LA POSTE
Une transformation à accélérer
Rapport public thématique
•
La Poste - décembre 2016
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Sommaire
Délibéré
..........................................................................................................
7
Introduction
...................................................................................................
9
Chapitre I
Une entreprise qui a évolué
.....................................................
11
I - Des mutations statutaires et réglementaires qui ont favorisé la
capacité d’adaptation de l’entreprise
..............................................................
11
A - La transformation en société anonyme et l’arrivée d’un nouvel
actionnaire, facteurs de consolidation
...................................................................
11
B - Une organisation de groupe avec de multiples filiales, reflet de sa
diversification concurrentielle et internationale
....................................................
13
C - Des missions de service public réaffirmées
....................................................
16
II - Des efforts de modernisation
...................................................................
18
A - Des réorganisations industrielles importantes au sein de la branche
Courrier
................................................................................................................
18
B - Des progrès en matière de qualité et d’adaptation du réseau des
bureaux de poste
...................................................................................................
19
C - Une méthode de conduite du changement qui a porté ses fruits
.....................
22
III - Un modèle économique qui a résisté à la crise
.......................................
23
A - Une structure financière consolidée
................................................................
24
B - Des relais de croissance qui ont bien fonctionné
............................................
28
C - Une maîtrise des charges engagée
..................................................................
35
Chapitre II
Des fragilités persistantes
.......................................................
41
I - Un rythme de transformation fortement dépendant des relations
sociales
...........................................................................................................
41
A - Une capacité de changement marquée par les spécificités du dialogue
social
.....................................................................................................................
41
B - Un symptôme préoccupant aux causes multiples : la persistance de
niveaux élevés d’absentéisme
...............................................................................
44
II - Une stratégie commerciale et numérique insuffisamment réactive
..........
46
A - Des marges de progression importantes dans la qualité des services
rendus
...................................................................................................................
46
B - Des offres commerciales sur internet qui ont pris du retard
............................
52
III - Les difficultés de pilotage d’une organisation décentralisée
..................
57
A - Une mutualisation insuffisante
.......................................................................
58
B - Des lacunes dans les contrôles internes et externes
........................................
59
IV - Une absence de visibilité sur les missions de service public
..................
61
A - Des charges de service public d’un montant non négligeable
........................
61
La Poste - décembre 2016
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COUR DES COMPTES
4
B - Des interrogations pour l’avenir
.....................................................................
66
Chapitre III
Des ambitions menacées par des incertitudes sur les
relais de croissance
.......................................................................................
75
I - Un objectif de retour à un niveau de croissance d’avant crise différé
à 2020
.............................................................................................................
75
A - Des résultats inférieurs aux attentes des plans stratégiques jusqu’en
2014
......................................................................................................................
76
B - Le plan stratégique 2014-2020 : une volonté de renouvellement, des
résultats pour l’heure satisfaisants
........................................................................
79
II - Des chocs devenus structurels
..................................................................
81
A - Des taux d’intérêt qui obscurcissent l’avenir de La Banque Postale
...............
82
B - Une intensification de la concurrence dans le secteur du colis
.......................
83
C - La poursuite de la chute des volumes de courrier
...........................................
85
III - Des interrogations fortes sur la capacité des relais de croissance à
fournir la contribution attendue en 2020
........................................................
90
A - Des relais de croissance historiques à faire évoluer
........................................
91
B - Des nouveaux relais de croissance qui apportent une contribution
encore marginale au résultat
.................................................................................
95
Chapitre IV
Changer La Poste pour mieux la préserver : une
accélération nécessaire des réformes
........................................................
103
I - Renforcer les leviers de maîtrise des charges
..........................................
104
A - La nécessaire baisse des coûts des réseaux
...................................................
104
B - Amplifier l’effort d’adaptation des effectifs et des carrières
.........................
109
C - Des gisements d’économie à exploiter
..........................................................
114
II - Tirer toutes les conséquences du choix d’un « modèle multi-
métiers »
.......................................................................................................
117
A - Un choix de longue date, qui s’est avéré jusqu’ici pertinent
........................
117
B - Des réformes à mener afin de renforcer la cohérence interne du modèle
......
120
C - Inscrire pleinement la croissance externe dans une vision stratégique
..........
127
III - Actualiser le contenu des missions de service public de La Poste
........
132
A - À missions constantes, des marges de manoeuvre à exploiter
.......................
133
B - Quels services pour quel coût ? Des options de fond à trancher
...................
136
Conclusion générale
...................................................................................
141
Récapitulatif des recommandations
.........................................................
145
Liste des principaux sigles
.........................................................................
147
Annexes
.......................................................................................................
149
Réponses des administrations et des organismes concernés
...................
227
•
La Poste - décembre 2016
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Les rapports publics de la Cour des comptes
- Élaboration et publication -
La Cour des comptes publie, chaque année, un rapport public annuel
et des rapports publics thématiques.
Le présent rapport est un rapport public thématique.
Les rapports publics de la Cour s’appuient sur les contrôles et les
enquêtes conduits par la Cour des comptes ou les chambres régionales des
comptes et, pour certains, conjointement entre la Cour et les chambres
régionales ou entre les chambres. En tant que de besoin, il est fait appel au
concours d’experts extérieurs, et des consultations et des auditions sont
organisées pour bénéficier d’éclairages larges et variés.
Au sein de la Cour, ces travaux et leurs suites, notamment la
préparation des projets de texte destinés à un rapport public, sont réalisés par
l’une des sept chambres que comprend la Cour ou par une formation
associant plusieurs chambres.
Trois principes fondamentaux gouvernent l’organisation et l’activité
de la Cour des comptes, ainsi que des chambres régionales et territoriales des
comptes, et donc aussi bien l’exécution de leurs contrôles et enquêtes que
l’élaboration des rapports publics : l’indépendance, la contradiction et la
collégialité.
L’
indépendance
institutionnelle
des
juridictions
financières
et
statutaire de leurs membres garantit que les contrôles effectués et les
conclusions tirées le sont en toute liberté d’appréciation.
La
contradiction
implique
que
toutes
les
constatations
et
appréciations ressortant d’un contrôle ou d’une enquête, de même que toutes
les
observations
et
recommandations
formulées
ensuite,
sont
systématiquement soumises aux responsables des administrations ou
organismes concernés ; elles ne peuvent être rendues définitives qu’après
prise en compte des réponses reçues et, s’il y a lieu, après audition des
responsables concernés.
La publication d’un rapport public est nécessairement précédée par la
communication du projet de texte que la Cour se propose de publier aux
ministres et aux responsables des organismes concernés, ainsi qu’aux autres
personnes morales ou physiques directement intéressées. Dans le rapport
publié, leurs réponses accompagnent toujours le texte de la Cour.
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COUR DES COMPTES
6
La
collégialité
intervient pour conclure les principales étapes des
procédures de contrôle et de publication.
Tout contrôle ou enquête est confié à un ou plusieurs rapporteurs.
Leur rapport d’instruction, comme leurs projets ultérieurs d’observations et
de recommandations, provisoires et définitives, sont examinés et délibérés de
façon collégiale, par une chambre ou une autre formation comprenant au
moins trois magistrats, dont l’un assure le rôle de contre-rapporteur, chargé
notamment de veiller à la qualité des contrôles. Il en va de même pour les
projets de rapports publics.
Le contenu des projets de rapport public est défini, et leur élaboration
est suivie, par le comité du rapport public et des programmes, constitué du
Premier président, du Procureur général et des présidents de chambre de la
Cour, dont l’un exerce la fonction de rapporteur général.
Enfin, les projets de rapport public sont soumis, pour adoption, à la
chambre du conseil où siègent en formation plénière ou ordinaire, sous la
présidence du Premier président et en présence du Procureur général, les
présidents de chambre de la Cour, les conseillers maîtres et les conseillers
maîtres en service extraordinaire.
Ne prennent pas part aux délibérations des formations collégiales,
quelles qu’elles soient, les magistrats tenus de s’abstenir en raison des
fonctions qu’ils exercent ou ont exercées, ou pour tout autre motif
déontologique.
*
Les rapports publics de la Cour des comptes sont accessibles en ligne
sur le site internet de la Cour des comptes et des chambres régionales et
territoriales des comptes : www.ccomptes.fr.
Ils sont diffusés par
La Documentation Française
.
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Délibéré
La Cour des comptes, délibérant en chambre du conseil en
formation ordinaire, a adopté le présent rapport intitulé
La Poste : une
transformation à accélérer.
Le rapport a été arrêté au vu du projet communiqué au préalable
aux administrations et aux organismes concernés et des réponses
adressées en retour à la Cour.
Les réponses sont publiées à la suite du rapport. Elles engagent la
seule responsabilité de leurs auteurs.
Ont participé au délibéré : M. Migaud, Premier président,
MM. Durrleman, Briet, Mme Ratte, MM. Vachia, Paul, Duchadeuil,
Piolé, Mme Moati, présidents de chambre, MM. Bertrand, Levy,
Mme Froment-Meurice, M. Lefas, présidents de chambre maintenus en
activité, M. Cazala, Mme Morell, MM. de Gaulle, Uguen, Sépulchre,
Mousson,
Guéroult,
Migus,
Rousselot,
Laboureix,
de
Nicolay,
Mme Dardayrol, MM. Delaporte, Brunner, Jamet, Senhaji, Rolland,
Appia,
Lallement,
Schwartz,
Fialon,
Mme
Latournarie-Willems,
conseillers maîtres, MM. Delbourg, Blanchard-Dignac, conseillers
maîtres en service extraordinaire.
Ont été entendus :
‐
en sa présentation, M. Briet, président de la chambre chargée des
travaux sur lesquels le rapport est fondé et de la préparation du projet de
rapport ;
‐
en son rapport, M. Paul, rapporteur général, rapporteur du projet
devant la chambre du conseil, assisté de M. Ory-Lavollée, conseiller
maître, M. Bakhouche, conseiller référendaire, M. Justum, auditeur et
Mme Grivel, rapporteure extérieure, rapporteurs devant la chambre
chargée de préparer le rapport, et de Mme Monique Saliou, conseillère
maître, contre-rapporteur devant cette même chambre ;
‐
en
ses
conclusions,
sans
avoir
pris
part
au
délibéré,
M. Johanet, Procureur général, accompagné de M. Kruger, premier
avocat général.
M. Filippini, secrétaire général, assurait le secrétariat de la
chambre du conseil.
Fait à la Cour, le 6 décembre 2016.
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COUR DES COMPTES
8
Le projet de rapport soumis à la chambre du conseil a été préparé,
puis délibéré le 29 septembre 2016, par la première chambre, présidée par
M. Briet, président de chambre, et composée de Mmes Morell, Saliou,
Bouygard et M. Chouvet, conseillers maîtres, ainsi que, en tant que
rapporteurs,
M.
Ory-Lavollée,
conseiller
maître,
M. Bakhouche,
conseiller référendaire, M. Justum, auditeur et Mme Grivel, rapporteure
extérieure, et en tant que contre-rapporteur, Mme Monique Saliou,
conseillère maître.
Le projet de rapport a été examiné et approuvé, le 14 octobre 2016,
par le comité du rapport public et des programmes de la Cour des
comptes, composé de M. Migaud, Premier président, MM. Durrleman,
Briet, Mme Ratte, MM. Vachia, Paul, rapporteur général du comité,
Duchadeuil, Piolé, Mme Moati, présidents de chambre, et M. Johanet,
procureur général, entendu en ses avis.
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Introduction
Institution dont les bases ont été posées par Louis XI au milieu du
XV
e
siècle afin d’acheminer les dépêches royales, La Poste ne se réduit
toutefois plus à l’activité postale. Fort de ses 253 464 salariés
1
, le groupe,
deuxième employeur public de France après l’État, exerce ses activités
dans des domaines aussi divers que la banque, le colis et l’express, la
téléphonie mobile ou les services à la personne, souvent par le biais de
ses nombreuses filiales, dont certaines évoluent sur les marchés étrangers.
La Poste bénéficie d’un capital de sympathie auprès des Français,
qui sont attachés aux missions de service public dont elle est chargée et à
son rôle dans leur vie quotidienne. Par deux réseaux majeurs, celui des
points de contact chargés de l’accueil du public (17 088 au total dont
9 149 bureaux de poste gérés en propre
2
) et celui de la distribution à
domicile, avec 72 199 facteurs
3
distribuant le courrier dans 39 millions de
boîtes aux lettres six jours par semaine, La Poste incarne une présence du
service public sur le territoire et tisse un lien social.
Mais elle est aussi une entreprise, confrontée à la chute continue
des volumes du courrier qui réduit de 500 M€ de chiffre d’affaires chaque
année, dans une activité où la plupart des coûts sont fixes. À ce défi
majeur s’ajoute la nécessité de réaliser sa transformation numérique, de
répondre à la croissance du e-commerce et, pour la banque, de faire face à
des taux d’intérêt durablement bas.
Troisième rapport public thématique publié sur La Poste, après
ceux de 2003 « Les comptes et la gestion de La Poste (1991-2002) »
4
et
de 2010 « La Poste : un service public face à un défi sans précédent, une
mutation nécessaire », celui-ci couvre les exercices 2010 à 2015
5
.
1
Effectif total en personnes physiques au 31 décembre 2015.
2
Avril 2016.
3
Effectifs permanents.
4
Cour des comptes,
Rapport public thématique :
L
es comptes et la gestion de La
Poste
.
La
Documentation
française,
octobre
2003,
175
p. disponible
sur
www.ccomptes.fr
5
Cour des comptes,
Rapport public thématique : La Poste : un service public face à
un défi sans précédent, une mutation nécessaire
. La Documentation française, juillet
2010, 190 p., disponible sur www.ccomptes.fr
La Poste - décembre 2016
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COUR DES COMPTES
10
Une grande part du contenu du présent rapport bénéficie de
l’apport de différents contrôles réalisés par la Cour entre 2012 et 2015 :
« Les achats de La Poste », « La rémunération des cadres dirigeants »,
« Poste Immo et la politique immobilière », « Synaxio », « Les oeuvres
sociales », « La modernisation de l’Enseigne », « Les facteurs et la
distribution du courrier et des objets », « La Banque Postale », « La
réalisation des trajectoires financières associées aux plans stratégiques de
La Poste depuis 2008 », « Le colis en France » et « Les projets
concourant à la transformation numérique de La Poste »
6
. Leurs constats
et observations ont été enrichis par des travaux complémentaires :
actualisation de données, questionnaires sur des sujets particuliers,
entretiens. Enfin, lors de deux tables rondes, des représentants des
associations de consommateurs et des responsables syndicaux de La Poste
ont pu exprimer leurs points de vue sur l’entreprise.
Les faits, les observations et les recommandations qui suivent
reposent sur quatre idées directrices : La Poste a su évoluer et se montrer
résistante ; des fragilités persistent toutefois ; l’existence de risques
exogènes et les incertitudes pesant sur ses relais de croissance soulèvent
des doutes sur la capacité de La Poste à réaliser les objectifs qu’elle s’est
fixés pour 2020 ; dès lors, elle doit, pour y faire face, accélérer le rythme
de sa transformation.
En d’autres termes, l’entreprise doit évoluer pour perdurer, pour
rester l’institution à laquelle les Français sont attachés. Au-delà
d’informer le public et d’encourager la direction et les actionnaires de La
Poste à des actions résolues, ce rapport a aussi pour ambition d’inviter les
pouvoirs publics et les citoyens à s’interroger sur les contraintes qu’il est
utile et raisonnable de lui imposer.
6
Certains des rapports finaux (rapports particuliers) issus de ces enquêtes ont été
publiés :
-
dirigeants-dans-le-Groupe-La-Poste
-
Groupe-La-Poste
-
culturelles-destinees-aux-agents-de-La-Poste
-
La-Poste
La Poste - décembre 2016
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Chapitre I
Une entreprise qui a évolué
Confrontée à un choc récessif sans précédent sur son métier
historique, La Poste s’est engagée dans une profonde transformation : de
sa forme juridique et de la composition de son capital ; de son modèle
économique ; de son offre de services. Grâce à ces évolutions et à
d’importants efforts de modernisation et de maîtrise des charges, La Poste
a résisté à une conjoncture défavorable.
I -
Des mutations statutaires et réglementaires
qui ont favorisé la capacité d’adaptation de
l’entreprise
A -
La transformation en société anonyme et l’arrivée
d’un nouvel actionnaire, facteurs de consolidation
1 -
Un passage en société anonyme en 2010
La Poste est un établissement public industriel et commercial
depuis le 1
er
janvier 1991
7
. En même temps que son statut juridique était
transformé, celui de ses agents connaissait également des évolutions
importantes puisqu’elle a cessé de recruter des fonctionnaires depuis cette
7
Conseil d'État, Assemblée, 13 novembre 1998, 188824 188826, publié au recueil
Lebon.
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COUR DES COMPTES
12
date et que, aujourd’hui, les salariés sous statut contractuel représentent
plus de la moitié des effectifs du groupe. Elle a continué à faire l’objet
d’ajustements successifs de son statut et de ses prérogatives au cours des
années 2000, qu’il s’agisse, par exemple, de la règlementation de ses
activités financières (2005), de la possibilité d’employer des contractuels
à durée indéterminée (2005) ou de celle de bénéficier d’allègements des
charges sociales (2006).
La loi 2010-123 du 9 février 2010 relative à l’entreprise publique
La Poste et aux activités postales a transformé le groupe La Poste en
société anonyme, forme juridique aujourd’hui majoritaire dans les postes
européennes. Elle a limité le champ des actionnaires possibles à l’État,
actionnaire majoritaire, aux autres personnes morales de droit public et
aux salariés de l’entreprise.
2 -
L’augmentation du capital et l’entrée de la Caisse des dépôts et
consignations
La possibilité de recourir à des apports de fonds propres issus
d’autres personnes morales de droit public que l’État est devenue
effective en avril 2011, avec l’entrée minoritaire de la Caisse des dépôts
et consignations au capital de La Poste
8
.
Cette ouverture du capital devait permettre de pourvoir aux besoins
d’investissement du groupe, supérieurs à ses capacités d’autofinancement,
tout en limitant la contribution de l’État.
À fin 2007, les ratios d’endettement de La Poste étaient jugés
dégradés, les charges financières représentant 30 % des flux de trésorerie.
Le recours à l’endettement était donc exclu pour couvrir ces besoins, qui
ne pouvaient par ailleurs pas être différés ou minorés, au risque
d’entraver l’essor des relais de croissance (colis express, banque) et de
dégrader la qualité de service et la productivité des activités historiques,
notamment le Courrier. Un recours à des augmentations de capital
circonscrites aux filiales Geopost et La Banque Postale a lui aussi été
écarté, en raison du risque de voir la participation de La Poste en partie
diluée au profit d’investisseurs extérieurs aux intérêts divergents de ceux
de l’entreprise.
8
La souscription des personnels, envisagée à hauteur de 2,99 % du capital, n’a pas été
mise en oeuvre. Elle a fait l’objet d’un vote défavorable des organisations syndicales
lors du conseil d’administration du 8 mars 2012.
La Poste - décembre 2016
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UNE ENTREPRISE QUI A ÉVOLUÉ
13
L’ouverture du capital de La Poste s’est donc effectuée, pour un
montant de 2,7 Md€
9
. L’État a souscrit un montant total de 1,2 Md€ et la
Caisse des dépôts et consignations 1,5 Md€. La part du capital détenu par
la Caisse des dépôts correspond à 26,32 % du capital. L’entrée au capital
de la Caisse des dépôts a conduit à la nomination de trois de ses
représentants au conseil d’administration de La Poste. Un pacte
d’actionnaires d’une durée de 20 ans, renouvelable une fois pour une
période de 10 ans, a été signé avec l’État.
B -
Une organisation de groupe avec de multiples
filiales, reflet de sa diversification concurrentielle
et internationale
1 -
Une structuration par « métiers » puis par « branches »
La Poste a abordé les années 2010 avec une organisation peu
distincte de celle d’un groupe à filiales opérationnelles autonomes. Cette
organisation était issue de deux choix majeurs datant de la première
moitié des années 2000 : l’autonomisation des branches d’activités et la
filialisation.
L’organisation de La Poste maison-mère en « métiers » (appelée
« métiérisation » à La Poste), c’est-à-dire la déconcentration du pilotage
opérationnel et des fonctions de soutien au sein de quatre familles
historiques d’activité (Courrier, Colis-Express, Services financiers et
Enseigne), s’était effectuée en 2004-2005.
Elle perdure en grande partie aujourd’hui dans l’organisation par
cinq branches, arrêtée depuis avril 2014
10
, qui s’est toutefois traduite par
le transfert au sein d’une même branche des métiers « courrier » et
« colis » et par la création d’une branche consacrée aux activités
numériques, auparavant dépendantes de chaque « métier ». Chaque
9
Les besoins de financement minimaux du groupe avaient été estimés à 6,3 Md€ sur
trois ans (2009-2012) par la commission préparatoire, cette somme couvrant les
besoins de dépenses en capital des différents métiers en matière de modernisation, de
croissance organique et d’opérations de croissance externe.
10
Cinq branches reprenant tout ou partie des activités des « métiers » ont été créées :
« Services-Courrier-Colis », « GeoPost », « Banque postale », « Réseau La Poste » et
enfin, « Numérique ».
La Poste - décembre 2016
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COUR DES COMPTES
14
branche est dirigée par un directeur général adjoint du groupe, président
des entités et holdings de sociétés associées à ces métiers.
Cette organisation s’est doublée de l’accroissement du nombre et
de la contribution financière des filiales, le résultat d’exploitation
consolidé du groupe provenant aujourd’hui majoritairement de ces
dernières. Des filiales restent néanmoins rattachées à la maison mère,
notamment deux filiales de gestion : Poste Immo pour les actifs
immobiliers
et
Véhiposte
SAS
pour
les
flottes
de
véhicules.
L’organigramme en 2012 est présenté en annexe n° 2.
L’organigramme est désormais le suivant :
Organigramme n° 1 :
Source : La Poste, retraitements Cour des comptes
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UNE ENTREPRISE QUI A ÉVOLUÉ
15
2 -
Le choix d’une gestion décentralisée
Dans l’organisation qui vient d’être décrite, les « métiers » ou les
branches, et bien sûr les filiales, fonctionnent comme des entreprises au
sein de l’entreprise, dotées des fonctions horizontales nécessaires à leurs
missions, élaborant des comptes et recevant des objectifs de chiffre
d’affaires et de résultat d’exploitation. Ces principes d’autonomie et de
décentralisation ont été également appliqués aux unités élémentaires
telles que les directions territoriales, les établissements du Courrier ou les
« terrains » du Réseau La Poste.
Par exemple, en ce qui concerne le Courrier, environ 600
établissements (centres de tri et plateformes de préparation et de
distribution
du
courrier
principalement)
reçoivent
des
objectifs
opérationnels et commerciaux, sont dotés d’une équipe de direction,
définissent leur organisation du travail et ont reçu délégation pour
accomplir une part croissante des actes de gestion du personnel et pour
conduire le dialogue social, notamment dans le cadre des instances de
représentation du personnel
11
.
Ce mode d’organisation a participé à l’évolution de La Poste d’une
administration vers une entreprise. Des projets aussi importants pour son
image et pour son avenir que la refonte de l’accueil du public dans les
bureaux de poste, l’octroi de crédits aux collectivités territoriales par La
Banque Postale ou l’organisation du travail des facteurs en équipe ont pris
la forme de projets internes aux métiers, mis en oeuvre dans les entités
élémentaires selon des modalités qu’elles ont adaptées à leurs
particularités. La capacité de l’entreprise à s’adapter à la baisse des
volumes du courrier et à un environnement concurrentiel a bénéficié de ce
choix décentralisateur.
En outre, ce transfert de l’organisation du travail et du dialogue
social dans les établissements a raréfié les mouvements sociaux à
l’échelle de l’entreprise : dans leur grande majorité, les conflits qui
subsistent correspondent à des enjeux locaux et se résolvent par des
négociations locales.
11
Ces établissements étaient encore au nombre de 1 200 avant la mise en oeuvre le
plan « 2015 Réinventons le courrier » (2010-2015).
La Poste - décembre 2016
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COUR DES COMPTES
16
C -
Des missions de service public réaffirmées
Les pouvoirs publics ont confié quatre missions de service public à
La Poste
12
:
-
le service universel postal (transport et distribution du courrier et des
petits objets) dont La Poste a été désigné prestataire pour une durée
de quinze ans à la suite de l’ouverture complète à la concurrence du
marché postal au 1
er
janvier 2011
13
;
-
le service public du transport et de la distribution de la presse ;
-
la contribution à l’aménagement et au développement du territoire,
mise en oeuvre par le biais du réseau de points de contact de La
Poste ;
-
et, enfin, l’accessibilité bancaire, formellement introduite par la loi
du 4 août 2008 de modernisation de l’économie, qui impose à La
Banque Postale d’ouvrir un livret A à toute personne qui en fait la
demande et de permettre la réalisation gratuite d’un certain nombre
d’opérations sur ces livrets (dépôts et retraits de faibles montants,
versement de prestations sociales, etc.).
La loi du 9 février 2010 a renforcé ces quatre missions en les
inscrivant explicitement dans la loi du 2 juillet 1990
14
, rappelant ainsi
qu’elles demeurent au coeur de l’identité et de l’activité de La Poste.
Consacrant une pratique instituée dans les faits depuis 2008, la loi
de 2010 a en outre prévu la signature d’un contrat d’entreprise entre l’État
et La Poste fixant les objectifs des missions de service public, en
particulier les objectifs de qualité de service du service universel postal
15
.
Des engagements spécifiques à La Banque Postale, en matière de lutte
contre le surendettement ou de promotion du micro-crédit, doivent
également y figurer. L’actuel contrat d’entreprise (2013-2017) contient
par ailleurs une liste d’« engagements citoyens » de La Poste dans des
domaines divers, tels que le développement du numérique (accessibilité
des services postaux sur l’internet, développement du commerce en ligne,
12
Voir fiches en annexe n° 3.
13
Directive du 20 février 2008 modifiant la directive 97/67/CE en ce qui concerne
l’achèvement du marché intérieur des services postaux de la Communauté.
14
Loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste
et des télécommunications.
15
Voir
infra
chapitre II, II- A.
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UNE ENTREPRISE QUI A ÉVOLUÉ
17
coffre-fort
électronique,
etc.),
le
développement
durable
ou
la
responsabilité sociale de l’entreprise.
Enfin,
les
contraintes
pesant
sur
La
Poste
en
matière
d’aménagement du territoire ont également été renforcées par la loi de
2010 qui a figé son maillage territorial en lui imposant de maintenir un
nombre minimal de 17 000 points de contact sur le territoire national.
Dans l’objectif de rechercher « la meilleure efficacité économique
et sociale » (article 6 de la loi de 1990 modifiée), la possibilité est
néanmoins laissée à l’entreprise d’adapter son réseau en transformant les
bureaux de poste en points de contact gérés par le biais « de partenariats
locaux publics ou privés ». Les conditions de mise en oeuvre de ces
dispositions sont définies par le contrat de présence postale territoriale
(contrat pluriannuel signé entre l’État, La Poste et l’association la plus
représentative des maires) ; ce contrat fixe à la fois les lignes directrices
de gestion du Fonds postal national de péréquation territoriale, qui
finance la mission d’aménagement du territoire par le biais d’un
allègement de fiscalité locale dont bénéficie La Poste, et les exigences en
termes de services ou d’horaires auxquelles doivent répondre les points
de contact du réseau.
Les collectivités territoriales jouent donc un rôle majeur tant dans
le financement que dans la mise en oeuvre de la mission d’aménagement
du territoire
16
. Ainsi, le contrat 2014-2016 prévoit, par exemple, la
possibilité pour les maires de s’opposer à la transformation d’un bureau
de poste en point de contact en partenariat.
Par ailleurs, la loi a confié à l’Autorité de régulation des
communications électroniques et des postes (ARCEP) la mission
d’évaluer chaque année le surcoût résultant du maillage territorial imposé
par la loi.
16
La mise en oeuvre du contrat et des financements associés repose sur les
commissions départementales de présence postale territoriale et est suivie par
l’observatoire national de la présence postale territoriale, instances composées
principalement d’élus.
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COUR DES COMPTES
18
II -
Des efforts de modernisation
A -
Des réorganisations industrielles importantes au
sein de la branche Courrier
À partir de 2004 et jusqu’en 2013
17
, le plan Cap Qualité Courrier a
réorganisé sur l’ensemble du territoire l’outil de collecte, de tri et
d’acheminement du courrier ; il s’est traduit par la fermeture des anciens
centres de tri, par la constitution d’une infrastructure informatique aboutie
(cf. encadré ci-dessous) et par la mise en place de 51 plateformes
industrielles du courrier
18
, pour un coût d’au minimum 3,1 Md€ ; la
baisse des volumes du courrier a toutefois conduit à réduire l’ampleur de
cette infrastructure, une première fois lors de son déploiement, puis au
cours des dernières années par la fermeture de plusieurs plateformes de tri
ou leur transformation en plateformes de distribution.
L’amélioration de l’informatique industrielle du courrier
Installé en 2008 grâce notamment au concours des sociétés Synaxio
et
Capgemini,
l’actuel logiciel
informatique
de
tri
du
courrier
(TAE - traitement automatisé de l’enveloppe) enregistre chaque pli entrant
dans les plateformes de tri et donne aux machines les instructions
nécessaires à son acheminement. Il traite 90 millions de plis chaque jour et
peut gérer plus de 2500 objets par seconde.
La Poste a tardé à tirer tout le parti possible de cet outil.
L’exploitation des données de l’application (statistiques et analyse de
production, recherche de fraude, traitement des réclamations, etc.)
n’est qu’en cours de montée en charge. Notamment, il peut être relevé que
TAE ne gère pas encore la réexpédition automatique des plis.
À partir de 2006, La Poste a mis en place un programme
d’optimisation de l’organisation interne de la distribution (« Facteurs
d’avenir »), afin de restructurer la chaîne hiérarchique des facteurs et de
17
Celui-ci devait s’achever en 2010 mais La Poste a repoussé son achèvement de trois
ans.
18
À la fin de 2015, le réseau comptait 38 plateformes industrielles et d’autres
transformations étaient en cours.
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UNE ENTREPRISE QUI A ÉVOLUÉ
19
gérer les effectifs en fonction du trafic moyen plutôt qu’en fonction des
pics de trafic. Un accord collectif conclu en 2007 avait prévu dans ce
cadre de promouvoir 37 000 facteurs en quatre ans. Ces promotions
représentent un coût estimé par la Cour à 40 M€ par an, soit 2,4 % de la
masse salariale des facteurs. La Poste a dépassé cet engagement et promu
40 000 facteurs, pour un surcoût estimé à 5 M€ par an. Enfin, à partir de
2010, le plan « Réinventons le courrier » (2010-2015) a transformé la
vision du facteur, qui n’est plus le bout de la chaîne logistique mais, grâce
au smartphone « Facteo »
19
, un acteur des services de proximité. Cette
modernisation, certes tangible et bienvenue, peut néanmoins être jugée
tardive en regard des technologies disponibles
20
, et elle reste incomplète
(cf. chapitre II – II B).
B -
Des progrès en matière de qualité et d’adaptation du
réseau des bureaux de poste
Depuis 2008, les bureaux de poste ont été repensés afin
d’améliorer l’accueil et la qualité du service proposé aux clients.
Parallèlement, afin de concilier l’exigence d’une présence postale
territoriale et la nécessaire diminution des coûts du réseau, La Poste a
multiplié les points de contact en partenariat, qui représentent désormais
plus de 47 % des points de contact postaux.
Dans le cadre du plan « Cap Relations clients 2012 », La Poste a
engagé la transformation de son modèle d’accueil de la clientèle avec la
suppression progressive des lignes de guichet caractéristiques des
bureaux de poste, remplacées par des îlots et des espaces en libre accès
dotés d’automates pour les services bancaires, postaux et de téléphonie
mobile. Les clients sont orientés en priorité vers ces automates, ce qui
repousse dans un second temps, voire supprime, le passage au guichet.
Près de 58 % des flux clients du Réseau s’opèrent désormais dans cette
19
Le smartphone Facteo a été lancé sur les modèles des smartphones commercialisés
en 2011 dans le but de réaliser les actes courants de la distribution (bordereau, remises
contre signature, procurations, ventes, etc.) et de mettre en oeuvre les nouveaux
services du facteur (photographies géolocalisées, preuves de passage à domicile,
ouverture des boîtes à lettres connectées, etc.). Le coût par smartphone s’élève à
130 €. En 2015, 90 000 facteurs et agents de La Poste étaient équipés de Facteo.
20
Des terminaux permettant le recueil d’informations sur le terrain existaient dès la
fin des années quatre-vingt-dix et l’on peut noter qu’un Français sur deux était déjà
équipé d’un smartphone quand le plan a été lancé.
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20
configuration, qui devrait encore évoluer avec l’équipement des
« guichetiers » en terminaux de type tablettes (dénommés « Smarteo »)
leur permettant de venir à la rencontre des clients pour réaliser diverses
transactions, notamment postales (dépôt de courrier ou de colis, retrait de
colis ou de recommandés)
21
.
Le développement du parc d’automates courrier et bancaires
(+ 45 % entre 2008 et 2015), a engendré une croissance significative du
nombre d’opérations réalisées par ce moyen, qui dépasse depuis 2013
celui des opérations au guichet (lequel a diminué de plus de 25 % sur la
même période). Le temps d’accès moyen aux services s’est en
conséquence amélioré : il s’établit à moins de quatre minutes, tous
bureaux et toutes opérations confondus. La Poste fait désormais état d’un
taux de satisfaction, mesuré à la sortie des bureaux de poste, de 95 %
22
.
Parallèlement à ces évolutions, la recomposition du réseau de La
Poste au bénéfice des points de contact en partenariat constitue l’un des
principaux leviers de modernisation du réseau. Elle permet en effet d’en
accroître l’efficience en réduisant le coût unitaire de chaque opération,
dans un contexte de diminution structurelle de la fréquentation des
bureaux de poste (baisse des volumes de courrier échangé, utilisation
croissante de services dématérialisés, etc.). Les partenariats constituent en
outre le moyen de préserver une offre de services dans les zones rurales
peu denses où le maintien d’un bureau de poste ne se justifie pas au
regard du niveau d’activité ; en zone urbaine, ils permettent de proposer
une offre de services complémentaire à celle des bureaux de poste sur des
plages horaires élargies, grâce aux commerces de proximité.
Les points de contact postaux en partenariat
Les partenariats consistent à confier la prestation des services les
plus usuels de La Poste à des tiers publics (agences postales communales
ou intercommunales : APC/API), en contrepartie d’une indemnité
compensatrice, ou privés (relais-poste commerçants : RPC) en échange
d’une rémunération (forfait et commission sur les activités).
21
457 bureaux Smarteo étaient déployés fin mai 2016 et un total de 1 000 sont
attendus pour la fin de l’année. Le projet concerne aussi les points de contact en
partenariat public sous forme de tablettes en libre-service pour les clients (1837
agences équipées en mai 2016, 4409 attendues au total pour fin 2016) et les relais
poste commerçants, sous forme de smartphones (1373 relais équipés en mai 2016 et
2065 attendues au total pour fin 2016).
22
Enquête de 2013.
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21
Les APC/API offrent la très grande majorité des services d’un
bureau de poste en matière de courrier (affranchissement, recommandés,
garde du courrier, etc.) et de colis (vente d’emballages, dépôt, remise, etc.)
ainsi qu’une offre de dépannage financier (retrait d’espèces jusqu’à 350 €
par semaine sur CCP ou Livret A, paiement de mandat, dans la limite de
350 € par opération). Les relais poste commerçants offrent des prestations
postales ainsi que des services financiers simples (retrait d’espèces pour
les titulaires de CCP et de Livret A jusqu’à 150 € par semaine).
Fin septembre 2016, La Poste comptait 17 116 points de contact
(chiffre stable depuis de nombreuses années), dont 8 978 bureaux de
poste gérés en propre et 8 138 points de contact gérés par le biais de
partenariats, soit 5 850 agences postales communales ou intercommunales
(APC/API) et 2 288 relais-poste commerçants (RPC)
23
. Si le rythme des
transformations de bureaux de poste s’est ralenti entre 2011 et 2014, en
raison de diverses circonstances (décision de geler les réorganisations en
2012 à l’occasion du « Grand Dialogue »
24
, calendrier électoral des
années 2012 et 2014 peu propice à des négociations avec les collectivités
territoriales, etc.), celui-ci a repris depuis 2015 avec une hausse de 4,4 %
du nombre de points de contact en partenariat (contre 1,9 % en 2013 et
2014).
Graphique n° 1 :
évolution du nombre de bureaux de poste et de
points de contact en partenariat
Source : La Poste, retraitements Cour des comptes
23
Il s’agit d’un réseau très dense : s’agissant des commerces, le nombre de points de
contact de La Poste n’est aujourd’hui dépassé que par celui des boulangeries.
24
Voir chapitre II – I.
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22
L’Observatoire national de la présence postale territoriale, chargé
de suivre la mise en oeuvre des partenariats, met en évidence un niveau
élevé de satisfaction des usagers et des élus locaux à leur égard. La
dernière enquête menée en mars 2016 montre ainsi que les points en
partenariat donnent satisfaction aussi bien aux clients (93 % satisfaits)
qu’aux élus (95 %) et aux commerçants partenaires ou agents
communaux responsables d’une agence postale (97 %).
L’évolution des réseaux des opérateurs postaux en Europe
L’évolution des réseaux de points de contacts postaux en Europe
fait l’objet de stratégies très différentes. Ainsi, parmi les grands pays
comparables à la France en termes de population et de superficie, l’Italie et
l’Espagne ont fait le choix de conserver leurs réseaux traditionnels de
bureaux de poste : début 2014, Poste Italiane disposait d’un peu plus de
13 000 points de contact postaux, dont l’intégralité était détenue en propre
à l’exception d’une dizaine de points en partenariat (installés par exemple
au sein de commerces) ; Correos, en Espagne, dispose d’un peu moins de
3 000 points de contact postaux intégralement détenus en propre sous la
forme de bureaux de poste.
A contrario,
l’Allemagne et le Royaume-Uni ont progressivement
remplacé les bureaux de poste traditionnels par des points de contact
externalisés : alors
qu’en 2003, l’Allemagne comptait encore 5 200
bureaux de poste détenus en propre par Deutsche Post sur 12 800 points de
contact postaux, il n’existe plus aujourd’hui sur le territoire allemand que
des points de contact en partenariat commerçants ; au Royaume-Uni, où
l’on dénombre environ 11 900 points de contact postaux, moins de 350
sont détenus en propre par Royal Mail, les autres étant des points en
partenariat commerçants.
C -
Une méthode de conduite du changement qui a
porté ses fruits
La modernisation du groupe La Poste s’est manifestée aussi par
une amélioration de sa gestion interne. Les enquêtes de la Cour ont relevé
plusieurs exemples où une professionnalisation des méthodes avait été
accomplie, engendrant parfois des économies. Ainsi, en matière d’achats,
la création d’une direction des achats du groupe ainsi que des efforts de
formation et de méthode ont amélioré la traçabilité et la rigueur des
procédures d’achat et incité à l’économie ; en matière de rémunération de
l’encadrement supérieur et dirigeant, les progrès dans l’évaluation
La Poste - décembre 2016
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23
individuelle et la généralisation d’une part variable liée à la réalisation
d’objectifs ont rendu les rémunérations plus lisibles, même si des progrès
restent à accomplir pour que les sommes attribuées soient plus
différenciées selon les performances.
Parmi ces progrès, la diffusion d’une méthode de conduite des
transformations constitue un point notable. Cette méthode prévoit
notamment une phase de diagnostic et d’étude approfondis, l’élaboration
de scénarios alternatifs, ainsi que la consultation à chaque étape du
personnel et de ses représentants, qui inclut un vote sur les scénarios. Elle
guide les responsables, qui ont reçu une formation adaptée, à
accompagner les réorganisations.
Ainsi, lorsqu’il s’agit de redessiner le parcours des tournées d’une
équipe de facteurs, le diagnostic inclut le calcul du temps de tournée qui
résulte pour chacun d’eux du volume et de la composition réels des objets
à livrer, et les scénarios correspondent à différentes hypothèses, portant
par exemple sur le découpage géographique des tournées et sur les
horaires de travail. Le responsable du projet dispose d’une « boîte à
outils » de modèles d’organisation – dont beaucoup ont été mis en place
par des postes étrangères – et la concertation avec le personnel prend de
multiples formes : réunions d’information, questionnaires, entretiens…
qui complètent les consultations réglementaires du comité d’hygiène et de
sécurité de l’établissement.
Cette méthode, si elle requiert des délais longs, a permis, jusqu’à
présent,
de
prévenir
et
de
circonscrire
les
conflits
liés
aux
transformations.
III -
Un modèle économique qui a résisté
à la crise
L’augmentation de capital de La Poste, conjuguée aux efforts de
modernisation de la gestion, a permis à La Poste de résister à une
conjoncture défavorable et de consolider sa structure financière.
Si, à l’instar de la plupart des opérateurs européens, elle a
également eu recours à des hausses tarifaires sensibles pour compenser la
baisse des volumes de correspondance, les efforts de La Poste ont porté
sur le développement des activités en croissance, principalement au sein
de La Banque Postale et de GeoPost, et sur la maîtrise des charges des
activités en déclin, qui ont des coûts fixes élevés.
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24
A -
Une structure financière consolidée
1 -
L’augmentation de capital a permis d’améliorer
la structure financière du groupe
La Cour des comptes avait relevé dans son précédent rapport
public thématique le niveau excessif de l’endettement de La Poste qui
avait représenté jusqu’à 2,3 fois les capitaux propres en 2006, avant de
redescendre à 1,4 fois en 2009.
La situation s’est nettement améliorée depuis. Les capitaux propres
consolidés ont plus que doublé sur la période, atteignant 10 Md€ fin 2015
contre 4,5 Md€ fin 2010. Cette augmentation résulte principalement de
l’augmentation de capital intervenue en 2011. Elle est aussi le fruit de la
stabilité des dividendes servis par La Poste à ses deux actionnaires
25
,
ceux-ci ayant laissé l’entreprise mettre en réserve la plus grande partie
des bénéfices dégagés par son activité.
25
Le dividende est passé de 25 à 35 % du résultat distribuable entre 2010 et 2013
(soit 136 M€ au titre des résultats 2010, 144 M€ au titre de 2011 et 171 M€ au titre de
2012). La trajectoire d’augmentation a ensuite été interrompue, les deux actionnaires
décidant de stabiliser le dividende en valeur absolue, à 171 M€ au titre des exercices
2013 à 2015 correspondant à un taux de distribution de 27 % en 2015. À titre de
comparaison, Deutsche Post DHL et Poste Italiane ont distribué respectivement 65 %
et 80 % de leur résultat net 2015.
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25
Tableau n° 1 :
évolution des principaux passifs non courants
du groupe La Poste (2010-2015)
26
En M€
2010
2011
2012
2013
2014
2015
Capital social
1 000
3 400
3 400
3 800
3 800
3 800
Prime d'émission
0
700
700
900
900
900
Réserves
2 594
2 093
2 355
2 698
3 276
3 735
Résultat de l'exercice
part du groupe
550
478
479
627
513
636
Capitaux propres de
l'ensemble consolidé
4 483
6 786
7 535
8 516
9 358
10 015
Emprunts
obligataires et dettes
financières non
courants
5 870
5 941
6 085
6 043
6 120
5 968
Dette nette
4 804
4 544
3 460
3 778
4 005
3 657
Source : rapports annuels publiés du groupe La Poste
La stagnation de la dette brute autour de 6 Md€, cumulée à une
forte augmentation des fonds propres, s’est traduite par une amélioration
mécanique mais notable de la structure financière du groupe. La dette
nette a en effet diminué de 23,9 % sur la période 2010-2015, et le ratio
dette nette sur capitaux propres s’est nettement amélioré (division par
trois, à 0,38 en 2015). Cet assainissement de la structure financière était
indispensable, à la fois pour réduire le poids des charges financières dans
le compte de résultat de La Poste et pour redonner à celle-ci des marges
de manoeuvre en cas de difficultés opérationnelles imprévues. Il a permis
à La Poste de se rapprocher des ratios d’endettement des autres grandes
postes européennes, qui sont tous très faibles
27
.
L’analyse détaillée du bilan du groupe figure en annexe n° 6.
26
Les chiffres figurant dans ce tableau correspondent à ceux publiés par La Poste
dans ses comptes annuels au titre de l’exercice. Ils intègrent les changements de
méthode comptable intervenus au cours de l’exercice.
27
En 2015, le ratio dette / capitaux propres de Royal Mail s’établissait à 0,37 ; celui
de TNT à 0,1 et celui de Deutsche Post à 0,09.
La Poste - décembre 2016
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26
2 -
La rentabilité du groupe est stable et résiste à un contexte peu
favorable
Depuis 2010, La Poste a connu une croissance modeste mais
régulière de son chiffre d’affaires et une grande stabilité de sa rentabilité,
dans un contexte pourtant peu favorable à ses activités (baisse des
volumes de courrier et accélération de la transformation numérique de
l’économie, baisse de la fréquentation des bureaux de poste, baisse
continue et durable des taux d’intérêt).
Tableau n° 2 :
compte de résultat simplifié du groupe La Poste
(2010-2015)
28
En M€
2010
2011
2012
2013
2014
2015
Produits opérationnels
20 939
21 341
21 658
22 084
22 163
23 045
Chiffre d’affaires des
activités commerciales
15 747
16 140
16 441
16 562
16 503
17 315
Produit net bancaire
5 192
5 201
5 217
5 522
5 660
5 730
Charges
opérationnelles nettes
20 155
20 671
20 842
21 314
21 462
22 174
Achats et autres charges
externes
6 210
6 747
7 108
7 362
7 448
8 078
Charges de personnel
12 701
12 509
12 599
12 524
12 556
12 731
Impôts et taxes
320
219
235
236
235
293
Amortissements,
provisions et pertes de
valeur
1 052
1 356
1 175
1 306
1 363
1 282
Résultat d’exploitation
784
670
816
770
719
875
Résultat financier
-233
-230
-284
-223
-198
-154
Résultat avant impôt
551
440
532
548
521
721
Impôt sur le résultat
-211
-143
-231
-127
-182
-253
Quote-part des sociétés
MEE
197
169
180
215
200
207
Résultat net de
l’ensemble consolidé
537
467
481
635
539
675
Source : rapports annuels publiés du groupe La Poste. Un changement de méthode comptable a
eu lieu à compter de 2014, qui conduit à intégrer directement dans le résultat d’exploitation la
quote-part de résultat des sociétés sous contrôle conjoint.
28
Les chiffres figurant dans ce tableau correspondent à ceux publiés par La Poste
dans ses comptes annuels au titre de l’exercice. Ils intègrent les changements de
méthode comptable intervenus au cours de l’exercice.
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UNE ENTREPRISE QUI A ÉVOLUÉ
27
Ainsi, ses produits opérationnels augmentent de 1,9 % par an en
moyenne, tirés par la croissance du produit net bancaire (PNB) de La
Banque Postale (LBP) (+ 2,0 % par an) et par le chiffre d’affaires du
colis-express (+ 8,4 % par an). En outre, les revenus du courrier n’ont
diminué qu’assez lentement (- 2,7 % en moyenne annuelle), l’accélération
des hausses tarifaires ayant permis de compenser, d’abord partiellement
(2010-2013), puis intégralement (2014-2015), la forte baisse des volumes
de courrier.
Toutefois, les charges opérationnelles ont progressé au même
rythme que les produits (+ 1,9 %), sous l’effet en particulier des autres
achats et charges externes (+ 5,4 %) et des amortissements et provisions
(+ 4,0 %), tandis que les charges de personnel sont stables depuis 2010.
L’augmentation de ces deux postes s’explique par :
-
le fort développement de l’activité colis-express, porté par
l’explosion du e-commerce et par la poursuite d’une politique de
croissance externe, qui a conduit GeoPost à accroître le recours à la
sous-traitance
29
;
-
la forte augmentation des immobilisations brutes, de 3,3 Md€ entre
2010 et 2015 (soit + 24 %), qui conduit mécaniquement à une
augmentation des amortissements. C’est un mouvement que les
concurrents de La Poste ont connu également
30
.
Quant à la stabilisation des charges de personnel, elle mérite d’être
soulignée et s’inscrit en rupture par rapport aux périodes précédentes. Elle
fait l’objet d’analyses approfondies
infra
(C).
Le résultat d’exploitation augmente sensiblement au même rythme
moyen annuel que les produits opérationnels (+ 2,2 %), ce qui permet de
stabiliser la marge d’exploitation
31
à 3,8 %.
La Poste a donc plutôt bien résisté au contexte économique
défavorable qu’elle a dû affronter. Les résultats du premier semestre 2016
ont d’ailleurs confirmé cette tendance
32
. La marge d’exploitation du
29
Le modèle économique du colis-express repose en effet, pour une très large part,
sur le recours à des sous-traitants, à l’exception de la gestion des hubs dont GeoPost
est propriétaire.
30
À titre d’exemple, le poste « amortissements et provisions » des comptes consolidés
de Deutsche Post – DHL a augmenté en moyenne de 5,1 % par an entre 2010 et 2015.
31
Définie comme le rapport entre le résultat d’exploitation et les produits
opérationnels.
32
Augmentation du chiffre d’affaires de 2,7 % et du résultat d’exploitation de 38,3 %
(+11,2 % hors éléments exceptionnels).
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28
groupe est dans une position intermédiaire, meilleure que celle des postes
italiennes ou britanniques, légèrement en deçà de celle de Deutsche Post
mais plus de deux fois inférieure à celle de ses homologues néerlandaise
et suisse (cf. annexe n° 7).
B -
Des relais de croissance qui ont bien fonctionné
La résistance des performances économiques de La Poste
s’explique pour l’essentiel par les résultats de ses relais de croissance
« historiques » que sont la banque et le colis. D’autres tentatives de
diversification ont été engagées - à l’image de La Poste Mobile
33
- mais
demeurent plus faiblement contributrices.
1 -
La Banque Postale a trouvé sa place dans le paysage bancaire
français
Le produit net bancaire de La Banque Postale (LBP) a augmenté
en moyenne de 2,0 % par an depuis 2009. Cette performance est
supérieure à celle de ses principaux concurrents
34
mais résume une
séquence de performances annuelles plus heurtées, étagées entre + 0,2 %
et + 5,7 %.
Le résultat d’exploitation (REX) de la banque a crû plus fortement
que le produit net bancaire (+ 5,7 % en moyenne depuis 2009), ce qui
témoigne de la capacité du groupe à croître tout en renforçant sa
rentabilité. La rentabilité des capitaux propres de LBP
35
est ainsi
supérieure à la moyenne du secteur.
33
Le résultat net de cette co-entreprise est encore négatif en 2015 (- 9 M€) malgré un
dynamisme commercial certain (augmentation du chiffre d’affaires de 14 % en 2015,
soit près de 200 M€ au total).
34
Le PNB des six premiers groupes bancaires français a augmenté de 1,6 % en
moyenne annuelle entre 2010 et 2014.
35
Mesurée par le ratio résultat net part du groupe/capitaux propres. Elle s’établissait
en 2015 à 8,4 % pour LBP contre 7,0 % en moyenne pour les six premiers groupes
bancaires français (source : ACPR).
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29
Tableau n° 3 :
évolution des soldes intermédiaires de gestion
consolidés de La Banque Postale
2010
2011
2012
2013
2014
2015
Produit net bancaire
5 215
5 230
5 241
5 539
5 673
5 745
Frais de gestion
4 436
4 522
4 486
4 685
4 672
4 693
Coût du risque
60
318
152
154
163
181
REX
719
390
603
700
838
871
Quote-part CNP
195
160
176
200
199
207
Résultat avant impôt
917
545
792
909
1 036
1094
Résultat net
651
412
574
579
677
707
Source : documents de référence de LBP
Les bonnes performances enregistrées par LBP s’expliquent par sa
structure de bilan atypique, caractérisée par une abondance de liquidités
36
qui l’ont aidé à résister à la crise financière. LBP a su également faire
valoir plusieurs particularités, qui participent d’un positionnement
stratégique et marketing de différenciation : un réseau de proximité sans
équivalent, un ancrage dans le secteur public qui reste un gage de
confiance, le choix de la simplicité et de la transparence des produits, et
enfin une tarification compétitive
37
.
Le nombre de clients actifs
38
a progressé régulièrement, pour
atteindre 10,8 millions en 2015. Surtout, l’encours de prêts et créances sur
la clientèle a plus que doublé entre fin 2009 et fin 2015, passant de
33,1 Md€ à 73,6 Md€. Cette croissance est due, pour les deux tiers, à la
croissance des encours de prêts immobiliers qui sont passés de 32,0 à
54,2 Md€,
ce
qui
représente
une
croissance
significative
bien
qu’inférieure à celle observée entre 2006 et 2009. En revanche, LBP n’est
pas parvenu, à ce stade, à stabiliser sa part de marché dans les segments
du dépôt et de l’épargne, qui constituent pourtant le meilleur gage de
rentabilité et de viabilité à long terme. En particulier, LBP n’est pas
vraiment parvenue à renouveler sa clientèle dont l’âge moyen reste élevé,
36
Le ratio crédits/dépôts de LBP s’établit à 0,75 contre plus de 1 pour les six premiers
groupes français.
37
Il faut néanmoins relever que la part des services gratuits s’est fortement réduite
depuis 2010 ; en outre, la banque a annoncé une multiplication par deux des frais de
tenue de compte au 1
er
janvier 2017.
38
Définis comme les clients ayant une relation suivie avec la banque dans les
domaines de l’argent au quotidien (comptes courants, moyens de paiement), de
l’équipement (crédit immobilier, prévoyance) ou de la gestion de patrimoine.
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30
alors qu’elle ne dispose plus de l’atout que représentait son statut
privilégié dans la distribution du livret A.
La croissance du résultat a surtout été entraînée par l’extension
progressive de la gamme de produits, développée selon un modèle
original.
LBP a en effet cherché à offrir de nouveaux produits à ses clients
sans procéder à des acquisitions de taille significative, préférant le recours
à des partenariats structurés sous la forme de co-entreprises dans
lesquelles LBP est l’actionnaire majoritaire du fait de la valorisation de
ses apports en nature (valorisation du réseau des bureaux de poste) ; le
partenaire, minoritaire, apporte du numéraire, du savoir-faire sur la
gamme de produits concernés, ainsi que des outils informatiques et
statistiques. L’ensemble des activités de diversification portées par les
filiales de LBP représente aujourd’hui près du quart du REX de la banque
alors que leur contribution était négligeable en 2009.
Parmi celles-ci, le crédit à la consommation joue un rôle central.
Lancé en mars 2010 en partenariat avec la Société générale, il contribue
positivement à la rentabilité de la LBP avec un résultat d’exploitation de
73 M€ en 2015 et une rentabilité
39
deux fois supérieure à celle du groupe.
Les résultats du partenariat avec Groupama dans le domaine de
l’assurance-dommage sont en revanche bien plus mitigés
40
.
De son côté, le crédit aux personnes morales se développe très
progressivement depuis 2011, sans recours à un partenaire extérieur. Les
encours sont partagés en parts presque égales entre le prêt aux entreprises
et associations (5,3 Md€ d’encours en 2015) et le prêt aux collectivités
locales (4,5 Md€). Sur ce dernier marché, LBP est devenue, à la suite de
la défaillance de Dexia, le deuxième prêteur du marché ; cette activité est
toutefois réalisée en grande partie pour le compte du groupe Société de
financement
local
(SFIL)/Caisse
française
de
financement
local
(CAFFIL).
Enfin, le développement de LBP a bénéficié du soutien de son
actionnaire La Poste, qui a conforté les fonds propres de la banque dans
un contexte de durcissement constant des exigences prudentielles. Ainsi,
sur les 2,7 Md€ injectés par l’État et la Caisse des dépôts, 860 M€ ont été
39
Mesurée par le ratio REX/PNB.
40
Les deux actionnaires ont dû recapitaliser la co-entreprise à hauteur de 24 M€ en
2014 et de 25,5 M€ en 2015, pour éponger les pertes cumulées (77 M€ entre 2010 et
2014). Elle demeure déficitaire en 2015 (-12 M€).
