menées permettront bien d’atteindre les objectifs fixés par la loi, par exemple recycler 70% de tous les emballages en 2030.

Elles recommandent également de relancer la tarification incitative qui permet de faire varier sa taxe ou redevance d’ordures ménagères en fonction du volume de ses déchets. La tarification incitative devrait, selon la loi, concerner 15 millions d’habitants : elle n’en atteint aujourd’hui que 6 millions. Pour rattraper notre retard,  un soutien financier de l’État aux intercommunalités apparaît nécessaire pendant la phase de mise en œuvre de cette nouvelle tarification. La Cour et les chambres régionales des comptes recommandent aussi que les visiteurs des communes touristiques contribuent davantage au ramassage de leurs ordures au travers de la taxe de séjour qu’ils paient.

En outre, les juridictions financières regrettent que peu d’efforts réels, au-delà des discours, soient faits en faveur de la prévention des déchets, tant par les entreprises que par les collectivités territoriales. Elles pourraient soutenir davantage par leurs financements l’écoconception des produits, la lutte contre le gaspillage et la réparation et le réemploi des biens usagés.

Elles appellent enfin à un rôle plus grand des régions et des éco-organismes pour organiser la modernisation des usines de traitement des déchets.

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