Le SDIS de l’Isère (SDIS 38) est classé en catégorie A (sur trois catégories) du fait de l’importance de la population du département. Le territoire isérois est caractérisé par sa superficie (10ème département en métropole), ses espaces montagneux, une forte activité touristique hivernale et la présence de risques technologiques.
L’activité du SDIS 38 est en croissance entre 2017 et 2021 avec une augmentation de 7 % du nombre d’interventions essentiellement portée par la hausse des aides à la personne qui représentent près de 80 % du total des interventions en 2021.
Afin d’atteindre les objectifs fixés par le schéma départemental d’analyse et de couverture des risques (SDACR), outil d’orientation stratégique du SDIS, ce dernier a fait le choix d’un regroupement de ses casernes (112 au 1er janvier 2022) en 21 unités territoriales. Cette organisation permet une souplesse de gestion accrue et des économies de moyens, qui sont affectées à l’échelle d’un groupe de plusieurs casernes, et non plus par caserne.
Toutefois, plusieurs indicateurs mesurant la réponse opérationnelle du SDIS 38 se sont dégradés entre 2017 et 2021 ou restent à des niveaux élevés :
• les temps d’intervention ont augmenté pour une majorité de casernes ;
• les taux de transfert d’une demande d’intervention de la caserne normalement en charge de l’intervention vers une autre plus éloignée mais pouvant assurer une réponse plus rapide sont en croissance ;
• les départs en intervention d’équipages incomplets (plus de 5 % en 2021).
Entre 2017 et 2021, la croissance du nombre d’interventions (+ 7 %) et l’évolution des effectifs de sapeurs-pompiers professionnels (+ 1,1 % d’emplois supplémentaires pourvus) sont décorrélées, notamment en raison de difficultés de recrutement.
Le SDIS 38 doit donc interroger son organisation par grandes unités à la lumière de ces indicateurs et veiller à se prémunir d’un décrochage trop important entre activité et effectifs mobilisables, afin de ne pas compromettre la qualité de sa réponse opérationnelle.
L’organisation du travail en gardes postées de douze heures est un système efficient quasiment généralisé au SDIS 38. Le seuil des 1 607 heures de travail annuel prévu par la loi n’est pas atteint du fait d’un régime de gardes allégé pour les agents de plus de 50 ans et de crédits d’heures accordés forfaitairement sans service fait. Le régime indemnitaire présente aussi plusieurs irrégularités, comme le versement d’une prime annuelle juridiquement infondée.
Par ailleurs, même si le niveau de féminisation des effectifs de sapeurs-pompiers professionnels et volontaires du SDIS 38 (22 % en 2020) est supérieur à celui de la moyenne nationale (19 %), l’établissement n’a pas défini de politique en la matière, alors que le développement de la féminisation des effectifs des SDIS est un objectif promu nationalement.
La prise en charge des risques psycho-sociaux pourrait être améliorée en accélérant la mise en œuvre du plan de prévention adopté en 2017. Par ailleurs l’organisation largement déconcentrée de l’établissement conduit à des gestions très différentes et une difficulté à partager les orientations fixées par l’état-major, notamment en matière de règles d’hygiène et sécurité.
L’organisation de la sécurité civile française s’appuie fortement sur le volontariat : en Isère, les sapeurs-pompiers volontaires représentent les deux tiers des effectifs engagés dans les interventions et 17 % de la masse salariale. Le SDIS 38 a entrepris une réflexion, encore inaboutie, sur le contrôle du respect du temps de repos de ses collaborateurs à la lumière de la jurisprudence européenne.
Le patrimoine immobilier du SDIS 38, important et vieillissant, constitue son premier poste d’investissement et un enjeu pour la maitrise de ses charges de fonctionnement. L’établissement public n’a pas tiré toutes les conséquences de l’audit immobilier réalisé en 2017 et malgré quelques opérations particulièrement qualitatives (notamment pour leur qualité d’isolation thermique), la démarche de programmation reste largement inaboutie et le rythme des rénovations/constructions nouvelles doit être accéléré. La recherche d’économies d’énergie doit amener à systématiser les évaluations des coûts de fonctionnement induits pour tous les projets immobiliers.
La situation financière du SDIS 38, malgré des soldes de gestion en baisse depuis 2017, reste solide. Le niveau de son fond de roulement lui permet de financer une partie de ses futurs investissements (notamment immobiliers). La part prépondérante des dépenses de personnel, caractéristique commune à l’ensemble des SDIS, appelle une vigilance particulière sur ce poste de dépenses. Le SDIS dispose pour cela de quelques possibilités non encore exploitées pour mieux encadrer l’évolution de ses charges de personnel en développant des mutualisations avec le département de l’Isère et en ajustant son organisation (diminution du nombre de groupements dans son organisation interne).
La gestion du système d’information, est répartie entre deux services dont un chargé d’accompagner la gestion opérationnelle. Cette organisation implique une transversalité forte entre les services et une plus grande stabilité des effectifs, deux points non encore acquis par l’établissement.
Le SDIS 38 doit enfin améliorer sa sécurité informatique en se dotant d’une politique de sécurité des systèmes d’information (PSSI).
RECOMMANDATIONS
Sur l’activité opérationnelle :
- Recommandation n°1 : établir et adopter un plan d’équipement conforme aux attendus de l’article L. 1424-12 du CGCT.
- Sur la gestion des ressources humaines :
- Recommandation n°2 : mettre en œuvre un temps de travail annuel égal à 1 607 heures pour tous les agents.
- Recommandation n°3 : mettre fin au versement irrégulier de la prime de fin d’année.
- Recommandation n°4 : formaliser une procédure de gestion transparente des recrutements en l’appliquant dès les prochaines candidatures.
- Recommandation n°5 : généraliser la réalisation des documents uniques relatifs à l’évaluation des risques professionnels (DUERP) à chaque site de travail et appliquer le code du travail et le règlement intérieur en ce qui concerne la présence d’alcool.
- Recommandation n°6 : mettre en conformité les locaux au regard des dispositions du code du travail.
- Recommandation n°7 : adopter un règlement intérieur des casernes commun.
Sur la gestion immobilière :
- Recommandation n°8 : préparer et faire adopter une programmation pluriannuelle des investissements comprenant le volet immobilier.
- Recommandation n°9 : intégrer systématiquement une évaluation des coûts de fonctionnement et notamment des consommations énergétiques dans les études de faisabilité.
- Sur la gestion financière :
- Recommandation n°10 : formaliser les relations financières entre le SDIS 38 et le conseil départemental de l’Isère conformément à l’article L. 1424-35 du CGCT.
Sur les systèmes d’information :
- Recommandation n° 11 : mettre en place une PSSI et la communiquer à l’ensemble des parties prenantes.
- Recommandation n°12 : mettre en place un plan de reprise de l’activité (PRA) complet et formaliser les tests associés sur les deux sites.