Une offre de services mal définie et une qualité de service à améliorer
Les gares gérées par SNCF Gares et Connexions sont d’importance variable, des grandes gares parisennes, qui ont accueilli 5,5 M de voyageurs en 2018, aux 551 gares qui en ont accueilli moins de 3 650.
L’organisation existante souffre de trois faiblesses. Tout d’abord, le classement des gares en trois catégories (d’intérêt national, d’intérêt régional et d’intérêt local) traduit imparfaitement la spécificité des gares de chaque catégorie au regard leur activité, ce qui nuit notamment à la cohérence de la tarification. De plus, il n’existe aucun cahier des charges fixant la teneur et le niveau des services que Gares et Connexions doit offrir dans chaque catégorie de gares. De ce fait, l’offre effectivement proposée est très variable entre gares de même catégorie. Enfin, la qualité des services offerts par Gares et Connexions est prise en compte à travers des indicateurs en nombre limité, des objectifs peu contraignants et des incitations financières trop faibles. Ainsi, en 2019, les malus subis par Gares et Connexions à ce titre n’ont représenté que 325 500 €, soit 0,045 % des redevances perçues par l’entreprise.
Un modèle économique complexe et peu lisible pour les transporteurs
Le modèle économique de Gares et Connexions repose sur deux types de ressources : des ressources dites « régulées », correspondant aux redevances versées par les transporteurs ferroviaires pour chaque départ de train et dont le montant est fixé sous le contrôle de l’Autorité de régulation des transports (737 M€ de chiffre d’affaires en 2019) ; des activités dites « non régulées », constituées pour l’essentiel par l’attribution de concessions commerciales dans les gares (394 M€ de chiffre d’affaires en 2019). Ce modèle économique est censé permettre à l’entreprise de couvrir ses coûts d’exploitation et de financer ses investissements. Il souffre toutefois de plusieurs faiblesses qui nuisent à son efficacité.
Tout d’abord, la redevance facturée aux transporteurs varie fortement selon les régions et les catégories de gares. Cette hétérogénéité des tarifs, qui n’est pas justifiée par des différences dans les services offerts aux transporteurs, se traduit par des effets contre-productifs, en particulier pour les très grandes gares. De plus, la garantie d’une couverture de l’ensemble des charges de l’activité régulée par le produit de cette redevance n’est pas de nature à inciter SNCF Gares et Connexions à engager des efforts de productivité. Enfin, les transporteurs ne peuvent disposer d’une visibilité pluriannuelle sur l’évolution de la redevance, dont le montant a souvent fortement varié d’une année à l’autre au cours de la période récente.
Des ressources insuffisantes au regard des besoins d’investissements
En complément des subventions versées par les collectivités territoriales, la forte croissance des ressources non régulées a permis à Gares et Connexions de financer un volume d’investissements en nette hausse depuis 2014 (+ 40 %, 411 M€ en 2019). Mais les marges de progression de ces ressources sont désormais réduites, alors même que les besoins d’investissements vont continuer à croître, notamment en raison du transfert à Gares et Connexions de la gestion des quais, des passerelles d’accès et des grandes halles voyageurs depuis le 1er janvier 2020. L’entreprise prévoit ainsi d’investir plus de 1 Md€ chaque année entre 2020 et 2024.
Construit pour bénéficier aux transporteurs, le modèle actuel ne permet pas de couvrir ces besoins de financement : les transporteurs récupèrent en effet 50 % des bénéfices dégagés grâce aux activités non régulées (24 M€ reversés par Gares et Connexions en 2020), tandis que l’entreprise doit en absorber les déficits (66 M€ en 2020). Cette asymétrie limite structurellement la possibilité de dégager des ressources supplémentaires grâce aux activités non régulées. De plus, les marges de manoeuvre de l’entreprise en matière d’endettement sont faibles et le recours à des partenariats avec des financeurs privés pour financer de grands projets de développement a montré ses limites.
Au-delà d’une réforme qui viserait à adapter ce modèle économique, notamment en supprimant le mécanisme de rétrocession bénéficiant aux transporteurs, il est nécessaire que l’État assume ses responsabilités de propriétaire et mobilise les moyens budgétaires nécessaires à la modernisation des gares et au maintien en condition d’un patrimoine historique, qu’il a décidé de préserver. La négociation du contrat de performance entre l’État et l’entreprise est une occasion de définir une nouvelle stratégie pour financer le réseau des gares.