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31
consacrés, en septembre 2011, à la recapitalisation de la banque ; deux
autres augmentations de capital ont été réalisées par apport en nature en
2013 et 2014 ; enfin, La Poste a souscrit à une émission de titres hybrides
« Tier One » de sa filiale bancaire à hauteur de 800 M€ en 2013. Au total,
les fonds propres prudentiels de LBP ont plus que doublé en cinq ans,
passant de près de 4 Md€ fin 2009 à près de 9 Md€ fin 2015.
Cela a permis à LBP de satisfaire aux exigences posées, à partir de
2012, par les accords de Bâle II-5 puis, à partir de 2013, par les accords
de Bâle III. Le ratio CET 1 (« common equity Tier One »
41
) s’établit à
13,2 % en 2015, contre une exigence posée par le régulateur de 9,3% au
1
er
janvier 2016.
LBP a aujourd’hui trouvé sa place dans le paysage bancaire, avec
un PNB qui la place au 3
ème
rang des banques françaises
42
.
2 -
L’activité de colis-express a su profiter de l’expansion du
e-commerce en Europe
Le chiffre d’affaires total de l’ensemble constitué par GeoPost et le
pôle Colis a augmenté de 8,4 % par an en moyenne entre 2010 et 2015. Il
dépasse 7 Md€ en 2015. Ces performances font de La Poste le 2
ème
acteur
européen du secteur derrière Deutsche Post DHL, avec 10,7 % de part de
marché, et même le premier pour ce qui concerne le marché des
transports routiers.
La dynamique est toutefois très différenciée entre les performances
de GeoPost – qui opère principalement
43
à l’international – et celles de
Colissimo sur le territoire français comme le montre le graphique
ci-après.
41
Cf.
glossaire.
42
LBP est la 3
ème
banque de détail française au regard du PNB réalisé en France. Elle
n’est en revanche que le 6
ème
groupe bancaire français (derrière BNP Paribas, Crédit
Agricole, Société générale, BPCE et le Crédit mutuel) du fait de son absence
d’activité significative à l’international.
43
GeoPost possède également Chronopost, Pickup, Stuart et Exapaq (devenu DPD en
2015) qui sont principalement actives sur le marché français.
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32
Graphique n° 2 :
évolution du chiffre d'affaires du colis-express entre
2010 et 2015
Source : Cour des comptes à partir des comptes consolidés du groupe La Poste
a)
De très bonnes performances à l’international, portées par
GeoPost
GeoPost a fait preuve d’une bonne capacité de modernisation et de
développement, comme le montre le graphique ci-après
Graphique n° 3 :
évolution des revenus et de la rentabilité de
GeoPost entre 2005 et 2015
Source : Cour des comptes à partir des données de GeoPost
1 000
2 000
3 000
4 000
5 000
6 000
7 000
8 000
2010
2011
2012
2013
2014
2015
en M€
Zone
Total
Zone
"Etranger"
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33
Depuis 2005, le chiffre d’affaires a été multiplié par 2,2, et le REX
par 1,8. Sur la période 2010-2015, le chiffre d’affaires a augmenté de
65 % et le REX de 22 %. Cela traduit une croissance de l’activité plus
forte qu’entre 2005 et 2010 mais une rentabilité opérationnelle un peu
plus faible, principalement du fait d’une déformation de l’activité au
profit des flux liés au e-commerce (dits
business to consumer
ou BtoC
44
).
Surtout, le REX de 2014 et 2015 a été lourdement pénalisé par les
provisions passées dans le cadre d’un contentieux devant l’Autorité de la
concurrence française pour entente sur les prix avec d’autres acteurs du
marché de l’express
45
.
Il faut mettre au crédit de GeoPost d’avoir su capter les flux de e-
commerce, en adaptant sa chaîne logistique et sa politique commerciale.
Cela n’allait pas de soi : certains acteurs ont « raté le coche », à l’instar de
l’Italie dont l’opérateur historique
Poste Italiane
– quasiment absent du
segment du BtoC – ne représente plus que 4,7 % du marché italien du
colis-express.
Surtout, GeoPost a su capter ces nouveaux volumes sans dégrader
trop fortement sa rentabilité. Elle y est parvenue en massifiant le
traitement de ses flux et en multipliant les nouveaux services aux clients
finaux, afin de conquérir et conserver les e-commerçants : déploiement de
l’outil
Predict
permettant aux particuliers de suivre en temps réel la
livraison de leur colis ; création d’une offre de retrait des colis en
consignes ou en relais commerçants (
Pick up
).
Au total, GeoPost occupe une position intermédiaire par rapport à
ses concurrents européens, comme le montre le tableau ci-dessous : TNT
a vu sa rentabilité reculer fortement et s’apprête à devenir la branche
européenne de Fedex ; DHL en revanche surclasse nettement GeoPost, à
la fois au regard du chiffre d’affaires (13,7 Md€) et de la rentabilité
(10,2 % de marge opérationnelle, soit plus du double de celle de GeoPost
44
Les flux BtoC sont structurellement moins rentables que les flux inter-entreprises
(dits
business to business
ou BtoB) puisqu’ils obligent à desservir un nombre
beaucoup plus élevé de points de livraison pour des prix plus bas, et avec des clients
moins nombreux et plus puissants que les clients BtoB qui poussent les prix à la
baisse. Ces flux représentaient environ 30 % des flux totaux du marché européen en
2015.
45
45 M€ en 2014 et 99 M€ en 2015. Exapaq-DPD et Chronopost ont été condamnés à
des amendes correspondant aux montants provisionnés, suite à une décision de
l’Autorité de la concurrence n° 15-D-19 du 15 décembre 2015 portant sur des
pratiques antérieures à 2010. Retraité du montant de cette provision, le REX a en fait
augmenté de 67 % entre 2010 et 2015.
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34
alors que ce dernier avait une marge opérationnelle supérieure à son
concurrent allemand en 2010).
Graphique n° 4 :
rentabilité des principaux opérateurs européens de
colis-express entre 2009 et 2015
Source : rapports annuels
b)
Des résultats plus mitigés sur le marché français du colis
Le chiffre d’affaires de l’ensemble GeoPost/Colissimo pour la
France a crû de 19,6 % entre 2010 et 2015, soit une croissance moyenne
annuelle de 3,6 %. Le groupe y est resté en position dominante (avec
51 % de part de marché), alors que d’autres opérateurs historiques sont
passés sous les 20 % de part de marché comme en Italie ou en Espagne.
La Poste a cependant subi la concurrence d’opérateurs intégrés
dans de grands groupes de distribution, qui ont su proposer des prix
moins élevés et une offre plus adaptée aux demandes des e-commerçants.
Pour y faire face, La Poste a fait le choix d’être présente sur
l’ensemble des segments de marché du colis, au risque de recoupements
entre les activités de Chronopost et de Colissimo (ex-ColiPoste). Filiale
de GeoPost initialement positionnée sur les seuls flux inter-entreprises,
Chronopost a développé avec succès des offres « premium » destinées
2
4
6
8
10
12
2010
2011
2012
2013
2014
2015
EBIT/CA (en %)
GeoPost
GeoPost hors
France
DHL
TNT
GLS
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UNE ENTREPRISE QUI A ÉVOLUÉ
35
aux e-commerçants
46
. De son côté, Colissimo, positionné sur des offres
BtoC
plus standard mais moins coûteuses, a lancé des offres « J+1 » très
proches de celles de Chronopost pour enrayer l’érosion de sa part de
marché.
C -
Une maîtrise des charges engagée
LBP et GeoPost ne pouvant compenser à eux seuls les pertes
d’activité résultant de la diminution de 6 à 7 % par an des volumes du
courrier
et
de
la
réduction
de
la
production
des
guichets
(- 31 % entre 2010 et 2015), la maîtrise des coûts s’est imposée comme
un objectif primordial à partir de 2008.
1 -
La baisse des effectifs au sein du Courrier et du Réseau
L’objectif de maîtrise des charges a porté en premier lieu sur les
branches Courrier et Réseau qui, confrontées à des pertes importantes de
productivité résultant, compte tenu de coûts fixes en majorité, de la baisse
de leur activité, ont dû mettre en oeuvre des économies reposant sur
des réorganisations (cf.
supra
II – A et B).
Plus généralement, le levier des effectifs a été privilégié par La
Poste dès le plan stratégique 2008-2012 pour maîtriser sa masse salariale,
en fixant un objectif de taux de remplacement des départs inférieur à 1.
En exécution, les effectifs ont même décru plus vite que programmé en
début de période (- 3,4 % en 2009 contre - 2,9 % dans la trajectoire
financière 2008-2010), amenant ainsi le taux de remplacement à un point
bas de 20 % en 2010.
Ainsi, jusqu’en 2014, l’économie due à l’effet de noria (c’est-à-
dire au remplacement des départs par des salariés en début de carrière,
moins rémunérés) a été importante. Néanmoins elle n’a pas suffi à
absorber totalement les mesures générales de revalorisation salariale
(1,4 % en moyenne annuelle, alors que le point d’indice a été gelé dans la
fonction publique de 2010 à 2016) et un glissement vieillesse-technicité
(GVT) positif. Comme le montre le graphique n° 5, les économies
engendrées par les baisses d’effectifs et par l’effet de noria ont été en
46
Sa marge opérationnelle (REX/CA) s’établit à 5,6 % en 2015 contre 2,5 % en 2010.
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36
majorité absorbées par la hausse des salaires (mesures générales et GVT),
avec un taux de recyclage de 65 %, qui est important
47
.
Graphique n° 5 :
facteurs d’évolution des dépenses de personnel
(moyenne annuelle 2008-2014, M€)
Source : estimations Cour des comptes (corrigées des variations de provisions), données La
Poste.
La branche Courrier (60 % des effectifs du groupe) a fourni l’effort
de réduction des effectifs le plus important, représentant 64 % de la baisse
totale des effectifs entre 2008 et 2014.
Le Réseau est l’autre contributeur net à cette réduction des effectifs
et des charges. Deuxième « employeur » au sein du groupe après le
courrier, le Réseau a vu ses charges de personnel baisser de 8,3 % entre
2010 et 2015
48
. Cette évolution résulte en grande partie de la baisse des
effectifs dans les fonctions de soutien, qui s’est traduite par des gains de
47
Dans sa
communication à la commission des finances du Sénat sur La masse
salariale de l’État, enjeux et leviers
, juillet 2015, 150 p., disponible sur
www.ccomptes.fr, la Cour a estimé que, dans la fonction publique, ce taux de
recyclage (taux de « retour catégoriel » visant, en théorie, à rétrocéder aux agents la
moitié des économies générées par le non remplacement d’un départ en retraite sur
deux dans le cadre de la révision générale des politiques publiques) avait atteint 61 %
pour l’ensemble des ministères entre 2008 et 2012.
48
Ce calcul tient compte des évolutions de périmètre du Réseau, qui ont eu lieu en
2014 et 2015 (impact de la mise en oeuvre du « management commercial unique »,
intégration dans le périmètre du Réseau de la Direction du support et de la
maintenance).
‐165
‐190
+130
+100
‐125
Masse
salariale N
Baisse des
effectifs
Effet de noria
Mesures
générales
GVT
Masse
salariale N+1
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37
productivité de plus de 6 %, et, dans une moindre mesure, du
développement des partenariats. Ont également contribué à cette
réduction de la masse salariale l’évolution favorable de la répartition
fonctionnaires/salariés
49
, l’application de mesures d’âge permettant de
faire sortir des agents du service actif
50
ainsi que le crédit d’impôt
compétitivité emploi (CICE) à compter de 2013.
Ainsi, bien que les charges de personnel soient restée stables tout
au long de la période, de même que leur part dans la valeur ajoutée de
l’entreprise (85 %), deux phases distinctes peuvent être observées : une
première, jusqu’en 2012, où les efforts internes de réduction des effectifs
sont patents, et une deuxième, à compter de 2013, au cours de laquelle le
CICE apporte une contribution significative à l’objectif de maîtrise des
charges.
2 -
L’apport du CICE depuis 2013
En début de période, la maîtrise des charges a été plus forte en
exécution que dans les prévisions (la hausse a été limitée à 0,6 % par an
en 2009-2010 au lieu des 2 % prévus) afin de répondre à la dégradation
des perspectives. En fin de période, en revanche, La Poste s’appuie
essentiellement sur le crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE) pour
remplir ses objectifs.
La Poste, première entreprise bénéficiaire du CICE
Le crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE), instauré par le
projet de loi de finances rectificative pour 2012, est un dispositif visant à
diminuer les charges de personnel des entreprises en leur accordant une
réduction d’impôt équivalente à 6 % de la masse salariale (hors salaires
supérieurs à 2,5 fois le SMIC).
49
Départ en retraite de fonctionnaires situés en haut des grilles indiciaires, remplacés
par des salariés jeunes en bas des grilles salariales.
50
Temps partiel aménagé senior (TPAS) : voir
infra
.
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COUR DES COMPTES
38
Bien que conçu à la suite du rapport remis par M. Louis Gallois au
Premier ministre en novembre 2012 appelant à instituer un « pacte pour la
compétitivité de l’industrie française » afin de soutenir les entreprises
intervenant sur des marchés très concurrentiels et renforcer leurs capacités
exportatrices, le dispositif du CICE n’a pas été ciblé sur un secteur
économique ou un type d’entreprises particulier. Il a eu d’emblée pour
vocation, non seulement, de renforcer la compétitivité mais également de
développer l’emploi
51
: toutes les entreprises employant des salariés et
relevant d’un régime réel d’imposition sur les bénéfices peuvent ainsi
bénéficier du CICE.
Du fait de sa structure salariale et du nombre de ses agents, La
Poste est aujourd’hui le premier bénéficiaire en montant absolu du CICE.
Une fois l’effet du CICE neutralisé, les charges de personnel
s’inscrivent en légère hausse de 2,3 % entre 2012 et 2015 (cf. graphique).
Graphique n° 6 :
évolution des charges de personnel du groupe
La Poste (2009-2015, base 100 en 2009)
Source : La Poste, retraitements Cour des Comptes
Le montant de la créance au titre du CICE a été estimé par La
Poste à 340 M€ par an en moyenne à partir de 2013 dans son plan
stratégique 2014-2020, soit un tiers du REX
52
: en l’absence du CICE, le
51
Le rapport Gallois proposait de cibler le dispositif sur le secteur industriel avec une
réduction de charges s’étendant aux salaires compris jusqu’à 3,5 fois le SMIC.
52
La hausse annoncée du taux du CICE à 7 % devrait en outre se traduire par 53 M€
supplémentaires pour La Poste à compter de 2017 (estimations Cour des comptes).
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UNE ENTREPRISE QUI A ÉVOLUÉ
39
REX ne retrouverait son niveau de 2012 qu’en 2017 (cf. graphique
ci-après).
Graphique n° 7 :
part du CICE dans la formation du résultat
Source : Cour des comptes, données La Poste, prévisions du plan stratégique 2014-2020
Enfin, les efforts de La Poste en matière de maîtrise des charges
sont à relativiser au regard des évolutions constatées chez les autres
opérateurs européens.
La maîtrise des dépenses de personnel chez les autres opérateurs
postaux européens
Les dépenses de personnel sont en recul sensible chez plusieurs
opérateurs étrangers ces dernières années, dont les Pays-Bas et l’Italie
(- 8 points dans le total des coûts d’exploitation entre 2010 et 2014, contre
- 4 points pour La Poste)
53
.
Face aux difficultés qu’elle rencontre, La Poste n’est pas la seule à
répondre par une baisse de ses effectifs : dans le secteur du courrier, celle
observée en France entre 2010 et 2014 (- 1,8 %) a été comparable à celle
du Royaume-Uni (- 2 %), mais inférieure à celle de l’Italie (- 3 %) ou de la
Belgique (- 4,3 %) et surtout des Pays-Bas (- 7,2 %) ou du Danemark
(- 6,8 %), confrontés à une baisse très marquée des volumes.
53
La Poste, « Benchmark 2014 des opérateurs postaux européens ».
0
400
800
1200
1600
2000
2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020
CICE
REX hors CICE
M€
Prévisions
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COUR DES COMPTES
40
En termes de modèle social, certains ont fait le choix de
l’externalisation (Allemagne, Pays-Bas), ce qui limite les frais de
personnels (dans les deux cas, ils représentent 33 % des coûts
d’exploitation en 2014 contre 59 % pour le groupe La Poste) et donne une
plus grande flexibilité. Un autre vecteur de flexibilité est le temps partiel,
qui
représente
75 %
des
nouvelles
embauches
chez
l’opérateur
britannique.
______________________ CONCLUSION ______________________
Entamée dans les années 1990, la mue de La Poste s’est poursuivie
durant les années récentes. Elle a concerné aussi bien son statut
juridique, que la modernisation de l’outil industriel, celle des méthodes
de gestion ou le développement de nouvelles activités.
Parmi celles-ci, les deux principales, qui représentent désormais
près de la moitié des produits du groupe, sont La Banque Postale, qui
s’est imposée peu à peu comme une banque à part entière, et GeoPost,
devenu le deuxième acteur du colis-express sur le territoire européen.
Par ailleurs, parallèlement à la chute des volumes de courrier et
de fréquentation des bureaux de poste, La Poste a su diminuer
significativement ses effectifs, même si cela a été en transformant en
hausses de salaires près des deux tiers de l’économie réalisée.
Le professionnalisme dans la gestion des transformations,
notamment la place donnée au dialogue, ont contribué à ces évolutions.
La résistance du groupe à la crise est le fruit de ces
transformations et de son attention à maîtriser les charges, mais ses
résultats financiers bénéficient aussi du crédit d’impôt compétitivité
emploi.
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Chapitre II
Des fragilités persistantes
En dépit de la résistance dont elle a su faire preuve dans la crise
économique et la période de croissance atone qui a suivi, La Poste reste
aujourd’hui confrontée à un certain nombre de fragilités internes,
auxquelles s’ajoutent des incertitudes concernant la mise en oeuvre de ses
missions de service public, dont le coût est croissant.
I -
Un rythme de transformation fortement
dépendant des relations sociales
La préservation d’un climat social apaisé est nécessaire à la
compréhension et l’acceptation par les personnels de La Poste des
réformes indispensables à mener au sein du groupe. Cet objectif doit donc
conduire à porter une attention toujours plus grande aux problèmes qui se
posent en matière de dialogue social et de conditions de travail.
A -
Une capacité de changement marquée
par les spécificités du dialogue social
La Poste a développé un grand nombre d’instances de dialogue
social. Elles irriguent l’ensemble des implantations fonctionnelles et
géographiques de l’entreprise. Ce maillage dense – la maison mère
compte par exemple 753 comités d’hygiène et de sécurité au travail
(CHSCT) – s’explique par une forte volonté de prévenir les conflits
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42
sociaux qui, par le passé, ont émaillé l’histoire de La Poste, et par une
attention réelle portée à la recherche de compromis entre la position de
l’entreprise et celle des représentants du personnel.
Sur des enjeux souvent transversaux et de portée nationale, ce
canevas « pacificateur » peut néanmoins rendre la conduite du dialogue
social complexe et contribuer à ralentir la mise en oeuvre de réformes.
Des exemples ont notamment pu être recensés dans la branche Courrier
lors de réorganisations de centres de distribution
54
. S’y ajoute en 2012 la
séquence inaugurée par la commission du Grand Dialogue qui, si elle a
permis de rétablir la confiance entre la direction et les personnels, s’est
néanmoins parfois traduite par un retard dans la réalisation de certaines
réformes, que La Poste doit rattraper aujourd’hui.
La « commission du Grand Dialogue » de la Poste
Au début de 2012, deux suicides de salariés sur leur lieu de travail
ont catalysé une contestation par les principaux syndicats de La Poste du
rythme et de l’intensité des changements internes. La réponse de la
direction de La Poste a été d’instaurer un « Grand Dialogue » au niveau
national et local, de créer un « Médiateur de la Vie au Travail », membre
du comité exécutif du groupe, d’enregistrer l’absence de consensus sur le
projet visant à rendre les salariés actionnaires, et de prendre diverses
mesures visant à améliorer les processus de gestion du personnel et les
conditions de vie.
Le « Grand Dialogue » a été piloté par une commission mêlant
dirigeants de l’entreprise, représentants syndicaux et personnalités
extérieures, et présidée par M. Jean Kaspar, ancien dirigeant de la CFDT.
Elle a reçu en mars 2012 la mission « d’analyser la situation de
l’entreprise et de ses salariés en matière de vie au travail ». Après de
nombreuses auditions, elle a remis en septembre 2012 un rapport, rendu
public. Analysant de manière approfondie les mutations de l’entreprise,
ses modes de management et sa gestion du personnel, il met en évidence
les tensions qui ont pu naître des changements fréquents et accélérés de
l’organisation, ainsi que de la coexistence des valeurs traditionnelles du
service public avec celles d’une entreprise devant réaliser des objectifs
commerciaux.
54
Par exemple dans le cas de la réorganisation de la distribution dans le 1
er
et le 2
e
arrondissement de Paris, en 2014. Cf.
Cour des comptes, Rapport public annuel 2016,
Tome 1
. Les facteurs face au défi de la baisse du courrier : des mutations à accélérer,
page 409. La Documentation française, février 2016, 696 p., disponible sur
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DES FRAGILITÉS PERSISTANTES
43
Ce rapport a conduit La Poste à décider une « pause » dans les
réorganisations et les réductions d’effectifs, et une augmentation de 10 000
à 15 000 du nombre de recrutements entre 2012 et 2014. Une des
conséquences de ces mesures a été d’interrompre les transformations de
bureaux de poste en d’autres formes de point de contact.
Le conseil d’administration de La Poste comprend, sur ses vingt-
et-un membres, sept membres élus tous les cinq ans par les agents de La
Poste et les salariés de ses filiales françaises
55
. Cinq organisations
syndicales sont représentées au comité technique national : bénéficiant
chacune de trois ou quatre sièges
56
, aucun accord ne peut être obtenu avec
l’aval d’un seul syndicat.
Le système de « cogestion » des oeuvres sociales entre le conseil
d’orientation et de gestion des activités sociales (COGAS), qui tient lieu
de comité d’entreprise, et la DRH du groupe démontre également la
complexité des organisations mises en place par La Poste pour préserver
certains équilibres internes et locaux et la nécessité qu’il y a à les
rationaliser.
Le COGAS fonctionne en effet sur le principe d’une gouvernance
partagée, reposant sur la recherche du consensus
entre La Poste et les
organisations syndicales
57
. Il s’appuie en outre sur un réseau de
commissions territoriales censées favoriser une gestion consensuelle de
l’action sociale au niveau local, mais dont la répartition n’est plus en
55
La répartition des sièges est la suivante : 2 sièges pour la CGT (contre 3 en 2010),
2 pour la CFDT (contre 1), 2 pour SUD, 1 pour FO. Lors des dernières élections en
novembre 2015, le taux de participation s’est élevé à 62,11 %. La CGT a obtenu
26,47 % des voix, la CFDT 22,56 %, SUD 20,11 %, FO 19,46 %, CGC 6,46 % et la
CFTC 4,95 %.
56
La répartition des sièges est la suivante : 4 sièges pour la CGT (contre 4 en 2011),
3 pour la CFDT (contre 3), 3 pour SUD, 3 pour FO et 3 pour CFTC CGC UNSA. Lors
des dernières élections en décembre 2014, le taux de participation s’est élevé à
75,63 %. La CGT a obtenu 26,54 % des voix, la CFDT 22,51 %, SUD 20,17 %, FO
19,97 %, FTC CGC UNSA 9,71 % et CNT 1,10 %.
57
Depuis l’origine, en effet, les deux vice-présidents du COGAS sont issus de FO et
de la CFDT, qui bénéficient de l’appui historique de la majorité des associations, alors
que la CGT et SUD, organisations arrivant en tête aux élections professionnelles (du
moins jusqu’en décembre 2014, date à laquelle la CFDT a dépassé SUD) sont
minoritaires au sein du collège.
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44
adéquation avec les implantations géographiques de La Poste et qui
s’avère lourd et coûteux à animer pour des résultats assez faibles
58
.
Le rattachement à la DRH du groupe de la direction nationale de
l’action sociale (service transversal mis à disposition du COGAS par La
Poste) depuis le 1
er
mars 2016, conformément aux recommandations
formulées par la Cour dans son rapport particulier sur « Les activités
sociales et culturelles destinées aux agents de La Poste » (juillet 2015)
59
,
et l’annonce de la mise en place d’une organisation territoriale plus
resserrée d’ici 2017 doivent conduire à une rationalisation de la gestion
des oeuvres sociales.
B -
Un symptôme préoccupant aux causes multiples : la
persistance de niveaux élevés d’absentéisme
La Cour a déjà eu l’occasion de relever un taux d’absentéisme
particulièrement élevé à La Poste, notamment chez les facteurs (7,6 %
contre 4,5 % en moyenne pour les ouvriers du secteur privé en 2014
60
) et
en augmentation depuis 2010 (7 %). Outre ses effets désorganisateurs, cet
absentéisme est coûteux pour l’entreprise : il représente en effet une perte
de 243 M€ par an
61
pour la distribution, montant est supérieur à celui du
coût des véhicules utilisés par l’entreprise. Un jour d’absence en moins
par an et par facteur permettrait une économie estimée à 20 M€.
L’absentéisme des facteurs s’est encore aggravé en 2015 : les absences
représentaient 30 jours par facteur en moyenne en 2015 contre 26 jours en
2013.
Plus largement, on relève à l’échelle du groupe tout entier le
maintien de niveaux élevés d’absentéisme au regard d’autres secteurs
d’activité, ainsi que leur aggravation ces dernières années (+8 % de jours
58
Plus d’un million d’euros par an (estimation Cour des comptes), alors que la plupart
des commissions territoriales se contentent de valider les options retenues par les
instances nationales.
59
Cour des comptes, Rapport particulier,
les activités sociales et culturelles destinées
aux agents de La Poste, exercices 2009-2013
, 92 p., disponible sur www.ccomptes.fr
60
Cour des comptes,
Rapport public annuel 2016, Tome 1
. Les facteurs face au défi
de la baisse du courrier : des mutations à accélérer, page 409. La Documentation
française, février 2016, 696 p., disponible sur www.ccomptes.fr
61
D’après les données de comptabilité analytique de 2013. L’absentéisme oblige à des
remplacements, parfois inopinés, avec paiement d’heures supplémentaires ou de main
d’oeuvre non permanente (CDD, intérim).
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DES FRAGILITÉS PERSISTANTES
45
d’absence entre 2013 et 2015), notamment pour les absences pour
maladie (6,14 % en 2013, 6,37 % en 2014, 6,65 % en 2015). Ces
problèmes touchent aussi une partie de l’encadrement, avec par exemple
une progression de 9 % du nombre de jours d’absence par an et par agent
entre 2013 et 2015 pour les cadres et cadres supérieurs du groupe,
progression globale principalement issue de l’augmentation des absences
pour maladie (+11 %).
L’absentéisme recouvre des situations et des causes hétérogènes,
souvent complexes. Dans un contexte de réorganisations fréquentes
du travail, des paramètres individuels peuvent venir s’ajouter aux causes
légales susceptibles de justifier une absence en droit du travail. Plusieurs
cadres locaux ont par exemple indiqué qu’ils considéraient que certains
cas d'absentéisme individuel pouvaient s’apparenter à une nouvelle forme
de conflictualité, des arrêts de travail volontaires se substituant aux
actions collectives autrefois plus fréquentes, comme la grève.
Dans ce contexte, La Poste a choisi d’agir sur la prévention des
causes professionnelles de l’absentéisme, issues de la pénibilité des
postes de travail, et d’ériger en priorité l’amélioration des conditions de
travail
62
. Elle a ainsi simplifié les tâches des agents de la distribution, afin
d’éviter pathologies et accidents. En revanche, l’identification des cas
abusifs d’arrêts de travail est encore peu développée. Elle relève d’une
démarche managériale de proximité.
La responsabilisation des cadres dans le traitement préventif des
causes d’absentéisme, mais également dans la mise en place d’une
réponse, au besoin disciplinaire lorsque les abus sont manifestes, est un
chantier que La Poste souhaite engager à l’avenir.
En raison des situations de malaise qui peuvent en être la cause et
de ses coûts, l’absentéisme demande une attention particulière, et, au vu
des faibles résultats atteints, de repenser les stratégies jusqu’ici mises en
place par l’entreprise.
62
La Poste a engagé en octobre 2016 une négociation nationale avec les organisations
syndicales sur les métiers et les conditions de travail des facteurs et des encadrants au
sein des activités services-courrier-colis.
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46
II -
Une stratégie commerciale et numérique
insuffisamment réactive
Si La Poste a su gérer le passage d’une situation monopolistique à
un contexte de concurrence sur plusieurs segments de marché, grâce à sa
tradition de service aux usagers, elle éprouve aujourd’hui des difficultés à
entreprendre une véritable démarche commerciale vis-à-vis de ses clients,
de même qu’elle connaît un retard important dans le développement de sa
stratégie numérique.
A -
Des marges de progression importantes
dans la qualité des services rendus
Dans le cadre de ses missions de service public, La Poste doit
répondre à un certain nombre d’exigences en termes de qualité du service
universel postal et de présence postale territoriale. Ces critères, définis
par la puissance publique, apparaissent toutefois insuffisants pour garantir
la fourniture d’un service de qualité, alors que, dans le même temps, sur
les segments de marché très concurrentiels où La Poste intervient
(transport et distribution de colis hors service universel postal), ses
produits doivent répondre à des standards de qualité de plus en plus
élevés afin de résister aux offres concurrentes.
1 -
Des faiblesses dans la distribution du courrier et des colis
La Poste est soumise, pour la distribution de courrier et de colis
entrant dans le cadre du service universel postal, à des objectifs de
« qualité de service » portant sur la rapidité et la fiabilité de ses
principales prestations
63
. Ces objectifs sont fixés par arrêté du ministre
chargé des postes et leur réalisation contrôlée par l’Autorité de régulation
des communications électroniques et des postes (ARCEP)
64
.
63
Lettre prioritaire, Lettre recommandée, avis de réception, Lettre verte, réexpédition,
courrier transfrontière communautaire, Colissimo guichet.
64
L'ARCEP émet un avis sur les objectifs arrêtés par le ministre, veille au respect de
ces objectifs ainsi qu'à la publication et à la fiabilité des mesures correspondantes.
Elle peut prononcer une sanction en cas de méconnaissance par La Poste de ses
obligations au titre du service universel.
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DES FRAGILITÉS PERSISTANTES
47
a)
Courrier : une qualité de la relation client à améliorer, au-delà des
objectifs réglementaires
La fixation par voie réglementaire d’objectifs de qualité de service
constitue un mode de régulation rigide en apparence. En réalité, la
possibilité de modifier rétrospectivement les objectifs prévus, comme cela
a été le cas pour la Lettre Verte en 2015
65
, témoigne d’une relative
souplesse dans son application.
Cette flexibilité renvoie à une difficulté inhérente à la régulation
des activités postales. S’il est impératif de garantir un niveau satisfaisant
de qualité de service pour les usagers, il est difficile en revanche d’exiger
une progression continue de ce niveau de qualité dans un contexte de
diminution croissante des volumes. Ainsi, s’agissant de la Lettre
Prioritaire, un taux de distribution en J+1 à 85 % semble constituer un
objectif raisonnable pour La Poste : la fixation d’objectifs plus ambitieux
se traduiraient en effet par une augmentation des coûts pour l’entreprise
sans rapport avec le prix acquitté par le consommateur pour un timbre
rouge (recours au transport aérien, travail de nuit supplémentaire, etc.)
66
.
En revanche, le suivi de la qualité de certains produits et
prestations pourrait être amélioré, par exemple en élargissant la gamme et
le type d’indicateurs utilisés et en les renouvelant régulièrement, dès
l’atteinte des objectifs (le maintien des résultats acquis ne constituant pas
en soi une cible). Si l’ARCEP a fait évoluer en 2014 et 2015 le panel des
indicateurs faisant l’objet d’un suivi afin d’y inclure un certain nombre de
prestations dont les associations de consommateurs dénonçaient la
moindre qualité
67
, le tableau de bord annuel du service universel postal
peine à refléter la variété des préoccupations de la clientèle. L’opinion
des clients de La Poste sur la qualité du service qui leur est rendu dépend
en effet de multiples facteurs, parfois subjectifs et difficiles à quantifier.
La question des « tournées à découvert » (non distribution du courrier
65
Alors que l’arrêté du 22 octobre 2014 avait fixé, pour la Lettre Verte, un objectif
correspondant à un taux de 94 % de distribution en « J+2 », les résultats 2014 publiés
par La Poste en avril 2015 ont mis en évidence un taux de distribution de 93,2 %
seulement. La Poste ayant en outre indiqué qu’elle ne serait pas en mesure de tenir les
objectifs fixés à 95 % pour 2015, l’arrêté du 14 octobre 2015 a substitué à l’objectif
initialement fixé une trajectoire plus conforme aux performances effectivement
réalisées par La Poste soit 93,5 % pour 2015, 93,75 % pour 2016 et 94 % pour 2017.
66
Or, aux termes de l’article L. 1 du code des postes et communications électroniques,
les prix des services proposés dans le cadre du service universel postal « sont orientés
sur les coûts ».
67
Services de réexpédition du courrier, lettres recommandées et accusés de réception.
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48
pour cause d’absence et de non remplacement du facteur titulaire)
constitue à cet égard un motif récurrent de mécontentement : si elle est
statistiquement très limitée (0,75 % en moyenne en 2015), elle demeure
un point irritant pour les clients de La Poste. Il en va de même de la
gestion des lettres recommandées : les plaintes d’usagers affirmant se
trouver à leur domicile au moment où le facteur a déposé dans leur boîte
aux lettres un avis de passage, et ayant dû, de ce fait, se rendre au bureau
de poste et parfois y faire la queue, constituent un problème lancinant,
que n’a pas véritablement résolu l’introduction d’une « seconde
présentation ». Les tournées s’effectuant hors contrôle hiérarchique, le
bon acheminement des objets suivis dépend en effet de la conscience
professionnelle de chaque facteur
68
.
En 2015 et 2016, certaines de ces lacunes ont été en partie
comblées avec, par exemple, l’introduction de la possibilité de choisir une
nouvelle livraison de lettre recommandée par le biais d’un compte client,
mais les volumes de réclamations portant sur les services courrier ne
diminuent pas. En outre, ces réclamations donnent rarement lieu à
indemnisation (16,9 %) en raison du faible nombre d’engagements
contractuels pris par La Poste
69
.
b)
Colis : des exigences accrues des e-commerçants
et des consommateurs
Le suivi réglementaire de la qualité du colis couvre un champ très
limité de l’activité postale, dans la mesure où les envois réalisés dans le
cadre du service universel postal ne concernent que les échanges entre
particuliers opérés depuis les guichets. Ce suivi repose sur un unique
indicateur portant sur le respect du délai de livraison en J+2 des
Colissimo Guichet, qui atteint aujourd’hui 91,6 % (réalisé 2015), au-delà
68
Ne pas sonner pour une lettre recommandée raccourcit la durée de la tournée, et
donc, abrège la journée de travail, alors que, parallèlement, le taux d’instance n’est en
général pas suivi individuellement et que chaque établissement du courrier ne se voit
pas assigner d’objectifs propres de délais de distribution.
69
La Poste ne s’engage pas formellement sur le délai d’acheminement du courrier, le
délai de livraison en « J+1 » d’une lettre prioritaire étant simplement indicatif, de
même que le « J+2 » pour la lettre recommandée qui, contrairement à une idée
répandue chez les consommateurs, ne comporte pas de garantie de rapidité. Par
ailleurs, pour ouvrir droit à indemnisation en cas de perte, il faut évidemment prouver
le dépôt à La Poste, ce qui est impossible dans le cas d’une lettre simple.
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DES FRAGILITÉS PERSISTANTES
49
des objectifs fixés par le ministre (89,5 %), objectifs que l’ARCEP juge
toutefois peu ambitieux
70
.
Ces chiffres contrastent avec les éléments avancés par les
associations
de
défense
des
consommateurs,
et
notamment
par
l’association UFC-Que choisir qui a réalisé à l’automne 2015 une étude
sur la base de tests d’envois croisés de colis entre bénévoles de
l’association
71
. Cette étude a mis en évidence des taux de distribution très
en-deçà des résultats nationaux affichés par La Poste, n’atteignant que
88,1 % en « J+2 » (97,8 % en « J+3 »). Ces mêmes associations
considèrent également que le faible taux de colis perdus ou volés (5 pour
10 000 en 2015) ne reflète pas la réalité des dommages subis par les
consommateurs, notamment les particuliers qui, à la différence des
entreprises, ne déposent pas systématiquement de réclamations
72
.
Pour l’ensemble de l’activité de son pôle Colis (donc au-delà du
seul segment du service universel postal), La Poste se fixe, en revanche,
en interne, des objectifs de performance plus élevés (taux de distribution
en « J+2 » attendu à 93,5 % en 2015 et réalisé à hauteur de 94,3 %). Ces
statistiques nationales masquent néanmoins des niveaux de qualité
hétérogènes selon les territoires
73
et les périodes de l’année
74
.
Ainsi, depuis quelques années, le niveau de qualité des prestations
colis de La Poste semble avoir atteint un palier alors que, dans le même
temps, l’exigence des clients et des consommateurs finaux augmente. Les
e-commerçants ne se contentent plus d’un suivi global calculé en
moyenne sur l’ensemble du territoire mais souhaitent connaître les zones
où la qualité de service n’est pas suffisante et les plans d’action mis en
oeuvre pour y remédier. Ils veulent également plus de proactivité en cas
70
Avis du 29 septembre 2015.
71
245 bénévoles présents dans 78 départements de France métropolitaine ont échangé
des courriers
(équivalant à 303 flux) entre le 28 septembre et le 26 octobre 2015
(« Service universel postal : hausse massive des tarifs aux fondements opaques et
critères de qualité en berne », UFC-Que choisir, service des études, novembre 2015).
72
Le nombre de réclamations déposé par des particuliers est en constante diminution :
il est passé d’un peu plus de 400 000 en 2010 à environ 150 000 en 2015. La tendance
est inverse pour les entreprises, dont le nombre de réclamations a presque doublé en
5 ans, passant de 1 million à 1,8 million.
73
Par exemple, alors que les taux d’instance de l’ensemble des zones géographiques
ont convergé depuis 2013, le taux du Sud-Est reste nettement plus élevé et ne
converge pas.
74
Ainsi, au mois de décembre, les volumes font plus que doubler certains jour
(jusqu’à 2,3 millions de colis contre 1 million en moyenne).
La Poste - décembre 2016
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COUR DES COMPTES
50
d’échec de la livraison (retards, incidents,
etc
.) afin de réassurer leurs
clients destinataires.
Or,
le
suivi
informatique
des
colis,
qui
repose
sur
un
enregistrement informatique assurant sa traçabilité (flashage), apparaît
encore insuffisant. En effet, si le taux de flashage des colis en plateforme
de préparation et de distribution du courrier augmente sensiblement en
2015
75
, le nombre de colis non flashés au stade de la distribution dépasse
le million de colis annuel, soit 4 000 colis par jour.
Alors que la livraison de colis en « J+1 » tend à se généraliser et
que des concurrents de La Poste lancent désormais des offres de livraison
« ultra-rapides », dans la journée, voire dans l’heure dans les grandes
villes
76
, l’opérateur public va devoir renforcer ses objectifs de qualité de
service afin de mieux répondre aux attentes des consommateurs. Une
enquête diligentée par la Direction générale des entreprises (DGE) en
2014
77
a ainsi mis en évidence l’intérêt pour les clients de La Poste de se
voir proposer des créneaux élargis de livraison, une livraison sur rendez-
vous ou encore une possibilité de seconde présentation du colis au
domicile. Si certains de ces services sont déjà proposés, leur diffusion et
leur promotion commerciale doivent rapidement progresser.
2 -
Un accès aux services en bureau de poste pas toujours adapté
aux modes de vie des Français
La France dispose du réseau le plus important d’Europe aussi bien
en nombre de points de contact qu’en densité de population desservie,
avec 3,7 points de contact pour 10 000 habitants (contre 3,5 en
Allemagne, 2,2 en Italie, 1,8 au Royaume-Uni et 1,6 aux Pays-Bas).
Au 1
er
janvier 2016, la règle d’accessibilité territoriale du service
universel postal
78
est ainsi respectée dans la quasi-totalité des
75
Il atteint 99,26 % contre 98,81 % en 2014. Ce taux est de de 99,78 % en ACP.
76
Voir notamment l’offre d’Amazon intitulée « Prime Now » qui propose un service
de livraison de « produits du quotidien » réservé à ses abonnés Premium gratuit pour
une livraison dans un créneau de 2 heures et facturé 5,90 euros pour une livraison
dans l’heure.
77
Étude sur les besoins et attentes de consommateurs sur les prestations offertes dans
le cadre du service universel postal
, réalisée par les cabinets TERA Consultants et
CODA Stratégies pour le compte de la Direction Générale des Entreprises, novembre
2014.
78
Voir fiche en annexe n° 3.
La Poste - décembre 2016
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DES FRAGILITÉS PERSISTANTES
51
départements métropolitains
79
et, dans les zones urbaines, la présence
postale (6 842 points de contact) dépasse largement cette exigence.
Le respect de la contrainte réglementaire ne suffit pas toutefois à
garantir l’accessibilité effective des services postaux. Les besoins peuvent
varier selon les territoires et les catégories de population. Dans certaines
zones, la présence physique de guichets postaux est un critère
incontestable
de
réponse
aux
besoins
des
utilisateurs,
adaptée,
notamment, aux diverses formes d’exclusion sociale et de difficultés
d’accès aux services publics qui peuvent s’y faire jour. C’est en revanche
moins le cas dans d’autres parties du territoire où une majorité des clients
de La Poste peuvent accéder au service public postal par d’autres moyens
que le guichet, en particulier
via
l’internet.
Le seul critère du nombre de points de contact physiques est donc
insuffisant pour mesurer l’accessibilité effective des services postaux :
celle-ci résulte en effet tout autant de l’amplitude des horaires
d’ouverture, du temps d’attente, de la palette de services offerts et de la
capacité à les présenter sous une forme adaptée à chaque type de public.
Par exemple, alors que La Poste dispose du réseau des boîtes aux
lettres (boîtes jaunes) le plus important et le plus dense en Europe
80
, plus
de 83 % de ces boîtes sont relevées avant 13 heures, limite peu
compatible avec les horaires de travail de beaucoup de clients de La
Poste.
S’agissant des bureaux de poste, l’amplitude des horaires
d’ouverture et l’accès effectif aux services à certains moments de la
semaine ou de la journée (matin, heure du déjeuner, sortie des bureaux,
samedi) constituent également des facteurs déterminants pour la
perception par la clientèle de l’accessibilité effective des services
postaux. Or, une diminution globale de l’amplitude horaire des bureaux
de poste peut être observée ces dernières années : en semaine dans
l’ensemble des zones de chalandise
81
, à l’exception des hypercentres
urbains, et le samedi matin, toutes zones de chalandise confondues. Ainsi,
dans les zones de « villages », en tenant compte de la transformation des
bureaux de poste en points de contact en partenariat, le nombre de points
79
À l’exception de quatre d’entre eux, soit en raison d’une situation locale
exceptionnelle, soit du fait de la difficulté de créer des points de contact en
partenariat.
80
Bien qu’en diminution de 3,3 % depuis 2012, ce réseau compte encore 136 930
boîtes en 2015 ; chaque boîte, en zone rurale, dessert 200 habitants.
81
Cf.
Glossaire.
La Poste - décembre 2016
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COUR DES COMPTES
52
de contact postaux ouverts le samedi matin de 8h à 13h a diminué de
7,5 % entre 2008 et 2016. Au total, en 2016, La Poste ne propose
d’ouverture le samedi que dans 4 005 points de contact (23 % du réseau).
Le développement de points de contact en partenariat permet
néanmoins d’apporter une réponse à la diminution de l’activité des
bureaux de poste à l’origine de ces restrictions d’horaires, tout en
maintenant, voire en améliorant, le service rendu aux usagers.
Le mouvement de transformation du réseau entrepris par La Poste
doit donc être poursuivi, en zone rurale, mais surtout amplifié en zone
urbaine où le potentiel d’évolution est encore très important et où le
développement de relais poste commerçant permet d’offrir des plages
horaires élargies. Une enquête de février 2016 diligentée La Poste et
menée par l’institut BVA dans neuf « La Poste Relais » où sont implantés
des services postaux de proximité à titre d’expérimentation
82
a mis en
évidence que les horaires d’ouverture et la rapidité d’accès aux services
constituaient des éléments décisifs du recours par les clients de La Poste à
ce type de points de contact. 95 % des utilisateurs se disent ainsi satisfaits
des horaires adaptés en soirée et le week-end et considèrent que le Relais
leur fait gagner du temps.
Enfin, le critère d’accessibilité devrait également s’apprécier en
prenant en compte tous les modes de contact : les points de contact
physiques, mais aussi les services en ligne et par téléphone et ceux
apportés par le facteur. Seule une approche « multicanal » est désormais
pertinente pour concevoir et pour gérer l’accès du public aux services
postaux.
B -
Des offres commerciales sur internet qui ont pris du
retard
L’examen de projets industriels et commerciaux du groupe La
Poste en matière de technologies numériques met en évidence le
caractère incomplet de l’adaptation de l’entreprise aux besoins de
transformation de ses métiers, offres et services, requis par la
généralisation des usages de l’informatique et de l’internet.
82
Enquête menée par l’institut BVA dans neuf « La Poste Relais » où sont implantés
des services postaux de proximité à titre d’expérimentation depuis un an et demi.
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DES FRAGILITÉS PERSISTANTES
53
1 -
Une formalisation tardive de la stratégie numérique du groupe
La Poste a réagi tardivement à la transformation numérique
survenue au tournant des années 2000. En 2007, afin de limiter les effets
négatifs de la substitution numérique, l’objectif reste d’améliorer la
productivité des activités existantes, notamment par l’optimisation des
schémas industriels, comme l’atteste la priorité donnée au projet Cap
Qualité Courrier
83
. Dans ce cadre, le numérique n’était pas perçu comme
un substitut ou un relais de croissance potentiel mais comme un
concurrent.
C’est seulement en 2012 que le groupe décide d’accroître la part
du numérique dans le chiffre d’affaires, la visibilité de ses offres sur
l’internet, la coordination des initiatives numériques prises par les
différents métiers ou encore la cohérence du suivi commercial des clients
selon leur mode de relation physique ou électronique avec La Poste.
À cette période apparaissent les premières structures consacrées à
l’innovation numérique à l’échelle du groupe (création de la direction du
numérique) et les premières réflexions en conseil d’administration sur la
définition d’une stratégie numérique transversale.
Les projets nécessaires à la réalisation d’une telle stratégie dans un
groupe décentralisé sont de grande ampleur (harmonisation des systèmes
d’information et des données commerciales, identification de segments
communs de clientèle, déploiement national de nouvelles offres,
arbitrages entre les initiatives de chaque branche de métier). Toutefois, le
retard dans le lancement des projets du groupe ne lui a pas permis de
devenir un acteur dominant ou important sur plusieurs marchés liés à
l’internet, même si, séparément, les « métiers » avaient déjà lancé
plusieurs initiatives en la matière (comme par exemple le coffre-fort
électronique).
83
Cf
. supra
chapitre I, II-A.
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54
Le plan stratégique 2014-2020 rend plus tangible l’ambition de
s’engager dans l’économie numérique et de prendre en compte
l’évolution des usages. Toutefois, elle ne s’accompagne pas d’un volet
relatif à la maîtrise des charges permise par la dématérialisation des
procédures et des outils. En outre, la réflexion managériale sur
l’internalisation de certaines compétences numériques reste hésitante
84
.
2 -
Les ventes sur l’internet : un canal de commercialisation faible
La Poste a progressivement rendu disponibles sur l’internet tous
ses produits et services de courrier et de colis entre 2005 et 2016, à un
prix identique à leur prix au guichet. Leur disponibilité à la vente sur
l’internet a différé selon la gamme de produit et la complexité technique
de la dématérialisation.
Tableau n° 4 :
chronologie de mise à disposition d’offres postales
passant par l’internet
Année
Produit
2003
Lettre recommandée en ligne distribuée par le facteur
2005
Souscription au service de réexpédition
2008
Personnalisation des timbres
2008
Affranchissement des Colissimo
2009
Affranchissement des différents types de courriers en ligne
2011
Envoi d’une lettre en ligne
2012
Réception en ligne d’une lettre recommandée
2015
Envoi d’un colis à partir de sa propre boîte aux lettres
Source : Données La Poste, présentation Cour des comptes
84
Par exemple, alors que la branche numérique estime à 35 M€ les coûts
d’externalisation supportés par le groupe sur des activités qui pourraient être
effectuées par Docapost, cet axe de travail n’est pas formalisé au sein de la stratégie
numérique. Par ailleurs, les recrutements externes de compétences informatiques ou
liées aux données se font par une procédure dérogatoire, lente, dans un contexte de
forte concurrence.
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DES FRAGILITÉS PERSISTANTES
55
Cette chronologie met en évidence le retard de la mise en place sur
l’internet des envois et réceptions de lettres, notamment de la
dématérialisation totale des lettres recommandées, intervenue près d’un
an plus tard que les autres postes européennes
85
.
Jusqu’en
2014,
ces
commercialisations
sur
l’internet
s’effectuaient au moyen de quatre boutiques : e-services, professionnels,
timbre et Colissimo, correspondant à quatre sites internet différents. Cette
fragmentation des ventes en ligne, sans coordination stratégique et
commerciale, a été identifiée par le groupe comme une faiblesse. Le taux
de transformation
86
était par exemple en 2011, à audience comparable,
sur les produits de base, 3 à 4 fois inférieur aux autres opérateurs postaux
européens.
Les produits postaux dématérialisés et le service universel postal
À l’occasion de la signature du contrat d’entreprise 2013-2017, La
Poste s’est engagée à inclure dans son catalogue d’offres du service
universel, le produit Lettre Prioritaire en ligne, existant depuis le 3 octobre
2011, service qui est devenu effectif au 1
er
janvier 2014.
La Lettre prioritaire en ligne permet l'envoi le jour même des
courriers urgents jusqu'à 19h00, avec un délai indicatif de distribution en
J+1. Accessible depuis le site web « Lettre en ligne », ce service permet de
rédiger un courrier à partir de modèles de lettres ou d’un document
téléchargé. La Poste se charge de l’impression, de l’acheminement et de la
distribution du pli. Ce service est accessible à partir d’un prix global de
0,99€. Il est toutefois très peu utilisé : la Lettre prioritaire en ligne ne
représente ainsi que 0,11 M€ de CA en 2014 et 2015.
L’offre en ligne de produits sur service universel a néanmoins
vocation à s’élargir, La Poste entend en effet proposer au ministre chargé
des postes d’y intégrer le service de Lettre Suivie en ligne à compter de
2017.
En valeur absolue, les ventes de produits et services sur l’internet
sont en croissance continue depuis 2011 (+59 %), même si certains
produits restent très peu utilisés, comme la lettre en ligne. La plus grande
part de la progression réside dans la personnalisation des timbres.
85
Les projets de courriers numériques des postes anglaises et néerlandaises ont été
lancés en 2011, ceux de Canada Mail, dès 2000.
86
Proportion d’achats sur le site internet par rapport au nombre de visiteurs
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56
Graphique n° 8 :
CA des ventes sur l’internet de produits et services
du Courrier et de Colis (M€) (hors grands comptes)
Source
:
Cour
des
comptes
à
partir
de
données
La
Poste
BSCC
et
BN.
Le chiffre d’affaire des ventes sur l’internet de produits et services du Colis ne sont pas connus
pour les années 2010 et 2012.
Néanmoins, ces ventes en ligne restent très faibles par rapport au
chiffre d’affaires total des ventes (moins de 7 % en 2015).
Graphique n° 9 :
part du CA des ventes Courrier sur l’internet
Source : Cour des comptes, à partir de données La Poste.
À titre de comparaison*, les ventes Courrier sur l’internet représentent 15 % du chiffre d’affaire
des postes US Postal (États-Unis) et Deutsche Post (Allemagne), 20 % du chiffre d’affaire de NL
Post (Pays-Bas) et, dans un autre domaine, les ventes sur l’internet représentent 48 % des ventes
de SNCF Voyages. * les périmètres pouvant différer.
La vente sur l’internet poursuit un objectif de maîtrise des charges,
tout en étant un facteur de qualité de service pour les clients. Pourtant, la
rentabilité financière des ventes sur l’internet n’est pas calculée. Cette
148,5
172,8
171,4
0
50
100
150
200
0
50
100
150
200
2011
2012
2013
2014
2015
CA Colis
CA Courrier
2%
3%
4%
5%
6%
7%
2011
2012
2013
2014
2015
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57
situation ne permet pas de comparer les différents canaux de vente et
d’effectuer des choix de tarification ou de priorité pertinents entre les
différents canaux de commercialisation. Il serait donc utile de mesurer la
rentabilité financière des ventes de produits postaux sur l’internet pour
pouvoir la comparer avec celle des ventes dans le réseau.
La Poste remédie à l’éclatement de ses ventes en ligne sur
plusieurs sites par un projet de convergence et d’intégration sur un site
unique, lancé en 2014
87
. Plusieurs améliorations de cette boutique unique
en ligne sont attendues en 2016 et 2017.
Plusieurs
axes
de
progrès
demeurent.
De
nombreuses
fonctionnalités du site de vente en ligne restent peu commodes
88
et
l’application mobile n’est pas au niveau des standards du marché. Le
niveau de service général et le calendrier de ces projets, indispensables
pour augmenter les ventes sur l’internet, doivent être rehaussés et
accélérés.
III -
Les difficultés de pilotage
d’une organisation décentralisée
L’organisation de La Poste se caractérise, en raison d’une volonté
de décentralisation qui n’est pas critiquable en elle-même, par un
cloisonnement des entités qui peut se révéler contre-productif. Il importe,
dans ce contexte, de mettre en place des contrôles suffisants et des
instances de gouvernance transversale.
87
Il s’agit du projet « La Poste en ligne », visant à l’homogénéisation et la
simplification du parcours client sur le seul site laposte.fr, par agrégation progressive
des boutiques en ligne existantes.
88
En 2015, La Poste n’était qu’à la 8
ème
place des entreprises grand public sur le
critère « des services internet facilement accessibles », par exemple derrière Orange,
Free, la SNCF et Crédit Agricole.
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58
A -
Une mutualisation insuffisante
1 -
Une autonomie des métiers et des filiales qui engendre
des charges
Dans le document de référence annuel du groupe La Poste, la liste
des filiales comprend plus de deux cents lignes. Si une structure
complexe est sans doute inévitable pour un groupe de cette dimension, ce
nombre paraît néanmoins excessif : outre qu’il nuit à la lisibilité de
l’organisation, le contrôle d’entités aussi nombreuses est difficile et
consommateur de temps.
Dans une organisation décentralisée, les objectifs donnés aux
équipes de direction de chaque entité – branche ou filiale – sont
essentiels. Aux objectifs de chiffre d’affaires et de résultat devraient
s’ajouter, plus qu’aujourd’hui, des objectifs de maîtrise des charges, ainsi
que des objectifs commerciaux, de qualité de service, ou de production.
La décentralisation de la gestion dans les « métiers », devenus
branches, les filiales et les entités territoriales, a conduit à doter chacune
d’elles des fonctions de soutien (ressources humaines, comptabilité,
achats, juridique, immobilier, etc.) d’une entreprise, sans procéder à une
réduction suffisante au siège du groupe. Cela a contribué au poids
excessif des fonctions de soutien dans les charges du groupe, conduisant
logiquement la direction à fixer l’objectif de les réduire (cf
.
chapitre IV,
II-C).
De plus, la gestion des relations entre les branches et entre les
entités juridiques du groupe induit une charge d’administration. Les
prestations de services ou les transferts de produits ou de charges entre
eux sont régis par des « conventions de service » qui peuvent poser des
problèmes juridiques complexes. Un service, rattaché à l’audit interne du
groupe, est ainsi chargé en particulier de centraliser et de contrôler ces
conventions de service.
