ENTITÉS ET POLITIQUES PUBLIQUES
UNE RÉFORME
INABOUTIE DU
DIALOGUE SOCIAL
DANS LA FONCTION
PUBLIQUE
Rapport public thématique
Octobre 2024
Sommaire
Procédures et méthodes
.................................................................................
5
Synthèse
..........................................................................................................
9
Récapitulatif des recommandations
...........................................................
15
Introduction
..................................................................................................
17
Chapitre I Une réduction du nombre d’instances moindre que
prévue, des pratiques antérieures parfois maintenues
..............................
19
I - Une architecture des instances paritaires profondément simplifiée
par la loi de transformation de la fonction publique
......................................
22
A - Des CAP moins nombreuses, aux compétences réduites
.................................
23
B - Le maintien d’un nombre important d’instances spécialisées, plutôt
dans la fonction publique d’État
............................................................................
26
C - La persistance d’une organisation atypique dans la fonction publique
hospitalière
............................................................................................................
30
II - Le maintien d’un dialogue social informel et de pratiques
antérieures
......................................................................................................
33
A - Un important dialogue social en dehors des instances, particulièrement
dans les fonctions publiques hospitalière et territoriale
.........................................
33
B - La permanence de pratiques antérieures, parfois contraires à l’esprit
de la loi
..................................................................................................................
34
C - Un impact de la réforme sur le climat social difficile à mesurer
......................
36
Chapitre II Les moyens dévolus au dialogue social, complexes
et estimés à 874 M€
......................................................................................
41
I - Une estimation difficile, partielle et inédite du coût du dialogue
social
..............................................................................................................
42
A - Les moyens humains
.......................................................................................
42
B - Les moyens matériels et financiers
..................................................................
43
C - Le coût total estimé
..........................................................................................
44
II - La persistance de pratiques dérogatoires coûteuses
.................................
46
A - Le maintien de situations avantageuses
...........................................................
47
B - L’attribution de moyens matériels complémentaires significatifs
....................
52
III - Un pilotage déficient des moyens humains consacrés au dialogue
social
..............................................................................................................
53
A - Une mesure des coûts souvent impossible en raison d’organisations
complexes
..............................................................................................................
53
B - Des outils de suivi inadaptés ou mal utilisés
....................................................
56
C - Une gestion des ressources humaines plutôt alourdie
......................................
59
SOMMAIRE
4
Chapitre III
Les conditions d’un dialogue social rénové
.........................
63
I - Renforcer l’accessibilité des informations utiles au dialogue social
.........
63
II - Mieux distinguer gestion de proximité et gestion stratégique
des ressources humaines
................................................................................
66
III - De nouvelles pratiques de négociation pour un dialogue social
plus stratégique
..............................................................................................
67
A - Un recours encore limité à la médiation
..........................................................
68
B - L’amorce lente du processus de négociation collective
...................................
69
C - Des mesures d’accompagnement pour favoriser la négociation
collective
...............................................................................................................
76
Liste des abréviations
..................................................................................
81
Annexes
.........................................................................................................
85
•
Procédures et méthodes
Les rapports de la Cour des comptes sont réalisés par l’une des six
chambres thématiques
1
que comprend la Cour ou par une formation
associant plusieurs chambres et/ou plusieurs chambres régionales ou
territoriales des comptes.
Trois principes fondamentaux gouvernent l’organisation et l’activité
de la Cour ainsi que des chambres régionales et territoriales des comptes,
donc aussi bien l’exécution de leurs contrôles et enquêtes que l’élaboration
des rapports publics : l’indépendance, la contradiction et la collégialité.
L’
indépendance
institutionnelle des juridictions financières et
l’indépendance statutaire de leurs membres garantissent que les contrôles
effectués et les conclusions tirées le sont en toute liberté d’appréciation.
La
contradiction
implique que toutes les constatations et
appréciations faites lors d’un contrôle ou d’une enquête, de même que toutes
les
observations
et
recommandations
formulées
ensuite,
sont
systématiquement soumises aux responsables des administrations ou
organismes concernés ; elles ne peuvent être rendues définitives qu’après
prise en compte des réponses reçues et, s’il y a lieu, après audition des
responsables concernés.
La
collégialité
intervient pour conclure les principales étapes des
procédures de contrôle et de publication. Tout contrôle ou enquête est confié
à un ou plusieurs rapporteurs. Le rapport d’instruction, comme les projets
ultérieurs d’observations et de recommandations, provisoires et définitives,
sont examinés et délibérés de façon collégiale, par une formation
comprenant au moins trois magistrats. L’un des magistrats assure le rôle de
contre-rapporteur et veille à la qualité des contrôles.
1
La Cour comprend aussi une chambre contentieuse, dont les arrêts sont rendus publics.
PROCÉDURES ET MÉTHODES
6
Sauf pour les rapports réalisés à la demande du Parlement ou du
Gouvernement, la publication d’un rapport est nécessairement précédée par
la communication du projet de texte, que la Cour se propose de publier, aux
ministres et aux responsables des organismes concernés, ainsi qu’aux autres
personnes morales ou physiques directement intéressées. Leurs réponses
sont présentées en annexe du rapport publié par la Cour.
Le présent rapport est issu d’une enquête menée, sur le fondement
de l’article L. 141-13 du code des juridictions financières, par la formation
commune aux juridictions relative à la fonction publique. Cette formation,
créée par arrêté n° 18-283 du Premier président du 5 avril 2018, associe la
Cour des comptes et l’ensemble des chambres régionales et territoriales des
comptes (CRTC).
L’enquête visant à examiner la façon dont s’organise le dialogue
social au sein de la fonction publique a été inscrite au programme des
travaux de l’année 2023. La formation commune a adopté, le 10 juillet 2023,
une note de cadrage, qui a précisé le champ et la méthode de l’enquête.
L’enquête a porté sur les trois fonctions publiques (fonction publique
de l’État, fonction publique hospitalière et fonction publique territoriale) et
l’ensemble des agents publics, y compris les agents contractuels. Parmi les
employeurs publics, ont été exclus :
-
les établissements publics à caractère administratif, qui recrutent leur
personnel selon les règles du droit privé (caisses nationales du régime
général de la sécurité sociale, par exemple) ou selon un droit public
particulier (organismes consulaires) ;
-
les établissements publics à caractère industriel et commercial et les
sociétés
publiques
commerciales,
leur
personnel
étant
quasi-
exclusivement soumis au droit privé.
Le présent rapport fait la synthèse de nombreuses informations
comprenant notamment :
-
les données de synthèse disponibles auprès des administrations,
notamment la direction générale de l’administration et de la fonction
publique (DGAFP), la direction générale de l’offre de soins (DGOS) et la
direction générale des collectivités locales (DGCL) ;
PROCÉDURES ET MÉTHODES
7
-
les travaux menés par les inspections générales ou par des prestataires à la
demande d’associations d’élus telles que la Fédération nationale des
centres de gestion (FNCDG)
2
;
-
les données recueillies par la Cour et les CRTC dans le cadre de la présente
enquête par le canal de questionnaires, complétés dans certains cas
d’entretiens
auprès
d’une
sélection
d’administrations
de
l’État,
d’établissements publics nationaux et locaux, de collectivités territoriales,
d’hôpitaux publics, ainsi que de divers organismes d’employeurs publics,
syndicats représentatifs et associations de cadres dirigeants ;
-
les observations faites lors de contrôles antérieurs par les chambres de la
Cour et les CRTC s’agissant de la mise en œuvre des principales
dispositions de la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction
publique (la liste des travaux des juridictions financières utilisés figure
dans l’annexe n° 1).
Le projet de rapport a été préparé, puis délibéré le 28 juin 2024, par
la formation commune aux juridictions précitée, présidée par M. Barbé,
conseiller maître, et composée de MM.
Boudy, Marquet, Colcombet,
Duboscq et Vasseur, conseillers maîtres, Mmes Casas et Deletang,
conseillères maîtres, M. Caïani, conseiller référendaire, vice-président de la
chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes, Mme François,
conseillère référendaire, M. Vidal, conseiller président, président de section
à la chambre régionale des comptes Île-de-France, M. Guillet, conseiller
président, président de section à la chambre régionale des comptes
Bretagne, ainsi que, en tant que rapporteurs généraux, M. Farouilh,
conseiller référendaire en service extraordinaire à la première chambre, et
Mme Le Dû, première conseillère à la chambre régionale des comptes
Auvergne-Rhône-Alpes, assistés de M. Picot, vérificateur à la première
chambre et, en tant que contre-rapporteur, M. Homé, conseiller maître à la
quatrième chambre.
2
En partenariat avec France urbaine, Intercommunalités de France et Départements de
France, la FNCDG a réalisé une enquête auprès de 2 199 collectivités territoriales et
intercommunalités afin de mesurer les implications, pour les collectivités locales, des
dispositions de la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique.
PROCÉDURES ET MÉTHODES
8
Le comité du rapport public et des programmes de la Cour des
comptes, composé de M. Moscovici, Premier président, M. Rolland,
rapporteur général du comité, M. Charpy, Mme Camby, Mme Démier,
M. Bertucci, Mme Hamayon, M. Meddah et Mme Mercereau, présidentes
et présidents de chambre de la Cour, M. Strassel, M. Lejeune, M. Serre,
Mme Daussin-Charpantier, Mme Renet et Mme Bonnafoux, présidentes et
présidents de chambre régionale des comptes, ainsi que M. Gautier,
Procureur général, a été consulté sur le projet de rapport le 10 juillet 2024.
Le Premier président en a approuvé la publication le 17 octobre 2024.
Les rapports publics de la Cour des comptes sont accessibles en ligne
sur le site internet de la Cour et des chambres régionales et territoriales des
comptes : www.ccomptes.fr.
Ils sont diffusés par La Documentation Française.
Synthèse
La loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique a
engagé une réforme du dialogue social dont l’ambition est de l’orienter vers
une approche plus stratégique et plus contractuelle, modifiant en
profondeur la culture sociale au sein de la sphère publique.
Pour ce faire, la loi réorganise et simplifie le cadre du dialogue
social : les comités techniques (CT) et les comités d’hygiène, de sécurité et
des conditions de travail (CHSCT) sont fusionnés dans une nouvelle
instance unique, les commissions administratives paritaires (CAP) voient
leur nombre fortement réduit et leurs compétences recentrées sur les seules
décisions disciplinaires. Elles n’examinent plus les décisions individuelles
de gestion des carrières, ce qui ôte aux organisations syndicales le rôle
d’interface entre les agents et leur employeur. En contrepartie, la loi
promeut la négociation collective débouchant sur des accords contractuels.
C’est dans un contexte de relatif déclin de la représentation
syndicale que la loi de transformation de la fonction publique est mise en
œuvre : malgré un taux de syndicalisation plus de deux fois supérieur au
secteur privé, le secteur public n’échappe pas au recul de la participation aux
élections professionnelles et de l’engagement syndical même si, au sein de
l’État, la représentation syndicale demeure forte. Par ailleurs l’application
de la réforme a été retardée par la crise sanitaire, puis par les mouvements
sociaux liés à la réforme des retraites.
Le présent rapport propose un premier bilan de la mise en
application de la loi de 2019, sur le plan quantitatif, en mesurant le degré
de simplification des instances et en estimant le coût du dialogue social,
mais également sur la façon dont les employeurs publics se sont saisis des
nouveaux leviers de dialogue social offerts par la loi. Cette approche, qui
repose sur le choix d’objectiver le degré de mise en œuvre de la réforme, a
conduit la Cour à ne pas porter d’appréciation sur la teneur du dialogue
social conduit depuis l’entrée en vigueur de la loi du 6 août 2019.
SYNTHÈSE
10
Une carte des instances sociales partiellement réduite
et encore complexe
Le nombre d’instances de dialogue social est passé, pour la seule
fonction publique de l’État (FPE), de plus de 5 000 en 2019 à environ
4 000 en 2023. Pour les trois ministères représentant 60 % des effectifs
de l’État, le nombre de CAP a significativement diminué : la baisse la
plus forte a concerné les ministères économiques et financiers, où le
nombre de CAP nationales et locales est passé dans le même temps de
519 à 18.
Au sein de la fonction publique territoriale (FPT), l’impact de la
réforme n’a été réellement significatif que pour les grandes collectivités
territoriales, d’autant que l’obligation légale de tenir au moins deux
réunions annuelles de CAP a parfois contrebalancé l’allégement attendu.
Quelques rares collectivités n’ont d’ailleurs pas tenu compte de cette
obligation, estimant que les motifs suffisants de saisine de la CAP
faisaient défaut.
Pourtant la diminution totale du nombre d’instances a été plus
faible que celle attendue car la baisse du nombre de CAP a été en partie
compensée par la hausse du nombre de formations spécialisées en matière
de santé, de sécurité et de conditions de travail (FSSCT). En effet, pour
répondre à des critiques sur la fusion de toutes les instances techniques
au sein d’une instance unique, des formations spécialisées ont été créées
lorsque l’effectif dépasse 200 agents et la faculté d’instaurer des
formations spécialisées supplémentaires a été ouverte si des risques
professionnels particuliers le justifient. Dans ce domaine, l’impact de la
loi n’a pas été le même selon la fonction publique, sans que cela semble
justifié par des raisons tenant à la nature des services publics.
Au sein de la fonction publique hospitalière (FPH), la fixation d’un
seuil de création obligatoire d’une formation spécialisée pour les
questions d’hygiène et de sécurité à 200 agents, contre 50 auparavant, a
réduit de près de 75 % le nombre des établissements soumis à cette
obligation. Nombre d’établissements sanitaires et sociaux, dont la
majorité des EHPAD, s’en sont trouvés exonérés.
La
faculté
offerte
de
créer
des
instances
spécialisées
supplémentaires a été saisie par beaucoup de ministères. Aussi, pour la
fonction publique de l’État, la réduction des instances a été très faible :
en 2023, le nombre de comités techniques
(3 622) était encore presque
identique à celui de 2018 (3 700). Au sein des ministères économiques
et financiers, la mise en œuvre de la reforme a même eu un effet
paradoxal : 211 formations spécialisées ont remplacé 117 CHSCT.
SYNTHÈSE
11
A contrario
, bien qu’elle ne soit pas précisément quantifiable, la
réduction du nombre d’instances spécialisées a été bien réelle au sein de
la fonction publique territoriale. À titre d’illustration, parmi les
44 employeurs de Savoie disposant avant 2019 d’un CHSCT, seuls cinq
ont créé une instance spécialisée, dont quatre employeurs comptant plus
de 200 agents et une seule commune ayant opté pour une création
facultative.
L’évaluation des économies dues à la réduction des instances, qui
était aussi l’un des objectifs recherchés pour allouer des moyens à une
gestion rénovée des ressources humaines, n’est pas stabilisée. Au-delà de
la diminution très inégale du nombre d’instances et de la poursuite de
diverses pratiques informelles, qui peuvent être chronophages, certains
employeurs publics ont maintenu, selon eux de façon temporaire, le
niveau antérieur des heures de représentation syndicale pour gérer la
période de transition. Cependant une baisse de la consommation des
moyens syndicaux (décharges et autorisations spéciales d’absence) est
constatée au sein de la fonction publique de l’État, centrée sur les CAP,
de l’ordre de 6 %.
Au total, la nouvelle carte des instances de dialogue social reste
complexe. L’objectif de diminution du nombre de CAP est atteint. En
revanche celui consistant à simplifier les instances spécialisées demeure
largement inabouti, dans un paysage très contrasté selon les employeurs
publics et parfois peu justifié par des considérations objectives tenant aux
conditions de travail.
Un coût du dialogue social difficile à cerner et non estimé
par l’administration, un ordre de grandeur minimal chiffré
par la Cour à 874 M€
Les
représentants
des
agents
bénéficient
de
facilités
(détachements, autorisations spéciales d’absence (ASA), décharges
d’activité de service) pour remplir les obligations résultant de leur
mandat. Le recollement de leurs participations effectives à la vie
syndicale se fait de façon dispersée et parcellaire. Les administrations ne
disposent pas d’informations consolidées qui permettraient de mesurer la
charge budgétaire correspondante. Par exemple, il n’existe aucune
consolidation du coût d’une séquence, pourtant aisément isolable, de la
vie sociale, celle des dépenses engagées pour les élections syndicales.
Un rapport de 2010 des inspections générales sur le bilan des
moyens alloués aux organisations syndicales dans la fonction publique
identifiait déjà des lacunes dans le suivi des absences syndicales pour les
SYNTHÈSE
12
trois fonctions publiques
3
. Il relevait notamment que leur recensement
n’était pas toujours effectué. L’enquête conduite par les juridictions
financières montre que, plus de dix ans plus tard, ces constats anciens
sont toujours avérés. En outre, quand l’information existe, la
consolidation nationale est parfois inexistante. Ainsi, au ministère de
l’éducation nationale, le suivi de la consommation des crédits syndicaux
est effectué au niveau académique sans données consolidées aux niveaux
interacadémique et national.
La Cour a tenté d’établir une estimation du coût du dialogue social,
en partie fondée sur des extrapolations réalisées à partir des données
existantes qu’elle a validées. Il en ressort qu’en 2022, les moyens mis en
œuvre par les employeurs des trois fonctions publiques en faveur du
dialogue social, qui touchent 5,2 millions d’agents, mobiliseraient près
de 874 M€
4
, soit 0,27 % de la masse salariale publique. Le coût par agent
public représenterait 154 €.
Cette estimation est minimale car incomplète. Elle n’inclut pas les
frais de mise à disposition de locaux et de matériels.
Enfin il conviendrait maintenant de mettre un terme aux pratiques
dérogatoires affectant l’exercice des droits syndicaux. Certaines avancées
sont à souligner même si des pratiques dérogatoires affectant l’exercice
des droits syndicaux subsistent. C’est le cas au sein des ministères
économiques et financiers. Les organisations syndicales y bénéficiaient
d’un volume de droits supplémentaires dérogatoires qui résulteraient de
la consolidation de « droits historiques », établie fin 2011 à 217 ETP.
Certes, le volume de ces droits dérogatoires a été réduit mais sans retour
à la norme à l’heure actuelle, d’autant que la réduction des décharges liée
à la baisse des effectifs n’a pas eu lieu. Au total, la convergence inachevée
vers les droits syndicaux réglementaires laisse perdurer un surcoût estimé
à 14,6 M€.
Une rénovation de la culture du dialogue social juste amorcée,
des accords collectifs peu nombreux, notamment sur
le service minimum
La réforme du dialogue social portée par la loi de 2019 vise à
privilégier dorénavant la négociation syndicale sur des aspects collectifs et
stratégiques de vie professionnelle des agents. Pour favoriser la conclusion
3
Rapport de l’IGA, l’IGAS, l’IGAENR et le CGEF sur le bilan des moyens alloués aux
organisations syndicales dans la fonction publique, juin 2010.
4
Le montant total des rémunérations versées était de 327,7 Md€ selon Insee Première
n° 1949, mai 2023,
Le compte des administrations publiques en 2022
.
SYNTHÈSE
13
d'accords négociés, notamment de proximité, les employeurs et
organisations syndicales peuvent conclure des accords-cadres et des
accords de méthode, sur les plans local ou national, depuis l’ordonnance
du 17 février 2021
relative à la négociation et aux accords collectifs dans
la fonction publique.
Fin 2022, environ 200 accords collectifs seulement avaient été
signés dans les trois fonctions publiques. Cette concrétisation du dialogue
social par un acte conventionnel est pourtant plébiscitée par l’ensemble
des parties. Sur la question sensible du service minimum, la loi de
transformation de la fonction publique ouvre la possibilité pour les
collectivités territoriales d’engager des négociations avec les organisations
syndicales en vue d’accords assurant la continuité des services publics.
Cependant très peu d’employeurs territoriaux ont fait de ce sujet un objet
de négociation.
L’application de la réforme demande des transformations
qualitatives de la gestion des ressources humaines
La réduction de la charge de travail pesant sur les directions des
ressources humaines en raison de l’allégement du formalisme attaché au
fonctionnement des CAP avant 2019 devait permettre de faire émerger une
nouvelle offre de services et de réaliser un suivi personnalisé plus
performant pour les agents publics. Elle devait également favoriser une
approche plus stratégique de la gestion des ressources humaines.
Plusieurs conditions doivent être réunies pour concrétiser cette
transformation. Après la mise en place des nouvelles instances prévues par
la loi de transformation de la fonction publique, un effort de réflexion sur
les missions des directions et services des ressources humaines doit être
engagé pour réorienter leurs actions : par exemple, définir des lignes de
gestion exigeantes et engager des négociations collectives.
Une distinction plus nette doit être faite au sein des services des
ressources humaines entre la gestion de proximité du dialogue social et
l’approche stratégique des ressources humaines. Pour ce faire, la pratique
des accords-cadres conclus au niveau supérieur et renvoyant à des accords
d’application aux niveaux subordonnés doit être encouragée. Au sein de la
fonction publique territoriale, la mutualisation des négociations entre
employeurs, déjà bien amorcée, doit se poursuivre.
Certains nouveaux leviers de la politique des ressources humaines,
comme la médiation, sont peu utilisés. Dans le cas de la médiation, le
champ d’application ouvert par les employeurs est souvent trop limité et
SYNTHÈSE
14
les organisations syndicales font état d’une relative méconnaissance de ce
dispositif par les agents. Un effort de promotion est à envisager.
Si les pouvoirs publics souhaitent que la logique conventionnelle se
développe au sein de la fonction publique, les droits et moyens des acteurs
du dialogue social doivent être reprécisés. En premier lieu, cela requiert
des formations spécifiques et partagées entre les deux parties. En second
lieu, valoriser l’engagement syndical dans le déroulement de carrière des
agents publics est certainement l’une des pistes à travailler. Ce sujet a
depuis longtemps été peu abordé.
Enfin, de façon paradoxale, les indicateurs de la Base de données
sociales (BDS) introduits par la loi de transformation de la fonction
publique sont trop nombreux et leur contenu trop disparate pour donner aux
employeurs publics et aux représentants des agents une information apte à
nourrir le dialogue social. Au sein de l’État, 102 indicateurs nourrissent les
rapports sociaux uniques locaux et directionnels, auxquels s’ajoutent
98 indicateurs pour le rapport social unique ministériel, portant à 200 le
nombre d’indicateurs suivis par les ministères. Une diminution de leur
nombre et leur ciblage sur des données vraiment utiles, notamment
budgétaires,
sont
nécessaires,
pour
également
alléger
la
charge
administrative des services gestionnaires.
***
La transformation du dialogue social au sein de la sphère publique
ne peut être ni d’application quasi immédiate, ni de niveau uniforme. Des
périodes de transition sont nécessaires et des pratiques parfois informelles
mais ancrées dans la vie sociale doivent être, selon la diversité des
situations des administrations, prises en compte. En outre, la portée des
modifications du mode de dialogue social ne se résume pas à des
indicateurs chiffrés. Pour autant, ceux-ci sont indispensables pour évaluer
et veiller à une application effective de la loi du 6 août 2019 de
transformation de la fonction publique. Or, force est de constater que ce
suivi n’est pas organisé et que certaines conditions qui devraient
accompagner les transformations qu’elle prône, ne sont pas remplies.
Aussi les juridictions financières appellent les employeurs publics
à donner leur pleine mesure aux dispositions de la loi de transformation
de la fonction publique qui réorganise l’exercice du dialogue social, à
s’engager vigoureusement à mettre un terme à certaines pratiques
dérogatoires et à utiliser davantage les outils nouveaux de dialogue social
dont ils disposent, comme la négociation de conventions collectives, par
les recommandations suivantes.
Récapitulatif des recommandations
1.
Adapter les systèmes d’information pour produire des données
relatives aux moyens consacrés au dialogue social au sein de la
fonction publique (
ministère de la transformation et de la fonction
publiques,
secrétariats généraux des ministères
).
2.
Mettre un terme aux dispositifs accordant des droits syndicaux
dérogatoires (
ministère de la transformation et de la fonction
publiques, ministère du travail, de la santé et des solidarités, ministère
de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et
numérique
).
3.
Diminuer le nombre des indicateurs de la Base de données sociales
(BDS) et les centrer sur des informations stratégiques utiles au
dialogue social (
ministère de la transformation et de la fonction
publiques
).
4.
Développer
le
recours
aux
accords-cadres
(
ministère
de
la
transformation et de la fonction publiques
).
5.
Renforcer l’offre de formation initiale et continue partagée en faveur
des représentants de l’administration et des agents publics (
ministère
de la transformation et de la fonction publiques, ministère de
l’intérieur et des outre-mer, ministère du travail, de la santé et des
solidarités
).
