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Commune d'Albiez-Montrond (Savoie)

CRC AUVERGNE-RHÔNE-ALPES

La chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes a procédé, dans le cadre de son programme de travail, au contrôle des comptes et de la gestion de la commune d’Albiez-Montrond pour les exercices 2018 et suivants.

Albiez-Montrond, qui s’étend sur 48 km², est située en Savoie, sur un plateau qui domine la vallée de la Maurienne. C’est une commune de moyenne montagne qui est située entre 700 et 3 364 mètres d’altitude. La commune accueille une station de sports d’hiver au cœur du village depuis les années 1950. En 2022, le domaine skiable s’étend sur 70 hectares, et comprend 25 pistes et huit remontées mécaniques.

Une station de ski qui n’a pas trouvé son équilibre économique

En 2017, la station de sports d’hiver a été menacée de fermeture en raison de la défaillance de son exploitant, l’établissement public industriel et commercial (EPIC) Albiez-Tourisme. La commune, elle-même dans une situation financière critique, a dû reprendre le déficit de clôture de l’exploitant de 875 k€ et plus de 5 M€ d’encours d’emprunts, et assurer la pérennité de l’activité.

Pour cela, elle a conclu trois délégations de service public successives, sous forme de régie intéressée, avec la société Savoie stations domaines skiable (SSDS), filiale de la société d’économie mixte départementale, Savoie stations ingénierie tourisme (SSIT).

Dans cette forme de délégation, la commune devrait organiser le pilotage du service, porter l’ensemble des investissements et assumer le risque financier de l’exploitation. En pratique, le délégataire SSDS est le donneur d’ordre et ne fait l’objet d’aucun contrôle par la commune. De plus, il préfinance une partie des investissements, en contradiction avec ce que permet la réglementation. En outre, il a gardé jusqu’à présent la propriété des biens acquis ou équipements réalisés, alors même que la commune les a entièrement financés.

Ainsi, la commune se trouve dans une relation déséquilibrée avec son délégataire qui lui est défavorable tant en termes financier que patrimonial.

L’exploitation du domaine skiable reste déficitaire. En réponse, la commune envisage un projet de liaison avec la station voisine des Karellis, estimé à plus de 16 M€. Ce projet est juridiquement et financièrement incertain. Aucune prospective financière n’a été réalisée permettant d’en démonter la soutenabilité financière le niveau d’endettement de la commune ne permet pas actuellement de financer un tel projet.

Un niveau d’endettement très élevé

Le niveau d’endettement de la commune d’Albiez-Montrond, bien qu’en baisse depuis 2011, demeure très élevé. L’encours de la dette atteint 8,3 M€ au 31 décembre 2021 avec une capacité de désendettement moyenne de 24 années sur les trois derniers exercices.

La priorité doit donc rester la réduction de l’endettement. Pour cela, la commune doit impérativement dégager une épargne suffisante pour couvrir l’annuité de la dette et ses besoins d’investissement essentiels. Elle devra donc encore accroitre ses produits (par le levier fiscal) et réduire ses charges de gestion.

En 2018, la commune a signé un protocole en vue de la renégociation de sa dette avec ses principaux créanciers. Les emprunts concernés ont été regroupés et rééchelonnés sur 20 ans. La renégociation, dont le coût est estimé à 1,28 M€, a permis de diminuer le montant des annuités. La dernière annuité significative de remboursement de ces emprunts est prévue en 2038.

D’importants manquements au code de la commande publique et des situations de conflits d’intérêts

A l’exception de l’exploitation du domaine skiable, les achats auxquels la commune a procédé relèvent de procédures adaptées. Dans la majeure partie des cas, ces procédures n’ont donné lieu à aucune mise en concurrence.

Les mises en concurrence qui ont été effectuées n’ont pas toujours été menées avec la rigueur nécessaire, dans l’organisation de la consultation comme dans l’analyse des offres.
 
Les contrats de délégation de service public passés pour l’exploitation du domaine skiable ont fait l’objet de 11 avenants depuis leur entrée en vigueur le 1er décembre 2017. Plusieurs d’entre eux concernent la réalisation de prestations qui ne relevaient pas du contrat. D’autres auraient dû être computées avec des achats communaux de même nature pour définir la procédure requise par le code de la commande publique.

Les situations de conflits d’intérêts sont fréquentes, certains membres du conseil municipal étant à la tête de sociétés, ou liés à des entrepreneurs fournisseurs de la commune. Bien que le code pénal autorise, dans les communes comptant jusqu’à 3 500 habitants, les élus à traiter avec leur commune « pour le transfert de biens mobiliers ou immobiliers ou la fourniture de services dans la limite d’un montant annuel fixé à 16 000 euros », cela ne dispense pas la collectivité du respect des principes de la commande publique : liberté d’accès à la commande publique, égalité de traitement des candidats et transparence des procédures.

RECOMMANDATIONS

  • Recommandation n° 1 : Organiser un dialogue de gestion avec le délégataire pour l’élaboration et le suivi du budget annexe domaine skiable, exiger la production du rapport annuel d’exécution de la DSP et contrôler les factures réglées dans le cadre de ce contrat.
  • Recommandation n°  2 : Ne plus attribuer d’études ou de travaux dans le cadre de la DSP relative à l’exploitation des remontées mécaniques et du domaine skiable.
  • Recommandation n° 3 : Procéder à l’engagement comptable des dépenses dans le système d’information financier et au recensement des restes à réaliser.
  • Recommandation n° 4 : Se doter d’inventaires physiques et comptables.
  • Recommandation n° 5 : Fiabiliser la dotation aux amortissements effectuée sur le budget assainissement et procéder à l’amortissement des biens sur le budget domaine skiable.
  • Recommandation n° 6 : Transférer les biens et la dette correspondants à l’exploitation du domaine skiable du budget principal vers le budget annexe et inscrire toutes les dépenses liées au domaine skiable dans le budget annexe.
  • Recommandation n° 7 : Rendre-compte devant le conseil municipal des décisions prises par le maire en vertu de sa délégation et en faire état dans le procès-verbal du conseil municipal.
  • Recommandation n° 8 : Restituer à la commune la somme de 3 331,24 € versée au titre des frais de représentation du maire et identifiée comme indûment versée faute de justificatifs.
  • Recommandation n° 9 : Recenser les situations d’atteinte à la probité et mettre en place des mesures de prévention des conflits d’intérêts.
  • Recommandation n° 10 : Mettre fin au versement des primes et avantages en nature irréguliers.
  • Recommandation n° 11 : Mettre systématiquement en concurrence les fournisseurs dans le respect des principes de la commande publique : liberté d’accès à la commande publique, égalité de traitement des candidats, transparence des procédures.
  • Recommandation n° 12 : S’assurer des déports des personnes concernées pendant tous les processus de décision.

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