Le plan de transformation numérique de la justice est avant tout, un plan de rattrapage
Conçu pour rattraper le retard du ministère de la justice en matière de systèmes d’information et enclencher une véritable transformation, le plan de transformation numérique (PTN) de la justice affichait à l’origine des objectifs ambitieux de modernisation des systèmes d’information. Or, le PTN se révèle finalement être davantage un catalogue de projets visant à remettre à niveau un ensemble de systèmes d’information vieillissants et incomplets, qu’un véritable plan de transformation. En outre, la complexité de la construction budgétaire rend difficile le rapprochement des crédits annoncés de ceux effectivement votés. La présente enquête fait apparaître que les crédits réellement affectés au plan se situent bien en-deçà des annonces initiales. Selon la Cour, une présentation budgétaire plus claire devrait permettre, à l’avenir, de distinguer les crédits exceptionnels qui y sont consacrés des crédits courants de fonctionnement du budget informatique.
À ce stade, un bilan contrasté
La Cour relève également que, si les projets inscrits dans le premier axe stratégique du plan ont permis de doter le ministère d’équipements informatiques performants (comme, par exemple, la mise en place d’un système performant de visio-conférence), les projets du deuxième axe du plan, constitué des applications, sont en décalage avec les calendriers initiaux. Ce constat est confirmé pour les deux projets les plus importants, Cassiopée et Portalis, lancés depuis plusieurs années et qui accumulent retards, dépassements de budget et satisfaction partielle des besoins. Le choix de recentrer le projet de modernisation de la justice civile Portalis sur les usagers plutôt que sur les acteurs du service public de la justice, magistrats, greffiers et avocats, a eu pour conséquence de le retarder, sans apporter un réel bénéfice à l’usager.
Le renforcement récent de la fonction informatique doit s’accélérer
Alors que le ministère de la justice a rencontré des difficultés pour recruter des professionnels du numérique jusqu’en 2020, la situation semble désormais s’améliorer. Toutefois, la fonction informatique nécessite encore des ajustements : est en cause le niveau d’externalisation excessif (difficulté majeure à laquelle se heurte le ministère de la justice), qui l’empêche de maîtriser ses projets et outils informatiques, et le conduit à s’éloigner des principes de la commande publique. Par ailleurs, malgré les ambitions de transparence affichées à l’origine, le suivi budgétaire du plan de transformation numérique est insuffisant. Enfin, les travaux du PTN ne doivent pas s’arrêter à la mise à disposition des nouveaux outils, mais doivent englober une évaluation ex post des résultats - de l’efficacité des services rendus au public, comme de l’amélioration de la valeur ajoutée et de la productivité des agents. Tant qu’une telle démarche ne sera pas systématiquement mise en œuvre, le PTN ne pourra répondre à l’attente des agents du ministère.