Introduction
Selon l’organisation internationale du travail (OIT),
« le dialogue
social inclut tous les types de négociation, de consultation ou simplement
d’échange d’informations entre les représentants des gouvernements, des
employeurs et des travailleurs selon des modalités diverses, sur des
questions relatives à la politique économique et sociale présentant un
intérêt commun »
.
La situation particulière dans laquelle se trouvent les agents de
l’État, ceux des collectivités territoriales et de leurs établissements publics
et ceux des centres hospitaliers en raison de leur participation au service
public explique qu’ils soient régis par des statuts spéciaux. Des droits
collectifs leur ont été progressivement reconnus de manière à rapprocher
leur situation de celle des salariés de droit commun. Pour autant, les
pouvoirs publics ont été constamment partagés entre la volonté d’adapter la
vie sociale de la fonction publique à son caractère régalien et aux principes
qui régissent les services publics (la continuité ou la neutralité du service par
exemple), notamment par des restrictions à la représentation syndicale et au
droit de grève pour certains métiers, et le souci d’assurer aux fonctionnaires
des droits syndicaux et sociaux de droit commun et conformes aux principes
constitutionnels.
L’adoption en 2019 de la loi de transformation de la fonction
publique s’inscrit dans ce contexte général qui, progressivement, a semblé
plus proche dans certains secteurs d’une cogestion des ressources humaines
avec les organisations syndicales que d’un dialogue social proche des
pratiques courantes de l’ensemble de la société.
En effet, l’étude d’impact de la loi de transformation de la fonction
publique constatait une lourdeur du dialogue social au sein de la fonction
publique, liée aux larges attributions des commissions administratives
paritaires (CAP) ainsi qu’au cloisonnement par corps et au formalisme de
celles-ci. Elle relevait également que l’examen des dossiers par ces
instances se faisait souvent au détriment d’une gestion qualitative des
ressources humaines et que le traitement des questions individuelles
l’emportait sur une gestion prospective et collective des ressources
humaines.
INTRODUCTION
18
Aussi la loi a visé à simplifier et transformer le dialogue social par
quatre dispositions majeures :
-
la réduction du nombre de commissions administratives paritaires
(CAP), désormais organisées par catégorie et non plus par corps
pour la fonction publique de l’État, et la fin de leur compétence en
matière d’examen des mutations, des actes de mobilité, des
avancements de grade et de promotion interne dans les trois
fonctions publiques ;
-
la création de comités sociaux par la fusion des comités techniques
(CT) et des comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de
travail (CHSCT) ;
-
l’obligation de produire un rapport social unique (RSU) et
l’établissement de lignes directrices de gestion (LDG) ;
-
le renforcement de la négociation collective.
***
Réaliser un premier bilan de ce type de réforme est délicat car
la transformation recherchée repose autant sur une évolution des
comportements des parties prenantes, exigeant du temps, que sur
l’application effective des dispositions de la loi. Pour autant, cette dernière
a engagé un processus dont le degré de réalisation peut être évalué de façon
quantitative, donnant alors une base objective à l’appréciation portée par
les juridictions financières.
Aussi le présent rapport évalue le niveau de réduction des instances
sociales et analyse les raisons d’un résultat en-deçà des attentes (chapitre I).
Il cerne ensuite les moyens consacrés au dialogue social et leur évolution
(chapitre II). Enfin, il examine si les méthodes du dialogue social ont été
rénovées et identifie les conditions requises pour accompagner ce
mouvement (chapitre III).
Chapitre I
Une réduction du nombre d’instances
moindre que prévue, des pratiques
antérieures parfois maintenues
La fonction publique n’échappe pas à la baisse du nombre d’adhérents
ni à la dispersion qui caractérisent le syndicalisme en France. Pour autant,
les organisations syndicales y conservent une capacité sensible de
mobilisation et une représentativité importante.
Les taux d’adhésion sont en recul et sont plus faibles qu’à l’étranger,
mais demeurent supérieurs à ceux observés dans le secteur privé : selon les
enquêtes sur les conditions de travail conduites par la direction de
l’animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) et la
direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP)
5
,
le taux de syndicalisation des agents publics était de 18,7 % en 2019, en recul
de 1,6 point par rapport à 2013. Il demeure toutefois plus de deux fois
supérieur au privé
6
(8,1 %), qui est également en repli (- 0,8 point).
Selon la DARES
7
, la baisse de la syndicalisation touche davantage
la fonction publique territoriale (FPT, - 1,9 point), que la fonction publique
5
DGAFP,
La représentation professionnelle et les grèves
, édition 2023.
6
Les salariés du « privé » correspondent aux salariés du secteur marchand ou associatif
qui travaillent dans une entreprise (privée ou publique), chez un artisan, dans une
association ou auprès de particuliers.
7
DARES Analyses,
Léger repli de la syndicalisation en France entre 2013 et 2019
,
février 2023, n° 6.
UNE RÉDUCTION DU NOMBRE D’INSTANCES MOINDRE QUE PRÉVUE,
DES PRATIQUES ANTERIEURES PARFOIS MAINTENUES
20
hospitalière (FPH, - 1,3 point) ou celle de l’État (FPE, - 1,1 point). Les
agents de la fonction publique d’État demeurent les plus syndiqués
(23,1 %, contre 15,6 % dans la fonction publique hospitalière et 14,1 %
dans la fonction publique territoriale). La fonction publique d’État
regroupe près de 45 % des salariés du public et 56 % des salariés
syndiqués. Toutes choses égales par ailleurs
8
, les salariés de la fonction
publique d’État ont une propension à la syndicalisation une fois et demie
plus élevée que ceux de la fonction publique territoriale.
Tableau n° 1 :
taux de syndicalisation par fonction publique
et par catégorie socioprofessionnelle
(en %)
2013
2016
2019
Fonction
publique
de l’État
Cadres
25,8
25,9
23,4
Professions
intermédiaires
23,9
23,4
23,7
Employés
22,4
22,7
21,0
Ouvriers
ns
ns
ns
Ensemble
24,1
24,4
23,0
Fonction
publique
territoriale
Cadres
17,0
17,4
13,2
Professions
intermédiaires
11,7
12,5
14,2
Employés
16,6
13,0
14,8
Ouvriers
19,6
19,2
12,8
Ensemble
16,0
14,3
14,1
Fonction
publique
hospitalière
Cadres
19,1
16,6
17,8
Professions
intermédiaires
14,7
11,2
9,7
Employés
17,4
21,6
21,2
Ouvriers
ns
ns
ns
Ensemble
16,9
16,1
15,6
Sources : Dares, DGAFP, Drees, enquêtes Conditions de travail (2013, 2016, 2019)
Champ : France en 2019, France (hors Mayotte) en 2013 et 2016, agents de la fonction publique.
Note de lecture : en 2019, 23,4 % des cadres de la fonction publique se déclarent adhérents ou
sympathisants d’une organisation syndicale.
ns : non significatif.
8
Des analyses toutes choses égales par ailleurs sont réalisées pour étudier la propension
de l’ensemble des salariés, puis ceux de la fonction publique et ceux du privé, à adhérer
à une organisation syndicale. Les variables explicatives retenues sont : le secteur privé
ou la fonction publique, la taille de l’établissement ; l’âge du salarié, son sexe, sa
catégorie socioprofessionnelle, son type de contrat (à durée limitée ou non), sa quotité
de travail. Dans le modèle concernant la fonction publique, sont ajoutés : la catégorie
d’agent (A, B, C), la famille de métier (la catégorie socioprofessionnelle étant retirée)
et la fonction publique (État, hospitalière, territoriale). Dans le modèle sur le secteur
privé, sont ajoutés les secteurs d’activité.
UNE RÉDUCTION DU NOMBRE D’INSTANCES MOINDRE QUE PRÉVUE,
DES PRATIQUES ANTERIEURES PARFOIS MAINTENUES
21
Le taux de participation aux élections professionnelles de 2022 s’est
inscrit en baisse dans les trois fonctions publiques ; il a atteint 44,9 % (contre
50,8 % en 2018) pour la fonction publique d’État, 45,6 % (contre 51,8 % en
2018) pour la fonction publique territoriale et 37,9 % (contre 44,2 % en 2018)
pour la fonction publique hospitalière. À cette baisse de participation ont pu
s’ajouter des difficultés à trouver des candidats : ainsi, au sein de la
fonction publique territoriale, 11 % des scrutins n’ont pu être tenus faute
de candidats, comme les juridictions financières l’ont relevé dans le cas de
la communauté d’agglomération Beaune Côte et Sud, où à la suite des
élections professionnelles du 8 décembre 2022, aucune liste n’a été
déposée
.
La consolidation des voix en 2022 aboutit à une évolution de la
composition du conseil commun de la fonction publique : la CGT a sept
sièges ; puis viennent FO et CFDT avec six sièges ; l’UNSA gagne un siège et
en obtient quatre ; la FSU et Solidaires restent respectivement à trois et deux
sièges, la CFE-CGC et la FA-FP conservent chacune un siège ; la CFTC perd
son unique siège.
Enfin la conflictualité paraît globalement plus forte que dans le
secteur privé. Dans la fonction publique de l’État, le nombre de journées
perdues pour fait de grève a légèrement augmenté en 2022 :
333 312 journées ont été comptabilisés en 2022 contre 287 375 en 2021
9
.
La majorité des jours de grève a concerné les agents du ministère de
l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur (85 % de la totalité
des journées perdues pour fait de grève), ministère dont les effectifs sont
les plus importants. Toutefois, le suivi statistique des jours de grève
n’existe que pour la fonction publique de l’État. Dans la fonction publique
territoriale, il n’existe pas de données consolidées publiées sur les journées
de grève, la direction générale des collectivités locales opérant simplement
un suivi des mouvements de grèves au sein de la fonction publique
territoriale à partir d’un échantillonnage de collectivités préétablies et une
remontée statistique effectuée
via
les préfectures. Dans la fonction
publique hospitalière, il n’existe pas de données récentes consolidées sur
les journées de grève.
9
Cf. annexe n° 3 : les jours perdus pour fait de grève.
UNE RÉDUCTION DU NOMBRE D’INSTANCES MOINDRE QUE PRÉVUE,
DES PRATIQUES ANTERIEURES PARFOIS MAINTENUES
22
I -
Une architecture des instances paritaires
profondément simplifiée par la loi
de transformation de la fonction publique
Les nouvelles instances de concertation ont été installées par les
employeurs publics à partir de janvier 2023 pour quatre ans, après les élections
professionnelles de 2022. Elles ont été installées à partir de février 2023, le
graphique suivant présente les transformations prévues par la loi de 2019 :
Graphique n° 1 :
l’évolution de l’architecture
des instances de dialogue social
Source : Cour des comptes
UNE RÉDUCTION DU NOMBRE D’INSTANCES MOINDRE QUE PRÉVUE,
DES PRATIQUES ANTERIEURES PARFOIS MAINTENUES
23
A -
Des CAP moins nombreuses, aux compétences
réduites
Dorénavant, les commissions administratives paritaires (CAP)
n’examinent plus les décisions de mobilité, de mutation, d’avancement, de
promotion et d’acceptation de la démission. Pour certaines situations qu’elles
continuent d’examiner, leurs avis
10
restent consultatifs. L'employeur est libre
de les suivre ou non en prenant néanmoins soin d’appuyer ses décisions sur
des lignes directrices de gestion désormais destinées à garantir la
transparence des critères de choix.
À la suite de la réforme, au sein de la fonction publique d’État, le
nombre de CAP (nationales et locales) a diminué sensiblement. La baisse
la plus significative a été constatée au sein des ministères économiques et
financiers, où le nombre de CAP nationales et locales est passé de 519
avant la réforme à 18 après, soit une baisse de plus de 95 % du nombre
d’instances. Au sein des trois ministères représentant 76 % des effectifs
ministériels et près de 60 % des effectifs de la fonction publique d’État, le
nombre de CAP a significativement diminué.
Tableau n° 2 :
carte des CAP au sein de l’échantillon
Ministères
Effectifs
physiques
(en
milliers)
Nombre de CAP
ante loi
de transformation
de la fonction
publique
Nombre de CAP
post loi
de transformation
de la fonction
publique
Solde
Éducation
nationale
1 052,7
613
317
- 296
Intérieur et
Outre-mer
303,3
154
95
- 59
Ministères
économiques
et financiers
130,7
519
18
- 501
Total
1 486,7
1 286
430
- 856
Sources : DGAFP, MENJ, MIOM, MEF
Pour la fonction publique territoriale, une commission consultative
paritaire (CCP), traitant des contractuels de toutes les catégories, a été mise
10
Leur consultation est notamment prévue en cas de refus de titularisation lorsque
l’aptitude professionnelle n’est pas appréciée par un jury
ou lors d’un licenciement en cours
de stage ; de refus de temps partiel ; de refus d'une mise en disponibilité ; de refus d'une
demande d'exercice en télétravail ; de licenciement pour insuffisance professionnelle.
UNE RÉDUCTION DU NOMBRE D’INSTANCES MOINDRE QUE PRÉVUE,
DES PRATIQUES ANTERIEURES PARFOIS MAINTENUES
24
en place dans chaque collectivité territoriale ou établissement public, ou,
en cas d’affiliation, auprès du centre de gestion concerné. Selon le centre
de gestion de l’Aisne, la loi de transformation de la fonction publique a
facilité l’organisation des CCP en instaurant une instance commune aux trois
catégories de personnel : d’une part, elle a permis à un syndicat de présenter
une liste complète de représentants
11
; d’autre part, la création d’une CCP
commune aux trois catégories permet de convoquer l’instance régulièrement.
Il est encore trop tôt pour porter une appréciation sur la qualité du
dialogue social après la réforme des CAP. Certains points méritent
toutefois d’ores et déjà d’être signalés.
Dans le champ de compétences conservé à l’issue de la réforme,
spécialement en matière disciplinaire
12
, les gestionnaires observent que les
dossiers auparavant considérés comme des sujets de second rang peuvent
aujourd’hui faire l’objet de discussions plus approfondies. En revanche la
connaissance fine des particularités de la gestion de corps spécifiques
pourrait être perdue, altérant la qualité des échanges entre les parties.
La connaissance des spécificités des corps
Selon le ministère de l’intérieur, c
ette évolution induit cependant une
perte de connaissance des spécificités de chacun des corps concernés et de ses
conditions de travail, ce qui a pu mener parfois selon lui à un appauvrissement
des débats en conseil de discipline. Au sein d’un ministère caractérisé par une
diversité des métiers et des environnements professionnels, les discussions
sont décrites par le ministère comme plus riches et pertinentes lorsque les
représentants des organisations syndicales appartiennent au même corps que
la personne qui comparait en conseil de discipline. Selon le ministère, ceux-
ci sont en mesure de décrire précisément les fonctions relevant dudit corps et
sont davantage capables d'évaluer les manquements professionnels de l’agent
à défendre. Il cite à titre de comparaison le maintien d'une CAP nationale
spécifique pour les inspecteurs du permis de conduire, qui aurait permis de
préserver la qualité des débats et des échanges en matière disciplinaire.
Enfin, auparavant, des commissions administratives paritaires
(CAP) se réunissaient au niveau le plus proche du terrain, dans les
11
Lors du scrutin précédent, le centre de gestion avait dû procéder en 2018 à un tirage
au sort pour certaines catégories.
12
Les commissions administratives paritaires peuvent siéger en formation disciplinaire.
C'est le cas lorsqu'une faute professionnelle est reprochée à un fonctionnaire.
L’intéressé est entendu, accompagné d'un défenseur de son choix, après avoir pris
connaissance du dossier. L'administration ne peut décider d'une sanction sans
délibération préalable de la commission administrative paritaire.
UNE RÉDUCTION DU NOMBRE D’INSTANCES MOINDRE QUE PRÉVUE,
DES PRATIQUES ANTERIEURES PARFOIS MAINTENUES
25
directions d’administration centrale, les services déconcentrés et les
établissements publics. Tel n’est plus le cas aujourd’hui, ce qui, pour
certaines organisations syndicales, peut sembler en contradiction avec
l’ambition d’animer un dialogue social de proximité.
Cette évolution peut entretenir le sentiment, exprimé par de
nombreux représentants syndicaux, que les consultations sont de pure
forme, la logique de stricte application du nouveau cadre juridique devant
conduire les représentants de l’administration à écouter ces organisations
syndicales (OS), sans échanger sur les situations individuelles. Une plus
grande communication de l’administration concernant la grille de critères
appliquée pour l’attribution des promotions semble ainsi nécessaire pour la
prémunir contre les critiques éventuelles touchant particulièrement à la
transparence des promotions au mérite et ainsi garantir la pérennité des
procédures mises en œuvre.
Les CAP n’ayant plus à se prononcer sur les décisions individuelles
relatives tant aux mutations internes et aux mobilités (détachement,
réintégration après détachement, intégration, disponibilité) qu’en matière
d’avancements de grade et de promotion interne, certains agents peuvent
toutefois recourir à une alternative préalable à la procédure contentieuse :
la médiation préalable obligatoire (MPO), voie de recours de proximité,
leur permettant d’être accompagnés par une personne de leur choix, qui
peut être leur représentant syndical.
Le renforcement des responsabilités des décideurs de proximité
au ministère de l’emploi
13
La loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique n’a eu,
au ministère chargé du travail, qu’une portée limitée.
La suppression de l’obligation de passage en CAP pour un certain
nombre de décisions individuelles a simplifié la gestion des avancements,
des promotions et des mobilités notamment. En termes de dialogue social,
en supprimant l’instance centrale donnant un avis sur ces décisions, elle a
renforcé le poids des décideurs de proximité (directeurs d’administration
centrale, directeur régionaux déconcentrés) dans les décisions et déplacé à
ce niveau les discussions syndicales relatives aux situations individuelles.
Le ministère a adopté des lignes directrices de gestion qui reprennent, pour
l’essentiel, des règles de gestion précédemment appliquées et qui n’ont
aucune portée pluriannuelle.
13
Cour des comptes,
La gestion des ressources humaines du ministère du travail
,
observations définitives, exercices 2015-2022, février 2024.
UNE RÉDUCTION DU NOMBRE D’INSTANCES MOINDRE QUE PRÉVUE,
DES PRATIQUES ANTERIEURES PARFOIS MAINTENUES
26
Au sein de la fonction publique territoriale, la réforme se présente en des
termes similaires. Toutefois, son impact pour les employeurs est plus contrasté,
l’effet mesuré étant tangible seulement pour les collectivités les plus importantes,
chargées de l’organisation de leur CAP
14
.
Dans le département de l’Yonne, la réforme a sensiblement allégé l’ordre
du jour des instances des agents, recentré les échanges en CAP sur les situations
individuelles complexes et permis un traitement plus fluide et plus réactif des
dossiers individuels. En revanche, la communauté de communes Le Grand
Charollais estime que la réforme n’a pas eu réellement d’impact, dans la mesure
où la CAP a été instituée auprès du centre de gestion de Saône-et-Loire. La
communauté de communes Albret-Communauté a indiqué que, compte tenu du
délai de saisine de la CAP placée auprès du centre de gestion du Lot et Garonne,
un gain de temps avait été observé dans le traitement de certaines situations
administratives ne relevant plus de la CAP, mais que, les dossiers de saisine
avant réforme étant peu nombreux, cela n’avait pas eu d’impact conséquent sur
la charge de travail des agents du service des ressources humaines.
La
réduction significative du nombre de questions susceptibles d’être
inscrites à l’ordre du jour des CAP soulève la question de la portée de l’obligation
imposée aux collectivités locales de respecter le rythme de deux réunions
annuelles prévu par les articles 26 et 27 du décret du 8 décembre 2020
15
. C’est
ainsi qu’en l’absence de motif de saisine suffisant, la commune de Bastia n’a
organisé aucune commission depuis le 1
er
janvier 2021.
L’évolution du rôle des CAP a conduit à un repositionnement des centres
de gestion dans un rôle de tiers de confiance sur les documents liés à la gestion
et à l’organisation des collectivités locales, et plus uniquement sur le contrôle
statutaire des dossiers individuels. Ainsi, le centre de gestion de l’Eure a mis à
disposition, depuis 2021, un module de gestion des avancements de grade, utilisé
par près de 180 collectivités, qui a permis à 401 agents de bénéficier d’un
avancement de grade en 2022.
B -
Le maintien d’un nombre important d’instances
spécialisées, plutôt dans la fonction publique d’État
La loi de transformation de la fonction publique a réorganisé les
comités techniques (CT) et les comités d’hygiène, de sécurité et des
14
Les centres de gestion de la fonction publique territoriale sont compétents pour
organiser les CAP pour le compte des collectivités de moins de 350 agents.
15
Décret n° 2020-1533 du 8 décembre 2020 relatif aux commissions administratives
paritaires et aux conseils de discipline de la fonction publique territoriale.
UNE RÉDUCTION DU NOMBRE D’INSTANCES MOINDRE QUE PRÉVUE,
DES PRATIQUES ANTERIEURES PARFOIS MAINTENUES
27
conditions de travail (CHSCT) en les fusionnant en un comité social. Cette
nouvelle instance est désormais compétente pour traiter des sujets
concernant l’organisation et le fonctionnement des services, l’orientation
stratégique de la politique de ressources humaines, les lignes directrices de
gestion, la protection de la santé physique et mentale, l’hygiène, la sécurité
des agents, l’accessibilité des services et la qualité des services rendus,
l’égalité professionnelle. Elle n’a toutefois pas totalement rationalisé la
carte des instances en imposant la création de formations spécialisées dès
lors que l’effectif de la collectivité dépasse 200 agents et en autorisant la
création de formations spécialisées dès lors que des risques professionnels
particuliers le justifient.
Pour la fonction publique d’État, une très faible réduction du nombre de
ces instances est constatée : le nombre de comités techniques (CT) et de comités
d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) est passé de plus de
3 700 instances en 2018 à 3 622 en 2023 (hors instances des services à l’étranger
du ministère de l’Europe et des affaires étrangères). Tous les ministères
16
ont
réduit le nombre de comités sociaux d’administration (CSA) et de formations
spécialisées (FS) comparé à celui des CT et CHSCT avant la réforme, à
l’exception des ministères économiques et financiers, du ministère de
l’éducation nationale et du ministère de l’enseignement supérieur, de la
recherche et de l’innovation
17
.
Dans ces trois ministères, les possibilités offertes par la loi de
maintenir des instances spécialisées a conduit à un foisonnement des
instances, contraire à l’objectif poursuivi par la loi d’en réduire le nombre.
16
Y compris en neutralisant les changements de périmètre issus des réorganisations
administratives intervenues depuis 2017.
17
L’organisation du ministère de l’éducation nationale est très déconcentrée. Ainsi, la
proximité avec les situations de travail est essentielle pour évaluer les risques
professionnels et prendre des mesures de prévention. Par exemple, la réalisation
d’enquêtes faisant suite à des accidents graves ou répétés ou bien à des signalements de
danger grave et imminent, ainsi que les visites de service, n’ont pas de sens à un niveau
régional ou ministériel.
Le ministère a appliqué la réglementation prévoyant, pour chaque comité social
d’administration (CSA), une formation spécialisée (FS) en santé, sécurité et conditions
de travail. Si la pertinence de la mise en place d’une FS pour les CSA de région
académique peut paraître discutable, en revanche, le ministère souligne son attachement
à l’existence des formations spécialisées des CSA spéciaux académiques. Elles
permettent en effet d’examiner, dans une composition appropriée, la situation
particulière des rectorats et des directions départementales, et tout particulièrement de
mettre en œuvre le dialogue social dans les services chargés de la jeunesse, de
l’engagement et des sports, dont les agents seraient sinon, en pratique, privés de
représentation utile.
UNE RÉDUCTION DU NOMBRE D’INSTANCES MOINDRE QUE PRÉVUE,
DES PRATIQUES ANTERIEURES PARFOIS MAINTENUES
28
Les ministères économiques et financiers ont augmenté leur nombre
de formations spécialisées en raison de l’impossibilité de conserver au
niveau des services centraux et des services déconcentrés, des CHSCT
inter-directionnels non prévus par la loi. Ils ont généralisé des formations
spécialisées au sein de chaque CSA de services déconcentrés, en lieu et
place des CHSCT inter-directionnels relevant souvent de plusieurs comités
techniques de services déconcentrés. En outre, dans un contexte social très
délicat, les ministères économiques et financiers ont également institué 29
formations spécialisées de service au sein de la direction générale des
douanes et droits indirects.
