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L’épargne retraite

COUR DES COMPTES

L’épargne retraite permet d’économiser durant la vie active pour disposer de ressources venant ensuite compléter les sommes versées par les régimes de retraite obligatoire. Durant les années qui ont précédé la loi Pacte du 22 février 2019, le paysage français de la retraite supplémentaire était marqué par un faible dynamisme des souscriptions et des cotisations, malgré un régime fiscal favorable. La loi a permis de dynamiser la collecte grâce à une simplification et une homogénéisation des produits qui a clarifié le paysage de l’épargne retraite pour les adhérents : un seul produit générique est désormais offert, le Plan d’épargne retraite. La loi avait également pour objectif d’orienter davantage les placements vers le financement de l’économie productive.
L’évaluation réalisée par la Cour montre que les déductions fiscales dont bénéficie l’épargne retraite représentent un coût pour les finances publiques estimé à au moins 1,8 Md€ en 2022 (sans tenir compte de l’épargne retraite collective obligatoire), alors que ses objectifs demeurent ambigus, entre préparation de la retraite et épargne financière.   La Cour relève à cet égard une diffusion limitée dans la population et concentrée sur des bénéficiaires aisés et âgés. Enfin, l’effet spécifique de l’épargne retraite sur le financement de l’économie reste faible car elle ne se différencie pas clairement, sur les placements de long terme, de l’assurance vie.

L’épargne retraite, un dispositif simplifié par la loi Pacte

Le dispositif de l’épargne retraite résulte, avant 2019, de la sédimentation de produits disparates, destinés chacun à des catégories distinctes de population, et différant par leurs avantages associés. La loi Pacte a permis de simplifier ce paysage pour les adhérents, en n’offrant plus qu’un seul produit générique, le Plan d’épargne retraite, décliné en trois versions différentes : le PER individuel (Perin) et le PER) ou obligatoire (Perob). Cette homogénéisation a clarifié et simplifié l’épargne retraite, qu’elle relève d’une démarche individuelle ou qu’elle constitue un compartiment de l’épargne salariale d’entreprise. La généralisation de la « gestion pilotée » soumet en principe l’ensemble des contrats à un mode de gestion qui réduit la part de risque des placements au fur et à mesure que se rapproche l’âge de liquidation des droits à la retraite, les sommes épargnées pouvant être services, au dénouement, sous forme de rente ou de capital au choix de l’épargnant.

La loi Pacte a-t-elle favorisé le développement de l’épargne retraite et à quel coût pour les finances publiques ?

Après avoir connu un essoufflement dans les années 2010, les dispositifs d’épargne retraite ont bénéficié depuis 2019 d’une nouvelle impulsion à mettre au crédit de la loi Pacte. Soutenue par un régime fiscal incitatif, l’épargne retraite a collecté un montant de cotisations annuelles de 18,5 Md€ en 2022, pour un encours de 292,7 Md€ fin 2023 et un nombre contrats supérieur à 16 millions.  La France étant dotée d’un système de retraite obligatoire par répartition, le poids de la retraite par capitalisation reste cependant modeste : l’épargne retraite ne représentait en 2022 que 5,1 % des cotisations retraite et 2,3 % des prestations servies. Environ 13 % des actifs occupés détiennent un plan d’épargne retraite (PER) d’entreprise et 10 % un produit individuel, étant précisé qu’il est possible de détenir les deux. Le dispositif d’épargne retraite représente par ailleurs un coût élevé pour l’État (minimum 1,8 Md€ chaque année), compte tenu des avantages fiscaux qui lui sont associés.

La loi Pacte a-t-elle favorisé une plus large diffusion de l’épargne retraite dans la population française ?

Les données relatives à la répartition de l’épargne retraite dans la population sont soit éparses, soit absentes. À partir des publications des administrations (notamment la direction générale du Trésor, France Stratégie, la Drees et l’Insee), il est néanmoins possible de caractériser la diffusion de l’épargne retraite dans la population. Ainsi, la répartition des 5,536 millions d’adhérents aux dispositifs individuels et des 10,5 millions à des contrats collectifs d’entreprise montre que ces dispositifs sont plutôt réservés aux catégories socio - professionnelles aisées, aux épargnants âgés et aux contribuables soumis à des taux d’imposition élevés. De même, la faculté de reporter sur les trois années suivantes la fraction non utilisée du plafond de déduction et de bénéficier du plafond de son conjoint ouvre de larges possibilités à des contribuables en recherche d’optimisation fiscale. L’épargne retraite, tout en permettant de compléter la retraite de ceux qui bénéficient de taux de remplacement faibles, reste avant tout un instrument de placement et d’épargne, dont la fiscalité avantageuse permet à des épargnants aisés et relativement âgés de bénéficier d’avantages fiscaux.

Le développement de l’épargne retraite favorise-t-il l’investissement productif ?

Quelques années après l’adoption de la loi Pacte, qui avait entre autres objectifs celui de favoriser l’investissement dans l’économie productive, l’épargne retraite continue pourtant de s’inscrire dans le cadre plus large de l’assurance vie, qui fait une part importante aux placements sécurisés, à travers la garantie en capital accordée pour les fonds euros. La propension à porter du risque en actions pourrait être accentuée par une invitation plus forte à investir dans les PME/ETI, comme la loi Industrie verte d’octobre 2023 enjoint de le faire. L’impact de l’épargne retraite sur le financement de l’économie est donc en pratique peu distinct des caractéristiques de l’assurance-vie.

La faiblesse de l’impact de l’épargne retraite sur les investissements en fonds propres des entreprises et la concentration de sa distribution sur les ménages aisés justifient, dans un contexte budgétaire très contraint, un resserrement de l’avantage fiscal attaché à ce produit.

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