Un tel choix d’organisation doit être équilibré par des structures
transverses, pour rechercher les économies pouvant résulter d’une
mutualisation de certaines activités ou dépenses, par exemple lorsqu’il
s’agit de rechercher une implantation commune pour le garage des
véhicules appartenant à des entités distinctes mais assurant des tournées
dans la même ville, ou de négocier avec un fournisseur commun.
La mise en place depuis 2014 de comités et de projets
transversaux, notamment en matière de logistique, constitue à cet égard
un progrès. Par exemple, alors que Colissimo et Chronopost avaient en
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59
2015 planifié séparément des investissements pour moderniser leurs
centres de tri, une coordination a finalement permis d’éviter la
redondance et de réduire la dépense.
2 -
L’exemple de l’immobilier
La complexité des organigrammes pose parfois des problèmes
d’efficacité et de coûts. Outre le cas des oeuvres sociales mentionné au
I-A, celui de l’immobilier mérite d’être signalé, car la complexité ne
résulte pas du choix d’organisation effectué, mais du fait de ne pas l’avoir
poussé jusqu’à son terme.
La création de la filiale Poste Immo, « foncière » du groupe gérant
12 000 immeubles et 6,5 millions de mètres carrés, soit la quasi-totalité
des immeubles de La Poste SA, a donné des résultats en matière
d’optimisation des surfaces. Mais l’ancienne direction de l’immobilier du
groupe La Poste a subsisté, avec des compétences qui ne se limitent pas à
la définition de la politique immobilière globale : elle continue d’héberger
42 % des 1 018 salariés de l’ensemble, nommé « pôle immobilier », que
forment cette direction et la filiale Poste Immo. De ce fait, des personnels
de statuts différents coexistent au sein des mêmes équipes. Le
regroupement dans les mêmes locaux et la « bi-appartenance » des
principaux cadres aux deux entités réduisent, sans les éliminer, les
inconvénients de cette dualité.
B -
Des lacunes dans les contrôles internes et externes
Un équilibre doit être trouvé, dans une entreprise de la taille de La
Poste, entre les nécessaires contrôles et l’autonomie de gestion.
La Cour a relevé des cas où le degré de délégation donné à
l’entreprise pouvait paraître excessif et où le degré de contrôle paraissait
insuffisant.
S’agissant du premier point, la délégation de 30 M€ donnée au
président pour les acquisitions ou créations de filiales a eu pour effet une
très faible implication du conseil d’administration dans ces dernières, la
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60
plupart ayant été inférieures au seuil
89
: c’est notamment le cas de
Synaxio
90
, filiale rattachée à Docapost, elle-même filiale de deuxième
rang du Courrier.
Le statut de société par actions simplifiée, qui peut se justifier pour
des filiales mineures mais est aussi celui d’importantes filiales de premier
rang, peut contribuer à cette opacité. S’il simplifie la gestion des filiales,
il présente l’inconvénient de réduire la transparence de leurs instances.
De nombreux autres cas peuvent être avancés où les dispositifs de
contrôle – contrôles externes et contrôles internes mis en place par La
Poste – ont paru insuffisants, par exemple :
-
pendant plus de quatre années après la transformation en société
anonyme, la mission du contrôle général économique et financier
(CGEFi) auprès du groupe la Poste est demeurée sans que son champ
de compétence soit précisé, laissant plusieurs filiales stratégiques
hors de celui-ci
91
;
-
l’évolution du mode de saisine de la commission des achats de La
Poste (CALP)
92
a conduit à une diminution du nombre de marchés
qui lui sont soumis (passé de 48 à 28 entre 2012 et 2015) ainsi que de
leur montant (qui ne représente plus que 21 % du montant des
contrats passés par la maison mère) ;
-
l’enquête de la Cour sur Poste Immo, et la gestion immobilière a
montré que le comité examinant les projets de cessions n’intervenait
qu’au-dessus de 1 M€ ; que les choix entre cession de gré à gré et
appel d’offres étaient mal explicités ; que le contenu des dossiers ne
garantissait pas une traçabilité complète de l’opération ; que les
motifs des décisions prises étaient parfois mal explicités ;
89
Depuis 2010, le conseil d’administration de La Poste a examiné 16 projets
d’acquisitions, soit entre 2 et 3 par an.
90
La société par actions simplifiée Synaxio, créée à la fin de 2007 conjointement avec
un fournisseur, dissoute le 31 décembre 2010, dont l’objet était de développer le
logiciel pilotant le tri dans les plateformes industrielles du courrier alors en
construction, mission accomplie avec succès.
91
Cinq ans après la transformation en SA, le décret n°2015-1148 du 15 septembre
2015 a précisé et actualisé ce champ, mais sans remédier à la coexistence à La Banque
Postale du commissaire du gouvernement prévu par la loi bancaire et du contrôle
général économique et financier.
92
Elle délivre un avis sur les projets de marchés les plus importants (plus de 10 M€) ;
ce seuil est de 1,5 M€ pour les achats de prestations intellectuelles ; dix contrats tirés
au sort sont en outre présentés chaque année à la commission.
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61
-
en matière de rémunération des dirigeants, le seul cas connu et
contrôlé par le conseil d’administration de La Poste est celui du
président directeur général. Or, la rémunération de ce dernier est
plafonnée à 450 000€
93
. Ni le conseil, ni son comité d’audit, n’ont eu
à connaître des rémunérations des membres du comité exécutif et des
dirigeants des principales filiales. Hormis le président de GeoPost et
les deux membres du directoire de La Banque Postale, auxquels
s’applique
également
le
plafonnement
à
450 000 €,
ces
rémunérations sont fixées par le seul président.
IV -
Une absence de visibilité sur les missions
de service public
L’État impose à La Poste des missions de service public qui
constituent une charge, mais lui procurent également un revenu
94
qui
couvre une partie des coûts fixes de ses réseaux (infrastructures
industrielles, bureaux de poste, guichetiers, facteurs, etc.). Or, le montant
des compensations versées par l’État
95
, qui constitue un enjeu important
(il représente, en 2015, 61 % du REX du groupe), diminue depuis 2010,
renchérissant la part restant à la charge de La Poste. Parallèlement,
l’entreprise a peu de prise sur l’évolution des missions. Elle est donc
confrontée aujourd’hui à une double incertitude, portant sur les modalités
de mise en oeuvre et sur le financement de ces missions pour les années à
venir.
A -
Des charges de service public d’un montant
non négligeable
Si l’on se réfère aux données de sa « comptabilité réglementaire »
(qui permet d’affecter les coûts de ses activités aux divers produits et
93
Décret n° 2012-915 du 26 juillet 2012 relatif au contrôle de l'État sur les
rémunérations des dirigeants d'entreprises publiques.
94
Matériel (sous forme de compensation) et immatériel (en contribuant à son image
de marque).
95
La mission de transport et de distribution de la presse fait l’objet d’une
compensation budgétaire ; la contribution de La Poste à l’aménagement du territoire
est financée par le biais d’un abattement de taxes locales ; l’accessibilité bancaire est
compensée par une dotation du Fonds d’épargne géré par la Caisse des dépôts et
consignations.
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62
services qu’elle fournit ainsi qu’à ses missions réglementaires), les quatre
missions de service public confiées à La Poste représentent, avec 8,8 Md€
de coûts attribuables, une part importante de son activité. Elles
engendrent un déficit net de 83 M€
96
en 2014.
1 -
L’évaluation du coût des missions de service public
La Poste a l’obligation de tenir une comptabilité réglementaire :
c’est sur cette base qu’elle estime le coût des missions de service public
qui lui sont confiées. Cette comptabilité réglementaire, dont l’ARCEP
spécifie les règles et qu’elle fait auditer annuellement, repose, comme
toute comptabilité analytique, sur un certain nombre d’hypothèses : par
conséquent, ce qui est présenté comme étant le coût des missions de
service public, qu’il résulte des calculs de La Poste ou de ceux du
régulateur (l’ARCEP est, en effet, chargée par la loi de produire tous les
ans une évaluation du coût net de la mission d’aménagement du territoire
et a été sollicitée en juillet 2015 pour émettre un avis sur les coûts de la
mission de transport et distribution de la presse
97
), est une estimation.
L’ARCEP pourrait utilement produire une évaluation annuelle exhaustive
du coût des missions de service public
98
.
Ces données, reprises ici, servent de base aux discussions avec les
pouvoirs publics et avec la Commission européenne sur les montants des
compensations versées à La Poste
99
. Dans sa décision du 26 mai 2014 sur
les dispositifs compensatoires des missions d’aménagement du territoire
et de transport et distribution de la presse, la Commission a ainsi estimé
que le système de comptabilité analytique appliqué actuellement par La
96
Après prise en compte du chiffre d’affaires de certaines missions (le service
universel postal et, dans une moindre mesure, le transport postal de la presse et le
livret A) et des compensations versées pour les missions presse, accessibilité bancaire
et aménagement du territoire.
97
Tout en soulignant la nécessité d’actualiser certains paramètres de calcul, l’ARCEP
n’a pas remis en cause les estimations de La Poste : « Ni les analyses de sensibilité, ni
ces simulations ne sont de nature à remettre en cause le caractère très largement
déficitaire du compte presse constaté en 2014 » (avis n° 2015-0831 en date du 7 juillet
2015 relatif à la demande du Gouvernement sur les coûts de l’offre de transport et de
distribution de la presse de La Poste).
98
La loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances
économiques prévoit d’ailleurs la possibilité pour le ministre chargé des postes de
saisir l’ARCEP pour avis sur toute question relevant de sa compétence.
99
Les compensations sont notifiées à la Commission au titre des aides d’État.
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DES FRAGILITÉS PERSISTANTES
63
Poste était satisfaisant, de même que la méthode employée pour calculer
le coût net de la mission d’aménagement du territoire
100
.
De ce point de vue, le service universel postal (SUP) ne peut être
placé sur le même plan que les autres missions de service public, La Poste
ne percevant aucune compensation au titre de cette mission. Si la
comptabilité réglementaire de La Poste met en évidence des coûts
attribuables et un chiffre d’affaires correspondant au « compte du service
universel postal » (voir
infra
tableau n° 5), le coût net du SUP
(correspondant au coût exact des sujétions de service public calculé en
référence à un modèle théorique permettant d’estimer les coûts qui
seraient ceux d’un simple opérateur commercial) n’est pas évalué.
Tableau n° 5 :
« Compte » du service universel postal issu de la
comptabilité réglementaire de La Poste* (M€)
2010
2011
2012
2013
2014
2015
Chiffre
d’affaires
9 004
8 715
7 859
7 603
7 545
7 644
Coûts
attribuables
8 667
8 215
7 435
7 317
7 111
6 988
Résultat net
337
499
424
286
434
656
Source : La Poste, * y compris la contrainte d’accessibilité imputée dans les comptes non à la
branche Courrier mais au secteur dit « Non affecté ».
Les données issues de la comptabilité réglementaire de La Poste
font apparaître un résultat net positif de la mission sur la période 2010-
2015, dû à la fois aux gains de productivité réalisés par la branche
Courrier et à la politique tarifaire validée par l’ARCEP, qui tient lieu de
compensation pour La Poste, les prix des services proposés dans le cadre
du SUP devant être « orientés sur les coûts » (article L. 1 du CPCE),
spécificité absente de la définition des trois autres missions de service
public.
Ces trois autres missions ne sont en effet pas intégralement
compensées et, pour deux d’entre elles (missions Presse et Accessibilité
bancaire), le coût restant à la charge de La Poste croît parallèlement à la
diminution du montant des compensations.
100
Méthode du coût net évité reposant sur la construction d’un réseau théorique qui
serait celui de La Poste en l’absence d’obligation de mettre en oeuvre la mission
d’aménagement du territoire (scénario dit « contrefactuel »).
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64
2 -
Des compensations en baisse, un « reste à charge »
qui augmente
Le montant global des compensations versées à La Poste au titre de
ses missions de service public diminue depuis 2010, en raison de
l’instauration
d’un
principe
de
dégressivité :
les
montants
des
compensations versées au titre des missions Presse et Accessibilité
bancaire ont ainsi décru, respectivement, de 51 % et de 13 % entre 2010
et 2015.
Graphique n° 10 :
montant des compensations versées depuis 2010
(M€)
Source : Direction générale des entreprises et La Poste
* y compris, jusqu’en 2014, la part correspondant à la compensation du moratoire sur les
hausses de tarifs décidé en 2009.
L’instauration de ce principe de dégressivité permet à la fois de
préserver les finances publiques et de répondre aux exigences du nouvel
encadrement européen des compensations de service public entré en
vigueur le 31 janvier 2012 (dit encadrement Almunia)
101
. Ce texte durcit
101
Décision 2012/21/UE de la Commission du 20 décembre 2011 relative à
l’application de l’article 106, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l’Union
européenne aux aides d’État sous forme de compensations de service public octroyées
à certaines entreprises chargées de la gestion de services d’intérêt économique général
et communication de la Commission européenne 2012/C8/03 du 11 janvier 2012 sur
l’encadrement de l’Union européenne applicable aux aides d’État sous forme de
compensations de service public.
691
700
680
662
563
534
0
100
200
300
400
500
600
700
800
2010 2011 2012 2013 2014 2015
Transport et
distribution de
la presse*
Accessibilité
bancaire
Contribution à
l’aménagement
du territoire
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65
les conditions d’autorisation du financement public des services d’intérêt
économique général (SIEG) en imposant, notamment, aux États membres
d’introduire des mesures incitant les opérateurs à être plus efficients et à
diminuer leurs coûts (cf
.
annexe n° 3). S’agissant de la mission
Aménagement du territoire, les gains d’efficience sont produits non par
une diminution de la compensation mais par la reconfiguration du réseau
et la transformation de bureaux de poste en points de contact en
partenariat.
Le résultat des missions de transport postal de la presse et
d’accessibilité bancaire
102
avant compensation par l’État laisse apparaître
en 2014 un déficit de 506 M€ pour la première
103
et de 314 M€
104
pour la
seconde
105
. Après compensation, ce déficit reste de 356 M€ pour la
mission Presse et de 72 M€ pour la mission Accessibilité. Si la
diminution des coûts attribuables de la mission Presse de près de 13 %
depuis 2010 a permis de limiter à 5 % sur la période la hausse des
montants restant à la charge de La Poste après compensation, en
revanche, l’effet cumulé de la diminution du produit net bancaire du
livret A et du montant de la compensation s’est traduit par une
multiplication par dix des sommes restant à la charge de La Poste au titre
de l’accessibilité bancaire, et ce en dépit d’une diminution de 12 % des
coûts attribuables (voir graphique n° 11
infra
).
Les montants restant à la charge de La Poste au titre de la mission
d’aménagement du territoire se sont en revanche fortement réduits depuis
2010 sous l’effet d’une diminution des coûts (-10 %) et d’une
stabilisation du montant de la compensation dans le cadre des contrats de
présence
postale
territoriale
successifs.
Le
coût
du
maillage
complémentaire nécessaire à la mise en oeuvre de la mission
d’aménagement du territoire a été estimé par l’ARCEP à 242 M€ en 2014
et le montant restant à la charge de l’entreprise après compensation à
70,8 M€ (- 39 % depuis 2010).
102
Établi sur la base de la comptabilité réglementaire.
103
Évaluation figurant dans l’avis de l’ARCEP du 7 juillet 2015.
104
Chiffres LBP.
105
Pour 2015, la comptabilité réglementaire de La Poste fait état d’un déficit avant
compensation de 465 M€ pour la Presse et de 535 M€ pour l’Accessibilité bancaire.
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66
Graphique n° 11 :
évolution des coûts restant à la charge de La Poste
après versement des compensations (M€)
Source : Direction générale des entreprises et La Poste
* y compris, jusqu’en 2014, la part correspondant à la compensation du moratoire sur les
hausses de tarifs décidé en 2009.
Si les missions de service public disparaissaient, La Poste ne
réaliserait toutefois pas une économie égale à leur coût, car celui-ci
intègre une partie de coûts fixes qui demeurerait, étant nécessaire à ses
autres activités. En d’autres termes, même déficitaires, les missions de
service public contribuent à financer les coûts fixes, notamment ceux des
deux grands réseaux, celui des bureaux de poste et celui des facteurs. Le
manque de visibilité de La Poste sur les conditions d’exercice de ses
missions et sur leur niveau de compensation constitue en revanche un
frein important à la planification des réorganisations internes et à la
fixation des objectifs de maîtrise des charges.
B -
Des interrogations pour l’avenir
Bien que l’État définisse des trajectoires pluriannuelles de
compensation des missions de service public, l’expérience montre que ces
trajectoires peuvent être remises en cause, comme en témoigne la
décision de l’État en 2014 de diminuer de 50 M€ la compensation
accordée à La Poste au titre du transport postal de la presse, et ce en dépit
des engagements pris quelques mois auparavant lors de la signature du
contrat d’entreprise 2013-2017. Des incertitudes pèsent donc sur les
montants de compensation à venir, mais également sur les conditions de
mise en oeuvre des trois missions de transport et distribution de la presse,
d’aménagement du territoire et d’accessibilité bancaire, qui font l’objet de
propositions de réforme plus ou moins abouties.
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DES FRAGILITÉS PERSISTANTES
67
1 -
La mission d’accessibilité bancaire dépendante des évolutions
globales affectant le livret A
La mission d’accessibilité bancaire est une mission historique de
La Poste
106
visant à permettre l’accès gratuit des publics financièrement
fragiles à un minimum de services bancaires
via
le livret A de La Banque
Postale (cf
.
annexe n° 3). Dans le contexte de l’adoption de la loi du
26 juillet 2013 relative à la séparation et à la régulation des activités
bancaires, qui a complété les dispositifs en faveur de l’inclusion bancaire,
une réflexion avait été engagée par le ministère de l’économie et des
finances afin de redéfinir et de mieux cibler cette mission. La perspective
d’une réforme a toutefois été repoussée à 2020, afin de conserver pour la
période 2015-2020 le même cadre juridique et financier que celui
précédemment approuvé par la Commission européenne
107
tout en
l’amendant à la marge afin de répondre aux exigences de l’encadrement
« Almunia » (voir
supra
).
Conformément aux exigences communautaires, une consultation
publique, menée dans le cadre du comité consultatif du secteur financier
(CCSF), a été organisée en juillet 2016, qui a confirmé la pertinence de la
mission confiée à La Banque Postale tout en appelant également à lancer
une réflexion sur son évolution possible.
La trajectoire de compensation 2015-2020 fixée par l’arrêté du
26 février 2015 prévoit par ailleurs des montants dégressifs de
compensation (- 36 % sur la période) afin d’inciter à en améliorer
l’efficience.
Tableau n° 6 :
montants de compensation prévus au titre de la
mission d’accessibilité bancaire (M€)
2015
2016
2017
2018
2019
2020
235
225
210
190
170
150
Source : arrêté du 26 février 2015
106
Cette mission préexistait à sa reconnaissance par la loi de modernisation de
l’économie consécutive à la libéralisation du livret A. La possibilité, par exemple, de
domicilier le versement de prestations sociales et pensions de retraite sur un livret A
de La Poste remonte aux années 1960.
107
Décision du 23 janvier 2013 sur la compensation accordée à La Banque Postale au
titre de sa mission d’accessibilité pour la période de 2009 à 2014.
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68
Ces montants n’ont néanmoins pas encore été validés par la
Commission européenne qui a demandé l’élaboration d’un scénario
contrefactuel
108
pour estimer le coût de la mission, méthodologie qui
n’était pas celle retenue jusqu’ici. Dans sa décision du 23 janvier 2013, la
Commission avait en effet validé une méthodologie reposant sur le
compte du livret A permettant de s’assurer que celui-ci ne faisait pas
ressortir un bénéfice déraisonnable au profit de La Banque Postale. En
2014, la charge totale du livret A était ainsi évaluée par La Poste à
626 M€, ce qui, après déduction des recettes du compte du Livret A
(312 M€) et de la compensation versée à LBP par le Fonds d’épargne au
titre de la mission d’accessibilité bancaire (242 M€), représentait un
« reste à charge » de 72 M€ pour La Banque Postale
109
.
Dans la mesure où la Commission européenne ne s’est pas
prononcée sur les montants de compensations qui lui ont été notifiés
(et que l’État a néanmoins commencé à verser à La Banque Postale
depuis 2015), le devenir de la mission d’accessibilité bancaire au-delà de
2020 n’a pas encore fait l’objet d’un examen approfondi.
2 -
La mission de transport et distribution de la presse confrontée
à la complexité des équilibres au sein du secteur de la presse
La mission de transport et de distribution de la presse repose sur
l’octroi à la très grande majorité des titres de presse, de tarifs préférentiels
au sein des tarifs presse du service universel postal (cf
.
annexe n° 3).
Entre 2008 et 2014, les coûts attribuables et le déficit brut (avant
compensation) de la mission ont diminué respectivement de 13 % et
15 %
110
contribuant à la quasi-stabilité du déficit net sur la période, en
dépit de la diminution de près de 40 % du montant des compensations.
Cette évolution repose sur la combinaison de plusieurs facteurs : une
baisse des volumes (- 5,1 % par an), des efforts de productivité au sein de
la branche Courrier et un cadre stable d’évolution des tarifs postaux et des
montants de compensation arrêté pour une durée de sept ans par les
108
Projection d’une situation théorique dans laquelle LBP n’assumerait pas la mission
Accessibilité, permettant de distinguer le coût spécifique de cette mission dans le
compte du livret A.
109
67 M€ en 2015 (602 M€ de coûts attribuables, 300 M€ de CA et 235 M€ de
compensation).
110
Données ARCEP (avis n° 2015-0831 du 7 juillet 2015).
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69
accords signés le 23 juillet 2008 entre l’État, La Poste et les éditeurs de
presse.
Comme le montre le graphique n° 11 ci-dessus, cette évolution
n’est toutefois pas linéaire : le déficit net de la mission, après s’être réduit
entre 2009 et 2012, est de nouveau orienté à la hausse (+ 26,7 % depuis
2012).
En outre, alors que les dispositions financières des accords de 2008
n’ont pas été totalement respectées
111
, des interrogations demeurent sur
les conditions d’exercice de la mission à compter de 2017. En effet,
aucun accord n’est venu se substituer à ceux de 2008 arrivés en échéance
fin 2015. L’abandon de la réforme des catégories de titres de presse
112
sur
laquelle devaient reposer les nouvelles trajectoires d’évolution des tarifs
et de compensation pour la période 2016-2022 a été annoncé le 8
septembre 2016. Un nouvel arbitrage interministériel a arrêté de
nouvelles trajectoires valables jusqu’en 2020 seulement, reposant sur une
moindre revalorisation des tarifs appliqués à la presse de loisir
113
mais
s’accompagnant d’une réforme de la tarification des suppléments
magazines des quotidiens
114
.
Tableau n° 7 :
trajectoire prévisionnelle de compensation de la
mission de transport et de distribution de la presse (M€)
2016
2017
2018
2019
2020
119
121
122,7
120,4
119,1
Source : DGE
111
En 2014, l’État a décidé de supprimer la compensation versée à La Poste en raison
du report d’un an des hausses tarifaires qui devaient s’appliquer à compter de 2009,
laissant à l’entreprise un reliquat de près de 5 M€, et de diminuer le montant de la
compensation versée à La Poste de près de 50 M€ au motif que le groupe bénéficiait
par ailleurs d’un soutien conséquent au titre du CICE.
112
Cette réforme visait à créer, conformément aux recommandations de la Cour en
faveur d’un meilleur ciblage des aides à la presse (« Les aides de l’État à la presse
écrite », 2013), une catégorie de titres dits « de la connaissance et du savoir »,
bénéficiant de tarifs inférieurs à ceux des autres titres de la presse de loisir.
113
3 % par an sur la période au lieu des 5 % prévus dans le cadre de la réforme
initialement envisagée.
114
Alors qu’ils bénéficiaient jusqu’à présent des mêmes tarifs que les quotidiens
auxquels ils sont associés, ceux-ci devraient désormais se voir appliquer la grille
tarifaire, plus élevée, des magazines.
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70
L’abandon de la réforme des catégories de titres de presse illustre
la complexité des enjeux entourant la mise en oeuvre de la mission de
transport et de distribution de la presse.
3 -
La contribution à l’aménagement et au développement du
territoire : un montant de compensation stable, mais des
modalités d’adaptation de la présence postale encore trop
contraignantes
Le coût de la contribution de La Poste à l’aménagement et au
développement du territoire est assimilé au surcoût résultant de
l’obligation de maintenir un réseau de 17 000 points de contact, allant
au-delà, à la fois, du réseau qui serait strictement nécessaire à l’activité de
La Poste (réseau dit « commercial ») et de celui permettant de répondre à
l’obligation d’accessibilité du service universel postal. Ce réseau
« complémentaire » a été évalué en 2015 par l’ARCEP à 9 460 points de
contact
115
. Son coût avant compensation, estimé à 238 M€ par le
régulateur, est en baisse constante depuis 2010 (- 10 %) du fait de la
transformation des bureaux de poste à faible activité en points de contact
en partenariat. Les perspectives d’évolution du réseau, notamment en
milieu urbain, conduisent d’ailleurs La Poste à estimer que ce coût ne sera
plus que de 188 M€ à l’horizon 2020
116
. Reste néanmoins à la charge de
l’entreprise un surcoût évalué à 70,8 M€ en 2014, le montant de la
compensation prévue dans le contrat de présence postale territoriale 2014-
2016 ayant été fixé à 170 M€ par an en moyenne.
Au total, sous l’empire des trois premiers contrats (2008-2010,
2011-2013 et 2014-2016), 1,4 Md€ ont été engagés dans les zones
prioritaires (zones rurales et de montagne, quartiers de la politique de la
ville et départements d’Outre-mer) pour financer près de 4 000 opérations
de modernisation des bureaux de poste. Le maintien probable au-delà de
2016 du niveau actuel de compensation
117
constitue un point positif pour
La Poste, qui doit cependant avoir pour corollaire la poursuite de
l’adaptation du réseau, principale source de gains d’efficience. Le contrat
115
Décision n° 2015-1122 en date du 22 septembre 2015 relative à l’évaluation pour
l’année 2014 du coût net du maillage complémentaire permettant à La Poste d’assurer
sa mission d’aménagement du territoire.
116
Projection du plan stratégique 2014-2020.
117
Voire 174 M€ en tenant compte de la participation de l’État au financement des
maisons de service au public.
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DES FRAGILITÉS PERSISTANTES
71
de présence territoriale, qui doit être conclu entre l’État, l’Association des
maires de France (AMF) et La Poste pour les années 2017 à 2019,
pourrait, sur cet aspect également, jouer un rôle décisif, d’une part, en
assouplissant les conditions de transformation des bureaux de poste en
milieu urbain et, d’autre part, en reconnaissant et finançant les nouvelles
formes de présence postale organisées
via
des mutualisations, internes à
La Poste (facteur guichetier) ou en collaboration avec d’autres
administrations (maisons de service au public).
Les maisons de service au public en bureaux de poste
Afin de conforter l’objectif fixé par le Gouvernement de créer
1 000 maisons de services au public (MSAP) pour 2017, la transformation
de 500 bureaux de poste à faible activité en MSAP a été annoncée en juin
2015. Elle vise à tirer profit du maillage territorial de La Poste pour
améliorer l’accès aux services publics sur le territoire, en particulier en
milieu rural, tout en contribuant au maintien, voire à l’accroissement, de
l’activité dans les bureaux où elle a tendance à diminuer fortement. Au
15 juin 2016, 318 MSAP en bureaux de poste étaient opérationnelles ou en
cours de déploiement (voir carte en annexe n° 8).
Cette initiative, promue par le député Jean Launay, par ailleurs
président de la commission supérieure du service public des postes et des
communications électroniques
118
, pourrait se traduire, à terme, par la
transformation des bureaux de poste ruraux en véritables lieux d’accueil,
d’information et d’orientation à destination des usagers des services
publics
119
. Dans un premier temps, toutefois, la gamme de services
accueillis en bureau de poste repose essentiellement sur la mise à
disposition d’outils numériques et sur la présence d’agents de La Poste
120
.
118
Rapport d’information n° 2495 sur « Les conditions du maintien de services
publics dans les territoires et la contribution que La Poste pourrait y apporter »
(janvier 2015).
119
La Poste souhaiterait à cet égard proposer des offres complémentaires rémunérées
en sus par les opérateurs (accueil de permanences, réalisation d’opérations de caisse),
mais n’a pour l’heure pas été sollicitée en ce sens par ses partenaires.
120
Ces
derniers
devraient
bénéficier
d’une
formation
à
la
médiation
et
l’accompagnement numérique, complétée par des modules spécifiques délivrés par les
opérateurs partenaires.
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72
Dans ce contexte, la Cour a estimé dans son rapport sur les relations aux
usagers et la modernisation de l’État que le mouvement de création de
MSAP postales gagnerait à être poursuivi afin de développer l’accès aux
services publics sous forme numérique
121
.
Le coût annuel des MSAP postales (32 000 € par MSAP) est
couvert depuis 2015 par un financement provenant à 50 % du Fonds postal
national de péréquation, à 25 % du fonds inter-opérateurs
122
et à 25 % de
l’État, modalités qui devraient être reconduites dans le cadre du contrat de
présence postale 2017-2019.
Conformément aux recommandations émises par la Cour dans le
référé sur la modernisation du réseau La Poste du 25 février 2016, si ces
évolutions étaient entérinées par le prochain contrat de présence postale
territoriale, elles permettraient d’accélérer les transformations du réseau
en ville et se traduiraient par une différenciation plus marquée de la
présence postale (entre les milieux rural et périurbain ainsi que les DOM,
d’un côté, et les centres urbains de l’autre) et une meilleure allocation des
moyens.
______________________ CONCLUSION ______________________
Au moment d’aborder une période où elle devra connaître des
transformations au moins aussi profondes que lors des années
précédentes, La Poste recèle plusieurs fragilités, en partie héritées du
passé :
-
la complexité des relations sociales rend délicate la recherche du
bon équilibre entre le rythme des transformations et le maintien d’un
climat social satisfaisant ;
-
les retards pris en matière numérique seront longs à combler, et ils
impliquent d’autant plus d’efforts que la transformation numérique
doit s’accompagner d’une transformation commerciale ;
-
l’organisation en métiers ou branches a certes contribué à faire de
La Poste une entreprise, mais ne pousse pas par elle-même aux
121
Enquête demandée par le
Comité d’évaluation et de contrôle des politiques
publiques de l’Assemblée nationale sur les Relations aux usagers et modernisation de
l’État, vers une généralisation des services publics numériques
, janvier 2016, 129 p.,
disponible sur www.ccomptes.fr
122
Alimenté par Pôle Emploi, les caisses d’assurance maladie, de retraite,
d’allocations familiales, de mutualité sociale agricole, GrDF, etc.
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DES FRAGILITÉS PERSISTANTES
73
synergies internes, ce qui oblige à les rechercher grâce à des
structures ad-hoc ;
-
à différents niveaux, l’autonomie donnée au management ne
s’accompagne pas de contrôles suffisants, ce qui peut engendrer des
risques.
Les missions de service public font partie de l’identité de La Poste,
contribuent à son activité, et, même lorsqu’elles ne sont pas totalement
compensées, couvrent une partie des coûts fixes de ses réseaux. La
variabilité et la faible visibilité de leur compensation constituent un
handicap, de même que les incertitudes portant sur leurs conditions
d’exercice futures.
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Chapitre III
Des ambitions menacées par des
incertitudes sur les relais de croissance
Si, jusqu’en 2012, La Poste a su se montrer résistante, son résultat
n’en a pas moins stagné autour du niveau de 2008, et ce en dépit des
ambitions affichées dans ses plans stratégiques de renouer avec les
niveaux de croissance d’avant-crise.
Les résultats ont donc été longtemps inférieurs aux attentes, même
si ce n’est plus le cas depuis cinq semestres. Ces bons résultats récents ne
permettent toutefois pas de lever le doute sur l’aptitude de La Poste à
réaliser les objectifs de croissance fixés dans le plan stratégique
2014-2020. En effet, les facteurs de risque exogènes qui expliquent les
moindres performances des années passées sont toujours présents alors
que des interrogations sur la capacité intrinsèque des relais de croissance
à fournir les résultats escomptés se font jour.
I -
Un objectif de retour à un niveau de
croissance d’avant crise différé à 2020
Nonobstant la perte de chiffre d’affaires annuelle du courrier, à
hauteur de 500 M€, La Poste n’a pas modifié ses perspectives financières
à horizon de cinq ans.
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COUR DES COMPTES
76
A -
Des résultats inférieurs aux attentes des plans
stratégiques jusqu’en 2014
La Poste a présenté et mis en oeuvre trois plans stratégiques depuis
2008 (2008-2012, 2010-2015 et 2014-2020), et six trajectoires financières
pluriannuelles, qui ont été à plusieurs reprises actualisées en cours de
programmation pour tenir compte d’évènements inattendus ou de
résultats en décalage avec les objectifs (cf
.
annexe n° 4). La succession
des trajectoires stratégiques depuis 2008 et leur confrontation aux
résultats met en évidence le report répété des objectifs et leur décalage
systématique au fur et à mesure que le constat est fait qu’ils ne sont ou ne
pourront pas être atteints (cf
.
graphique ci-après).
Graphique n° 12 :
trajectoires financières successives et réalisation
Source : Cour des comptes, données La Poste
En outre, lorsque l’on superpose ces trajectoires, on constate
qu’elles sont toutes identiques, ce qui signifie que La Poste se fixe des
objectifs régulièrement trop optimistes et ne tient pas compte de l’effet
permanent des chocs qu’elle subit. La Poste fait ainsi l’hypothèse qu’elle
saura mettre en oeuvre des actions à la fois pour compenser ces chocs et
pour développer son résultat au même rythme que lorsqu’ils n’existaient
pas : hypothèse ambitieuse, qui ne s’est pas réalisée à ce jour.
0
500
1000
1500
2000
2500
2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020
2008
2010
2011
2012
2014
2013
Réalisé
M€
REX
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DES AMBITIONS MENACÉES PAR DES INCERTITUDES SUR LES RELAIS DE
CROISSANCE
77
Si la réalisation du plan stratégique 2008-2012 « Performance et
confiance », qui prévoyait de poursuivre sur la lancée du précédent, s’est
logiquement heurtée à la crise
123
, l’écart entre prévisions et résultats a
ensuite continué de se creuser pendant la durée du plan 2010-2015
« Ambition 2015 ».
La crise passée, La Poste a en effet considéré qu’elle était en
mesure de relancer son activité et de poursuivre des objectifs ambitieux,
affichant sa volonté de retrouver progressivement ses niveaux de
rentabilité antérieurs (croissance de l’activité de 1,1 % par an en
moyenne, objectif de REX de 1,7 Md€ en 2015 et doublement de la
marge entre 2010 et 2015 pour atteindre 7,8 %).
À
l’appui
de
cette
trajectoire,
La
Poste
escomptait
une
modification profonde de la contribution des différents métiers à la
constitution du chiffre d’affaires et du résultat. Elle anticipait en effet un
recul significatif de la contribution du courrier, compensé par la montée
en puissance du colis - express et de LBP, dont la contribution au chiffre
d’affaires et au résultat devait devenir prédominante (cf. graphique
n° 13).
123
Alors que le précédent plan avait abouti à un redressement de la situation
financière du groupe avec une multiplication du REX par quatre (de 0,3 Md€ en 2003
à 1,3 Md€ en 2007), la crise économique et financière a entraîné une stagnation puis
un recul de l’activité en 2008 et 2009 qui s’est traduit par un recul puis une stagnation
du REX de La Poste autour de 800 M€ par an, et ce en dépit d’un redressement de
l’activité à un rythme proche des prévisions à partir de 2010, avec le rebond de
l’économie.
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COUR DES COMPTES
78
Graphique n° 13 :
structure du chiffre d’affaires et du REX
Source : Cour des comptes, données La Poste. Par souci de simplicité de lecture, ces calculs
masquent le poids négatif des autres activités dans la formation du REX du Groupe.
Si la part du courrier dans la formation du chiffre d’affaires a
effectivement reculé conformément aux attentes (-10 points entre 2007 et
2014), il représente encore 20 % du REX en 2014 contre 7 % dans les
prévisions de La Poste, à la fois en raison des hausses tarifaires et de la
moindre performance des relais de croissance. Le développement de LBP
est en effet demeuré très en-deçà des objectifs, que ce soit en termes de
chiffre d’affaires ou de REX. Cette moindre performance de LBP n’a en
outre pas pu être compensée par le colis-express, certes monté en
puissance (25 % du REX en 2014 contre 19 % en 2007
124
) mais qui
évolue dans un secteur structurellement moins rentable que le secteur
bancaire.
La non atteinte par La Poste des objectifs du plan d’affaires 2010-
2015 a d’ailleurs conduit la Caisse des dépôts à déprécier sa participation
dans La Poste, pour un montant de 485 M€
125
en 2013 et de 115 M€ en
2014.
124
Cette performance de GeoPost est à souligner, si l’on se souvient qu’au tournant
des années 2000 son activité était fortement déficitaire.
125
Dont 191 M€ de dépréciation d’écart d’acquisition.
Courrier
56%
Colis/
express
23%
LBP 21%
Réalisé 2007
CA
46%
29%
25%
Réalisé 2014
46%
24%
29%
Objectif 2014 dans le plan
stratégique 2010-2015
Courrier
49%
Colis/
express
19%
LBP 32%
Réalisé 2007
REX
20%
25%
54%
Réalisé 2014
7%
19%
74%
Objectif 2014 dans le plan
stratégique 2010-2015
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DES AMBITIONS MENACÉES PAR DES INCERTITUDES SUR LES RELAIS DE
CROISSANCE
79
B -
Le plan stratégique 2014-2020 : une volonté de
renouvellement, des résultats pour l’heure satisfaisants
La trajectoire financière adoptée en juin 2014 se situe pleinement
dans la lignée des précédentes, avec un objectif de croissance du chiffre
d’affaires du groupe fixé à 2 % par an en moyenne, un REX censé
approcher les 2 Md€ en 2020 et une marge portée au-delà de 7 % (contre
moins de 4 % aujourd’hui). Dans son plan stratégique, La Poste reconnaît
toutefois qu’elle ne peut plus s’appuyer uniquement sur les activités
existantes, soit parce qu’elles sont en recul (Courrier, Réseau) soit parce
qu’elles subissent les freins de la concurrence (colis-express) ou d’un
contexte réglementaire et économique défavorable (LBP) : elle prend
donc acte dans son plan stratégique 2014-2020 de la nécessité de
renouveler son projet stratégique.
1 -
Une nouvelle orientation stratégique, mais des moteurs
de croissance qui restent les mêmes
La Poste n’entend pas renoncer à son modèle multi-métiers, mais
au contraire l’étendre à de nouveaux marchés en suscitant la création de
relais de croissance inédits. Pour faire émerger ces relais de croissance, le
plan stratégique prévoit d’investir dans des activités nouvelles telles que
l’économie sociale et solidaire, la «
silver economy
» ou les services
numériques, mais surtout d’élargir sa palette d’interventions dans ses
domaines de compétences traditionnels (par exemple dans le secteur de la
logistique urbaine en complément des offres classiques de livraison).
L’objectif
premier
est,
en
effet,
de
proposer
des
prestations
complémentaires permettant de soutenir les activités en déclin, au premier
rang desquelles le Courrier.
Ainsi, les nouveaux services du facteur s’appuient sur la proximité
de ces personnels afin d’offrir une gamme de prestations à domicile
susceptibles de rentabiliser ce réseau : services au domicile connecté des
particuliers (installation et mise en main d’équipements tels que
détecteurs de chute, boîtier de téléassistance, décodeurs, etc.), services
d’économie circulaire (collecte et recyclage), services à domicile
(livraison de proximité, vigie de personnes et de biens), interventions et
collecte d’information au domicile et à proximité (diagnostic et constat en
matière assurantielle, collecte d’informations commerciales).
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COUR DES COMPTES
80
La contribution attendue de ces nouvelles activités devrait
néanmoins demeurer relativement minime à l’horizon 2020 (200 M€ de
chiffre d’affaires pour les nouveaux services du facteur, hors croissance
externe, 618 M€ pour les activités numériques).
C’est donc encore essentiellement sur GeoPost et LBP que La
Poste entend s’appuyer pour recouvrer une bonne santé économique. La
Poste anticipant un nouveau recul de la contribution du courrier tant dans
la formation du chiffre d’affaires que dans celle du REX, l’importance de
l’apport du colis-express pour le chiffre d’affaires et de LBP pour le REX
est une nouvelle fois réaffirmée (cf. graphique n° 14). La hausse des tarifs
postaux, censée compenser à elle seule la moitié de la perte de chiffres
d’affaires du courrier, ainsi que la poursuite des baisses d’effectifs et des
plans d’optimisation des charges
126
, constituent les deux autres vecteurs
de croissance mis en avant par La Poste.
Graphique n° 14 :
structure du chiffre d’affaires
et du résultat (réalisé 2014 et objectifs 2020)
Source : Cour des comptes, données La Poste. Par souci de simplicité de lecture, ces calculs
masquent le poids négatif des autres activités dans la formation du REX du groupe.
126
Ainsi, le réseau doit garantir une baisse de ses coûts, malgré la hausse tendancielle
de ses coûts unitaires et de ses coûts fixes.
37
34
27
2
Objectif 2020
9
28
60
3
Objectif 2020
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DES AMBITIONS MENACÉES PAR DES INCERTITUDES SUR LES RELAIS DE
CROISSANCE
81
2 -
Des résultats meilleurs que prévus depuis 2014
À l’issue de la deuxième année de mise en oeuvre du plan
stratégique 2014-2020, La Poste est globalement en avance sur ses
objectifs financiers : en 2014 et 2015, les produits opérationnels, le REX
et la marge opérationnelle ont dépassé les prévisions de la trajectoire
financière.
Cet écart s’explique par les bonnes performances de la branche
Courrier, qui ont plus que contrebalancé des résultats de la banque,
inférieurs aux prévisions, et l’impact négatif sur le résultat de GeoPost
des provisions passées au titre du contentieux devant l’Autorité de la
concurrence. La branche Courrier a en effet bénéficié d’importantes
hausses tarifaires en 2015 (+ 7 %), qui ont permis de compenser
pleinement la baisse du volume de courrier, laquelle s’est par ailleurs
avérée moindre que prévu (- 6,5 % contre - 7,5 % anticipé).
Toutefois, les hausses tarifaires devant être moins fortes à
l’avenir
127
, ce levier ne devrait plus avoir d’effets aussi massifs sur le
reste de la période. Or, l’ambition du plan stratégique se concentre
essentiellement sur les années 2017-2020. La trajectoire financière
prévoit en effet une évolution en trois phases : inflexion du modèle en
2013 ; transition pour faire converger les résultats financiers avec les
objectifs sur la période 2014-2016 ; refondation pour développer un
nouveau modèle économique durable sur la période 2017-2020. Il serait
donc prématuré de déduire des bons résultats obtenus depuis 2014 que le
respect de la trajectoire est assuré à moyen terme.
II -
Des chocs devenus structurels
Depuis 2008, La Poste a dû faire face à des chocs exogènes
importants : tout d’abord la crise économique et financière, ensuite, les
conséquences de celle-ci sur le secteur financier (baisse des taux d’intérêt,
renforcement
des
contraintes
prudentielles),
mais
surtout
la
dématérialisation des échanges qui entraîne une baisse rapide et
irréversible des volumes de courrier, condamnant au déclin l’activité
historiquement majoritaire et rentable de La Poste. Si, dans ses plans
stratégiques, La Poste a pris en compte les effets temporaires de la crise,
127
50 % du
price cap
(cf
.
glossaire) ont été consommés en 2015, 20 % en 2016 : il ne
reste donc en principe que 10 % en 2017 et
2018.
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82
elle doit désormais prendre la mesure de ses effets structurels ou de long
terme.
A -
Des taux d’intérêt qui obscurcissent l’avenir
de La Banque Postale
À moyen terme, La Poste fait systématiquement l’hypothèse d’une
remontée puis d’une stabilisation des taux d’intérêt, dont la baisse a été en
réalité continue et forte depuis 2008 (cf
.
graphique n° 15).
Graphique n° 15 :
taux d’intérêt à dix ans pour la France (OAT)
Source : Cour des comptes, données La Poste, Insee et Banque de France.
Dans l’hypothèse de maintien des taux à un niveau très bas, voire
négatif, le risque est réel pour LBP de ne pas atteindre les objectifs
ambitieux qui lui sont assignés au titre des années 2014 à 2020 : un taux
d’intérêt plus bas de 1 point aurait en effet un impact de l’ordre de
- 350 M€ sur le PNB et un scénario plus dégradé de 10 points de base par
an aurait un impact cumulé de - 800 M€ sur un REX attendu de 1,5 Md€
en 2020. Ce nouvel environnement des taux doit donc impérativement
entraîner une révision des prévisions de LBP.
0
1
2
3
4
5
2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020
PS 2008‐2012
PS 2010‐2015
PS 2014‐2020
Réalisé
%
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DES AMBITIONS MENACÉES PAR DES INCERTITUDES SUR LES RELAIS DE
CROISSANCE
83
En outre, l’éventualité d’un nouveau renforcement des règles
prudentielles n’est pas à exclure. Si la remise en cause du « compromis
danois »
128
n’est plus à l’ordre du jour, d’autres facteurs d’inquiétude
subsistent concernant, notamment, le traitement prudentiel de l’épargne
réglementée
129
.
Le
plan
stratégique
2014-2020
débouche,
sous
certaines
hypothèses, sur un besoin supplémentaire de fonds propres prudentiels
pour LBP de 5,1 Md€ sur la période (dont 1,6 Md€ de fonds propres à la
charge de La Poste, le reste étant couvert par l’émission de titres
subordonnées auprès d’investisseurs externes). La Poste a toutefois revu
ce chiffrage à la baisse. Elle estime en outre être capable de faire face aux
augmentations de capital éventuelles de LBP liées à une évolution
ultérieure de ces règles.
B -
Une intensification de la concurrence dans le secteur
du colis
La Poste s’est construite comme un monopole d’État, elle est
aujourd’hui un groupe capitalistique public dont toutes les activités sont
ouvertes à la concurrence et qui intervient sur des marchés diversifiés et
internationalisés
via
une multitude de filiales. Cette modification
profonde de son statut et de sa situation crée à la fois des opportunités et
des difficultés à surmonter.
Ainsi, le marché du colis, qui a toujours été en partie
concurrentiel
130
,
est
actuellement
en
forte
croissance
grâce
au
développement de l’e-commerce. La Poste bénéficie donc, d’un côté,
d’opportunités de développement à l’étranger mais doit, d’un autre côté,
défendre ses parts de marché en France. Cette concurrence pèse sur les
prix, tout comme le fait que le secteur soit dépendant de donneurs d’ordre
128
Dénommé ainsi car adopté en 2012 sous la présidence danoise de l’Union
européenne, ce dispositif permet à certains groupes bancaires européens ayant des
filiales d’assurance d’utiliser un traitement prudentiel avantageux.
129
En effet, la Banque centrale européenne (BCE) a refusé la dérogation demandée
par les banques françaises, et acceptée antérieurement par acte délégué de la
Commission européenne d’octobre 2014, de déduire de l’assiette du levier l’encours
du livret A centralisé à la Caisse des dépôts, qui est pour LBP de 100 %. L’affaire a
été portée devant la Cour de justice de l’Union européenne.
130
L’ouverture à la concurrence des « colis postaux » s’est faite en 2005, alors que le
marché de l’express a toujours été concurrentiel.
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84
puissants (par exemple Amazon). Pour l’avenir, plusieurs menaces sont
ainsi susceptibles de modifier négativement le marché, jusqu’ici très
porteur, du colis-express.
Les demandes des e-commerçants poussent les acteurs du colis-
express à réduire toujours davantage les délais de livraison jusqu’à la
livraison le jour-même, tout en exerçant une forte pression sur les prix
(la livraison étant le plus souvent annoncée à l’acheteur comme
« offerte ») ; à cet égard, l’évolution des marchés européens du e-
commerce, et l’émergence d’Amazon comme acteur dominant du marché,
contribuent à affaiblir le pouvoir de négociation des acteurs du
colis-express dans la fixation du prix
131
. Ces évolutions sont bien
anticipées par le groupe (qui prévoit une baisse des prix de 1 % par an en
moyenne sur 2014-2020) et GeoPost est en mouvement perpétuel pour
accroître les volumes et créer de la valeur par des nouveaux services
« premium ». Les prises de participation récentes dans Stuart en France et
Tiramizoo en Allemagne - qui assurent des livraisons le jour même en
zone urbaine - illustrent cette stratégie, de même que l’expérimentation de
tournées de livraison le soir par Colissimo. Le développement d’une offre
de livraison express de produits frais est elle aussi intéressante et
permettra de répondre au développement rapide du e-commerce dans ce
domaine
132
. Toutefois, une décroissance de tarifs de 1,5 % par an au lieu
des 1 % anticipés fait peser un risque de l’ordre de 33 M€ par an sur le
REX de GeoPost, soit 231 M€ en cumulé sur la durée du plan d’affaires.
En outre, la concurrence s’intensifie. Jusqu’à présent, les grands
intégrateurs américains (UPS et Fedex) n’étaient présents en Europe que
sur les trafics transfrontaliers et surtout intercontinentaux mais ils
commencent à se doter de réseaux nationaux de distribution
133
; en outre,
il n’est pas exclu que les e-commerçants eux-mêmes deviennent des
concurrents des opérateurs de colis, à l’image d’Amazon qui s’est doté de
son propre réseau logistique au Royaume-Uni, a pris une participation
minoritaire en France dans Colis privé et développe depuis peu un service
autonome de livraison en 1h à Paris. Un scénario plausible serait
qu’Amazon internalise la livraison de ses produits dans les zones les plus
131
GeoPost compte environ 550 000 clients BtoB mais une poignée de clients BtoC,
concentrés autour des grands acteurs du e-commerce (Amazon, CDiscount, Zalando,
Fnac.com, etc.).
132
Le lancement d’Amazon Fresh aux États-Unis et, depuis juin 2016, au Royaume-
Uni devrait inciter les acteurs de la grande distribution européenne à accélérer et
moderniser leurs offres de e-commerce.
133
UPS a racheté le néerlandais TNT et le français Kiala. Fedex a racheté Opex en
Pologne et TAT Express en France.
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DES AMBITIONS MENACÉES PAR DES INCERTITUDES SUR LES RELAIS DE
CROISSANCE
85
densément peuplées, ne laissant à La Poste que les flux les moins
rentables et les volumes qu’il ne serait pas capable de traiter seul pendant
les périodes de pointe.
C -
La poursuite de la chute des volumes de courrier
La Poste est aujourd’hui confrontée à la baisse rapide et
structurelle des volumes de courrier du fait de la concurrence des
échanges
électroniques.
À
cet
égard,
la
mauvaise
conjoncture
économique non seulement pèse sur les volumes de courrier et de colis
échangés, mais incite les entreprises à choisir de dématérialiser certaines
procédures
(facturation,
publicité
adressée)
afin
de
réaliser
des
économies, ce qui accélère la baisse des volumes de correspondance
134
.
Pour une industrie de réseau aux coûts majoritairement fixes, le
maintien de la productivité de l’activité du courrier avec des volumes
décroissants exige une maîtrise particulièrement stricte des charges. C’est
pourquoi l’hypothèse retenue dans les plans stratégiques pour l’évolution
des volumes de courrier est très importante : elle constitue à la fois le
déterminant de la plus grosse part du chiffre d’affaires (- 1 % de volume
de courrier correspond environ à - 100 M€ de chiffres d’affaires) et
l’élément par rapport auquel se calcule l’évolution des charges afin de
garantir un résultat positif.
Or, dans ses plans stratégiques successifs, La Poste a éprouvé des
difficultés à prévoir le rythme de baisse du courrier, en particulier avant
2010
135
, ainsi que le montre le graphique n° 16.
134
La baisse des volumes de courrier s’est accélérée à partir de 2009 (cf
. infra
).
135
Le plan stratégique 2008-2012 ne prévoyait qu’une diminution des volumes de
1,5 % par an, en légère accélération par rapport à la période précédente (- 0,8 % par an
en moyenne entre 2000 et 2007) : dans les faits, la baisse a été de - 3,75 % par an en
moyenne sur la période 2008-2012, soit 2,25 points de plus.
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86
Graphique n° 16 :
prévisions dans les plans stratégiques et
réalisation, évolution des volumes de courrier (Md d’objets)
Source : Cour des comptes, données La Poste et Arcep.
La situation d’autres opérateurs postaux, confrontés à une baisse
plus précoce et plus prononcée du courrier, témoigne en outre du risque
de poursuite et d’accélération du phénomène et laisse entrevoir le
potentiel de pénétration des usages numériques en France.
Graphique n° 17 :
évolution comparée des volumes de courrier en
Europe
136
Source : Cour des comptes, données Union postale universelle.
136
La baisse est très marquée dans les pays où la dématérialisation est avancée
(Danemark) et où l’opérateur historique a perdu des parts de marché suite à
l’ouverture à la concurrence (Pays-Bas) ; elle est plus faible dans les pays où le
courrier n’était traditionnellement pas très développé (Allemagne). L’Estonie
constitue un exemple extrême, où la politique de dématérialisation très volontariste a
mené à une quasi-disparition du courrier papier.
8
10
12
14
16
18
20
PS 2008‐2012
PS 2010‐2015
PS 2014‐2020
Réalisé
Rythme annuel moyen
‐0,8%
‐3,7%
‐6,0%
Points d'inflexion
‐55
‐45
‐35
‐25
‐15
‐5
5
Evolution 2008‐2014
Evolution 2004‐2008
%
‐90%
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DES AMBITIONS MENACÉES PAR DES INCERTITUDES SUR LES RELAIS DE
CROISSANCE
87
La menace d’un nouveau choc sur les volumes de courrier ou
d’une plus grande sensibilité de la demande aux tarifs ne saurait donc être
écartée.
Alors que le rythme annuel de baisse du courrier est passé en trois
ans de - 3,7 % en moyenne (2010-2012) à - 6 % (2013-2015), La Poste a
retenu pour la période 2015-2020 une trajectoire de baisse des volumes
qui diverge peu de la période précédente (- 7 %). Or, plusieurs facteurs
pourraient accentuer le phénomène d’e-substitution, par exemple les
annonces récentes concernant le « choc de simplification », la levée de
certaines
obligations
de
recours
à
la
lettre
recommandée,
la
dématérialisation de la propagande électorale ou la montée en charge de
la déclaration et du paiement des impôts en ligne
137
. Or, bien qu’elle ait
examiné des scénarios alternatifs, dont un plus dégradé, La Poste
n’affiche pas de provisions de mesures supplémentaires à mettre en
oeuvre au cas où elle devrait faire face à une nouvelle accélération du
rythme de baisse des volumes de courrier.
Il est vrai que, parallèlement à l’accélération de la baisse des
volumes, La Poste a eu recours, avec l’accord de l’ARCEP, à une
augmentation des tarifs du courrier pour compenser en partie le recul des
volumes. Le
price cap
138
a ainsi fortement évolué et la hausse du prix du
timbre, peu ou prou conforme à l’inflation jusqu’en 2012, la dépasse
désormais sensiblement
139
. Depuis 2013, le levier tarifaire est ainsi
devenu central. Alors que la hausse des tarifs avait compensé moins de la
moitié de la baisse des volumes sur la période 2009-2013, elle la couvre
quasiment en totalité en cumulé pour les années 2014-2015 (cf
.
graphique
n° 18). Cela illustre la forte dépendance de l’équilibre financier du
courrier à la poursuite des hausses de tarifs dans les années à venir,
compte-tenu de l’importance des pertes liées à la baisse des volumes
(estimées à 3,4 Md€ à l’horizon 2020).
137
Ces phénomènes ont notamment été analysés par la Cour dans le rapport qu’elle a
remis au
Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques de l’Assemblée
nationale sur les Relations aux usagers et modernisation de l’État, vers une
généralisation des services publics numériques
, janvier 2016, 129 p., disponible sur
www.ccomptes.fr
138
Cf
.
