COMMUNIQUÉ DE PRESSE
14 février 2024
Audit flash
LE CONTRÔLE DE LA CONTRACTUALISATION
DANS LE CADRE DE LA LOI EGALIM
:
PREMIERS ENSEIGNEMENTS POUR LES
ÉLEVEURS BOVINS
En 2022, la filière bovine française a contribué de manière significative à l'agriculture du
pays en produisant plus de 23 milliards de litres de lait de vache et en élevant plus de
4 millions de bovins pour la viande. Les activités de production impliquent au premier chef
les éleveurs. Ceux-ci sont très nombreux et vendent leur production à un faible nombre
d’acheteurs. En raison de cette asymétrie, les acheteurs bénéficient
ainsi
d’un rapport de
force à leur avantage dans la négociation. La loi EGAlim 2 a généralisé l'obligation de
contractualisation écrite pluriannuelle dans les filières bovines (viande et lait). La Cour a
décidé de conduire un audit flash, à partir du 8 septembre 2023, pour examiner les contrôles
effectués par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la
répression des fraudes (DGCCRF) sur les contrats conclus entre producteurs et premiers
acheteurs dans ces filières.
L’activité de contrôle de la DGCCRF
constitue
l’un des seuls
instruments permettant d’apprécier la mise en œuvre d’EGAlim
. Cet audit rend compte des
moyens mobilisés par la DGCCRF et en tire les premiers enseignements.
Une obligation de contractualisation amont pour la filière bovine
Au sein de la filière bovine, les éleveurs, très nombreux, négocient la vente de leurs productions
avec un faible
nombre d’acheteurs. À titre d’illustration, en 2021, 76,3 % de la collecte de lait a
été réalisée par 28 établissements collecteurs. Concernant la viande, 143 abattoirs assurent
92
% des tonnages. En raison de cette asymétrie, les acquéreurs bénéficient d’un rapport de
force à leur avantage dans la négociation.
La loi EGAlim 1 a été promulguée en novembre 2018
afin d’améliorer l'équili
bre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire.
La loi a introduit un mécanisme de contractualisation
de l’
« amont
», c’est
-à-dire, entre les
premiers acheteurs et les agriculteurs. La proposition de contrat intervient
à l’initiative de
ces
derniers
afin qu’il soit mieux tenu compte de leurs coûts de production.
La loi EGAlim 2 du
18
octobre 2021 a rendu obligatoire la signature d’un contrat écrit pluriannuel pour la vente
d’un produit agricole
. En termes de réglementation, cette obligation
ne s’applique
pas à toutes
les filières agricoles. Ainsi, les céréales, les fruits et les légumes sont notamment exemptés.
Entrées en vigueur récemment pour les filières bovines, les règles applicables aux contrats sont
complexes. Elles révèlent des différences
d’interprétation entre les acteurs
et traduisent la
difficulté de trouver un bon équilibre entre liberté contractuelle et régulation du marché.
Des moyens de contrôle ciblés et mobilisés rapidement par la DGCCRF
Le
dispositif créé pour contrôler les relations commerciales à l’amont, y
compris la
contractualisation, repose pour l’essentiel sur
les contrôles de la DGCCRF. Ils sont planifiés
rapidement après la promulgation de la loi. Les enquêtes de la DGCCRF permettent
d’éclairer
les relations commerciales entre les éleveurs et leurs premiers acheteurs que sont les industries
agro - alimentaires, les coopératives et autres organisations de producteurs, les commerçants
de gros en lait et en bestiaux, et les abatteurs. Ces acteurs clés
constituent l’interface entre les
agriculteurs et leurs groupements (amont agricole)
d’une part et
les distributeurs et
consommateurs (aval agro-alimentaire)
d’autre part
. Leur
chiffre d’affaires apparaît comme
l’un des principaux critères employés pour
sélectionner les acheteurs à contrôler. Au total, pour
les exercices examinés par la Cour, la DGCCRF a contrôlé 64 acquéreurs pour les filières bovines.
Parmi lesquels on retrouve de grands opérateurs nationaux. En moyenne, un acheteur contrôlé
réalise un chiffre d’affaires de plus de 2
milliards
d’euros
soit un volume financier
correspondant
à un approvisionnement auprès de milliers d’éleveurs.
L’activité de contrôle, e
n
croissance de 140 % entre 2022 et 2023, apparaît dans cette mesure proportionnée aux
moyens de la DGCCRF et a été répartie de façon globalement équilibrée sur le territoire national
et entre les différentes catégories d’acheteurs.
Les premiers enseignements des contrôles réalisés
Les contrôles de la DGCCRF permettent de prendre connaissance des contrats qui reflètent une
forte hétérogénéité entre les filières et l’emploi d’indicateurs de prix et de clauses
. Ce qui
produit des effets parfois contrastés pour les éleveurs. I
ls permettent aussi de s’interroger sur
l
es cas d’
absence de contractualisation.
Dans cette phase d’appropriation des règles par les
acteurs
les sanctions prévues par la loi n’ont pas encore été ap
pliquées. Une nouvelle phase
s’ouvre désormais
. La
complexité
contractuelle
et
législative
nécessite
un
meilleur
accompagnement des producteurs et une plus grande transparence sur les contrôles réalisés.
Le
Ministère de l'Agriculture et de la Souveraineté alimentaire devrait proposer au comité de
règlement des différends commerciaux agricoles de rendre publiques des lignes directrices.
Cela permettrait de
lever les difficultés d’application
de trois articles du code rural et de la
pêche maritime. Le Ministè
re chargé de l’É
conomie devrait établir et rendre public un bilan
annuel des contrôles réalisés conformément à la loi. La Cour recommande au Ministère chargé
de l'
É
conomie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique de mettre en place
une plateforme de signalement destinée aux agriculteurs avec des garanties de confidentialité.
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