FINANCES ET COMPTES PUBLICS
LA SÉCURITÉ
SOCIALE
Rapport sur l’application des lois
de financement de la sécurité sociale
Synthèse
Mai 2023
2
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
g
AVERTISSEMENT
Le présent document a pour objet de faciliter la lecture du rapport
de la Cour des comptes qui, seul, engage cette dernière. Les
réponses des administrations et des organismes intéressés sont
présentées en annexe du texte de la Cour
.
L’ordre des chapitres résumés correspond à celui du rapport.
3
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Sommaire
Présentation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .5
1
Une situation financière
de la sécurité sociale à redresser
7
2
Des réformes à poursuivre
21
3
Des évolutions nécessaires
33
4
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
5
Présentation
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Dans son dernier rapport public annuel
1
, la Cour des comptes a constaté que
la situation des finances publiques de la France restera en 2023 parmi les
plus dégradées de la zone euro . Elle a rappelé les risques élevés portant sur la
soutenabilité de la dette publique française à moyen terme . La Cour estime donc
qu’il n’est plus possible de repousser le nécessaire redressement des finances
publiques .
Après l’adoption d’une réforme des retraites et la révision des règles de l’assurance
chômage, le Gouvernement a annoncé une revue annuelle des dépenses afin
d’identifier les pistes permettant aux politiques publiques d’être plus efficaces et
plus économes . La Cour formulera à cet effet dans les prochaines semaines des
recommandations complémentaires au sein de publications spécifiques .
Dès à présent, le rapport d’application des lois de financement de la sécurité
sociale 2023 s’attache à :
- analyser la situation financière de la sécurité sociale au terme de l’exercice 2022,
afin d’éclairer le vote par le Parlement de la loi d’approbation des comptes de la
sécurité sociale, dont le projet lui est présenté pour la première fois dès le mois
de mai (partie I) ;
- tirer le bilan de la mise en œuvre des réformes ou de mesures décidées, ces
dernières années, par les lois de financement de la sécurité sociale et évaluer
en particulier leur apport à la maîtrise et à la qualité des dépenses de sécurité
sociale (partie II) ;
- illustrer, à travers quatre exemples, la nécessité d’engager les évolutions
nécessaires à une plus grande efficacité de la dépense publique dans le secteur
de la sécurité sociale (partie III) .
1 . Cour des comptes,
la situation d’ensemble des finances publiques (à fin février 2023),
rapport
public annuel 2023 .
6
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
7
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
1
Une situation financière
de la sécurité sociale à redresser
Après avoir analysé la situation des
comptes de la sécurité sociale en 2022,
les prévisions pour l’exercice 2023
et leur trajectoire pour les années à
venir (chapitre I), le rapport examine
de manière approfondie l’évolution
des dépenses d’assurance maladie
et formule des propositions pour
rendre plus effective la portée de leur
pilotage (chapitre II) . Il évalue enfin
la qualité de l’information nouvelle
apportée au Parlement sur la situation
financière des établissements
de santé et recommande les
améliorations nécessaires pour en
accroître la pertinence et l’exhaustivité
(chapitre III) .
1 - La situation financière de la sécurité
sociale : une amélioration temporaire,
une dégradation prévisible
Le déficit des régimes obligatoires
de base de la sécurité sociale (Robss)
et du fonds de solidarité vieillesse
(FSV) au 31 décembre 2022 a
atteint 19,6 Md€, soit 0,7 % du PIB.
Son amélioration, de 9,7 Md€ par
rapport au résultat de 2021 rectifié
(voir encadré),
reste modeste au
regard de l’ampleur de la reprise
économique
(croissance du PIB de
2,6 %) et de la hausse de l’inflation
(+ 5,3 % hors tabac), qui ont participé
à l’accroissement des recettes
(augmentation de la masse salariale
de 8,7 %) .
8
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Une situation financière
de la sécurité sociale à redresser
La rectification par le Parlement des résultats de 2021,
suivant l’opinion de la Cour des comptes
Dans le rapport de certification des
comptes du régime général de 2021,
la Cour avait souligné une anomalie :
des recettes perçues auprès des
travailleurs indépendants, dont le
prélèvement avait été reporté dans le
cadre des mesures d’accompagnement
de la crise, avaient été comptabilisées
au titre de 2021 alors qu’elles étaient
rattachables à l’exercice 2020 . Cela
a conduit à majorer de 5 Md€ le
résultat de 2021 et à minorer d’autant
le résultat de 2020 . Le Parlement a
rectifié les recettes et le solde de la
sécurité sociale de 2021 à l’occasion de
leur approbation en loi de financement
de la sécurité sociale pour 2023 .
L’administration n’a toutefois pas établi
de comptes
pro forma
sur la base du
vote du Parlement .