S’agissant
du
ministère
de
l’éducation
nationale
et
de
l’enseignement supérieur, la création de CSA spéciaux au niveau régional
dans huit régions académiques, de CSA dotés de formations spécialisées
(FS), et la mise en place systématique de FS dans les 31 CSA spéciaux
académiques ont conduit à une augmentation du nombre de FS prévues par
rapport au nombre actuel de CHSCT. La création de ces FS a
majoritairement résulté de l’application du seuil d’effectifs de 200 agents
institué par le décret du 20 novembre 2020. En revanche, le ministère a
réduit de 613 à 317 le nombre de ses CAP.
Dans la fonction publique hospitalière, la fixation d’un seuil de
création obligatoire d’une formation hygiène et sécurité à 200 agents,
contre 50 agents pour les CHSCT, revient à imposer cette formation à près
de 25 % seulement des établissements, excluant nombre d’établissements
sanitaires et sociaux, dont la majorité des établissements d’hébergement
pour personnes âgées dépendantes (EHPAD). La création facultative d’une
telle instance au sein d’établissements employant entre 50 et 200 agents n’a
pas été une solution majoritairement retenue. Les représentants du
personnel d’établissements de taille moyenne, comme ceux du centre
hospitalier de la Dracénie à Draguignan, ont exprimé des regrets quant à
l’abandon du CHSCT, considérant que l’adossement d’une revendication
au CHSCT avait plus de poids vis-à-vis de la direction.
Pour les établissements hospitaliers ayant conservé une formation
spécialisée, les représentants des organisations syndicales disent regretter
la disparition d’une instance dotée de la personnalité juridique, qui donnait
notamment au CHSCT la capacité de signer des contrats (comme ceux
concernant le recours à l’expertise). Pourtant, plusieurs établissements de
santé ont indiqué que la mise en place des nouvelles instances n’avait pas
engendré de changements notables pour le comité social d’établissement
(CSE) et la formation spécialisée en matière de santé, de sécurité et de
conditions de travail (F3SCT). La fréquence des réunions reste la même et
les ordres du jour sont souvent chargés, notamment pour le volet hygiène
UNE RÉDUCTION DU NOMBRE D’INSTANCES MOINDRE QUE PRÉVUE,
DES PRATIQUES ANTERIEURES PARFOIS MAINTENUES
29
et sécurité, plus sensible dans ces établissements, pour lequel des points
restent inscrits en doublon dans les deux instances.
Dans la fonction publique territoriale, la direction générale des
collectivités locales (DGCL) ne dispose pas encore de toutes les données
18
permettant de connaître le nombre exact de formations spécialisées (ayant
repris les attributions des 4 800 CHSCT) de droit pour les collectivités
locales de plus de 200 agents et de manière facultative pour celles comptant
entre 50 et 200 agents. Les investigations menées dans le cadre de l’enquête
montrent que la plupart des collectivités et établissements dont le nombre
d’agents est compris entre 50 et 200 agents ont fait le choix d’une instance
unique, conformément à l’esprit de la loi. La réduction du nombre
d’instances spécialisées, si elle n’est pas quantifiée, est bien réelle. À titre
d’illustration, parmi les 44 employeurs de Savoie disposant d’un CST,
seuls cinq ont créé une instance spécialisée
19
, dont quatre employeurs
comptant plus de 200 agents, et une seule commune a opté pour une
création facultative. Dans la communauté de communes des Bastides, la
création d’une instance unique n’a toutefois pas fait évoluer la fréquence
des échanges car le CHSCT ne s’était pas réuni entre 2019 et 2022.
S’agissant des centres de gestion de la fonction publique territoriale,
qui gèrent le comité social pour le compte des collectivités de moins de
50 agents, la DGCL a indiqué que ces derniers devaient obligatoirement
créer une formation spécialisée
20
, considérant que le nombre d’agents
relevant du comité social territorial du centre de gestion était supérieur au
seuil des 200 agents
. Toutefois, près de la moitié des centres de gestion s’y
refusait encore un an après les élections, ce que la CRC Hauts-de-France a
pu relever pour le centre de gestion de l’Aisne. Du fait du relèvement du
seuil de 50 à 200 agents pour la création de la formation spécialisée, les
18
La DGCL indique que la mise en place récente des instances, début 2023, ne permet
pas de disposer d’une remontée de ces informations : ce sera le cas dans le cadre du
RSU 2023, disponible début 2025.
19
Cf. déclarations du directeur du centre de gestion, la gazette des communes, article
publié le 19 décembre 2023.
20
Elle a précisé, dans une « foire aux questions » publiée sur son site que
« dans la mesure
où d’une part, le comité social territorial
[CST]
du centre de gestion
[CDG]
ne couvre
pas que les agents de ce centre mais ceux de l’ensemble des collectivités et établissements
relevant du CST du CDG et d’autre part, que la formation spécialisée
[FS]
est une
émanation du CST, c’est donc bien sur cette base qu’il faut considérer l’obligation
de seuil pour créer une formation spécialisée
[FS]
. De fait, tous les CDG doivent
créer une FS »
.
UNE RÉDUCTION DU NOMBRE D’INSTANCES MOINDRE QUE PRÉVUE,
DES PRATIQUES ANTERIEURES PARFOIS MAINTENUES
30
centres de gestion arguent de l’incohérence des textes
21
. Créer un
formation spécialisée attachée au comité social du centre de gestion revient
en effet à imposer à une collectivité de 25 agents la saisine d’une telle
formation dont est affranchi un employeur de 62 agents disposant de son
propre CST. Cette situation a conduit plusieurs organisations syndicales à
engager des contentieux contre des centres de gestion auprès de la
juridiction administrative.
Au total l’examen de la transformation des divers comités
techniques en un instance unique met en lumière une situation très
contrastée, loin de la simplification attendue, avec parfois même un
accroissement du nombre des instances.
C -
La persistance d’une organisation atypique
dans la fonction publique hospitalière
En-dehors de la disparition des comités techniques d’établissement
(CTE) et des comités d’hygiène, sécurité et des conditions de travail
(CHSCT) au profit des comités sociaux d’établissement (CSE) et de leurs
formations spécialisées en matière de santé, sécurité et conditions de travail
(F3SCT), dont les conséquences ont été évoquées précédemment, les autres
instances ont conservé la même configuration.
Au niveau national, le conseil supérieur des personnels médicaux,
odontologistes et pharmaceutiques des établissements publics de santé
(CSPM) et le conseil supérieur de la fonction publique hospitalière
(CSFPH) sont consultés sur toutes les questions et les projets de textes
intéressant respectivement les personnels médicaux et non médicaux. La
seule modification apportée à ces deux instances par la loi du 6 août 2019
concerne la suppression de la commission des recours qui existait au sein
du CSFPH
22
.
21
Afin d’éviter une telle incohérence, il conviendrait de considérer, selon la Fédération
nationale des centres de gestion (FNCDG), que le code général de la fonction publique
n’attache pas la création de la formation spécialisée à l’effectif d’électeurs dans le
ressort du CST du centre de gestion. La FNCDG rappelle que chacun des employeurs
relevant du CST du centre de gestion emploient moins de 50 agents et que le centre de
gestion ne constitue pas à leur égard un employeur collectif des collectivités et
établissements relevant du CST placé auprès de lui.
22
Cette commission pouvait être saisie par les fonctionnaires ayant fait l’objet d’une
sanction disciplinaire plus sévère que celle proposée par le conseil de discipline au
niveau local ou en cas de licenciement pour insuffisance professionnelle, alors que la
CAPL n’avait pas donné d’avis favorable à ce licenciement. Elle pouvait également être
saisie pour des recours sur l’inscription d’un agent à un tableau d’avancement.
UNE RÉDUCTION DU NOMBRE D’INSTANCES MOINDRE QUE PRÉVUE,
DES PRATIQUES ANTERIEURES PARFOIS MAINTENUES
31
Le centre national de gestion, acteur du dialogue social
de la fonction publique hospitalière
La gestion statutaire et le développement des ressources humaines
des praticiens hospitaliers et des directeurs de la fonction publique
hospitalière des secteurs sanitaire, social et médico-social est confiée à un
établissement public administratif sous tutelle du ministre chargé de la
santé, le centre national de gestion (CNG). Celui-ci définit les lignes
directrices de gestion pour cette catégorie de personnel. Il est responsable
des instances de dialogue social suivantes :
-
le comité consultatif national (CCN), régi par le décret n° 2016-1065 du
3 août 2016, pour les personnels non médicaux ;
-
trois CAP nationales pour certains corps de catégorie A (directeurs des
soins, directeurs d’hôpital, directeurs d'établissements sanitaires, sociaux
et médico-sociaux) ;
-
les commissions statutaires nationales (CSN), régies par les articles
R. 6156-42 et suivants du code de la santé publique, pour les personnels
médicaux ;
-
les conseils de discipline, régis par les articles R. 6152-310 et suivants du
code de la santé publique, pour les personnels médicaux.
Au sein des établissements, seul le personnel non médical a été
concerné par la mise en œuvre de la loi de transformation de la fonction
publique, les expressions du personnel médical et non-médical des
établissements publics de santé n’obéissant pas aux mêmes règles. Le corps
médical est en effet intégré dans la gouvernance de l’établissement par le
biais de la commission médicale d’établissement (CME), alors que le
dialogue social du personnel non-médical s’exerce au sein du conseil social
d’établissement (CSE). Depuis la réforme, les instances représentatives des
personnels non-médicaux
23
sont décrites dans le code de la fonction publique
et non plus dans le code de la santé publique, comme c’était précédemment
le cas notamment pour la CME.
Les modes de désignation dans ces deux instances sont différents.
La CME est composée d’une partie de membres de droit et d’une partie de
23
L’ordonnance n° 2021-1574 du 24 novembre 2021 portant partie législative du code
général de la fonction publique a fusionné les comités techniques d’établissement
(CTE) et les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) en
une instance unique, le comité social d’établissement (CSE), dont une formation
spécialisée en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail (F3SCT) doit
permettre de conserver une visibilité sur ces sujets.
UNE RÉDUCTION DU NOMBRE D’INSTANCES MOINDRE QUE PRÉVUE,
DES PRATIQUES ANTERIEURES PARFOIS MAINTENUES
32
membres élus au scrutin uninominal notamment parmi les praticiens de
l’établissement
24
. Les élections à la CME ne donnent pas lieu à des
candidatures des organisations syndicales du corps médical, qui existent
pour autant, mais qui n’ont pas de rôles et de droits fixés par le législateur
dans la gouvernance des établissements
25
. Les élections au CSE sont
organisées à partir de listes présentées par les organisations syndicales
26
.
Les prérogatives de la CME sont beaucoup plus étendues quant au
fonctionnement de l’établissement, et plus restreintes concernant la gestion
des ressources humaines, à l’inverse des prérogatives du CSE.
Dix CAP locales (quatre pour les agents de catégorie A, trois pour
les B, trois pour les C) sont organisées par domaine d’activité (personnel
technique, personnel des services de soins, des services médico-techniques
et des services sociaux, personnel administratif et sages-femmes). La
configuration de ces commissions n’a pas été modifiée lors du
renouvellement des instances dans la mesure où ces CAP locales
regroupaient déjà plusieurs corps pour chacune d’entre elles. Seuls les
groupes et sous-groupes en leur sein et la notion de formation restreinte ont
été supprimés.
Par ailleurs, sur le même périmètre départemental, dix CAP sont
instituées pour assurer la gestion des agents affectés dans les plus petits
établissements qui n’auraient pas un effectif suffisant pour justifier la mise
en place de CAP locales, ainsi qu’une commission consultative paritaire
(CCP) compétente à l'égard des agents contractuels. La gestion de ces
derniers est confiée à l'un des établissements publics de santé dont le siège
se trouve dans le département. C’est ainsi que le centre hospitalier
Émile Roux du Puy-en-Velay suit notamment les 35 agents titulaires et
contractuels du foyer de l’enfance du département de Haute-Loire.
Par exception, une CCP spécifique a été instaurée pour l’AP-HP.
En définitive, la réforme a eu moins d’impact sur la fonction
publique hospitalière. Si le nombre de réunions de CAP y est en baisse, le
total d’heures de réunion n’a pas diminué significativement entre 2018 et
2021
27
, les compétences retirées aux CAP n’étant pas très chronophages.
24
Article R. 6144-4 du code de la santé publique.
25
Les organisations syndicales des médecins sont néanmoins consultées dans des
instances nationales.
26
Article L. 211-1 du code de la fonction publique.
27
De nombreux comptes rendus de 2019 et 2020 ne comportent pas d’horaires, ce qui
ne permet pas d’exploiter ces données.
UNE RÉDUCTION DU NOMBRE D’INSTANCES MOINDRE QUE PRÉVUE,
DES PRATIQUES ANTERIEURES PARFOIS MAINTENUES
33
La réforme a donc surtout facilité le travail d’organisation des réunions
mais a libéré peu de temps d’agents.
II -
Le maintien d’un dialogue social informel
et de pratiques antérieures
Le dialogue social repose sur une consultation formelle d’instances
prévues à cet effet : comités sociaux, CAP, formations spécialisées. Il peut
aussi s’incarner dans une négociation collective, comme le prévoit la loi de
transformation de la fonction publique. Mais il se traduit également par des
échanges plus informels au sein de groupes de travail sur les sujets
intéressant les agents ou encore par un dialogue social préparatoire non
formalisé sur des situations individuelles ou des enjeux collectifs.
A -
Un important dialogue social en dehors
des instances, particulièrement dans les fonctions
publiques hospitalière et territoriale
La mise en œuvre de la loi de transformation de la fonction publique
a été l’occasion de renforcer les temps d’échanges en dehors des instances
de concertation sur de nombreux sujets : mise en place de nouvelles règles
de temps de travail, élaboration des nouvelles lignes directrices de gestion
(LDG), mise en œuvre du régime indemnitaire tenant compte des fonctions,
des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel (RIFSEEP),
encadrement du télétravail ou, plus récemment, développement de la
protection sociale complémentaire.
Ces temps d’échanges ont été nombreux au sein de la fonction
publique territoriale. Ainsi, au sein de la communauté de communes
Beaujolais Pierres Dorées (Rhône), le dialogue social apparaît dense et
apaisé. Les rencontres informelles permettent d’y préparer les dossiers
et de disposer de conditions de discussions favorables entre élus et
représentants du personnel. Dans le département de la Haute-Loire,
l’ensemble des parties prenantes reconnait que les groupes de travail
contribuent à un dialogue social que syndicats et administration qualifient
unanimement «
d’apaisé et constructif
». À Bastia, des contacts réguliers
s’établissent entre la direction et les organisations syndicales. Ils se
matérialisent notamment par des rencontres organisées à la demande des
agents ou des représentants syndicaux, afin de discuter de questions
individuelles ou collectives. Une réunion est, par ailleurs, organisée en
UNE RÉDUCTION DU NOMBRE D’INSTANCES MOINDRE QUE PRÉVUE,
DES PRATIQUES ANTERIEURES PARFOIS MAINTENUES
34
début d’année avec chacune des organisations syndicales afin que celles-ci
exposent leurs revendications et/ou doléances. À Saint-Germain-en-Laye,
le dialogue social s’exerce dans un environnement favorable, grâce à
des échanges réguliers entre la direction des ressources humaines et
l’organisation syndicale.
Certaines
administrations
d’État,
notamment
les
ministères
économiques et financiers, ont également maintenu un dialogue social
informel, qui sort du cadre fixé par la loi. À la DGFiP notamment, il facilite
la gestion de près de 100 000 agents représentant près de 75 % des effectifs
des ministères économiques et financiers. Comme l’a noté la Cour en
2021
28
, dans un contexte marqué par le poids des directions à réseau, dotées
de leurs propres comités techniques, en particulier la DGFiP, qui concentre
une large majorité des enjeux, le niveau ministériel peut être, sur certains
aspects, moins déterminant que le niveau directionnel.
Selon certains interlocuteurs
29
rencontrés au cours de l’enquête, le
dialogue social informel n’est pas incompatible avec le dialogue social
organisé dans le cadre des instances prévues par la loi, il peut même le
renforcer.
Selon le ministère de l’intérieur et des outre-mer, le dialogue
informel permet de préciser les demandes des organisations syndicales et
de désamorcer d’éventuelles crises tandis que le dialogue social formel
offre l’occasion de faire valoir les revendications syndicales afin qu’elles
soient inscrites au procès-verbal des instances. Ce ministère considère
l’équilibre entre formel et informel comme essentiel.
B -
La permanence de pratiques antérieures,
parfois contraires à l’esprit de la loi
L’enquête des juridictions financières a révélé que l’ambition de
réduire le temps consacré au traitement des situations individuelles n’est
pas tenue.
S’agissant de mesures à portée davantage individuelle, nombre de
collectivités locales ont maintenu la consultation préalable des élus du
personnel pour les actes de gestion de carrière, quand bien même l’article
10 de la loi de transformation de la fonction publique prévoit que les
28
Cour des comptes,
Le secrétariat général du ministère de l’économie, des finances et
de la relance
, observations définitives, 2021.
29
Représentants de l’administration et des organisations syndicales.
UNE RÉDUCTION DU NOMBRE D’INSTANCES MOINDRE QUE PRÉVUE,
DES PRATIQUES ANTERIEURES PARFOIS MAINTENUES
35
commissions administratives paritaires (CAP) ne sont plus compétentes
en ce domaine.
De nombreux travaux conduits par les chambres régionales et
territoriales des comptes (CRTC) dans le cadre de cette enquête illustrent
cette tendance. C’est le cas par exemple, du département de la Corrèze, où
les organisations syndicales ont demandé le maintien du fonctionnement
antérieur s’agissant de l’examen de la situation individuelle de chaque agent
promouvable par la CAP, ce que l’autorité territoriale a accepté, perpétuant
ainsi le fonctionnement du dispositif antérieur. Des modalités de
fonctionnement proches de celles existant avant la réforme ont par ailleurs
été relevées au sein du département de l’Aude, dans la commune de Saint-
Germain-en-Laye
30
ou encore dans le département de la Drôme, où a été
relevée une pratique locale qui ne tient pas compte du nouveau cadre
national.
La propension des acteurs à maintenir les modalités de fonctionnement
antérieures à la loi n’est pas propre aux fonctions publiques territoriale et
hospitalière mais elle y est développée d’une manière plus étendue qu’au sein
de l’administration d’État. Ce constat rejoint celui établi par l’association
Réalités du dialogue social
(RDS) au travers son analyse de la façon dont la
fonction publique hospitalière et la fonction publique territoriale se sont
emparées du volet relatif au dialogue social de la loi de transformation de la
fonction publique
31
.
Dans la fonction publique d’État, au ministère de l’intérieur et de
l’outre-mer, un dialogue informel a été mis en place dans le cadre des
mobilités au fil de l’eau
32
et plus formel dans le cadre du mouvement
annuel de mutation pour répondre aux organisations syndicales, qui
regrettaient que les mobilités ne soient plus examinées en CAP.
30
Dans sa réponse aux observations provisoires de la CRC d’Île-de-France, la
commune a indiqué que les compétences de la commission administrative paritaire
seraient revues conformément à la loi de transformation de la fonction publique du
6 août 2019.
31
Réalités du dialogue social,
Le dialogue social dans la fonction publique : état des
lieux des pratiques et perspectives de la mise en œuvre de la réforme 2019-2021
, juin
2022, à partir de l’exploitation de deux enquêtes participatives réalisées avec le
concours de réseaux d’employeurs et des organisations syndicales.
32
Saisine des organisations syndicales avec des tableaux et réponses des sections sur
les mouvements.
UNE RÉDUCTION DU NOMBRE D’INSTANCES MOINDRE QUE PRÉVUE,
DES PRATIQUES ANTERIEURES PARFOIS MAINTENUES
36
L’intervention des organisations syndicales au ministère
de l’intérieur et de l’outre-mer dans le cadre des mobilités
au fil de l’eau
S’agissant des mobilités, les organisations syndicales peuvent
intervenir en amont des validations. Dans le cadre des mobilités au fil de
l'eau, elles saisissent directement le service gestionnaire par courriel,
téléphone ou en direct pour porter à la connaissance de l’administration les
dossiers soutenus. Elles lui demandent également de les tenir informées des
classements des services une fois la position de l’organisation syndicale
réceptionnée. Selon les organisations syndicales, ces saisines peuvent être
très fréquentes ou plus rares. Dans le cas des campagnes de mutation
annuelle, une réunion de dialogue social est formalisée, durant laquelle les
organisations syndicales font part de leurs souhaits.
Selon le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire
,
les organisations syndicales interviennent en matière de mobilité pour
signaler des situations individuelles difficiles, d’ordre économique ou
social par exemple, afin de sensibiliser l’administration à l’intérêt qu’il y
aurait à favoriser la mobilité de tel ou tel agent. En aval des mobilités, les
syndicats peuvent introduire, au bénéfice des agents, des recours sur des
situations individuelles jugées problématiques. Pour les avancements et les
promotions, les organisations syndicales rencontrent individuellement,
chaque année, le chef du service des ressources humaines afin de défendre
la situation des agents qui les ont mandatés et pour lesquels elles estiment
que des éléments objectifs justifient une attention de l’employeur.
Au ministère des armées, des réunions bilatérales sont organisées
avec les organisations syndicales en amont des campagnes d’avancement.
Ces différents exemples renvoient aux traditions propres à chaque
administration. Ils n’en demeurent pas moins contraires à l’esprit de la loi.
La poursuite des modalités de fonctionnement antérieures entraîne dans
certains cas le déplacement du dialogue social multilatéral vers un dialogue
social bilatéral pour le traitement des situations individuelles : certains
services des ressources humaines sont encore saisis par les organisations
syndicales de situations individuelles et un temps important est consacré
au dialogue social pour traiter des situations individuelles.
C -
Un impact de la réforme sur le climat social
difficile à mesurer
Le recours aux baromètres sociaux pour mesure le climat social est
généralisé dans les trois fonctions publiques, dont la fonction publique
UNE RÉDUCTION DU NOMBRE D’INSTANCES MOINDRE QUE PRÉVUE,
DES PRATIQUES ANTERIEURES PARFOIS MAINTENUES
37
territoriale (22 % dans les intercommunalités) et la fonction publique
hospitalière (34 % des établissements de santé).
Le baromètre du bien-être au travail des personnels de l’éducation
nationale exerçant en établissement scolaire
Au printemps 2022, le personnel de l’éducation nationale exerçant dans
les écoles et établissements scolaires a répondu à une enquête sur son bien-être
professionnel. Cette enquête a été conduite après une période d’application du
protocole sanitaire. Elle montre que la satisfaction professionnelle des agents
est inférieure à la moyenne des Français qui travaillent.
L’enquête l’a évaluée à 6,0 sur 10 contre 7,2 pour les Français. Les
agents concernés se situent cependant à des niveaux de satisfaction proches des
Français s’agissant de l’item
« vie menée actuellement »
et le sentiment que leur
vie professionnelle a du sens.
Les perspectives de carrière (3,1 sur 10) et leur niveau de rémunération
(3,4 sur 10) sont jugés globalement insatisfaisants par les personnels de
l’éducation nationale. La moitié d’entre eux signalent un sentiment d’épuisement
professionnel élevé. Leur satisfaction concernant l’équilibre entre leur vie
professionnelle et personnelle est cependant proche de celle des Français (5,7 sur
10 contre 6,2).
Dans
l’ensemble,
les
personnels
aiment
travailler
dans
leur
établissement (7,1 sur 10). Pour la grande majorité d’entre eux, ils s’y sentent
en sécurité et entretiennent de bonnes relations, notamment avec les élèves et
leurs collègues.
Dans la fonction publique territoriale, la moitié des cadres et des élus
interrogés dans le cadre du baromètre RH des collectivités de
« La Gazette » avec Randstad
33
estiment que le climat social est stable par
rapport à l’année précédente. Un peu plus d’un tiers (37 %) constate qu’il
se dégrade. Selon le baromètre Horizons 2023
34
, un peu moins de 13 % des
collectivités locales soulignent une tension dans l’exercice du dialogue
social. Les communes comptant de 5 000 à 50 000 habitants se déclarent
les plus touchées, à 41 %, contre 31 % en 2022.
Plusieurs éléments d’explication sont avancés, en premier lieu les
contextes de fusions qui restent récentes pour les EPCI issus de la mise en
œuvre
des
précédents
schémas
départementaux
de
coopération
intercommunale, ou les négociations
engagées en matière de refonte du
temps de travail et de régime indemnitaire. Au sein de la fonction publique
33
14
ème
Baromètre RH des collectivités, Randstad France, septembre 2023.
