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Commune de Poindimié (Nouvelle-Calédonie)

CTC NOUVELLE-CALÉDONIE

La chambre territoriale des comptes a examiné la gestion de la commune de Poindimié pour les exercices 2018 et suivants.

SYNTHÈSE

La chambre territoriale des comptes de Nouvelle-Calédonie a contrôlé les comptes et la gestion de la commune de Poindimié depuis 2018. Entre 2019 et 2023, la chambre territoriale des comptes, saisie par des tiers sur le fondement de l’article L. 263-21 du code des juridictions financières pour défaut d’inscription de dépenses obligatoires au budget communal, a rendu trois avis budgétaires concernant la commune. La chambre a pu relever, à l’occasion de ces procédures, des difficultés de trésorerie expliquant la mise en paiement tardive des factures ainsi que des désordres dans la tenue de la comptabilité communale. Ces constats l’ont conduite à accorder une attention particulière à ces points dans le cadre de son contrôle des comptes et de la gestion de la commune. Le maire de la commune a indiqué prendre en compte les observations et recommandations de la chambre et a présenté les grandes lignes d’un plan d’action en ce sens.

 

Avec 5 006 habitants, Poindimié est la neuvième commune la plus peuplée de Nouvelle-Calédonie et la deuxième de la province Nord derrière Koné. Souvent qualifiée de chef-lieu de la côte Est, elle bénéficie de nombreuses infrastructures publiques et accueille plusieurs manifestations à dimension touristique et culturelle. Le maire de la commune est, depuis 1989, M. Paul Néaoutyine, également président de la province Nord. En l’état actuel du droit en Nouvelle-Calédonie, il n’y a pas incompatibilité entre ces deux fonctions exécutives locales.

La commune dispose d’un budget consolidé (budget principal et budget annexe de l’eau) de 820 MF CFP en 2022 et compte un effectif d’une soixantaine d’agents en équivalents temps-plein.

Une gouvernance à consolider

Les conditions actuelles de fonctionnement de la gouvernance de la commune présentent d’importantes anomalies. Les dispositions du code des communes de la Nouvelle-Calédonie régissant le fonctionnement du conseil municipal, la publicité des actes et délibérations et les conditions d’exercice du mandat municipal ne sont pas respectées. La périodicité légale d’une réunion du conseil municipal par trimestre n’est pas appliquée et l’information des élus et citoyens sur les affaires de la commune n’est pas suffisamment assurée.

Des procès-verbaux des séances du conseil municipal ne sont pas systématiquement établis et, quand ils le sont, se caractérisent par leur caractère très succinct.

La commune ne tient pas de registre des délibérations et des actes du maire alors que cette obligation lui incombe depuis le 1er juillet 2022 et qu’elle en a été dûment informée en amont par le représentant de l’Etat.

Les modalités de mise en œuvre des délégations de pouvoirs du maire et de ses adjoints présentent des fragilités juridiques : le maire ne rend pas compte de l’usage de ses délégations, l’exercice par les adjoints de leur délégation n’est pas en cohérence avec l’étendue de celle-ci.

Le droit à la formation des élus n’est pas encadré et le budget qui lui est alloué est insuffisant. Il appartient à la commune de déterminer les orientations qu’elle entend privilégier en matière de formation des membres de l’organe délibérant.

Enfin, l’organisation des services communaux manque de lisibilité, tant en ce qui concerne les missions dévolues aux agents qu’en ce qui concerne les responsabilités hiérarchiques. Le suivi des effectifs doit en outre être amélioré.

Une fiabilité des comptes et une qualité de l’information financière à améliorer

De nombreux errements sont constatés dans la gestion comptable de la commune, ce que révèlent notamment un suivi défaillant des factures, des retards de paiement, l’absence de mandatement de sommes importantes que la commune a été condamnée à payer suite à un contentieux dans lequel sa responsabilité a été retenue par des décisions de justice exécutoires. La chambre souligne le caractère inacceptable de cette inertie et appelle la commune à exécuter sans délai ces décisions.

Le contrôle réalisé par la chambre révèle un délai de mandatement moyen de près de quatre-vingts jours pour les marchés publics, bien au-delà du délai maximal de trente jours prévus par la délibération n°424 du congrès du 20 mars 2019 relative aux marchés publics. Ceci éclaire les saisines récurrentes de la chambre ces dernières années, par des créanciers de la commune, au motif de factures impayées.