Évolution du déficit agrégé des régimes obligatoires de base de sécurité sociale
et du FSV (2009-2022, en Md€)
- 24,9
- 29,6
- 22,6
- 19,2
- 16,0
- 12,8
- 10,2
- 1,4 - 1,7
- 39,7
- 29,3
- 19,6
- 45
- 40
- 35
- 30
- 25
- 20
- 15
- 10
- 5
0
2009
2010
2011
2012
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
2022
- 7,0
- 4,8
Évolution du déficit
Note : La LFSS pour 2022 a adopté les comptes portant un déficit 2020 s’élevant à
39,7 Md€. En tenant compte de la rectification du déficit 2021 votée par le Parlement en
LFSS pour 2023, minoré de 5 Md€ produits rattachables à 2020, le solde correspondant
pour 2020 s’établirait à 34,7 Md€.
Source : Cour des comptes d’après le PLACSS pour 2022 et les tableaux d’équilibre
approuvés par les LFSS pour les années antérieures
Très proches de l’équilibre en 2018
et en 2019, les soldes de la sécurité
sociale avaient été profondément
dégradés par la crise sanitaire en
2020 et en 2021 . À partir de 2021, le
rebond de la croissance et la reprise
de l’emploi ont ensuite restauré les
recettes et favorisé un redressement
progressif . Toutefois, les dépenses ont,
en parallèle, fortement augmenté,
du fait de la prolongation de la
crise sanitaire jusqu’en 2022 et du
déploiement depuis 2020 du « Ségur
de la santé », programme pluriannuel
de revalorisations salariales et
d’investissement structurel en faveur
de l’hôpital et des établissements
médico-sociaux .
La branche maladie porte en 2022 un
déficit de 21 Md€, supérieur à celui de
l’ensemble de la sécurité sociale, et en
aggravation de 1,9 Md€ par rapport à
la prévision initiale .
9
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Une situation financière
de la sécurité sociale à redresser
La branche vieillesse accuse un déficit
croissant, s’élevant à 3,8 Md€ en 2022 .
Ce déficit est imputable au régime
général (2,9 Md€) et à la caisse de
retraites de la fonction publique locale
et hospitalière (CNRACL, 1,8 Md€),
les autres régimes étant en excédent
ou à l’équilibre . Pour le régime de la
fonction publique d’État et plusieurs
régimes spéciaux, cet équilibre
est atteint par le versement de
contributions ou de subventions d’un
montant total de 51,3 Md€ en 2022 .
Les autres branches (accidents du
travail et maladies professionnelles,
famille, autonomie) sont
excédentaires . Leurs résultats sont
conformes à la prévision initiale ou
meilleurs qu’initialement prévus .
Le résultat 2022 de la sécurité sociale
est ainsi proche de la prévision
réalisée en loi de financement
initiale (amélioration de 1,8 Md€) .
Cela masque toutefois une forte
augmentation des recettes compensée
par une hausse tout aussi importante
des dépenses, en dépit desquels le
Gouvernement n’a pas déposé
de projet de loi de financement
rectificative .
Les recettes (572 Md€) dépassent
ainsi de 22,8 Md€ la prévision
initiale . À périmètre constant, elles
sont supérieures de 64,2 Md€ aux
produits de 2019, avant la crise
sanitaire . Cette croissance s’explique
par l’évolution favorable de la masse
salariale du secteur privé, portée par
la bonne tenue de l’emploi (+ 2,7 %)
et par l’augmentation du salaire
moyen par tête (+ 5,8 %), soutenue
par les revalorisations décidées dans
le contexte d’inflation . La hausse de
3,5 % du point d’indice de la fonction
publique, le 1
er
juillet 2022, a procuré
à la sécurité sociale un surcroît de
cotisations et contributions de 1,1 Md€
en 2022 . La TVA nette affectée
(46,4 Md€) est restée une ressource
dynamique (+ 4,7 %) .
Les dépenses (591,6 Md€) ont dépassé
les prévisions de 21,0 Md€ . Cette
forte augmentation a deux causes
principales : les effets de la crise
sanitaire, plus importants que prévu, et
la revalorisation de 4 % des prestations
sociales adoptée le 1
er
juillet 2022
par anticipation de la revalorisation
annuelle 2023 pour prévenir les effets
de l’inflation sur le pouvoir d’achat des
bénéficiaires .
Pour l’assurance maladie, l’objectif
national de dépenses (Ondam)
voté (236,8 Md€) a été dépassé de
10,4 Md€, dont 6,8 Md€ du fait des
dépenses de crise . La hausse des
dépenses des autres branches
s’explique principalement par l’effet
des revalorisations de prestations
sociales .
En 2023, les soldes des régimes de
base de la sécurité sociale devraient
poursuivre leur amélioration, grâce
à des facteurs conjoncturels : la
poursuite de la dynamique des recettes
et le reflux des dépenses de crise.