Glossaire.
139
Inflation + 0,3 % pour la période 2009-2012 ; inflation + 1 % pour la période
2013-2015 ; inflation + 3,5 % pour la période 2015-2018.
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COUR DES COMPTES
88
Graphique n° 18 :
impact annuel moyen des hausses de tarifs
140
et de la baisse des volumes de courrier sur le REX du courrier
Source : Estimations Cour des comptes, données La Poste et Arcep.
Si cette politique de hausse soutenue des tarifs est largement
partagée par l’ensemble des opérateurs européens, elle n’en contient pas
moins le risque d’accentuer la dématérialisation des échanges.
140
Il ne s’agit pas seulement du prix du timbre mais de l’ensemble de la grille tarifaire
du courrier.
‐600
‐400
‐200
0
200
400
600
2009‐2013
2014‐2015
Objectifs du PS 2014‐2020
Impact annuel
moyen sur le REX
des hausses de
tarifs
Impact annuel
moyen sur le REX
de la baisse des
volumes de
courrier
M€
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DES AMBITIONS MENACÉES PAR DES INCERTITUDES SUR LES RELAIS DE
CROISSANCE
89
La hausse des tarifs postaux en Europe
Face au problème partagé de la baisse des volumes de courrier, les
opérateurs postaux européens ont mené, pour la plupart, une politique
tarifaire dynamique. La hausse la plus spectaculaire a été mise en oeuvre
au Royaume-Uni, où
Royal Mail
a augmenté ses tarifs à un rythme
nettement supérieur à celui de la baisse des volumes, proche de 13 % par
an entre 2008 et 2015, contre 5,5 % pour La Poste et 2 % seulement pour
Deutsch Post
141
.
Les Pays-Bas ont, eux aussi, récemment augmenté fortement le prix
du timbre (+ 18,5 % en 2014), qui était auparavant très inférieur à la
moyenne. À l’autre bout du spectre, le Danemark pratique le prix du timbre le
plus élevé (1,21 € en 2014) et en poursuit l’augmentation dans le cadre d’une
politique volontaire en faveur de l’e-substitution. Avec un timbre prioritaire à
0,76 € en 2015 (0,80 € au 1
er
janvier 2016), La Poste est dans la moyenne des
tarifs du courrier en Europe, alors que le territoire français est plus vaste et
moins densément peuplé que celui de la plupart des autres pays.
Graphique n° 19 :
tarif 2015 de la lettre prioritaire
Source : Cour des comptes, données La Poste et ARCEP.
141
Cette hausse très marquée des tarifs au Royaume-Uni, destinée à restaurer
l’équilibre économique de
Royal Mail
dans le contexte de sa privatisation, a été
critiquée par le régulateur Ofcom en juillet 2015, qui examine actuellement
l’opportunité d’un contrôle tarifaire plus strict, pour des raisons de distorsion
éventuelle de concurrence.
0
0,2
0,4
0,6
0,8
1
1,2
1,4
Allemagne
Belgique
Danemark
France
Italie
Pays‐Bas
Royaume‐Uni
€
La Poste - décembre 2016
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COUR DES COMPTES
90
La sensibilité du volume de courrier aux tarifs (élasticité-prix) est
considérée par La Poste comme très variable selon les segments de
marché
142
. C’est la raison pour laquelle, en 2015, la hausse a été de
11,3 % pour le timbre unitaire, de 3 % pour le courrier relationnel
(factures, relevés bancaires, etc.) et de 1,4 % seulement pour le courrier
publicitaire.
La Poste joue également sur la modification de son offre, en
orientant ses clients vers des produits moins urgents (type Lettre Verte),
dont la généralisation permettrait de dégager des économies en
réorientant l’outil industriel vers le « J+2 ».
Le levier tarifaire a néanmoins ses limites. Le prix du timbre est en
effet un sujet sensible, et ce d’autant plus que La Poste bénéficie de sa
position ultra-dominante d’un ancien monopole d’État sur ce segment. De
fait, le financement direct par le consommateur a déjà fait réagir les
associations de consommateurs, qui soulignent en outre que ces hausses
répétées
ne
servent
pas
à
améliorer
la
qualité
de
service
(cf
.
chapitre II, II- A). Par ailleurs, concernant les entreprises et les
administrations, les pertes de « grands comptes » provoquées par une
hausse trop rapide des prix peuvent avoir un effet significatif et
irréversible.
III -
Des interrogations fortes sur la capacité
des relais de croissance à fournir la contribution
attendue en 2020
Outre les facteurs de risque exogènes auxquels elle est déjà
largement exposée (cf
.
supra
II), La Poste est confrontée au risque
endogène d’une moins bonne performance de ses deux pourvoyeurs de
croissance « historiques » (LBP et GeoPost) et à celui d’une montée en
charge plus lente que prévu des nouveaux relais de croissance.
142
Elle serait quasi-nulle pour les ménages, dont c’est une très faible part du budget,
relativement faible pour le courrier de gestion (les plans de dématérialisation des
entreprises répondent à des déterminants plus structurels de leur activité) et forte sur
le marketing direct pour lequel La Poste veille à ce que les hausses de tarif soient
beaucoup plus modérées.
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DES AMBITIONS MENACÉES PAR DES INCERTITUDES SUR LES RELAIS DE
CROISSANCE
91
A -
Des relais de croissance historiques à faire évoluer
1 -
La Banque Postale : une stratégie de diversification
aux résultats aléatoires
LBP vise un REX de 1,5 Md€ en 2020, ce qui représente un quasi
doublement par rapport au réalisé 2015 (851 M€), alors que le retour de la
liquidité sur le marché engendre une guerre des prix (par exemple sur le
crédit immobilier ou sur le crédit aux collectivités locales) et pose un
problème de rentabilité particulièrement aigu pour LBP qui dispose de
plus de dépôts qu’elle n’accorde de crédits. Le passif de LBP est par
ailleurs surpondéré en livrets réglementés qui sont pénalisés par la
conjoncture.
Quant aux axes de développement de LBP, ils consistent à
poursuivre la stratégie de diversification de la clientèle et des activités. Ils
reposent ainsi, notamment, sur la montée en charge des activités récentes
telles que le crédit à la consommation (avec un objectif de croissance de
+ 34 % par an).
S’agissant du développement du crédit aux personnes morales
(entreprises, collectivités locales, professionnels), il suppose la maîtrise
d’une activité plus risquée. L’objectif fixé pour le déploiement du crédit
aux personnes morales apparaît à cet égard ambitieux (+ 60 % d’ici 2020)
alors qu’il est pour l’instant très progressif et que le volume d’encours
reste faible.
Priorité est également donnée à la clientèle patrimoniale et à son
équipement, avec un objectif de + 10 % par an. Si le potentiel est réel,
avec un écart de PNB par client de 500 € par rapport aux banques
concurrentes, le positionnement marketing de la « banque citoyenne »
n’est pas forcément compatible avec la conquête d’une clientèle plus
aisée. L’atteinte de cet objectif pose également la question de la
reconfiguration du réseau des bureaux de poste, pour mieux l’adapter à la
stratégie de LBP.
Enfin, les activités de gestion d’actifs et d’assurance devraient
avoir un poids croissant (elles représentent déjà 40,6 % du résultat net
part du groupe en 2014). En leur sein, CNP contribue de manière
substantielle aux résultats (à hauteur de 207 M€ en 2015, soit 31 % du
résultat net part du groupe, auxquels s’ajoutent les commissions de
distribution versées par l’assureur à LBP). Le plan stratégique fait
l’hypothèse d’une croissance des résultats de CNP de 5 % par an, en ligne
avec les objectifs que s’est fixés la compagnie d’assurance. Toutefois, la
commercialisation des produits CNP et sans doute aussi sa structure
capitalistique seront vraisemblablement appelés à évoluer dans les années
à venir.
La Poste - décembre 2016
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92
Les perspectives de CNP Assurances
Le capital de CNP Assurances se répartit, aujourd’hui, entre deux
blocs d’actionnaires principaux : la Caisse des dépôts et consignations (qui
détient 40,9 %) et Sopassure (à hauteur de 36,3 %), contrôlée par les deux
réseaux distributeurs que sont La Banque Postale (à hauteur de 50,1 %) et
le groupe BPCE (49,9 %). L’État détient également 1,1 % du capital. Le
reste est coté en bourse.
Outre que les performances de la compagnie d’assurances seront
pénalisées par la persistance de taux d’intérêt bas, CNP doit gérer les
conséquences de la décision prise par BPCE de produire elle-même les
contrats d’assurance-vie qui seront distribués par le réseau des caisses
d’épargne, CNP Assurances conservant la gestion du stock de contrats
ouverts avant le 1
er
janvier 2016. En contrepartie, l’accord trouvé entre
CNP et BPCE prévoit que le partenariat en protection/prévoyance sera
renforcé et que l’assurance-emprunteur produite par CNP sera désormais
distribuée par l’ensemble du réseau BPCE, et non plus par les seules
caisses d’épargne.
À cette refonte des relations avec BPCE s’est ajoutée, en mars
2016, la décision du groupe Crédit agricole de mettre un terme à son
partenariat avec CNP en matière d’assurance emprunteur et d’internaliser
la production de ces contrats.
Enfin,
s’agissant
de
la
structure
actionnariale,
le
pacte
d’actionnaires en vigueur depuis 1998 a été tacitement reconduit jusqu’au
31 décembre 2017, pour permettre à chaque actionnaire de réfléchir à
l’avenir de sa participation.
En 2015 et au premier semestre 2016, LBP a atteint des
résultats inférieurs aux prévisions du plan stratégique : le nombre de
clients actifs décroît légèrement, le produit net bancaire et le REX
augmentent moins vite qu’attendu. Si cette sous-performance devait se
prolonger, il serait nécessaire d’engager un plan d’économies
permettant de préserver la rentabilité de l’activité bancaire.
2 -
Un palier de développement à franchir pour GeoPost
La trajectoire prévisionnelle du groupe La Poste pour 2014-2020
fixe à GeoPost un objectif de chiffre d’affaires de 6 793 M€ en 2020 (soit
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DES AMBITIONS MENACÉES PAR DES INCERTITUDES SUR LES RELAIS DE
CROISSANCE
93
une croissance de 20 % par rapport au réalisé 2015) et un objectif de REX
de 539 M€, soit un doublement par rapport au réalisé 2015 (268 M€
143
)..
Cette trajectoire prévoit des hausses de chiffre d’affaires moins fortes que
celles constatées ces cinq dernières années. En revanche, elle est très
ambitieuse sur la rentabilité puisque le REX devra croître plus vite que le
chiffre d’affaires alors que c’est l’inverse qui s’est produit depuis 2011.
À cet égard, le groupe GeoPost présente certaines fragilités.
Il s’apparente encore à une juxtaposition d’entreprises nationales,
certes souvent fortes sur leur marché national, mais encore peu présentes
sur
les
échanges
transfrontaliers
européens
et,
a
fortiori,
intercontinentaux : les volumes internationaux représentent autour de
10 % des volumes totaux et 20 % du chiffre d’affaires. Or, ce sont les
activités transfrontalières et intercontinentales qui dégagent les marges les
plus élevées (environ 30 % de la marge pour 10 % des volumes)
144
. Il faut
cependant relever que, depuis deux ans, les flux internationaux
augmentent de manière notable
145
; le chantier en cours de constitution
d’une identité de marque commune (accompagnée d’une harmonisation
des systèmes d’information et de la création d’une équipe de grands
comptes paneuropéens) devrait amplifier ce mouvement.
De
plus,
GeoPost
demeure
une
entreprise
essentiellement
européenne
146
alors que la croissance des prochaines années se fera
principalement hors Europe, et notamment en Asie où la plupart de ses
concurrents sont déjà implantés de longue date (cf
.
encadré ci-après). Les
opérations de croissance externe en cours devraient permettre de
renforcer la présence européenne de GeoPost ; l’entreprise s’est
également développée à l’est de l’Europe (Russie, républiques d’Asie
centrale, Turquie) et elle étudie plusieurs projets hors d’Europe. Mais la
stratégie de GeoPost consiste à prendre dans un premier temps des
participations minoritaires pour se familiariser avec la direction de
l’entreprise-cible et avec le marché. L’entreprise estime que cette
143
L’augmentation du REX s’établit à 48 % entre 2015 et 2020 si on retraite le REX
2015 de la provision de 99 M€ constituée dans le cadre du contentieux devant
l’Autorité de la concurrence (cf
.
supra
).
144
Les projets de la Commission européenne visant à accroître la transparence sur les
coûts des flux transfrontaliers (proposition de règlement du 25 mai 2016) pourraient
néanmoins remettre en cause la forte rentabilité des flux intra-européens.
145
+ 14,0 % en moyenne annuelle entre 2013 et 2015, contre + 9,8 % pour les flux
domestiques et + 6,7 % pour les seuls flux domestiques B2B.
146
Seuls 2 % de son chiffre d’affaires sont réalisés avec des clients non
européens
-
situés pour l’essentiel en Turquie, en Inde et en Afrique du sud.
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COUR DES COMPTES
94
approche prudente maximise les chances de réussite d’une prise de
contrôle ultérieur ; la contrepartie en est une progression très lente de la
part des produits internationaux dans le chiffre d’affaires.
Deutsche Post DHL : un opérateur postal hors de ses frontières
nationales
Ces dernières années, le groupe allemand DP-DHL a consenti des
investissements importants à l’international pour son activité de colis-
express (extension en 2012 du hub de Shanghai, et en 2013 de celui de
Cincinnati). Le résultat d’exploitation de la branche a bondi de 154 %
entre 2010 et 2014, en passe de devenir le premier centre de profit du
groupe. DP-DHL s’est fixé pour objectif de poursuivre la croissance du
REX de son activité colis/express de 10 % par an jusqu’en 2020.
La stratégie d’internationalisation de l’activité de DP-DHL a été
précoce, notamment sur les marchés émergents, avec une implantation en
Chine dès 1986. Elle a bénéficié d’importants moyens financiers et ne
s’est pas déroulée sans accroc (pertes et coûts de restructuration de
250 M€ en 2009, liés aux activités nord-américaines du groupe) mais lui
permet de réaliser aujourd’hui près de 70 % de son chiffre d’affaires hors
de ses frontières nationales.
Le groupe souhaite accélérer son développement sur les marchés
émergents et compte limiter à 70 % en 2020 son chiffre d’affaires sur les
marchés matures (États-Unis, Europe, Japon) contre 78 % aujourd’hui.
Enfin, la poursuite de la croissance sur des marchés connexes ne va
pas de soi. Les résultats de Tigers, la filiale de
freight forwarding
147
détenue à 66 % par GeoPost, restent modestes
148
et très inférieurs à ceux
des « grands » de ce marché
149
; en outre, les synergies avec le colis-
express ne sont pas évidentes. GeoPost le reconnaît et souhaite
positionner cette acquisition sur des niches de marché sur lesquelles
Tigers dispose d’avantages concurrentiels
150
.
147
Cf
.
glossaire
148
150 M€ de chiffre d’affaires et 2,7 M€ de REX en 2015.
149
DHL, Kuehne+Nagel et DB Schenker sont les trois plus gros acteurs du secteur.
Leurs chiffres d’affaires dans le
freight forwarding
dépassent les 15 Md€.
150
Telles que le transport de produits frais en direction de l’Asie et l’importation en
Chine de produits en provenance d’Europe.
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DES AMBITIONS MENACÉES PAR DES INCERTITUDES SUR LES RELAIS DE
CROISSANCE
95
Sur le marché français, les perspectives de croissance des volumes
de colis restent fortes avec une croissance du e-commerce attendu à 7,5 %
par an entre 2015 et 2020
151
. Pour bénéficier de cette embellie, il est
impératif que les différents opérateurs de La Poste, GeoPost et Colissimo,
veillent à ne pas se concurrencer entre eux et à adapter leur offre en
fonction de l’évolution, très rapide, du marché du e-commerce.
B -
Des nouveaux relais de croissance qui apportent une
contribution encore marginale au résultat
Les nouveaux relais de croissance (nouveaux services, numérique)
ouvrent des perspectives positives pour La Poste : ils contribuent à
valoriser l’image de l’entreprise et donner un horizon aux postiers.
Néanmoins, en termes de résultat, leur apport, même cumulé, devrait
demeurer très inférieur à l’effet négatif des baisses de volume du
courrier (cf
.
tableau).
Tableau n° 8 :
potentiel attendu des « nouveaux services » et du
numérique par rapport au recul du courrier dans le plan stratégique
2014-2020
Évolution 2014-
2020 (M€)
Chiffre
d’affaires
Contribution
au total
REX
Contribution
au total
Total Groupe
+ 3 145
-
+ 1 257
-
Baisse des volumes
de courrier*
- 1 300
- 41 %
- 230
- 18 %
« Nouveaux
services du
facteur »
+ 200
6,4 %
+ 20
1,6 %
Numérique
+ 607
19,3
+ 103
8,2 %
Source : Cour des comptes, données La Poste. * Nette des augmentations de tarifs
151
Étude de Xerfi-Precepta de 2014.
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96
1 -
Les « nouveaux services du facteur » : un développement
embryonnaire
Dans le plan stratégique 2014-2020, la branche Services-Courrier-
Colis doit atteindre 1 Md€ d’activités nouvelles dans son chiffre
d’affaires en 2020, ce qui traduit l’ambition de parvenir en fin de période
à compenser, au sein de la branche, la baisse des volumes de courrier par
les relais de croissance. Les 200 M€ attendus des nouveaux services du
facteur peuvent, à cet égard, paraître « modestes », mais l’horizon fixé
n’en est pas moins ambitieux au regard de la réalité actuelle du
développement de ces services (20 M€ de chiffre d’affaires en 2015,
40 M€ attendus en 2016). Une enveloppe indicative de 1,5 Md€ de
croissance externe a ainsi été retenue pour permettre à la branche
d’atteindre cet objectif.
Au-delà des innovations les plus médiatiques (telles que la
participation de La Poste à l’organisation des épreuves du code de la
route), la direction du groupe fonde en particulier des espoirs dans le
développement de la «
silver economy
», qui est un gisement exploré par
d’autres opérateurs postaux
152
. La Poste a déjà une expérience dans le
service aux personnes âgées avec
Cohesio
, une visite de lien social
assurée par les facteurs au domicile de personnes âgées isolées, et, depuis
octobre 2016, l’offre « Veiller sur mes parents »
153
. Si certaines activités
de la «
silver economy
» pourraient s’inscrire dans la continuité de ces
premières expériences (installation de matériel médical à domicile par
exemple), d’autres modèles d’affaires paraissent difficilement abordables
par La Poste (maisons de retraite) : la question du choix des secteurs à
investir est donc cruciale.
La capacité de la branche à assurer la montée en charge rapide des
nouveaux services du facteur est également un sujet d’interrogation. En
effet, alors que les expérimentations ont été nombreuses en 2013-2014, ce
152
PostNord s’est engagé dans la logistique du médicament et l’installation de
matériel médical à domicile. Deutsche Post et Japan Post proposent des visites
régulières chez les personnes âgées. Poste Italiane propose une solution de gestion du
dossier électronique du patient et d’échange des données de santé, de même que la
vente sur internet de médicaments et produits de santé.
153
Cette offre s’adresse aux familles et consiste en : une visite de proximité
(fréquence à choisir entre 2 et 6 fois par semaine) ; un système d’aide et de support
pour les menus travaux ; une téléassistance.
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DES AMBITIONS MENACÉES PAR DES INCERTITUDES SUR LES RELAIS DE
CROISSANCE
97
n’est qu’en 2015 qu’une demi-douzaine de domaines prioritaires
154
ont
été ciblés et que des équipes de projet ont été constituées pour les
développer. Si une acquisition significative a eu lieu en octobre 2016
155
,
La Poste doit encore faire la preuve de son aptitude à « industrialiser » les
projets les plus prometteurs.
S’il est encore trop tôt pour estimer le potentiel réel de réussite de
cette stratégie de diversification, La Poste devra rester vigilante : les
« nouveaux services » peuvent utilement constituer un pourvoyeur
d’activité pour le réseau des facteurs, mais ils ne doivent en revanche ni
bloquer son redimensionnement ni rigidifier la baisse des effectifs.
Enfin, il faut souligner que cette diversification apparaît beaucoup
plus tardivement que chez d’autres opérateurs, tel
Swiss Post
où elle s’est
révélée depuis longtemps payante.
La diversification des activités de
Swiss Post
Swiss Post
est un opérateur postal très rentable, avec une marge qui
avoisine les 10 % ces cinq dernières années. Son modèle économique
s’appuie, entre autres, sur les services financiers (PostFinance), qui
représentent environ la moitié du REX, mais également sur l’activité
postale « traditionnelle » dont la marge a atteint 13,3 % en 2014,
notamment grâce à des hausses de tarif (+8,6 % par an en moyenne entre
2010 et 2014). Enfin, 23 % du chiffre d’affaires en 2014 sont réalisés par
les activités autres que postales, logistiques et financières.
La plus importante d’entre elles, l’activité de transport de
voyageurs par la route, CarPostal, a été créée en 1906. Avec 140,6
millions de voyageurs transportés en 2014, CarPostal est la plus
importante société de transport par car de Suisse. En 2014, son chiffre
d’affaires a atteint 832 M€, soit 9 % du chiffre d’affaires du groupe, et son
REX 29 M€, soit 4 % du total (soit un taux de marge de 3,6 %).
154
La collecte d’informations (Proxi Data), le portage de proximité (Proxi Courses),
l’installation et la mise en main d’équipements (Proxi Equip), la vigie des personnes
et des biens (Proxi Vigie), la remise ou collecte commentées (Proxi Contact), la
collecte et le recyclage (Recy’go), auxquels s’ajoutent des propositions en direction
des collectivités locales (services d’accompagnement à la rénovation énergétique, aide
à la dénomination et à la numérotation des voies).
155
Axeo Services (une franchise de 180 agences de services à la personne).
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COUR DES COMPTES
98
Swiss Post
est également numéro 1 pour la téléphonie mobile
prépayée : les ventes de produits tiers au guichet ont ainsi représenté un
chiffre d’affaires de 487 M€ en 2014.
La diversification de
Swiss Post
devrait se poursuivre à l’avenir, le
groupe affichant les six priorités de développement suivantes : le
e-commerce (avec son site Postshop.ch, dont le chiffre d’affaires avoisine
450 M€ par an, ce qui permet d’amortir en partie le 2
ème
réseau de bureaux
de postes le plus dense d’Europe), les solutions de mobilité (comme la
gestion de systèmes de covoiturage), la banque en ligne, la cyber-santé
(dossier électronique du patient avec la plateforme Vivates depuis 2011),
le marketing direct et la gestion de documents numérisés.
2 -
Des produits numériques qui ne présentent pas encore
de rentabilité
a)
Les ambitions financières encore mal établies
de la branche numérique
La Poste a affiché ses ambitions en matière de services numériques
en créant en 2014 une nouvelle branche numérique, à laquelle a été
assigné un objectif de 718 M€ de chiffre d’affaires et de 42 M€ de
résultat d’exploitation en 2020. Alors que la branche est actuellement
déficitaire (- 14 M€ en 2015), la prévision de son résultat d’exploitation
en 2020 a déjà été revue à la baisse par deux fois depuis 2014 (144 M€,
puis 65 M€, puis 42 M€). En outre, ces ambitions sont susceptibles de se
heurter à deux faiblesses.
D’abord, les holdings constitutives de la branche, Docapost SAS et
Mediapost
Communication,
présentent
un
modèle
économique
vulnérable. Le portefeuille d’activités de Docapost reste constitué pour
moitié d’activités physiques en extinction (traitement des chèques,
éditique industrielle et préparation de courriers en Bretagne), même si
cette entité génère un résultat d’exploitation positif (13,8 M€ en 2015) et
porte des projets prometteurs (une plateforme de services pour les
professionnels, des offres de dématérialisation des services de gestion).
Mediapost Communication est, elle, constituée de filiales acquises en
2011 et 2012, à faible rentabilité et cumule de manière récurrente des
pertes d’exploitation dont la résorption n’est pas acquise.
Ensuite, la croissance de la branche numérique doit provenir pour
moitié de la croissance externe. La trajectoire 2014-2020 du groupe
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DES AMBITIONS MENACÉES PAR DES INCERTITUDES SUR LES RELAIS DE
CROISSANCE
99
prévoit dans cet objectif une enveloppe indicative de 400 M€, dont 30 %
pour des acquisitions de start-ups. Or, ces montants doivent être investis
dans un secteur d’activité caractérisé par des valorisations élevées, une
forte incertitude et des taux de rentabilité difficiles à anticiper. Les
expériences contrastées de GeoPost avec les start-ups de la livraison
ultra-rapide sont éclairantes à cet égard, de même que l’activité du fonds
de capital-risque X-Ange, dont LBP a cédé le contrôle en 2015.
Les modalités de croissance externe de la branche numérique ont
besoin d’être revues : en envisageant des prises de participation (et non
des acquisitions), moins coûteuses, ce qui réduit l’impact des échecs
possibles ; en renforçant les diligences préalables aux décisions ; et
surtout, en recherchant plus de synergies commerciales entre les
nouvelles filiales et les services du groupe.
En tout état de cause, la contribution du numérique sera
insuffisante pour couvrir les manques à gagner liés à la chute du courrier.
Toutefois, l’apport de la branche numérique n’est pas que financier : elle
peut aussi contribuer à accélérer la numérisation des activités existantes, à
coordonner des projets au sein du groupe et à insuffler une nouvelle
culture.
b)
Les produits numériques de La Poste : des actifs en attente de
rentabilité
Si les projets relatifs à la numérisation des différentes étapes
logistiques du transport de colis sont bien avancés, principalement en
raison de la pression concurrentielle, ceux liés au courrier, activité où La
Poste est le seul acteur, sont encore en phase de démarrage (incitation à
recourir à la lettre recommandée électronique, ventes en ligne, utilisation
de Facteo dans les tournées).
Plusieurs projets innovants ont été mis en oeuvre au sein de la
branche Courrier, parfois de manière particulièrement précoce (service de
messagerie
en
2000,
coffre-fort
électronique
en
2009).
Leur
commercialisation reste toutefois très limitée. Ces activités sont
structurellement déficitaires, avec par exemple des pertes d’exploitation
récurrentes pour le coffre-électronique
156
. Cette situation est également
156
Entre 2009 et 2012, le plein développement commercial coffre-fort électronique a
été implicitement freiné, car sa cible, le courrier de gestion, représente la moitié du
CA du Courrier.
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100
décevante pour ce qui concerne la messagerie électronique, qui présente
des recettes publicitaires négligeables (2 M€ en 2014). Le « hub »
numérique pour objets connectés, créé en 2014-2015, est, lui, encore en
phase d’investissement. Il n’existe pas d’indicateur financier transversal
sur les investissements qui ont été alloués aux produits numériques depuis
leur création, outil qui garantirait que les montants investis jusqu’ici ont
été pleinement justifiés.
Nombre de ces projets pourraient être accélérés mais ils pâtissent
parfois d’une relative inertie, souvent non formulée explicitement, des
réseaux physiques (agences postales, facteurs), dont l’activité consiste en
la réalisation d’actes matériels (tournées de distribution, accueil en
agence, ventes).
Avec le coffre-fort, l’identité numérique et les objets connectés, La
Poste possède depuis 2009, 2014 et 2015, trois actifs sur des marchés
numériques émergents pour des montants investis encore faibles donc
soutenables à l’échelle du groupe. Néanmoins, il n’existe pas pour l’heure
de modèle de rentabilité tangible qui confirme la pertinence de ces choix :
la
stratégie
numérique
ne
présente
aujourd’hui
aucune
réussite
commerciale. La Poste n’a pas encore capitalisé dans le monde
numérique ses atouts et son image de marque.
Une réflexion stratégique sur la valorisation de ces actifs
numériques s’impose donc, afin d’étayer leur rentabilité. Une revue
d’ensemble pourrait avoir pour objectif de distinguer ceux qui peuvent
être mis en synergie avec d’autres activités du groupe pour améliorer leur
rentabilité, de ceux qui ne présentent plus d’intérêt stratégique ou
économique pour La Poste.
c)
Des transformations commerciales incomplètes
L’accroissement
des
services
permis
par
les
plateformes
numériques de La Poste et leur interconnexion avec d’autres offres et
services du groupe tardent à atteindre leurs objectifs quantitatifs et
qualitatifs. Cette situation s’illustre notamment par la lenteur et la
complexité de la convergence des différentes stratégies commerciales des
branches en matière de commercialisation sur l’internet. Il en est ainsi des
chantiers relatifs :
-
d’une part, à l’enregistrement de nouveaux clients lors d’une
opération auprès d’un facteur ou d’une agence postale, projet de
grande ampleur qui débute à peine. Alors que cet outil serait un
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DES AMBITIONS MENACÉES PAR DES INCERTITUDES SUR LES RELAIS DE
CROISSANCE
101
élément déterminant pour fidéliser la clientèle et lui proposer de
nouveaux produits, La Poste ne dispose par exemple pas encore
d’une base informatique unique de suivi des clients, quel que soit le
canal de contact choisi avec l’entreprise (site internet ou contact
physique) ; ce projet informatique n’en est qu’à ses débuts et prendra
plusieurs années ;
-
d’autre part, à la construction de synergies commerciales entre offres
et services des différentes branches du groupe. Faute de disposer
d’infrastructures
informatiques
rapidement
adaptables
et
d’incitations fortes aux regroupements transversaux, les produits
numériques ne sont pour l’instant que des actifs peu partagés et peu
intégrés aux autres produits et services de La Poste.
Dans des marchés hautement concurrentiels, par exemple ceux liés
aux services numériques aux entreprises où est déjà présente Orange, ces
lacunes devraient constituer un axe de travail prioritaire du groupe. La
diffusion commerciale des offres numériques structurées à l’échelle du
groupe tout entier et la conquête de marchés liés aux usages en masse de
l’internet ne sont pas encore des réalités.
La réalisation des ambitions de la stratégie numérique de La Poste
d’ici 2020 dépendra donc d’une professionnalisation rapide et poussée
des équipes pour les adapter aux marchés de l’internet commercial,
souvent
en
rapide
évolution
et
requérant
une
forte
technicité
(développement informatique, exploitation des données). Dans un
contexte où les recrutements externes ne peuvent qu’être rares, cela
passera par une politique résolue de formation des personnels.
__________ CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS __________
L’examen des plans stratégiques de La Poste depuis 2010 montre
que leurs prévisions financières se sont presque toujours révélées trop
ambitieuses et ont dû être révisées à la baisse. Si la crise de 2008-2009
avait pu constituer une cause exogène, l’analyse montre que La Poste a
surestimé sa capacité à retrouver les résultats antérieurs, notamment
parce qu’elle a pendant un temps sous-estimé l’ampleur des chocs subis,
au premier rang desquels la baisse des volumes du courrier.
La capacité de La Poste à réaliser son plan stratégique 2014-2020
est donc sujette à interrogation. Malgré une réalisation pour l’instant
meilleure
que
les
prévisions,
plusieurs
motifs
d’inquiétude
se
superposent :
-
il ne peut être exclu que la baisse du courrier s’accélère ;
La Poste - décembre 2016
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COUR DES COMPTES
102
-
les hausses de tarifs qui ont jusqu’à présent compensé en partie ses
effets devront trouver une limite, sauf à risquer d’accélérer la baisse
des volumes ;
-
si la croissance du commerce en ligne et l’essor du colis
transfrontalier représentent des opportunités, la concurrence très
vive sur ce marché, qui tire les prix vers le bas et oblige à une
amélioration constante de la qualité du service, peut nuire aux
perspectives financières de l’activité.
-
enfin, le niveau exceptionnellement et durablement bas des taux
d’intérêt représente un important manque à gagner pour La Banque
Postale, que les obligations prudentielles pourraient aggraver.
À l’horizon du plan stratégique, ses deux principales novations ne
pourront compenser ces risques : si la branche numérique traduit la
volonté de rattraper le temps perdu, elle ne dégage pas de résultat et
ses offres commerciales demeurent peu intégrées aux offres historiques ;
quant aux nouveaux services du facteur, ils sont encore en phase de
développement.
Cette situation oblige La Poste à actionner tous les leviers à sa
disposition pour préserver son équilibre économique. En conséquence, la
Cour formule les recommandations suivantes :
•
inclure systématiquement dans les trajectoires financières des
plans stratégiques des scénarios alternatifs prévoyant des
mesures supplémentaires en cas d’accentuation des risques ;
•
développer auprès du public, dans le cadre d’une démarche
commerciale structurée, les offres de services et produits
numériques.
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Chapitre IV
Changer La Poste pour mieux la
préserver : une accélération nécessaire
des réformes
Bien qu’elle soit en avance sur ses objectifs à la suite de résultats
meilleurs que prévus au cours de ces cinq derniers semestres, La Poste
reste engagée dans une course contre le temps. Il est loin d’être acquis
que l’ambition du plan stratégique 2014-2020 de réaliser 2 Md€ de REX
en fin de période soit atteinte. Les bons résultats récents ne doivent pas
masquer, en effet, les risques qui peuvent menacer le groupe et amener
l’entreprise à renoncer à des efforts exigeants en vue de sa
transformation.
Le maintien de taux d’intérêt bas, voire négatifs, remet en cause
l’apport de La Banque Postale aux résultats du groupe et, plus
globalement, une stratégie consistant à s’appuyer sur ses relais de
croissance pour gagner du temps afin d’accompagner le déclin ses
activités traditionnelles (courrier, réseau). L’intensité de la concurrence
dans le secteur du colis-express peut également conduire à une baisse des
revenus attendus de cette activité, en contribuant à tirer les prix vers le
bas. Enfin, les nouveaux relais de croissance, sur lesquels s’appuie le plan
stratégique 2014-2020, sont encore loin d’être rentables et de contribuer
significativement aux résultats du groupe. Dans ce contexte, et alors que
La Poste n’est pas à l’abri d’une chute plus rapide des volumes de
courrier, elle doit mobiliser tous les leviers à sa disposition pour
consolider son modèle économique face à ces facteurs de vulnérabilité.
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COUR DES COMPTES
104
Il est urgent pour La Poste, d’une part, de mieux maîtriser ses
charges, notamment en limitant le coût de ses réseaux et celui de sa masse
salariale, et en améliorant sa gestion. Il est, d’autre part, indispensable
que le groupe tire pleinement parti de son modèle stratégique, en
développant les synergies entre ses différentes activités et en menant une
politique de croissance externe cohérente. Enfin, il revient à l’État
d’examiner les
leviers susceptibles d’être actionnés en lançant,
notamment, une réflexion sur le contenu des missions de service public
qui lui sont confiées.
I -
Renforcer les leviers de maîtrise des charges
Le Réseau et le Courrier ont fait la preuve de leur capacité à
maîtriser leurs charges pour faire face à la crise, mais ont ensuite subi les
conséquences du « Grand Dialogue », qui a ralenti les réorganisations et
les efforts de productivité au moment où la baisse d’activité s’accélérait.
L’ampleur du choc que représente cette baisse, ainsi que les
incertitudes associées à plusieurs variables clés du plan stratégique,
obligent La Poste à intensifier ses efforts.
A -
La nécessaire baisse des coûts des réseaux
La Poste devra dans les années à venir chercher sans relâche à
réduire les coûts de ses réseaux (bureaux de poste et facteurs), à la fois au
niveau de chaque établissement et en les appréhendant sur des périmètres
plus larges. Une telle démarche, qui s’inscrit nécessairement dans une
logique de moyen, voire de long terme, est plus exigeante que la maîtrise
des charges réalisée jusqu’à présent, car elle oblige à remettre en cause
l’organisation du travail.
1 -
Améliorer l’efficience du tri et de la distribution du courrier
La baisse des effectifs des facteurs a été au cours des dernières
années moins rapide que celle des volumes. Il est impératif d’arrêter ou
tout au moins de contenir au maximum l’augmentation du coût par objet
qui en résulte. En effet, celle-ci se révélera insoutenable dans la durée, car
on ne pourra augmenter indéfiniment les tarifs pour la compenser.
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NÉCESSAIRE DES RÉFORMES
105
Cette situation doit inciter La Poste à donner une plus grande place
à l’enjeu de la productivité dans le pilotage et dans l’évaluation des
établissements de distribution, en introduisant un objectif de productivité
physique et de coût unitaire de la distribution sur lequel chaque
responsable aurait à rendre compte régulièrement.
Un des axes d’amélioration de la productivité est la réduction du
temps des travaux intérieurs : alors que, grâce à l’automatisation du tri
réalisée en créant les plateformes industrielle du courrier, une grande
majorité du courrier est délivré aux plateformes de distribution « trié dans
l’ordre de la sacoche du facteur », le temps des « travaux intérieurs »,
c’est-à-dire des tris effectués par les facteurs dans ces plateformes, a
vocation à devenir résiduel.
S’agissant des « travaux extérieurs », autrement dit des tournées de
distribution, des gains sont aussi possibles. Si le programme « Facteurs
d’Avenir » en a réalisé certains, en organisant le travail par équipes et en
attribuant, les jours de faible trafic, les rues d’un secteur laissé vacant aux
secteurs voisins, des progrès sont possibles :
-
le partage de secteurs entre les facteurs (la « sécabilité ») n’est pas
généralisé et, notamment, n’est pas effectué tous les jours où cela
serait utile ;
-
alors que La Poste a développé des outils sophistiqués pour calculer
le temps de travail nécessaire compte tenu de la disposition des
boîtes aux lettres sur le terrain, de la composition du courrier et de sa
quantité, elle ne se sert de ces outils qu’à l’occasion des
réorganisations, tous les deux ans environ, au lieu de s’en servir tout
au long de l’année pour mesurer et mieux répartir entre les facteurs
la charge de travail engendrée par le trafic de courrier effectif.
Un élément déterminant de l’efficience de la distribution réside
dans la réorganisation régulière des tournées. Leur fréquence (qui tout en
respectant le délai minimum de deux ans fixé par la direction de La Poste,
ne devrait pas ou guère excéder cette durée) ainsi que l’atteinte de leurs
objectifs
constituent
des
facteurs
clés
de
la
performance
des
établissements de distribution. En effet, ces réorganisations, en
redécoupant les secteurs qui leur sont confiés, évitent que des facteurs
restent en partie inoccupés du fait de la baisse des volumes. Elles
permettent aussi de déployer des organisations du travail innovantes –
mais déjà en vigueur dans beaucoup de postes étrangères. Or, à la fin de
2014, cela n’était fait que pour 18 % des 58 000 tournées.
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COUR DES COMPTES
106
En dépit des conflits auxquels elles donnent parfois lieu, les
réorganisations de la distribution sont dans l’intérêt collectif, en tant
qu’elles concourent à maintenir à un niveau soutenable le coût du réseau
de distribution. Une réflexion pourra dès lors se révéler nécessaire sur
certaines particularités qui peuvent les freiner, principalement la tradition
de la « vente » des quartiers, qui, outre qu’elle relègue au second plan les
critères de performance individuelle, peut représenter une contrainte forte
lors des redécoupages de tournées.
Enfin, les boîtes aux lettres collectives et l’amélioration du
raccordement postal sont deux voies d’amélioration de la productivité de
la distribution qui devront être explorées de manière volontariste, même
si elles impliquent des évolutions réglementaires.
2 -
Accélérer les transformations au sein du Réseau
a)
Le poids du réseau des bureaux de poste
Une caractéristique importante du groupe est que toutes ses
activités sont aussi en partie dépendantes du réseau des bureaux de poste,
dont elles se partagent les charges par refacturation. Même si les branches
ont la maîtrise de certaines dépenses du réseau (par exemple, il relève
d’une décision de LBP d’installer des automates bancaires), elles se
partagent également des coûts de structure sans lien direct avec leur
activité. Par conséquent, un objectif constant des plans stratégiques
depuis 2008 est que le réseau assure au moins la stabilité en euros
courants des charges qu’il refacture aux autres branches.
Ces dernières années, le réseau a consenti des efforts notables pour
se transformer, en poursuivant la diversification des points de contact
(cf
.
supra
chapitre I, II-B) la différenciation des formats de bureaux
(les bureaux conservés en propre devenant à titre principal des agences
bancaires). Les charges du réseau
157
ont ainsi baissé de 8,1 % entre 2008
et 2014, c’est-à-dire une performance meilleure qu’escomptée dans le
plan stratégique 2010-2015 (cf
.
graphique ci-après).
157
70 % concerne de la masse salariale, les 30 % restant comprenant notamment
l’immobilier et les systèmes d’information.
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NÉCESSAIRE DES RÉFORMES
107
Graphique n° 20 :
évolution des charges du réseau
Source : Cour des comptes, données La Poste
La poursuite de la maîtrise des coûts du réseau se justifie
néanmoins par la dégradation de sa productivité parallèlement à la baisse
de son activité.
b)
Une activité qui oblige à accélérer la transformation, surtout en
zone urbaine
L’activité des bureaux de poste a diminué de près de 28 % entre
2010 et 2015, proportion très supérieure à la baisse des coûts et de
l’effectif, si bien que les coûts unitaires et la productivité par agent se
sont dégradés. Le nombre de bureaux de poste à faible et très faible
activité a ainsi progressé de 7 %, avec une hausse de près de 45 % en
milieu urbain
158
.
158
L’activité des bureaux de poste est mesurée en millions de minutes d’opérations de
guichet produites dans l’année (dites minutes « ROP » pour référentiel des opérations
postales).
3,9
4,1
4,3
4,5
4,7
4,9
2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020
PS 2008‐2012
PS 2010‐2015
PS 2014‐2020
Réalisé
Md€
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108
0
500
1000
1500
2010 2015
Très
faible
activité
URBAIN
Faible
activité
URBAIN
Graphique n° 21 :
évolution du nombre de bureaux de poste à faible
et très faible activité
Source : La Poste, Retraitements Cour des comptes. Les bureaux de poste de faible activité
correspondent à environ une à trois heures d’activité effective par jour (de 16 000 minutes ROP
à moins de 40 000 minutes ROP par an) et les bureaux de poste de très faible activité à une
heure d’activité ou moins par jour (soit moins de 15 000 minutes ROP par an).
Pour respecter l’objectif du plan stratégique 2014-2020 d’un coût
total du réseau inférieur à 4 Md€ en 2020
159
, des efforts devront de
nouveau être accomplis, notamment par la restructuration des bureaux de
poste en milieu urbain et par la poursuite des mutualisations en milieu
rural, en particulier avec le développement des maisons de service au
public (cf
.
supra
chapitre II, IV-B 3), mais également grâce à une baisse
du coût des fonctions de soutien (- 20 % attendus à horizon 2020).
La restructuration du réseau urbain constitue à cet égard une
priorité. Compte tenu des coûts élevés de l'immobilier en zone urbaine,
elle est en effet de nature à dégager des économies substantielles. Or, elle
est beaucoup moins engagée en milieu urbain (où en janvier 2016,
seulement 10,4 % des points de contacts du réseau urbain, soit 712,
s’appuyaient sur des partenariats), qu’en milieu rural, si bien que le
nombre de bureaux de plein exercice a très peu varié en milieu urbain au
cours des dernières années, comme le montre le graphique ci-après.
159
Correspond à une baisse des coûts (y compris masse salariale) de 3,5 % par an
(hors CICE).
0
1000
2000
3000
4000
2010
2015
Très
faible
activité
RURAL
Faible
activité
RURAL
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109
Graphique n° 22 :
évolution du nombre de bureaux de poste selon les
zones de chalandise
Source : La Poste, retraitements Cour des comptes
Une partie des gains tirés de la restructuration du réseau devrait
servir à mieux répondre aux besoins des quartiers prioritaires de la
politique de la ville en y améliorant le service là où cela est nécessaire.
B -
Amplifier l’effort d’adaptation des effectifs et des
carrières
La Poste devra mener des exercices contraints et ambitieux pour
maîtriser ses charges, exercices principalement liés aux sujets des
ressources humaines, puisqu’il s’agit de maintenir une politique de
baisses d’effectifs et de modération salariale dans un contexte
d’adaptations des métiers et des carrières, notamment des facteurs.
1 -
Adapter les effectifs de postiers aux nouveaux métiers
a)
Des contraintes exigeantes à l’avenir
Le groupe comptait en moyenne 253 158 ETP en 2015, répartis
comme suit :
0
500
1000
1500
2000
2500
3000
3500
2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015
Hyper centre
Urbain
Suburbain
Ville à la
Campagne
Village Pôle
Rural
Village
Mayotte et
autres
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COUR DES COMPTES
110
Graphique n° 23 :
effectifs du groupe La Poste
Source : La Poste
Dans le plan stratégique 2014-2020, l’objectif affiché est un taux
annuel de remplacement des départs entre 20 et 25 %. Il s’agit donc de
revenir au niveau des résultats réalisés en 2010 – ce qui a été le cas en
2015 avec un taux de remplacement qui a été limité à 23 % – et surtout de
le maintenir ces prochaines années.
Pour l’avenir, cet effort de maîtrise des effectifs devra s’effectuer
sous deux contraintes exigeantes :
-
les départs naturels seront en recul : les départs en retraite sont en
diminution régulière, avec 6 392 départs en 2015 (soit 3 % des
effectifs) contre plus de 9 000 en 2008. Cette situation va durer, avec
une démographie relativement défavorable aux retraites jusqu’en
2018. En y ajoutant les autres départs volontaires, les départs
naturels totaux seront quasiment divisés par deux par rapport à la
période 2008-2015. Il sera donc nécessaire de prolonger voire
d’accentuer les incitations aux départs volontaires telles que les pré-
retraites (l’accès au dispositif « TPAS » a déjà été facilité à partir de
2015, pour une provision comptable de 143 M€), ainsi que les
dispositifs de formation, de reconversion et de mobilité, encore peu
efficaces, quoiqu’en progrès depuis 2015
160
;
160
La Poste a par exemple augmenté en 2015 son taux de formation par agent et le
pourcentage de sa masse salariale consacré à la formation (3,9 % en 2015 contre
3,5 % en 2014 et 3,6 % en 2013). Sont désormais relevés 6 687 parcours qualifiants
de postiers, 385 mobilités de la maison mère vers les filiales et 1 303 mobilités inter-
branches.
La Poste
(maison‐
mère,
France)…
Filiales
françaises
10%
Filiales
étrangères
9%
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NÉCESSAIRE DES RÉFORMES
111
-
il faudra identifier année après année de nouvelles sources de
productivité et les projets industriels associés, qui sont de plus en
plus difficiles à mettre en oeuvre au fur et à mesure que les effectifs
se réduisent. À titre d’exemple, au Courrier, la substitution
capital/travail a déjà été en grande partie réalisée
161
. Il faudra donc
revoir l’organisation du travail des agents en maintenant un rythme
de réorganisation conforme aux baisses de volumes de courrier,
exigence qui peut être porteuse de tensions sociales.
b)
Des carrières à réinventer : l’exemple des facteurs
La difficulté que va éprouver La Poste à l’avenir à réaliser de
nouveaux gains de productivité en diminuant ses effectifs lui impose de
considérer d’autres options et, notamment, de repenser les carrières des
agents. Cette analyse est particulièrement avérée dans le cas des effectifs
du Courrier, qui représentent une partie substantielle des effectifs du
groupe La Poste (45 % en 2015) et où d’importantes baisses
d’effectifs ont été constatées ces dernières années (cf. Chapitre I, III – C).
Au sein du Courrier, être facteur est le métier le plus courant. La
Cour a déjà relevé l’existence d’un sureffectif dans ces fonctions
162
, en
raison d’une productivité technique supérieure à la capacité à faire
évoluer les facteurs vers de nouveaux emplois. Par ailleurs, leur pyramide
des âges, avec des départs en retraite en-deçà des besoins liés à la baisse
des volumes de courrier, est défavorable à une maîtrise des effectifs. Dans
la trajectoire qui sous-tend son plan stratégique, le Courrier ajoute aux
prévisions de départs en retraite l’hypothèse de maintien des dispositifs
de départ anticipé (entre 1 000 et 1 400 départs par an), et un nombre
équivalent de sorties définitives, correspondant à une stabilité par rapport
à la situation de 2013.
161
Dans son
Rapport public thématique : La Poste : un service public face à un défi
sans précédent, une mutation nécessaire
, p.104. La Documentation française, juillet
2010, 190 p., disponible sur www.ccomptes.fr,
la Cour soulignait déjà que « la
concrétisation des gains de productivité, c’est-à-dire l'ajustement des effectifs aux
évolutions de l’activité, va devenir une préoccupation cruciale et difficile dans un
contexte où des mesures de départs imposés ne peuvent être envisagées pour les
fonctionnaires et ne sont pas envisagées par La Poste pour les autres salariés ».
162
Rapport public annuel 2016, Tome 1, p. 397-428
. Les facteurs face au défi de la
baisse du courrier : des mutations à accélérer. La Documentation française, 696 p.,
disponible sur www.ccomptes.fr
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112
Alors que les difficultés à maîtriser les effectifs de facteurs ont été
identifiées par La Poste comme « risque majeur » de gestion dès 2013, la
mise en oeuvre de plans d’action visant à confirmer les hypothèses du
plan stratégique en agissant notamment sur les dynamiques de carrière est
indispensable. En dépit de la prorogation du dispositif de facilitation des
fins de carrière (549 facteurs en 2014, 765 en 2015), des pistes comme
l’orientation vers le temps partiel choisi, ou les mobilités vers les
fonctions de guichetiers (163 en 2015) ou vers les filiales (51 cas en
2015) sont encore trop peu explorées au regard des objectifs.
La gestion des carrières est aujourd’hui théoriquement orientée
vers deux objectifs : assurer les ajustements de postes nécessaires par la
voie interne et susciter des flux de mobilité sortants au-delà des départs
naturels attendus. Or, l’examen des dispositifs actuels de mobilité hors
des branches montre que ces objectifs seront difficiles à atteindre à
modèle de carrière inchangé. En effet, la gestion actuelle des carrières
présente plusieurs faiblesses :
-
une mobilité limitée qui ne concourt pas à la réduction des effectifs ;
-
des instruments d’accompagnement à la mobilité peu différenciés
malgré des progrès récents ;
-
des exercices locaux de gestion prévisionnelle des emplois et des
compétences (GPEC) de pure forme et qui requièrent une plus forte
professionnalisation et autonomie des filières RH ;
-
des actions de formation encore insuffisantes car trop centrées sur
l’adaptation aux postes actuels, au lieu de viser des évolutions ou des
reconversions.
Afin de préparer l’avenir du modèle social de La Poste et de
continuer à adapter les effectifs au déclin de certaines activités comme le
courrier, l’entreprise doit préciser la gestion prévisionnelle des emplois et
des compétences (GPEC) mise en place en 2015. Distinguer les secteurs
nécessitant le maintien d’effectifs de ceux dont les gains de productivité
ou la démographie autoriseraient un moindre renouvellement des départs
en
retraite
sera
nécessaire.
Ce
travail
doit
s’accompagner
de
l’intensification des parcours de formation, en lien avec la montée en
charge des services et du colis ou de La Banque Postale.
La Poste a pris conscience de cette situation et a entamé la
rénovation de ses instruments d’accompagnement de carrière, sur la base
de l’accord social de février 2015.
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113
2 -
Lier l’évolution salariale aux objectifs stratégiques
Depuis les années 2000, La Poste a davantage mobilisé le levier
des effectifs que la rigueur salariale. En outre, dans le contexte du
« Grand Dialogue », les efforts de maîtrise de la masse salariale ont été
moindres et, par la suite, la reprise de la baisse des effectifs s’est même
accompagnée d’une augmentation des rémunérations moyennes.
Il est à cet égard regrettable que La Poste ne calcule plus la
rémunération moyenne des personnes en place (RMPP), indicateur qui
décrit l’évolution dont ont bénéficié les personnes demeurées dans
l’entreprise et qui est donc le plus pertinent pour appréhender la politique
salariale lorsque les effectifs varient beaucoup.
À partir de 2014, La Poste a mis en place une série de mesures
visant à engager un effort accru de maîtrise des rémunérations. Les
revalorisations salariales annuelles, les promotions et les taux de
remplacement ont ainsi été réduits par rapport aux années précédentes,
tant pour les personnels d’exécution que pour les cadres.
Le facteur principal de hausse des rémunérations du groupe dans
les prochaines années concerne les rémunérations dans les filiales (19 %
des dépenses totales de personnel du groupe en 2014). En effet, selon le
contrôle général économique et financier
163
, alors que les dépenses de
personnel ont diminué de 0,7 % entre 2013 et 2014 pour La Poste SA, ces
dépenses ont augmenté de 0,9 % sur cette même période pour l’ensemble
du groupe. Alors que les économies salariales issues de la baisse des
effectifs totaux se sont élevées à 285 M€ entre 2014 et 2015, la masse
salariale des filiales du groupe a parallèlement crû à elle-seule de 229 M€.
Cet effet est notamment expliqué par des décisions autonomes de
revalorisation salariale dans les filiales, par exemple au sein des filiales
françaises de GeoPost, qui ont bénéficié ces dernières années de hausses
qu’expliquent le développement de l’activité, mais aussi une gestion plus
décentralisée des rémunérations.
La Poste devra également faire face dans les prochaines années à
des facteurs structurels de hausse de la masse salariale, comme les
promotions et la déformation de la structure des qualifications au profit
d’emplois plus qualifiés et donc plus coûteux. La revalorisation du point
d’indice des fonctionnaires au 1
er
juillet 2016 et au 1
er
février 2017
(+1,2 % au total), qui concerne 46 % de l’effectif de La Poste, pourrait
163
Rapport annuel 2015 de la mission de contrôle auprès du groupe La Poste.
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114
également contribuer à la dynamique générale des salaires, de même que
la traduction de l’accord sur les parcours professionnels, les carrières et
rémunérations (PPCR).
La maîtrise de son premier poste de coûts, les rémunérations, va
donc exiger de La Poste une rigueur égale dans la baisse des effectifs et
dans la politique salariale. Celle-ci devra s’attacher à plusieurs objectifs
simultanés : circonscrire les augmentations aux agents qui s’engagent
dans un processus d’amélioration des compétences ou de transformation
significative de leur métier, tout en veillant à limiter les effets
inflationnistes des rémunérations dans ses filiales.
C -
Des gisements d’économie à exploiter
Trois domaines illustrent les potentiels d’économie qui peuvent
encore être mobilisés dans la gestion interne de l’entreprise.
1 -
Le poids excessif des fonctions de soutien
Le rapport public thématique de 2010
164
signalait l’hypertrophie
des fonctions de soutien au sein de l’effectif du groupe La Poste, qui se
manifestait à la fois par la proportion élevée dans l’effectif du groupe de
fonctions comme les ressources humaines ou les finances, par
l’optimisation insuffisante de ces fonctions de soutien au sein de chaque
métier et par des redondances entre les métiers et la tête du groupe.
La recommandation faite dans ce rapport de diminuer les effectifs
des fonctions de soutien a été peu suivie : en 2013, ceux de la maison
mère avaient même légèrement augmenté par rapport à 2008. C’est donc
à juste titre que le plan stratégique La Poste 2020 a prévu un effort
spécifique de réduction des coûts des sièges et des structures, sous la
forme d’un « projet prioritaire » nommé « Servir le développement »,
confié au secrétaire général du groupe.
164
Rapport public thématique : La Poste : un service public face à un défi sans
précédent, une mutation nécessaire
. La Documentation française, juillet 2010, 190 p.,
disponible sur www.ccomptes.fr
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115
Tableau n° 9 :
effectifs de siège et de structure du groupe La Poste
2005
2008
2011
2013
2015
25 700
23 600
n.c
24 000
23 675
Source : La Poste
Il importe que cet effort produise des résultats. Si une baisse des
effectifs de ces fonctions de soutien s’est amorcée en 2015, La Poste n’a
pas été en mesure de communiquer lors de l’instruction l’évolution de
leur coût, qui était estimé à 2,5 Md€ en 2013
Le regroupement des sièges des différentes branches – à
l’exception de La Banque Postale – qui a été réalisé à la limite de Paris et
d’Issy les Moulineaux (92) au premier semestre de 2016, il est vrai sur
trois sites et non dans un bâtiment unique, a selon La Poste engendré une
économie de 11 M€. Il ne pourra que faciliter la recherche de synergies et
l’élimination des redondances.
