Synthèse
L’institut départemental Gustave Baguer est spécialisé depuis plus d’un siècle dans l’accueil des enfants sourds. Reconstruit en 2006, l’institut a vu son activité et le profil des enfants accueillis notablement évoluer. Face à la diminution du nombre d’enfants sourds placés en établissement, soit en 2014, 119 pour un effectif théorique de 180, l’établissement s’est ouvert aux enfants souffrant de troubles sévères du langage (58 en 2014). Il prend également en charge de manière croissante des enfants sourds souffrant de handicaps ou de troubles associés (24 en 2014).
Au plan financier, la situation de l’établissement apparaît tout-à-fait satisfaisante, grâce à l’accumulation de réserves. La nette amélioration de l’exploitation, qui génère désormais une capacité d’autofinancement très positive, est moins due à la stabilisation des dépenses qu’à l’augmentation massive de recettes, quasi-exclusivement liées à l’encaissement de prix de journée.
Cette amélioration n’est toutefois pas liée à une progression de l’activité mais à la mise en réserve des excédents. Il en résulte que le prix de journée augmente effectivement en cas de déficit pour couvrir les charges de l’établissement. Toutefois, il ne baisse pas à due concurrence en cas d’excédent et ceux-ci sont inutilement thésaurisés au lieu de diminuer le besoin de financement de l’exploitation.
L’établissement dispose ainsi d’une trésorerie importante qui représente presque une année de produits de fonctionnement. Dans ce contexte d’excédent financier, rien ne fondait pour l’établissement qu’il souscrive des emprunts qui ont généré des charges financières inutiles.
Neuf ans après sa réouverture, l’institut Gustave Baguer a encore des difficultés à fixer sa stratégie et à préciser ses orientations. Ainsi l’ouverture de son activité à destination d’un public nouveau n’est pas consolidée. L’établissement ne dispose pas d’une l’autorisation d’activité adéquate permanente et de surcroît, ce changement de public est mal accepté par le personnel.
Ne disposant pas d’outils de pilotage, l’institut ne peut construire de plan d’action à moyen terme. Ainsi, les instruments élémentaires de gestion et de management font défaut. Manquent ainsi des tableaux de bord ou d’évaluation professionnelle. Quand ils existent, ces instruments sont détournés de leur usage, à l’instar du droit individuel à la formation.
L’établissement pâtit également de la faiblesse des dispositifs internes de contrôle. Il n’y a pas d’outil de suivi et d’évaluation de l’activité et le conseil d’administration est tenu à l’écart des décisions stratégiques engageant l’établissement, comme par exemple le programme d’investissement.
L’institut se prive en outre de moyens humains en ayant réduit la durée du travail de ses agents bien en-deçà de la durée légale et en ne se donnant pas les moyens de s’adapter à l’évolution de son public par la formation professionnelle continue.
La gestion de l’établissement est donc faite au quotidien sans mesure et sans prospective.
La faiblesse de l’encadrement et l’absence de formalisation des procédures sont la cause de graves dysfonctionnements. Ainsi, la fonction achats n’est pas maîtrisée et les règles essentielles de la commande publique ne sont pas respectées.
La chambre a ainsi relevé de graves irrégularités aux règles de la mise en concurrence, un traitement inéquitable des entreprises candidates, voire même leur éviction infondée. Les risques en matière d’atteinte à la liberté d’accès aux marchés publics, à l’égalité de traitement entre les candidats et à la transparence des procédures sont très importants.
La chambre a également relevé des abus sérieux en matière de logement de fonction. La faiblesse des contraintes en matière de garde fait de l’attribution de ces logements de fonction une solution coûteuse et de surcroît, redondante pour l’établissement. Par ailleurs, des irrégularités substantielles ont été constatées pour deux de ces logements de fonction. Outre une occupation sans titre, l’appropriation de ces deux logements par la seule directrice s’est accompagnée de la réalisation de travaux coûteux sans que le conseil d’administration n’en ait été informé préalablement ni qu’il ait fixé leur cadre.
La gestion de l’institut Gustave Baguer appelle donc de profondes transformations, seules à même de permettre à l’établissement d’opérer son indispensable modernisation.