Au vu de ces constats, la chambre appelle la commune à mettre en place une procédure de la dépense intégrant l’enregistrement et le suivi des factures, l’attestation du service fait et le mandatement.

La fiabilité des comptes est compromise par une mauvaise tenue de la comptabilité patrimoniale et, partant, une mauvaises pratique des règles d’amortissement, l’absence de constitution de dotations aux provisions en dépit des risques financiers pesant sur la commune au titre de contentieux ou de créances dont le recouvrement est manifestement compromis, des anomalies constatées dans la gestion des opérations de fin d’exercice (restes à réaliser et rattachements) et l’absence de justification satisfaisante des travaux effectués en régie.

Par ailleurs, la qualité de l’information financière est perfectible et doit être améliorée qu’il s’agisse du débat sur les orientations budgétaires, qui n’est actuellement pas à la hauteur des ambitions affichées par la commune, des annexes budgétaires incomplètes et des notes de présentation du budget et du compte administratif dont le contenu mériterait d’être enrichi.

Une situation financière qui demeure fragile, une situation de trésorerie très dégradée

La trajectoire financière de la commune, après s’être fortement dégradée jusqu’en 2020, connaît depuis une relative amélioration, ce que traduit le redressement de l’épargne. Elle demeure néanmoins fragile. Les dépenses de fonctionnement se sont ainsi rigidifiées du fait de l’augmentation en leur sein des charges de personnel. Compte tenu de la faiblesse de l’épargne, le financement des investissements a été principalement assuré par le recours à l’endettement et la mobilisation du fonds de roulement. Si la durée de désendettement demeure maîtrisée, l’encours de la dette s’est en conséquence fortement accru, passant de 518,3 MF CFP à 592,9 MF CFP.

La commune est dotée, outre son budget principal, d’un budget annexe de distribution d’eau potable. Ce dernier est largement tributaire des subventions du budget principal pour le financement de ses investissements. En méconnaissance des dispositions applicables aux services publics industriels et commerciaux, il n’a aucune autonomie financière. Par ailleurs, les dépenses relatives à l’assainissement sont indûment supportées par le budget principal, alors qu’elles devraient être retracées dans un budget annexe, pouvant être commun avec celui de l’eau.

La commune est confrontée à une insuffisance de trésorerie, qui la conduit très régulièrement à être dans l’incapacité de payer ses fournisseurs. Cette situation trouve son origine dans un montant très important de créances non recouvrées, particulièrement auprès des usagers du service de l’eau, avec un total des restes à recouvrer du budget annexe de 315 MF CFP fin 2022. Le recouvrement d’une grande partie de ces créances est, eu égard à leur ancienneté, très compromis.

Les besoins de trésorerie du budget annexe se répercutent sur le budget principal dont la trésorerie se trouve, de ce fait, affectée. Ceci appelle la définition d’une stratégie de restauration de la trésorerie, s’appuyant sur la mise en œuvre charte partenariale pour une politique de recouvrement conclue avec la direction des finances publiques et reposant sur deux principaux piliers : le réexamen de la tarification de la fourniture en eau potable, en envisageant la mise en place d’une tarification incitative et une politique de recouvrement plus active. Une action d’information et de sensibilisation des usagers sur les coûts réels du service de l’eau et sur la bonne gestion de cette ressource devrait par ailleurs être menée.

Une mise en œuvre des règles de la commande publique perfectible, des enjeux de politique publique à prendre en compte.

En matière de commande publique, la chambre a constaté des pratiques ne permettant pas d’assurer l’efficacité et la régularité de l’achat public. La commune n’a pas défini de règles de publicité et de mise en concurrence pour les achats en dessous du seuil de 20 MF CFP, les modalités de computation des seuils sont insuffisamment prises en compte, le choix des attributaires des marchés n’est pas suffisamment étayé.

La prise en compte des risques induits par le changement climatique, tels que l’érosion côtière et la submersion, demeure insuffisante. La chambre invite l’ordonnateur à élaborer, ainsi qu’il lui incombe, un plan communal de sauvegarde et un dossier communal sur les risques majeurs pour s’y préparer.

 

La chambre formule à l’endroit de la commune dix rappels du droit et sept recommandations visant à remédier aux dysfonctionnements et insuffisances qu’elle a constatés et améliorer la performance de la gestion comptable et financière.

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