34
Horizons 2023, ADF, AMF, CNFPT, FNCDG, Régions de France, octobre 2023.
UNE RÉDUCTION DU NOMBRE D’INSTANCES MOINDRE QUE PRÉVUE,
DES PRATIQUES ANTERIEURES PARFOIS MAINTENUES
38
territoriale, très peu de grèves avec mot d’ordre local ont été relevées lors
de l’enquête, à l’instar du département de la Corrèze, de la commune de
Saint-Germain-en-Laye ou de la communauté de communes Le grand
Charollais, dans lesquels aucun jour de grève avec motif local n’a été
décompté.
Dans la fonction publique hospitalière, les contrôles des chambres
régionales des comptes révèlent des situations très hétérogènes selon les
établissements, sans qu’un lien entre le climat social et la réforme des
instances ne puisse être établi.
UNE RÉDUCTION DU NOMBRE D’INSTANCES MOINDRE QUE PRÉVUE,
DES PRATIQUES ANTERIEURES PARFOIS MAINTENUES
39
______________________ CONCLUSION ______________________
Une réduction du nombre d’instances représentatives a été engagée.
Le paysage des instances sociales reste toutefois très contrasté et
foisonnant. Les employeurs auxquels un certain degré de latitude était
laissé, pour les instances techniques et sociales, ont eu des comportements
très divers, produisant parfois des effets contraires à la simplification
attendue.
De nombreux employeurs publics ont estimé judicieux de conserver
des pratiques antérieures, informelles ou parfois même en maintenant des
instances hors du cadre légal. La nécessité de ménager une période
transitoire peut expliquer cette attitude, celle aussi de maintenir des
échanges estimés propices à la bonne gestion des ressources humaines.
Ces considérations sont légitimes mais elles ne doivent pas aboutir à vider
de portée la réforme prévue par la loi du 6 août 2019 de transformation de
la fonction publique, en maintenant un dialogue social axé sur les
situations personnelles, constituant souvent
de facto
une forme de
cogestion des ressource humaines.
La persistance de frictions dans la mise en œuvre de la réforme
suggère que des efforts méritent d’être accomplis pour faire de ces
nouvelles instances de véritables espaces de dialogue social. La crise
sanitaire a incontestablement bouleversé le dialogue social en mettant à
l’ordre du jour de l’agenda social des sujets particuliers et en modifiant
les conditions, voire le calendrier d’installation et de réunion des
instances.
Mais ce contexte, qui a retardé l’application de la loi, n’est plus
d’actualité. Les frictions actuelles doivent donc être dépassées rapidement,
au risque de laisser s’installer de façon définitive une application partielle
de la loi.
Chapitre II
Les moyens dévolus au dialogue social,
complexes et estimés à 874 M€
L’étude d’impact de la loi de transformation de la fonction publique
estimait que la mise en œuvre de la loi devrait se traduire par une économie
budgétaire en raison, d’une part de la diminution du temps de préparation,
du nombre de réunions et du temps passé en CAP, tant pour les
représentants du personnel que pour les gestionnaires RH
35
et, d’autre part,
de la réduction du nombre de CAP. Dès lors il était prévu que les emplois
consacrés à ces tâches pourraient être redéployés au profit d’une évolution
qualitative de la fonction RH des employeurs.
L’enquête de la Cour relativise la réalisation de ces objectifs. En
effet un certain nombre de dispositifs dérogatoires au droit commun
perdure. Surtout, les administrations ne se sont pas dotées d’instruments de
mesure des moyens qu’elles accordent au dialogue social.
35
À cet égard, il était relevé que les DRH pourraient économiser des ETPT (environ
une dizaine par ministère) grâce au recentrage des attributions des CAP, tout en
redéployant une partie des effectifs correspondants vers des prestations de politique de
ressources humaines à plus forte valeur ajoutée (appui aux projets d’évolution
professionnelle et de mobilité, animation managériale, amélioration de la qualité de vie
au travail).
LES MOYENS DÉVOLUS AU DIALOGUE SOCIAL,
COMPLEXES ET ESTIMÉS À 874 M€
42
I -
Une estimation difficile, partielle et inédite
du coût du dialogue social
La connaissance des moyens consacrés au dialogue social
36
recèle
de nombreuses failles. D’une part, les moyens alloués aux organisations
syndicales font rarement l’objet d’un suivi par les employeurs publics.
D’autre part, il existe une pluralité de pratiques informelles qui se
traduisent, par exemple pour les autorisations d’absence, par une absence
de suivi de la consommation des moyens alloués aux organisations
syndicales. Enfin, à ce jour, aucune administration n’a développé de
méthode permettant de calculer le coût du dialogue social.
Cette question n’est pas nouvelle. Plusieurs rapports ont cherché à
approcher ce coût, notamment le rapport au Premier ministre de
M. Raphaël Hadas-Lebel sur la représentativité et le financement des
organisations professionnelles et syndicales, en mai 2006, ou encore le
rapport de plusieurs inspections générales sur les moyens alloués aux
organisations syndicales dans la fonction publique, en 2009 et 2010
37
.
Aucun d’entre eux n’était conclusif.
Les éléments chiffrés du présent rapport
38
doivent être appréciés
avec précaution. Ils résultent en effet de l’exploitation des réponses d’un
panel d’employeurs publics, qui ne retracent qu’une partie des moyens mis
à disposition des organisations syndicales, et du recueil de données issues
de rapports sociaux uniques, loin de rassembler un panel d’indicateurs
homogènes.
A -
Les moyens humains
Les moyens humains correspondent aux différentes catégories
d’autorisations d’absence, de décharges de fonction et de mises à
disposition qui sont données aux agents ayant un mandat syndical.
36
Cf. l’annexe n° 4.
37
Rapport sur le bilan des moyens alloués aux organisations syndicales dans la fonction
publique ;
Analyse détaillée dans deux départements : le Rhône et le Loiret
, IGA,
IGAS, IGAENR, CGEF, juin 2010.
38
Cf. l’annexe n° 5.
LES MOYENS DÉVOLUS AU DIALOGUE SOCIAL,
COMPLEXES ET ESTIMÉS À 874 M€
43
Tableau n° 3 :
les moyens humains alloués aux organisations
syndicales dans la fonction publique en 2022
FP
Nombre
d’ETP
Valorisation
en €
Décharges interministérielles
FPE
71
4 092 549
Décharges ministérielles
FPE
6 325
363 024 164
Crédits de temps syndicaux tirés de la
représentativité
FPT
3 246
121 171 121
FPH
2 025
97 509 589
Autres autorisations spéciales
d’absence
FPE
3 687
211 635 668
FPT
946
35 320 144
FPH
590
28 423 049
Mises à disposition
FPT
103
3 844 990
FPH
102
4 912 728
Total
17 095
869 934 001
Source : Cour des comptes
B -
Les moyens matériels et financiers
Les éléments de chiffrage que les juridictions financières ont
rassemblés sont incomplets dans la mesure où les informations sur les
locaux mis à disposition des organisations syndicales (surface et valeur
locative) sont rarement renseignées de manière satisfaisante. Ils ne peuvent
donc faire l’objet d’une valorisation.
En conséquence, les éléments retenus concernent exclusivement les
subventions versées par les ministères, à l’exception de celles allouées par
les collectivités locales et les établissements hospitaliers.
Tableau n° 4 :
les moyens financiers alloués aux organisations
syndicales dans la fonction publique en 2022
Montant
(en €)
Subvention annuelle versée aux OS représentatives de la FPE
2 178 207
Subvention annuelle exceptionnelle versée aux OS
représentatives de la FPE
200 000
Autres subventions annuelles versées par des ministères
1 736 306
Total
4 114 513
Source : Cour des comptes
LES MOYENS DÉVOLUS AU DIALOGUE SOCIAL,
COMPLEXES ET ESTIMÉS À 874 M€
44
C -
Le coût total estimé
Au total, plus de 874 M€ sont consacrés chaque année au dialogue
social dans les trois fonctions publiques, hors frais de mise à disposition de
locaux et de matériels. La masse salariale publique s’élevant à
327,7 Md€
39
, la charge estimative du dialogue social dans la fonction
publique en représente 0,27 %.
Schéma n° 1 :
estimation du coût du dialogue social
Source : Cour des comptes
Tableau n° 5 :
les moyens alloués aux organisations syndicales
dans la fonction publique en 2022
Montant
(en €)
Moyens humains
869 934 001
Moyens financiers
4 114 513
Total
874 048 514
Source : Cour des comptes
39
Insee Première n° 1949,
Le compte des administrations publiques en 2022
,
mai 2023.
LES MOYENS DÉVOLUS AU DIALOGUE SOCIAL,
COMPLEXES ET ESTIMÉS À 874 M€
45
Rapportés aux effectifs des trois fonctions publiques, les employeurs
publics consacrent plus de 154 € par agent (154,15 €) et par an au dialogue
social. Recourant à d’autres modalités de calcul, le rapport des inspections
générales de juin 2010 estimait ce montant à 134 €.
Il est impossible de comparer ces montants à la dépense correspondante
dans le secteur privé tant les modalités de financement sont différentes.
Le financement du dialogue social dans le secteur privé
Pour les employeurs du secteur privé, un fonds paritaire de
financement du dialogue social a été institué
40
afin de financer certaines
missions d’intérêt général remplies par les organisations syndicales et
patronales représentatives au niveau national
41
. Il est essentiellement
alimenté par une contribution des employeurs, fixée à 0,016 % des
rémunérations versées aux salariés, soit un montant total de l’ordre
de100 M€, et une subvention de l’État d’un montant de 32,6 M€.
Au niveau de l’entreprise, l’article L. 2141-6 du code du travail
«
interdit à l’employeur de prélever les cotisations syndicales sur les
salaires de son personnel et de les payer au lieu et place de celui-ci
». Par
ailleurs, une éventuelle participation de l’employeur au financement des
syndicats doit s’envisager au regard du critère d’indépendance énoncé à
l’article L. 2121-1 pour la détermination de la représentativité syndicale.
La pratique du « chèque syndical », consistant à attribuer à chaque
salarié un bon de financement d’un syndicat, à charge pour lui de le remettre
ou non au syndicat de son choix, s’est toutefois développée dans certaines
grandes entreprises à l’initiative de l’entreprise Axa. Le chèque peut être
utilisé au profit de tout syndicat, qu’il soit représentatif ou non. Le nombre
de chèques collectés par un syndicat détermine le montant de la subvention
patronale revenant au syndicat. L’attribution d’un chèque syndical par un
salarié n’implique pas son adhésion au syndicat bénéficiaire.
Une autre méthode consiste pour l’employeur à rembourser au
salarié tout ou partie de la cotisation individuelle qu’il a choisi de verser à
un syndicat, une fois soustraite la partie fiscalement déductible de l’impôt
sur le revenu. C’est le dispositif prévu par l’accord d’entreprise conclu en
2016 par l’UES Solvay France dont l’avantage, par rapport au chèque
syndical, est de contribuer à développer l’adhésion syndicale.
40
Loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et
à la démocratie sociale.
41
Articles L. 2135-9 et suivants du code du travail.
LES MOYENS DÉVOLUS AU DIALOGUE SOCIAL,
COMPLEXES ET ESTIMÉS À 874 M€
46
Compte tenu de ces multiples moyens, mutualisés pour une part dans
le fonds paritaire et éclatés par ailleurs au sein de chaque entreprise, le coût
du dialogue social dans le secteur privé ne saurait être réduit aux ressources
du fonds pour le financement du dialogue social, qui ont atteint 144 M€ en
2022, selon le rapport annuel l’association de gestion du fonds paritaire
national (AGFPN). En effet, ni les pratiques évoquées ci-dessus, ni les
moyens mis à disposition des organisations syndicales au sein des entreprises
(crédits d’heures des délégués syndicaux, locaux, …) ne sont pris en compte
dans ce montant. Dès lors, en l’absence d’évaluation de ces moyens, aucune
comparaison ne peut être faite entre le coût du dialogue social dans la fonction
publique et le coût du dialogue social dans le secteur privé.
Le montant estimé doit être considéré comme se situant en-deçà de
la réalité en raison du caractère parcellaire de certaines réponses, du
caractère incomplet du recensement de certaines données et de l’absence
de consolidation des moyens alloués par chacun des employeurs publics.
Pour autant ce montant est une donnée inédite. Aussi les administrations
devraient se doter des moyens nécessaires pour connaître les coûts
complets effectivement engagés et ainsi pouvoir les suivre et les piloter.
II -
La persistance de pratiques dérogatoires
coûteuses
L’enquête a permis de mettre en lumière certaines pratiques
dérogatoires qui viennent contrarier l’objectif d’économie budgétaire mis
en avant par l’étude d’impact de la loi de la transformation de la fonction
publique.
Déployés parfois sans fondement juridique, plusieurs dispositifs
sont en effet constitutifs d’une dépense irrégulière qui vient alourdir le coût
du dialogue social.
LES MOYENS DÉVOLUS AU DIALOGUE SOCIAL,
COMPLEXES ET ESTIMÉS À 874 M€
47
A -
Le maintien de situations avantageuses
1 -
Une inapplication des droits syndicaux réglementaires
au sein des ministères économiques et financiers
En application du décret n° 82-447 du 28 mai 1982 relatif à
l’exercice du droit syndical dans la fonction publique
42
, le volume des
droits syndicaux réglementaires est calculé à partir du nombre d’électeurs
inscrits au comité technique ministériel (CTM), à raison d’un équivalents
temps plein (ETP) pour 230 électeurs. La baisse des effectifs des ministères
économiques et financiers a mécaniquement entraîné celle des droits
réglementaires à chaque élection, ce volume étant toutefois garanti pour la
durée de la mandature. Après les élections de 2018, les droits
réglementaires sont ainsi passés de 651,2 ETP à 608,1 ETP (- 43,1 ETP).
Dans son rapport susmentionné de 2021, la Cour a relevé qu’une
réforme de ces droits avait été engagée en vue d’un rapprochement avec le
droit commun d’ici 2021. Les moyens d’atteindre cet objectif n’ont
cependant pas été mis en œuvre.
Lors de la réunion du comité technique ministériel (CTM) du 23 juin
2022, le ministre des comptes publics a en effet indiqué qu’il souhaitait le
maintien d’un
« dialogue social soutenu »
et qu’il
« n’y aurait pas de baisse
des droits réglementaires »
. En conséquence, la diminution mécanique de 55
ETP liée à la baisse des effectifs des quatre dernières années n’a pas été
répercutée sur l’actuelle mandature (2023-2026) : le volume global de
608
ETP de la mandature précédente a été reconduit au cours de cette période
au lieu du plafond de 553 ETP qui aurait résulté de l’application de la loi.
Tableau n° 6 :
comparaison entre les droits réglementaires
et les droits effectivement ouverts
Avant
les élections
de 2018
Entre
les élections
de 2018 et 2022
Après
les élections
de 2022
Droits
réglementaires
651 ETP
608 ETP
553 ETP
Droits effectivement
ouverts
651 ETP
608 ETP
608 ETP
Source : Cour des comptes
42
L’ordonnance n° 2021-1574 du 24 novembre 2021 portant partie législative du code
général de la fonction publique qui a codifié, dans son livre II, l’exercice du droit
syndical et le dialogue social.
LES MOYENS DÉVOLUS AU DIALOGUE SOCIAL,
COMPLEXES ET ESTIMÉS À 874 M€
48
Les organisations syndicales des ministères économiques et
financières bénéficiaient en outre d’un volume de droits supplémentaires
dérogatoires, qui résultaient de la consolidation de « droits historiques »,
établie fin 2011 à 217 ETP, lors de la mise en œuvre de la réforme des droits
syndicaux. Ces droits dérogatoires ont été reconduits au même niveau par
arrêté en 2013 et en 2014. Fin 2014, il a été décidé de baisser leur volume
pour chaque organisation syndicale : ils sont passés de 217 à 169 ETP
(réunion du CTM du 26 mai 2015) et devaient être supprimés d’ici fin 2021.
Ce dispositif a un impact sur les directions, dans la mesure où les permanents
syndicaux sont rémunérés sur leurs crédits de personnel (titre 2).
Qualifiée de « plan social » par les fédérations syndicales, cette
réduction significative a fait l’objet d’un dispositif d’accompagnement, qui
a permis d’exclure du contingent des fédérations les permanents partant à
la retraite, l’année de leur départ, et les permanents dit « confédéraux »
43
(38 ETP) siégeant dans des instances confédérales ou fonction publique.
En 2021 et 2022, les ministres ont accepté le report d’une partie de
droits syndicaux non consommées pour tenir compte de l’impossibilité
d’organiser des réunions syndicales en raison de la situation sanitaire, à
hauteur de 37 ETP pour chacune des deux années concernées.
Pour permettre aux fédérations syndicales de préparer les élections
professionnelles de fin 2022, un « bonus électoral » exceptionnel de
12 ETP leur a été accordé.
Enfin, lors de la séance du CTM du 23 juin 2022 précitée, le ministre
des comptes publics a également annoncé le maintien de la prise en charge
des permanents « confédéraux », dans la limite de 45 ETP, et des
permanents partant à la retraite dans l'année, ainsi que la prise en charge
des frais de déplacement des suppléants des formations spécialisées
sécurité, santé et conditions de travail.
Selon les ministères économiques et financiers, ces annonces ont
permis de tenir un discours de retour au droit commun pour les membres
des formations spécialisées santé, sécurité et conditions de travail (FS) et
ainsi de mettre fin aux droits dont disposaient les membres des anciens
CHSCT
44
. Cette évolution s’est accompagnée du maintien de la prise en
charge des frais de déplacement des suppléants des formations spécialisées,
43
Le dispositif des « confédéraux » permet de combler l’absence de prise en charge au
niveau interministériel des permanents syndicaux qui pèsent sur le contingent des
fédérations, calculé sur le périmètre ministériel, et qui exercent un mandat dépassant le
cadre ministériel.
44
Deux jours de préparation pour chaque réunion, au lieu d’une durée égale à la durée
de la réunion.
LES MOYENS DÉVOLUS AU DIALOGUE SOCIAL,
COMPLEXES ET ESTIMÉS À 874 M€
49
dont le principe avait été annoncé par le ministre. Cette facilité, non prévue
par les textes, était attendue par les fédérations, qui estiment que les sujets
discutés au sein des formations spécialisées sont très techniques.
Ces assouplissements ont, selon le ministère, pour objectif principal
de permettre un dialogue social de qualité au sein des nouvelles instances
et un retour au cadre réglementaire à la fin de cette mandature.
Ce nouveau report du retour à la norme, reposant sur de simples
décisions ministérielles, nuit à l’équité de traitement des représentants des
agents publics. La préservation de droits réglementaires dérogatoires et des
deux dispositifs des « retraitables » et des « confédéraux » est à l’origine
du maintien, non prévu par les textes, de plus d’une centaine d’équivalents
temps plein
45
.
Il doit être mis un terme à ces pratiques dérogatoires au droit
commun de la fonction publique, constitutives d’une dépense irrégulière
estimée à 14,6 M€.
2 -
Un dispositif spécifique pour les corps de direction relevant
des ministères sociaux
Les articles 19 et suivant du décret du 19 mars 1986 relatif à
l'exercice du droit syndical dans les établissements mentionnés à l'article 2
de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la
fonction publique hospitalière prévoient que le nombre total en équivalent
temps plein des agents mis à disposition auprès d'organisations syndicales
pour exercer un mandat national est fixé à quatre-vingt-quatre
46
. En sus,
les personnels de catégorie A gérés au niveau national bénéficient d’un
dispositif de mises à disposition spécifique pour l’exercice d’un mandat
national (conformément à un protocole conclu le 10 mai 1999 entre les
ministres chargés de la santé et des affaires sociales et les organisations
syndicales des corps de direction).
Le protocole est appliqué de façon constante depuis 1999 et fait
l’objet de consensus avec les organisations syndicales de directeurs. Selon
la direction générale de l’offre de soins (DGOS), cet accord est logique sur
un plan juridique car il permet aux corps de direction de disposer de temps
syndical au titre des résultats des élections à la commission consultative
45
Soit appliqué au salaire mensuel net moyen des MEF (2020) : 3 036 € x 100 x 12 x 4
= 14,6 M€. (Siasp, Insee, Traitement DGAFP – Sdessi).
46
Les agents ainsi mis à disposition peuvent l'être pour une quotité comprise entre 20 %
et 100 %.
LES MOYENS DÉVOLUS AU DIALOGUE SOCIAL,
COMPLEXES ET ESTIMÉS À 874 M€
50
nationale comme pour l’ensemble des instances de dialogue social dans la
fonction publique. Du fait de la vocation nationale et du statut particulier
des corps de direction, qui sont gérés au niveau national, ce crédit de temps
est accordé sous forme de mise à disposition.
3 -
Des mises à disposition auprès des organisations syndicales
sans fondement juridique dans les secteurs sanitaire,
social et médico-social
Il n’y a pas de mise à disposition de niveau national au sein de la
fonction publique de l’État, la représentativité nationale étant effectuée
grâce aux décharges de services ministérielles et interministérielles.
Cependant les textes ont progressivement autorisé la mise à disposition, au
sein de la fonction publique territoriale et de la fonction publique
hospitalière, de représentants syndicaux pour exercer un mandat syndical à
l’échelon national, à hauteur de 103 agents pour la fonction publique
territoriale
47
et de 102 pour la fonction publique hospitalière
48
.
Les organisations syndicales représentatives dans les établissements
privés à but non lucratif bénéficient également de mises à disposition à
hauteur de 56 ETP, financés sur fonds publics. Ainsi, un mécanisme de
prise en charge de mises à disposition syndicales pour l’exercice d’un
mandat à l’échelon national a été mis en place dans le périmètre privé à but
non lucratif des secteurs sanitaire, social et médico-social. Ce mécanisme
repose sur deux accords distincts, dont le second n’a pas de base juridique :
-
la
convention
collective
nationale
des
établissements
privés
d'hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif
du 31 octobre 1951 ;
-
l’accord du 23 avril 2015 de la branche sanitaire, sociale et médico-
sociale à but non-lucratif relatif à la mise à disposition de salariés
auprès d’une organisation syndicale.
Aux termes de ces accords, le personnel mis à disposition des
syndicats conserve son contrat de travail et continue d’être rémunéré par
son employeur officiel. Le coût de remplacement du salarié est compensé
par une majoration de la dotation de l’établissement. Cette compensation
47
Arrêté du 25 janvier 2023 fixant la répartition entre les organisations syndicales des
103 agents de la fonction publique territoriale mis à disposition au titre de l'article
L. 213-3 du code général de la fonction publique.
48
84 au titre du décret n° 86-660 du 19 mars 1986 + 6,5 au titre du décret n° 2012-148
du 30 janvier 2012 relatif au conseil commun de la fonction publique + 12 au titre du
protocole d’accord du 10 mai 1999 .
LES MOYENS DÉVOLUS AU DIALOGUE SOCIAL,
COMPLEXES ET ESTIMÉS À 874 M€
51
nécessite que la direction générale de l’offre de soins (DGOS) définisse
le fondement juridique des mises à disposition au titre de l’accord du
23 avril 2023, qui pèsent sur les dotations budgétaires octroyées aux
établissements.
***
Il doit être mis fin dans des délais rapides à la perpétuation de
situations dérogatoires après le vote de la loi de 2019 comme à l’absence
de fondements juridiques précis de certaines pratiques.
4 -
La possibilité offerte aux collectivités locales d’opter
pour des conditions plus avantageuses
L’article 2 du décret du 3 avril 1985 précité, relatif à la fonction
publique territoriale, offre à l’autorité territoriale la possibilité d’offrir aux
organisations syndicales des conditions plus avantageuses que celles fixées
par ledit décret. Il garantit également le maintien des règles ou accords
existants avant le 4 avril 1985
49
, s’ils sont plus favorables et de même
nature que ceux résultant du décret modifié en décembre 2014.
Les contrôles réalisés par les chambres régionales des comptes n’ont
pas permis de détecter des situations particulièrement avantageuses qui
auraient été négociées en faveur des organisations syndicales. Les
exemples recueillis tendent davantage à répondre à une problématique
locale spécifique ou à rapprocher les règles en vigueur de celles applicables
dans les deux autres fonctions publiques.
Ainsi, en 2018, suite à un accord local, la durée des séances
regroupées du CT-CHSCT du centre de gestion de l’Isère a été portée à une
journée et le temps alloué pour les préparer à une journée et demi. Par
ailleurs, la fongibilité des contingents de temps tirés de la représentativité
syndicale a pu être constatée à Saint-Germain-en-Laye. Pour autant, rien
ne semble justifier l’application de règles différentes pour la fonction
publique territoriale.
