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Les prêts garantis par l’État

COUR DES COMPTES

Définis dès le 23 mars 2020 par voie législative et réglementaire, en conformité avec le cadre fixé par la Commission européenne le 19 mars 2020, les prêts garantis par l’État (PGE) ont été l’un des principaux dispositifs de soutien aux entreprises pour faire face à la crise sanitaire. Ces prêts ont été accordés par les banques jusqu’au 30 juin 2022, garantis entre 70 % et 90 % par l’État, et plafonnés à 25 % du chiffre d’affaires annuel - ou, pour les nouvelles entreprises, deux années de masse salariale. Au cours du premier confinement, ils ont été massivement souscrits : sur les 137 Md€ de PGE accordés par les banques au 31 décembre 2021, plus de 70 % ont été accordés entre mars et juin 2020. Le rapport publié ce jour par la Cour des comptes évalue la mise en œuvre et le bilan de cette politique publique en répondant à trois questions : la conception et le déploiement des PGE ont-ils permis de répondre efficacement au besoin de liquidité des entreprises compte-tenu des autres outils existants ? Ont-ils facilité la survie à moyen long terme des entreprises et des mécanismes d’accompagnement pertinents ont-ils été définis ? Dans quelle mesure le calibrage du dispositif a-t-il donné lieu à un partage équilibré des risques et du coût entre les entreprises, les banques et l’État ?

Un dispositif massif déployé rapidement

Les prêts garantis par l’État (PGE) ont été distribués rapidement : sur les 137 Md€ de PGE accordés par les banques à plus de 660 000 entreprises en décembre 2021, plus de 70% avaient été octroyés dès juin 2020. Le dispositif a été particulièrement sollicité par les très petites entreprises qui ont bénéficié de près de 88 % des prêts au 31 décembre 2021 (36,7 % en montant). Le dispositif s’est déployé plus rapidement en France que dans les autres pays, en raison du choix d’une distribution des PGE par les banques (en bonne santé financière avant le déclenchement de la crise sanitaire), de la conception d’un produit simple et aisément compréhensible et de la mise en place d’un processus fluide de demande en ligne d’attestation de garantie auprès de Bpifrance. La France a également mis en place l’un des systèmes les plus avantageux pour les entreprises en termes de coût, avec un taux incluant la prime de garantie de 0,25 % la première année et de 1 % à 2,5 % les années suivantes. Le taux de refus des PGE, après négociations préalables entre les entreprises et les banques sur le montant du prêt, est resté stable (autour de 2,9 %) et près des deux tiers des refus ont fait l’objet d’un recours au médiateur du crédit, dont l’intervention a permis d’aboutir à l’octroi d’un prêt dans la moitié des cas.

Les PGE ont bien répondu aux besoins de liquidités des entreprises

Au terme de son évaluation, la Cour constate que, conformément à son objet, le dispositif a permis de soutenir l’offre de crédit par les banques et d’éviter des faillites massives d’entreprises dans un contexte inédit de crise. Ainsi, les PGE ont été particulièrement sollicités dans les secteurs les plus fragilisés, notamment par plus de 50 % des entreprises relevant de l’hôtellerie-restauration, 40 % des entreprises de services et 35 % des commerces. Le choix d’un dispositif simple, dont la distribution a été déléguée aux banques, s’est avéré pertinent pour assurer un déploiement rapide des prêts et restaurer la confiance des acteurs économiques. La réponse au besoin de liquidité des entreprises a été un peu au-delà de ce qui était nécessaire mais ce sur-calibrage a été nettement moins important que dans d’autres pays européens.

Si les outils d’accompagnement à la sortie de crise doivent encore monter en charge, les difficultés de remboursement sont circonscrites

En s’appuyant sur une analyse des demandes de prêts par les banques, qui ont pu en ajuster le montant, voire, dans des cas limités, en refuser l’octroi, la Cour estime que le dispositif a effectivement permis de soutenir des entreprises viables affectées par la crise. La sélection opérée par les banques a permis de limiter à moins de 2,5 % la part des entreprises « zombies » parmi les bénéficiaires. Le niveau de prêts souscrits et les choix d’amortissement des PGE apparaissent globalement cohérents avec la situation financière des entreprises, ce qui est rassurant sur leur capacité à faire face aux remboursements. Les difficultés apparaissent relativement circonscrites même si elles dépendront de l’évolution du contexte macro-économique et de la montée en charge des outils d’accompagnement à la sortie de crise : les entreprises jugées les plus à risque par la Cour devront consacrer mensuellement plus de 9 % de leur chiffre d’affaires au remboursement de dettes PGE et Urssaf, et les entrepreneurs individuels (3 % des PGE en montant, mais 19% des bénéficiaires) apparaissent particulièrement vulnérables.

Le calibrage du dispositif conduit à un partage des risques et des coûts assez équilibrés entre les entreprises, les banques et l’État

Le partage des risques entre les entreprises, les banques et l’État est assez équilibré, avec une part de risque assumée par l’État plus importante, ce qui n’est pas anormal dans une situation exceptionnelle de crise. Les paramètres des PGE ont été plutôt avantageux pour les entreprises, notamment les plus petites, et sécurisants pour les banques dans un contexte de taux d’intérêt faibles. Le contrôle des engagements des grandes entreprises n’est cependant pas suffisamment piloté et l’efficacité du dispositif sur leurs délais de paiement est mitigée. La délégation aux banques s’est accompagnée de mécanismes de responsabilisation qui ont permis d’éviter des fraudes massives et un coût important pour les finances publiques. Le coût des PGE pour l’État devrait rester contenu (moins de 3 Md€), alors qu’ils ont permis de soutenir environ 700 000 entreprises à hauteur de près de 140 Md€. En raison de sa sensibilité aux évolutions du contexte macro-économique, cette situation de partage des coûts doit être surveillée. La Cour formule cinq recommandations pour améliorer le suivi et le contrôle de la mise en œuvre des PGE et renforcer les capacités d’analyse de la situation financière des entreprises.

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