La loi de financement rectificative de
la sécurité sociale pour 2023 prévoit
un déficit prévisionnel de 8,2 Md€, en
nette amélioration de 11,4 Md€ . La
progression attendue des recettes
de cotisations, contributions et taxes
affectées (+ 4 %) resterait tirée par
l’inflation et la meilleure situation de
l’emploi . L’augmentation des dépenses
10
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
serait plus faible (+ 1,7 %) . Après les
revalorisations par anticipation des
retraites et des prestations sociales
en juillet 2022, celles de 2023 seraient
plus modérées .
Le redressement le plus important
concernerait la branche maladie, dont
le déficit serait ramené de 21 Md€ à
7,1 Md€ . À titre principal, il résulterait
de la réduction des dépenses de crise
de 10,7 Md€ à 1 Md€ . Toutefois, il
repose aussi sur une hypothèse de
progression de l’Ondam hors crise de
3,6 %, inférieure à l’inflation, ce qui
suppose des efforts de maîtrise des
dépenses qui restent à confirmer .
La réforme des retraites n’a modifié
qu’à la marge la prévision de déficit
2023 . La revalorisation des minima de
pensions pour les retraites complètes
doit s’appliquer dès le 1
er
septembre
2023, pour un surcoût estimé à
0,4 Md€ en 2023 . L’effet du report de
l’âge de départ et de l’augmentation
de la durée d’assurance requise pour
les nouveaux retraités (0,2 Md€
d’économies attendues en 2023) est
plus progressif et, pour la première
année d’application, devrait être
contrebalancé par les autres mesures
d’accompagnement .
À partir de 2024, un déficit qui
devrait se dégrader malgré les effets
attendus de la réforme des retraites
L’amélioration de la situation
financière attendue en 2023 ne devrait
être que transitoire . Dès 2024, le déficit
devrait s’aggraver à nouveau, porté
par la dégradation des soldes de la
branche vieillesse, que la réforme des
retraites ne devrait pas permettre de
rétablir rapidement . Le déficit devrait
ensuite se stabiliser au-dessus de
13 Md€ en 2025 et en 2026 .
Une situation financière
de la sécurité sociale à redresser
Trajectoire financière 2021-2026 des soldes des branches et du FSV (en Md€)
Maladie
Autonomie
Vieillesse + FSV
AT-MP
Robss + FSV
Famille
- 4,4
- 2,5
- 2,5
- 6,4
- 10,2
- 11,4
- 29,3
- 19,6
- 8,2
- 9,6
- 13,5
- 13,1
- 30
- 25
- 20
- 15
- 10
- 5
0
5
2021
2022
2023 (p)
2024 (p)
2025 (p)
2026 (p)
Source : Annexe de la LFRSS 2023, rectifiée pour 2021 selon l’article 1
er
de la LFSS 2023
et pour 2022 selon les comptes définitifs
11
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Cette dégradation serait l’effet de la
conjoncture d’une part et d’un déficit
structurel de la branche vieillesse
de l’autre, tandis que la progression
prévue des dépenses de santé serait
fortement maîtrisée .
En effet, en 2024, les recettes devraient
ralentir avec le recul de l’inflation
et un marché de l’emploi moins
dynamique selon les hypothèses de
masse salariale du Gouvernement .
Dans le même temps, les pensions
et prestations devraient intégrer
l’inflation constatée en 2023, révisée
à la hausse par le programme de
stabilité .
Une situation financière
de la sécurité sociale à redresser
Effet de l’inflation sur le solde de la sécurité sociale
En cas d’augmentation ou de
diminution de l’inflation, les effets
se répercutent rapidement sur les
recettes de la sécurité sociale qui
reposent à 85 % sur les salaires et sur
la consommation . Les effets sont plus
lents sur les dépenses, avec un an de
décalage pour les dépenses indexées .
En conséquence, sauf revalorisation par
anticipation des prestations comme en
2022, les déficits de la sécurité sociale
diminuent quand l’inflation accélère
et augmentent quand elle décélère .
Cet effet participe à l’amélioration du
solde 2023 et devrait contribuer à sa
dégradation en 2024 et en 2025 .
L’hypothèse concernant l’évolution
de l’Ondam, hors crise sanitaire,
apparaît particulièrement ambitieuse .
Sa progression moyenne annuelle
sur la période 2023-2026 serait de
2,9 %, soit à peine plus que l’inflation
(2,8 %) . Dans le passé, jamais une telle
modération n’a pu être obtenue sur
plusieurs années . La mise en œuvre de
la trajectoire programmée supposerait
un ensemble de réformes visant
à améliorer l’efficience et la qualité
des soins . La Cour a rappelé les plus
significatives des mesures qu’elle
préconise dans une note structurelle de
2021
2
et qu’elle illustre dans le présent
rapport, afin de réaliser des économies
importantes sans remettre en cause
la qualité des soins, telle la maîtrise
médicalisée des dépenses de santé ou
l’efficience de l’imagerie médicale .