2 -
L’enjeu de l’optimisation des coûts immobiliers
La réforme de la gestion immobilière a permis de diminuer les
surfaces occupées de 656 000 mètres carrés entre 2010 et 2014, soit -
13 %, mais les coûts facturés par Poste Immo aux métiers ont augmenté
de 748 M€ à 843 M€, en raison de l’accroissement de la part des locaux
loués et des travaux de rénovation. Ces deux évolutions étaient sans doute
nécessaires à l’optimisation des surfaces, à la réalisation de cessions et à
l’amélioration de l’accueil du public, mais réduire le coût de la fonction
immobilière, qui s’élève à 1,2 Md€
165
, doit constituer l’objectif central du
pôle immobilier. À cette fin, les travaux menés par la Cour ont identifié,
de manière non exhaustive, certaines actions possibles. La planification à
moyen terme au plan local des besoins de surfaces des branches ou
filiales utilisatrices, de leur utilisation et des économies réalisables doit
devenir plus systématique et plus approfondie. Cette planification doit
être menée en englobant toutes les branches et filiales du groupe présents
dans la ville ou sur le territoire concernés.
165
Pour les 6,5 millions de mètres carrés (85 % des surfaces occupées en France par le
groupe), gérés par le pôle immobilier.
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116
Des ratios de mètres carrés par agent doivent être définis pour les
différents types d’activité et cette planification doit se donner l’objectif de
les respecter strictement.
Le taux de vacance, autrement dit les surfaces inoccupées, dépasse
15 % des surfaces totales depuis 2012, en raison notamment des surfaces
restituées par les utilisateurs. Le manque à gagner (estimé par les loyers
qui serait perçus si elles étaient louées) peut être chiffré entre 80 M€ et
95 M€. Un tel enjeu justifie un plan d’action spécifique pour céder les
surfaces inoccupées ou pour valoriser de toutes les manières possibles
celles qui ne peuvent être cédées.
Enfin, un suivi plus fin des dépenses énergétiques, dans chaque
local et dans le temps, permettrait de réduire les charges immobilières.
3 -
Le gisement majeur des achats
Les enquêtes de la Cour ont mis en évidence des cas trop
nombreux où les procédures de passation des contrats avaient été
irrégulières ou défaillantes. Par exemple, dans le cas des équipements
téléphoniques de l’Enseigne (ancienne dénomination du Réseau), la
prolongation irrégulière de contrats qui dataient de 2005 pendant trente
mois, de janvier 2009 à juillet 2011, a privé La Poste de la baisse des prix
dans ce secteur, et le manque à gagner peut être estimé à 3,8 M€.
Le simple rapprochement entre le montant des achats identifié par
la direction des achats du groupe (3,4 Md€) et celui qui apparaît dans les
comptes consolidés (8,0 Md€) montre que la centralisation des besoins et
la mutualisation des contrats peuvent encore progresser.
Un exemple de gain : la flotte de téléphones mobiles
En dehors du smartphone Facteo qui équipe les facteurs, La Poste
fournit fréquemment à ses salariés des téléphones mobiles : avec 46 930
lignes, sa flotte est une des dix premières de France. La gestion de ces
équipements était éclatée entre un grand nombre d’entités et les contrats
passés avec plusieurs opérateurs, sans stratégie d’ensemble.
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117
En 2013, la gestion de ce besoin a été confiée à la branche Service-
Courrier-Colis, qui bénéficiait de l’expérience de Facteo. En concertation
avec les autres branches ou filiales utilisatrices, elle a su standardiser les
besoins selon des profils type et définir des règles contractuelles
communes ainsi que des modalités simplifiées de facturation et de suivi
financier. Sur ces bases, une consultation unique pour toute la flotte a été
lancée. Selon la direction des achats de la branche, le nouveau contrat a
engendré un gain de 30 % par rapport à la situation antérieure, soit 9 M€
en cinq ans.
Par ailleurs, le management des équipes effectuant les achats doit
être plus orienté vers la performance, mesurée principalement par le
« gain achat » réalisé à l’occasion de chaque contrat. Ainsi, ce gain n’était
pas mesuré au service achats du pôle immobilier, et dans aucun des
services achats examinés par la Cour, la rémunération des acheteurs
n’était liée aux gains achat réalisés.
II -
Tirer toutes les conséquences du choix d’un
« modèle multi-métiers »
La Poste a réaffirmé, dans le cadre de son plan stratégique
2014-2020, le choix d’un modèle reposant sur plusieurs métiers
(modèle multi-métiers), à rebours des autres opérateurs européens. Si ce
choix n’est pas en lui-même contestable, encore faut-il que La Poste
parvienne à en améliorer la cohérence interne par des actions
volontaristes en matière d’organisation et par des choix stratégiques
pertinents en matière de croissance externe.
A -
Un choix de longue date, qui s’est avéré
jusqu’ici pertinent
Bien avant que le courrier ne soit fragilisé par la baisse rapide des
volumes, La Poste a choisi de développer un modèle multi-métiers. Ce
choix a été largement contraint : il s’est agi en créant La Banque Postale
de financer un réseau de bureaux de poste dont la taille était prédéfinie,
et, avec les activités de colis, d’assurer le plan de charge du réseau de
facteurs menacé par la baisse du courrier.
Tant la banque que le colis-express ont joué leur rôle au plan
financier et ont aidé La Poste à compenser la chute du courrier. Le
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118
modèle multi-métiers a ainsi permis aux résultats de La Poste de se
maintenir malgré l’importance des chocs subis.
L’effort de diversification de La Poste a néanmoins été plus tardif
et plus limité que chez d’autres grands opérateurs postaux européens, qui
ont fait des choix plus radicaux de changement de modèle, comme
l’Allemagne avec la logistique ou l’Italie avec les services financiers
(cf
.
aussi l’annexe n° 7 sur les opérateurs étrangers) :
Graphique n° 24 :
structure comparée du chiffre d’affaires (2014)
Source : La Poste, « Benchmark 2014 des opérateurs postaux européens »
Ces
transformations
en
profondeur du
modèle
postal
les
immunisent aujourd’hui probablement mieux contre le choc de la baisse
du courrier (qui ne représente plus que 27 % du chiffre d’affaires en
Allemagne et 14 % en Italie contre 46 % en France en 2014), mais les
exposent en contrepartie à des difficultés accrues en cas de choc sur leur
nouveau marché dominant.
Poste Italiane : un exemple de compensation des pertes du
courrier par le développement des services financiers
Pour l’opérateur italien Poste Italiane (PI), l’activité postale est
devenue marginale : elle ne représente plus en 2014 que 14 % du chiffre
d’affaires, en baisse de près de 10 points depuis 2010. Du fait d’une baisse
très prononcée du volume de courrier (la 2
ème
en Europe derrière le
Danemark), l’activité postale est désormais fortement déficitaire (-500 M€
de résultat en 2014) et sa rentabilité recule fortement (-177 % entre 2011 et
2014). De surcroît, PI n’a pas su profiter du développement du e-commerce,
et le volume de colis a également reculé de 18 % entre 2010 et 2014.
0
2
4
6
8
10
0%
20%
40%
60%
80%
100%
Autres
Services
financiers
Logistique
Colis express
Courrier et
paquets
Marge (éch.D)
%
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NÉCESSAIRE DES RÉFORMES
119
Tableau n° 8 :
structure du résultat opérationnel 2014 du groupe
Poste Italiane (M€)
Groupe PI
Assurance
Services
financiers
Services
postaux
Autres
689
415
766
-505
14
Source : Cour des comptes, données rapport annuel 2014, Poste Italiane
Pour faire face à ces difficultés, PI, qui fournissait déjà depuis
longtemps des services financiers, a décidé de poursuivre sa diversification
dans les assurances, dont le chiffre d’affaires a augmenté de 15 % depuis
2010. Désormais, les activités banque et assurance représentent à elles deux
plus de 85 % du chiffre d’affaires du groupe (66 % pour l’assurance et 19 %
pour les services financiers). Avec un portefeuille de plus de 30 millions de
clients, PI s’appuie notamment sur son réseau de bureaux de postes (13 200,
tous gérés directement), bien plus vaste que les réseaux d’agences des deux
plus grosses banques du pays (respectivement 3 300 et 4 300 agences pour
UniCredit et Intesa Sanpaolo). Pour maîtriser ses charges, PI tente
actuellement de rationaliser ce réseau.
Le développement de l’activité assurantielle, dont la rentabilité est
faible (marge de 2,2 % en 2014), ne suffit pas à compenser pleinement les
pertes de la branche postale (marge de -12,4 % en 2014) : la marge
opérationnelle du groupe a ainsi reculé de 8,6 % en 2010 à 2,4 % en 2014.
D’autres opérateurs postaux ont, au contraire, conservé le courrier
et les colis postaux traditionnels comme activité principale, par exemple
au Royaume-Uni où ils représentent encore 82 % du chiffre d’affaires en
2014, dont la moitié provient toutefois du colis, le développement
particulièrement important du e-commerce outre-Manche permettant
d’assurer sur la période récente des résultats positifs à
Royal Mail
, malgré
la baisse du courrier.
L’hétérogénéité des choix et des résultats obtenus par certains pays
étrangers montre qu’il n’y a pas de modèle dominant garantissant la
rentabilité. En revanche, la réussite du modèle choisi par La Poste
nécessite que plusieurs réformes importantes soient menées à bien.
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120
Graphique n° 25 :
marge opérationnelle 2010 et 2014, comparaison
internationale
Source : La Poste, « Benchmark 2014 des opérateurs postaux européens »
B -
Des réformes à mener afin de renforcer la cohérence
interne du modèle
La diminution du risque résultant du modèle multi-métiers est de
même nature que celle qui se réalise dans les conglomérats industriels, et
s’expose donc aux critiques qui leur sont traditionnellement adressées,
notamment : hétérogénéité, manque de lisibilité, complexité de gestion,
allocation des capitaux non optimale. La cohérence des activités
rassemblées dans le groupe, ainsi que les synergies entre elles, peuvent
rendre ces critiques inopérantes, mais elles supposent des évolutions
profondes.
1 -
Accentuer l’interpénétration entre La Banque Postale
et le Réseau
a)
Le coût élevé du réseau des bureaux de poste pour LBP
Les trois quarts des frais de gestion de LBP sont des refacturations
du réseau : 2,0 Md€ de charges de personnel et 1,0 Md€ de facturation
d’opérations de guichet. En outre, alors que le volume des opérations de
guichet décroît (-25 % entre 2009 et 2013), le montant de refacturations
reste stable. De même, alors que les effectifs du réseau qui travaillent
‐2
0
2
4
6
8
10
12
Allemagne
France
Italie
Pays‐Bas
Royaume‐Uni
Suisse
2010
2014
%
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NÉCESSAIRE DES RÉFORMES
121
pour LBP
166
diminuent ces dernières années, les charges de personnels
refacturées restent stables. S’y ajoute, en propre, le coût des systèmes
d’information qui est au-dessus du niveau moyen du secteur (15 % du
PNB contre 10 % dans les autres banques).
Il en résulte pour LBP un coefficient d’exploitation
167
supérieur
d’environ 20 points à la moyenne des grandes banques de détail
françaises, et qui n’a pas baissé au rythme programmé dans le plan
stratégique 2010-2015 : il est encore supérieur à 80 % (cf
.
graphique
ci-après), alors qu’il devait descendre en-dessous de cette cible dès 2010
selon le dossier d’agrément présenté en 2005. Dans le plan stratégique
2014-2020, l’objectif est de le ramener à 75 %.
Graphique n° 26 :
évolution du coefficient d’exploitation de LBP
Source : Cour des comptes, données La Poste
La baisse des charges du réseau (cf
. infra
II-A) apparaît donc
indispensable à la viabilité du « partenariat » entre LBP et les bureaux de
poste. En effet, actuellement, comme les refacturations sont indexées sur
les actions de guichet liées à chaque activité, chaque branche a
individuellement intérêt à chercher au maximum à commercialiser
directement ses produits en dehors du réseau pour que les coûts de celui-
ci soient davantage supportés par les autres branches. Mais une telle
stratégie non coopérative conduit à accélérer encore la baisse d’activité
du réseau et donc l’augmentation des coûts unitaires qui sont de toute
façon
in fine
refacturés aux branches. Pour sortir de ce cercle vicieux, il
faut donc que le coût global du réseau baisse et qu’ainsi que le poids du
166
90 % des effectifs qui travaillent pour LBP sont des personnels salariés de La Poste
SA.
167
Charges d’exploitation / PNB.
70
74
78
82
86
90
2009
2010
2011
2012
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
PS 2010‐2015
PS 2014‐2020
Réalisé
%
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122
réseau supporté par les branches, et par LBP en particulier, ne les
dissuade pas d’y avoir recours.
b)
L’enjeu de la « ligne managériale unique »
Alors que les bureaux de poste remplissent pour La Banque Postale
la fonction d’agences bancaires, le maintien d’une relation entre le
Réseau et LBP basée uniquement sur la refacturation de prestations de
service apparaît de moins en moins soutenable.
Les deux branches ont, au cours des années récentes, accentué leur
interpénétration, notamment avec la bi-appartenance de dirigeants et de
cadres. La directrice du Réseau est ainsi membre du comité exécutif de
La Banque Postale. Sous le nom de « ligne commerciale unique » a été
entamée une évolution de l’organisation qui vise à rapprocher le
fonctionnement conjoint des deux branches de celui d’une banque
normale avec :
-
la fusion des directions commerciales de la banque et du réseau ;
-
la création de postes de managers ayant compétence sur des
« terrains » regroupant plusieurs bureaux sur un territoire pertinent ;
-
la déconcentration de la gestion des risques au niveau du « terrain »,
pour délivrer directement une réponse au client sans devoir remonter
par l’échelon supérieur ;
-
la montée en charge rapide des compétences bancaires des agents du
réseau
168
.
Ces évolutions sont conformes aux recommandations formulées
par la Cour dans le rapport public thématique de 2010
169
, où elle
soulignait la nécessité de clarifier les lignes de responsabilités entre le
Réseau et La Banque Postale. La spécialisation bancaire de bureaux de
poste, ou de portions de bureaux, qui s’esquisse d’ores et déjà, paraît
nécessaire pour mieux adapter l’offre à la clientèle desservie et répondre
168
La Poste a créé une « École de la Banque et du Réseau », destinée à la formation
interne et appuyée sur des partenariats avec des organismes de formation. Entre 2015
et 2018, l’ensemble des directeurs de terrain est appelé à faire l’objet d’une formation
aux métiers de la banque, ainsi que 1500 guichetiers.
169
Rapport public thématique : La Poste : un service public face à un défi sans
précédent, une mutation nécessaire
. La Documentation française, juillet 2010, 190 p.,
disponible sur www.ccomptes.fr
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123
aux
attentes
exprimées,
notamment
par
les
associations
de
consommateurs, en matière de qualification des agents.
2 -
Renforcer la recherche de synergies entre les réseaux
industriels
Le groupe a développé en France quatre réseaux de tri et
d’acheminement du courrier et des objets : celui du courrier, comprenant
notamment 47 plateformes industrielles de tri ; celui du colis au sein de la
maison mère, comprenant 15 centres de tri ; celui de Chronopost, filiale
de GeoPost ; et enfin celui de DPD-France (Exapaq antérieurement),
filiale de GeoPost acquise en 2009.
De même, pour la distribution au client final, coexistent dans le
groupe cinq réseaux : celui des facteurs, formé de 3 882 plateformes de
distribution réparties en 580 établissements ; les 65 agences spécialisées
qui distribuent les colis dans les grandes villes ; les réseaux de
distribution propres à Chronopost et à DPD-France, en partie sous-
traités ; les équipes de Mediapost (5 000 ETP) assurant la distribution des
publicités et plis non adressés ; et enfin le réseau de points-relais chez les
commerçants, géré par la filiale Pickup.
La coexistence de ces réseaux s’explique par des différences qui
ont trait à la nature et au nombre d’objets traités (de 55 millions par an
pour DPD-France à 13 milliards pour le courrier), aux délais contractuels
et aux autres obligations vis-à-vis du client. Toutefois, des synergies entre
eux sont possibles, dans certaines zones, pour certaines prestations ou
fonctions, à certains moments de l’année, etc. Jusqu’à 2014, ces réseaux
étaient localisés chacun dans une entité – métier ou filiale – différente.
Une telle situation ne facilitait pas le repérage et la mise en oeuvre des
synergies, et il n’existait pas d’instances ou de structures transversales
destinées à les faire émerger.
La Poste a pris conscience de ce point : la recherche de synergies a
constitué un des motifs du rapprochement du colis et du courrier dans la
même branche et des collaborations plus formalisées se sont mises en
place. Une de leurs formes concrètes consiste par exemple, dans des
agglomérations où le courrier, les colis de La Poste, les colis de
Chronopost et ceux de DPD-France donnent lieu à des tournées de
distribution distinctes, à mutualiser certains moyens de transport, lieux de
stationnement ou autres locaux, et ainsi à dégager des économies.
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124
D’autres parties de la chaîne de traitement des colis et des objets
peuvent donner lieu à des investissements, en particulier les plateformes
de tri. Alors qu’un nombre croissant d’acteurs du commerce électronique
déploient leur activité sur plusieurs pays, entraînant la vive croissance des
flux transfrontaliers, cette démarche ne doit pas se limiter aux filiales
françaises.
Cette recherche de synergies entre les outils industriels pourrait
constituer un programme formalisé, présenté au conseil d’administration
de la maison mère et des filiales concernées et donnant lieu à un compte
rendu régulier.
3 -
Un réseau des facteurs voué à des transformations profondes
a)
Facteo : un outil de travail encore insuffisamment exploité
Le smartphone Facteo (90 000 unités) est la pierre angulaire du
déploiement de nouveaux services commerciaux du facteur. Ce projet
d’équipement ambitieux concerne l’ensemble des facteurs et s’est
déployé de 2012 à la fin de 2015. Facteo est programmé dans l’ordre de la
tournée, avec une présentation successive des écrans nécessaires aux
différentes actions. Il permet des économies et gains de productivité.
Fin 2015, le coût total du projet depuis son lancement est de
65,1 M€. La décomposition des coûts annuels montre que leur
progression
est
tirée
par
la
forte
croissance
du
montant
des
abonnements téléphoniques :
Tableau n° 10 :
coûts du projet Facteo (M€)
Année
2012
2013
2014
2015
Évol.
Développement, infrastructure
5,0
4,2
8,6
7,0
+ 2
Assistance à maîtrise d’ouvrage
0,5
1,1
2,1
1,3
+ 0,8
Achats de smartphones
2,1
1,9
9,7
5,5
+ 3,4
Abonnements
0,3
2,3
3,4
9,9
+ 9,6
Total
7,9
9,5
24
23,7
+ 15,8
Source : Cour des comptes, données La Poste
Les coûts de développement sont désormais inférieurs aux coûts
d’abonnements, alors que le développement des applications est un enjeu
crucial pour exploiter le potentiel de l’outil.
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125
En 2016, on ne dénombre ainsi que six services aux clients
disponibles sur Facteo
170
et sept services permettant l’amélioration de
l’efficacité de la tournée du facteur, trois services additionnels étant par
ailleurs en test depuis 2015
171
.
En tant qu’outil d’appui à l’activité de distribution, plusieurs
possibilités restent à exploiter : par exemple, avec la géolocalisation, le
téléphone pourrait avertir le facteur lorsqu’il approche d’une adresse où il
doit remettre un objet contre signature, afin de lui éviter des oublis ou des
retours en arrière. Les systèmes d’information du Courrier ne permettent
pas, pour l’heure, leur déploiement intégral et immédiat.
La branche Courrier doit donc s’efforcer de lever les obstacles
empêchant le développement intégral et rapide de toutes les applications
de services aux clients et aux facteurs permises par Facteo. La pleine
utilisation de cet outil est bien l’un des déterminants à l’appui des
nouveaux marchés et des nouvelles fonctions auxquels les facteurs sont
destinés.
b)
L’avenir du métier de facteur
La chute des volumes de courrier met en question l’existence
même d’un réseau de 73 000 facteurs répartis dans 3 882 implantations,
pour visiter six jours sur sept 36 millions de boîtes aux lettres. Son avenir
doit être envisagé en tenant compte d’autres évolutions qui le concernent.
La première, déjà mentionnée (cf
.
supra
I, A-3), est le
développement des nouveaux services du facteur, qui signifie une
évolution profonde de leur métier. Même si ces services sont très divers,
le contenu, les règles et le rythme des tâches qu’ils impliquent vont le
plus souvent différer fortement de la distribution du courrier et des objets.
170
La vigie de personnes, l’enregistrement de diagnostics au domicile, la collecte
d’informations diverses, l’expédition en boîte aux lettres de colis, la remise
commentée de documents et la vérification de l’adresse.
171
La prise de photo d’un pli pour visualiser les services qui y sont associés, la prise
de photo d’une boîte aux lettres pour visualiser les habitants associés et les croiser
avec les services qu'ils ont souscrits et une fonction d’assistant vocal qui répond à
toute question du facteur sur les contrats des clients (réexpédition, procuration, etc.).
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126
Les adaptations à réaliser seront encore plus fortes si une des
formes imaginables du développement des nouveaux services se
concrétise : la vente à grande échelle, dans un cadre volontaire et non
régulé où La Poste conserverait la maîtrise de ses tarifs, de « minutes
facteur » correspondant à des prestations de distribution de nature diverse,
mais
devant
respecter
des
standards
de
format,
de
poids,
de
conditionnement, etc. Les clients, aussi bien des entreprises de grande
taille que des commerces locaux, auraient vocation à intégrer ces
prestations dans leur propre offre, et, outre la livraison et le portage, elles
pourraient comprendre le recueil d’information.
Indépendamment de cette diversification, le champ d’action des
facteurs, le « dernier kilomètre », traditionnellement point névralgique
des activités logistiques, voit son importance accrue par plusieurs
mouvements de fond.
En premier lieu, comme cela a été dit au chapitre III (II, A-2), la
livraison représente pour le commerce en ligne un enjeu majeur : son coût
doit permettre au commerçant de la rendre gratuite sans perdre toute sa
marge, et elle doit répondre à des attentes de qualité de service qui ne
cessent de s’élever : raccourcissement drastique des délais au premier
chef, mais aussi choix du moment et du lieu de la livraison, possibilité de
les changer en cours de route, information en temps réel, etc. Les
livraisons de colis par les facteurs, qu’il s’agisse des Colissimo de la
maison mère ou de celles de Chronopost, doivent répondre à ces
exigences. La livraison des colis en soirée, en rupture avec des tournées
du courrier qui ont lieu le matin, illustre les changements que cela
implique. S’ils ne s’accomplissent pas, l’écart entre les prestations de La
Poste et celles de la concurrence entraînera des pertes de chiffre
d’affaires.
En deuxième lieu, un marché de services de livraison rapide en
milieu urbain a récemment émergé, avec, en France, des acteurs comme
Colisweb, Stuart, etc. ou, pour les restaurants, Deliveroo, Foodora,
Allo-Resto, etc. La prise de participation de GeoPost dans Stuart a
manifesté le souci de La Poste de ne pas rester en marge de ce marché où
règne une vive concurrence et dont le modèle social ne repose pas sur le
salariat. Or, son développement nécessitera de l’adosser, au moins en
partie, aux réseaux de distribution existants, au premier chef celui des
facteurs.
En
troisième
lieu,
pourraient
apparaître
dans
de
grandes
agglomérations, comme c’est déjà le cas dans des pays voisins, des
réglementations
des
livraisons
en
centre-ville
imposant
des
regroupements, voire obligeant, pour limiter les encombrements, à passer
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127
par un ou plusieurs transporteurs avec lesquels la municipalité aura passé
un contrat. Forte de ses implantations, de ses véhicules et de ses facteurs,
La Poste aurait naturellement vocation à les déployer sur ce marché.
Ces évolutions ont en commun d’offrir des perspectives aux
facteurs, de diversifier leur activité et de la relier plus qu’aujourd’hui à
celle d’autres entités du groupe, voire de tiers. Mais les bouleversements
de l’organisation qu’elles impliquent sont plus nombreux et plus profonds
que ceux qui relèvent de la seule optimisation de la productivité : outre de
transformer le métier des facteurs, ils auraient potentiellement pour effet
de modifier l’architecture des établissements et des implantations, le
mode de management, l’organisation de la production, les horaires et
cycles de travail, voire la position du réseau des facteurs dans
l’organigramme du groupe. La Poste ne saurait faire l’économie d’une
analyse approfondie des scénarios d’organisation les plus aptes à réaliser
ces évolutions.
C -
Inscrire pleinement la croissance externe dans une
vision stratégique
Parce qu’elle procure l’occasion de compléter ou faire évoluer la
structure du groupe, la croissance externe peut contribuer à la cohérence
et à la pertinence du modèle multi-métiers. Le bilan des décisions prises
ces dernières années est à cet égard mitigé. Les acquisitions ont permis le
développement de nouvelles activités pour le groupe ou son implantation
dans de nouvelles zones géographiques, mais elles n’améliorent pas sa
rentabilité et les montants investis restent trop faibles pour contribuer
significativement à le « désensibiliser » de l’activité historique du
courrier. La définition d’une stratégie de croissance externe plus rentable
devrait constituer une priorité et bénéficier d’une supervision plus forte.
1 -
Des investissements restés à ce jour modestes et qui n’ont
guère amélioré la rentabilité du groupe
Le cumul sur la période 2010-2015 des investissements consacrés
à la croissance externe s’élève à 745 M€, somme employée pour
l’essentiel à développer le colis en Europe (475 M€, soit près des deux
tiers). Ce montant représente seulement le quart des moyens nouveaux
accordés par les actionnaires, alors que le plan stratégique « Ambition
2015 » (2010-2015) prévoyait 2,2 Md€ d’investissement au titre de la
croissance externe.
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128
Cet écart s’explique par le fait que La Poste a utilisé ces moyens
nouveaux pour restaurer sa structure financière et recapitaliser la banque,
dans un contexte de durcissement des exigences prudentielles (cf
.
supra
).
Il manifeste aussi une forme de prudence bienvenue de La Poste dans sa
stratégie de développement, qui n’a pas empêché les échecs mais a
permis d’éviter des déconvenues trop coûteuses
172
.
Ainsi, dans le secteur du courrier, les projets du début de la
décennie 2010 visant à investir dans les flux de courrier transfrontaliers et
dans la constitution d’un réseau européen alternatif de distribution n’ont
pas connu de suite, La Poste ayant tiré les conséquences de l’accélération
de la chute des volumes de courrier. Les investissements se sont limités
aux secteurs amont et connexes du courrier, avec des fortunes diverses.
Mediaprism : une acquisition préjudiciable
Mediaprism est une société spécialisée dans l’utilisation des
données individuelles recueillies auprès de sociétés de vente par
correspondance. Ces données permettent de cibler des campagnes de
publicité.
Afin de s’ancrer dans le marketing relationnel et de se doter d’une
expertise en connaissance client et en communication, le pôle Mediapost,
filiale de la holding du courrier Sofipost, a pris le contrôle de la société en
mars 2011, pour 15,4 M€ correspondant à 81,7 % du capital.
La Poste a constaté, après l’acquisition, des difficultés structurelles
dans les relations économiques avec les fournisseurs de données que les
diligences juridiques et financières préalables à la prise de contrôle
n’avaient pas permis de détecter, et qui compromettent la rentabilité de la
société. Elle a engagé un plan de restructuration de l’entreprise ; plusieurs
contentieux sont en cours. Une provision pour risque a été passée dans les
comptes de la holding Mediapost Communication.
Dans le secteur bancaire, les acquisitions ont été peu nombreuses
depuis 2010, au profit de co-entreprises développées sans apport en
numéraire. Tandis que le bilan de ces dernières est plutôt positif
172
En témoigne l’absence de dépréciations d’actifs significatives entre 2010 et 2015 :
le montant des dépréciations s’élève à 136 M€ en cumulé sur la période, soit 7 % de la
ligne « écarts d’acquisition » en 2015, concentrés sur la dépréciation des franchises
SEUR dans le secteur du colis-express (92 M€).
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129
(cf
.
supra
), les acquisitions ont été, quant à elles, assez peu réussies, qu’il
s’agisse de celle de BPE en 2013 ou de SOFIAP en 2014
173
.
Enfin, dans le secteur du colis-express, les acquisitions les plus
structurantes avaient été réalisées au début des années 2000. La période
2010-2015 s’est caractérisée par la poursuite des rachats de franchise
dans des pays où GeoPost était déjà présent, voire par une consolidation
du marché lorsque les circonstances s’y prêtaient (Pologne), ainsi que par
de petites acquisitions visant à tester de nouveaux services aux clients, de
nouveaux marchés hors d’Europe, ou des secteurs d’activité connexes à
celui du colis-express. Les acquisitions effectuées depuis 2009 par
GeoPost contribuent à 5,3 % du chiffre d’affaires de 2015 et à 2,9 % du
REX seulement. L’apport de ces acquisitions au REX du groupe devient
même négatif si l’on tient compte de celles qui contribuent au lancement
de nouvelles activités, à l’image de Chronopost Food lancé après l’échec
du rachat de Colizen.
L’échec de Colizen
La start-up Colizen a été fondée fin 2008 pour offrir un service de
livraison en deux heures sur rendez-vous, du lundi au samedi de 7h00 à
22h00 ainsi que le dimanche matin, à l’aide de véhicules électriques.
Chronopost a acquis 40 % du capital de la société en février 2013 - pour
1,971 M€ - puis les 60 % restants en juillet 2014 pour 4,740 M€.
Pourtant, les résultats escomptés n’ont pas été au rendez-vous,
obligeant Chronopost à recapitaliser sa filiale et finalement à réorienter
son activité. Désormais, Colizen, rebaptisée Chronopost Food, est la
structure du groupe chargée de l’activité « livraison express de produits
frais ».
L’analyse de la rentabilité des capitaux propres donne une
indication intéressante : le ratio résultat net/capitaux propres (RoE) passe
en effet de 15,3 % en 2010 – avant augmentation de capital – à 7,8 %
après l’augmentation de capital, pour se stabiliser ensuite autour de
7-8 %. Ce ratio recouvre des réalités différentes, entre les activités
173
La banque à vocation patrimoniale BPE, filiale du Crédit mutuel Arkéa, a été
rachetée par LBP en avril 2013. LBP a
acquis en mai 2014 une participation
majoritaire (66 %) dans la SOFIAP, filiale du Crédit Immobilier de France et de la
SNCF qui distribue des crédits immobiliers aux cheminots. La SOFIAP a dégagé un
résultat net tout juste à l’équilibre en 2015 (0,1 M€ de REX contre 5,2 M€ prévus
dans le plan d’affaires d’acquisition). La BPE a, quant à elle, dégagé un résultat net
négatif en 2014 avant sa fusion en 2015 avec LBP Gestion privée.
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130
industrielles et commerciales d’une part, et les activités bancaires d’autre
part, dont le RoE est certes en baisse mais demeure supérieur à celui des
concurrents du secteur (cf.
supra
). L’évolution du RoE montre que La
Poste a maintenu durant la période une rentabilité relativement stable, de
l’ordre de 7 à 8 %. La reconstitution de ses fonds propres, si elle a
renforcé sa structure financière, ne s’est pas accompagnée d’une
amélioration de ses performances opérationnelles. Il convient de noter
que le groupe La Poste ne communique pas sur la rentabilité des capitaux
propres ou des capitaux employés et qu’il ne semble pas considérer ces
indicateurs comme des outils de pilotage.
Tableau n° 11 :
rentabilité des capitaux propres du groupe La Poste
(2010-2015)
2010
2011
2012
2013
2014
2015
Résultat net part du
groupe
550
478
479
627
513
636
Capitaux propres
174
3 589
6 160
6 410
7 198
7 687
8 135
RoE
15,3 %
7,8 %
7,5 %
8,7 %
6,7 %
7,8 %
Source : Cour des comptes, à partir des comptes consolidés
Enfin, et au-delà du seul bilan financier des opérations de
croissance externe, La Poste n’est pas parvenue à utiliser ses acquisitions
pour diffuser des changements au sein de ses métiers et de ses offres
historiques.
Le bilan mitigé des opérations de croissance externe réalisées à ce
jour doivent toutefois moins inciter La Poste à renoncer à sa stratégie de
développement qu’à mieux l’encadrer et à en renforcer la cohérence.
2 -
Le défi d’une accélération de la croissance externe
Le plan stratégique 2014-2020 prévoit une enveloppe indicative de
3,6 Md€ pour des opérations de croissance externe, à laquelle s’ajoutent
les opérations réalisées par LBP qui seraient autofinancées. Pour l’heure,
cette enveloppe n’a été consommée qu’à la marge mais plusieurs
acquisitions importantes sont en cours de finalisation.
174
Hors résultat de l’exercice et hors plus-value latente sur instruments financiers.
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131
Ces montants permettent, sans recourir à de nouveaux apports des
actionnaires, de maintenir la dette nette en-dessous de 5 Md€ (contre
3,7 Md€ fin 2015). Ils sont compatibles avec la notation du groupe La
Poste et permettent de maintenir le ratio « flux de trésorerie générés par
l’exploitation / dette nette » au-dessus de 20 %.
Il reste que les montants prévus dans le plan stratégique sont très
supérieurs à ceux consommés entre 2010 et 2015. Pour que les
acquisitions à venir se traduisent par de la création de valeur pour La
Poste et s’inscrivent dans une vision stratégique, certaines conditions
doivent être réunies.
S’agissant
tout
d’abord
du
sens
stratégique
donné
au
développement, celui-ci devra être précisé et rendu plus concret. La Poste
ambitionne aujourd’hui d’être « la première entreprise de services de
proximité humaine » mais cette formule ne donne pas la clé de la
physionomie du groupe en 2020, ni des métiers qui seront exercés par ses
salariés, et au premier chef par les facteurs.
S’agissant ensuite de la gouvernance, il serait souhaitable que le
groupe se dote d’une doctrine portée à la connaissance des branches pour
sélectionner les projets d’acquisitions. L’implication forte du PDG du
groupe et de son état-major sera par ailleurs indispensable, pour
hiérarchiser et sélectionner les projets qui remontent des branches,
notamment au regard de leur rentabilité attendue, décider de leur
industrialisation
puis,
une
fois
lancés,
évaluer
leurs
résultats
commerciaux et financiers, ainsi que leur bonne intégration au sein du
groupe. Le conseil d’administration du groupe devrait également débattre
plus fréquemment de cette stratégie et exercer un « droit de suite » sur les
performances des acquisitions dont il a eu à connaître au moment de la
transaction.
Des
progrès
sont
intervenus
récemment.
Un
comité
des
investissements a été créé pour examiner les dossiers relatifs aux projets
de croissance externe jusqu’à 10 M€
175
. En outre, à la demande de
l’Agence des participations de l’État, le conseil d’administration est
amené à débattre une fois par an du bilan financier (création de valeur) et
commercial d’un échantillon d’acquisitions récentes. Cet examen a eu
lieu une première fois en octobre 2014 et une seconde fois en décembre
2015.
175
Ce comité comprend le président du groupe La Poste, le directeur financier, le
directeur de la stratégie, le directeur des opérations financières et de la trésorerie, ainsi
que les postiers directement concernés de la branche qui réalise l’opération
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132
La question d’un accompagnement financier des actionnaires se
poserait si l’une des hypothèses suivantes venait à se réaliser :
performances opérationnelles du groupe incompatibles avec les besoins
de son développement ; évolution des règles prudentielles conduisant La
Poste à devoir recapitaliser La Banque Postale et réduisant à due
proportion
la
part
des
financements
consacrés
au
développement engagement d’une ou plusieurs opérations structurantes
exigeant la mobilisation de moyens exceptionnels.
La réalisation de l’une ou l’autre de ces hypothèses obligerait à
rechercher les moyens de financement les plus adéquats : endettement sur
les marchés, augmentation de capital en numéraire ou en nature par les
actionnaires existants, ouverture de capital à d’autres actionnaires, etc.
En tout état de cause, l’accélération de la croissance externe devra
aller de pair avec la formalisation d’un cadre stratégique et financier
propre à garantir la cohérence, la logique industrielle et la soutenabilité
financière des opérations envisagées.
III -
Actualiser le contenu des missions
de service public de La Poste
La Poste, en accord avec l’État ou à sa demande, ne met pas en
oeuvre, pour faire face à la chute des volumes de courrier et retrouver un
taux de rentabilité comparable, les solutions utilisées par les autres
opérateurs européens : elle n’externalise pas la quasi-intégralité de son
réseau, comme en Allemagne, ou n’a pas recours à une main d’oeuvre très
flexible voire précaire, comme aux Pays-Bas. Elle doit en outre assumer
la charge de missions de service public autres que le service universel
postal, dans un contexte de diminution progressive des compensations
publiques et de maintien d’une grande partie des coûts, fixes, de ses
réseaux. Confier ces missions à La Poste dans une période où celle-ci
bénéficiait de la « rente du courrier » pouvait avoir du sens, mais
l’évolution du contexte économique devrait désormais appeler des
évolutions.
S’il revient à La Poste de mettre en oeuvre les réformes nécessaires
à la viabilité de son modèle économique et de produire des gains
d’efficience en maîtrisant mieux ses charges, il appartient à l’État de
l’accompagner dans sa transformation afin qu’elle puisse demeurer
l’entreprise de proximité à laquelle les Français sont attachés.
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133
Les missions de service public confiées à La Poste sont le résultat
d’une histoire et doivent pouvoir évoluer. Dans ce contexte, desserrer les
contraintes pesant sur La Poste permettrait de sortir du
statu quo
actuel
qui a déjà un coût élevé pour l’entreprise publique (
cf.
supra
chapitre II,
IV), mais aussi pour la collectivité qui finance ces missions, que ce soit
par le biais des impôts ou de l’augmentation des tarifs postaux. Une mise
en débat du contenu et des modalités des missions mises en oeuvre par La
Poste ainsi que du prix que la collectivité est prête à payer pour ces
missions s’impose donc.
A -
À missions constantes, des marges de manoeuvre
à exploiter
Le contrat d’entreprise 2013-2017 souligne dans son préambule
que le contexte financier dans lequel il s’inscrit est particulièrement
contraint pour le groupe La Poste. Le montant des compensations ne
suffisant pas à assurer l’équilibre économique et financier des missions de
service public, les contraintes de La Poste devraient être prises en compte
dans la définition du cadre d’exercice de ces missions. Or, des marges de
manoeuvre existent pour la plupart d’entre elles qui, sans remettre en
cause ni dégrader le contenu de la mission, permettraient de desserrer ces
contraintes.
Ainsi que l’a indiqué la Cour dans le cadre de l’insertion au rapport
public annuel 2016
176
sur les facteurs et la distribution du courrier,
faciliter la desserte des boîtes aux lettres, démarche qui ne nécessite que
des évolutions réglementaires, pourrait contribuer à cet objectif. Les
conditions d’exercice du service universel postal en France étant par
ailleurs plus exigeantes que les normes arrêtées au niveau européen,
notamment en termes de fréquence de distribution, certains paramètres
pourraient être modifiées afin d’atténuer le coût de ces exigences. Sans
même évoquer le passage, pour le courrier
177
, d’une distribution de six
jours sur sept à une distribution de cinq jours sur sept, plusieurs solutions
intermédiaires pourraient être envisagées, notamment grâce aux outils de
tri dont s’est dotée La Poste dans le cadre du plan « Cap Qualité Courrier
». Le principe d’une distribution six jours sur sept pourrait être conservé
176
Cour des comptes,
Rapport public annuel 2016
, Tome 1. Les facteurs face au défi
de la baisse du courrier : des mutations à accélérer. La Documentation française,
février 2016, 696 p., disponible sur www.ccomptes.fr
177
Pour mémoire, l’écrasante majorité des flux de colis ne relève pas du service
universel postal, à l’exception des Colissimo guichet, qui correspondent, pour
l’essentiel, à des envois entre particuliers. La tendance pour le colis est inverse et la
fréquence de distribution devrait s’accroître.
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134
mais avec un caractère pleinement effectif uniquement pour les colis et
les courriers prioritaires, en constituant la « liasse du facteur » de manière
telle que celui-ci ne s’arrête pas pour desservir une adresse s’il n’y a pas
de courriers prioritaires ou de colis pour cette adresse, et que les lettres
« vertes » et « économiques » soient considérées comme pouvant encore
attendre (distribution dite « à date »).
De même, la création d’une offre en « J+2 » dans le cadre du
service public de transport et de distribution de la presse (là où le choix
s’opère aujourd’hui entre du « J+1 », du « J+4 » et du « J+7 ») pourrait
donner un peu plus de souplesse à La Poste. Le resserrement des titres
éligibles à ces tarifs préférentiels constitue également une piste que la
Cour avait mise en avant dans sa communication à la Commission des
finances du Sénat sur « Les aides de l’État à la presse écrite »
178
. Lancée
en 2015, la réforme visant à distinguer, au sein de la presse magazine, une
catégorie de titres dits « de la connaissance et du savoir » bénéficiant de
tarifs plus avantageux et d’imposer aux autres titres un rythme plus élevé
d’augmentation des tarifs (5 % par an contre 3 %) participait de cette
idée
179
.
S’agissant de la présence postale territoriale, l’adaptation du réseau
par transformation des bureaux de poste en points de contact constitue
une démarche à poursuivre. Les exigences en densité et en nombre de
points de contact pourraient s’accommoder par ailleurs d’une plus grande
diversification des formats des points de contact soit par une plus grande
spécialisation (évoquée
supra
au I-B 1) susceptible de produire des
économies et des gains de technicité soit par le développement des
mutualisations :
-
entre deux branches de La Poste, comme c’est le cas des facteurs-
guichetiers, qui assurent à la fois les missions de distribution du
courrier et de guichet
180
;
-
avec d’autres services publics, comme dans les maisons de service au
public (MSAP) accueillies en bureau de poste (voir encadré au
chapitre II, IV- B), avec la possibilité d’enrichir, à terme, les services
rendus par le point de contact postal, comme cela a été le cas au
Portugal.
178
Cour des comptes,
communication à la commission des finances du Sénat : Les
aides de l’État à la presse écrite
, juillet 2013, 184 p., disponible sur www.ccomptes.fr
179
Comme indiqué précédemment, cette réforme n’a toutefois pas vu le jour.
180
En 2015, 256 bureaux de poste facteurs-guichetiers ont été créés, auxquels
s’ajoutent 91 bureaux créés entre janvier et avril 2016.
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135
Les mutualisations de services publics au sein du réseau postal :
l’exemple du Portugal
En novembre 2013, un protocole d’accord a été signé entre CCT
Correios
181
, la poste portugaise, et le gouvernement portugais afin de
lancer un large programme de création d’ « Espaces citoyen ».
L’Espace Citoyen constitue un nouveau modèle de service assisté
regroupant les services disponibles sur l’internet de plusieurs organismes
publics sur un seul point d’accès physique. Complémentaire du réseau
existant, ce dispositif ne vise pas, selon le gouvernement portugais, à
remplacer les formes traditionnelles de services de l’administration
publique mais à favoriser l’acculturation au numérique de la population
Ces nouveaux « Espaces citoyens » permettent, entre autres, la
délivrance des permis de conduire, le traitement des questions relatives à
l’emploi et à la formation professionnelle, la réalisation d’un changement
d’adresse, la gestion des demandes de carte européenne d’assurance
maladie ou de renouvellement de carte d’identité et permis de séjour.
À titre expérimental, des guichets sont déjà en place dans 24
bureaux de poste et assurent une large gamme de services pour le compte
de 15 entités administratives. Le gouvernement vise à terme la création de
1 000 Espaces citoyen en bureaux de poste et mairies. Dans les
établissements postaux, ces services sont assurés à un comptoir réservé,
par
des
guichetiers
formés
au
préalable
par
l’Agence
pour
la
modernisation administrative (AMA). CTT-Correios est rémunéré en
fonction du nombre d’opérations effectuées.
Source : Observatoire national de la présence postale territoriale
.
S’agissant enfin de la mission d’accessibilité bancaire, plusieurs de
ses paramètres étant définies par voie réglementaire ou par la convention
signée entre LBP et l’État, il serait également possible de les faire évoluer
sans recourir à la loi. Néanmoins, les bénéficiaires de cette mission étant
des personnes financièrement et socialement fragiles, il ne serait
vraisemblablement pas opportun de jouer sur ces critères, sans
reconsidérer, plus globalement, l’objectif et les modalités de la mission.
En dépit d’une définition universelle, la mission d’accessibilité bancaire
bénéficie en effet essentiellement aux détenteurs de livrets A ne disposant
181
Société anonyme totalement privatisée depuis septembre 2014, CTT-Correios a
réalisé en 2014 un chiffre d’affaires de 719 M€. L’entreprise compte actuellement
12 253 employés et gère un réseau de 2 317 bureaux (dont plus des deux-tiers sont
gérés en partenariat). Le courrier représente 72,2 % de son chiffre d’affaires, le
colis/express 17,6 % et les services financiers 10,2 %.
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136
pas d’autre compte et utilisant celui-ci comme un quasi-compte
courant
182
. Pour ces publics, pour lesquels l’utilisation d’espèces reste le
moyen de paiement privilégié, l’accès à de l’argent liquide au guichet,
rendu possible par le réseau dense des bureaux de poste, semble
constituer un critère important. Mais cette fonction sociale du guichet, qui
concerne également les détenteurs de comptes courants de La Banque
postale, dépasse largement le champ de la mission d’accessibilité.
Ce dernier exemple démontre que toute réforme de grande ampleur
des missions de service public de La Poste ne peut être menée sans une
réflexion de fond sur les besoins à satisfaire, les objectifs assignés aux
missions et les attentes des bénéficiaires. Il apparaît par ailleurs
indispensable que La Poste soit à même de fournir des évaluations
précises des économies attendues des différents
scenarii
d’évolutions des
missions susceptibles d’être proposés, ainsi que la Cour l’avait déjà
souligné, au sujet du service universel postal, dans le cadre de l’insertion
au rapport public annuel 2016 sur les facteurs et la distribution du
courrier et des colis.
B -
Quels services pour quel coût ? Des options de fond
à trancher
Si, dans un premier temps, La Poste pourrait, en accord avec l’État,
tirer parti des marges de manoeuvre existantes dans la réglementation des
missions de service public, il serait toutefois utile de mener une réflexion
plus large sur le fondement et la définition de ces missions, en impliquant
les citoyens dans cette démarche.
Les missions de service public répondent à un instant donné à un
besoin social, mais elles ne sauraient être figées : au contraire, elles
doivent pouvoir évoluer en fonction des attentes de la société, en
application du principe d’adaptabilité du service public. Or, les missions
de service public de La Poste s’inscrivent dans un contexte fortement
182
La plupart des bénéficiaires se caractérisent par le fait qu’ils ne détiennent qu’un
livret A chez LBP, que ces livrets sont en suractivité et que le montant d’encours y est
très faible. D’après une estimation de 2013, 800 000 clients de LBP ne possèderaient
qu’un livret A qu’ils utilisent pour réaliser des opérations courantes (plus de 50
opérations financières annuelles contre 12 dans le cadre d’une utilisation normale
d’un compte épargne) et plus de 300 000 détenteurs domicilient leurs prestations
sociales sur leur livret A de La Banque Postale.
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NÉCESSAIRE DES RÉFORMES
137
évolutif, en lien notamment avec le développement des usages du
numérique, qui a pour conséquence la baisse des volumes du courrier
mais également l’émergence de nouveaux usages et de nouvelles attentes
de la part des consommateurs vis-à-vis des services postaux. Le
numérique modifie le rapport au temps et à la notion de proximité.
Le contenu et les modalités des missions de service public
dévolues à La Poste n’ont pas été réexaminés depuis plusieurs années,
alors qu’ils ont été définis dans un contexte social, économique et
financier différent d’aujourd’hui.
Le service universel postal a été pensé dans un contexte de
croissance du marché postal et dans des périodes où la massification des
correspondances numériques n’était pas envisagée. Or, dans une période
de chute du courrier, le maintien de critères d’urgence tels que la
distribution en « J+1 » devient de plus en plus coûteux (recours au travail
de nuit et au mode de transport aérien notamment), sans que la qualité de
service soit pleinement au rendez-vous (cf
.
supra
chapitre II, II-A) mais
également sans que le besoin en soit clairement identifié, à l’heure où les
échanges réellement urgents passent par les courriels ou les envois en
express
183
.
La définition de la présence postale territoriale a été figée sur la
base du réseau existant en 2010 et est aujourd’hui mesurée de manière
uniforme sur l’ensemble du territoire, ce qui ne paraît pas être le moyen le
plus adapté d’assurer une allocation des moyens dynamique et équitable
en fonction des enjeux : rien ne garantit en effet que les 17 000 points de
contact répartis sur le territoire desservent correctement les besoins de la
population, alors que des communes nouvelles se créent, que les zones
suburbaines nécessiteraient une attention accrue et que les zones
« surdenses » (c’est-à-dire où l’offre excède le besoin) des centres urbains
évoluent peu.
S’agissant de la mission d’accessibilité bancaire de La Banque
Postale, elle a été inscrite dans la loi en 2008, dans le contexte de la
réforme d’ampleur qu’a représentée la généralisation de la distribution du
183
Il ressort ainsi d’une étude sur les besoins et attentes de consommateurs sur les
prestations offertes dans le cadre du service universel postal réalisée pour le compte
de la Direction Générale des Entreprises en novembre 2014 que, si la rapidité
demeure pour les particuliers le premier critère de choix pour l’affranchissement d’un
courrier, cette préférence ne se traduit pas systématiquement par une demande
formelle de distribution en « J+1 ». Quant aux entreprises, la rapidité ne constitue que
leur troisième critère de choix après les tarifs et la fiabilité des délais.
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138
livret A à l’ensemble des établissements de crédit de la place. Ses
conditions de mise en oeuvre préexistaient toutefois à la définition légale
qui en a été donnée par la loi de modernisation de l’économie et
correspondaient à une mission ancienne de La Poste. Celle-ci coexiste
cependant désormais avec plusieurs dispositifs généraux en faveur de
l’inclusion bancaire
184
qui, même s’ils n’ont pas la même portée que le
livret A de LBP, poursuivent le même objectif d’un accès pour tous à un
minimum de services bancaires et proposent en outre, pour la plupart, des
moyens de paiement plus modernes (carte bancaire) que ceux utilisés
dans le cadre de la mission d’accessibilité (retrait d’argent liquide). La
gratuité de l’ensemble des services, y compris des opérations de gestion
des incidents de fonctionnement (tels que le rejet de prélèvement), dans le
cadre du livret A de la mission d’accessibilité bancaire constitue toutefois
une différence notable avec ces dispositifs. La disponibilité d’argent
liquide au guichet à partir de très faibles montants en est une autre. Ainsi,
dans la perspective d’une réforme éventuelle, au-delà de la question du
support adéquat de la mission (livret A ou compte courant), le débat
devrait notamment porter sur l’utilité sociale de maintenir ce service de
guichet, au regard, à la fois, de l’intérêt pour les bénéficiaires d’évoluer
vers des moyens de paiement à plus forte valeur ajoutée et des coûts
élevés induits pour La Banque Postale.
L’aide au transport postal de la presse, qui remonte à la Révolution
française, ne devrait pas non plus échapper à une remise à plat. Celle-ci
peut toutefois difficilement s’envisager indépendamment d’une réforme
plus globale du régime des aides à la presse, qui, bien qu’envisagée à de
multiples reprises, n’a pas été mise en oeuvre en raison de sa complexité
et de l’intrication des enjeux. On peut toutefois observer que, bien que
l’État prône une neutralité des aides à la diffusion, les tarifs postaux très
préférentiels de la mission de service public de transport et de distribution
de la presse et les incohérences de la politique de soutien au portage, déjà
soulignées par la Cour
185
, ont fait du transport postal le canal de
distribution le plus aidé. Enfin, comme indiqué précédemment, alors que
l’aide au transport postal contribue également au soutien au pluralisme en
184
Droit au compte, gamme de paiement alternatifs au chèque (pour les interdits
bancaires), offre spécifique pour les clients des banques fragiles financièrement, sans
compter le développement d’offres privées alternatives à un compte en banque
classique, telles que le compte Nickel disponible en bureau de tabac.
185
Cour des comptes,
Rapport public annuel 2013
, Tome 1. Le plan d’aide à la presse
écrite 2009-2011 : une occasion de réforme manquée, p. 621-657. La Documentation
française, 657 p., disponible sur www.ccomptes.fr
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NÉCESSAIRE DES RÉFORMES
139
proposant des tarifs différenciés par famille de presse, on peut considérer
qu’elle demeure insuffisamment ciblée.
Dans ce contexte, et alors que la Commission européenne rend
désormais obligatoire une consultation publique sur le bien-fondé des
services d’intérêt économique général (SIEG) dans le cadre de la
notification des compensations versées par l’État, une consultation
publique plus large sur les missions confiées à La Poste et sur leur
devenir gagnerait à être organisée, et ce d’autant plus que ces
consultations ponctuelles ne concernent pas le service universel postal
(SUP), qui n’est pas compensé.
Différents formats sont envisageables. Quels qu’ils soient, ils
nécessiteront de faire preuve de pédagogie et d’exposer au préalable les
enjeux d’une éventuelle redéfinition des missions, en les replaçant dans le
contexte économique et financier de La Poste aujourd’hui. Il paraît en
effet indispensable que les citoyens puissent se prononcer sur les
modalités des missions de service public en ayant connaissance de leurs
implications concrètes en termes d’organisation et de coût. La Poste a
d’ailleurs elle-même organisé en décembre 2013 et janvier 2014 des
consultations « citoyennes », qui avaient permis de conclure que les
participants étaient attachés au rôle de service public de La Poste, mais
qu’ils étaient néanmoins ouverts à ce que le contenu précis des missions
et leur financement évoluent en fonction de la réalité des besoins de la
population. Les résultats de l’enquête précitée sur le SUP menée pour le
compte de la DGE en 2014 démontrent également, au-delà des réflexes
initiaux d’hostilité au changement, la capacité des personnes interrogées à
nuancer leurs jugements et leurs attentes en tenant compte du contexte
économique dans lequel évolue La Poste
186
.
Une telle consultation permettrait par la suite au Parlement de
débattre de l’actualisation des missions de service public de La Poste et
d’en arrêter, par son vote, le contenu.
186
Les enquêtes réalisées démontrent que, spontanément, les utilisateurs des services
postaux souhaitent naturellement que rien ne change : horaires et fréquence de
distribution, remise en J+1, continuité du service 6 jours sur 7, sont autant d’acquis du
service actuel dont la remise en cause est souvent jugée préjudiciable. Néanmoins, les
approches qualitatives ont démontré que, dès lors qu’étaient présentées les contraintes
spécifiques associées à la baisse des volumes, les positions de principe initiales
pouvaient évoluer et que les utilisateurs pouvaient tout à fait envisager des
aménagements dans l’organisation actuelle du SUP.
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COUR DES COMPTES
140
___________________ RECOMMANDATIONS __________________
La Cour formule en conséquence les recommandations suivantes :
•
élaborer des scénarios de réorganisation du réseau des facteurs, afin
de l’adapter aux marchés des nouveaux services et de la logistique de
proximité, ainsi qu’aux exigences de délai et de qualité de livraison
dans le secteur du colis ;
•
accélérer fortement la transformation des bureaux de poste à faible
activité en zone urbaine en d’autres formes de points de contact ;
•
poursuivre les transformations de bureaux de poste à faible activité en
zone rurale en d’autres formes de points de contact ;
•
mieux encadrer la politique salariale en liant l’évolution des salaires à
des objectifs de transformation de l’entreprise ;
•
formaliser un cadre stratégique et financier de moyen terme relatif à la
croissance externe du groupe La Poste ;
•
actualiser, à l’issue d’un débat public, les missions de service public de
La Poste en tenant compte du service attendu par les usagers et du coût
pour la collectivité.
