La métropole de Lyon se caractérise par un habitat urbain particulièrement dense qui regroupe près de 90 % de la population et de la production des déchets de son territoire. Cette particularité rend complexe l’atteinte des objectifs nationaux déclinés au niveau régional si bien que la métropole n’est elle-même pas totalement en mesure de les atteindre.
Avant même que les plans locaux de prévention des déchets ménagers et assimilés (PLPDMA) n’aient été rendus obligatoires en 2012, le Grand Lyon s’est doté, dès 2010, d’un plan de lutte et de prévention des déchets. Sur la période 2010-2015, il a permis une réduction de 7 % des tonnages des ordures ménagères et assimilés (OMA), alors même que la population augmentait de 6,35 %.
Le PLPDMA, qui lui a succédé pour la période 2019-2024 comporte plusieurs divergences importantes avec le plan de gestion des déchets de la région Auvergne-Rhône-Alpes. Les élus métropolitains ont approuvé le plan régional mais ont émis des réserves quant aux objectifs de réduction des déchets, qui leur paraissent trop ambitieux, eu égard notamment à la typologie de l’habitat métropolitain.
S’il est encore trop tôt pour faire un bilan du PLPDMA, en raison notamment d’un exercice 2020 marqué par la crise sanitaire et une dégradation générale des conditions de collecte et de tri, il est toutefois possible de formuler une première série de constats. Les objectifs fixés par la métropole en 2019 ont uniquement été atteints pour la collecte du verre. En revanche, aucune des cibles n’a été atteinte pour la collecte sélective, la collecte en déchèteries, la production d’ordures ménagères résiduelles et d’ordures ménagères et assimilés.
Les biodéchets, qui représentent à eux seuls près de 17 % des déchets ménagers et assimilés produits, ne font l’objet d’aucun suivi quantitatif. Il n’est donc pas possible, à partir des rapports annuels sur le prix et la qualité du service, ou des indicateurs de suivi du PLPDMA, d’en mesurer l’évolution, et par conséquent, de prendre les mesures correctives si nécessaire. Les analyses périodiques du contenu des bacs d’ordures ménagères tendent à démontrer la faible progression de la collecte sélective des biodéchets depuis près de dix ans.
De manière générale, plus de la moitié des indicateurs de suivi n’est pas renseignée, ce qui ne permet pas à la commission consultative d’élaboration et de suivi (CCES) de jouer pleinement son rôle.
Un peu moins d’un bac sur trois de collecte sélective fait l’objet d’un refus de collecte par les agents, et près d’un tiers des déchets arrivant en centre de tri fait l’objet d’un refus de tri. Ces performances ont tendance à se dégrader.
L’objectif national de valorisation matière de 75 % des emballages à fin 2012 était loin d’être atteint fin 2019. Les objectifs que la métropole s’est elle-même fixée à fin 2019 n’ont pas non plus été respectés, à l’exception de la collecte du verre.
Il ressort des enquêtes menées auprès des usagers qu’ils ont une image positive du service de collecte, mais également de fortes attentes en matière d’information et de prévention. Le budget consacré à la prévention des déchets entre 2015 et 2019 était compris entre 0,53 € et 1,14 € par an et par habitant. Un renforcement de ces actions paraîtindispensable. À défaut, la métropole risque de ne pas pouvoir atteindre ses propres objectifs.
L’amélioration des performances de tri conditionnera notamment certaines orientations stratégiques, comme le maintien de deux unités d’incinération des déchets, ou encore, la construction et l’exploitation de son propre centre de tri par la métropole. La viabilité économique de ce dernier projet est conditionnée par les orientations nationales concernant notamment la mise en place de la consignation de certains emballages.
La majorité de la collecte et du traitement des déchets est confiée à des entreprises privées, et ce, depuis la création de la communauté urbaine de Lyon le 1er janvier 1969. Le reste des prestations est réalisé directement par les services du Grand Lyon.