***
Au total une harmonisation des règles relatives aux moyens humains
alloués aux organisations syndicales au sein des trois fonctions publiques
permettrait de clarifier le cadre d’intervention des représentants syndicaux
dans un contexte ou la mobilité entre les trois fonctions publiques est
encouragée.
49
Date initiale de publication dudit décret.
LES MOYENS DÉVOLUS AU DIALOGUE SOCIAL,
COMPLEXES ET ESTIMÉS À 874 M€
52
B -
L’attribution de moyens matériels complémentaires
significatifs
En dehors des cas prévus à l’article 3 du décret du 28 mai 1982
relatif à l'exercice du droit syndical dans la fonction publique, qui prévoit
qu’en cas d'impossibilité de mettre des locaux équipés à la disposition des
organisations syndicales représentatives, une subvention représentative des
frais de location et d'équipement des locaux est versée aux organisations
syndicales concernées, certains ministères prennent en charge d’autres
types de dépenses, comme le ministère des armées, celui de la justice, le
ministère de l’agriculture, les ministères sociaux, le ministère de la
transition écologique ou le ministère de l’économie et des finances. Les
dépenses prises en charge se traduisent soit par l’attribution de subventions
de fonctionnement, soit par l’acquisition directe de petit matériel
informatique ou bureautique.
Dans ce cadre, les ministères économiques et financiers allouent
chaque année depuis 1985 une subvention aux fédérations syndicales
ministérielles représentatives pour leurs besoins de fonctionnement. Celle-
ci repose sur une décision ministérielle annuelle et est répartie en fonction
du nombre de sièges détenus par les fédérations au comité social
d’administration
ministériel
(CSA M).
Hormis
une
augmentation
exceptionnelle de 25 % en 2011, le montant de la subvention, fixé à
291 306 €, a été reconduit depuis d’année en année sans évolution alors
que les données révèlent une baisse sensible du nombre d’élus. Le
versement
de
cette
subvention
pour
participation
aux
frais
de
fonctionnement des fédérations fait l’objet d’une convention établie entre
le secrétariat général et chacune des fédérations attributaires.
Quant à lui, le ministère de l’intérieur et des Outre-mer consacre
1 444 186 € par an depuis 2018 à ses organisations représentatives. Le
budget annuel prévisionnel établi par la direction des ressources humaines,
des finances et des soutiens de la police nationale pour la nouvelle
mandature (2023-2026) se chiffre à 1 445 000 € annuels. Le ministère de
l’éducation nationale n’accorde pas de subvention de fonctionnement aux
fédérations syndicales représentées dans ses instances.
Les textes ne prévoient le versement d’aucune subvention s’agissant
des deux autres fonctions publiques, ni au niveau local, ni au niveau
national pour les organisations syndicales représentées dans les deux
conseils supérieurs.
LES MOYENS DÉVOLUS AU DIALOGUE SOCIAL,
COMPLEXES ET ESTIMÉS À 874 M€
53
Pour autant, la loi du 17 janvier 2002 de modernisation sociale
50
dispose que les collectivités territoriales sont autorisées à verser des
subventions aux structures locales des organisations syndicales. Le décret
du 25 juillet 2005 relatif à l'attribution par des collectivités territoriales de
subventions de fonctionnement aux structures locales des organisations
syndicales représentatives en fixe les modalités
51
. Cette faculté a été
utilisée par le département de la Haute-Loire, qui a versé 73 954 € à ses
organisations syndicales en 2023.
III -
Un pilotage déficient des moyens humains
consacrés au dialogue social
La participation des représentants des agents aux instances du
dialogue social peut prendre plusieurs formes (détachements, autorisations
spéciales d’absence, décharges d’activité de service) et être accordée selon
les conditions définies par les décrets propres à chacune des fonctions
publiques.
Au sein de certaines administrations, le recensement de ces
différentes facilités s’est grandement amélioré. La situation n’est toutefois
pas identique parmi l’ensemble des employeurs publics. Le déploiement
d’instruments de mesure adaptés reste d’actualité et doit accompagner le
processus de modification des pratiques de négociation des employeurs et
des organisations syndicales, en germe dans la loi de transformation de la
fonction publique.
A -
Une mesure des coûts souvent impossible en raison
d’organisations complexes
1 -
Une connaissance partielle du coût des élections
Le
coût
global
des
séquences
électorales
sur
lequel
les
administrations
communiquent
n’intègre
qu’exceptionnellement
les
« apports
en
nature »
des
administrations
(personnels
mobilisés,
50
Article 216 de la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002, de modernisation sociale codifié aux
articles L. 2251-3-1, L. 3231-3-1 et L. 4253-5 du code général des collectivités territoriales.
51
Décret n° 2005-849 du 25 juillet 2005 relatif à l'attribution par des collectivités
territoriales de subventions de fonctionnement aux structures locales des organisations
syndicales représentatives
LES MOYENS DÉVOLUS AU DIALOGUE SOCIAL,
COMPLEXES ET ESTIMÉS À 874 M€
54
impressions internes etc.). Ainsi le ministère de l’intérieur et des outre-mer
évoque un montant total des prestations pour les élections professionnelles
de 2022 de 2 297 635€ TTC, dont 1 524 187 € pour la solution de vote
(marché public passé avec un prestataire), sans évoquer les charges
supportées par le ministère lui-même pour le bon déroulement d’un
tel scrutin.
Le coût complet d’organisation de ces élections pour le ministère de
l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique
s’est également révélé difficilement quantifiable. En effet, les moyens
internes mobilisés n’ont fait l’objet d’aucune consolidation et le marché
commun passé entre le ministère et le ministère de l’Europe et des affaires
étrangères associait également certains établissements publics et autorités
administratives indépendantes
52
.
La Cour relève toutefois la bonne pratique mise en œuvre au CHU
de Grenoble Alpes qui a été capable de produire un coût proche du coût
complet.
Le coût des élections au CHU Grenoble-Alpes
Pour la session 2022, l’organisation des élections représentait une
logistique importante, pour le CHUGA qui organisait ses propres élections,
pour le CSE et les dix commissions administratives paritaires locales, mais
aussi pour le CSE du groupement de coopération sanitaire de la blanchisserie,
les dix commissions administratives paritaires départementales et la
commission consultative paritaire pour les 43 établissements de l’Isère. Les
élections ont eu lieu par voie électronique. Un protocole d’accord pré-électoral
a été élaboré avec les organisations syndicales conformément à la législation
Le coût des élections est estimé à près de 168 000 € par le CHU,
réparti à 46 % pour la propagande papier, à 36 % en temps agents,
notamment pour la gestion des effectifs d’électeurs et des listes de
candidats, mais aussi pour l’organisation matérielle, le temps de négociation
avec les organisations syndicales, et la gestion du marché pour le prestataire
de vote électronique, et enfin à 19 % pour la solution de vote électronique.
52
Les cinq instituts régionaux administratifs, l'Agence nationale des fréquences,
l’Autorité de la concurrence, l’Autorité nationale des jeux pour le MEFSIN et l'Agence
pour l’enseignement français à l’étranger pour le MEAE.
LES MOYENS DÉVOLUS AU DIALOGUE SOCIAL,
COMPLEXES ET ESTIMÉS À 874 M€
55
2 -
Une mutualisation des temps syndicaux insuffisamment
optimisée au sein des fonctions publiques
territoriale et hospitalière
La
mutualisation
des
crédits
de
temps
syndicaux
entre
établissements est effective dans la fonction publique hospitalière depuis
2016 pour les établissements de moins de 800 agents. Les crédits d'heures
syndicales qui n'ont pu être utilisés durant l'année civile dans les
établissements de moins de 800 agents sont additionnés au niveau
départemental au profit de chaque organisation syndicale bénéficiaire et
sont reportés pour être utilisés l'année suivante par chaque organisation
syndicale. Pour autant, et plus encore qu’au niveau de chaque
établissement, la sous-consommation des heures globalisées est patente.
Ainsi, pour le département de l’Isère, le CHU de Grenoble indique que
seules près de 10 % de ces heures globalisées ont été consommées en 2022.
Une telle possibilité de mutualisation est également ouverte, sous
conditions, dans la fonction publique territoriale
53
. Ainsi, la chambre
régionale des comptes
Occitanie
a relevé que
le principe des conventions
de mutualisation de crédits d’heures avait été évoqué fin 2021 au sein du
bureau du centre de gestion des Hautes Pyrénées, mais qu’il ne lui a pas été
donné une suite favorable, afin de ne pas faire payer les décharges
syndicales des collectivités adhérentes non affiliées aux collectivités
affiliées. Elle a encouragé le CDG à continuer de rechercher la signature
de conventions avec les établissements non obligatoirement affiliés afin de
mutualiser l’utilisation de ces crédits. À l’inverse, le centre de gestion de
l’Eure a signé deux conventions avec le centre communal d’action sociale
et la ville d’Évreux et deux syndicats pour permettre une mutualisation du
crédit de temps de travail. Il retire un avis positif de ce dispositif, qui
permet, à ses yeux, une sécurisation des conditions d’exercice de l’activité
syndicale tout en formalisant une enveloppe affectée, facilitant ainsi la
gestion par l’établissement public de ce volet financier.
53
L’article L. 214-6 du code général de la fonction publique dispose qu’un centre de
gestion et une ou plusieurs collectivités ou établissements non obligatoirement affiliés
peuvent mutualiser leurs crédits de temps syndical par convention.
LES MOYENS DÉVOLUS AU DIALOGUE SOCIAL,
COMPLEXES ET ESTIMÉS À 874 M€
56
3 -
Des prévisions budgétaires peu précises pour les centres
de gestion de la fonction publique territoriale
La sous consommation des crédits de temps, combinés à d’autres
facteurs, rendent difficile la réalisation de prévisions budgétaires, en
particulier pour les centres de gestion de la fonction publique territoriale
54
,
qui se retrouvent parfois dans l’incapacité de réaliser de prévisions
budgétaires fiables.
La chambre régionale des comptes Occitanie a constaté la
reconduite de pratique d’inscriptions de crédits à des niveaux élevés au
centre de gestion de la fonction publique territoriale des Hautes-Pyrénées,
malgré des taux très bas de réalisation, que l’ordonnateur justifie par le
manque de visibilité sur les
« remboursement d’activités syndicales »
. Elle
a également observé, pour le centre de gestion de Haute-Garonne, que le
montant des remboursements au titre des activités syndicales (autorisations
d’absences et décharges d’activité de service) était en forte hausse
(+ 41 %), malgré une diminution du nombre d’heures financées, en raison
d’une hausse significative du coût moyen de l’heure (qui dépend de la
situation individuelle des agents concernés par les décharges).
Pour le centre de gestion de l’Isère, la chambre régionale des
comptes Auvergne-Rhône-Alpes a relevé que le poste de dépenses a connu
de fortes variations d’un exercice à l’autre et une augmentation importante
entre 2015 et 2022, due à un nombre croissant de collectivités demandeuses
et d’agents éligibles, mais également à l’augmentation du nombre de
réunions d’information organisées en 2017 et en 2018, ainsi qu’à
l’augmentation des effectifs.
B -
Des outils de suivi inadaptés ou mal utilisés
En juin 2010, un rapport des inspections générales sur le bilan des
moyens alloués aux organisations syndicales dans la fonction publique
55
a
mis en lumière des lacunes dans la comptabilisation et le suivi des absences
54
En application des dispositions du 11° du II de l’article 23, des articles 100 et 100-1
de la loi du 26 janvier 1984 et des articles 14 et 19 du décret du 3 avril 1985, les centres
de gestion sont chargés, pour les collectivités et établissements qui leur sont affiliés, de
suivre et calculer les contingents d’autorisations d’absence imputables sur le crédit de
temps syndical et de décharges d’activité de service accordées aux représentants
syndicaux, ainsi que de rembourser aux collectivités et établissements employeurs les
charges salariales de toute nature y afférentes.
55
Rapport de l’IGA, l’IGAS, l’IGAENR et le CGEF sur le bilan des moyens alloués
aux organisations syndicales dans la fonction publique, juin 2010.
LES MOYENS DÉVOLUS AU DIALOGUE SOCIAL,
COMPLEXES ET ESTIMÉS À 874 M€
57
pour les trois fonctions publiques. Il a notamment relevé que le recensement
des absences syndicales n’était pas toujours effectué, que les différents cas
d’absences étaient volontairement ou non mélangés, que le système de
gestion des ressources humaines ne faisait pas ressortir les totalisations des
absences syndicales et que les réunions organisées pendant le temps de
travail ne faisaient pas systématiquement l’objet d’une autorisation
d’absence et n’étaient donc pas toujours comptabilisées. Le rapport a aussi
souligné que de nombreux services, parmi lesquels l’éducation nationale,
pratiquaient la fongibilité des autorisations spéciales d’absences, les
transformant en décharge d’activité de service dans le but de mieux organiser
le service.
Le suivi des moyens demeurait très inégal et ne faisait pas l’objet
de demandes particulières de suivi de la part des employeurs.
Plus de dix ans plus tard, ce constat reste d’actualité tant la gestion
des ressources humaines est encore trop souvent limitée par les systèmes
d’information utilisés et rarement adaptés aux usages que les textes invitent
pourtant à mettre en œuvre. Les outils informatiques existants ne
permettent pas un suivi fin des absences pour participation aux instances
du dialogue social et, par conséquent, de leur impact budgétaire. Les bases
de données existantes ne sont pas déployées de manière homogène et,
souvent, les administrations ont elles-mêmes développé leurs propres outils
numériques, facteur de fragmentation de l’information.
La fiabilité des données peut être sujette à caution. La qualité de
saisie des participations aux instances dépend toujours largement du
contexte local et ne peut être considérée comme exhaustive. Toutes les
participations aux instances de dialogue social ne sont pas recensées et les
différents secrétariats généraux des ministères ne disposent pas de données
précises sur le nombre moyen de jours accordés par représentant et le coût
des journées d’autorisations spéciales d’absence (ASA).
Les architectures informatiques RH déployées dans les services
déconcentrés sont parfois différentes de celles utilisée par les niveaux
centraux et une certaine fongibilité entre les différents types d’autorisation
d’absence peut être pratiquée. De surcroît, les différences d’organisation
des organisations syndicales entre les niveaux locaux et national
compliquent le suivi de la consommation des ASA.
Très souvent, le recensement des absences pour représentation
syndicale est déclaratif. D’abord réalisé manuellement au niveau local, il
est ensuite transmis au niveau central pour agrégation. L’administration
centrale dispose alors bien de la connaissance du contingent de décharges
d’absence au niveau national. En revanche, elle ne connaît souvent pas le
LES MOYENS DÉVOLUS AU DIALOGUE SOCIAL,
COMPLEXES ET ESTIMÉS À 874 M€
58
volume d’absences pour assister aux instances des différents échelons
déconcentrés (CSA régional, CSA direction départementale), ces dernières
relevant d’autres ministères.
Au sein des ministères économiques et financiers, certaines
directions comme la direction générale de la concurrence, de la
consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) indiquent ne pas
pouvoir suivre informatiquement les autorisations d’absence accordées
en raison
« du risque de conflit avec le principe de liberté syndicale
». Pour
sa part, la direction générale des entreprises (DGE) entretient au niveau de
son réseau des relations étroites avec le ministère des affaires sociales qui
compliquent le suivi. Par ailleurs, le passage au distanciel a réduit une
grande partie des temps de déplacement.
Au ministère de l’éducation national, le suivi des participations des
représentants syndicaux est bien souvent effectué au niveau académique et
il n’existe pas de données consolidées aux niveaux interacadémique et
national. Dès lors, il en résulte une connaissance partielle et bien souvent
sous-évaluée des moyens mobilisés par le dialogue social au sein de
l’administration la plus importante de l’État. Toutefois, afin de remédier à
cette situation, ce ministère s’est engagé à faire, dès la rentrée 2024, un
suivi de la consommation des crédits de temps syndicaux les plus sensibles
via
l’utilisation d’une application de gestion spécifique.
Au ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire
(MASA), le suivi des autorisations d’absences accordées par les supérieurs
hiérarchiques directs, au bénéfice de représentants syndicaux affectés en
grand nombre au sein d’établissements et services répartis sur tout le
territoire, ne font pas l’objet d’une remontée au niveau ministériel. Le
ministère a néanmoins mis en place un dispositif permettant de suivre le
niveau de répartition du crédit de temps syndical. Un outil de suivi permet
désormais d’établir, à date, le droit de tirage des organisations syndicales
au titre du crédit de temps syndical, dans l’optique de garantir son
utilisation dans les limites définies par la réglementation
Faute de suivi centralisé de la consommation réelle des ASA
attribuées, il n’est matériellement pas possible de quantifier précisément
les ASA consommées au titre de chaque fondement.
A fortiori
, il n’existe
pas de suivi du nombre de jours moyens accordés par représentant et du
coût correspondant, alors que ces éléments pourraient figurer parmi les
indicateurs du rapport social unique.
Il en est de même pour les fonctions publiques territoriale et
hospitalière : peu de collectivités ou d’établissements ont été capables de
transmettre aux chambres régionales des comptes une version consolidée
LES MOYENS DÉVOLUS AU DIALOGUE SOCIAL,
COMPLEXES ET ESTIMÉS À 874 M€
59
des temps syndicaux utilisés pendant toute la période sous contrôle. Ainsi
la communauté de communes du Grand Charollais (Saône-et-Loire) n’a créé
un tableau de bord de suivi du contingent d’heures par liste et par agent que
depuis les élections professionnelles de 2022. De même, le centre
hospitalier François Quesnay de Mantes-la-Jolie n’a pas été en mesure de
préciser la consommation des crédits d’heures par les représentants du
personnel entre 2018 et 2023.
Les juridictions financières ont régulièrement constaté une
mauvaise utilisation des systèmes d’informations, voire un manque de
rigueur dans la gestion des absences des agents. À Achères (Yvelines), les
droits d’absence effectivement mobilisés ne sont pas comptabilisés, alors
que le logiciel RH utilisé par la commune le permet. À Saint-Orens de
Gameville (Haute-Garonne), il existe un vrai décalage entre les
potentialités de l’outil de gestion de la fonction RH et l’usage qui en est
fait, les absences (hors congés) étant relevées et tenues à jour manuellement
à partir d’un document sur support non dématérialisé. Au centre de gestion
de l’Aisne, l’utilisation du crédit de temps syndical fait l’objet d’un suivi
régulier par les services de l’établissement mais ce suivi est réalisé
manuellement, les informations étant archivées, par organisation syndicale,
sous forme papier.
Parmi les différentes absences, celles utilisées dans le cadre du
dialogue social sont rarement quantifiées de manière satisfaisante. En
particulier, les autorisations d’absence accordées aux représentants
syndicaux appelés à siéger dans des instances paritaires ou statutaires, ou à
des réunions sur convocation de l’administration, ne sont ni contingentées
ni plafonnées et leur suivi est très aléatoire d’une collectivité à l’autre.
Si le volume d’heures passées en réunions d’instances peut être
appréhendé de manière globale, les temps de préparation et de compte
rendu ainsi que les temps de trajet ne sont pas intégrés de façon
systématique, alors que c’est ce volume consolidé qui devrait permettre de
mesurer l’impact réel de la participation au dialogue social. La situation est
encore plus critique si l’on cherche à y intégrer le volume d’heures passé
en réunion informelle, qui fait rarement l’objet d’un suivi.
C -
Une gestion des ressources humaines plutôt alourdie
Selon l’étude d’impact de la loi de transformation de la fonction
publique, la réforme du dialogue social en matière de questions
individuelles relatives au déroulement de carrière des agents publics devait
permettre aux administrations de proposer une gestion des ressources
LES MOYENS DÉVOLUS AU DIALOGUE SOCIAL,
COMPLEXES ET ESTIMÉS À 874 M€
60
humaines optimisée. Or les juridictions financières ont plutôt constaté un
accroissement de la charge de travail de ces services.
Jusqu’à l’entrée en vigueur de la loi de transformation de la fonction
publique, les représentants des personnels considéraient qu’ils jouaient un
rôle facilitateur d’interface entre l’administration et les agents pour éclairer
les fondements des décisions relatives à leur carrière en matière de
promotion et de mobilité. Aujourd’hui, de manière générale, les
organisations syndicales estiment ne plus être en mesure de renseigner les
agents sur les justifications d’une absence de promotion, ce qui conduit les
intéressés à s’adresser directement à leur correspondant « ressources
humaines » pour obtenir ces informations.
En conséquence, les services des ressources humaines, dont la
structure, les moyens et la montée en compétences n’ont guère été calibrés
en fonction des attendus de la loi de transformation de la fonction publique,
sont confrontés à un afflux de demandes et rencontrent des difficultés à
répondre aux agents ou organisations syndicales qui les sollicitent.
Ainsi, à la DGFiP, les agents non retenus dans le cadre d’une
promotion ont droit à un retour d’information, soit du niveau local
(directions régionales ou départementales des finances publiques), soit du
niveau central (bureau gestionnaire). Il a été constaté un déport de la charge
de travail vers les fonctions RH notamment quand le volume de
promouvables est conséquent (1 000 à 1 500 dossiers). Face à un traitement
de masse des dossiers, la gestion qualitative des promotions risquerait d’être
remise en cause.
Pour les juridictions financières, l’adaptation de la fonction publique
aux exigences posées par la mise en œuvre de la loi de transformation de
la fonction publique ne peut se faire sans une meilleure prise en compte de
ses impacts en termes d’évolution du pilotage des ressources humaines afin
de répondre aux demandes des agents en matière de reconnaissance de leur
implication et de leur performance professionnelle.
LES MOYENS DÉVOLUS AU DIALOGUE SOCIAL,
COMPLEXES ET ESTIMÉS À 874 M€
61
__________ CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS __________
Les moyens alloués aux organisations représentatives des agents
sont estimés
a minima
à 874 M€. Complexes dans leur mise en œuvre, ils
sont peu suivis et peu connus. Ils doivent dorénavant faire l’objet d’un
pilotage plus précis visant à :
-
identifier avec précision les facilités accordés aux représentants
syndicaux. Or, cette connaissance est encore parcellaire. Leur
recensement, qui s’est amélioré au sein de certaines administrations,
reste le plus souvent incomplet et fragmentaire ;
-
mesurer de manière fiable le coût des moyens mobilisés. Les
indicateurs retenus souffrent de défauts qu’il conviendrait de corriger
par la mise en place de systèmes d’information adaptés ;
-
veiller à éviter la déperdition de moyens par le maintien de dispositifs
exorbitants du droit commun.
La Cour formule les recommandations suivantes :
1.
adapter les systèmes d’information pour produire des données
relatives aux moyens consacrés au dialogue social au sein de la
fonction publique (ministère de la transformation et de la fonction
publiques, secrétariats généraux des ministères) ;
2.
mettre un terme aux dispositifs accordant des droits syndicaux
dérogatoires (ministère de la transformation et de la fonction
publiques, ministère du travail, de la santé et des solidarités, ministère
de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et
numérique).
Chapitre III
Les conditions d’un dialogue social
rénové
La loi de transformation de la fonction publique a redéfini les
modalités de conduite du dialogue social avec l’ambition de le rendre plus
stratégique et efficace. La réforme de la carte des instances paritaires ne
saurait suffire seule à répondre à cet objectif. Pour l’atteindre, d’autres
leviers, pour partie prévus par la loi du 6 août 2019, doivent être mobilisés.
I -
Renforcer l’accessibilité des informations
utiles au dialogue social
Pour nourrir le débat sur la politique des ressources humaines,
l’article 5 de la loi de transformation de la fonction publique et ses textes
d’application imposent, au plus tard en 2024 pour les données 2023, la
production d’un rapport social unique public (RSU) pour chaque comité
social, ainsi que la mise à disposition des membres du comité social des
données ayant servi à composer les indicateurs
56
de ces RSU constituant la
base de données sociales (BDS)
57
.
56
Arrêté du 7 mai 2021 pour la fonction publique de l’État, arrête du 10 décembre 2021
pour la fonction publique territoriale, arrêté du 28 avril 2022 pour la fonction publique
hospitalière.
57
La loi de sécurisation de l’emploi du 14 juin 2013 a créé la base de données
économique et sociale (BDES), suite à l’accord national interprofessionnel du
11 janvier 2013. La finalité de la BDES est d’abord l’information des institutions
représentatives du personnel (IRP), afin de leur permettre d’émettre un avis informé sur
la politique économique et sociale de l’entreprise.