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Conclusion générale
La Poste n’est plus aujourd’hui celle que ses usagers et clients ont
connue durant des décennies. Si elle est restée le principal employeur de
France, elle a vu son coeur de métier, l’acheminement du courrier,
décroître rapidement et fortement, tandis que ses résultats dépendaient
désormais du développement de son activité bancaire et de sa
performance sur le marché très concurrentiel du colis. Elle a dû faire face
à plusieurs chocs économiques, aux bouleversements induits par la
révolution numérique, à la nécessité de concevoir sa stratégie à l’échelle
internationale, ainsi qu’aux évolutions des modes de vie et de
consommation.
Pour les personnels, ces transformations signifient fréquemment
des efforts d’adaptation générateurs de tensions, notamment en raison de
la difficulté de concilier une culture de service public et une culture
commerciale qui doivent nécessairement coexister au sein de La Poste
d’aujourd’hui. Cette situation appelle de la part de ses
dirigeants une
vigilance particulière.
Les bouleversements sont loin d’être terminés et La Poste n’a pas
achevé sa mue. Si elle a su résister à la crise économique et financière et
se moderniser, l’entreprise ne doit pas aujourd’hui relâcher ses efforts de
transformation, indispensables à la survie du groupe.
La Poste a en effet choisi de gérer le déclin de l’activité courrier en
développant une stratégie de développement de groupe reposant sur la
coexistence de différents métiers (courrier, colis-express, banque,
services, etc.). Ce choix lui a permis de disposer de plusieurs moteurs de
croissance, et ainsi de limiter sa vulnérabilité aux chocs touchant un
secteur en particulier, ce qui s’est révélé pertinent lors de la crise de
2008-2009. Le modèle multi-métiers s’est maintenu, là où d’autres
opérateurs européens ont opté pour la séparation de leurs activités. Il
convient toutefois d’être lucide sur les risques qui menacent ce modèle et
sur la nécessité d’en renforcer la cohérence interne.
À cet égard, l’avenir de La Poste se dessine sur un fond de
certitudes sur le déclin de ses métiers historiques et d’éléments
d’incertitude sur l’ensemble des relais possibles de rentabilité.
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COUR DES COMPTES
142
La baisse continue de l’activité courrier, qui ne peut que se
prolonger avec les politiques de dématérialisation poursuivies par les
entreprises privées comme par les administrations publiques, est une
donnée certaine, sur laquelle La Poste a peu de prise.
Plus incertaines sont les perspectives des relais de croissance
actuels et futurs de l’entreprise. La contribution de la Banque postale et,
dans une moindre mesure, celle du colis-express, qui sont au coeur des
équilibres actuels du modèle multi-métiers, se révèlent plus fragiles que
prévu. Le maintien durable des taux d’intérêt à un niveau très bas, voire
négatif, et l’intensification de la concurrence dans le secteur du colis-
express constituent, en effet, des facteurs de risque majeurs. Les revenus
apportés par La Banque postale devaient donner à La Poste un délai
suffisant pour gérer le déclin de ses activités traditionnelles et trouver
d’autres relais de croissance. Cette gestion du temps trouve aujourd’hui
ses limites.
Celles-ci sont d’autant plus manifestes que la recherche de
nouveaux moteurs de croissance se révèle complexe et tarde à porter ses
fruits. Les « nouveaux services » à la personne, outre qu’ils supposent
une forte évolution dans l’exercice des métiers, sont encore à un stade de
développement embryonnaire. La montée en charge des activités
numériques reste handicapée par le retard avec lequel La Poste a investi
dans ce secteur.
Dans ce contexte difficile, La Poste doit utiliser tous les leviers
dont elle dispose et accélérer sa mutation. Elle doit en premier lieu
réduire ses coûts en agissant dans trois directions simultanées : réaliser
des économies par des rationalisations de l’organisation et de la gestion ;
maîtriser la masse salariale en poursuivant la baisse des effectifs et en
limitant l’évolution des rémunérations ; optimiser le périmètre et la
structure des deux grands réseaux que forment les bureaux de postes et la
distribution. La réorganisation des réseaux doit aller de pair avec la
recherche de synergies entre les différentes activités du groupe, de
manière à tirer tous les avantages du choix du modèle multi-métiers.
La modernisation de l’offre de services de La Poste est un autre
impératif. L’entreprise doit concevoir son offre commerciale et de
services à partir des besoins effectifs de ses clients et usagers. Cette offre
doit prendre en compte l’ensemble des modes de contact avec le client
(implantations physiques, offres dématérialisées, services apportés par le
facteur…) et ses attentes (horaires et délais de livraison par exemple). Le
développement des points de contact en partenariat doit être relancé en
milieu rural et résolument mis en oeuvre en zone urbaine. Le déploiement
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CONCLUSION GÉNÉRALE
143
des services numériques doit être accéléré, grâce notamment à une
stratégie commerciale plus dynamique.
Enfin, La Poste doit continuer à miser sur la création progressive
de nouveaux relais de croissance. Une stratégie de croissance externe par
acquisition de sociétés déjà rentables ou prometteuses fait partie des
leviers de développement envisageables. Les choix effectués doivent,
pour donner cohérence au groupe et le consolider, s’inscrire dans une
logique industrielle et rester soutenables financièrement.
L’ampleur des défis à venir impose également à l’Etat de prendre
sa part dans les évolutions de La Poste en menant une réflexion sur les
missions de service public qu’il lui a confiées. Si ces missions demeurent
au coeur de l’identité de l’entreprise, leur contenu, conçu et organisé avant
l’ère numérique, doit être questionné afin de tenir compte des attentes du
public. Ces missions se traduisant, malgré les compensations versées par
l’État, par un reste à charge pour La Poste, il convient également de
s’interroger sur les moyens que la collectivité est prête à consacrer à leur
financement.
Depuis 2010, La Poste a bénéficié pleinement de l’appui de ses
actionnaires pour se transformer. En dépit d’une « pause » dans les
réorganisations en 2012, elle a engagé des chantiers ambitieux de réforme
et de modernisation en recherchant l’adhésion
de ses personnels.
Désormais, le défi principal est de parvenir à poursuivre
résolument dans la voie qu’elle a elle-même tracée, à un rythme
suffisamment soutenu pour se prémunir des risques qui la guettent et pour
entrer ainsi dans une nouvelle phase de sa transformation.
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Récapitulatif des recommandations
Recommandations à l’État :
1.
actualiser, à l’issue d’un débat public, les missions de service public
de La Poste en tenant compte du service attendu par les usagers et du
coût pour la collectivité.
Recommandations aux actionnaires (État et Caisse des dépôts et
consignations) et à La Poste :
2.
formaliser un cadre stratégique et financier de moyen terme relatif à
la croissance externe du groupe La Poste.
Recommandations à La Poste :
3.
élaborer des scénarios de réorganisation du réseau des facteurs, afin
de l’adapter aux marchés des nouveaux services et de la logistique de
proximité, ainsi qu’aux exigences de délai et de qualité de livraison
dans le secteur du colis ;
4.
accélérer fortement la transformation des bureaux de poste à faible
activité en zone urbaine en d’autres formes de points de contact ;
5.
poursuivre les transformations de bureaux de poste à faible activité
en zone rurale en d’autres formes de points de contact ;
6.
développer auprès du public, dans le cadre d’une démarche
commerciale
structurée,
les
offres
de
services
et
produits
numériques ;
7.
mieux encadrer la politique salariale en liant l’évolution des salaires à
des objectifs de transformation de l’entreprise ;
8.
inclure systématiquement dans les trajectoires financières des plans
stratégiques
des
scénarios
alternatifs
prévoyant
des
mesures
supplémentaires en cas d’accentuation des risques.
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Liste des principaux sigles
AMF
.............
Association des maires de France
APC
..............
Agences postales communales
API
...............
Agences postales intercommunales
ARCEP
.........
Autorité de régulation des communications électroniques et des
postes
B to B
...........
Business to Business
B to C
...........
Business to Consumer
CA
................
Chiffre d’affaires
CAFFIL
........
Caisse française de financement local
CALP
...........
Commission des achats de La Poste
CCP
..............
Compte courant postal
CET 1
...........
Common equity Tier One
CGEFi
..........
Contrôle général économique et financier
CICE
............
Crédit d’impôt compétitivité emploi
COGAS
........
Conseil d’orientation et de gestion des activités sociales
CPCE
............
Code des postes et des communications électroniques
DGE
.............
Direction générale des entreprises
LBP
..............
La Banque Postale
MSAP
...........
Maisons de service au public
PI
..................
Poste Italiane
PNB
..............
Produit net bancaire
PPDC
............
Plateforme de préparation courrier
REX
..............
Résultat d’exploitation
RPC
..............
Relais-poste commerçants
SFIL
.............
Société de financement local
SMIC
............
Salaire minimum interprofessionnel de croissance
SUP
..............
Service universel postal
TAE
..............
Logiciel de traitement automatisé de l’enveloppe
TPAS
............
Temps partiel aménagé sénior
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Annexes
Annexe n° 1 : glossaire
................................................................................
150
Annexe n° 2 : organigramme du groupe La Poste en 2012
..........................
157
Annexe n° 3 : les missions de service public de La Poste
............................
158
Annexe n° 4 : les plans stratégiques de La Poste depuis 2008 et leurs
actualisations successives
............................................................................
174
Annexe n° 5 : principaux évènements ayant affecté le groupe La Poste
depuis 2010
..................................................................................................
175
Annexe n° 6 : les comptes consolidés du groupe La Poste et les
comptes sociaux de La Poste SA
.................................................................
179
Annexe n° 7 : présentation de la situation, de la stratégie financière et
de la diversification de Deutsche Post, Royal Mail et Poste Italiane
...........
209
Annexe n° 8 : cartographie des maisons de service au public (MSAP)
en bureau de poste
........................................................................................
221
Annexe n° 9 : suivi de la mise en oeuvre des recommandations du
rapport public thématique : « La Poste : un service public face à un
défi sans précédent, une mutation nécessaire »
............................................
222
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COUR DES COMPTES
150
Annexe n° 1 :
glossaire
Accords Schwartz
: accords signés entre l’État, la Poste et les
éditeurs de presse le 23 juillet 2008 fixant la trajectoire de hausse des
tarifs, les montants de compensation versés par l’État à La Poste et le
niveau de qualité de service de la mission de transport postal de la presse
pour la période 2009 à 2015.
Accessibilité bancaire
: mission de service public confiée à La
Banque Postale lui faisant obligation d’ouvrir un Livret A à toute
personne qui en fait la demande et d’autoriser un certain nombre
d’opérations non fournies par d’autres établissements bancaires (dépôt et
retrait à partir de 1,5 €, contre un seuil général fixé à 10 €, domiciliation
sur le livret A d’un certain nombre de virements et de prélèvements,
fourniture d’un service de guichet dans les mêmes conditions que pour les
comptes chèques postaux, etc.)
Accessibilité territoriale
: critère du service universel postal
(SUP) prévoyant qu’« au moins 99 % de la population nationale et au
moins 95 % de la population de chaque département sont à moins de
10 km d’un point de contact et toutes les communes de plus de 10 000
habitants disposent d’au moins un point de contact par tranche de 20 000
habitants » (article R. 1-1 du code des postes et communications
électroniques).
APC/API (agences postales communales et intercommunales)
:
points de contact gérés en partenariat avec une mairie ou une
communauté
de
communes.
En
contrepartie
d’une
indemnité
compensatrice, des prestations postales sont assurées. Ces agences sont
gérées par des agents employés par la commune ou la communauté de
communes concernée. Sur les 17 088 points de contact que compte le
réseau de La Poste en avril 2016, plus de 46 % sont gérés en partenariat,
soit 5 739 APIC/API et 2 198 RPC.
BtoB
:
Business to Business
, se dit d’une relation d’entreprise à
entreprise.
BtoC
:
Business to Consumer
, se dit d’une relation d’une
entreprise vers un particulier.
BSCC
: Branche service-courrier-colis de La Poste SA.
Coefficient d’exploitation bancaire :
indicateur utilisé pour
mesurer l’efficacité d’un établissement de crédit. Il correspond au rapport
des
charges
d’exploitation
(frais
de
personnel,
dotations
aux
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ANNEXES
151
amortissements sur les immobilisations corporelles et incorporelles,
autres services externes) divisées par le produit net bancaire (PNB).
Colis express
: livraison d’objets et de plis dans des délais
garantis, du seuil de la porte de l’expéditeur jusqu’à celui du destinataire.
Il s’agit d’un marché complètement ouvert à la concurrence, qui porte sur
les colis légers (jusqu’à 30 kg) émis et distribués sur le territoire français.
Colis « ordinaires »
: colis de 0 à 30 kg, livrés à domicile ou en
points de retrait des colis. Ce marché se caractérise par des délais plus
importants que ceux des envois express. Il est complètement ouvert à la
concurrence mais partiellement régulé : le service universel garantit
qu’une offre de colis jusqu’à 20 kg en envoi ordinaire ou en recommandé
est disponible à l’unité sur tout le territoire. Sont exclus les services
d’envois offerts à des entreprises en exécution de contrats portant sur
plusieurs envois.
Commission supérieure du service public, des postes et des
communications
électroniques
:
commission
parlementaire
mixte
(Assemblée nationale et Sénat) visant à contrôler les activités postales et
de communications électroniques (téléphonie fixe, mobile et internet).
Common Equity Tier 1 (CET 1)
: comprend le capital social, les
primes d’émission, d’apport ou de fusion et les résultats reportés. Les
produits hybrides sont tolérés à condition qu’ils puissent être utilisés d’un
point de vue comptable et juridique pour absorber des pertes sans devoir
passer par le stade de la liquidation de la banque. Il est rapporté aux
emplois à risque et aux emplois hors bilan de l’établissement de crédit
concerné.
Contrat d’entreprise
: formalise les engagements respectifs de La
Poste et de l’État sur les missions de service public. Le dernier contrat
d’entreprise a été signé le 1
er
juillet 2013 pour la période 2013-2017 avec
pour objectifs :
-
le maintien des missions de service public confiées à La Poste : le
service universel postal, le transport et distribution de la presse,
l’accessibilité bancaire et l’aménagement du territoire, avec pour ces
trois dernières missions le maintien du principe de compensation des
coûts ;
-
une trajectoire de qualité de service renforcée ;
-
l’adaptation renforcée des missions aux attentes des usagers et à
l’évolution des technologies ;
-
la
mise
en
place
d’engagements
citoyens
en
faveur
du
développement des territoires et des entreprises, des plus démunis,
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COUR DES COMPTES
152
du développement de la société numérique et dans le domaine de la
responsabilité sociale de l’entreprise.
Contrat de présence postale territoriale
: contrat signé entre
l’État, La Poste et l’association des maires de France, déterminant les
objectifs, les modalités et le financement de la présence postale
territoriale. Le contrat 2014-2016 a pour visée la poursuite de la
rénovation des bureaux de poste et le développement des partenariats.
Contribution à l’aménagement et au développement du
territoire
: mission de service public reposant sur le réseau de La Poste
dont la loi du 2 juillet 1990 modifiée prévoit qu’il « compte au moins 17
000 points de contact répartis sur le territoire français en tenant compte
des spécificités de celui-ci, notamment dans les départements et
collectivités d’outre-mer ».
Courrier égrené
: ensemble du courrier des particuliers et des
petites entreprises, auquel s’ajoute le courrier non industriel des
entreprises. Désigne les envois d’objets postaux postés et traités
individuellement par opposition aux envois en nombre (courrier
industriel).
Courrier de gestion
: représente près de 90 % du chiffre d’affaires
du Courrier, hors presse et publicité adressée. Correspond dans une large
mesure aux volumes envoyés par les entreprises (relevés bancaires,
factures, courriers administratifs, etc), mais également à celui des
administrations.
Délai de livraison
: délai exprimé en jours ouvrables entre la prise
en charge de la marchandise par le transporteur et sa livraison au
destinataire final.
Écopli
: lettre non urgente. L’écopli est trié de jour dans les centres
de tri contrairement à la lettre qui est triée de nuit, ce qui justifie son tarif
un peu plus bas et un délai d'acheminement d'un jour de plus. Pour 2016,
le tarif de l’écopli a été fixé à 0,68 €.
Enseigne La Poste
: direction de la maison mère érigée en
« métier » en charge des activités courrier, colis, bancaires au sein du
réseau des bureaux de poste. Désormais remplacée par le Réseau.
Envoi postal :
tout objet destiné à être remis à l’adresse indiquée
sur l’objet lui-même ou sur son conditionnement et présenté dans la
forme dans laquelle il doit être acheminé. Outre les envois de
correspondance, sont notamment considérés comme des envois postaux
les livres, les journaux, les périodiques et les colis postaux contenant de la
marchandise avec ou sans valeur commerciale.
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ANNEXES
153
Envois de correspondance
: envoi postal ne dépassant pas 2 kg.
Les envois postaux adressés tels que les livres, catalogues, journaux ou
périodiques ne font pas partie des envois de correspondance. Le
publipostage
(publicité adressée ou marketing direct) est un envoi de
correspondance.
Flashage
: procédé qui consiste à scanner (flasher) un colis du
dépôt en bureau de poste jusqu’à la livraison (un colis est flashé en
moyenne quatre fois lors de son parcours). Avec le numéro de suivi du
colis, le client peut connaître à tout moment l’état d’acheminement de son
envoi.
Freigt fowarding :
le
freight forwarding
est la coordination et
l’expédition des marchandises d’un endroit à un autre par l’intermédiaire
d’un seul ou de plusieurs transporteurs par avion, bateau, le rail ou
l’autoroute.
Les entreprises spécialisées dans le freight forwarding, ou
transitaires, fournissent généralement une gamme complète de services
comprenant le suivi des transports, la préparation des documents
d’expédition et d’exportation, la négociation des frais de transports, la
consolidation du fret, l’assurance du fret et le dépôt des réclamations
d’assurances. Elles agissent comme des intermédiaires entre l’expéditeur
et les différents services de transports de marchandises.
Instance
: Objet postal en attente de retrait en agence.
Lettre Prioritaire
: disponible depuis 2007, la lettre prioritaire est
l'option privilégiée pour les envois rapides de documents ou de petits
objets n'excédant pas 3 cm d'épaisseur et ne dépassant 3 kg. L’arrêté du
14 octobre 2015 relatif aux objectifs de qualité de service fixés à La Poste
pour 2015, 2016 et 2017 fixe un objectif de taux de distribution J+1
supérieur à 85 %. Son prix est de 0,76 €.
Lettre Verte
: lancée le 1
er
octobre 2011, la lettre verte est moins
onéreuse (0,67 € contre 0,78 €) mais plus lente (J+2 contre J+1) que la
lettre prioritaire. Sa consommation énergétique est moindre car sa
distribution ne se fait pas en avion. L’arrêté précité du 14/10/2015 fixe un
taux d’acheminement du service de 93,75 % en 2016 et 94 % en 2017.
Logistique urbaine
: façon d’acheminer dans les meilleures
conditions les flux de marchandises qui entrent, sortent et circulent dans
la ville en tenant compte de composantes multiples (habitat, activité
économique, gestion urbaine, transports, etc.).
Pickup Station
: service de mise à disposition des colis dans des
consignes automatiques (accessible 7j/7, 24h/24 pour celles situées en
extérieur). Dès que le colis est mis à disposition, un SMS ou un courriel
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COUR DES COMPTES
154
est automatiquement envoyé au destinataire lui indiquant le code du
retrait. Il dispose alors de trois jours ouvrés pour retirer son colis.
Point de contact
: dénomination générique de l’ensemble des
formes de présence postale territoriale, regroupant les bureaux de poste,
les APC et API, les relais poste et toutes autres formes de mutualisation.
Pôle colis
: direction du colis de la branche-service-courrier-colis.
Pôle courrier
: direction nationale du courrier de la branche
services-courrier-colis.
Pôle services
: direction des services de la branche services-
courrier-colis.
Portage
: distribution d’un support de presse par porteur au
domicile ou sur le lieu de travail d’un abonné.
PPDC
: plateforme de préparation du courrier.
Price cap
: encadrement des hausses tarifaires autorisé par
l’ARCEP. L’objectif du
price cap
est de permettre à La Poste de
«
maintenir (voire améliorer) son taux actuel de rentabilité, tout en ayant
une incitation à l’efficacité
» (ARCEP, rapport d’activité 2014). Le
25 juillet 2014, l’Arcep a autorisé La Poste à augmenter le tarif des
timbres de 5,2 % en moyenne sur la période 2015-2018, avec la
possibilité d’utiliser dès 2015 jusqu’à 50 % de l’enveloppe globale prévue
sur les 4 ans (70 % en 2016, 90 % en 2017, 100 % en 2018).
Produit net bancaire (PNB) :
le PNB est la différence entre les
produits bancaires et les charges bancaires (activité de prêt et d’emprunt ;
opérations sur titres, change, marchés dérivés, etc.). Il mesure la
contribution spécifique des banques à l’augmentation de la richesse et
peut en cela être rapproché de la valeur ajoutée dégagée par les
entreprises non financières. Le calcul du PNB intègre les dotations ou
reprises de provisions sur titres de placement.
Publicité non adressée (PNA)
: totalement ouverte à la
concurrence, correspond à la distribution de messages sans référence
personnelle, sans adresse et sans nom, par opposition à la publicité
adressée. Ces plis ne nécessitent ni collecte, ni tournée quotidienne de
distribution.
Ratio de levier
: rapport entre le capital d’une banque (fonds
propres
Tier one
) et le total de ses expositions (bilan et hors-bilan).
Institué par le dispositif Bâle III et repris dans le règlement (UE)
n° 575/2013 concernant les exigences prudentielles applicables aux
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ANNEXES
155
établissements de crédit et aux entreprises d’investissement, il a été fixé
à 3 % par le comité de Bâle jusqu’à la fin 2017.
RPC (relais poste commerçants)
: point de contact installé chez
un commerçant ou un artisan, auquel La Poste donne mandat pour
effectuer en son nom et pour son compte des prestations postales et des
services financiers simples de dépannage (retrait d’espèces pour les
titulaires de CCP et de livret A pour des montants limités – jusqu’à
150 euros par semaine). En contrepartie, il perçoit une rémunération au
moyen d’un forfait et d’une commission sur les activités.
Service universel postal (SUP)
: défini par la directive postale du
15 décembre 1997 comme « une offre de services postaux de qualité
déterminée fournis de manière permanente en tout point du territoire à des
prix abordables pour tous les utilisateurs », le SUP repose sur un certain
nombre de critères qui, en France, vont plus loin que la législation
européenne. Il prévoit, par exemple, un service de levée et de distribution
6 jours sur 7 (contre 5 jours ouvrables dans la directive) et des envois de
colis postaux jusqu’à 20kg (contre 10 kg dans la directive). La Poste a été
désignée prestataire du SUP pour une durée de 15 ans par la loi du
9 février 2010.
Silver economy
: économie au service des personnes âgées,
destinée à accompagner une population dont l’espérance de vie croît et
crée de nouveaux besoins, notamment dans les secteurs de loisirs,
transport, alimentation, sécurité, santé, domicile, habitat collectif,
assurance, assistance téléphonique, internet, sport.
TPAS
: « temps partiel aménagé seniors », dispositif interne à La
Poste de réduction d’activité en fin de carrière.
Travaux intérieurs, extérieurs
: tris manuels, tournées des
facteurs.
Zone de chalandise
: zone d’attraction commerciale entourant un
point de vente et dans laquelle résident les consommateurs. Les zones de
chalandise distinguées par La Poste se répartissent en zones urbaines et
rurales. Au sein des premières se trouvent les « hyper-centres » (ville-
centre au sein d’une unité urbaine de plus de 20 000 habitants, disposant
de 45 services de proximité dans un rayon de 150m), les zones urbaines
(même définition que les hyper-centres sans les services de proximité),
les zones suburbaines (même définition que les zones urbaines hors
centre et présentant un taux de logement en appartement supérieur à celui
des logements en maison individuelle) et les villes à la campagne (moins
de 20 000 habitants). Les zones rurales regroupent, quant à elles, les
communes entrant dans la définition de l’INSEE et comprennent les
La Poste - décembre 2016
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COUR DES COMPTES
156
communes de moins de 2 000 habitants ; elles se répartissent en « village
pôle rural » (lorsqu’elles disposent de plus de 15 services de proximité) et
en « village » (les mêmes sans les services).
La Poste - décembre 2016
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ANNEXES
157
Annexe n° 2 :
organigramme du groupe La Poste
en 2012
Au cours de la période contrôlée, La Poste est passée d’une
organisation en métiers à une organisation en branche. Cet
organigramme correspond à l’organisation en métiers (2012) :
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COUR DES COMPTES
158
Annexe n° 3 :
les missions de service public de La
Poste
•
Cadre général
L’article 2 de la loi du 2 juillet 1990 modifiée dresse la liste des
quatre missions de service public de La Poste :
-
le service universel postal (mentionné dans la loi depuis 1999 et dont
le régime est fixé par le code des postes et des communications
électroniques),
-
le service public du transport et de la distribution de la presse (idem),
-
la contribution à l’aménagement et au développement du territoire
(mentionnée depuis 2005, détaillée à l’article 6 et mise en oeuvre
conformément aux dispositions du contrat de présence postale
territoriale),
-
et la mission d’accessibilité bancaire (mentionnée depuis 2008 et
définie par le code monétaire et financier).
Ces missions font l’objet de fiches récapitulatives individuelles
infra
.
Le principe du versement à La Poste de compensations financières
au titre de ces missions de service public est prévu par la loi :
-
s’agissant du service universel postal (SUP), l’article L. 2-2 du code
des postes et télécommunications prévoit la création d’un fonds de
compensation destiné à assurer le financement des coûts nets liés aux
obligations de service universel. Ce fonds devant être alimenté par
les contributions des prestataires de services postaux autorisés par le
régulateur, il n’a finalement pas été mis en oeuvre, La Poste ayant
conservé un monopole de fait sur le marché du courrier, à
l’exception de quelques niches ;
-
l’article 8 de la loi du 2 juillet 1990 renvoie à un décret en Conseil
d’État le soin de fixer les garanties d’une « juste rémunération des
prestations de service public qu’assure La Poste, notamment des
prestations de transport et de distribution de la presse » ; l’article 21
de la loi du 2 juillet 1990 prévoit spécifiquement un abattement sur
les bases d’imposition des taxes locales dues par La Poste égal à
85 % de leur montant « en raison des contraintes de desserte de
l’ensemble du territoire national et de participation à l’aménagement
du territoire » qui s’imposent à l’opérateur public. Un décret fixe
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ANNEXES
159
tous les ans les taux des abattements des bases d’impositions directes
locales dont bénéficie La Poste au titre de la mission (d’une part,
pour la cotisation foncière des entreprises et pour les taxes foncières
et, d’autre part, pour la cotisation sur la valeur ajoutée des
entreprises) afin de faire coïncider le montant octroyé avec le
montant prévu dans le contrat de présence postale territoriale ;
-
enfin, en ce qui concerne la mission d’accessibilité bancaire, l’article
L. 221-6 du code monétaire et financier prévoit le versement au
profit de La Banque Postale d’une rémunération complémentaire au
titre des obligations spécifiques qui lui incombent en matière de
distribution et de fonctionnement du livret A. L’article R. 221-8-1
précise que cette rémunération est calculée de manière à assurer une
« compensation proportionnée » aux missions de service d’intérêt
économique général confiées à l’établissement.
Les montants de compensations versées au titre des missions de
service public doivent être notifiés à la Commission européenne au titre
des aides d’État.
L’encadrement de l’Union européenne applicable aux aides d’État
sous forme de compensations de service public
L’encadrement
du
20
décembre
2011,
dit
« encadrement
Almunia », a précisé les dispositions applicables aux compensations de
service public constituant des aides d’État compatibles avec le Traité sur
le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) devant être notifiées à
la Commission européenne.
Cette nouvelle règlementation, entrée en vigueur le 31 janvier
2012, est applicable aux SIEG bénéficiant de compensations annuelles
excédant 15 millions d’euros (c’est-à-dire au-delà du seuil d’application
du règlement
de minimis
)
et n’entrant pas dans le champ des services
répondant à certains besoins sociaux (hôpitaux, logement social…)
exemptés, de ce fait, de notification.
Un mandat doit confier expressément la mission de SIEG et
préciser, notamment, la nature et la durée des obligations de service
public, la description du mécanisme de compensation ainsi que les
paramètres de calcul, de contrôle et de révision de la compensation. Les
États membres doivent en outre apporter la preuve qu’ils ont pris en
considération les besoins en matière de service public : ils sont tenus à cet
égard de procéder à une consultation publique ou à toute autre procédure
appropriée permettant de tenir compte des intérêts des utilisateurs. Enfin,
les États membres doivent introduire des incitations à une prestation
efficiente de SIEG de qualité élevée.
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COUR DES COMPTES
160
Ces objectifs d’efficience doivent être pris en compte dans la
fixation du montant de la compensation (selon la méthode du coût net
évité ou de la répartition des coûts).
Les États membres peuvent, par
exemple, définir à l’avance un niveau de compensation fixe anticipant les
gains d’efficience que l’entreprise devrait réaliser sur la durée du mandat,
ou définir des objectifs d’efficience dans le mandat, de telle sorte que le
niveau de compensation soit fonction de la mesure dans laquelle ces
objectifs ont été atteints.
La
notification
de
la
compensation
à
la
Commission,
conformément à l’article 108 du TFUE, doit permettre de s’assurer de
l’absence de surcompensation : aux termes de l’encadrement, « le
montant de la compensation ne doit pas dépasser ce qui est nécessaire
pour couvrir le coût net de l'exécution des obligations de service public,
compte tenu d’un bénéfice raisonnable ».
•
Le service universel postal
Se reporter également à l’insertion au rapport public annuel 2016
« Les facteurs face au défi de la baisse du courrier : des mutations à
accélérer ».
FICHE RÉCAPITULATIVE : SERVICE UNIVERSEL
POSTAL
Définition
- «
une offre de services postaux de qualité déterminée
fournis de manière permanente en tout point du territoire à des
prix abordables pour tous les utilisateurs
» (directive
97/67/CE) ;
-principes d’égalité, de continuité et d’adaptabilité en
recherchant la meilleure efficacité économique et sociale ;
- obligations de qualité et d’accessibilité du service ;
- La Poste prestataire du service universel postal pour
une durée de 15 ans (2025)
Base juridique
- directive 97/67/CE
- article L. 1 et s. et R. 1 et s. du code des postes et
communications électroniques
- arrêtés du ministre fixant les objectifs de qualité de
service
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ANNEXES
161
FICHE RÉCAPITULATIVE : SERVICE UNIVERSEL
POSTAL
Modalités
- levée et distribution 6 jours sur 7 sur l’ensemble du
territoire national (5/7j dans la directive postale) ;
- critères d’accessibilité des points de contact
187
:
au niveau national, au moins 99 % de la population
doit être à moins de 10 km d’un point de contact ;
au niveau départemental, au moins 95 % de la
population de chaque département doit être à moins
de 10 km d’un point de contact ;
et, au niveau communal, toutes les communes de
plus de 10 000 habitants doivent disposer d’au moins
un point de contact par tranche de 20 000 habitants
-
catalogue
d’offres
de
services
nationaux
et
transfrontières (prestations assorties de tarifs), ex :
envoi de correspondance jusqu’à 2kg
envoi de colis postaux jusqu’à 20kg (10kg dans la
directive) ;
péréquation tarifaire pour les envois égrenés.
- objectifs de qualité de service (rapidité et fiabilité)
Compensation
- possibilité prévue par la directive postale de mettre en
place un Fonds de compensation pour le prestataire du service
universel financé par les concurrents (pas de mise en oeuvre en
France faute de concurrents de taille critique sur le territoire)
- en pratique, compensation
via
l’augmentation des
tarifs postaux consentie par l’ARCEP
Coûts (2014)
- Estimations issues de la comptabilité réglementaire
de La Poste :
coûts attribuables : 7,1 Md€
chiffre d’affaire : 7,5 Md€
résultat net : 434 M€
187
Article R.1-1 du code des postes et communications électroniques issu du décret
du 5 janvier 2007 pris pour la transposition de la directive du 15 décembre 1997. Si la
directive impose aux États membres de prendre des mesures pour que la densité des
points de contact et d'accès tienne compte des besoins des utilisateurs, elle ne précise
ni le nombre ni la densité des points de contact postaux, qu’il revient aux États
membres de déterminer.
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COUR DES COMPTES
162
FICHE RÉCAPITULATIVE : SERVICE UNIVERSEL
POSTAL
Actualité
et
enjeux
- Demande de renégociation de la directive postale par
plusieurs États-membres de l’UE, mais opposition pour l’heure
de l’Allemagne et de la France
Recomman-
dations
de
la
Cour
- Élaborer des scénarios chiffrés du contenu et du coût
du service universel postal et les mettre en débat, tant entre les
administrations concernées qu’avec les usagers (insertion au
RPA 2016).
Niveaux
d’intervention
possibles
- à l’intérieur des
contraintes légales
: amélioration du
raccordement,
réorganisations
pour
une
plus
grande
mutualisation courrier/colis
- à l’intérieur des
contraintes européennes
: réexamen
des critères fixés au-delà des exigences de la directive
(fréquence de levée et de distribution, poids/format)
- renégociation de la
directive postale
(pas à l’ordre du
jour au niveau européen, bien que de nombreux pays la
réclament)
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ANNEXES
163
•
Le transport et la distribution de la presse
Se reporter également à l’insertion au rapport public annuel 2013
« Le plan d’aide à la presse écrite 2009-2011 : une occasion de réforme
manquée »
188
ainsi qu’à la communication à la Commission des finances
du Sénat de juillet 2013 sur « Les aides de l’État à la presse écrite »
189
.
FICHE RÉCAPITULATIVE : TRANSPORT ET
DISTRIBUTION DE LA PRESSE
Définition
- des prestations offertes bénéficiant de tarifs spécifiques
homologués par le ministre des postes après avis de l’ARCEP
- «
la structure tarifaire de ces prestations doit favoriser le
pluralisme, notamment celui de l’information politique et générale
»
(art. L.4 du code des postes et communications électroniques)
Base juridique
-
articles
L. 4
et
R1-1-17
du
code
des
postes
et
communications électroniques
-
jusqu’en
2015,
accords
tripartites
définissant
les
engagements de La Poste, de l’État et des éditeurs de presse
Modalités
- tarifs préférentiels (voir tableau n° 18)
Compensa-
tion
- trajectoire de compensation préalablement fixé par les
accords tripartites, désormais arrêtée par l’État
- trajectoire décroissante depuis les accords Schwartz, avec
une accentuation en 2014 liée à la réfaction de 50 M€ décidée par le
Gouvernement : au total, le montant de la compensation aura
diminué de 44 % entre 2010 et 2015
188
Cour des comptes,
Rapport public annuel 2013
, Tome 1. Le plan d’aide à la presse
écrite 2009-2011 : une occasion de réforme manquée, p. 621-657. La Documentation
française, 657 p., disponible sur www.ccomptes.fr
189
Cour des comptes,
communication à la commission des finances du Sénat : Les
aides de l’État à la presse écrite
, juillet 2013, 184 p., disponible sur www.ccomptes.fr
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COUR DES COMPTES
164
FICHE RÉCAPITULATIVE : TRANSPORT ET
DISTRIBUTION DE LA PRESSE
Coûts 2014
- Estimations issues de la comptabilité réglementaire de La
Poste :
coûts attribuables : 904 M€
chiffre d’affaire : 396 M€
déficit brut : 506 M€
déficit net (après compensation) : 306 M€. D’après La
Poste, ce déficit net divise par deux la marge de l’activité
Courrier.
Actualité
et
enjeux
- Après l’abandon de la réforme des catégories de titres de
presse, mise en place d’une nouvelle tarification des suppléments
magazines des quotidiens, gestion des conséquences du moratoire
sur les tarifs de 2009
- Notification de la nouvelle trajectoire de compensation à la
Commission européenne
Recomman-
dations de la
Cour
- Mise en place d’un meilleur ciblage des tarifs aidés
Niveaux
d’intervention
possibles
- Convergence des tarifs du SP vers les tarifs du SU ;
- Réforme plus globale du dispositif des aides à la presse.
Avec 1,2 Md d’exemplaires diffusés en 2013, soit 30 % de la
diffusion payée de la presse sur le territoire, La Poste est le deuxième
canal de diffusion de la presse (après le réseau de vente au numéro et
devant le portage) et le principal mode de diffusion de la presse abonnée.
La presse représente 22 % du poids de la sacoche des facteurs alors
qu’elle n’occupe que 8 % du volume de courrier et 4 % du chiffre
d’affaires Courrier de La Poste.
La mission de transport et de distribution de la presse repose sur
l’octroi à la très grande majorité des titres de presse, de tarifs préférentiels
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ANNEXES
165
au sein des tarifs presse du service universel postal. Ainsi, l’offre inscrite
au catalogue de service universel à destination des publications de presse
ne s’applique qu’à un faible nombre de titres n’ayant pas reçu l’agrément
de la CPPAP (commission paritaire des publications et agences de presse)
et ne pouvant bénéficier de ce fait des tarifs accordés dans le cadre de la
mission de service public de transport postal de la presse.
Tarifs du transport postal en 2014 (€)
Tarif
théorique du
service
universel
presse
Tarif moyen
de la mission
de service
public de
transport de
la presse
Taux de
couverture
Quotidiens à
faibles ressources
publicitaires
(QFRP)
0,62
0,08
14 %
Presse
d’information
politique générale
(PIPG) hors QFRP
0,92
0,32
35 %
Autres publications
autorisées par la
CPPAP*
0,66
0,40
61 %
Source : La Poste - * CPPAP : commission paritaire des publications et agences de presse
•
La contribution à l’aménagement et au développement du
territoire
Se reporter également au référé sur « La modernisation du réseau
La Poste », février 2016.
FICHE RÉCAPITULATIVE : AMÉNAGEMENT DU
TERRITOIRE
Définition
- « La Poste contribue, au moyen de son réseau de points de contact,
à l’aménagement et au développement du territoire national, en
complément de ses obligations de service universel (…) et dans le
respect des principes fixés à l'article 1
er
de la loi n° 95-115 du
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COUR DES COMPTES
166
FICHE RÉCAPITULATIVE : AMÉNAGEMENT DU
TERRITOIRE
4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement
du territoire » (art. 6 de la loi du 2 juillet 1990)
- (…) « Pour remplir cette mission, La Poste adapte son réseau de
points de contact, notamment par la conclusion de partenariats
locaux publics ou privés, en recherchant la meilleure efficacité
économique et sociale »
Base
juridique
- articles 6 et 21 de la loi du 2 juillet 1990
- contrat de présence postale territoriale
Modalités
- au moins 17 000 points de contact répartis sur le territoire français
en tenant compte des spécificités de celui-ci, notamment dans les
départements et collectivités d'outre-mer.
Compensa-
tion
-
via
le Fonds postal national de péréquation territoriale (constitué,
dans un compte spécifique de La Poste, qui en assure la gestion
comptable et financière) dont les lignes directrices sont fixées par le
contrat de présence postale territoriale passé entre l'État, La Poste et
l’AMF, après avis de la Commission supérieure du service public
des postes et des communications électroniques
- les ressources du fonds proviennent de l'allégement de fiscalité
locale dont La Poste bénéficie (art 21 de la loi du 2 juillet 1990 :
« les bases d'imposition de La Poste font l'objet d'un abattement égal
à 85 % de leur montant, en raison des contraintes de desserte de
l'ensemble du territoire national et de participation à l'aménagement
du territoire qui s'imposent à cette société. L'abattement ne donne
pas lieu à compensation par l'État. Le taux de l’abattement est révisé
chaque année conformément au 3° du II de l'article 1635
sexies
du
code général des impôts »).
- 170 M€ par an prévus dans le contrat de présence postale
territoriale 2014-2016
Coûts 2014
- coût estimé par l’ARCEP à 242 M€
- coût net après compensation des missions de service public :
7
0 M€
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ANNEXES
167
FICHE RÉCAPITULATIVE : AMÉNAGEMENT DU
TERRITOIRE
Actualité et
enjeux
- négociation en cours du contrat de présence postale territoriale
pour les années 2017-2019 : le futur CPPT devrait déterminer de
nouvelles modalités de répartition des ressources du Fonds de
péréquation et de transformation du réseau de La Poste
- notification de la future trajectoire de compensation à la
Commission
Recomman-
dations de
la Cour
- Référé sur la modernisation du Réseau La Poste (février
2016) :
redéfinir les critères d'accessibilité en zone urbaine en
prenant en compte les besoins de la clientèle postale et
bancaire ;
transformer les bureaux de poste à faible activité en zone
urbaine en d'autres formes de points de contact et organiser
à cet effet une concertation avec les autorités locales
concernées ;
poursuivre les transformations de bureaux de poste à faible
activité en zone rurale en d'autres formes de points de
contact.
Les modalités de transformation du réseau et de soutien financier
à la présence postale territoriale sont déterminées par le contrat de
présence postale territoriale signé entre l’État, La Poste et l’AMF.
L’actuel contrat, en cours de renégociation, pourrait se traduire par un
allégement des contraintes pesant sur La Poste.
Les contrats de présence postale territoriale 2014-2016 et
2017-2019
Contrat 2014-
2016
Avenant 2015
Projet de contrat
2017-2019 au
30/06/2016
Points
de
contact éligibles
à l’intervention
du
Fonds
de
péréquation
Tous les points de
contact situés :
1)
dans
les
communes
de
moins
de
2000
habitants (y compris
en
leur
sein
les
zones
de
Précision
selon
laquelle
les
bureaux de poste
organisés sous la
forme
facteur-
guichetier et sous
celle de maisons
de
service
au
Points
de
contact
dits
« prioritaires » :
•
bureaux
de
poste
mutualisés
(maisons de services au
public
en
bureau
de
poste
et
bureaux
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COUR DES COMPTES
168
Contrat 2014-
2016
Avenant 2015
Projet de contrat
2017-2019 au
30/06/2016
revitalisation rurale
et
les
zones
de
montagne)
2) dans les zones
urbaines sensibles
3)
dans
les
départements
d’Outre-mer
(DOM)
public
sont
éligibles au Fonds
Substitution
des
nouveaux
quartiers
de
la
politique
de
la
ville
aux
zones
urbaines sensibles
Mention parmi les
partenariats
des
relais
Économie
sociale et solidaire
(ESS)
Facteur-Guichetier) ;
•
bureaux
de
poste ouverts moins de
18 heures ;
•
points
de
contact en partenariat
avec
les
collectivités
locales
(agences
postales communales et
intercommunales) ;
•
relais
commerçants
ou
les
relais
en
partenariat
avec
les
acteurs
de
l’économie
sociale
et
solidaire
(relais
ESS)
situés
dans
les
communes de moins de
2 000 habitants ;
•
points
de
contact situés dans les
nouveaux quartiers de la
politique
de
la
ville
(NQPV);
•
points
de
contact situés dans les
DOM.
Nombre
de
points
de
contact éligibles
par
département
Annexe au contrat
11 348 au total
= chiffre 2014
Principe
de
révision annuelle
de
la
liste
des
points de contact
éligibles (plus de
référence à la 1
ère
année du contrat)
Pas
d’annexe
prévue
Limitation
aux
9 500 points de contact
nécessaires pour assurer
la
mission
d’aménagement
du
territoire
=>
pas
de
financement
pour
les
zones
urbaines
sauf
NQPV
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ANNEXES
169
Contrat 2014-
2016
Avenant 2015
Projet de contrat
2017-2019 au
30/06/2016
Facteurs
de
pondération des
dotations
-communes rurales :
1
- ZRR : 1.1
-zones
de
montagne : 1.2
- ZRR et zones de
montagne : 1.3
- ZUS : 1.7
- DOM : 1.7
Probable
reconduction, sauf pour
les NQPV qui passerait
à 3
Affectation des
dotations
Répartition
des
enveloppes
départementales par
destination :
-
part
A
:
rémunérations
des
partenariats
-
part
B
:
amélioration
de
l’accès aux services
postaux [
6 sous-
parts :
1)
modernisation
des
bureaux,
2)
accompagnement
des
clientèles
fragiles,
3)
accessibilité
numérique
avec
objectif de 30 % de
la
part
B,
4)
aménagement
des
partenariats,
5)
création
de
partenariats,
6)
Commissions
départementales de
la présence postale
territoriale
-
CDPPT
]
Principe
de
miscibilité
des
enveloppes
au
sein de la part B
Volonté
de
décloisonnement
des
parts => définition de
priorités avec marges de
manoeuvre laissées aux
CDPPT
pour
leur
répartition
et
plus
grande fongibilité (dont
5 % pour le financement
d’expérimentations)
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COUR DES COMPTES
170
Contrat 2014-
2016
Avenant 2015
Projet de contrat
2017-2019 au
30/06/2016
-
part
C
:
fonctionnement
et
évolution
des
bureaux de poste en
zone
rurale
[
financement
des
bureaux
à
très
faible activité
]
-
part
D
:
renforcement
de
l’offre postale dans
les DOM
Modalités
d’évolution
du
réseau
- diagnostic partagé
entre
LP
et
la
commune
concernée, préalable
et formalisé
- accord préalable
du
maire
et
du
conseil municipal
Proposition de La Poste
reposant sur trois cas
distincts :
- pour les points de
contact
prioritaires,
maintien du dispositif ;
- pour les points de
contact non prioritaires
mais situés dans des
communes
à
faible
densité
de
population
(seuil restant à préciser),
dispositif aménagé de
présentation argumentée
d’un dossier de synthèse
par
La
Poste
à
la
commune et d’accord
préalable
du
maire
uniquement ;
- pour tous les autres
points
de
contact,
présentation argumentée
d’un
dossier
de
synthèse,
courrier
de
formalisation adressé au
maire et information des
clients et du président
de la CDPPT un mois
au moins avant la date
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ANNEXES
171
Contrat 2014-
2016
Avenant 2015
Projet de contrat
2017-2019 au
30/06/2016
de la transformation
Demande de l’AMF :
- maintien du dispositif
actuel
pour
les
communes
urbaines
disposant
d’un
seul
bureau de poste*,
- mise en oeuvre d’une
concertation
renforcée
entre le maire et le
représentant de La Poste
pour les autres
* NB : 6397 communes
concernées
Modalités
de
modification
des horaires
- modification sans
changement
d’amplitude globale
= information écrite
du maire 1 mois
avant et information
du
public
avec
délais minimaux
- modification avec
changement
d’amplitude
=
rapport
écrit
au
maire qui dispose
d’un délai de 3 mois
pour transmettre ses
observations ;
une
seule
évolution
d’amplitude
autorisée
pdt
la
durée du contrat
- interdiction des
modifications ayant
pour effet de réduire
à
moins
de
12h
l’amplitude
hebdomadaire
-
extension
de
l’obligation
d’information sur
les modifications
éventuelles
d’horaires lors de
la création d’un
poste de facteur-
guichetier
- probable reconduction
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COUR DES COMPTES
172
•
L’accessibilité bancaire
ACCESSIBILITÉ BANCAIRE
Définition
- principe d’universalité du livret A : LBP « ouvre un livret
A à toute personne [personnes physiques, associations mentionnées
au 5 de l'article 206 du code général des impôts, organismes
d'habitations à loyer modéré et syndicats de copropriétaires] qui en
fait la demande » (article L. 221-2 du code monétaire et financier)
- sujétions spécifiques fixées par voie réglementaire
(montants minimaux des opérations individuelles de retrait et de
dépôt ; liste des opérations autorisées)
Base juridique
- art. L. 221-1 et s., L. 518-25 et s. et R. 221-1 et s. du code
monétaire et financier
- convention entre l’État et LBP qui précise les conditions
applicables
à
cet
établissement
pour
la
distribution
et
le
fonctionnement du livret A
Modalités
- montant minimal des opérations individuelles de retrait ou
de dépôt en espèces fixé à 1,5 € (contre 10 € pour les autres
banques) ;
- obligation pour LBP de procéder gratuitement à l’ensemble
des opérations suivantes sur les livrets A :
domiciliation des versements relatifs (i) aux
prestations sociales versées par les collectivités publiques
et les organismes de sécurité sociale et (ii) aux pensions
des agents publics ;
domiciliation
des
prélèvements
relatifs
au
paiement (i) de l’impôt sur le revenu, de la taxe
d’habitation, des taxes foncières ou de la redevance
audiovisuelle, (ii) des quittances d’eau, de gaz ou
d’électricité et (iii) des loyers dus aux organismes
d’habitation à loyer modéré et aux sociétés d’économie
mixte gérant des logements sociaux).
- un certain nombre de prestations commerciales assurées en
sus
Compensation
- LBP perçoit une rémunération complémentaire au titre des
obligations spécifiques qui lui incombent en matière de distribution
et de fonctionnement du livret A ; montant annuel fixé par arrêté du
ministre chargé de l'économie (art. R. 221-8 du code monétaire et
financier)
- montant dégressif (- 13 % entre 2010 et 2015 ; - 36 %
prévus entre 2015 et 2020)
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ANNEXES
173
ACCESSIBILITÉ BANCAIRE
Coûts 2014
- Estimations issues de la comptabilité réglementaire de La Poste :
coûts attribuables : 625 M€
chiffre d’affaire : 312 M€
déficit net (après compensation) : 72 M€
Actualité
et
enjeux
- renchérissement des coûts pour LBP en raison des conditions
actuelles de taux du livret A
- notification de la nouvelle trajectoire de compensation à la
Commission
avec
obligation
de
modifier
la
méthodologie
d’évaluation du coût de la mission afin de produire un scénario
contrefactuel
Niveaux
d’intervention
possible
- remise à plat de la mission, de ses objectifs et de ses
moyens au regard des dispositifs en faveur de l’inclusion bancaire
existant par ailleurs
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COUR DES COMPTES
174
Annexe n° 4 :
les plans stratégiques de La Poste
depuis 2008 et leurs actualisations successives
Plan stratégique 2003‐2007
« Performance et convergence »
Plan stratégique 2008‐2012
« Performance et confiance »
Plan stratégique 2010‐2015
« Ambition 2015 »
Plan stratégique 2014‐2020
« La Poste 2020 : conquérir l’avenir »
Crise financière
(2008‐2009)
Trajectoire financière 2008-2010
Actualisation 2011
Actualisation 2012
Plan stratégique 2013-2018
« La confiance partagée »
Contrat de service public 2008-2012
Contrat d’entreprise 2013-2017
Plan stratégique
Trajectoire financière (si différente
du plan stratégique)
Plan stratégique non mis en œuvre
Contrat avec l’Etat
Actualisation en 2017 ?
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ANNEXES
175
Annexe n° 5 :
principaux évènements ayant
affecté le groupe La Poste depuis 2010
Année 2010
1
er
mars
:
jusqu’alors
établissement
public
industriel
et
commercial, La Poste devient une société anonyme à capitaux 100 %
publics.
15 avril
: adoption du plan stratégique 2010-2015 « Ambition
2015 », qui fixe un objectif de chiffre d’affaires de 22Md€ et un objectif
de résultat d’exploitation de 1,7Md€ en 2015.
Année 2011
1
er
janvier
: ouverture des services postaux à la concurrence à la
suite des directives communautaires 97/67/CE du 15 décembre 1997 et
2002/39/CE du 10 juin 2002, transposées par la loi du 20 mai 2005
relative à la régulation des activités postales. L'article 2 du code des
postes et des communications électroniques prévoit néanmoins que « La
Poste est le prestataire du service universel postal pour une durée de
quinze ans à compter du 1
er
janvier 2011 ».
26 janvier
: signature du contrat de présence postale territoriale
pour la période 2011-2013 par La Poste, l’État et l’Association des
Maires de France. Il prévoit le maintien des points de contact dans les
zones rurales, l’établissement d’un diagnostic partagé entre les maires et
les représentants locaux de La Poste avant toute transformation d’un
bureau
de
poste
en
Agence
Postale
Communale
(APC)
ou
Intercommunale (API) ou Relais Poste (RP), ainsi que l’accord du maire
et du conseil municipal. Le financement prévu par ce contrat est de
170 M€ par an, soit 510 M€ pour la période (contre 135 M€ pour le
précédent contrat).
10 février
: augmentation du capital de La Poste de 2,7 Md€
(1,5 Md€ souscrits par la Caisse des dépôts et 1,2 Md€ par l’État) à la
suite d’un engagement irrévocable matérialisé dans un contrat de
souscription signé par l’État, la Caisse des dépôts et La Poste.
23 mai
: La Poste devient opérateur virtuel de téléphonie mobile
(MVNO),
via
sa filiale La Poste Mobile créée en partenariat avec SFR.
1
er
octobre
: La Poste lance la lettre verte, moins onéreuse (0,67 €
contre 0,78 €) mais plus lente (J+2 contre J+1) que la lettre prioritaire.
La Poste - décembre 2016
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COUR DES COMPTES
176
Année 2012
31 janvier
: LBP lance une assurance complémentaire santé, en
partenariat avec la Mutuelle Générale et Malakoff Médéric.
Mars-septembre
: après le suicide de deux employés, Jean-Paul
Bailly confie à Jean Kaspar la mission du « Grand Dialogue sur la vie et
le bien-être au travail ». À la suite du rapport, La Poste décide notamment
de prendre des dispositions pour améliorer la qualité de vie au travail. Le
groupe recrute en outre 15 000 personnes en CDI entre 2012 et 2014, soit
5 000 de plus que le nombre prévu dans le plan stratégique.
1
er
juillet
: la Banque Postale reprend les activités de Dexia en
direction des collectivités locales. La filiale en charge de cette nouvelle
activité est co-détenue par LBP (65 %) et la Caisse des dépôts (35 %).
Juillet
: La Poste et Swiss Post lancent Asendia, coentreprise qui
réunit leurs activités transfrontières. Asendia est détenue à parts égales
par les deux partenaires. L’objectif est de devenir le leader des solutions
BtoC pour le courrier international.
Octobre
: LBP lance « La Banque Postale chez soi » qui permet au
client d’être en contact à distance avec la banque.
2012
: La Poste commence à déployer en partenariat avec Renault
des véhicules électriques pour les facteurs, pour la collecte et la
distribution du courrier et des petites marchandises.
Année 2013
22 janvier
: signature d’un accord sur la qualité de vie au travail
qui reprend les recommandations du Grand Dialogue. L’accord est signé
par FO, CFDT, CGC-UNSA et CFTC.
30 mai
: adoption du plan stratégique 2013-2018 « La confiance
partagée », qui fixe un objectif de chiffre d’affaires de 23,7 Md€ et un
objectif de résultat d’exploitation de 740 M€ en 2018.
25 septembre
: nomination de Philippe Wahl à la fonction de
Président-directeur général du Groupe La Poste. Il remplace Jean-Paul
Bailly, en place depuis 2002.
Année 2014
16 janvier
: signature du contrat de présence territoriale 2014-2016
par La Poste, l’État et l’Association des Maires de France. Il prévoit que
La Poste doit assurer pour la période 17 000 points de contact sur
l’ensemble du territoire. Le contrat reconduit le montant de financement
La Poste - décembre 2016
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ANNEXES
177
prévisionnel de 170 M€ par an, soit 510 M€ pour la période. Ce nouveau
contrat favorise les investissements encourageant l’amélioration de
l’accessibilité numérique et le renforcement de la mutualisation de
services de proximité au public.
28 janvier
: adoption du plan stratégique 2014-2020 « La Poste
2020 : conquérir l’avenir », qui fixe un objectif de chiffre d’affaires de
25 Md€ et un objectif de résultat d’exploitation de 1,9 Md€ en 2020.
Avril
: le groupe réorganise sa gouvernance. Les quatre « métiers »
sont remplacés par cinq « branches » (La Banque Postale, le Réseau, le
Numérique, GeoPost et la branche Services-Courrier-Colis).
25 juillet
: l’Arcep autorise La Poste à augmenter ses tarifs de
5,2 % en moyenne pendant 4 ans. La décision prévoit que La Poste peut
utiliser dès 2015 jusqu’à 50 % de l’enveloppe globale prévue sur les 4
ans.
Année 2015
Février
: décision de regrouper les sièges sociaux des principales
entités du groupe à Issy-les-Moulineaux et dans le XIVe arrondissement
de Paris. Le déménagement a débuté en février 2016 et doit être effectif
en juin 2017. L’économie prévue est de 11 M€ par an.
