L’absence de véritable pilotage stratégique
La Ville de Paris emploie près de 52 300 agents. Si l’évolution de ses effectifs a été stable depuis 2010 (+1%), la masse salariale a en revanche augmenté de façon significative (+12%).
Les dépenses de personnel s’élèvent au total à 2,16 Mds €. Les contraintes budgétaires actuelles en font un levier majeur de maîtrise des charges de fonctionnement et devraient conduire la Ville à développer une culture de l’évaluation et de la prospective.
Or, le système d’information existant des ressources humaines hiérarchisant en fait très peu les priorités, la Ville se trouve dépourvue d’une programmation pluriannuelle solide.
La gestion des personnels étant largement décentralisée au sein de chaque direction, la répartition des compétences entre la DRH et le service ressources humaines de chaque direction mérite d’être formalisée par des contrats de service. En outre, le contrôle interne doit être renforcé pour garantir le respect des règles de gestion et fiabiliser les données. Les résultats obtenus par le « service de la synthèse et de la prospective » (SSP), chargé du contrôle de gestion sociale, doivent être évalués.
Si plusieurs outils destinés au pilotage des ressources humaines ont été déployés, la Ville ne dispose toujours pas de tableaux de bord adaptés. Les documents retraçant la performance de la gestion des ressources humaines sont ainsi très perfectibles (bilans sociaux, états du personnel) comme l’est le répertoire des métiers.
Le manque de transparence dans les perspectives pluriannuelles
Si la Ville affiche, pour la période 2012-2014, une maîtrise de sa masse salariale (+ 4,61%), l’augmentation serait en réalité de 6,59% à périmètre constant. En effet, au cours de la période 2012-2014, deux « débudgétisations » importantes d’effectifs sont intervenues avec le transfert d’agents de la Ville au centre d’action sociale de la Ville de Paris (CASVP) et à Paris Musées. Le conseil de Paris doit donc être en mesure de suivre l’évolution de la masse salariale à au moins à trois ans et à périmètre constant.
Les délibérations « emplois » du conseil de Paris, qui valident les créations et les suppressions annuelles d’emplois présentent seulement aux élus des flux en omettant de chiffrer les effectifs qui en résultent. Ces délibérations doivent donc non seulement faire figurer le grade et l’emploi, mais aussi l’impact financier de ces flux. En outre, malgré ces délibérations, des dépassements ont été constatés par rapport aux recrutements autorisés.
Le cadre statutaire applicable aux agents est peu lisible car les statuts évoluent « au fil de l’eau » au gré des modifications successives. Cette pratique affaiblit le pouvoir délibérant du conseil de Paris et prive, de fait, le grand public d’un accès facile aux statuts consolidés des agents parisiens. L’information sur les statuts doit être sensiblement améliorée par la publication des délibérations et des arrêtés consolidés.
Si le contenu du bilan social connaît une amélioration, il n’est pas adapté aux dispositions réglementaires en vigueur, ce qui limite la comparabilité des informations.
Des aménagements du temps de travail dérogatoires, complexes et coûteux
La réglementation en matière de temps de travail n’est pas respectée et de nombreux protocoles aménagent en outre la durée annuelle, entraînant un surcoût qui peut être chiffré au minimum à 74 M€.
Le temps de travail annuel de référence est de l’ordre de 1 552 heures, ce qui est très inférieur à l’obligation de 1 607 heures annuelles. L’application de la loi sur la réduction du temps de travail à Paris a maintenu un avantage particulier de 8 à 9 jours de congés de plus par an, même si, fort récemment, le jour « fête des mères » a été supprimé.
Ce temps de travail annuel, qui s’écarte sensiblement de la loi, est réduit plus encore, dans certains cas particuliers, sous l’effet de quelque 138 délibérations différentes.
Des marges d’économies substantielles
Une revue générale des coûts salariaux est nécessaire au vu, notamment, de la progression de certaines fonctions transversales (cabinet de la maire, direction de la communication, secrétariat général). Les redéploiements, qui n’ont pas atteint les résultats escomptés, doivent être complétés par d’autres mesures (suppression des doublons, mutualisation de services).
La Ville de Paris compte aujourd’hui 63 corps de fonctionnaires et 23 statuts d’emplois fonctionnels. Une simplification est indispensable, en particulier par le regroupement de corps fortement spécialisés.
La Ville pourrait aussi économiser 3 M€ par an en remettant en cause simplement la pratique actuelle qui est d’accorder la totalité de leurs congés annuels aux agents partant en retraite sans tenir compte de la date de départ (par exemple, en début d’année).
La remise à plat du régime des rémunérations accessoires constitue un chantier incontournable, comme celui des nouvelles bonifications indiciaires. En effet, les crédits du système indemnitaire ont augmenté plus vite que les effectifs et la masse salariale. Le pilotage global ne s’applique pas à l’attribution des primes qui n’est pas, non plus, articulée avec l’évaluation individuelle des agents.
La décentralisation de la gestion des logements de fonction s’est traduite par des ruptures d’égalité entre agents. L’emploi des indemnités pour frais de représentation des élus est, par ailleurs, insuffisamment contrôlé.