LES CONDITIONS D’UN DIALOGUE SOCIAL RÉNOVÉ
64
Les objectifs de la base de données sociales (BDS)
Les trois objectifs de la BDS, tels que détaillés dans l’exposé de
l’amendement qui l’a créée, sont «
l’identification des enjeux stratégiques à
court terme pour chaque entité
», «
l’efficience du pilotage des lignes
directrices de gestion et des politiques de ressources humaines à plus long
terme
» et «
la transparence de la gestion des ressources humaines attendue de
l’ensemble des acteurs du dialogue social
».
Cette base, produite par l’administration, contient des informations
concernant l’emploi, le recrutement, les parcours professionnels, la
formation, les rémunérations, la santé et la sécurité au travail,
l’organisation du travail et l’amélioration des conditions et de la qualité de
vie au travail, l’action sociale et la protection sociale, le dialogue social,
la discipline.
Le RSU remplace le rapport sur l’état de l’entité, appelé
communément bilan social, dont la présentation au moins tous les deux ans
au comité technique avait été imposée par l’article 33 de la loi statutaire du
26 janvier 1984. Il doit permettre de formaliser la politique de gestion des
ressources humaines à partir d’un tronc commun de données fiables,
regroupées en dix thèmes pour les fonctions publiques d’État et territoriale
et neuf thèmes
58
pour la fonction publique hospitalière.
Le principal intérêt du RSU réside dans les synthèses qui en sont faites
aux niveaux national et local, qui permettent aux collectivités locales,
établissements ou administrations de connaître les grandes tendances
observées, de se situer plus facilement et d’effectuer des comparaisons avec
les structures similaires.
Pour la fonction publique de l’État, l’arrêté du 7 mai 2021 impose
la production de 102 indicateurs pour les rapports sociaux uniques des
comités sociaux d’administration (CSA) locaux et directionnels. S’y
ajoutent 98 indicateurs pour le rapport social unique ministériel, portant à
200 le nombre total d’indicateurs suivis au niveau ministériel. Parmi ces
200 indicateurs, 89 sont relatifs à la santé et la sécurité au travail. Les
difficultés rencontrées par les services portent principalement sur le
nombre d’indicateurs à décliner par CSA, le niveau de croisement attendu
sur une grande partie des indicateurs et les 89 indicateurs liés à la santé et
la sécurité au travail. L’enquête a montré que la mise à disposition des
58
L’emploi, le recrutement, le parcours professionnel, la formation, la rémunération, la
santé et sécurité au travail, l’organisation au travail et le temps de travail, l’action
sociale et la protection sociale, le dialogue social.
LES CONDITIONS D’UN DIALOGUE SOCIAL RÉNOVÉ
65
données sociales auprès des membres des CSA nécessitait une évolution
des outils de recueil de ces données.
Dans ce contexte, la direction générale de l’administration et de la
fonction publique (DGAFP) a transmis aux ministères une version
amendée de l'annexe de l'arrêté du 7 mai 2021 précité. Ce projet, modifié
en fonction des retours des ministères, devrait faire l’objet de discussions
avec les organisations syndicales. Pour la DGAFP, cet exercice vise, d'une
part, à réduire substantiellement le nombre d'indicateurs et, d'autre part, à
simplifier les indicateurs restants, grâce à des définitions plus synthétiques,
compréhensibles par l’ensemble des acteurs concernés (gestionnaire RH,
juristes, informaticiens, etc.).
Pour la fonction publique hospitalière, le RSU comprend des
thématiques que l’on retrouvait dans le bilan social (recrutements,
formation, mobilité, rémunérations, égalité professionnelle…). Le rapport
est plus ambitieux et est désormais obligatoire pour les établissements, sans
distinction de taille
59
. Au premier trimestre 2024, l’ouverture de la BDS
aux organisations syndicales n’était effective pour aucune des trois
fonctions publiques. Elle rencontre même des difficultés à être mise en
œuvre dans la fonction publique hospitalière, certains établissements,
comme le Centre hospitalier de la Dracénie à Draguignan, étant toujours
en attente en mai 2024 de la fourniture par le prestataire informatique des
requêtes nécessaires au calcul des indicateurs.
Un rapide état des lieux conduit à constater une augmentation
sensible du nombre d’indicateurs, conjuguée à une fréquence de production
désormais annuelle pour toutes les structures, ce qui pose la question de la
capacité des administrations à produire les éléments demandés dans les
délais. Nombre de comptes rendus de réunion du conseil supérieur de la
fonction publique hospitalière CSFPH soulignent ainsi que de nombreux
établissements ne souscrivent toujours pas à cette obligation, qui ne
reposait, pourtant jusqu’alors que sur les seuls établissements de plus de
300 agents
60
.
Au sein de la fonction publique territoriale, 68 % des collectivités
locales, soit 44 787 structures représentant 1 677 513 agents, avaient saisi
59
L’arrêté du 28 avril 2022 distingue les indicateurs contenus dans la base de données
sociales selon qu’ils sont obligatoires pour tous les établissements ou facultatifs pour
les établissements de moins de 300 agents.
60
Près de 19 % des établissements n’avaient pas réalisé leur bilan social en 2021, contre
20 % en 2020. L’ensemble des données recueillies pour 2021 ne couvraient que 54 %
des agents de la FPH et 62 % des agents hospitaliers.
LES CONDITIONS D’UN DIALOGUE SOCIAL RÉNOVÉ
66
leurs données sociales 2022 dans les délais impartis dans l’application
spécifique des centres de gestion. Elles étaient plus nombreuses l’année
précédente
61
. Selon une enquête de
La Gazette des communes
de novembre
2023, les premiers freins viendraient du nombre d’indicateurs (près de
110), jugés trop nombreux et détaillés, et sur les difficultés à comprendre
le périmètre que recouvrent certains indicateurs en matière de santé et de
sécurité au travail, de droits sociaux ou de dialogue social.
Lorsque le bilan social ou le RSU existe, les données présentées ne sont
pas toujours pertinentes et fiables. Elles donnent rarement lieu à des échanges
nourris en instance : la présentation de l’état de la collectivité y est même
parfois occultée. Ainsi, à Ajaccio, à Vierzon ou en Guyane, les chambres
régionales des comptes ont relevé une connaissance trop imprécise des
effectifs. À Montpellier, les données permettant une approche complète et
contextualisée des ressources humaines étaient absentes des bilans sociaux.
Pour la communauté d’agglomération Beaune Côte et Sud, des données
sociales restent à fiabiliser. Dans le département de la Drôme, le comité
technique n’a été saisi de l’état de la collectivité qu’une seule fois depuis
six ans
62
.
***
Pour faire du RSU le support d’un dialogue social stratégique, un
travail de rationalisation est à mener. Il s’agit de concentrer l’exposition
des données obligatoires sur un nombre restreint d’indicateurs, susceptibles
d’être renseignés de façon homogène par tous les employeurs publics afin
de pouvoir faire l’objet de consolidations robustes et d’une exploitation
rapide par les parties prenantes du dialogue social.
La DGAFP a indiqué à la Cour qu’un travail était engagé avec les
organisations syndicales dans le cadre d’un groupe de travail ayant pour
objectif de modifier, dans le sens d’un allègement, la base de données sociales.
II -
Mieux distinguer gestion de proximité
et gestion stratégique des ressources humaines
Selon le baromètre Horizons 2023
63
, le dialogue social apparaît dans
la fonction publique territoriale comme un axe prioritaire de la stratégie
RH pour seulement 1,1 % des répondants. Pourtant, l’une des orientations
61
45 344 RSU correspondant à 1 598 854 agents avaient été renseignés.
62
En 2018.
63
Étude menée auprès de 2 200 collectivités locales.
LES CONDITIONS D’UN DIALOGUE SOCIAL RÉNOVÉ
67
à conduire pour l’optimiser consisterait à rechercher une plus grande
proximité entre le dialogue social et les agents, de façon à ce que les parties
prenantes s’appuient sur une perception aussi juste que possible des
problèmes concrets à résoudre.
Cette perspective invite à davantage de pragmatisme, fondé sur une
meilleure répartition des rôles entre ce qui relève du niveau national ou
local du dialogue social, en laissant aux acteurs locaux des marges de
manœuvre compatibles avec les objectifs recherchés.
Les dispositions de l’article 53 du décret du 10 mai 2021
invitant le
comité social territorial à débattre au moins une fois par an de la
programmation de ses travaux participent de cette approche. C’est ainsi que
des collectivités locales, comme le département de la Manche
64
, ont adopté
un « agenda social » pluriannuel afin de favoriser la culture du dialogue
social dans leurs services. Toutefois cette pratique de l’agenda social au
sein de la fonction publique territoriale est loin d’être systématique. À
Bastia, pour sa première année de mise en œuvre, cette instance n’a pas
adopté de programme de travail. Au centre intercommunal d’action sociale
du Civraisien en Poitou, aucun agenda particulier n’a été adopté pour faire
vivre le dialogue social.
III -
De nouvelles pratiques de négociation
pour un dialogue social plus stratégique
La loi de transformation de la fonction publique a introduit de
nouvelles modalités de dialogue social. Outre le recours à la médiation par
l’adoption de lignes directrices de gestion qui le rendent possible, elle
comporte des dispositions favorisant la conclusion d’accords négociés
65
dans les trois fonctions publiques et visant à développer une véritable
culture de la négociation dans les pratiques du dialogue social. Cette
évolution prolonge celle engagée par la loi du 5 juillet 2010 portant
rénovation du dialogue social dans la fonction publique, qui a défini les
conditions de validité des accords collectifs entre les organisations
64
Après échange dans le cadre d’une audition des DRH des départements, a été portée
à la connaissance de la Cour la délibération de juin 2023 du conseil départemental de
la Manche approuvant la mise en place d’un agenda social 2023-2027, après avis du
comité social territorial.
65
Ordonnance n° 2021‑174 du 17 février 2021 relative à la négociation et aux accords collectifs
dans la fonction publique et décret n° 2021-904 du 7 juillet 2021 relatif aux modalités de la
négociation et de la conclusion des accords collectifs dans la fonction publique.
LES CONDITIONS D’UN DIALOGUE SOCIAL RÉNOVÉ
68
syndicales représentatives des fonctionnaires et l’autorité administrative
ainsi que les thèmes possibles de négociation, mais sans en tirer de
conséquences sur leur portée juridique.
Or cette nouvelle dimension du dialogue social, au cœur des lois
successives, fait l’objet d’une appropriation extrêmement progressive de la
part des parties prenantes
66
.
A -
Un recours encore limité à la médiation
Concomitamment à la suppression
via
son article 25 de la compétence
des CAP s’agissant des actes de mobilité et de promotion des agents, la loi
de transformation de la fonction publique prévoit l’édiction de lignes
directrices de gestion dont le contenu et les conditions d’élaboration sont
déterminées par le décret du 29 novembre 2019. Certaines lignes directrices
de gestion ministérielles ont prévu qu’en cas de contestation par un agent
n’ayant pas obtenu la mobilité souhaitée, une médiation RH soit
expérimentée, en amont des procédures contentieuses. Ce dispositif se
distingue de celui de la médiation préalable obligatoire (MPO).
Au sein des ministères économiques et financiers, le décret du
15 avril 2021 a modifié le décret du 26 avril 2002
67
instituant un médiateur
afin de permettre à titre expérimental la saisine du médiateur par les agents
du ministère. Celui-ci peut être saisi de toute décision individuelle
défavorable, notamment en matière de mobilité.
La possibilité d’être accompagné d’un représentant d’une organisation
syndicale devant le médiateur
En application du décret n° 2021-449 du 15 avril 2021 portant
expérimentation de la saisine du médiateur du ministère de l’économie, des
finances et de l’industrie par les agents de ce ministère, ceux-ci peuvent, le cas
échéant, saisir le médiateur RH en cas de décision individuelle défavorable
touchant notamment la formation professionnelle et les mesures de
détachement, de placement en disponibilité, de changement d’affectation (hors
sanction disciplinaire), ou encore notamment de révision du compte rendu
d’entretien professionnel. Les agents qui mobilisent le dispositif de médiation
peuvent être accompagnés d’un représentant d’une organisation syndicale. Le
recours à ce dispositif récemment créé reste, à ce stade, très limité.
66
Selon une expression recueillie au cours de l’enquête,
« il faut que les syndicats
changent de culture et que l’administration change de culture »
.
67
Le médiateur institué par décret du 26 avril 2002 au sein des MEF était uniquement
compétent sur les litiges opposant les usagers aux directions et services.
LES CONDITIONS D’UN DIALOGUE SOCIAL RÉNOVÉ
69
L’expérimentation a débuté au premier semestre 2022 et se
terminera le 1
er
septembre 2024. La montée en charge du dispositif est très
progressive, les premières remontées ne permettant pas d’apprécier le
niveau de recours à ce dispositif en régime de croisière (sur 32 saisines,
quatre recevables). Une expérimentation de la médiation RH a été mise en
place au
ministère des armées auprès de l’inspection du personnel civil de
la défense et le bilan devait être présenté au CSA ministériel, lors du
premier semestre 2024. Au ministère de l’agriculture et de la souveraineté
alimentaire, le médiateur de l’enseignement agricole a indiqué avoir reçu
202 saisines en 2022 et 167 en 2023
68
(au 27 novembre 2023). Ces
demandes ont pour objet de rappeler certaines situations individuelles
auprès des bureaux de gestion RH, en vue de faciliter leur traitement. Ces
interventions donnent lieu systématiquement à un règlement des situations
concernées.
Au total, le recours à la médiation demeure encore restreint. En
premier lieu, son champ d’application est trop limité dans chacune des
administrations qui l’ont mise en œuvre. En deuxième lieu, plusieurs
syndicats ont fait état d’une relative méconnaissance de ce dispositif par
les agents. En troisième lieu, cette demande de médiation ne peut avoir
d’effet suspensif et les demandeurs sont donc souvent amenés à présenter
en parallèle un recours contentieux.
A contrario
, pour les agents ne
souhaitant pas s’engager dans une démarche contentieuse, le recours à la
médiation peut être considéré comme risquant de les stigmatiser vis-à-vis
de l’administration. Enfin, l’efficacité du dispositif demeure à confirmer
puisque le médiateur ne peut pas, par nature, s’engager sur une décision.
B -
L’amorce lente du processus de négociation
collective
L’article 14 de la loi de transformation de la fonction publique a
renvoyée le cadrage du recours à la négociation collective à des
ordonnances. Celle du 17 février 2021 relative à la négociation et aux
accords collectifs vise à développer la négociation dans la fonction
publique à l’échelon « local » notamment, par l’extension des domaines sur
lesquels les accords peuvent porter (près d’une quinzaine désormais voire
plus en cas d’accord des parties). Elle ouvre la possibilité de conclure des
accords-cadres, des accords de méthode et des accords sociaux de
proximité. Elle pose le droit d’initiative syndicale pour l’ouverture d’une
négociation.
68
Au 27 novembre 2023.
LES CONDITIONS D’UN DIALOGUE SOCIAL RÉNOVÉ
70
Dans les faits, le recours à la négociation collective se développe
progressivement, même si la pandémie s’est révélée propice à la mise en
œuvre de la réforme, dans la mesure où elle a favorisé l’émergence de
sujets à traiter et à placer à la table des négociations (télétravail, temps et
conditions de travail, …)
69
. Fin 2022, environ 200 accords collectifs
70
avaient été signés dans les trois fonctions publiques. Les premiers accords
négociés ont permis de mesurer le nouvel élan donné au développement
d’une culture de la négociation. La mise en œuvre de la loi de transformation
de la fonction publique s’accompagne d’une accélération du rythme de
conclusions des accords inter-fonctions publiques. Entre 2010 et 2020,
quatre accords négociés avaient été signés à ce niveau. Entre juillet 2021 et
octobre 2023, le dispositif de la négociation collective a fait l’objet, de trois
applications par la signature d’accords, conclus à l’unanimité, relatifs au
télétravail (13 juillet 2021) et à la protection sociale complémentaire (dans
ses volets santé [26 janvier 2022] et volet prévoyance [20 octobre 2023]).
En décembre 2023, le ministre de la fonction publique a indiqué aux
organisations syndicales que la méthode de négociation annuelle sur les
salaires, l’égalité professionnelle
71
, les qualifications et la formation
professionnelle, l’action sociale, l’organisation et les conditions de travail
et les droits syndicaux sont les thématiques retenues qui «
pourront faire
l’objet de négociations
»
72
.
1 -
Un processus de négociation à approfondir
dans la fonction publique d’État
L’ancrage au sein de la fonction publique d’État de la culture de la
négociation constitue l’un des objectifs des ministères. À ce titre, les
ministères économiques et financiers se sont saisis des outils de la
négociation collective en signant, en 2022, un accord de méthode, puis un
accord ministériel sur le télétravail, lequel conduit à réunir périodiquement
69
Le dialogue social dans la fonction publique : état des lieux des pratiques et
perspectives de la mise en œuvre de la réforme 2019-2021
, Réalités du dialogue social,
juin 2022.
70
DGAFP, rapport annuel 2022.
71
Cf. la conclusion de l’accord collectif pour l’égalité professionnelle dans la fonction
publique le 30 novembre 2018, dont le rapport d’initiative citoyenne de la Cour des
comptes sur
La politique d’égalité entre les femmes et les hommes menée par l’État
de
septembre 2023 indique que près de trois mesures sur quatre ont été mises en œuvre
entre 2018 et 2022. Cet accord a été accompagné d’une forte activité réglementaire :
13 décrets ont été publiés entre novembre 2019 et mars 2022.
72
Faute d’accord de méthode sur l’agenda social, c’est le relevé de conclusions des
groupes de travail qui se sont tenus sur le sujet cet automne qui fait office de cadrage.
LES CONDITIONS D’UN DIALOGUE SOCIAL RÉNOVÉ
71
un comité de suivi avec les signataires de l’accord (toutes organisations
syndicales, à l’exception de la CGT). Le recours aux outils collaboratifs a
permis d’échanger en amont des séances de négociation sur les documents
soumis à la signature et de se concentrer sur les sujets de fond lors des
réunions : leur utilisation est désormais admise et souhaitée par les
organisations syndicales. Des négociations ont également été engagées par
les directions à réseau, dont l’aboutissement a conditionné certaines
avancées catégorielles.
La méthode et les outils proposés pour aborder des thématiques
organisationnelles ont été consensuels. Une question continue toutefois de
se poser au regard de la position exprimée par les ministères économiques
et financiers, concernant la portée des accords de méthode et la possibilité
pour les non signataires de tels accords de participer aux négociations
engagées par la suite.
La signature de l’accord ministériel sur le télétravail
73
, premier
accord ministériel signé depuis 11 ans, illustre l’intérêt pour les
organisations syndicales de se saisir des objets du dialogue social.
L’accord ministériel peut offrir la possibilité de mettre sur la table
des négociations de niveau ministériel des sujets qu’une approche
strictement directionnelle ne permettrait pas de traiter. Cela pourrait
notamment être le cas de l’introduction d’une part variable dans les
rémunérations des agents de catégorie B et C permise par l’inscription de
crédits spécifiques en LFI 2023, alors même que les organisations
syndicales de la DGFiP et de la direction générale des douanes et des droits
indirects y sont plutôt défavorables.
La portée de certains accords est cependant incertaine.
Ainsi, dans le cadre de la négociation de l’accord relatif au
télétravail
74
, les organisations syndicales étaient favorables à ce que, dans
le cadre du développement du télétravail, des heures mensuelles
d’information distancielles et des webinaires nationaux soient autorisés.
C’est ce qui a été porté dans la négociation et obtenu dans l’accord, afin de
permettre aux agents en télétravail d’avoir accès à l’information syndicale.
Cette clause de l’accord collectif au niveau ministériel ne s’applique
cependant pas à la DGFiP : les heures mensuelles d’information n’y sont
pas déclinées sous cette forme distancielle, en raison notamment des
73
Cet accord a été signé par Solidaires, mais pas par la CGT.
74
Dix accords de déclinaison ont été conclus ; deux accords de méthode ont été conclus
au ministère de l’intérieur, qui comportent un volet dédié aux directions
départementales interministérielles.
LES CONDITIONS D’UN DIALOGUE SOCIAL RÉNOVÉ
72
moyens (techniques, immobiliers, humains) qu’elles impliquent et des
modalités d’organisation qu’elles nécessitent de préciser.
L’insertion au sein des accords négociés de clauses prévoyant leur
évaluation et les modalités de cette dernière, en particulier en définissant
des indicateurs de suivi pertinents et un calendrier permettrait, d’une part,
de mieux suivre l’avancement des engagements formulés dans ces accords
et, d’autre part, de nourrir le processus de négociations ultérieures entre les
parties prenantes.
2 -
Une culture de la négociation plus ancrée
dans la fonction publique hospitalière
La culture de la négociation revêt une dimension particulière au sein de
la fonction publique hospitalière. Elle y a été largement encouragée par les
accords de Ségur
75
, signés le 13 juillet 2020, eux-mêmes fruits d’un important
travail de négociation. Alimentés par des enveloppes de financement
significatives,
ces
accords
invitent
explicitement
les
établissements
hospitaliers à passer par la négociation pour la déclinaison locale des mesures.
À l’échelle d’un établissement, le financement de certaines mesures du
Ségur, plus spécifiquement celles en lien avec les organisations de travail
76
,
était, en effet, conditionné à la conclusion d’un accord local majoritaire. Pour
les autres actions, si aucun formalisme n’a été exigé, la signature d’un accord
avec au moins une organisation syndicale était recommandée. Dans ce
contexte, la plupart des établissements a entamé des négociations avec les
représentants du personnel. Celles-ci ont principalement permis la résorption
des emplois précaires, la revalorisation de la rémunération des agents
contractuels et la mise en place d’un
pool
de remplacement.
C’est dans ce cadre que le centre hospitalier universitaire de Poitiers a
obtenu rapidement la signature un accord majoritaire avec trois des quatre
organisations syndicales de l’établissement
77
, portant sur la résorption de
l’emploi précaire, la création de 48 postes sur deux ans, la création d’un
pool
de remplacement de 27 postes et la création d’un
« forfait d’heures
75
Ayant pour objectif de renforcer l’attractivité des métiers et de reconnaître
l’engagement des professionnels de santé, ces accords ont été adoptés dans le
prolongement de la crise sanitaire et signés entre le Premier ministre, le ministre des
solidarités et de la santé, la majorité des organisations syndicales représentatives de la
fonction publique hospitalière et la fédération hospitalière de France (FHF).
76
Sont ici concernées les mesures d’annualisation du temps de travail, d’abaissement à
11 heures du repos quotidien ou encore l’élaboration de chartes de fonctionnement des
pools
de remplacement.
77
CNI, CFDT et CFTC.
LES CONDITIONS D’UN DIALOGUE SOCIAL RÉNOVÉ
73
supplémentaires contractualisé »
pour effectuer des remplacements ponctuels
ou de mise en stage au premier jour de recrutement pour les infirmiers.
Il en est de même pour le centre hospitalier de Châteauroux-le
Blanc, qui a signé avec les organisations syndicales un accord local relatif
à la mise en œuvre des mesures sur le temps de travail, la valorisation de
l’engagement collectif et la résorption de l’emploi précaire. Cet accord
prévoit notamment la mise en place d’un
pool
de remplaçants afin de faire
face aux difficultés de recrutements sur les métiers en tension (pour un coût
annuel estimé à 1,5 M€). Au CHU de Grenoble Alpes, un accord local a
été validé en 2022 mais l’annualisation du temps de travail pour des postes
spécifiques et les modalités de fonctionnement des
pools
de remplacement,
n’ont pas été validés par l’ensemble des organisations syndicales.
3 -
Une dynamique émergente
dans la fonction publique territoriale
a)
La création de la coordination des employeurs territoriaux
Pour les élus locaux
78
, la dynamisation du dialogue social va de pair
avec un renforcement de leur responsabilisation. Une telle orientation
suppose que les employeurs territoriaux s'expriment d'une même voix, sur le
modèle de la Fédération hospitalière de France (FHF), et renforcent ainsi leur
pouvoir de négociation vis-à-vis de l'État et des organisations syndicales.
La création de la Coordination des employeurs territoriaux (CET)
79
,
au travers de la signature d’une charte d’engagement le 12 septembre 2018,
concrétise cette ambition. Contribuant au développement de négociations
nationales au sein de la fonction publique territoriale, la CET a ainsi pu se
positionner, lors de l'examen du projet de loi de transformation de la
fonction publique, en faveur de certaines dispositions n’ayant pas la même
portée ou la même application dans la fonction publique territoriale et dans
les deux autres fonctions publiques.