Mai
: le site de la Poste de la rue du Louvre, plus grand centre de
distribution du courrier de France (32 000 m
2
), commence à être rénové.
Une partie du bâtiment sera transformée en un hôtel de 80 chambres.
27 juin
: fin de service des TGV postaux. Mis en service en 1984,
ces trains assuraient la livraison du courrier J+1.
7 juillet
: Mediapost est l’objet d’une plainte de la part d’une de ses
filiales, Mediaprism Groupe, pour « faux et usage de faux » et « tentative
d’escroquerie ».
7 octobre
: La Poste lance une offre permettant d’envoyer un colis
depuis son domicile
via
Colissimo.
21 octobre
: La Poste lance La Poste Connect, offre de service
numérique qui permettra à terme au client d’accéder à tous les services La
Poste.
29 octobre
: GeoPost poursuit sa diversification avec l’acquisition
de Resto-in et Stuart, dont elle acquiert 20 % des parts. Resto-in est
spécialisée en livraison de nourriture à domicile et Stuart dans la course
urbaine urgente.
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COUR DES COMPTES
178
Année 2016
J
anvier
: Docapost prend une participation majoritaire (85 %) dans
la startup SmartPanda, spécialisée dans les services pour dirigeants de
TPE.
14 janvier
: La Poste équipe progressivement ses bureaux de poste
d’une borne Wifi en accès libre. Objectif : équiper 750 points de service à
la fin de l’année 2016.
Mai
: La Poste acquiert ProbaYes, société qui développe des
solutions prédictives et d’optimisation à travers l’analyse de données.
L’opération permet au groupe de se doter d’un centre de recherche en
intelligence
artificielle
pour
répondre
aux
besoins
internes
de
transformation
et
d’optimisation
mais
aussi
aux
besoins
de
personnalisation et de développement de nouveaux services pour ses
clients.
Juin
: Dans le cadre de la réforme du permis de conduire, prévue
par la loi du 6 août 2015, La Poste ouvre ses premiers centres d’examens.
Juillet
: Chronopost rachète Biologistic, société de transport sous
température dirigée de produits sensibles dans le secteur sanitaire,
pharmaceutique et environnemental.
Octobre
: La Poste prend une participation majoritaire dans Axeo
services, entreprise spécialisée dans les services à la personne.
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ANNEXES
179
Annexe n° 6 :
les comptes consolidés du groupe
La Poste et les comptes sociaux de La Poste SA
1. Les comptes consolidés
Le total de bilan du groupe La Poste a cru de manière régulière et
quasi constante de fin 2010 à fin 2015 en passant de 186 Md€ à fin 2010
à 233 Md€ à fin 2015 (+ 25 %). Cette croissance s’est concrétisée au
passif par un doublement des fonds propres, tandis que les passifs non
courants, représentatifs de l’endettement à moyen long terme du groupe,
ne progressaient que de 12 %. À l’actif, les actifs courants et non courants
ont crû au même rythme sur la période.
En valeur, la progression du total de bilan du groupe est à imputer
en quasi-totalité à celle des encours liés à l’activité bancaire et classés,
tant à l’actif qu’au passif, en « non courant »
190
.
190
Dans le secteur bancaire, les actifs et passifs « non courants » peuvent, en
dépit de leur intitulé, comprendre des titres en portefeuille détenus de
manière pérenne par l’établissement ou, au passif, des titres émis par lui et
portés par les marchés.
La Poste - décembre 2016
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COUR DES COMPTES
180
Bilan consolidé
simplifié du groupe La
Poste
en millions d'euros
2010
publié
2011
publié
2012
publié
2013
publié
01/01/
2013
Initial
publié
31/12/1
3 PF
Vs 2014
31/12/
2014
publié
2015
publié
I. Actif bilan consolidé - Groupe La Poste SA
1. Actif non courant
10 876
11 482
11 903
12 073
11 903
12 192
12 706
12 800
2. Actifs courants
bancaires
169 874
182 191
191 875
195 837
192 594
197 501
208 182
213 153
3. Autres actifs courants
5 440
6 245
6 660
6 648
5 941
5 849
5 448
7 050
4. Actifs destinés à être
cédés
61
155
104
120
104
120
29
17
Total de l'actif du bilan
consolidé (1+2+3+4)
186 250
200 072
210 544
214 677
210 544
215 661
226 364
233 019
II. Passif du bilan consolidé - Groupe La Poste SA
Capitaux propres part
du groupe
4 465
6 783
7 470
8 460
7 362
8 615
9 088
9 723
dont résultat de
l'exercice (part du
groupe)
550
478
479
627
479
624
513
636
intérêts minoritaires
18
3
65
57
65
235
270
292
1. Capitaux propres de
l'ensemble consolidé
4 483
6 786
7 535
8 516
7 427
8 850
9 358
10 015
2. Passif non courant
7 735
7 855
8 032
7 976
8 140
8 086
8 513
8 644
3. Provisions pour
risques et charges
courantes
889
1 095
1 390
1 666
1 390
2 340
2 813
3 129
4. Emprunts obligataires
et dettes financières à
court terme
1 262
1 349
1 567
1 060
1 567
1 023
885
1 345
5. Passifs courants
bancaires
166 990
178 130
186 883
190 133
186 882
190 163
199 546
204 283
6. Autres passifs
courants
4 891
4 835
5 136
5 327
5 136
5 200
5 250
5 603
7. Passifs destinés à être
cédés
0
22
0
0
0
0
0
0
Total passif courant
(3+4+5+6+7)
174 032
185 431
194 977
198 185
194 977
198 725
208 494
214 360
Total du bilan
(1+2+3+4+5+6+7)
186 250
200 072
210 544
214 677
210 544
215 661
226 364
233 019
Source : rapports annuels publiés du groupe « La Poste »
La Poste - décembre 2016
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ANNEXES
181
Le « haut de bilan » du groupe La Poste
Au passif, les capitaux propres « part du groupe » ont plus que
doublé en atteignant 9,7 Md€ à fin 2015 contre 4,5 Md€ à fin 2010,
principalement du fait de l’augmentation de capital de 2,7 Md€ souscrite
par l’État et la Caisse des dépôts et consignations.
Le passif non courant, composé principalement des emprunts
obligataires et des dettes financières ainsi que des « avantages au
personnel »
191
, n’a progressé que faiblement, passant de 7,7 Md€ fin 2010
à 8,6 Md€ fin 2015. L’endettement du groupe à moyen long terme,
constitué des seuls emprunts obligataires et dettes financières, a stagné : il
représente 6,0 Md€ fin 2015 contre 5,9 M€ fin 2010.
Ainsi, le groupe La Poste a mis à profit la période 2010-2015 pour
conforter sa structure financière.
191
Les « avantages au personnel » correspondent, pour l’essentiel de la ligne, à des
provisions pour départ en retraite des personnels fonctionnaires et contractuels
(cf.
infra
).
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COUR DES COMPTES
182
Haut de bilan consolidé
groupe La Poste en M€
31/12/2010
publié
31/12/2011
publié
31/12/2012
publié
31/12/13 PF
2014
31/12/2014
publié
31/12/2015
publié
1.
Actif non courant au 31/12
Ecarts d'acquisition
1 386
1 417
1 562
1 626
1 805
1 968
Immobilisations
incorporelles
729
787
825
807
850
860
Immobilisations
corporelles
6 126
6 096
6 062
5 931
5 880
5 780
Participations
dans
les
sociétés
mises
en
équivalence
2 060
2 048
2 446
2 741
3 075
3 141
Autres actifs financiers
non courants
500
930
894
938
831
707
Impôts différés d'actif
75
205
113
149
264
343
Total actif non courant
10 877
11 482
11 903
12 192
12 706
12 800
2.
Capitaux propres et passif non courant
2.1. Capitaux propres
Capital social
1 000
3 400
3 400
3 800
3 800
3 800
Prime d'émission
0
700
700
900
900
900
Apport initial et autres
fonds propres
Réserves
2 594
2 093
2 355
2 879
3 276
3 735
Résultat
latent
sur
instruments financiers
326
142
581
613
888
952
Écarts
actuariels
sur
avantages du personnel*
-80
-198
-179
Réserve de conversion
-5
-29
-45
-120
-92
-121
Résultat de l'exercice part
du groupe
550
478
479
624
513
636
Capitaux propres part du
groupe
4 465
6 783
7 470*
8 615
9 088
9 723
intérêts minoritaires
18
3
65
235
270
292
Capitaux
propres
de
l'ensemble consolidé
4 483
6 786
7 535*
8 850
9 358
10 015
2.2 Passif non courant
Emprunts obligataires et
dettes
financières
non
courants
5 870
5 941
6 085
6 048
6 120
5 968
Avantages du personnel -
dette non courante
1 650
1 716
1 713
1 685
1 912
2 093
La Poste - décembre 2016
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ANNEXES
183
Haut de bilan consolidé
groupe La Poste en M€
31/12/2010
publié
31/12/2011
publié
31/12/2012
publié
31/12/13 PF
2014
31/12/2014
publié
31/12/2015
publié
Provisions pour risques et
charges non courantes
137
94
90
114
172
290
Impôts différés passifs
79
103
142
238
309
293
Autres
dettes
non
courantes
Total passif non courant
7 735
7 855
8 032*
8 086
8 513
8 644
Total capitaux propres +
Passif non courant
12 218
14 641
15 667*
16 936
17 871
18 659
* après première mise en application de la norme IAS 19 révisée relative aux avantages des
personnels Incidence sur le bilan de clôture 2012 de -108 M€ sur les capitaux propres (7 362
M€ part du groupe retraités au lieu des 7 470 M€ initiaux). Incidence sur le bilan de clôture
2011 de + 46 M€ sur les capitaux propres 6 829 M€ part du groupe retraités au lieu des 6
783 M€ initiaux)
Source : rapports annuels publiés du groupe La poste
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184
COUR DES COMPTES
C
•
L’évolution de l’actif non courant
L’actif non courant regroupe les investissements résultant (i) des
besoins de renouvellement des infrastructures et des matériels et (ii) de la
croissance externe, identifiable dans les comptes consolidés au poste
« écarts d’acquisition »
192
. Il a crû de près de 19 % entre le 31 décembre
2010 et le 31 décembre 2015, en passant de 10,7 Md€ à 12,8 M€.
Actif non courant( immobilisé)
Groupe La Poste - M€
31/12/
2010
31/12/
2011
31/12/
2012
31/12
2013
31/12/
2014
31/12/
2015
Dont immobilisations incorporelles (brevets, logiciels, fonds de commerce, etc.)
Montant brut
1 811
2 113
2 435
2 364
2 590
2 852
Amortissements, dépréciations
-1 082
-1 326
-1 610
-1 547
-1 740
-1 992
Montant net
729
787
825
816
850
860
Dont immobilisations corporelles
Montant brut
10 507
10 915
11 176
11 453
11 842
12 068
Amortissements, dépréciations
-4 382
-4 819
-5 114
-5 512
-5 962
-6 288
Montant net
6 126
6 096
6 062
5 941
5 880
5 780
Dont écarts d'acquisition (goodwills)
Montant brut
1 444
1 534
1 698
1 722
1 948
2 113
Dépréciations
-58
-117
-136
-135
-143
-145
Montant net
1 386
1 417
1 562
1 587
1 805
1 968
1. Total immobilisations
incorporelles, corporelles et
goodwills en net
8 241
8 299
8 450
8 345
8 535
8 608
1bis. Total immobilisations
incorporelles, corporelles et
goodwills en brut
13 762
14 562
15 309
15 629
16 380
17 033
2. Titres mis en équivalence
2 060
2 048
2 446
2 634
3 075
3 141
3. Autres actifs non courants
576
1 135
1 007
1 094
1 096
1 050
Total actif non courant en net
d'amortissements, provisions et
dépréciations (1+2+3)
10 877
11 482
11 903
12 073
12 706
12 800
Source : rapports annuels publiés du groupe « La Poste »
192
Écart d’acquisition comptabilisé à l’actif du bilan lors de la première consolidation
de la filiale (uniquement en cas de consolidation globale ou proportionnelle) et égal,
schématiquement, à la différence (obligatoirement positive) entre le prix d’achat des
titres et les éléments d’actif et de passifs venant en remplacement de ce prix inscrit
dans les comptes sociaux de l’entité consolidante.
La Poste - décembre 2016
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ANNEXES
185
Le
stock
d’immobilisations
au
sens
strict
(corporelles,
incorporelles et écarts d’acquisition) a progressé en brut de 3,3 Md€ entre
le 1
er
janvier 2011 et le 31 décembre 2015, pour atteindre à cette date
17,0 Md€. Cet accroissement a été particulièrement sensible pour les
immobilisations incorporelles qui ont vu leur montant augmenter de plus
d’1 Md€ au cours de la période (2 852 M€ à fin 2015 pour 1 811 M€ à fin
2010). La hausse a été proportionnellement plus faible pour ce qui est des
immobilisations corporelles, dont le stock brut est passé de 10 507 M€ à
12 068 M€. La progression des écarts d’acquisition, qui sont passés de
1 444 M€ fin 2010 à 2 113 M€ fin 2015, a été plus faible que celle des
immobilisations incorporelles mais néanmoins substantielle.
Ces variations résultent d’acquisitions qui sont résumées par le
tableau suivant :
Total acquisitions (effectives)
groupe La Poste - M€
2011
2012
2013
2014
2015
Acquisitions immo incorporelles (hors
goodwills)
272
266
239
327
334
Acquisitions immo corporelles
914
820
769
706
679
Total
1 186
1 086
1 008
1 033
1 013
acquisition goodwill
110
167
53
174
168
Total acquisition
1 296
1 253
1 061
1 207
1 181
Source : rapports annuels publiés du groupe La Poste
Les comptes d’immobilisations du bilan du groupe La Poste ont
ainsi été impactés de 6,0 Md€ d’acquisitions sur la période 2011-2015,
mais uniquement de 3,3 Md€ après prise en compte des sorties
193
, comme
le montre le tableau ci-dessus. En dynamique, les montants consacrés aux
investissements (ligne « total acquisition ») sont relativement stables sur
la période et compris entre 1,1 et 1,3 Md€ par an.
La comparaison avec les autres grandes postes européennes montre
que ces dernières ont eu tendance à accroître leurs investissements, en
particulier à partir de 2013, profitant du niveau historiquement bas des
taux d’intérêt.
193
Mises au rebut, cessions, destructions, pertes, etc.
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COUR DES COMPTES
186
Tableau n° 12 :
Évolution du ratio Investissement/Chiffre d’affaires
(en %)
2010
2
2011
2012
2013
2
2014
2015
La Poste
55,11
66,28
55,47
55,37
55,70
55,15
Deutsche Post DHL
22,46
33,25
33,06
33,21
33,31
33,42
TNT
22,42
22,61
11,98
11,93
22,84
44,47
Royal Mail GLS
44,09
66,59
66,60
77,17
66,52
77,05
Source : rapports annuels
Au sein de l’actif non courant, c’est la ligne des titres mis en
équivalence qui a connu la croissance la plus forte entre le 31 décembre
2010 et le 31 décembre 2015, comme le montre le tableau ci-dessous.
Évolution du
poste "titres mis
en équivalence"
Consolidation La
Poste - M€
2010
2011
2012
2013
2013
PF
2014
2015
CNP Assurance
1 954
1 945
2 327*
2 522*
2 522
2 830**
2 911
X-Ange
20
17
14
8
OPCI Akatera
17
18
33
31
32
30
28
Yurtici Cargo
43
38
41
33
33
32
28
Asendia
(contrôle
conjoint)
48
51
53
Autres
24
29
32
40
106
133
121
Total
2 060
2 048
2 446
2 634
2 741
3 075
3 141
Source : rapports annuels publiés du groupe La Poste
*S'agissant de CNP Assurances, choix du groupe de recevoir les dividendes 2012 et
2013 en actions
**variation principalement imputable à la variation positive sur IF et titres AFS
juste valeur de la participation CNP Assurances par rapport au cours de bourse:
A fin 2011: 1 122 M€ pour 19,72 % du capital pour une MEE de 1 945 M€
Afin 2012: 1 492 M€ pour 19,98 % du capital pour une MEE de 2 327 M€
à fin 2013: 2 060 M€ pour 20,15 % du capital pour une MEE de 2 522 M€
à fin 2014: 2 037 M€ pour 20,15 % du capital pour une MEE de 2 830 M€
à fin 2015: 1 721 M€ pour 20,125 % du capital pour une MEE de 2 911 M€
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ANNEXES
187
L’augmentation très sensible de la valeur comptable des titres mis
en équivalence s’explique par :
‐
le durcissement des normes IFRS en matière d’appréciation des
critères de contrôle conjoint et de coentreprises à compter de
2014 : cela explique le passage en consolidation par mise en
équivalence d’Asendia, co-entreprise avec la poste suisse
consolidée jusqu’alors par intégration proportionnelle ;
‐
et, surtout, l’augmentation de la valeur de la participation CNP
(+957 M€ pour une augmentation totale du poste de « titres mis
en équivalence » de 1081 M€). Il convient à cet égard de relever
que la valeur inscrite dans les comptes consolidés reste
structurellement
supérieure
à
la
valeur
boursière
de
la
participation et que cet écart a augmenté tout au long de la
période pour s’élever fin 2015 à 1 190 M€, ce qui représente
41 % de la ligne
194
.
•
Les comptes de passifs non courants
L’augmentation du passif non courant, qui est passé de 7,7 Md€ à
8,6 M€ entre 2010 et 2015, est principalement imputable à l’évolution des
provisions non courantes, relatives notamment aux avantages au
personnel.
194
La valeur des titres mis en équivalence à l’actif du bilan consolidé est en effet
calée sur la valeur des capitaux propres publiés, et non sur la valeur boursière de la
participation.
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COUR DES COMPTES
188
2. Capitaux
propres et
passif non
courant en M€
31/12/2010
publié
31/12/2011
publié
31/12/2012
publié
31/12/13
PF
2014
31/12/2014
publié
31/12/2015
publié
2.1. Capitaux propres
Capital social
1 000
3 400
3 400
3 800
3 800
3 800
Prime
d'émission
0
700
700
900
900
900
Apport
initial
et autres fonds
propres
Réserves
2 594
2 093
2 355
2 879
3 276
3 735
Résultat latent
sur instruments
financiers
326
142
581
613
888
952
Écarts
actuariels
sur
avantages
du
personnel*
-80
-198
-179
Réserve
de
conversion
-5
-29
-45
-120
-92
-121
Résultat
de
l'exercice part
du groupe
550
478
479
624
513
636
Capitaux
propres
part
du groupe
4 465
6 783
7 470
8 615
9 088
9 723
intérêts
minoritaires
18
3
65
235
270
292
Capitaux
propres
de
l'ensemble
consolidé
4 483
6 786
7 535
8 850
9 358
10 015
2.2 Passif non courant
Emprunts
obligataires et
dettes
financières non
courants
5 870
5 941
6 085
6 048
6 120
5 968
Avantages
du
personnel
-
dette
non
courante
1 650
1 716
1 713
1 685
1 912
2 093
Provisions
pour risques et
charges
non
courantes
137
94
90
114
172
290
Impôts différés
passifs
79
103
142
238
309
293
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ANNEXES
189
2. Capitaux
propres et
passif non
courant en M€
31/12/2010
publié
31/12/2011
publié
31/12/2012
publié
31/12/13
PF
2014
31/12/2014
publié
31/12/2015
publié
Autres
dettes
non courantes
Total
passif
non courant
7 735
7 855
8 032
8 086
8 513
8 644
Total capitaux
propres
+
Passif
non
courant
12 218
14 641
15 667
16 936
17 871
18 659
Source : rapports annuels publiés du groupe La Poste
Les avantages au personnel du groupe se subdivisent en trois
catégories :
‐
les avantages postérieurs à l’emploi, dont principalement : ceux
accordés aux agents fonctionnaires de l’État hors retraite
195
(511 M€ à fin 2015) ; ceux accordés au personnel contractuels du
groupe au titre des indemnités de départ à la retraite (298 M€ à
fin 2015) ; ceux relatifs au régime de retraite du personnel des
filiales étrangères (68 M€ à fin 2015, concernant principalement
Geopost) ;
‐
les dispositifs d’aménagement de fin de carrière qui bénéficient
principalement aux agents fonctionnaires de La Poste. Ces
dispositifs de cessation progressive d’activité sont accessibles
aux personnes ayant atteint un âge variant entre 53 et 59 ans. À
fin 2015, le total des provisions s’y rapportant s’élevait à
1 020 M€ ;
‐
les « autres » avantages du personnel, dont les comptes épargne
temps, les congés bonifiés et les congés longue maladie / longue
durée (196 M€ à fin 2015).
En revanche, la dette financière du groupe n’a cru que de 98 M€,
l’augmentation de capital ayant permis de limiter strictement le recours à
l’endettement.
195
Hors versement des retraites aux fonctionnaires, l’article 150 de la loi de
finance rectificative pour 2006 disposant que l’obligation de La Poste au titre
des retraites des fonctionnaires qui lui sont rattachés se limitent désormais au
paiement d’une contribution employeur à caractère libératoire.
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COUR DES COMPTES
190
1.1.
L’actif et le passif courants
•
Les provisions courantes
Cette rubrique se subdivise en deux composantes :
‐
les provisions techniques des activités bancaires et d’assurance
‐
les autres provisions pour risques et charges
Les provisions
courantes en M€
2010
2011
2012
2013
2013
PF
2014
2014
2015
I. Provisions
spécifiques aux
activités bancaires et
d'assurance
662
724
1 005
1 126
1 802
2 228
2 513
Provision pour risque
épargne logement
211
194
331
309
309
440
504
Provisions techniques
d'assurance
451
530
674
817
1 494
1 787
2 009
2. Les autres
provisions pour
risques et charges
227
371
385
540
538
585
616
Litiges sociaux
40
52
49
53
53
43
40
Autres litiges
40
54
51
73
73
86
10
Autres
146
264
285
413
413
446
447
Total (1+2)
889
1 095
1 390
1 666
2 340
2 813
3 129
Source : rapports annuels publiés du groupe La Poste
L’augmentation très sensible de la provision épargne logement sur
la période 2010-2015 (+138 %) est moins à imputer à la progression des
dépôts qu’au risque de devoir accorder des prêts à taux préférentiel et de
rémunérer les encours dans le futur à un taux certes révisable pour les
générations postérieures au 28 février 2011, mais intangible pour les
contrats ouverts avant cette date.
La progression des provisions techniques d’assurances traduit le
développement de l’activité du groupe dans ce secteur. Cette hausse a été
accentuée fin 2013 de près de 700 M€ par l’entrée en vigueur de la norme
IFRS 10 et la consolidation par intégration globale de la filiale LBP
Prévoyance, auparavant consolidée par mise en équivalence. CNP
Assurances étant quant à elle consolidée par mise en équivalence, ses
propres provisions n’influent pas sur cette ligne dans les comptes
consolidés de La Poste.
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ANNEXES
191
S’agissant des autres provisions courantes, inhérentes à l’activité et
à la taille du groupe, elles incluaient à fin 2015, pour 144 M€, le montant
de l’amende infligée par l’Autorité de la concurrence à Chronopost et à
DPD France pour des pratiques d’entente antérieures à 2010 entre les
principaux acteurs du marché du colis express en France.
•
Les actifs et passifs « courants » liés à l’activité bancaire
Le montant total des actifs courants bancaires est sensiblement
égal au total du bilan consolidé de la Banque Postale.
Avec un total de bilan de 218 Md€ à fin 2015
196
, LBP se situe dans
le « bas du peloton » des grandes banques de détail françaises. À titre de
comparaison, le total de bilan consolidé du groupe BPCE dépassait les
1 166 Md€ à fin 2015, soit près de 5,5 fois celui de LBP.
196
213 Md€ repris dans la consolidation auxquels il faut ajouter les immobilisations
propres à La Banque Postale et les participations mises en équivalence dont celle de la
CNP
.
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COUR DES COMPTES
192
Les
actifs
et
passifs
"courants"
liés
à
l'activité bancaire en M€
2010
2011
2012
2013
2013
PF 2014
2014
2015
1.
Les
actifs
courants
bancaires
169 874
182 191
191 875
195 837
197 501
208 182
213 153
Prêts et créances sur la
clientèle
39 194
45 028
49 922
59 204
59 204
67 857
73 628
Créances
sur
les
établissements de crédit
73 494
74 882
81 254
82 894
82 894
83 315
83 102
Portefeuilles de titres
51 871
56 037
54 281
49 784
50 566
52 541
51 542
Autres
actifs
financiers
courants
1 073
1 560
1 305
1 200
1 435
1 521
1 486
Comptes de régularisation
2 092
2 040
2 387
1 185
1 220
998
1 583
Caisse, banque centrale
2 150
2 644
2 726
1 570
2 182
1 950
1 812
2. Les passifs courants
bancaires
166 990
178 130
186 883
190 133
190 163
199 546
204 283
Dettes financières (dettes
envers les établissements
de crédit)
12 245
17 463
21 584
14 757
14 757
15 157
15 741
Dettes envers la clientèle
(non bancaire)
151 043
156 236
160 393
166 583
166 583
167 251
171 384
Autres passifs financiers
(dettes représentées par
un titre et autres passifs)
934
1 165
1 413
6 790
6 801
15 143
14 717
Comptes de régularisation
2 768
3 266
3 493
2 003
2 022
1 995
2 441
Source : rapports annuels publiés du groupe La Poste
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COUR DES COMPTES
193
Représentatifs du fonds de commerce d’une banque de détail, les
comptes de dépôts de la clientèle ont évolué comme suit au cours de la
période 2010-2015 :
Dettes envers la
clientèle - M€
2010
2011
2012
2013
2014
2015
Comptes d'épargne à
régime spécial
101 862
105 925
111 414
113 866
112 974
112 408
dont Livret A
54 692
56 990
61 756
64 314
62 696
60 177
dont PEL
19 254
19 752
20 185
21 287
23 055
25 744
dont CEL
6 467
6 498
6 282
5 699
5 157
4 821
dont LEP
10 468
9 785
9 375
8 691
8 095
7 396
%
67 %
68 %
70 %
68 %
68 %
66 %
Dettes envers la
clientèle à vue
46 321
47 458
45 639
47 901
50 604
54 746
%
31 %
30 %
28 %
29 %
30 %
32 %
Dettes envers la
clientèle à terme
2 860
2 853
3 341
4 815
3 672
4 231
%
2 %
2 %
2 %
3 %
2 %
2 %
Total
151 043
156 236
160 393
166 583
167 251
171 384
%
100 %
100 %
100 %
100 %
100 %
100 %
Total du bilan consolidé
de La Banque Postale
173 016
185 715
195 786
200 232
212 839
218 708
% Dettes envers la
clientèle/ total de bilan
de la banque
87 %
84 %
82 %
83 %
79 %
78 %
Source : rapports annuels publiés du groupe La Poste
Les dettes envers la clientèle, c’est-à-dire les dépôts à vue ou à
terme, représentent la majeure partie du passif exigible de la banque,
même si la tendance s’infléchit légèrement sur la période. Ce point
constitue la caractéristique principale du bilan de la banque et la cause
première de sa surliquidité.
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COUR DES COMPTES
194
À partir de 2012, il a été procédé à des émissions de titres (dette
subordonnée et émissions obligataires) pour conforter les ratios
prudentiels de LBP, qui sont venues alourdir le poste des passifs courants.
Leur montant a ainsi été multiplié par deux entre 2010 et 2015, passant de
5,8 à 11,4 Md€.
Évolution des dettes
représentées par un titre
et autres passifs en M€
2010
2011
2012
2013PF
2014
2014
2015
Dettes représentées par un
titre
5 759
6 220
5 387
5 129
11 048
11 443
Dettes subordonnées
1 236
796
850
829
1 658
2 389
Emprunts obligataires
273
1 536
3 620
4 220
Certificats de dépôts
4 523
5 464
4 264
2 763
5 770
4 834
Dépôts de garantie reçues
315
338
386
478
1 591
1 020
Passifs financiers à la juste
valeur par résultat
113
250
111
118
332
326
Instruments dérivés de
couverture
182
234
563
372
432
326
Autres passifs financiers
640
681
739
705
1 739
1 602
Total
7 009
7 763
7 185
6 801
15 143
14 717
Source : comptes annuels publiés La Poste SA
À l’actif, la période 2010/2015 se caractérise par une croissance
notable des prêts et créances sur la clientèle (+87 %) et une quasi-
stagnation des encours de prêts et de créances sur les banques et
établissements de crédit ainsi que des portefeuilles de titres.
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ANNEXES
195
Prêts et créances sur la
clientèle
de
l'activité
bancaire - M€
2010
2011
2012
2013
2014
2015
1. Prêts et créances sur la
clientèle à vue
Montant brut
348
492
771
901
984
1 078
Provisions
-57
-76
-138
-138
-146
-157
Montant net
291
416
633
763
838
921
2. Prêts et créances sur la
clientèle à terme
Montant brut
38 898
44 680
48 669
57 111
64 933
69 948
Provisions
-71
-81
-78
-172
-234
-283
Montant net
38 827
44 599
48 591
56 939
64 699
69 665
dont crédit de trésorerie
1 392
2 492
2 625
3 271
4 043
4 553
dont crédit à l'habitat
37 356
41 840
44 993
49 646
53 631
54 214
Dont crédit aux personnes
morales
140
666
3 373
5 511
8 055
3. Titres assimilés aux prêts et
créances avec la clientèle
76
11
526
942
1 369
1 476
4. Opérations de location-
financement
1
172
561
951
1 567
Total (1+2+3+4)
39 194
45 028
49 922
59 204
67 857
73 628
Source : comptes annuels publiés La Poste SA
Les prêts et créances sur la clientèle à vue sont principalement
constitués des comptes ordinaires débiteurs de la clientèle (découverts).
Ces découverts n’ont cessé de croître sur la période pour atteindre plus
d’un milliard d’euros fin 2015.
Les crédits de trésorerie incluent principalement les crédits à la
consommation liés au développement de l’activité de La Banque Postale
Financement (4 238 M€ d’encours hors intérêts courus non échus à fin
2015 contre 759 M€ à fin 2010) ainsi que les différés de carte bleue.
Ainsi qu’il ressort du tableau, l’augmentation très sensible des
encours est principalement imputable aux crédits à l’habitat et dans une
moindre mesure aux crédits aux personnes morales (collectivités), activité
démarrée en 2012 et qui a connu une croissance exponentielle. Même si
elles ont quadruplé en quatre ans, les provisions restent d’un montant
faible en regard des encours.
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COUR DES COMPTES
196
Les créances sur les établissements de crédit
Créances sur les
établissements de crédit -
M€
2010
2011
2012
2013
2014
2015
Comptes et prêts sur
établissements de crédit à vue
264
92
252
148
200
3 823
Comptes et prêts sur
établissements de crédit à
terme
72 426
72 610
77 798
80 404
81 174
78 033
Dont fonds centralisés à la
CDC
68 847
74 747
76 568
78 063
75 294
Titres assimilés aux prêts et
créances sur Ets de crédit
804
2 181
3 204
2 342
1 941
1 246
Total
73 494
74 882
81 254
82 894
83 315
83 102
Source : comptes annuels publiés La Poste SA
La croissance de la rubrique constatée sur la période 2010/2015 est
en quasi-totalité imputable à la ligne « comptes et prêts sur les
établissements de crédit à terme » qui enregistre en fait les fonds du livret
A, du livret de développement durable et du livret d’épargne populaire
centralisés à la Caisse des dépôts et consignations (75 294 M€ à fin 2015,
pour 78 063 M€ à fin 2014 et 76 568 à fin 2013).
S’agissant des concours accordés au secteur bancaire, les montants
figurant aux bilans de clôture ne traduisent pas systématiquement le
niveau de l’activité de LBP qui a joué, en particulier pendant la crise
financière de 2008, un rôle important de prêteur aux autres établissements
de crédit.
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ANNEXES
197
Les portefeuilles de titres de l’activité bancaire
Portefeuille de titres de
l'activité bancaire - M€
2010
2011
2012
2013
2014
2015
Actifs
financiers
détenus
jusqu'à l'échéance
37 413
35 377
37 036
32 266
28 297
24 158
% par rapport au total du
portefeuille
72 %
63 %
68 %
65 %
54 %
47 %
Actifs financiers disponibles
à la vente
9 821
9 338
9 892
11 898
12 984
15 379
% par rapport au total du
portefeuille
18 %
17 %
18 %
24 %
25 %
30 %
Actifs financiers à la juste
valeur par résultat
4 507
11 177
7 061
5 489
11 029
11 827
% par rapport au total du
portefeuille
9 %
20 %
13 %
11 %
21 %
22 %
dont
Actifs
financiers
détenus
à
des
fins
de
transaction
4 153
10 866
6 791
5 239
9 377
10 480
dont dérivés / juste valeur
positive
354
311
270
250
1 652
1 347
Ecart de réévaluation sur
portefeuilles
couverts
(couverture de juste valeur)
130
145
293
130
231
178
Total
51 871
56 037
54 281
49 784
52 541
51 542
%
100 %
100 %
100 %
100 %
100 %
100 %
Source : comptes annuels publiés La Poste SA
Complément de l’activité de prêteur au système bancaire,
l’activité titres de LBP s’est développée autour d’un portefeuille de titres
d’investissement
principalement
obligataires.
Si,
à
fin
2015,
le
portefeuille de titres d’investissement (ou titres « détenus jusqu’à
l’échéance ») représente encore 47 % des encours de titres avec un
montant de 24,2 Md€, il a néanmoins régressé de 13,2 Md€ par rapport à
fin 2010, au profit des titres de placement (ou disponibles à la vente) et de
transaction (titres à la juste valeur par résultat).
2. Les comptes sociaux de La Poste SA
La Poste SA est à la fois une entreprise industrielle et
commerciale de plein exercice et une holding ; de surcroît, elle agit, avec
le réseau des bureaux de poste, en prestataire de services pour le compte
de sa principale filiale qu’est La Banque Postale.
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COUR DES COMPTES
198
2.1.
.Le bilan
Entre le 31 décembre 2010 et le 31 décembre 2011, le total de
bilan de La Poste SA a cru de 3 270 M€. Cette augmentation sensible est
à imputer principalement à la croissance, au passif, des capitaux propres
(+2 945 M€) et à celle, à l’actif, des immobilisations financières
(+2 678 M€). Simultanément, les dettes financières se stabilisaient tandis
qu’à l’actif, on assistait à une baisse « en net » (après amortissement) des
postes d’immobilisations incorporelles et corporelles (- 444 M€).
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ANNEXES
199
Bilan social de La Poste SA en M€
2010
2011
2012
2013
2014
2015
Actif au 31/12 en M€
I. Actif immobilisé au 31/12
(Capital souscrit non appelé)
1 050
Immobilisations incorporelles en net
308
302
277
244
257
271
Immobilisations corporelles en net
1 349
1 291
1 219
1 128
1 030
942
Immobilisations financières en net
8 602
9 512
9 566
10 424
11 218
11 280
Total de l'actif immobilisé en net (I)
10 259
12 155
11 062
11 796
12 505
12 943
Valeur brute
13 504
15 648
14 548
15 210
16 096
16 127
amortissements, provisions
-3 245
-3 493
-3 486
-3 414
-3 591
-3 635
II. Actif circulant (en net)
4 949
4 901
6 373
5 911
5 002
5 985
Stocks et encours
139
133
127
114
98
88
Créances d'exploitation
2 034
1 766
1 684
2 049
2 338
2 561
Débiteurs divers
89
15
13
9
64
92
Comptes de régularisation
182
185
185
181
76
58
Valeurs mobilières de placement et
disponibilités
2 505
2 803
4 364
3 558
2 425
3 186
Total de l'actif en net (I+II)
15 208
17 056
17 435
17 707
17 507
18 478
Passif au 31/12 en M€
1. Capitaux propres
2 881
5 024
4 946
5 458
5 650
5 826
2. Provisions réglementées
92
97
106
111
112
102
3. Provisions pour risques et charges
1 485
1 662
1 673
1 703
1 727
1 958
4. Dettes financières
6 858
6 898
7 063
6 614
6 563
6 983
5. Dettes d'exploitation
3 241
2 719
2 818
2 817
2 672
2 891
6. Créditeurs divers
362
394
588
727
519
509
7. Comptes de régularisation
289
262
241
277
264
209
Total des dettes (hors provisions)
(4+ 5+6+7)
10 750
10 273
10 710
10 435
10 018
10 592
Total du passif (1+2+3+4+5+6+7)
15 208
17 056
17 435
17 707
17 507
18 478
Source : comptes annuels publiés La Poste SA
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ANNEXES
200
Cette
situation
particulière
trouve
son
explication
dans
l’augmentation de capital de La Poste SA pour un total de 2,7 Md€, qui
lui a permis, à son tour, de conforter les fonds propres de sa filiale La
Banque Postale sans avoir besoin de recourir à l’emprunt.
Filiales et
participations
au 31/12
2010
2011
2012
Valeur
Valeur
Avances
Valeur
Valeur
Avances
Valeur
Valeur
Avances
en M€
brute
nette
prêts
brute
nette
prêts
brute
nette
prêts
Geopost
1 240
1 240
714
1 240
1 240
725
1 240
1 240
716
Sofipost
258
211
151
258
211
162
258
258
245
La
Banque
Postale
2 331
2 331
3 191
3 191
3 191
3 191
Poste Immo
2 071
2 071
1 446
2 071
2 071
1 446
1 721
1 721
1 654
Autres filiales et
participations
11
8
399
23
22
371
23
22
412
Total
5 912
5 861
2 710
6 784
6 736
2 705
6 434
6 433
3 027
Filiales
et
participations
au 31/12
2013
2014
2015
Valeur
Valeur
Avances
Valeur
Valeur
Avances
Valeur
Valeur
Avances
en M€
brute
nette
prêts
brute
nette
prêts
brute
nette
prêts
Geopost
1 240
1 240
705
1 240
1 240
893
1 240
1 240
1 100
Sofipost
263
263
250
263
263
244
263
263
285
La
Banque
Postale
3 419
3 419
803
4 052
4 052
803
4 052
4 052
803
Poste Immo
1 493
1 493
1 654
1 493
1 493
1 654
1 493
1 493
1 475
Autres filiales et
participations
24
23
488
24
23
481
32
31
480
Total
6 439
6 438
3 900
7 072
7 071
4 075
7 080
7 079
4 143
Source : comptes annuels publiés La Poste SA
La Poste - décembre 2016
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201
COUR DES COMPTES
Parallèlement, La Poste SA a dû continuer à provisionner des
risques, liés à son personnel ou à des litiges. Au cours de la période, le
poste des provisions pour risques et charges a évolué comme suit :
Stocks de provisions pour
risques et charges - en M€
2009
2010
2011
2012
2013
2014
2015
Dispositifs d'aménagement de
fin de carrière
443
815
958
878
939
860
985
IDR des contractuels
76
91
102
165
171
241
230
Congés de longues maladie et
de longue durée / autres
congés
333
338
340
353
348
365
364
Risques juridiques
72
82
69
52
39
37
62
Remise en état
30
31
31
33
30
33
25
Litiges sociaux
45
40
52
55
75
91
177
Sinistres et litiges
12
11
11
12
11
19
19
Autres provisions pour
risques et charges
86
77
99
125
90
82
97
Total
1 097
1 485
1 662
1 673
1 703
1 727
1 958
Solde net des dotations
exercice N/ exercice N-1
388
177
11
30
24
231
Source : comptes annuels publiés La Poste SA
D’une manière synthétique, l’évolution du bilan de La Poste SA a
été plus déterminée par l’augmentation de capital dont elle a bénéficié
que par les résultats réalisés et l’activité.
La Poste - décembre 2016
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COUR DES COMPTES
202
Évolution des
capitaux propres
La Poste SA en M€
Apports
Autres
fonds
propres
Capital
social
Primes
liées
au
capital
Réserves
Report
à nouveau
Résultat
de
l'exercice
Total
Capitaux
Situation au 31
décembre 2009
2 258
209
606
30
3 103
Création d'un
capital social
(création de la SA)
-2 258
-209
1 000
1 467
Affectation du
résultat
2
-2
Distribution du
dividende
-76
-28
-104
Résultat de la
Période
-117
-117
Situation au 31
décembre 2010
1 000
1 469
529
-117
2 881
Augmentation de
capital par
incorporation de
réserves
1 000
-1 000
Augmentation de
capital par émission
d'ABSA
1 400
700
2 100
Affectation du
résultat
-117
117
Distribution de
dividendes
-136
-136
Résultat de la
période
179
179
Situation au 31
décembre 2011
3 400
700
469
276
179
5 024
Affectation du
résultat
9
26
-35
Distribution de
dividendes
-144
-144
Résultat de la
période
66
66
Situation au 31
décembre 2012
3 400
700
478
302
66
4 946
Augmentation de
capital
400
200
600
Affectation du
résultat
3
-3
La Poste - décembre 2016
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ANNEXES
203
Évolution des
capitaux propres
La Poste SA en M€
Apports
Autres
fonds
propres
Capital
social
Primes
liées
au
capital
Réserves
Report
à nouveau
Résultat
de
l'exercice
Total
Capitaux
Distribution de
dividendes
-171
Résultat de la
période
84
84
Situation au 31
décembre 2013
3 800
900
481
193
84
5 458
Affectation du
résultat
4
-4
Distribution de
dividendes
-91
-80
-171
Résultat de la
période
363
363
Situation au 31
décembre 2014
3 800
900
485
102
363
5 650
Affectation du
résultat
18
174
-192
Distribution de
dividendes
-171
-171
Résultat de la
période
347
347
Situation au 31
décembre 2015
3800
900
503
276
347
5 826
Source : comptes annuels publiés La Poste SA
La Poste - décembre 2016
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204
COUR DES COMPTES
2.2.
Le compte de résultat
Comptes sociaux de la La
Poste SA - Compte de
résultat en M€
2010
2011
2012
2013
2014
2015
1. Chiffre d'affaires
12 713
12 696
12 373
12 089
11 976
12 031
Chiffre d'affaires Courrier
(Courrier/colis à compter
de 2014)
10 062
9 982
9 736
9 351
10 835
10 906
Chiffre d'affaires Colis
1 422
1 501
1 531
1 578
Numérique
3
5
Chiffre d'affaires Enseigne
La Poste (Réseau compter
de 2014)
1 199
1 185
1 080
1 138
1 117
1 101
Chiffre d'affaires
immobilier
30
28
26
22
21
19
2. Autres produits
d'exploitation
2 523
2 532
2 607
2 536
2 439
2 436
I. Total des Produits
d'exploitation (1+2)
15 236
15 228
14 980
14 625
14 415
14 467
3. Charges d'exploitation
15 707
15 433
15 349
15 174
14 810
14 735
Achats
468
492
495
492
435
415
Autres charges externes
3 624
3 773
3 757
3 805
3 785
3 901
Impôts, taxes et versements
assimilés
871
841
837
828
791
781
Charges de personnel
9 957
9 773
9 878
9 600
9 400
9 083
Dotations aux
amortissements et
provisions
787
554
382
449
399
555
II. Résultat d'exploitation
(1+2-3)
-471
-205
-369
-549
-395
-268
4. Résultat financier
277
289
286
340
513
431
III. Résultat courant ( 1+2-
3+4)
-194
84
-83
-209
118
163
5. Résultat exceptionnel
0
-1
-26
-21
-20
-1
IV. Résultat avant impôt
(1+2-3+4)
-194
83
-109
-230
98
162
6. impôt sur les bénéfices
76
96
175
314
265
185
V. Résultat net (1+2-3+4-
5)
-117
179
66
84
363
347
Source : comptes annuels publiés La Poste SA
La Poste - décembre 2016
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ANNEXES
205
•
Les produits d’exploitation
Les produits d’exploitation ont été en décroissance régulière sur
la période 2010-2015, qu’il s’agisse du chiffre d’affaires
stricto sensu
ou
des « autres produits d’exploitation ».
Le chiffre d’affaires Réseau inclut les prestations rendues à la
Banque Postale par les bureaux de poste, qui se sont élevées à 1 033 M€
en 2015. S’y ajoutent les lignes « coûts de personnel des services
financiers » et « coûts de la ligne de conseil bancaire du réseau La Poste »
qui figurent dans les « autres produits d’exploitation ». Au total, en 2015,
ce sont donc 3 079 M€ qui ont été facturés par La Poste SA à la Banque
Postale au titre de ses prestations diverses.
Les «autres produits d’exploitation » retracent également la
compensation versée par l’État au titre de la mission de transport postal
de presse (« Contribution presse ») qui, entre 2012 et 2015, a presque été
divisée par deux.
La Poste - décembre 2016
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COUR DES COMPTES
206
Décomposition des produits
d'exploitation La Poste SA -
en M€
2010
2011
2012
2013
2014
2015
I . Chiffre d'affaires total
12 713
12 696
12 373
12 089
11 976
12 031
1. Chiffre d'affaires Courrier
(Services-Courrier >2014)
10 062
9 982
9 736
9 351
9 253
9 286
Correspondance
7 035
6 792
6 557
6 322
6 213
6 253
Publicité
1 500
1 614
1 538
1 431
1 317
1 233
Presse
461
474
439
432
429
430
International
555
545
561
534
555
575
Autres produits
511
557
641
738
739
795
2. Chiffre d'affaires Colis
1 422
1 501
1 531
1 578
1 582
1 620
BtoC (Business to Consumer)
956
1 038
1 055
1 092
1 095
1 188
CtoC (Consumer to consumer)
445
436
449
449
441
448
Autres
21
27
37
37
46
54
3. Chiffre d 'affaires Réseau
1 199
1 185
1 080
1 138
1 117
1 101
4.
Chiffre
d'affaires
Numérique
3
5
5.
Chiffre
d'affaires
Immobilier
30
28
26
22
21
19
II.
Autres
produits
d'exploitation
2 523
2 532
2 607
2 536
2 439
2 436
Contribution presse
242
242
262
248
152
133
Prestations de services au titre
de l'activité bancaire
2 031
2 074
2 082
2 042
2 042
2 046
dont coûts des personnels des
services financiers
1 012
1 004
1 007
1 004
946
884
dont coûts de la "ligne de
conseil bancaire de l'Enseigne"
1 019
1 069
1 075
1 038
1 096
1 162
Production immobilisée
66
57
63
61
68
62
Prestations réalisées avec les
filiales
67
62
69
71
70
70
Autres produits d'exploitation
117
97
131
114
107
129
Total
des
produits
d'exploitation de La Poste SA
(I+II)
15 236
15 228
14 980
14 625
14 415
14 467
Source : comptes annuels publiés La Poste SA
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207
COUR DES COMPTES
•
Les charges d’exploitation
Les charges d'exploitation
de La Poste SA en M€
2010
2011
2012
2013
2014
2015
Achats
468
492
495
492
435
415
Autres charges externes
3 624
3 773
3 757
3 805
3 785
3 901
Impôts, taxes et versements
assimilés
871
841
837
828
791
781
Charges de personnel
9 957
9 773
9 878
9 600
9 400
9 083
Dotations aux amortissements
et provisions
787
554
382
449
399
555
Total
15 707
15 433
15 349
15 174
14 810
14 735
Source : comptes annuels publiés La Poste SA
Excepté en ce qui concerne les autres charges externes, les charges
d’exploitation ont régressé dans l’ensemble des compartiments de la
rubrique, et notamment celui des frais de personnel (-874 M€).
La baisse des frais de personnel est toutefois à relativiser en raison
de deux éléments :
‐
le recours accru à la sous-traitance comptabilisée en « autres
charges externes » à la rubrique « Services extérieurs » ;
‐
l’effet CICE qui vient en diminution de la masse salariale (à
hauteur de 321 M€ en 2015, 320 M€ en 2014 et 269 M€ en
2013).
•
Le résultat
Le résultat d’exploitation (REX) ressort structurellement négatif
sur la période 2010-2015.
Le résultat financier est positif sur la période ; il provient en quasi-
totalité des dividendes « remontés » de La Banque Postale et de
Chronopost.
Le résultat après impôt (sur les sociétés) est supérieur au résultat
avant impôt qui ressort même déficitaire en 2010, 2012 et 2013. Cette
situation résulte du régime d’intégration fiscale prévu à l’article 223 A du
code général des impôts. La Poste, qui est à la tête du groupe fiscal
qu’elle a constitué avec les filiales de son choix, règle l’impôt dû par le
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COUR DES COMPTES
208
groupe calculé sur une base fiscalement « consolidée » française. Les
filiales bénéficiaires lui règlent à cet égard leur impôt « comme si elles
étaient imposées séparément », tandis que La Poste SA et d’autres filiales
peuvent être déficitaires. Le groupe réalise ainsi un gain net d’intégration
fiscale comptabilisé à cette ligne et égal à la différence entre l’impôt
effectivement versé au Trésor et la contribution perçue des filiales.
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ANNEXES
209
Annexe n° 7 :
présentation de la situation, de la
stratégie financière et de la diversification de
Deutsche Post, Royal Mail et Poste Italiane
Le contexte postal européen est marqué par une attrition rapide
des volumes de courrier, affectant le coeur de métier traditionnel des
opérateurs postaux, qui y ont tous répondu par des augmentations
tarifaires, particulièrement marquées au Royaume-Uni.
Évolution des volumes courrier et évolution des tarifs
du timbre entre 2010 et 2014
En %
Évolution volume courrier
Évolution tarifs du timbre
Deutsche Post
-1,8
2,2
Royal Mail
-4,9
10,9
Poste Italiane
-7,4
3,9
La Poste
-5,4
3,3
Source : Benchmark des opérateurs postaux européens, Groupe La Poste, 2015
Au-delà de l’augmentation des tarifs, les grands opérateurs
postaux européens, Deutsche Post, Royal Mail et Poste Italiane ont choisi
des stratégies différenciées pour réagir à la chute des volumes de courrier.
Quand Royal Mail demeure un opérateur dont l’activité principale, voire
exclusive, est l’activité courrier-colis, les activités non postales
constituent désormais plus de 85 % du chiffre d’affaires de Poste Italiane,
qui est plus un groupe de banque-assurance qu’une poste. Deutsche Post
se situe quant à lui dans une situation intermédiaire, similaire à celle du
groupe La Poste.
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COUR DES COMPTES
210
Chiffre d’affaires hors courrier/express des
opérateurs postaux européens
Source : Cour des comptes
L’évolution du chiffre d’affaires et du résultat des quatre
opérateurs entre 2010 et 2015 démontre la viabilité de chacune des
stratégies employées :
Chiffre d’affaires des opérateurs postaux européens
CA (en Md€)
2010
2011
2012
2013
2014
2015
Deutsche Post
51,4
52,8
55,5
54,9
56,6
59,2
Royal Mail
9,5
10,5
10,8
11,4
12,8
11,7
Poste Italiane
21,8
21,7
24,1
26,3
28,5
30,7
La Poste
20,9
21,3
21,7
22,1
22,2
23,0
Source : Cour des comptes
47
8
50
23
51
9
77
25
50
0
87
51
0
20
40
60
80
100
Deutsche Post
Royal Mail
Poste Italiane
La Poste
CA hors Courrier/Express (en
%)
Operateurs postaux
2002
2010
2015
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ANNEXES
211
Résultats d’exploitation (EBIT) des opérateurs postaux
européens
EBIT (en Md€)
2010
2011
2012
2013
2014
2015
Deutsche Post
1,8
2,4
2,7
2,9
3,0
2,4
Royal Mail
0,08
0,3
0,4
2
0,5
0,2
Poste Italiane
1,9
1,6
1,4
1,4
0,7
0,9
La Poste (REX)
0,8
0,7
0,8
0,8
0,7
0,9
Source : Cour des comptes
Si Deutsche Post et surtout Poste Italiane ont fait montre d’une
importante capacité pour faire face à la crise et au déclin du courrier,
Royal Mail et La Poste n’ont vu leurs résultats évoluer que modestement.
Deutsche Post bénéficie certes de la moindre chute du courrier en
Allemagne que dans les autres
pays ; surtout, DHL s’est imposé comme
un relais de croissance puissant permettant à l’opérateur postal allemand
de surmonter la crise du courrier.
Deutsche Post a de surcroît compensé la chute des volumes de
courrier par une réduction du réseau des bureaux de poste, permettant au
résultat d’exploitation de l’activité courrier de se maintenir à flot depuis
2010 :
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COUR DES COMPTES
212
Répartition des points de contact
Source : rapport public d’activité 2014 de l’ARCEP « la régulation du marché postal en 2014
Évolution de l’EBIT des segments courrier
EBIT (en
M€)
2010
2011
2012
2013
2014
2015
Deutsche
Post
1 120
1 107
1 048
1 286
1 298
1 103
Royal Mail
(136)
26
348
719
846
768
Poste
Italiane
(153)
(263)
416
300
(504)
(568)
Source : Rapports annuels
La division courrier de Deutsche Post apparaît d’ailleurs comme
la plus rentable des quatre opérateurs comparés ici, l’évolution de Royal
Mail s’expliquant par l’introduction en bourse et l’important mouvement
de réduction du personnel (cf.
infra
). En 2014, le ratio EBIT/CA de la
division courrier de Deutsche Post était en effet de 8,3 %, contre 3,8 %
pour La Poste, 4,4 % pour Royal Mail et -12,4 % pour Poste Italiane.
0%
20%
40%
60%
80%
100%
120%
Partenariat
Service assuré par
le facteur
Bureaux de postes
mobiles
Bureaux gérés par
le prestataire du
service universel
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ANNEXES
213
1.
Deutsche Post
Deutsche Post est la plus grande entreprise postale d’Europe en
termes de chiffre d’affaires. Elle est une société de droit privé depuis
1995, au sein de laquelle l’État allemand détient de manière indirecte une
participation de 21 % à travers la KfW, équivalent de la Caisse des dépôts
et consignations en France. Depuis décembre 2000, le groupe est coté à la
Bourse de Francfort.
1.1
La situation financière de Deutsche Post : une segmentation
équilibrée
Entre 2010 et 2015, les résultats financiers de Deutsche Post se
sont améliorés :
Principaux résultats de Deutsche Post
En Md€
2010
2011
2012
2013
2014
2015
CA
51,4
52,8
55,5
54,9
56,6
59,2
EBIT
1,8
2,4
2,7
2,9
3,0
2,4
EBIT/CA
(%)
3,6
4,6
4,8
5,2
5,2
4,1
Source : rapport annuel 2015
Le chiffre d’affaires du groupe est en progression constante sur la
période, de même que l’EBIT et la marge opérationnelle (EBIT/CA) qui
progressent chaque année sauf en 2015.
Le groupe est divisé en quatre segments opérationnels : la division
Post-eCommerce-Parcel (PeP), la division Express, la division Global
Freight Forwarding (GFF), la division Supply Chain. Ces quatre segments
contribuent de manière équilibrée aux résultats du groupe :
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COUR DES COMPTES
214
Répartition du résultat de Deutsche Post en 2015
Source : rapport annuel 2015
Le business model de Deutsche Post est stable et sa stratégie de
répartition des risques clairement identifiée : l’activité postale, l’express,
la logistique et le transport de marchandises participent chacun pour un
quart du résultat du groupe. Cette quasi-égale répartition des revenus
permet au groupe d’être moins exposé en cas de baisse des résultats d’un
segment.
Le
résultat
du
groupe
s’effectue
en
majeure
partie
à
l’international – 69 % en 2014 – notamment grâce à DHL (division
Express), présent dans 220 pays. Mais il faut également souligner la
bonne résistance du segment courrier-colis-eCommerce (PeP), qui a vu
son résultat augmenter continûment entre 2010 et 2015 (+3 % en
moyenne annuelle) : dans un contexte de baisse de volumes du courrier,
Deutsche Post est ainsi parvenu à résister à la substitution numérique,
principalement grâce aux revenus tirés du e-commerce.
1.2
La stratégie de diversification de Deutsche Post : géographique et
sectorielle
Deutsche Post a mis en place une stratégie de double
diversification : géographique (expansion hors d’Europe) et sectorielle
(développement du colis et de la logistique).
Outre le renforcement de ses quatre métiers principaux, le groupe a
multiplié les initiatives, en investissant de nombreux secteurs avec des
fortunes diverses. Le transport en car est un échec car Deutsche Post est
arrivé trop tard sur le marché national dont il n’a capté que 7 %. Il a en
revanche réussi sa diversification dans la messagerie électronique en étant
le pionnier de ce marché. Deutsche Post a aussi investi le marché de la
santé et de la logistique à température dirigée avec Post Persönlich, et
celui des agences de voyage avec Post Reisen.