C’est en 2017 que la part confiée aux prestataires de collecte des déchets est devenue majoritaire, avec le transfert au secteur privé des opérations intéressant les communes de Bron, Tassin-la-Demi-Lune et Vaulx-en-Velin, soit 113 000 habitants. L’année 2017 a également été marquée par la fin du système de fini-parti, qui permettait aux agents de quitter le lieu de travail dès la fin de leur circuit. En plus d’être irrégulière en termes de temps de travail, cette pratique avait pour conséquence une dégradation de l’état de santé des agents et de la qualité du service rendu aux usagers, tout en générant un risque accru d’accidents.
L’accroissement de l’externalisation semble avoir permis une baisse du nombre des accidents du travail et de l’absentéisme. Elle n’a toutefois pas entrainé de baisse des dépenses d’intérim, malgré une réduction du périmètre resté à la charge de la régie.
Chaque cocontractant de la métropole est tenu de lui communiquer un rapport annuel, selon une trame et un contenu imposés par les contrats. Cette obligation n’est pas respectée par plusieurs d’entre eux et de nombreuses informations essentielles ne sont pas produites. Il n’est dès-lors pas possible de comparer les performances des prestataires entre eux, mais également avec la régie.
L’externalisation s’accompagne en outre d’une précarisation du personnel employé par les entreprises cocontractantes et une hausse de l’absentéisme. Les intérimaires peuvent y représenter jusqu’à un tiers des effectifs de collecte en moyenne et plus de la moitié à certaines périodes de l’année. Alors qu’ils sont soumis contractuellement à une obligation d’insertion professionnelle, les prestataires n’en rendent pas compte dans leurs rapports, ou très partiellement.
La métropole doit également veiller à la sécurité des opérations de collecte, notamment en prévenant la surcharges des véhicules de la régie et des prestataires, excessives dans de nombreux cas, et qui représentent un risque pour les agents, les usagers de la route, et les piétons.
La métropole de Lyon est par ailleurs confrontée à des procédures contentieuses récurrentes concernant la taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM). Ses budgets primitifs et les taux de la TEOM votés entre 2015 et 2018 ont été censurés par le juge administratif. La métropole a contesté ces décisions. Un budget annexe a été mis en place en 2020 et une baisse des taux de la TEOM a été décidée, entrainant une baisse des recettes de 20 M€ en 2019. Pour 2021, la métropole de Lyon a fait le choix de voter un taux unique, devant le risque d’annulation de ses taux différenciés selon la fréquence de ramassage et la nature du service (normal ou complet). La délibération correspondante a également fait l’objet d’un recours devant le tribunal administratif.
Tout dégrèvement prononcé à compter du 1er janvier 2019 serait à la charge exclusive de la collectivité, ce qui pourrait représenter plus de 100 M€ de charges exceptionnelles pour son budget.
RECOMMANDATIONS
- Recommandation n° 1 : Renforcer le pilotage du plan local de prévention des déchets ménagers et assimilés (PLPDMA), notamment par une mise à jour des indicateurs de suivi, et les suivre strictement en se dotant d’une base de données pérenne et comparable sur l’ensemble de la durée du plan.
- Recommandation n° 2 : Se rapprocher du fournisseur de système embarqué afin de résoudre les problèmes techniques de suivi de la collecte et de disposer de données fiabilisées et complètes.
- Recommandation n° 3 : Renforcer les contrôles des prestataires et assurer un même niveau de contrôle que celui réalisé sur la régie.
- Recommandation n° 4 : Contrôler le non dépassement de la charge utile des véhicules de collecte, y compris pour les prestataires.
- Recommandation n° 5 : S’assurer que les prestataires renseignent leurs rapports annuels d’activité, quelle que soit la nature de celle-ci (collecte, traitement), comme prévu aux contrats, en y intégrant les dépassements de charge utile des véhicules et les pénalités infligées.
- Recommandation n° 6 : Définir des données identiques pour les rapports d’activités annuels des prestataires, mais également pour la régie, notamment en matière d’intérim et d’absentéisme, afin de pouvoir les comparer.
- Recommandation n° 7 : Recueillir, tenir à jour et mentionner des données sur les biodéchets dans le rapport annuel sur le prix et la qualité du service.