78
Conseil supérieur de la fonction publique territoriale,
Bilan d’activité 2018
.
79
La CET associe huit associations d’élus (l’association des maires de France,
l’association des départements de France, Régions de France, l’Assemblée des
communautés de France, Villes de France, France Urbaine, l’association des maires
ruraux de France, l’association des petites villes de France), le collège des employeurs
du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, le Centre national de la
fonction publique territoriale et la Fédération nationale des centres de gestion.
LES CONDITIONS D’UN DIALOGUE SOCIAL RÉNOVÉ
74
Elle a contribué à faciliter ensuite les négociations avec les
représentants du personnel, et permis de faire aboutir le premier protocole
national entre les associations d’employeurs et les organisations syndicales
représentatives à l’échelle territoriale de la fonction publique, signé le
11 juillet 2023 et portant sur la protection sociale complémentaire
80
.
Le rapport sur l’attractivité de la fonction publique territoriale
81
propose un renforcement de la place des élus et des exécutifs territoriaux
au travers de la coordination des employeurs territoriaux. Il s’interroge,
dans l’hypothèse où la négociation collective deviendrait un enjeu national,
sur la nécessité ou non de faire de la CET le représentant officiel et mandaté
des employeurs territoriaux. La visibilité ainsi donnée pourrait, selon les
membres de la mission, être un facteur de modernisation et de meilleure
communication à l’extérieur des enjeux et des atouts de la fonction
publique territoriale.
La conclusion, le 17 novembre 2023, d’un partenariat entre le
ministère de la transformation et de la fonction publiques, la Fédération
hospitalière de France (FHF) et la Coordination des employeurs
territoriaux (CET) afin d’engager une dynamique commune aux trois
fonctions publiques pour faire connaître les métiers du service public, grâce
à une promesse employeur unifiée, commune et lisible -
« Choisir le
service public »
- participe de cette évolution
82
.
80
Le protocole introduit de nouveaux droits en matière de prévoyance. Il garantit aux
agents en situation de maladie ou d’invalidité le maintien de 90 % de leur rémunération
nette. Cette couverture interviendra dans le cadre de contrats collectifs à adhésion
obligatoire dont la cotisation sera partagée à parts égales entre la collectivité et l’agent.
Pour mémoire, l’ordonnance du 17 février 2021 a réformé la protection sociale
complémentaire dans la FPT en prévoyant, à compter du 1
er
janvier 2025, une dépense
obligatoire en matière de prévoyance et, à compter du 1
er
janvier 2026, la prise en charge
d’une partie des frais de santé des agents. Le décret n° 2022-581 du 20 avril 2022 a fixé
les modalités d’application de cette réforme.
81
Rapport réalisé, à la demande du ministre de la transformation et de la fonction publiques,
par Philippe Laurent, président du CSFPT, Corinne Desforges et Mathilde Icard.
82
Le partenariat prévoit notamment la mise à disposition d’outils de communication, la
valorisation des métiers et des offres d’emploi, le déploiement de comités locaux de
l’emploi public (CLEP) sur les territoires, la représentation des trois fonctions publiques
lors des différents salons de l’emploi public et le développement de la coordination avec
le ministère de l’éducation nationale, le ministère de l’enseignement supérieur et de la
recherche, les régions et les opérateurs de France travail.
LES CONDITIONS D’UN DIALOGUE SOCIAL RÉNOVÉ
75
b)
Des accords qui restent circonscrits à des enjeux locaux
Le déclenchement de la négociation collective à l’échelle locale peut
résulter d’une demande des organisations syndicales représentatives ou
d’un accord-cadre signé au niveau national, comme celui précédemment
cité sur le télétravail. C’est notamment le cas de l’accord collectif sur le
télétravail signé au centre de gestion de l’Eure en mai 2022, qui su profiter
de cette dynamique nationale alors qu’un précédent projet d’accord
syndical négocié en 2015 n’avait pas abouti.
Certaines collectivités locales ou établissements publics locaux se
sont également engagés dans cette voie, en particulier afin de fixer les
conditions de travail des agents relevant du droit privé au sein des régies
d’eau et d’assainissement, comme l’illustre l’accord signé au sein de la
communauté d’agglomération de Saint-Dié-des-Vosges le 13 décembre
2021. La même année, en anticipation de la reprise en régie de la
production et de la distribution de l’eau potable avec prise d’effet au
1
er
janvier 2023, la métropole de Lyon a souhaité garantir les acquis
sociaux des salariés de la société exploitante lors de leur transfert à la régie.
Elle a signé dès juillet 2021 un accord de méthode avec l’intersyndicale et
cette entreprise, avant de confier cette activité à un établissement public
industriel et commercial
83
. Ces nouvelles modalités ont également permis
la mise en place d’accords de méthode, comme ce fut le cas au SDIS du
Var dans le cadre des négociations relative à la protection sociale
complémentaire « Santé » et « Prévoyance ». Ledit accord a été présenté
au conseil d’administration du SDIS du Var le 30 janvier 2024.
Pour autant, les innovations introduites par la loi de transformation
de la fonction publique visant à inciter les syndicats et les employeurs de
la fonction publique territoriale à négocier des accords n'ont pas encore
produit tous leurs effets.
c)
Le service minimum, un dispositif peu mis en œuvre
par les collectivités locales
L’article 56 de la loi de transformation de la fonction publique offre
aux collectivités territoriales la possibilité d’engager des négociations avec
les organisations syndicales en vue de la signature d’un accord visant à
assurer la continuité des services publics.
83
Créé en janvier 2022, cet EPIC a poursuivi les négociations qui se sont traduites par
l’approbation d’accords sur le temps de travail (24 octobre 2022), sur les frais de santé
et de prévoyance (29 novembre 2022) et par un accord d’intéressement le15 juin 2023.
LES CONDITIONS D’UN DIALOGUE SOCIAL RÉNOVÉ
76
Ces négociations concernent une liste de services limitativement
énumérés dont l’interruption en cas de grève contreviendrait au respect de
la continuité du service public, notamment à la salubrité publique ou aux
besoins essentiels de leurs usagers. Il s’agit de la collecte et du traitement
des déchets ménagers, du transport public de personnes, de l’aide aux
personnes âgées et handicapées, de l’accueil des enfants de moins de trois
ans, de l’accueil périscolaire et de la restauration collective et scolaire.
Alors que l’obligation de continuité de service public figure
au premier rang des devoirs auquel les agents sont attachés selon le
6
ème
baromètre du service public local
84
de novembre 2023, peu
d’employeurs territoriaux ont fait de cette question un objet de négociation
sociale. C’est le cas du département de l’Yonne, qui a indiqué que la mise
en place d’un service minimum dans les services
de restauration scolaire
dans les collèges lui semblait difficile au regard de la taille restreinte des
équipes (de cinq à six agents). À l’inverse, à Rambouillet, un protocole
d’accord portant sur l’exercice du droit de grève a été approuvé par
délibération du 29 septembre 2022, pour une entrée en vigueur le 1
er
octobre 2022. Cet accord encadre l’exercice du droit de grève dans les
services d’accueil des enfants de moins de trois ans, les services d’accueil
périscolaires et les services de restauration collective et scolaire.
***
En conclusion, l’un des leviers majeurs de transformation du
dialogue social reste encore peu utilisé. La recherche d’accords
contractuels par la négociation collective, à l’instar de la pratique sociale
dans le secteur privé, doit être développée. À défaut, la vocation de
rénovation du dialogue social de la loi du 6 août 2019 risque de rester
« lettre morte », l’application de la réforme se limitant alors à la révision
de la carte institutionnelle.
C -
Des mesures d’accompagnement pour favoriser
la négociation collective
1 -
Recenser et diffuser les bonnes pratiques du dialogue social
L’ensemble des responsables des administrations et organisations
syndicales rencontrés au cours de l’enquête ont souligné l’importance du
développement du dialogue social comme levier de performance. Si la loi
de transformation de la fonction publique a ouvert des possibilités de
84
Association des administrateurs territoriaux de France (AATF) ; 6
ème
édition de son
baromètre Ipsos sur les Français et le service public local ; 23 novembre 2023.
LES CONDITIONS D’UN DIALOGUE SOCIAL RÉNOVÉ
77
négociation, les partenaires sociaux comme les managers publics ne sont
pas tous forcément rompus à l’exercice. Nombre d’entre eux ont besoin
de mieux appréhender ces nouveaux outils afin de faire vivre le dialogue
social. L’absence de connaissance des règles du jeu peut parfois être
source d’incompréhensions, voire de défiance entre l’administration et les
organisations syndicales.
Pour y remédier, les juridictions financières considèrent qu’il
conviendrait de construire et de capitaliser des outils et des méthodes
permettant d’avancer sur les différents sujets de dialogue social. Cette
démarche collective pourrait déboucher sur l’élaboration et le partage de
méthodologies pour dégager des bonnes pratiques susceptibles d’essaimer
auprès des trois fonctions publiques.
Si des éléments d’un dialogue social plus pragmatique existent
bien au sein de la fonction publique, la culture de la négociation
n’irrigue pas de manière homogène l’ensemble des administrations
des trois fonctions publiques. L’enquête a montré que des bonnes
pratiques ont été mises en œuvre, à l’image de la diffusion d’un guide
de la négociation collective par la DGAFP aux ministères, ou de la
publication par la FHF d’un
« guide d’appui à la négociation collective
dans la fonction publique hospitalière »
85
. Elles n’en demeurent
pas moins globalement très insuffisantes au regard des nouveaux
enjeux posés.
Consciente de la nécessité de développer une culture de la
négociation, la DGFAP intervient à plusieurs niveaux : au travers d’un
cycle de formation des DRH ministériels, de l’actualisation du guide de la
négociation collective et du déploiement, d’ici fin 2024, d’un espace
numérique consacré à la publication des accords collectifs conclus dans les
trois fonctions publiques. Outre la mise à disposition des accords pour
l’ensemble des agents, cet espace permettra aussi aux employeurs de
disposer d’une banque d’accords, afin de mieux diffuser la culture de la
négociation collective.
85
Il n’a pas été recensé de déclinaison du guide pour la fonction publique territoriale.
LES CONDITIONS D’UN DIALOGUE SOCIAL RÉNOVÉ
78
2 -
Améliorer la formation conjointe des parties prenantes
Ainsi que l’a exprimé la mission
« renforcer la négociation
collective dans la fonction publique »
, dans son rapport d’avril 2020
86
, de
nouvelles pratiques de négociation collective ne pourront émerger que dans
le cadre d’un renforcement de la formation des élus et des agents en charge
du dialogue social.
Un renforcement de la formation
87
des représentants des agents et
des cadres impliqués dans le dialogue social semble indispensable. Il passe
à la fois par une meilleure connaissance du cadre juridique du dialogue
social et de ses spécificités dans la fonction publique et par une diffusion
des techniques de la négociation.
À ce titre, l’ouverture de la négociation relative à la protection sociale
complémentaire (PSC) a parfois été précédée d’une formation, dispensée par
un actuaire, à laquelle ont conjointement participé les représentants des
personnels et de l’administration appelés à participer à la négociation.
Le développement d’une culture du dialogue social et de la
négociation fait partie des priorités du schéma directeur interministériel de
la formation professionnelle tout au long de la vie. Pour autant, parmi les
modules de formation à la gestion des ressources humaines proposés dans
le cadre de la formation initiale ou continue des futurs managers de la
fonction publique, bien peu mentionnent le « dialogue social » dans leur
intitulé. La plupart des agents concernés seront pourtant amenés à
s’exprimer devant les instances représentatives du personnel, à négocier et
à signer des accords ou à gérer des conflits, voire des situations de crise.
***
La formation aux relations sociales des encadrants doit donc être
accrue dans l’esprit d’être partagée entre les acteurs sociaux de la sphère
publique. L’intégration d’un référentiel sur le dialogue social dans leur
cycle de formation, initiale et/ou continue mériterait d’être impulsée.
86
Renforcer la négociation collective dans la fonction publique
, rapport de Marie Odile
Esch, Christian Vigouroux et Jean Louis Rouquette, rendu en avril 2020 dans le cadre
d’une mission confiée par Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé, Gérald
Darmanin, ministre de l’action et des comptes publics, Jacqueline Gourault, ministre de
la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et Olivier
Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics.
87
Les sessions devraient prioritairement être proposées de façon simultanée aux
représentants de l’administration et des personnels, de façon à contribuer à la diffusion
d’une culture commune. À l’image de ce que met en œuvre l’INSP dans son module de
formation consacré au dialogue social en collaboration avec les confédérations
syndicales, l’association des représentants syndicaux devrait être systématisée dans les
formations initiales des cadres dans les trois fonctions publiques.
LES CONDITIONS D’UN DIALOGUE SOCIAL RÉNOVÉ
79
__________ CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS __________
De façon paradoxale par rapport à d’autre volets de la loi du
6 août 2019, la crise sanitaire a accéléré le processus de négociation et
de passation d’accords. Elle a en effet favorisé l’émergence de sujets
transversaux et stratégiques sur l’organisation et les conditions de travail :
télétravail, conditions de travail dans le secteur sanitaire.
Pour autant, les pratiques de négociation sont encore limitées au
sein des trois fonctions publiques. À ce jour, les négociations se
concentrent sur les sujets imposés par les textes, tels que les lignes
directrices de gestion ou l’instauration de la protection sociale
complémentaire. Le champ des sujets de négociation, permis par exemple
par le droit à l’initiative syndicale, reste assez restreint.
En tout état de cause, les nouvelles pratiques mises à la disposition
des représentants de l’administration et des organisations syndicales
invitent, tout en confortant les droits et moyens des parties prenantes, à
mettre en œuvre une nouvelle étape du dialogue social en le rendant plus
stratégique. C’est sur ce point que les effets de la loi en vue de moderniser
le dialogue social dans la fonction publique, seront les plus significatifs.
La Cour formule les recommandations suivantes :
3.
diminuer le nombre des indicateurs de la Base de données sociales
(BDS) et les centrer sur des informations stratégiques utiles au
dialogue social
(ministère de la transformation et de la fonction
publiques) ;
4.
promouvoir le recours aux accords-cadres (ministère de la
transformation et de la fonction publiques) ;
5.
renforcer l’offre de formation initiale et continue partagée en faveur
des représentants de l’administration et des agents publics
(ministère
de la transformation et de la fonction publiques, ministère de
l’intérieur et des outre-mer, ministère du travail, de la santé et des
solidarités).
Liste des abréviations
AAI
..............
Autorité administrative indépendante
AATF
...........
Association des administrateurs territoriaux de France
AC
................
Administration centrale
ADF
..............
Association départements de France
ADRHESS ... Association pour le développement des ressources humaines
dans les établissements sanitaires et sociaux
AMF
.............
Association des maires de France et des présidents
d’intercommunalité
ARS
..............
Agence régionale de santé
ASA
..............
Autorisation spéciale d’absence
BS
.................
Bilan social
BDS
..............
Base de données sociales
CAP
..............
Commission administrative paritaire
CAPD
...........
Commission administrative paritaire départementale
CAPL
...........
Commission administrative paritaire locale
CAPN
...........
Commission administrative paritaire nationale
CCAS
...........
Centre communal d’action sociale
CCN
.............
Comité consultatif national
CCP
..............
Commissions consultatives paritaires
CDG
.............
Centre de gestion
CE
................
Conseil d’État
CET
..............
Coordination des employeurs territoriaux
CFE-CGC
.....
Confédération française de l'encadrement - Confédération générale
des cadres
CFDT
...........
Confédération française démocratique du travail
CFTC
............
Confédération française des travailleurs chrétiens
CGEF
...........
Contrôle général économique et financier
CHSCT
.........
Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail
CHU
.............
Centre hospitalier universitaire
CIAS
............
Centre inter-communal d'action sociale
CL
................
Collectivités locales
CME
.............
Commission médicale d’établissement
LISTE DES ABRÉVIATIONS
82
CNFPT
.........
Centre national de la fonction publique territoriale
CNG
.............
Centre national de gestion des praticiens hospitaliers
et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière
CRC
..............
Chambre régionale des comptes
CRTC
...........
Chambres régionales et territoriales des comptes
CSFPT
..........
Conseil supérieur de la fonction publique territoriale
CSA
..............
Comité social d’administration
CSA M
.........
Comité social d’administration ministériel
CSE
..............
Comité social d’établissement
CST
..............
Comité social territorial
CSFPH
.........
Conseil supérieur de la fonction publique hospitalière
CSN
..............
Commissions statutaires nationales
CSPM
...........
Conseil supérieur des personnels médicaux, odontologistes
et pharmaceutiques des établissements publics de santé
CT
................
Comité technique
CTE
..............
Comité technique d’établissement
CTM
.............
Comité technique ministériel
CU
................
Communauté urbaine
DARES
........
Direction de l’animation de la recherche, des études
et des statistiques
DDI
..............
Directions départementales interministérielles
DGAFP
........
Direction générale de l’administration et de la fonction publiques
DGCCRF
......
Direction générale de la concurrence, de la consommation
et de la répression des fraudes
DGCL
...........
Direction générale des collectivités locales
DGCS
...........
Direction générale de la cohésion sociale
DGDDI
.........
Direction générale des douanes et droits indirects
DGE
.............
Direction générale des entreprises
DGFiP
..........
Direction générales des finances publiques
DGOS
...........
Direction générale de l’offre de soins
DREES
.........
Direction de la recherche des études de l’évaluation
et des statistiques
DRH
.............
Direction des ressources humaines
DUERP
........
Document unique d’évaluation des risques professionnels
EHPAD
........
Établissement d’hébergement pour les personnes âgées
dépendantes
EPA
..............
Établissement public administratif
EPCI
.............
Établissement public de coopération intercommunale
ETP
..............
Équivalent temps plein
LISTE DES ABRÉVIATIONS
83
ETPT
............
Équivalent temps plein travaillé
FA-FP
...........
Fédération autonome de la FPT
FHF
..............
Fédération hospitalière de France
FNCDG
........
Fédération nationale des centres de gestion
FO
................
Force ouvrière
FP
.................
Fonction publique
FPE
...............
Fonction publique d’État
FPH
..............
Fonction publique hospitalière
FPT
...............
Fonction publique territoriale
FS
.................
Formation spécialisée
FSSCT
..........
Formation spécialisée en matière de santé, de sécurité
et de conditions de travail (ou F3SCT)
FSU
..............
Fédération syndicale unitaire
GPEEC
.........
Gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs
et des compétences
HMI
..............
Heure mensuelle d’information
IGA
..............
Inspection générale de l’administration
IGAENR
......
Inspection générale de l’administration de l’éducation
nationale et de la recherche
IGAS
............
Inspection générale des affaires sociales
INSEE
..........
Institut national de la statistique et des études économiques
INSP
.............
Institut national du service public
LDG
.............
Lignes directrices de gestion
LTFP
............
Loi de transformation de la fonction publique
(loi n° 2019-828 du 6 août 2019)
MAD
............
Mise à disposition
MAS
.............
Ministères chargés des affaires sociales (synonyme : MS)
MASA
..........
Ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire
MEAE
..........
Ministère de l’Europe et des affaires étrangères
MEF
.............
Ministères économiques et financiers
MEFSIN
.......
Ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté
industrielle et numérique
MEN
.............
Ministère de l’éducation nationale
MESR
...........
Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche
MIOM
..........
Ministère de l’intérieur et des outre-mer
MINARM
.....
Ministère des armées
MPO
.............
Médiation préalable obligatoire
M€
................
Million d’euros
LISTE DES ABRÉVIATIONS
84
Md€
..............
Milliard d’euros
OIT
...............
Organisation internationale du travail
OS
................
Organisations syndicales
PSC
..............
Protection sociale complémentaire
RSU
..............
Rapport social unique
RH
................
Ressources humaines
RIFSEEP
......
Régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions,
de l'expertise et de l'engagement professionnel
SDIS
.............
Service départemental d’incendie et de secours
SG
................
Secrétariat général
SNDGCT
......
Syndicat national des directeurs généraux des collectivités
territoriales
SSCT
............
Santé, sécurité, conditions de travail
UNSA
...........
Union nationale des syndicats autonomes
Annexes
Annexe n° 1 : liste des travaux des juridictions financières utilisés
...............
86
Annexe n° 2 : les jours perdus pour fait de grève
..........................................
88
Annexe n° 3 : le cadre juridique de l’allocation des moyens consacrés
aux syndicats
..................................................................................................
90
Annexe n° 4 : estimation du coût du dialogue social
.....................................
96
ANNEXES
86
Annexe n° 1 :
liste des travaux des juridictions
financières utilisés
Par ordre de citation :
-
CRC Bourgogne-Franche-Comté, rapport d’observations définitives,
CA Beaune Côte et Sud –Communauté Beaune Chagny Nolay,
mai 2024
-
CRC Hauts-de-France, rapport d’observations définitives, Centre de
Gestion de l’Aisne, mai 2024
-
CRC Bourgogne-Franche-Comté, rapport d’observations définitives,
département de l’Yonne, juin 2023
-
CRC Bourgogne-Franche-Comté, rapport d’observations définitives,
communauté de communes du grand charollais, février 2024
-
CRC
Nouvelle-Aquitaine,
rapport
d’observations
définitives,
communauté de communes d’Albret-Communauté, mai 2024
-
CRC Corse, rapport d’observations définitives, commune de Bastia,
mars 2024
-
CRC Normandie, rapport d’observations définitives, Centre de gestion
de l’Eure, janvier 2024
-
CRC Provence-Alpes-Côte d’Azur, rapport d’observations définitives
Centre Hospitalier de la Dracénie, juillet 2024
-
CRC Auvergne-Rhône-Alpes, rapport d’observations provisoires,
Centre Hospitalier Universitaire de Grenoble Alpes, mars 2024
-
CRC
Nouvelle-Aquitaine,
rapport
d’observations
définitives,
communauté de communes des Bastides-en-Haut-Agenais-Périgord,
mai 2024
-
CRC, Auvergne-Rhône-Alpes, rapport d’observations définitives,
département de la Haute-Loire, avril 2024
-
CRC Auvergne-Rhône-Alpes, rapport d’observations définitives,
communauté de communes beaujolais pierres dorées, avril 2024
-
CRC Île-de-France, rapport d’observations définitives, commune
de Saint-Germain-en-Laye, avril 2024
-
CRC
Nouvelle-Aquitaine,
rapport
d’observations
définitives,
département de la Corrèze, juillet 2024
-
CRC Occitanie, rapport d’observations définitives, département
de l’Aude, juillet 2023
ANNEXES
87
-
CRC Auvergne-Rhône-Alpes, rapport d’observations définitives,
département de la Drôme, mars 2024
-
CRC Occitanie, rapport d’observations définitives, Centre de gestion
de la fonction publique territoriale des Hautes-Pyrénées, octobre 2022
-
CRC Occitanie, rapport d’observations définitives, Centre de gestion
de la fonction publique territoriale de la Haute-Garonne, mars 2022
-
CRC Auvergne-Rhône-Alpes, rapport d’observations définitives,
Centre de gestion de la fonction publique territoriale de l’Isère,
décembre 2023
-
CRC Île-de-France, rapport d’observations définitives, centre
hospitalier François Quesnay de Mantes la Jolie, mars 2023
-
CRC Île-de-France, rapport d’observations définitives, commune
d’Achères, mars 2024
-
CRC
Occitanie,
rapport
d’observations
définitives,
commune
de Saint-Orens de Gameville, juin 2023
-
CRC Grand Est, rapport d’observations définitives, communauté
d’agglomération de Saint Dié des Vosges, juillet 2024
-
CRC Corse, rapport d’observations définitives, commune d’Ajaccio,
avril 2022
-
CRC
Centre-Val-de-Loire,
rapport
d’observations
définitives,
commune de Vierzon, juin 2022
-
CRC Guyane, situation financière de la collectivité territoriale
de Guyane, Octobre 2022
-
CRC
Occitanie,
rapport
d’observations
définitives
commune
de Montpellier, juillet 2023
-
CRC Nouvelle-Aquitaine, rapport d’observations définitives, centre
intercommunal d’action sociale du Civraisien en Poitou, avril 2024
-
CRC Auvergne-Rhône-Alpes, rapport d’observations définitives,
Métropole de Lyon ; Epic « Eau du Grand Lyon – la Régie »,
janvier 2024
-
CRC Île-de-France, rapport d’observations définitives, commune
de Rambouillet, avril 2023
-
CRC Nouvelle-Aquitaine, rapport d’observations définitives, CHU
de Poitiers, juillet 2023
ANNEXES
88
Annexe n° 2 :
les jours perdus pour fait de grève
Tableau n° 7 :
nombre de journées perdues pour fait de grève
interministérielle, ministérielle ou sectorielle dans
la fonction publique de l'État depuis 2017
(En %)
2017
2018
2019
2020
2021
2022
Ministère ou service
Agriculture et Alimentation
3 333
5 302
10 958
4 516
1 804
4 758
Armées (personnels civils)
4 755
6 435
12 981
5 410
774
3 447
Culture
3 188
3 328
5 749
3 315
1 310
2 701
Éducation nationale,
Enseignement supérieur,
Recherche et Innovation
207 259 362 995 1 255 502 426 923 198 098 283 001
Europe et Affaires étrangères (*)
356
3 611
8 637
3 046
2 469
3 743
Intérieur et Outre-Mer
2 976
4 379
7 620
2 723
307
423
Justice
5 091
7 634
11 098
4 772
3 028
3 425
Ministères économiques
et financiers
65 990
84 059
208 476
39 265
28 363
24 279
Ministères sociaux
6 529
6 583
20 210
7 373
48 968
1 047
Services du Premier ministre
80
156
334
101
2
8
Transition écologique et solidaire,
Logement et Habitat durable
et Cohésion des territoires
14 218
17 471
31 694
10 118
2 252
6 480
Ensemble des ministères
(hors établissements publics)
313 775 501 953 1 573 259 507 562 287 375 333 312
Autres organismes
Caisse des dépôts et consignations
360
401
493
229
23
100
Source : DGAFP - Cabinet du directeur général
ANNEXES
89
Tableau n° 8 :
évolution du nombre de jours perdus pour
fait de grève interministérielle, ministérielle ou sectorielle
dans la fonction publique de l'État depuis 1999
En nombre
de jours
Total ministères
(hors établissements
publics)
En nombre
de jours
Total ministères
(hors établissements
publics)
1999
577 709
2011
648 934
2000
1 457 379
2012
237 237
2001
921 115
2013
261 067
2002
604 864
2014
262 482
2003
3 655 483
2015
345 387
2004
373 891
2016
427 292
2005
1 113 155
2017
313 775
2006
950 984
2018
501 953
2007
609 621
2019
1 573 259
2008
1 153 009
2020
507 562
2009
941 176
2021
287 375
2010
1 851 083
2022
333 312
Source : DGAFP - Cabinet de la directrice générale. Champ : Mouvements nationaux
(interministériels ou ministériels)
ANNEXES
90
Annexe n° 3 :
le cadre juridique de l’allocation
des moyens consacrés aux syndicats
Les moyens alloués aux syndicats sont principalement encadrés par
voie règlementaire. Seule la fonction publique territoriale est désormais
mentionnée au Code général de la fonction publique en ses articles L 214-
3 et suivants, qui précisent les modalités d’attribution des décharges
d’activité de service et les mises à disposition, ce qui s’explique par le fait
que le législateur a prévu, dans ce dernier cas, des charges financières
supportées soit par les collectivités soit par les centres de gestion. Cet
article détermine également le seuil (50 agents) à compter duquel des
locaux doivent être mis à disposition des organisations syndicales.
