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COMMUNIQUÉ DE PRESSE
Le 6 juin 2023
LES ENJEUX DE LA TVA À L’ÈRE DU NUMÉRIQUE
Depuis la publication, en février 2023, du rapport du Conseil des prélèvements obligatoires intitulé «
La
taxe sur la valeur ajoutée (TVA), un impôt à recentrer sur son objectif de rendement pour les finances
publiques
», les discussions sur le paquet de la Commission européenne du 8 décembre 2022 en vue
d’adapter le système de TVA à l’ère numérique et les propositions de réforme douanière de l’Union
européenne du 17 mai 2023 justifient d’éclairer les enjeux de ces évolutions. Tel est l’objet de cette
note approuvée par le CPO dans sa séance du 25 mai 2023 et qui formule 8 recommandations.
La TVA est l’impôt le plus réglementé au niveau européen. Généralisée à l’ensemble de l’économie, sauf
au secteur financier et aux opérations immobilières, elle s’applique à toutes les transactions au lieu de
livraison du bien, c’est-à-dire de destination, et au lieu du siège ou d’établissement du prestataire.
Le numérique oblige à repenser les règles de territorialité de la TVA
Avec le développement de prestations de services dématérialisées transfrontalières, il a été décidé pour
des raisons d’égalisation des conditions de concurrence qu’à compter du 1
er
janvier 2010, les services
rendus à un opérateur économique assujetti à la TVA (BtoB) et certains services rendus à un
consommateur final (BtoC) tels que ceux rendus par les fournisseurs d’accès seraient considérés comme
taxables au lieu d’établissement du client.
Le CPO recommande
d’étendre la règle du lieu
d’établissement du client particulier à un plus grand nombre de services et, à l’inverse, de réviser la
territorialité des opérations fondées sur la
blockchain
pour lesquelles le client final n’est pas connu.
Les livraisons de biens entrant dans l’UE (importations) sont exonérées dans le pays d’origine et taxées
dans le pays d’arrivée. Une directive de 2017 a créé un guichet unique électronique permettant de
déclarer et de payer la TVA sur les ventes à distance de biens importés dans l’UE, le IOSS («
Import One-
Stop-Shop »
), en le cantonnant aux opérations BtoC de moins de 150 euros. Elle a également introduit,
pour ces envois, un principe de redevabilité de la TVA, non par le vendeur, mais par la plateforme
facilitant la vente de biens en ligne. Le 17 mai 2023, la Commission européenne a annoncé une réforme
du cadre douanier. Elle permettrait aux vendeurs en commerce électronique de déclarer l’ensemble des
ventes à distance sur le guichet IOSS.
Le CPO recommande
aux autorités françaises de soutenir cette
proposition.
Pour les opérations entre deux pays de l’UE,
le CPO préconise
d’étendre le guichet électronique OSS-UE,
également créé par la directive de 2017, à des opérations impliquant le stockage dans un entrepôt dans
le pays d’arrivée avant la vente au consommateur final (opérations BtoBtoC), de simplifier les formalités
administratives d’immatriculation TVA en France et de travailler à un standard commun des procédures
d’immatriculation au sein de l’UE (dématérialisation, socle de documents, exigences linguistiques) et à
un guide de bonnes pratiques.
Le numérique permet aux particuliers de fournir des biens et services sans être assujettis à la TVA
Les opérations économiques sont réalisées de plus en plus par des personnes non assujetties à la TVA,
parfois coordonnées ou référencées sur des plateformes. Il en résulte une perte de ressources fiscales
pour les Etats en raison du caractère « invisible » de ces opérateurs économiques non immatriculés, des
distorsions de concurrence entre entreprises assujetties à la TVA et prestataires non taxés opérant sur
les plateformes, et une insécurité juridique croissante pour des personnes de bonne foi.
La loi fiscale française a renforcé les obligations déclaratives des plateformes. Depuis le 1
er
janvier 2019,
celles-ci doivent transmettre chaque année à leurs utilisateurs et à l’administration un document
récapitulatif des transactions réalisées. Depuis le 1
er
janvier 2020, l’administration peut engager la
solidarité de paiement d’une plateforme en matière de TVA. Enfin, depuis le 1
er
juillet 2021, les
plateformes sont tenues de conserver et de mettre à disposition de l'administration un registre
permettant de reconstituer la TVA due sur les transactions BtoC qu'elles ont facilitées.
En parallèle, la directive « DAC 7 » du 22 mars 2021, destinée à faciliter le recouvrement des impôts
directs, a institué une obligation déclarative à la charge des opérateurs de plateforme et a étendu
l'échange automatique d'informations entre administrations à ces données. La loi de finances pour 2023
qui a transposé la directive a toutefois supprimé l’obligation à la charge des plateformes de déclarer le
lieu d’établissement de l’acquéreur des biens ou du preneur de services pour les transactions réalisées
entre entreprises (BtB).
Le CPO recommande
d’évaluer les conséquences de cette suppression en
matière de recouvrement de la TVA et, le cas échéant, de rétablir cette obligation.
Enfin, la Commission européenne propose d’étendre le champ d’application de la TVA aux services de
transport et d’hébergement rendus par des particuliers sur des plateformes, qui sont aujourd’hui non
assujettis. Cette proposition augmenterait fortement le nombre d’immatriculés.
Le CPO recommande
de procéder à une étude approfondie de ses implications et des alternatives envisageables.
Le numérique offre aussi des perspectives de renforcement des outils du contrôle fiscal
La loi de finances rectificative pour 2022 prévoit de généraliser à l’horizon 2026 la facturation
électronique entre entreprises assujetties à la TVA et la transmission des données de transaction à
l’administration. La Commission propose d’harmoniser les formats de facturation électronique et
d’étendre les obligations de reporting électronique aux opérations transfrontalières, notamment celles
sur les guichets uniques.
Le CPO recommande
aux autorités françaises de soutenir cette proposition.
D’autre part, en application d’une directive de 2020, transposée par la loi de finances pour 2023, un
registre central européen de paiements électroniques (« CESOP ») sera mis en place à compter de 2024.
En donnant aux agents habilités de l'administration fiscale accès à certaines données sur les transactions
transfrontalières, collectées auprès des prestataires de services de paiement (banques et autres
intermédiaires), il offre des perspectives prometteuses de détection d’anomalies ou de fraudes dans les
déclarations de TVA.
Le CPO recommande
d’en tirer les conséquences le plus tôt possible pour le
contrôle fiscal de ces opérations transfrontalières.
Lire la note
CONTACTS PRESSE :
Julie Poissier
Responsable du pôle médias
T
01 42 98 97 43
julie.poissier@ccomptes.fr
Eran Guterman
Chargé des relations presse et réseaux sociaux
T
01 42 98 59 73
eran.gutermar@ccomptes.fr
Le Conseil des prélèvements obligatoires,
une institution associée à la Cour des comptes
Le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO) est «
chargé d’apprécier l’évolution et l’impact économique,
social et budgétaire de l’ensemble des prélèvements obligatoires, ainsi que de formuler des recommandations sur
toute question relative aux prélèvements obligatoires
».Placé auprès de la Cour des comptes et présidé par le Premier
Président de la Cour des comptes, le collège du CPO comporte seize membres, huit magistrats et hauts fonctionnaires
et huit personnalités qualifiées choisies, à raison de leur expérience professionnelle, par les Présidents de
l’Assemblée nationale, du Sénat et du Conseil économique, social et environnemental, ainsi que par les ministres
chargés de l’économie et des finances, des affaires sociales et de l’intérieur..