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L'organisation territoriale de la Métropole du Grand Paris

COUR DES COMPTES

La Métropole du Grand Paris (MGP) regroupe 130 communes et la Ville de Paris, soit une population totale de plus de sept millions d’habitants. Le rapport publié ce jour par la Cour des comptes rappelle d’abord que la création de la MGP est le fruit d’une réforme ambitieuse engagée initialement pour remédier aux graves déséquilibres du territoire métropolitain. Cependant, après six ans d’existence, la métropole peine à s’affirmer dans l’exercice de ses missions les plus stratégiques. Depuis l’origine, sa capacité d’action est entravée par la complexité de son organisation institutionnelle et financière. Ce rapport s’efforce de tracer des perspectives de réforme visant à doter le Grand Paris d’institutions aptes à mener des politiques publiques à la hauteur des enjeux métropolitains.

Les missions de la MGP : une mise en œuvre insuffisante

Dotée d’une économie riche et puissante, la Métropole du Grand Paris regroupe la majorité des pôles économiques franciliens, notamment dans sa partie occidentale. Sa population connaît cependant d’importantes inégalités de revenus, de pauvreté ou de mal-logement : on y trouve le département où les revenus des ménages sont les plus faibles (Seine-Saint-Denis) et les deux départements (Paris, Hauts-de-Seine) où ils sont les plus élevés. Pour rééquilibrer le développement de son territoire, la loi a donné à la MGP des compétences obligatoires dans quatre grands domaines : l’aménagement de l'espace métropolitain, la politique locale de l'habitat, le développement et l'aménagement économique et socio-culturel, ainsi que la protection et la mise en valeur de l'environnement et la politique du cadre de vie. La Cour constate cependant que la MGP n’exerce pas pleinement l’ensemble de ces responsabilités.

L’organisation métropolitaine inadaptée à l’affirmation du rôle stratégique de la MGP

L’organisation territoriale de métropole du Grand Paris est le résultat d’un difficile compromis obtenu au sein du Parlement en faveur d’un système institutionnel singulier au regard des autres métropoles. Ainsi, la MGP résulte d’une organisation non pyramidale sur trois niveaux : chaque commune est membre à la fois de la MGP et d’un établissement public territorial (EPT), qui n’ont pas de relations institutionnelles entre eux. En comptant la région et les départements, ce territoire est couvert par au moins cinq niveaux différents d’administration locale, sans compter plusieurs grands syndicats mixtes ou intercommunaux.

Du fait de sa gouvernance, la MGP s’apparente à une « métropole des maires ». Siégeant à la fois au sein de la MGP et des EPT, ceux-ci sont au centre de l’organisation métropolitaine. Ce qui est paradoxal alors que les compétences majeures de la MGP concernent des domaines où les EPT sont compétents et non plus les communes. Or, le caractère très hétéroclite des communes rend difficile la construction d’une convergence des intérêts en matière d’aménagement urbain, de réponse aux besoins de logements ou de développement économique. Ainsi, la MGP n’est pas encore parvenue à arrêter son plan métropolitain de l’habitat et de l’hébergement (PMHH). En janvier 2022, elle a enfin arrêté un projet de SCoT (schéma de cohérence territoriale) mais, selon les services de l’État, celui-ci est insuffisamment prescriptif et territorialisé.

La MGP : un « nain budgétaire »

L’organisation institutionnelle retenue par le législateur engendre des flux financiers très complexes entre les trois niveaux de l’ensemble métropolitain et créée une compréhension très difficile pour les élus comme pour les citoyens. Surtout, elle laisse à la MGP des moyens propres qui paraissent très faibles au regard de ses ressources financières. En apparence, son budget est important (3,47 Md€ en 2020), mais est en réalité, il se révèle en « trompe l’œil » : la MGP reverse la quasi-totalité de ses ressources à ses communes membres sous la forme d’attributions de compensation, tandis que « budget propre » s’établit entre 50 et 100 M€ depuis sa création.

L’instauration des EPT peu propice au développement de l’intercommunalité à l’échelle des « territoires »

Les onze EPT disposent de compétences propres qui se rapprochent de celles des communautés d’agglomération. Cependant, les transferts de compétences par les communes sont variables et souvent inaboutis. Les EPT consacrent essentiellement leurs dépenses de fonctionnement et leurs dépenses d’investissement aux services urbains (déchets, eau et assainissement), à l’aménagement, la culture, les sports et la jeunesse. Mais ils disposent d’une faible latitude pour équilibrer leurs recettes et dépenses et sont donc très dépendants de leurs communes membres qui leur versent le fonds de compensation des charges territoriales - la plus importante de leurs ressources. De surcroît, les communes ont souvent retiré aux EPT leurs rares marges de manœuvre budgétaires.

La nécessité d’une réforme progressive mais ambitieuse de l’organisation territoriale

La Cour considère qu’une réforme de l’organisation territoriale du Grand Paris s’impose. L’impuissance de la métropole et sa déconnexion avec des EPT insuffisamment intégrés retardent en effet l’engagement de politiques pourtant prioritaires pour le territoire et ses habitants, sachant que l’évolution de leurs capacités d’intervention repose à ce jour sur des ressources financières qu’ils maîtrisent peu. Le calendrier d’une telle réforme doit tenir compte de l’avancement des projets engagés, notamment par les EPT (JO 2024, Grand Paris Express). Dès lors, trois principaux scénarios demeurent : la suppression des EPT et l’absorption de leurs compétences et ressources par la MGP, l’instauration d’une métropole dont les membres seraient la Ville de Paris et les EPT dotés du statut d’EPCI à fiscalité propre ou bien une réforme plus ambitieuse consistant à instaurer une métropole composée des départements de la petite couronne, qui absorberait les compétences des EPT.

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