L’ensemble des autres dispositions applicables ont été définies dans
les années 1980 par voie règlementaire et pour chaque fonction publique.
Les décrets n°82-447 du 28 mai 1982 pour la fonction publique de l’État,
n°85-397 du 3 avril 1985 pour la fonction publique territoriale et 86-660
du 19 mars 1986 pour la fonction publique hospitalière, très peu modifiés
depuis près de 30 ans, constituent le socle juridique des moyens alloués
aux syndicats.
Ces trois décrets, très semblables dans leur construction,
déterminent le régime des moyens alloués aux organisations syndicales.
Des différences de contenu les séparent sur certains points.
Le décret relatif à la fonction publique territoriale indique en son
article 2 que les autorités territoriales et les organisations syndicales
peuvent conclure des accords contenant des dispositions plus avantageuses
que celles contenues par le décret lui-même.
Les deux autres décrets ne laissent pas explicitement cette place à la
négociation
Pour la fonction publique d’État, la circulaire n° SE1 2014-2 du 3
juillet 2014 relative à l’exercice du droit syndical dans la fonction publique
de l’État détaille les règles et principes applicables en vertu du décret du
28 mai 1982.
Les moyens matériels et financiers
Les locaux syndicaux
Pour les trois fonctions publiques, les règles sont similaires.
L’administration doit mettre à la disposition des organisations syndicales
représentatives dans le service ou groupe de services considéré, ayant une
ANNEXES
91
section syndicale, un local commun aux différentes organisations lorsque les
effectifs du personnel de ce service ou groupe de services implantés dans un
bâtiment administratif commun sont égaux ou supérieurs à 50 agents, avec
si possible un local distinct à la disposition de chaque organisation.
L’octroi de locaux distincts est de droit lorsque les effectifs du
personnel sont supérieurs à 500 agents pour la fonction publique d’État et
la fonction publique territoriale, contre 200 pour la fonction publique
hospitalière. Les locaux mis à disposition sont normalement situés dans
l’enceinte des bâtiments administratifs ; si tel n’est pas le cas,
l’administration en supporte les frais de location. Les locaux doivent
comporter les équipements indispensables à l’exercice de l’activité
syndicale. En cas d’impossibilité de mettre des locaux équipés à la
disposition des organisations syndicales représentatives, une subvention
représentative des frais de location et d’équipement des locaux est versée
aux organisations syndicales concernées.
Les équipements
Pour la fonction publique d’État, la circulaire précitée indique que les
équipements fournis sont les suivants : mobilier, téléphone, poste
informatique, accès aux moyens d’impression, et précise que les conditions
dans lesquelles l’administration prend en charge, dans la limite des crédits
disponibles, le coût des consommables, sont définies par l’administration
après concertation avec les organisations syndicales concernées. De même,
la concertation entre l’administration et les organisations syndicales doit
permettre de définir les conditions dans lesquelles ces organisations peuvent,
dans la limite des crédits disponibles, obtenir le concours de l’administration
en matière de reprographie et pour l’acheminement de leur correspondance.
Le décret applicable à la fonction publique hospitalière prévoit que
les instances paritaires doivent être consultées sur ce point.
Les technologies de l’information et de la communication (TIC)
Les décrets prévoient que le cadre général de l’utilisation par les
organisations syndicales, au sein des services, des technologies de
l’information et de la communication ainsi que de certaines données à
caractère personnel contenues dans les traitements automatisés relatifs à la
gestion des ressources humaines est fixé par arrêté du ministre chargé de
la fonction publique, par décision de l’autorité territoriale ou par le ministre
de la santé en fonction de la fonction publique, après avis des instances
paritaires. Cet arrêté précise également les conditions dans lesquelles sont
garantis la confidentialité, le libre choix et la non-discrimination
auxquelles cette utilisation est subordonnée.
ANNEXES
92
Dans chaque ministère, les conditions et modalités d’utilisation de
ces technologies sont fixées par une décision du ministre ou du chef de
service, après avis du comité technique correspondant. Cette décision
précise les conditions dans lesquelles cette utilisation peut être réservée aux
organisations syndicales représentatives au sens de l’article 3, compte tenu
des nécessités du service ou de contraintes particulières liées à l’objet des
facilités ainsi accordées. L’article 3-2 du décret précité précise que dans
tous les actes autorisant la création de traitements automatisés de données
à caractère personnel relatifs à la gestion des ressources humaines
concernant des agents de l’État, peuvent être destinataires de données
requises pour la constitution de listes d’adresses électroniques nominatives
professionnelles, pour l’exercice de mandats ou en vue d’une candidature,
et dans la limite du besoin d’en connaître, les agents expressément désignés
par une organisation syndicale dans les conditions prévues par les
dispositions de l’article 3-1 pour utiliser des technologies de l’information
et de la communication et certaines données à caractère personnel.
Au sein de chaque établissement hospitalier, ces conditions sont
fixées par décision du directeur d’établissement.
L’allocation de subventions
Le décret n° 2000-1215 du 11 décembre 2000 prévoit l’allocation
de subventions aux organisations syndicales de la fonction publique d’État
représentatives au niveau national. Le montant des subventions est
déterminé compte tenu de la part respective des sièges détenus par les
organisations syndicales de la fonction publique de l’État.
Le décret n° 2005-849 du 25 juillet 2005 relatif à l'attribution par
des collectivités territoriales de subventions de fonctionnement aux
structures locales des organisations syndicales représentatives et modifiant
le code général des collectivités territoriales
en sa partie réglementaire
précise que les collectivités peuvent attribuer une subvention de
fonctionnement aux structures locales des organisations syndicales
représentatives qui sont dotées de la personnalité morale et qui remplissent
des missions d'intérêt général.
Les moyens humains
Les représentants syndicaux bénéficient de facilités afin de remplir
les obligations résultant de leur mandat, qui prennent la forme soit d’un
détachement, soit d’autorisations spéciales d’absence ou de décharges
d’activité de service, qui peuvent leur être accordées dans les conditions
définies aux articles 13 et15 des décrets précités.
ANNEXES
93
Le détachement pour l’exercice d’un mandat syndical
En application de l’article 17 du décret n° 85-986 relatif au régime
particulier de certaines positions des fonctionnaires de l’État, à la mise à
disposition, à l’intégration et à la cessation définitive de fonctions, le
détachement pour exercer un mandat syndical prévu au 11° de l’article 14
du même décret est accordé de droit. Il est prononcé par arrêté du seul
ministre dont relève le fonctionnaire intéressé.
Les autorisations spéciales d’absence indépendantes
de la représentativité syndicale
Les décrets prévoient en des termes identiques les autorisations
spéciales d’absence pour participer aux congrès et organismes directeurs
des syndicats nationaux, fédérations ou confédérations, ainsi qu’aux
instances internationales. Le même régime de 10 à 20 jours
88
d’absence
annuelle par représentant s’applique dans les trois fonctions publiques.
Les trois décrets prévoient aussi des autorisations spéciales
d’absence pour les représentants syndicaux appelés à siéger dans des
instances paritaires ou statutaires, ou à des réunions sur convocation de
l’administration. Elles sont accordées sur simple présentation de la
convocation à ces organismes et ne font donc l’objet d’aucun
contingentement.
Pour les trois fonctions publiques sont prévues des autorisations
pour siéger au sein des instances de dialogue social national ou local, des
comités économiques et sociaux régionaux, des conseils d’administration
des organismes sociaux ou mutualistes, y compris les organismes de
retraite, et lors des réunions de travail convoquées par l’administration.
Pour la fonction publique d’État s’ajoutent les réunions du comité
interministériel d’action sociale, des sections régionales interministérielles
(SRIAS) et des commissions ministérielles d’action sociale, des conseils
d’administration des organismes sociaux ou mutualistes, y compris les
organismes de retraite, des organismes publics chargés de promouvoir la
diversité dans la fonction publique ; des conseils d’administration des hôpitaux
et des établissements d’enseignement. Pour chaque département ministériel, la
liste de ces instances de concertation peut être complétée par arrêté conjoint du
ministre chargé de la fonction publique et du ministre intéressé.
Dans la fonction publique territoriale sont prévues la participation
aux réunions de la Conférence nationale des services d'incendie et de
secours, de la Commission consultative des polices municipales, ou de
88
Selon qu’elle est ou non représentées au conseil commun de la fonction publique.
ANNEXES
94
toute autre instance nationale ou locale pour laquelle la présence des
représentants du personnel de la fonction publique territoriale est requise
par un texte législatif ou réglementaire.
Dans la fonction publique hospitalière, elles concernent les réunions
des assemblées délibérantes des établissements ainsi que les réunions de
certains organismes privés de coopération inter hospitalière, du Comité
national et comités locaux du fonds pour l'insertion des personnes
handicapées dans la fonction publique, et de l’Agence nationale du
développement professionnel continu.
Les trois textes prévoient que la durée de l’autorisation d’absence
tient compte de la durée prévisible de la réunion, d’un délai de route et de
temps de préparation et de compte rendu des travaux. Les décrets relatifs à
la fonction publique hospitalière et territoriale prévoient que l’autorisation
doit faire l’objet d’une demande présentée avec un préavis de trois jours et
à faire une réserve de nécessité de service. Aucun des textes ne précisent si
des autorisations d’absences peuvent bénéficier simultanément à de
titulaires et à des suppléants.
Le crédit de temps syndical
Un crédit de temps syndical, utilisable sous forme de décharges de
service ou de crédits d’heures selon les besoins de l’activité syndicale, est
déterminé au sein de chaque département ministériel et au sein de chaque
établissement hospitalier ou collectivité à l’issue du renouvellement
général des instances.
Ce contingent évolue en fonction de l’effectif de la structure, les
modalités de calcul variant toutefois d’une fonction publique à l’autre.
Le contingent global ainsi déterminé est ensuite réparti entre les
organisations syndicales, compte tenu de leur représentativité, de la
manière suivante :
-
la moitié du contingent ministériel résultant de l’application du
barème est répartie entre les organisations syndicales représentées au
comité technique ministériel, en fonction du nombre de sièges qu’elles
détiennent ;
-
l’autre moitié est répartie entre toutes les organisations syndicales
ayant présenté leur candidature à l’élection du comité technique
ministériel, proportionnellement au nombre de voix qu’elles ont
obtenues.
Pour la fonction publique territoriale, deux contingents distincts sont
calculés, selon d’autres modalités de calcul, mais toujours en est fonction
ANNEXES
95
de l’effectif de la structure. Le premier contingent est attribuable sous
forme de décharges de services, qui permettent à leurs bénéficiaires
d’exercer pendant leurs heures de service une activité syndicale en lieu et
place de leur activité administrative normale.
Le second est attribuable
uniquement sous forme d’autorisations spéciales d’absences, qui sont
établies pour participer aux congrès, ou aux réunions statutaires
d'organismes directeurs des organisations syndicales d'un autre niveau que
celles citées précédemment. La répartition des deux contingents entre
organisations syndicales est la même que pour les deux autres fonctions
publiques.
La détermination des effectifs à prendre en compte comme base de
calcul varie d’une fonction publique à l’autre.
Outre les possibilités d’accords plus favorables ouvertes pour la
fonction publique territoriale, une disposition de la circulaire sur la
fonction publique de l’État prévoit la possibilité de négociations sur la
répartition des contingents entre le niveau national et le niveau
déconcentrés, et les établissements sous tutelles pour les décharges.
Les décrets prévoient également des décharges interministérielles
pour la fonction publique d’état et la mise à disposition de fonctionnaires
pour les deux autres fonctions publiques aux organisations syndicales
représentées aux instances nationales.
ANNEXES
96
Annexe n° 4 :
estimation du coût
du dialogue social
Les moyens alloués aux organisations syndicales se répartissent en deux
lots :
Tableau n° 9 :
les moyens alloués aux organisations syndicales
dans la fonction publique en 2022
Montant en €
Moyens humains
869 934 001
Moyens financiers
4 114 513
Total
874 048 514
Source : Cour des comptes
Les moyens humains
Les moyens humains alloués aux organisations syndicales dans la fonction
publique sont de quatre natures différentes :
Tableau n° 10 :
estimation des moyens humains
FP
Nombre
d’ETP
Coût
de l’ETP
en €
Valorisation
en €
Décharges
interministérielles
FPE
71
57 399
4 092 549
Décharges
ministérielles
FPE
6 325
57 399
363 024 164
Crédits de temps
syndicaux tirés de la
représentativité
FPT
3 246
37 330
121 171 121
FPH
2 025
48 164
97 509 589
Autres autorisations
spéciales d’absence
FPE
3 687
57 399
211 635 668
FPT
946
37 330
35 320 144
FPH
590
48 164
28 423 049
Mises à disposition
FPT
103
37 330
3 844 990
FPH
102
48 164
4 912 728
Total
17 095
869 934 001
Source : Cour des comptes
ANNEXES
97
1. Les décharges de service à caractère interministériel font l’objet
d’une répartition par arrêté du ministère chargé de la fonction publique entre
les fédérations syndicales de fonctionnaires représentées au conseil supérieur
de
la
fonction
publique
de
l’État.
Ces
décharges
représentent
71,3 équivalents temps plein
89
.
2.
Les
décharges
ministérielles
d’activité
de
service sont
déterminées chaque année par les ministères en fonctions de leurs effectifs,
selon des modalités dégressives
90
. Au sein de l’échantillon de ministères
retenu par la Cour, ces décharges représenteraient 3 732 équivalents temps
plein ; appliquées à l’ensemble de la FPE
91
, elles seraient de 6 325 ETP en
2022.
Tableau n° 11 :
évolution de la consommation des crédits
de temps syndical des MEN, MIOM et MEF
En ETP
2018
2019
2020
2021
2022
Évolution
Crédit de temps
syndical
3 983
3 923
3 801
3 717
3 732
- 6,3 %
Données du niveau ministériel pour le MEFSIN ; BS RSU MEN
Source : Cour des comptes
3. En extrapolant le mécanisme de calcul retenu au sein de la FPE
aux deux autres fonctions publiques, les crédits de temps pourraient
représenter l’équivalent de 7 905 ETP. Les constats dressés par les
chambres régionales des comptes quant à l’utilisation de ces décharges
invitent à retenir un niveau inférieur d’un tiers, soit 3 246 ETP pour la FPT
et 2 025 ETP pour la FPH.
Cette sous-consommation affecte de la même manière les
deux fonctions publiques. À Bastia, les représentants du personnel ne
consomment en moyenne sur la période que 28 % des droits à autorisation
d’absence, soit 218,5 jours pour un droit ouvert de 780 jours. Le temps de
89
Union interfédérale des agents de la fonction publique Force ouvrière - UIAFP-FO :
12,5 décharges ; Fédération syndicale unitaire (FSU) : 12,5 décharges ; Unions des
fédérations de fonctionnaires UNSA fonction publique : 12,5 décharges ; Union des
fédérations CFDT des fonctions publiques et assimilés (UFFA-CFDT) : 12,5 décharges ;
Union générale des fédérations de fonctionnaires CGT (UGFF-CGT) : 12,5 décharges ;
Union syndicale Solidaires fonction publique : 4,4 décharges ; Union fédérale des cadres
des fonctions publiques (CFE-CGC) : 4,4 décharges.
90
Modalités qui attribuent proportionnellement davantage de décharges aux ministères
dont les effectifs sont les plus réduits.
91
Les calculs ont été faits en prenant les effectifs suivants : FPE : 2,52M ; FPT :
1, 94M ; FPH : 1,21M ; MEF : 131 000 ; MEN : 1 053 000 ; MIOM : 303 000.
ANNEXES
98
crédit syndical réellement utilisé représente en moyenne moins de 1,8 ETP
par an. À la communauté de communes des Bastides-en-Haut-Agenais-
Périgord, aucun agent de bénéficie d’une décharge d’activité.
Au Centre Hospitalier Universitaire de Grenoble Alpes, les
organisations syndicales n’utilisent pas la totalité du crédit d’heures qui
leur est attribué : en 2022, sur les 33 828 heures notifiées les syndicats,
seules 27 983 heures ont été utilisées.
4. Les autorisations spéciales d’absence (ASA) sont accordées aux
représentants des organisations syndicales pour assister à des réunions
relevant de leurs activités syndicales ou de leurs activités au sein des
instances de leur administration. Elles représentent pour les MEF et le
MIOM, l’équivalent de 635 ETP en 2022.
Tableau n° 12 :
évolution des ASA des MEF et du MIOM
En jours
2018
2019
2020
2021
2022
Autorisations
d’absence (Art. 13)
34 496
29 223
24 185
35 199
27 535
Autorisations
d’absence (Art. 15-I)
160 457
132 902
150 468
136 660
114 417
Autorisations
d’absence (Art. 15-II)
4 359
2 679
3 317
3 664
3 664
Total
199 312
164 804
177 970
175 523
145 616
Soit, en ETP
869
718
775
765
635
Données du niveau ministériel pour le MEFSIN
Source : Cour des comptes
L’extrapolation à l’ensemble de la fonction publique d’État conduit
à retenir une estimation de 3 687 ETP (soit 0,146 % des effectifs).
Pour les deux autres fonctions publiques, faute de système
d’information adapté, il n’existe pas de données consolidées permettant
d’approcher le nombre des ASA indépendantes de la représentativité
syndicale.
L’application du coefficient de 0,146 % aux effectifs de la FPT et la
FPH pourrait représenter 4 608 ETP. Cependant, le recours aux ASA est
moindre dans ces deux fonctions publiques. Pour les juridictions
ANNEXES
99
financières, un équivalent de 1 536 ETP, correspondant au tiers du ratio
précité, soit 946 ETP pour la FPT et 590 pour la FPH, paraît raisonnable
92
.
Les moyens financiers
Les moyens financiers alloués aux organisations syndicales dans la
fonction publique en 2022 sont de deux types :
Tableau n° 13 :
les moyens financiers alloués aux organisations
syndicales dans la fonction publique en 2022
Montant
Subvention annuelle versée aux OS représentatives
de la FPE
2 178 207 €
Subvention annuelle exceptionnelle versée aux OS
représentatives de la FPE
200 000 €
Autres subventions annuelles versées par des ministères
1 736 306 €
TOTAL
4 114 513 €
Source : Cour des comptes
-
des
subventions
annuelles
et
des
subventions
annuelles
exceptionnelle
s
s
ont accordées, en application du décret du
11 décembre 2000 aux organisations syndicales de la fonction
publique d’État représentatives au niveau national
93
. Le montant des
subventions, appelées à financer des stages ouvrant droit pour
formation syndicale, est déterminé en fonction de la part respective
des sièges obtenus par les organisations syndicales au conseil
supérieur de la fonction publique de l’État. Cette disposition n’a pas
d’équivalent dans les deux autres fonctions publiques.
92
Sur la base d’une consommation de temps trois fois moindre que celle retenue pour
la fonction publique d’État, considérant que ces absences sont davantage mobilisées
dans les centres hospitaliers les plus importants et les grandes collectivités (13 régions
métropolitaines, 5 régions et départements d’outre-mer, 96 départements métropolitains,
22 métropoles,
14
communautés
urbaines,
221
communautés
d’agglomération,
129 communes de plus de 50 000 habitants), ainsi que dans les centres de gestion de la FPT.
93
Cette attribution existe depuis 1992. Ces subventions trouvent leur base législative
dans l'article 34-7° de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires
relatives à la FPE. Cette disposition, relative au congé pour la formation syndicale dont
peuvent bénéficier les fonctionnaires de l'État, prévoit, en son deuxième alinéa, que
« la formation ouvrant droit au bénéfice de ce congé et placée sous la responsabilité
des organisations syndicales de fonctionnaires représentées au Conseil supérieur
de la fonction publique de l'État peut faire l’objet d’une aide financière de l'État ».
ANNEXES
100
Aux termes des dispositions de l’arrêté du 16 janvier 2015 fixant le
montant
de
la
subvention
versée
aux
organisations
syndicales
représentatives de fonctionnaires de l'État, le montant de la subvention
annuelle accordée à chaque organisation syndicale représentative de
fonctionnaires de l'État au niveau national est fixé comme mentionné dans
le tableau ci-dessous. À cette subvention annuelle, s’ajoute depuis 2014 le
versement d’une subvention exceptionnelle réglementaire les années de
renouvellement des instances, comme ce fut le cas en 2022.
Tableau n° 14 :
le financement des organisations syndicales en 2022
Organisations syndicales
représentées au CSFPE
Montant
de la subvention
(en €)
Montant de la subvention
exceptionnelle
complémentaire (en €)
Fédération générale
des fonctionnaires
Force ouvrière (FGF-FO)
363 034,50
33 333,32
Fédération syndicale unitaire
(FSU)
363 034,50
33 333,32
Unions des fédérations
de fonctionnaires UNSA
fonction publique
363 034,50
33 333,32
Union des fédérations CFDT
des fonctions publiques
et assimilés (UFFA-CFDT)
363 034,50
33 333,32
Union générale des
fédérations de fonctionnaires
CGT (UGFF-CGT)
363 034,50
33 333,32
Union syndicale Solidaires
fonction publique
181 517,25
16 666,66
Union fédérale des cadres
des fonctions publiques
(CFE-CGC)
181 517,25.
16 666,66
Total
2 178 207
199 999,92
Source : DGAFP
-
des subventions particulières sont versées par certains ministères
(291 306 € au MEF et 1 445 000 € au MIOM).