SYNTHÈSE
Dans le cadre de sa mission d’assistance au Parlement1 et en application de l’article LO. 132-3-1 du code des juridictions financières, la Cour des comptes a été saisie par les co-présidents de la Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS) et par la présidente de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale d’une demande d’enquête relative aux achats hospitaliers.
Dans un contexte marqué depuis 2010 par la reconstruction complète du centre hospitalier régional d’Orléans (CHRO) et un recours croissant à l‘externalisation de certaines activités, les achats de l’hôpital ont augmenté dans une proportion supérieure à celle de l’activité médicale, à l’exception des produits pharmaceutiques et à usage médical dont la consommation est restée mesurée.
L’organisation de la fonction achat reste, sur la période observée, largement partagée entre les directions, même si un service achat, placé auprès de la Direction des Services Economiques, intervient en support aux autres directions, notamment sur le plan juridique.
La création des groupements hospitaliers de territoire a néanmoins nécessité une plus forte structuration de la fonction achat, le Nouvel Hôpital d’Orléans (NHO) étant établissement support.
Les utilisateurs sont largement associés à l’expression de la demande, le CHRO faisant de cette étape un point focal de son action visant à contrôler, coordonner, rendre cohérente et rationaliser sa dépense. Toutefois, les contrats de pôle n’intègrent pas cette dimension.
La répartition des rôles entre tous les participants aux opérations d’achat est bien connue au sein de l’établissement, mais les outils de contrôle de gestion ou de pilotage apparaissent perfectibles. De même, les pratiques d’achats ne se sont inscrites que tardivement dans les divers plans institutionnels prescrits par la DGOS.
Le CHRO ne dispose pas d’un guide unique résumant les processus et critères requis, rappelant les impératifs déontologiques nécessaires, soulignant la place qu’il entendrait voir attribuer aux PME dans ses commandes ou, enfin, explicitant sa préoccupation réelle en termes d’achats durables. De même, la pratique du « sourcing2 », désormais reconnue, demande à être formalisée. Pour autant, la régularité des opérations analysées ne pose pas question.
L’évaluation des gains potentiels liés à l’application du programme « Phare » intègre, selon l’établissement, des paramètres qui sont extérieurs à l’optimisation de sa propre stratégie d’achat, en ignorant, par exemple, les effets de renouvellement de gammes sur le prix des matériels antérieurs.
Presque 40 % des achats sont effectués par l’intermédiaire de l’un des trois groupements d’achats nationaux, sans que cette proportion ait cru de façon notable entre 2010 et 2014 contrairement aux « marchés négociés conclus sans publicité ni mise en concurrence » dont la part a plus que doublé.
Selon l’établissement, la mutualisation et la massification des achats ne permettront pas une diminution des dépenses du CHRO, sa propre taille étant suffisante pour être déjà significativement prise en considération par ses fournisseurs.
De fait, la négociation est une pratique revendiquée dont l’efficacité permet de diminuer des coûts d’achats d’équipements d’imagerie d’environ 8 %, au-delà de tarifs déjà négociés tout en jouant également sur des extensions de garanties comme la durée et les formules d’indexation ce qui permet de limiter les coûts ultérieurs de maintenance. A cet égard, l’approche en coûts complets des investissements, déjà pratiquée, gagnerait à être systématisée.
En s’éloignant du quotidien des services hospitaliers, du fait de regroupements plus larges, les opérations d’achats sont perçues comme perdant en efficience ce qu’elles permettraient de gagner en coût de mise en œuvre, sous réserve que l’agrégation de besoins provenant de divers hôpitaux et qu’il faut traduire en une demande unique, produise réellement une réduction des coûts.
Les achats de médicaments se font au sein d’un marché administré vis-à-vis duquel l’établissement affirme disposer de peu de marges de manœuvre. Toutefois, des éléments empiriques de comparaison laissent à penser qu’il obtient des tarifs compétitifs. Le CHRO a recours aux médicaments génériques, dans une proportion dont il ne mesure pas le poids, tout en estimant que les perspectives d’économies liées à leur usage sont en voie d’épuisement, dans un contexte où apparaissent peu de nouveautés.
L’optimisation des conditions de la distribution est prise en compte pour limiter les volumes d’achat et ajuster au mieux la commande aux consommations. Pour autant, le CHRO est régulièrement confronté à des situations de rationnement touchant certains médicaments. Il privilégie alors la sécurité de son approvisionnement, d’autant qu’il est l’hôpital de recours à l’échelon régional.
Les changements réglementaires dans les modalités de prise en charge des médicaments constituent enfin une source d’incertitude du pilotage de ces dépenses pour lesquelles les pharmaciens émettent, par ailleurs, de fortes attentes en matière d’évaluation de l’amélioration du service médical rendu.
L’organisation de la fonction achat semble, aujourd’hui, moins aboutie que la stratégie et la pratique déployées au quotidien, à tous les niveaux, afin d’en minimiser le coût. La perspective d’une direction des achats identifiée et unifiée est de nature à consolider les volets juridiques et éthiques de l’acte d’achat tout en permettant un pilotage précis de ces opérations.
Des objectifs et des indicateurs, non nécessairement nombreux, pourront ainsi rendre compte de l’efficacité de cette politique d’achats et attester que l’hôpital, comme d’autres, optimise déjà en grande partie ce poste de dépenses tout en y associant en premier chef les personnels.
RECOMMANDATIONS
- Mettre en place des indicateurs de pilotage du suivi des achats ;
- Elaborer un référentiel ou guide d’achat global, rassemblant l’ensemble des règles et processus liés à la fonction.