27,23%
23,06%
25,14%
26,66%
PeP
Express
Global
Forwarding
Supply Chain
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ANNEXES
215
Sur le plan géographique, DHL a entrepris depuis 2005 une
expansion en Asie, qui lui permet d’occuper 40 % du marché chinois.
1.3
La stratégie de Deutsche Post à l’horizon 2020 : la logistique comme
principal relais de croissance
Deutsche Post a présenté au troisième trimestre 2015 ses objectifs
2020, issus de son plan stratégique «
Focus. Connect. Grow
».
Trois priorités stratégiques de moyen terme sont identifiées :
‐
Focus
: placer la logistique comme coeur de métier du groupe
‐
Connect
: assurer la qualité des équipes et des services au client
‐
Grow
: devenir leader sur la logistique liée au eCommerce et
accentuer sa présence sur les marchés émergeants.
Deutsche Post a pris des initiatives qui vont dans ce sens, avec :
‐
le développement du service Packstation, qui permet aux clients
de récupérer 7j/7 et 24h/24 leurs colis commandés en ligne grâce
à des consoles automatiques ;
‐
le service Track&Trace, qui leur permet de suivre la livraison du
colis en temps réel ;
‐
une
prise
de
participation
majoritaire
dans
l’entreprise
Allyouneed, un supermarché online ;
‐
l’expérimentation d’une solution de livraison de colis très
urgents par hélicoptère ou par drone (The DHL Parcelcopter)
pour concurrencer le service Prime Now d’Amazon.
2.
Royal Mail
Fondé par Henri VIII en 1516, Royal Mail a cessé d’être un service
public le 15 octobre 2013 après son introduction en bourse par le
gouvernement britannique. L’opérateur est aujourd’hui une entreprise
totalement privée après la vente par l’État de ses parts restantes en
octobre 2015.
2.1
Situation financière de Royal Mail : un opérateur centré sur les
activités postales traditionnelles
Les résultats de l’opérateur s’améliorent sur la période :
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COUR DES COMPTES
216
Principaux résultats de Royal Mail
Source : rapport annuel 2015
La hausse régulière du chiffre d’affaires (+4,3 % par an en
moyenne) s’accompagne d’une importante augmentation de l’EBIT
(x2,5) et de la marge opérationnelle, imputable à deux facteurs : la hausse
des tarifs postaux en 2012 (+30 % sur le timbre Prio et +39 % sur le
timbre Eco) et les actions de réduction de coûts, notamment une baisse
des effectifs :
Évolution des employés de Royal Mail
Source : rapport annuel 2015
L’activité du groupe se concentre essentiellement autour de deux
segments : UK Parcel, International, Letters (UKPIL) et General Logistic
System (GLS), un opérateur postal de colis au réseau européen :
2010
2011
2012
2013
2014
2015
CA (en Md€)
9,5
10,5
10,8
11,4
12,8
11,7
EBIT (en M€)
84
332
390
2 009
483
211
EBIT/CA (%)
0,9
3,2
3,6
17,6
3,8
1,8
Employés
2010
2011
2012
2013
2014
2015
UKPIL
155 181
151 156
149 940
148 441
142 910
139 408
GLS
13 167
13 362
13 646
13 811
14 409
13 991
Filiales
4 254
3 926
4 030
3 999
3 199
3 136
Total groupe
172 602
168 444
167 616
166 251
160 518
156 535
La Poste - décembre 2016
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ANNEXES
217
Répartition du résultat de Royal Mail en 2015
Source : rapport annuel 2015
2.2
La stratégie de Royal Mail : rester fidèle à son orientation postale
tout en limitant la baisse du courrier
Comme le montre la participation des segments au résultat du
groupe, Royal Mail a choisi de demeurer centré sur les activités postales
(courrier et colis). Sa seule diversification significative concerne la
téléphonie mobile (6e fournisseur pour le téléphone fixe au Royaume-Uni
avec 500 000 clients et 168M€ de CA en 2015). Royal Mail a en outre
développé des solutions de signature et d’identité numérique en
partenariat avec le gouvernement. Plus récemment, il a commencé à
développer une activité dans le e-commerce
197
. Parmi les quatre
principaux opérateurs postaux, Royal Mail est le seul à proposer des
ventes de produits tiers au guichet, en assurant la vente de la loterie
nationale.
Pour les années à venir, la stratégie de Royal Mail devrait rester
centrée autour de UKPIL et de GLS. L’objectif financier principal est
d’augmenter la productivité de 2 à 3 % par an et de servir aux
actionnaires un dividende de 21 % par action. Pour atteindre ces objectifs,
et dans un contexte de baisse du courrier, l’opérateur souhaite approfondir
son offre dans le colis.
Dans cette perspective, des innovations technologiques sont en
développement (services de « tracking » des colis, livraison de colis sur
mesure, etc.).
197
Acquisitions d’entreprises proposant des solutions informatiques et logistiques
clés-en-main pour des sites de vente en ligne (notamment MarketEngine, Storefeeder
et Mallzee)
82,87%
17,08%
0,05%
UKPIL
GLS
Autre
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COUR DES COMPTES
218
3.
Poste Italiane
Poste Italiane est une société par actions. Depuis le 27 octobre
2015, le groupe est coté en bourse, mais l’État reste majoritaire.
3.1
Situation financière de Poste Italiane : une poste spécialisée dans le
secteur bancaire et assurantiel
Le chiffre d’affaires est en forte hausse depuis 2010 mais la
rentabilité décroît fortement :
Principaux résultats de Poste Italiane
Source : rapport annuel 2015
L’augmentation du chiffre d’affaires s’explique par l’important
développement des activités assurantielles dont le poids dans le groupe
est croissant. Néanmoins la rentabilité opérationnelle de l’assurance
(2,62 % entre 2010 et 2015) est trop faible pour compenser celle du
courrier, qui est fortement négative.
Pour limiter la chute de sa rentabilité opérationnelle, Poste Italiane
a cherché à réduire ses effectifs depuis 2010 :
Éévolution des employés de Poste Italiane
Source : rapport annuel 2015
Poste Italiane se divise en quatre segments opérationnels : Poste &
Business, Services financiers, Assurance et autres. Le résultat est très
largement issu de l’assurance et, dans une moindre mesure, des activités
bancaires, comme le montre le graphique ci-après :
2010
2011
2012
2013
2014
2015
CA (en Md€)
21,8
21,7
24,1
26,3
28,5
30,7
EBIT (en Md€)
1,9
1,6
1,4
1,4
0,7
0,9
EBIT/CA (%)
8,7
7,4
5,8
5,3
2,5
2,9
Employés
2010
2011
2012
2013
2014
2015
Groupe
151 844
148 453
146 542
145 431
144 635
143 700
La Poste - décembre 2016
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ANNEXES
219
Répartition du résultat de Poste Italiane en 2015
Source : rapport annuel 2015
3.2
La stratégie de diversification de Poste Italiane
Poste Italiane s’apparente aujourd’hui plus à une banque-assurance
qu’à un opérateur postal. En revanche, l’opérateur ne s’est pas orienté
vers le colis, l’express et le e-commerce. L’opérateur postal a ainsi la plus
faible part de marché sur le segment du colis/express BtoC en
comparaison avec ses concurrents européens (5 % en 2014). Le
lancement du site de e-commerce « ePosteShop.it » est un échec, avec un
résultat négatif de 12,5M€ en 2014 ; le site a fermé en mai 2016. Par
ailleurs, Poste Italiane multiplie les initiatives sur plusieurs secteurs de
l’économie numérique, avec notamment une offre de e-commerce
transfrontalier
via
un partenariat avec la poste russe, une offre de
téléphonie mobile, des services d’identité numérique ou encore un service
de cloud.
Poste Italiane a défini sa stratégie à moyen terme dans un plan
stratégique 2015-2020 qui identifie trois relais de croissance : les lettres et
le colis, les services financiers et l’assurance. Pour ce faire, l’opérateur a
défini plusieurs moyens d’actions :
‐
la réduction du nombre de bureaux de poste (-455) ;
‐
3Md€ d’investissement dans les infrastructures ;
‐
le recrutement de 8000 personnes ;
‐
3millions d’heures de formation pour convertir les facteurs aux
métiers financiers et logistique ;
12,66%
16,88%
69,67%
0,79%
Postal and
Business
Services
Financial
Services
Insurance
Services
Other Services
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COUR DES COMPTES
220
‐
une augmentation radicale des prix du courrier et une réduction
de la fréquence de distribution (un jour sur deux) ;
‐
le développement de l’ « asset management », débuté avec une
prise de participation de 10 % dans le gestionnaire d’actifs
Anima.
La Poste - décembre 2016
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ANNEXES
221
Annexe n° 8 :
cartographie des maisons de service
au public (MSAP) en bureau de poste
Afin d’accélérer la création de 1000 MSAP, un partenariat entre le
Gouvernement et La Poste a été mis en place. Il prévoit que La Poste
accueille 500 MSAP dans des bureaux de poste situés en zones rurales et
de montagne d’ici fin 2016.
Au 15 juin 2016, 472 MSAP avaient été validées par un accord de
la préfecture et de la collectivité concernée et 71 sites étaient en attente.
La Poste a communiqué leur cartographie.
Source : La Poste
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COUR DES COMPTES
222
Annexe n° 9 :
suivi de la mise en oeuvre des
recommandations du rapport public thématique :
« La Poste : un service public face à un défi sans
précédent, une mutation nécessaire »
198
Le rapport public thématique de 2010 « La Poste : un service
public face à un défi sans précédent, une mutation nécessaire »
comprenait
17
recommandations
faisant
l’objet
d’un
suivi
de
recommandation après son adoption. Le suivi de leur mise en oeuvre,
effectué de 2011 à 2014
199
, a été réactualisé pour les besoins du présent
rapport. Son résultat est :
Nombre et pourcentage des recommandations mises en
oeuvre
Tableau pour l'ensemble des recommandations
Nombre
%
Nombre total des recommandations du RPT
faisant l'objet d'un suivi
17
100 %
Recommandations totalement mises en oeuvre
11
65 %
Recommandations
partiellement
mises
en
oeuvre
5
29 %
Recommandation non mise en oeuvre
1
6 %
La plupart des recommandations étaient totalement mises en
oeuvre en 2013.
198
Cour des comptes,
Rapport public thématique : La Poste : un service public face à
un défi sans précédent, une mutation nécessaire
. La Documentation française, juillet
2010, 190 p., disponible sur www.ccomptes.fr
199
Ce suivi des recommandations n’a pas distingué, parmi les recommandations
« partiellement mises en oeuvres », entre les recommandations dont la mise en oeuvre
est « en cours » et « incomplète ». Les recommandations dont la mise en oeuvre est en
cours sont celles pour lesquelles une mise ne oeuvre est engagée avec un calendrier de
réalisation étalé dans le temps, la perspective étant la mise en oeuvre totale. La
cotation « mise en oeuvre incomplète » s’applique à celles pour lesquelles la mise en
oeuvre est partielle dans son contenu.
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ANNEXES
223
Récapitulatif des recommandations du RPT « La Poste : un
service public face à un défi sans précédent »
°
Libellé Recommandation
Degré de
la mise en
oeuvre
Situation à fin 2015
Conclure un pacte d’actionnaire
entre l’État et la CDC dans le but de
donner sa pleine signification à
cette nouvelle répartition du capital
et de développer les synergies
potentielles entre la Poste, la Caisse
et certaines de leurs filiales.
Totalement
Le pacte d’actionnaire a été signé le 10
février 2011.
Dès
lors
qu’elle
disposera des
capacités financières, humaines et
techniques
adéquates,
étendre
l’agrément de la Banque Postale à
l’octroi de crédit aux personnes
morales,
en
orientant
prioritairement ses efforts vers les
PME, TPE et associations.
Totalement
La Banque Postale a obtenu l’agrément
de l’ACP le lundi 5 septembre 2011.
Relever significativement l’objectif
de qualité de la distribution en J+1
et le rendre plus effectif dans un
périmètre géographique pertinent ;
et élargir la plage utile pour la
remise du courrier : dépôt plus
tardif, et plus de boîtes aux lettres.
Partiel-
lement
L’objectif
concernant
le
taux
de
distribution en J+1 n’est pas encore
atteint. Des améliorations substantielles
ont été réalisées sur d’autres segments
(lettres
prioritaires,
recommandées,
export).
Examiner en 2013 la compensation
des coûts supportés par la Poste au
titre des missions de service public
au regard de l’évolution des besoins
du public et des entreprises, du
périmètre de ces missions et de la
rentabilité du groupe.
Totalement
Dans son rapport financier de 2013, La
Poste a examiné la compensation des
coûts supportés par la Poste au titre des
missions de service public. Le contrat
d’objectif, la préparation du contrat de
présence territoriale et les notifications
à l’Union européenne ont eux aussi
procuré l’occasion de ce réexamen.
Examiner, dans ce même esprit, la
question de l’assujettissement de la
Poste à la taxe sur les salaires qui la
place dans une situation d’inéquité
concurrentielle.
Non mis en
oeuvre
Ce sujet n’a pas été discuté à l’occasion
des nouveaux contrats d’objectifs de la
Poste
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COUR DES COMPTES
224
°
Libellé Recommandation
Degré de
la mise en
oeuvre
Situation à fin 2015
Réaliser
des
simulations
complémentaires
tournant
autour
d’une
hypothèse
alternative
de
baisse des volumes économiques du
courrier de 40 % entre 2008 et
2015.
Totalement
Ces simulations ont été réalisées entre
2013 et 2014 dans le cadre de la
préparation
du
nouveau
plan
stratégique.
Renforcer la qualité de service en
priorité pour résoudre la question de
l’accueil et de l’attente dans les
bureaux de poste, sans délaisser les
petits bureaux, et améliorer les
modalités de livraison des colis aux
particuliers.
Totalement
La réduction du temps d’attente au
guichet est constatée, puisqu’il passe de
7,3 à 4,1 minutes entre 2009 et 2014. ;
les possibilités de choix des modalités
de livraison des colis (horaire, lieu…)
se sont accrues
Réduire
les
charges
fixes,
notamment
en
rationnalisant
l’organisation des fonctions support
au sein de chaque métier ainsi que
la gestion du parc immobilier du
groupe,
qui
représente
son
deuxième poste de charges.
Partiel-
lement
Cette recommandation a d’abord été
peu
suivie.
Le
projet
« Servir
le
développement » traduit une volonté
d’agir, en visant d’aligner le coût des
fonctions support sur d’autres grands
groupes français. Une baisse légère des
effectifs est amorcée depuis 2014.
Tout en maintenant le nombre des
points de contact, poursuivre leur
transformation en partenariats et
engager un effort de réduction du
poids de leurs structures de gestion.
Totalement
La Poste a poursuivi la transformation
de bureaux de poste en points de
contact en partenariat. À la fin d’avril
2016, on en comptait 7 939 contre
6 445 en 2009. Ces transformations ont
toutefois été rares en ville.
0
Clarifier les lignes de responsabilité
entre
la
Banque
Postale
et
l’Enseigne.
Totalement
L’interpénétration de LBP et du Réseau
s’est accentuée, notamment grâce à la
« ligne commerciale unique », qui a
rempli aussi l’objectif de clarification.
1
Permettre
le
plein
effet
des
perspectives de départs naturels en
instaurant une complète fluidité
entre les secteurs en décroissance et
les activités en développement.
Partiel-
lement
Cet objectif a été réaffirmé et des
progrès ont été réalisés. En particulier,
l’accord d’entreprise « un avenir pour
chaque postier » a pour but de faciliter
les évolutions professionnelles.
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ANNEXES
225
°
Libellé Recommandation
Degré de
la mise en
oeuvre
Situation à fin 2015
2
Conférer
une
importance
prépondérante
à
la
formation
qualifiante des agents en place pour
leur permettre d’évoluer vers les
nouveaux emplois qui pourront leur
être
proposés
et
renforcer
l’efficacité des dispositifs existants
de mobilité interne et externe.
Totalement
En 2013, 80 % des postiers ont suivi
une formation. L’accord « un avenir
pour
chaque
postier »
prévoit
un
important effort en termes de formation.
3
Disposer
d’organisations
plus
performantes et plus adaptables en
fonction des besoins de l’entreprise,
notamment pour la distribution du
courrier.
Totalement
L’organisation en branches mise en
place en 2014 a prévu des instances et
projets
transversaux.
Dans
les
établissements, La Poste a accentué ses
efforts pour réorganiser les processus
de travail et les adapter à la baisse du
volume du courrier.
4
Pour ColiPoste, élargir les choix de
livraison
proposés
aux
clients,
renforcer
sa
présence
dans
le
commerce électronique, développer
le colis standard de particulier à
particulier en Europe.
Totalement
Colissimo peut être livré en point relais
et, dans certains cas, avec un choix du
créneau horaire. Par ailleurs, La Poste a
développé le colis de particulier à
particulier en Europe.
5
Pour
l’express,
poursuivre
son
implantation
internationale,
sans
viser
le
créneau
des
grands
intégrateurs mondiaux.
Partiel-
lement
Le
processus
d’extension
et
de
consolidation
européenne
et
internationale du réseau GeoPost s’est
poursuivi mais n’est pas achevé.
6
Pour
les
métiers
connexes
du
courrier,
tirer
profit
des
complémentarités existantes entre
les
diverses
sociétés
du
pôle
documentaire,
privilégier
la
recherche
de
valeur
ajoutée
et
l’innovation, mais rester prudent
(opérations croissance externe en
Europe)
Partiel-
lement
La création de la branche numérique, en
reconfigurant les filiales du métier
Courrier, a permis d’atteindre une partie
de cet objectif.
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COUR DES COMPTES
226
°
Libellé Recommandation
Degré de
la mise en
oeuvre
Situation à fin 2015
7
Affirmer la capacité du groupe à
faire
des
offres
commerciales
globales
impliquant
tous
ses
métiers.
Totalement
La Poste a réalisé de vrais progrès dans
ce domaine (par exemple : les offres
destinés
aux
commerçants,
« box
e-commerce » ;
le
« pack
déménagement).
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Réponses des administrations
et des organismes concernés
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Sommaire
Réponse du secrétaire d’État chargé de l’industrie
.................................
231
Réponse du président-directeur général du groupe La Poste
..................
236
Réponse du président de l'Autorité de régulation des communications
électroniques et des postes (ARCEP)
.....................................................
244
Réponse du directeur général du groupe Caisse des dépôts et consignations
................................................................................................................
245
Destinataires n’ayant pas répondu
Ministre de l’économie et des finances
Ministre de l’aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités
territoriales
Secrétaire d’État chargé du budget
Secrétaire d’État chargée du numérique et de l’innovation
Président de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR)
Président de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et
consignations
Destinataire n’ayant pas souhaité rendre
ses observations publiques
Ministre de l’intérieur
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS
231
RÉPONSE DU SECRÉTAIRE D’ÉTAT CHARGÉ DE L’INDUSTRIE
Comme le constate la Cour, La Poste fait face à des mutations
sans précédent de son environnement économique, juridique et social, qui
imposent une transformation profonde de son modèle économique. Avec
le soutien de l’Etat, dans ses multiples rôles auprès du groupe, La Poste
met en oeuvre des efforts considérables pour relever ce défi dans le cadre
ambitieux fixé par le plan stratégique 2014-2020.
Les relations entre le groupe La Poste et l’Etat actionnaire, client,
tutelle, régulateur, ou encore collecteur d’impôt répondent à des logiques
différentes. La multiplicité de ces relations, à la cohérence desquelles
l’Etat est attentif, n’empêche pas l’Etat actionnaire, via sa participation à
l’élaboration du plan stratégique et à son suivi, en lien étroit avec la
direction générale du groupe, de s’assurer de la cohérence d’ensemble de
la stratégie de La Poste, compte tenu des diverses missions qui lui sont
confiées par l’Etat, et de son environnement fiscal et concurrentiel.
Au-delà de cette remarque d’ordre général, les constats et
recommandations de la Cour appellent les remarques suivantes :
1/ La Cour considère « l’absence de visibilité sur les missions de
service public » qui sont confiées à l’Etat par la Poste, comme autant de
« fragilités » pour le Groupe. Ce constat nous semble devoir être nuancé.
S’il est vrai que ces missions représentent une charge nette importante
pour le groupe (493 M€ de déficit net en 2014 des trois missions donnant
lieu à compensation), elles contribuent également à la résilience de son
chiffre d’affaire. Par ailleurs, l’Etat veille à ce qu’elles évoluent pour
s’adapter aux besoins réels des citoyens et des entreprises tout en
s'attachant à ce que le déficit net restant à la charge de La Poste se
réduise progressivement. Cela implique, d’une part, de donner à La Poste
une perspective pluriannuelle sur le contenu et la rémunération de ces
missions et, d’autre part, de prévoir une réévaluation périodique
conformément aux exigences européennes, selon des durées adaptées à
chaque mission.
Ces trois missions de service public donnant lieu à une
compensation financière de La Poste par l’Etat ont fait récemment au
font actuellement l’objet d’un réexamen ; elles devront être approuvées
dans leurs nouvelles configurations par la Commission européenne.
2/ La Cour indique que la mission d’aménagement du territoire
souffre encore de modalités d’adaptation trop contraignantes de la
présence postale, en particulier en zone urbaine, et propose « d’accélérer
la transformation des bureaux de poste à faible activité en zone urbaine
en d’autres formes de points de contact ».
La Poste - décembre 2016
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COUR DES COMPTES
232
Les recommandations faites par la Cour dans son référé du
25 février 2016 relatives à l’approfondissement de la modernisation du
réseau de La Poste, notamment en zone urbaine, ont été prises en
considération dans l’élaboration du projet de contrat de présence postale
2017-2019. Ce futur contrat devrait prévoir des évolutions sur le
maillage territorial et sur les modalités de concertation de La Poste avec
les élus locaux. C’est ainsi que, pour les points de contact situés dans les
communes urbaines, les négociations en cours pour le futur contrat de
présence postale visent à faire évoluer les modalités de gestion du réseau,
tout en garantissant la continuité de la présence postale territoriale.
3/ S’agissant des services numériques, la Cour indique à juste titre
que « seule une approche « multicanal » [du réseau] est désormais
pertinente pour concevoir et pour gérer l’accès du public aux services
postaux » et recommande à La Poste de « développer auprès du public,
dans le cadre d’une démarche commerciale structurée, les offres de
services et produits numériques ».
Si le constat de la Cour d’une diffusion trop lente des services
numériques nous apparaît fondé, nous tenons cependant à souligner les
progrès de La Poste, en particulier depuis 2015, dans l’intégration des
outils numériques dans ses processus quotidiens internes et au service de
ses clients. À cet égard, il peut être considéré qu'un enjeu très important
de la numérisation est la modernisation des activités considérées comme
traditionnelles, avant même le développement de services totalement
nouveaux et proprement numériques. Par exemple, la dotation des
facteurs en smartphones Facteo est un élément puissant pour diversifier
et enrichir les activités des facteurs. La Poste développe par ailleurs une
base commune de clients qui permettra de suivre la relation avec les
clients de manière individualisée afin d’améliorer la qualité du service
qui leur est rendu. L’élargissement de cette base à tous les clients,
particuliers, professionnels et entreprises, est une des priorités de La
Poste pour 2017. L’Etat sollicite et accompagne également la
transformation numérique de La Poste. Ainsi, les agents des bureaux de
Poste accueillant une Maison de services au public joueront un rôle de
médiation numérique, afin qu’ils puissent orienter au mieux les usagers
vers les opérateurs de services (Pôle Emploi, CAF...).
4/ La croissance externe constitue, comme le souligne justement la
Cour, un élément contributif majeur pour permettre à La Poste de « se
désensibiliser » de l’activité historique du courrier et ainsi renforcer la
« cohérence et la pertinence de son modèle multimétier ». Dans ce
contexte, la Cour recommande à l’Etat et à La Poste « de formaliser un
La Poste - décembre 2016
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS
233
cadre stratégique et financier relatif à la croissance externe du groupe La
Poste ».
Nous partageons l'exigence de rentabilité que la Cour met en
avant pour la croissance externe, mais nous considérons que les
appréciations critiques du rapport sur la rentabilité des acquisitions et la
gouvernance des projets peuvent être nuancées. Nous souhaitons tout
d'abord
rappeler
que
si
certaines
petites
acquisitions
se
sont
effectivement révélées décevantes, la grande majorité des projets s’est
traduite par le développement de nouvelles activités pour le groupe ou
sur de nouvelles zones géographiques, qui constituent aujourd’hui autant
de relais de croissance. La construction progressive par GeoPost du
premier réseau routier européen du « colis rapide » constitue une bonne
illustration de ce phénomène. De même, le modèle partenarial privilégié
par La Banque Postale lui a permis de développer de nouvelles activités,
en limitant la consommation de fonds propres et en s’appuyant sur
l’expérience de ses partenaires. Ainsi, les bons résultats dans le crédit à
la consommation de LBP Financement, en partenariat avec la Société
Générale, permettent à La Banque Postale de diversifier ses activités de
crédit, au- delà du crédit immobilier, en maîtrisant les risques inhérents
au lancement d’une activité nouvelle. Un cas comme celui de
Mediaprism, cité par la Cour comme « une acquisition préjudiciable »,
est effectivement regrettable, mais peut être relativisé dans la mesure où
l’acquisition s’est faite pour 15,4 M€ en 2011, soit 2 % des
investissements consacrés à la croissance externe du groupe sur la
période 2010-2015 (745 M€). Par ailleurs, un plan d’action est en cours
de mise en oeuvre afin de pallier les difficultés associées à cette opération.
La gouvernance de la croissance externe constitue un élément
essentiel pour s’assurer de la bonne mise en oeuvre de la stratégie du
groupe. Nous considérons que le bilan dans ce domaine est plus positif
que ne le décrit la Cour et que de nombreux progrès ont été réalisés. Le
seuil de 30 M€ pour l’examen des projets d’acquisition par le conseil
d’administration de La Poste SA est fixé à un niveau que nous
considérons équilibré, eu égard à la taille du groupe La Poste, au
nombre de projets de croissance externe examinés et en comparaison des
seuils retenus dans d’autres têtes de groupe d’entités du portefeuille de
l’Agence des Participations de l’Etat (50 M€ pour Safran, 80 M€ pour
SNCF Mobilités). En outre, les instances de gouvernance des filiales du
groupe ont justement pour rôle d’examiner de manière plus fréquente et
détaillée les projets dans leur secteur d’activités. La présence que la
Mission de contrôle économique et financier assure au nom de l'Etat dans
les principales filiales du groupe permet d'apporter un regard extérieur
et s'attache à la clarté et à la cohérence des prises de décisions. Enfin, et
La Poste - décembre 2016
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COUR DES COMPTES
234
comme le précise la Cour, le bilan annuel des principales acquisitions du
groupe présenté désormais annuellement au conseil d’administration de
La Poste, permet depuis 2014 de bénéficier des retours d’expérience
(positifs et négatifs) sur les projets réalisés.
5/ La Cour recommande à l’Etat d’« actualiser, à l’issue d’un
débat public, les missions de service public de La Poste en tenant compte
du service attendu par les usagers et du coût pour la collectivité ».
Nous partageons l'appréciation de la Cour sur l’importance d’une
information suffisante et préalable des citoyens sur les enjeux qui
animent les missions d’intérêt général confiées à La Poste et nous
attachons à introduire, dans chaque nouvelle procédure de validation de
ces missions, des consultations publiques. Pour autant, l’organisation
d’une consultation unique globale portant sur des missions très
hétérogènes et impliquant des parties prenantes très différentes
n’apparaît ni faisable ni souhaitable. Le choix alternatif a par conséquent
été fait d’associer et d’impliquer les parties prenantes, selon une
procédure et un périmètre adaptés à chaque mission, y compris le service
universel postal.
L’Etat a ainsi organisé en juillet 2016 une consultation publique
relative à la mission d’accessibilité bancaire, via le Comité consultatif du
secteur financier (CCSF), dont la composition a garanti une parfaite
représentativité des différentes parties concernées par la mission
d’accessibilité bancaire confiée à La Banque Postale. Cette consultation
publique a permis de confirmer la pertinence de la mission et de mettre
en exergue le fait que cette mission constitue une réponse équilibrée à des
exigences d’usage concrètes exprimées par des populations spécifiques,
qui sont parfois en situation d’extrême précarité et qui ne sont pas
couvertes par les autres dispositifs d’accessibilité.
S’agissant de la mission d’aménagement du territoire, la règle
d’accessibilité au réseau définie dans la loi du 2 juillet 1990 permet à La
Poste de faire évoluer et de transformer son réseau de façon souple, tout
en assurant un maillage territorial équilibré répondant aux besoins des
usagers et prenant en compte les attentes des élus. Cette mission
d’aménagement du territoire est encadrée par le contrat de présence
postale territoriale. Le prochain contrat, qui couvrira la période 2017-
2019, permettra de prévoir une évolution des modalités de gestion du
réseau, en particulier s’agissant de l’amélioration de l’offre de services
et de la transformation des bureaux de poste en zone urbaine. Les travaux
d’élaboration de ce nouveau contrat se sont appuyés largement sur les
consultations
publiques
organisées,
via
les
90
commissions
départementales de présence postale territoriale et l’observatoire
La Poste - décembre 2016
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS
235
national de la présence postale, auprès de l’ensemble des acteurs locaux
au niveau départemental, régional et national (120 réunions, 1 000
représentants des territoires).
La
participation
de
La
Poste
à
la
politique
publique
d’amélioration de l’accessibilité des services au public initiée par P Etat
illustre le caractère évolutif de cette mission. Entre fin 2015 et fin 2016,
près de 500 Maisons de service au public seront accueillies dans des
bureaux de poste ruraux. Pour améliorer le maillage des services au
public, la loi NOTRe prévoit un schéma départemental d’amélioration de
l’accessibilité des services au public, co-élaboré pour le projet de
département et pour le Président du Conseil départemental. Ce schéma
donne un cadre territorial pour organiser les réponses aux besoins des
usagers et aux attentes des élus.
En ce qui concerne la mission de transport et de distribution de la
presse, une consultation publique via Internet est en cours de préparation
par les services du Ministère de l’Economie et devrait être lancée très
prochainement,
sur
la
base
des
orientations
arrêtées
par
le
Gouvernement.
Au sujet de la mission de service universel postal, il peut être
souligné, en premier lieu, les efforts réalisés par La Poste tant en matière
de redéploiement de son outil industriel que de rationalisation de ses
coûts. Les efforts de l’entreprise sont d’ailleurs soutenus par l’Etat qui
instruit et porte les évolutions règlementaires en vue d’une modernisation
du service universel postal, tout en garantissant le respect du cadre
communautaire et national du service universel.
Ainsi, pour faire suite aux préconisations que la Cour a formulées
dans son rapport public annuel de 2016 et qui visaient l’adoption de
mesures destinées à faciliter l’accès des facteurs aux boîtes aux lettres
des particuliers (notamment en zone rurale), le Gouvernement prépare
une évolution de la règlementation, en concertation avec La Poste et
l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes.
Enfin, les évolutions peuvent passer par des mesures techniques,
déjà envisagées par La Poste, comme un pilotage plus fin du contenu des
sacoches des facteurs et des tournées de ceux-ci, ou des mutualisations
avec la distribution des colis, voire d’autres produits, sans remettre en
cause brutalement les modalités emblématiques actuelles de distribution
du courrier dans le cadre du service universel postal (distribution
6 jours/7, coexistence d’un tarif urgent J+l et d’un tarif J+2, notamment),
auxquels les usagers sont très attachés.
La Poste - décembre 2016
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COUR DES COMPTES
236
RÉPONSE DU PRÉSIDENT-DIRECTEUR GÉNÉRAL
DU GROUPE LA POSTE
1. L’impérieuse nécessité de la transformation
Le rapport public thématique de la Cour des comptes fait suite à
celui de juillet 2010 intitulé « La Poste : un service public face à un défi
sans précédent, une mutation nécessaire » ; il couvre les exercices 2010 à
2015 et s’intitule « La Poste : une transformation à accélérer ».
Je tiens à remercier la Cour pour la démarche qu’elle a engagée et
la qualité du travail mené.
La Cour souligne que La Poste, au cours des dernières années, « a
su évoluer et se montrer résistante » : elle salue les « efforts de
modernisation », « des progrès en matière de qualité », « une méthode de
conduite de changement qui a porté ses fruits », et un « modèle
économique qui a résisté à la crise », avec « une structure financière
consolidée », « des relais de croissance qui ont bien fonctionné », et
« une maîtrise des charges engagée ».
La Cour montre aussi que La Poste recèle des « fragilités
persistantes » et qu’elle doit « accélérer le rythme de sa transformation ».
Je partage ce constat. C’est la mission qui m’a été confiée et c’est
la tâche à laquelle, avec l’équipe de direction du Groupe, je me suis
attelé.
En effet, si les résultats sont meilleurs que ceux de la trajectoire
pluriannuelle depuis début 2014, si La Poste a engagé résolument sa
transformation, celle-ci reste à finaliser. De ce point de vue, les
prochains mois marqueront des étapes importantes.
La Cour estime, à juste titre, que La Poste reste encore très
dépendante de son activité Courrier au moment où la croissance de
La Banque Postale est pénalisée par la faiblesse des taux d’intérêt,
événement largement imprévisible tant pour son occurrence que pour sa
durée.
Au total, la concomitance de la baisse structurelle massive des
volumes de courrier et de taux d’intérêt durablement bas, à un niveau
inédit, crée un contexte particulièrement difficile et exigeant pour notre
Groupe.
Si ce contexte rend la transformation plus difficile, elle n’en est
que plus indispensable.
La Poste - décembre 2016
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RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS ET DES ORGANISMES CONCERNÉS
237
Transformer La Poste, c’est préserver ses valeurs et ses missions
de service public, qui en font l’entreprise considérée par les Français
comme la plus utile au pays, et pour cela les adapter et les moderniser.
Transformer La Poste, c’est engager les adaptations nécessaires,
grâce à un dialogue social permanent et à un accompagnement des
postiers, permettant d’en faire les acteurs et les bénéficiaires du
changement.
Transformer La Poste, concrètement, c’est la rendre moins
sensible à la baisse des volumes du courrier, et pour cela ramener la part
du courrier traditionnel dans le chiffre d’affaires du Groupe à moins de
20 % d’ici 2020.
C’est là l’indicateur clé de la transformation du Groupe et ce sera
une marque du succès du projet stratégique « La Poste 2020 : conquérir
l’avenir », qui va transformer La Poste et en faire la première entreprise
de proximité humaine en France.
Il s’agit donc d’opérer un changement de modèle à partir du
champ d’activités du Groupe déjà diversifié par mes prédécesseurs.
Suivant des parcours différents, de telles transformations ont été
réussies par d’autres postes. Ainsi les postes japonaise, allemande et
italienne
ont-elles
construit
et
stabilisé
de
nouveaux
modèles
stratégiques.
2. La priorité stratégique absolue du développement
Pour mener à bien la transformation, il y a une priorité stratégique
absolue : le développement.
En effet, seul le développement permettra de transformer le
Groupe, de diversifier son modèle d’activités, de lui donner les moyens de
l’adaptation de ses moyens, de l’accompagnement des postiers et de la
modernisation de ses missions.
Le développement, c’est d’abord celui de toutes ses activités
actuelles, en répondant aux nouvelles attentes des marchés et des clients,
en innovant, en complétant les offres par des acquisitions et des
partenariats.
C’est ensuite une stratégie numérique pleinement intégrée à la
stratégie du Groupe.
C’est enfin une diversification ambitieuse et maîtrisée.
La Poste développe toutes ses activités actuelles, en répondant aux
nouvelles attentes des marchés et des clients.
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C’est le cas pour l’activité du colis : le développement du e-
commerce est une chance pour le Groupe La Poste, qui entend être
présent sur l’ensemble des segments de marché du colis afin de faire face
à une forte concurrence. En cela, les offres de Chronopost et Colissimo
(ex-ColiPoste) sont complémentaires et non concurrentes, Chronopost
occupant le secteur « premium » tandis que Colissimo propose une offre
standard compétitive. Cette dualité permet au Groupe La Poste d’être
l’opérateur européen ayant gardé la plus forte part de marché sur le
marché domestique du colis. Elle s’accompagne évidemment de la
recherche de synergies entre les entités du Groupe.
Cette réussite s’appuie aussi sur de nombreuses innovations :
« Predict » (à savoir la fixation d’un créneau de livraison court auprès
du client), l’expédition de colis à partir de la boîte aux lettres du
particulier, le choix enrichi des modes de retrait des colis (domicile,
bureau de poste, point Pick-up, consignes…).
C’est le cas de l’activité courrier : le constat d’une baisse
structurelle forte et brutale des volumes de courrier n’entrave pas la
capacité de proposer des offres innovantes et enrichies, par exemple la
Lettre Recommandée Electronique, l’offre dédiée aux professionnels, la
gamme renouvelée de marketing direct, ou le développement d’une offre
internationale, notamment grâce à Asendia, co-entreprise fondée avec la
poste suisse.
C’est le cas de l’activité colis-express en Europe : si GeoPost peut
apparaître comme une fédération de sociétés, c’est le reflet d’une
stratégie et d’une méthode de croissance externe patiente, économe, mais
aussi ambitieuse et persévérante, qui a permis à GeoPost de bâtir, en une
quinzaine d’années, sans accident industriel ou financier notable, le
second réseau européen de colis-express. Désormais, après avoir
consolidé ses parts de marchés domestiques, l’effort se porte sur le
développement des flux transfrontaliers, avec une croissance à deux
chiffres et une rentabilité solide. Ainsi, GeoPost a l’ambition de devenir
le premier réseau européen routier du colis-express.
C’est évidemment le cas de l’activité bancaire. La Banque Postale
se structure et étend son offre, avec les prêts aux collectivités locales,
marché sur lequel La Banque Postale est devenue en quelques années un
leader, avec le renforcement des activités de financement, avec le
lancement d’une offre aux entreprises et aux professionnels, avec la
complétude de gamme en matière d’assurance, que ce soit l’assurance
dommage ou l’assurance vie.
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La Poste accompagne le développement de La Banque Postale et
lui en donne les moyens.
Le développement, c’est aussi une stratégie numérique qui a
vocation à soutenir l'ambition du Groupe. L'ambition est d'utiliser le
levier numérique pour accélérer la transformation et le développement du
chiffre d'affaires aux bornes du Groupe.
La stratégie numérique est transversale, elle implique l'ensemble
des Branches, la Branche Numérique en étant l'orchestrateur. Elle
permet en effet d'améliorer la reconnaissance et la connaissance du
client à travers un identifiant unique intitulé La Poste Connect, enjeu
majeur d’ailleurs souligné par la Cour.
Elle
permet
également
de
consolider
des
infrastructures
numériques transversales au sein du Groupe (telles que laposte.fr, La
Poste Connect, Digiposte+, le hub numérique…) pour accélérer le
développement commercial des Branches, autre enjeu essentiel.
Enfin, la Branche Numérique développe de nouvelles offres
numériques - au premier rang desquelles Digiposte+, le coffre-fort
électronique de La Poste, qui la positionne comme tiers de confiance
numérique - et soutient la politique de croissance externe du Groupe.
Le développement, c’est enfin une stratégie de diversification
ambitieuse et maîtrisée.
La Poste croit au développement des services de proximité
humaine, s’appuyant sur ses réseaux de proximité physique, numérique et
mobile, notamment son réseau de facteurs. La Poste assume d’avoir, lors
d’une phase initiale en 2014, lancé un grand nombre d’expérimentations,
tout en menant en parallèle des études de marché pour évaluer le
potentiel des différents marchés qu’elle souhaitait investir ou faire
émerger. A partir de 2015, ont été priorisées les actions de
développement, ce qui a conduit en fin d’année à la création d’équipes
dédiées en charge de développer chacune un chiffre d’affaires supérieur
à 10 M€ sur un marché précis. Dans le domaine des services rendus par
les facteurs, le chiffre d’affaires est passé de 5 M€ en 2014 à 20 M€ en
2015 et atteindra 40 M€ dès 2016.
Dans le même esprit, La Poste entend devenir un acteur majeur de
la « Silver economy », en étant intégrateur et opérateur des services de
proximité : la prise de participation majoritaire dans Axeo Services, un
des premiers réseaux privés de services à la personne, confirme cette
ambition.
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Ce bouquet de services s’étoffe avec le déploiement sur l’ensemble
du territoire de l’offre « Ardoiz », la tablette des seniors, et le lancement
de « Veiller sur mes parents », une offre de services combinables sur
abonnement, agrégeant à partir de la visite régulière du facteur des
offres de téléassistance et d’assistance, d’urgence ou de dépannage.
La Poste entend également développer fortement La Poste Mobile,
lancée en 2011, qui est déjà une diversification réussie. En peu d’années
et dans un marché extrêmement concurrentiel, La Poste Mobile atteint
200 M€ de chiffre d’affaires et a conquis 1,4 million de clients,
participant ainsi de la dynamique commerciale du Réseau.
GeoPost met en oeuvre cette stratégie de diversification, à un
double titre.
GeoPost d’une part a engagé l’extension progressive de son
réseau, en Russie, en Turquie, en Chine, en Inde, en Afrique du Sud…
Ceci est indispensable pour profiter pleinement de la vague de croissance
du e-commerce mondial.
GeoPost innove d’autre part en France avec de nouvelles activités,
comme la prise de contrôle de Resto-in, la prise de participation dans
Stuart, opérateur de courses urbaines urgentes, le lancement de
Chronofresh (transport alimentaire), afin de proposer à ses clients l’offre
la plus riche possible.
La Banque Postale a engagé la création d’une offre omnicanale et
réfléchit au lancement d’une banque purement digitale.
En synthèse, la priorité absolue donnée au développement depuis
trois ans se traduit déjà dans les activités du Groupe, dans sa
transformation digitale, dans sa diversification.
Le recours à la croissance externe, déjà engagé, va s’accélérer.
Il s’agit là de la seule voie possible pour transformer le Groupe
avec l’objectif de le pérenniser, dans sa structure, dans ses missions,
dans ses valeurs.
Les actionnaires de La Poste, l’Etat et la Caisse des Dépôts
soutiennent cette stratégie et ont accepté de limiter le montant des
dividendes versés durant les premières années du plan stratégique.
L’accélération de la diversification du Groupe, pour ramener la part du
chiffre d’affaires du courrier traditionnel à 20 % du chiffre d’affaires
global et stabiliser son modèle stratégique, nécessitera, au-delà de la
mobilisation
financière
des
moyens
de
La
Poste,
un
soutien
complémentaire de ses actionnaires.
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3. L’accélération du développement et la nécessaire poursuite de
l’adaptation
des
moyens
et
des
organisations,
grâce
à
l’accompagnement et à l’engagement des postiers
La Cour souligne que La Poste a « engagé une maîtrise des
charges », mais appelle à « renforcer cet effort ». La Poste partage cette
appréciation, mais tient à ajouter que, comme en matière de
développement, ceci n’est possible que si les postiers sont les acteurs et
les bénéficiaires de la transformation, ce qui suppose un fort
accompagnement des évolutions et un dialogue social ouvert et
permanent.
Depuis plusieurs années, La Poste a engagé les réorganisations
industrielles, les adaptations de processus et les réductions d’effectifs
nécessaires à sa pérennité. La Poste a également mis en place dès 2013 -
ce que reconnaît la Cour -, l'ensemble des leviers disponibles afin de
maîtriser sa masse salariale.
Elle travaille par ailleurs à l’adaptation de son réseau de bureaux
de poste, en développant les partenariats, à la satisfaction de l’ensemble
des parties prenantes, et elle a fortement rapproché le management du
Réseau de celui de La Banque Postale. La Poste partage avec la Cour la
nécessité de poursuivre la transformation du Réseau La Poste en zone
rurale, notamment grâce au développement des maisons de services au
public et à l’implantation des facteurs-guichetiers, ainsi qu’en zone
urbaine.
Le Groupe a aussi franchi une nouvelle étape d’adaptation de ses
réseaux logistiques, notamment grâce au rapprochement de son activité
Courrier et de son activité Colissimo. Ces premiers mouvements de
réorganisation conjugués au développement commercial ont d’ailleurs
contribué à compenser la baisse des volumes, les hausses tarifaires
n’ayant pas été le seul vecteur de résistance des résultats de la Branche
Services-Courrier-Colis. Pour poursuivre ces efforts, le Groupe a
formalisé la recherche de synergies entre les réseaux logistiques à
travers un ambitieux schéma directeur industriel de la Branche Services-
Courrier-Colis.
Enfin, s’agissant de la rationalisation de ses coûts de structure, de
services supports et de siège, La Poste a mis en place un programme
important, intitulé « Servir le développement », dont la première étape a
été le déménagement et le regroupement de l’ensemble des sièges.
Ces efforts d’adaptation des organisations et de réduction des
charges sont indispensables et seront poursuivis.
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Pour que cette exigence puisse être menée à bien, certaines
conditions doivent être réunies.
Il convient tout d’abord de déployer une méthode de conduite de
changement transparente, coopérative et équitable. Cette méthode a été
précisément décrite, a donné lieu à des formations et sa mise en oeuvre est
l’objet d’un suivi attentif.
Il faut un management exemplaire, attentif, proche. La Poste,
entreprise qui réunit plusieurs dizaines de milliers de managers,
s’attache à ce que cela soit toujours et partout le cas.
Il faut un accompagnement à la hauteur des enjeux, d’où le
doublement durable de l’effort de formation, manifeste par exemple à
travers la création de l’Institut du Management et de l’Ecole de La
Banque et du Réseau.
Enfin,
la
poursuite
d’une
politique
sociale
ambitieuse
accompagnée de pratiques de négociations et d’un dialogue social
permanent est nécessaire.
C’est pourquoi je rencontre chacune des organisations syndicales
représentatives deux fois par an pour un tour d’horizon stratégique large
et documenté. C’est ainsi que sont régulièrement signés des accords
nationaux majoritaires, dont le plus emblématique est l’accord « un
avenir pour chaque postier » de février 2015, qui donne un cadre social
au déploiement du projet stratégique, et chaque année plus de mille
accords locaux. Force est de constater qu’au-delà de tensions ponctuelles
et de difficultés réelles, inévitables dans une communauté humaine de
plus de 250 000 personnes soumise à une exigence de profonde
adaptation, la conflictualité se situe depuis quelques années à un niveau
limité.
L’accélération du développement, l’adaptation des moyens, comme
la réduction des charges passent par cet engagement des postiers, qui
repose sur leur accompagnement et le dialogue social.
4. Une adaptation et un enrichissement des missions de service
public
La bonne exécution des missions de service public est une raison
d’être de La Poste et un moteur essentiel de l’engagement des postiers.
Le respect des objectifs de qualité de service assignés à La Poste
mobilise notamment jour après jour ses équipes. Les résultats obtenus
par La Poste en matière de qualité de service sont en progression et
garantissent l’atteinte des objectifs réglementaires, eux-mêmes de plus en
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243
plus exigeants, qui s’inscrivent dans une trajectoire pluriannuelle
déterminée par le contrat d’entreprise et surveillée par l’ARCEP. Au-
delà, La Poste s’est engagée dans la recherche d’une qualité totale, dans
toutes ses activités, à la hauteur de l’exigence des clients d’aujourd’hui
envers une entreprise de services.
La Cour appelle à « actualiser le contenu des missions de service
public de La Poste », « résultat d’une histoire et qui doivent pouvoir
évoluer ».
La Poste partage ce constat et ce souhait, qui ne doit toutefois
laisser place à aucune ambigüité : La Poste n’appelle pas à la
suppression de ces missions, qui sont répétons-le une raison d’être et qui
sont utiles à la société tout entière.
Nous avons ainsi engagé des programmes prioritaires visant à ce
que les postiers contribuent à des défis sociétaux contemporains, comme
la transition énergétique, la modernisation de l’action publique,
l’inclusion numérique… Nous avons également mené à bien un
programme de création en moins de deux ans de 500 maisons de service
au public partout sur le territoire.
Pour autant, face aux mutations des usages et des outils
qu’entraîne la transformation numérique de toute la société, il est
légitime et opportun de réfléchir à une actualisation du contenu, des
modalités d’exécution et de la soutenabilité économique de chacune de
nos missions, notamment au travers de la compensation de leur coût, afin
que La Poste demeure une entreprise appréciée de tous et utile à la
société. Il appartiendra aux Pouvoirs publics et à La Poste d’engager
cette actualisation lors de la discussion en 2017 du prochain contrat
d’entreprise, en associant les citoyens, les clients, et bien entendu le
Parlement.
Dans un contexte très exigeant (chute des volumes du courrier,
taux d’intérêt bas), La Poste confirme pleinement sa volonté de
transformation avec pour objectif, à l’issue de son projet stratégique « La
Poste 2020 : conquérir l’avenir », de devenir la première entreprise de
proximité humaine du pays.
Le développement et la diversification forment une priorité
absolue,
que
ses
actionnaires
soutiennent
et
seront
amenés
à
accompagner.
La Poste entend poursuivre ses efforts d’adaptation et de réduction
des charges. La Poste partage le souhait d’une adaptation concertée de
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244
ses missions de service public, de leurs modalités d’exécution et de
compensation dans le cadre de la révolution numérique.
Enfin, la réussite de ces actions passe par l’engagement des
postiers et la poursuite d’une politique sociale ambitieuse ainsi que d’un
dialogue social ouvert et permanent.
Compte tenu de son ampleur, la transformation de La Poste
demande du temps et exige une constance dans l’effort.
Elle aura réussi si en 2020 le nouveau modèle stratégique repose
sur des métiers rentables et en croissance avec une part du courrier
traditionnel dans le chiffre d’affaires inférieure à 20 % ; si les postières
et les postiers sont fiers de leur entreprise et se sont engagés avec
confiance dans les évolutions de leurs métiers ; si, parce qu’elle est au
service de la société tout entière, ses clients la considèrent comme la
première entreprise de proximité.
RÉPONSE DU PRÉSIDENT DE L'AUTORITÉ DE RÉGULATION
DES COMMUNICATIONS ÉLECTRONIQUES ET DES POSTES
(ARCEP)
À travers ce rapport, la Cour réalise une revue de la stratégie du
groupe La Poste et de sa politique de transformation. Je tiens à souligner
la qualité et l’utilité de ces travaux.
L’Arcep n’exerce aucune fonction de tutelle sur le groupe La Poste
mais principalement un contrôle, tant en termes de prix que de qualité,
des prestations de service universel postal assurées par sa maison-mère.
Pour ce faire, l’Arcep s’appuie sur les résultats de la comptabilité
réglementaire de La Poste, dont elle spécifie les règles et en fait contrôler
la mise en oeuvre. L’Arcep assure également une fonction d’évaluation du
coût de l’obligation, qui relève du service public et non du service
universel, de La Poste en matière d’aménagement du territoire. Par
ailleurs, l’Arcep a été sollicitée en 2015 par le ministre chargé de
l’économie sur la correcte allocation des coûts à l’offre de transport et de
distribution de la presse, offre qui relève également des seules obligations
de service public de La Poste.
Ainsi, si l’Autorité n’entend pas intervenir sur la politique du
groupe, elle a, à travers les différentes fonctions qu’elle exerce,
développé une expertise économique sur les activités postales de La Poste
et, plus indirectement, sur les enjeux qui s’attachent à l’équilibre
économique du groupe.
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La Cour relève ainsi avec raison l’importance des enjeux auxquels
La Poste fait face du fait de l’accélération de la baisse des volumes de
courrier ce qui lui impose, à la fois, une adaptation rigoureuse de ses
charges et le développement de nouvelles activités. L’Arcep a eu
l’occasion de faire ce constat lors des travaux menés en 2014 avec La
Poste, travaux qui ont abouti à la fixation de l’encadrement pluriannuel
des tarifs des prestations de service universel postal pour les années 2015
à 2018. Ce dispositif plafonne l’augmentation annuelle moyenne des
tarifs du service universel sur la période à l’inflation + 3,5 %, sous
l’hypothèse d’une baisse moyenne annuelle des volumes de 6,3 %. Les
échanges menés alors avec La Poste permettent de considérer que ce
dispositif devrait assurer, sur cette période, le maintien de l’équilibre
économique du service universel postal, moyennant une adaptation
rigoureuse de ses charges. Les résultats 2015 observés à l’été 2016 à
l’occasion du rendez-vous à mi-parcours prévu par la décision
d’encadrement tarifaire confirment cette trajectoire. Naturellement, il est
crucial pour La Poste de maintenir cette bonne maîtrise des charges sur
les années à venir.
La Cour souligne également l’importance des charges de service
public de La Poste. Elle relève que « L’ARCEP pourrait utilement
produire une évaluation annuelle exhaustive du coût des missions de
service public ».
L’Arcep est d’accord sur cette suggestion, cohérente avec sa
volonté, exprimée lors de sa revue stratégique, d’assurer un rôle de tiers
de confiance au service de l’Etat et des autorités de concurrence. Elle a
d’ailleurs engagé avec La Poste des échanges en vue d’améliorer la
qualité et la pertinence de l’information économique issue de la
comptabilité réglementaire de La Poste.
RÉPONSE DU DIRECTEUR GÉNÉRAL DU GROUPE CAISSE DES
DÉPÔTS ET CONSIGNATIONS
Je partage l’appréciation de la Cour sur la capacité d’adaptation
de La Poste, qui a su historiquement transformer son modèle économique
avec le développement de services financiers et de l’activité de colis
express afin de compenser la baisse de revenus du métier de distribution
du courrier. Ces évolutions, et comme le rapport le souligne, l’ouverture
du capital à laquelle la Caisse des Dépôts a participé, ont permis à La
Poste de résister à date à une conjoncture défavorable et de consolider sa
structure financière.
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Comme le relève la Cour, des fragilités persistent. Elles
constituent des points de vigilance pour les actionnaires, qui s’assurent à
travers leur participation à la gouvernance de la société que des plans
d’actions sont mis en oeuvre par la direction de La Poste pour y faire
face. S’agissant de la réalisation des trajectoires financières associées
aux plans stratégiques, je partage le constat que les trajectoires
financières de La Poste et leur révision fréquente reflètent les chocs
économiques et réglementaires majeurs auxquels le Groupe a été
confronté durant cette période, ainsi que la difficulté de l’entreprise à les
anticiper et à transformer son modèle économique pour y faire face.
Les objectifs fixés à moyen terme, notamment dans le cadre de la
trajectoire financière « La Poste 2020 » restent, comme le rapport
l’indique, particulièrement ambitieux. Ce choix de La Poste démontre une
volonté de transformer le modèle économique du Groupe et d’activer
l’ensemble des leviers disponibles (réduction des coûts, évolution du
réseau, développement des branches, …) pour retrouver des niveaux de
résultat d’avant crise. Les incertitudes sur la capacité des leviers
mobilisés par La Poste pour répondre aux enjeux sont fortes, alors que
l’environnement, notamment de taux d’intérêts, est défavorable au
Groupe.
Dans ce contexte, je partage les constats et recommandations de la
Cour quant à la nécessité de poursuivre et d’accélérer les réformes. La
maitrise des charges et la nécessaire adaptation des métiers, tout en
maintenant, et c’est primordial, un dialogue social de qualité, doivent
demeurer une priorité et la poursuite de la transformation du réseau
constitue à ce titre un enjeu important.
La recherche de relais de croissance pour atteindre les ambitions
du Groupe nécessite de maintenir des investissements importants. Comme
le rapport le souligne, les actionnaires ont démontré leur volonté
d’accompagner le Groupe dans la nécessaire transformation de son
modèle
économique,
en
appuyant
notamment
la
stratégie
de
développement de Geopost à l’international. La Cour recommande de
formaliser un cadre stratégique et financier relatif à la croissance
externe du Groupe La Poste. La Poste devra en effet continuer, au regard
de ses contraintes financières, à se montrer sélective dans ses
acquisitions et dans la diversification de ses activités, en sélectionnant
des projets présentant un potentiel de développement et cohérents avec
les différentes activités du Groupe.
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