La réforme des retraites adoptée
le 14 avril 2023 a des finalités
économiques qui vont au-delà du seul
objectif de rétablissement comptable
des comptes sociaux . Dans le champ des
régimes de base de la sécurité sociale,
la réforme n’aura d’effets financiers
favorables que progressivement,
la montée en charge des mesures
d’accompagnement étant plus rapide
que celle des mesures d’âge . Elle se
traduirait ainsi par un surcoût jusqu’à la
fin de 2024 . Le gain net resterait limité à
1 Md€ en 2025 et à 2 Md€ en 2026 .
À horizon 2030, sous les hypothèses
favorables d’une productivité
2 . Cour des comptes,
« Santé : garantir l’accès à des soins de qualité et résorber le déficit de
l’assurance maladie »,
décembre 2021 .
12
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
augmentant de 1 % par an et d’un
taux de chômage ramené à 4,5 %
(7,2 % à fin 2022), l’impact net sur
les soldes de la branche vieillesse des
régimes obligatoires de base et du
FSV serait de 7,1 Md€ . À cet horizon,
l’effet du report à 64 ans de l’âge de la
retraite et de l’accélération de la durée
d’assurance requise à 43 annuités
atteindrait 11,5 Md€ et serait
réduit de 4,4 Md€ par les mesures
d’accompagnement
3
Une situation financière
de la sécurité sociale à redresser
Conséquences de la réforme des retraites sur les soldes de la branche vieillesse
et du FSV (tous Robss, en Md€)
- 5,0
0,0
5,0
10,0
2023
2024
2025
2026
2027
2028
2029
2030
Départs anticipés
(invalides, carrières longues…)
Prévention de l'usure
professionnelle
Revalorisation minima
de pensions
Transitions retraites
Relèvement 64 ans âge légal
+ 43 annuités
Création assurance vieillesse
des aidants
- 2,5
2,5
7,5
12,5
Source : étude d’impact de la réforme accompagnant le PLFSS, Cnav, modèle Prisme 2022
En prenant en compte les effets de la
réforme et les mesures réglementaires,
le déficit de la branche vieillesse et du
fonds de solidarité vieillesse (FSV),
devrait atteindre, malgré les effets de
la réforme des retraites, un maximum
de 8,8 Md€ en 2025, avant de se
réduire à 5,7 Md€ en 2030 . De plus,
les effets des mesures adoptées par
amendement lors de la discussion du
projet de loi au Parlement n’ont pas
encore été intégrés à cette prévision .
3 . Départs anticipés pour les invalides, carrières longues, prévention de l’usure professionnelle,
revalorisation des minima de pensions, mesures de transition retraites, revalorisation du seuil de
récupération sur succession de l’Aspa, création d’une assurance vieillesse pour les aidants .
13
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Une situation de la CNRACL de plus en plus préoccupante
La CNRACL gère un régime spécial qui
couvre les risques retraite et invalidité
des agents de la fonction publique
territoriale et hospitalière . Compte tenu
d’un déficit devenu structurel et appelé
à s’aggraver (6,6 Md€ en 2030), la LFSS
2023 a autorisé la CNRACL à recourir
à l’emprunt dans la limite de 7,5 Md€
pour assurer la pérennité des paiements
des prestations en 2023 . Cette solution
est de plus en plus coûteuse avec la
remontée rapide des taux d’intérêt .
Une situation financière
de la sécurité sociale à redresser
Évolution prévisionnelle des soldes des régimes de base
de la branche vieillesse et du FSV (en Md€)
- 2,5
- 3,9
- 7,4
- 8,8
- 8,7
- 7,3
- 6,8
- 6,7
- 5,7
- 12
- 10
- 8
- 6
- 4
- 2
0
2
4
6
2022
2023
2024
2025
2026
2027
2028
2029
2030
Régimes alignés + FSV
CNRACL
Autres régimes
ROBSS + FSV
Source : étude d’impact de la réforme accompagnant le PLFRSS, Cnav, modèle Prisme 2022
Le financement des déficits de la
sécurité sociale par la Cades n’étant
plus organisé après 2023, l’adoption
de mesures nouvelles devrait
s’accompagner d’une trajectoire
crédible de retour à l’équilibre
L’existence de la Caisse d’amortissement
de la dette sociale (Cades) a été prolon-
gée de 2024 à 2033 par la loi du 7 août
2020, qui a également prévu la reprise de
92 Md€ au titre des déficits 2020 et pos-
térieurs . Selon la prévision, il ne resterait
à la Cades que 8,8 Md€ pour reprendre le
déficit 2023 du régime général . Il faudra
donc élaborer de nouvelles solutions
pour les déficits du régime général qui
seront constatés à partir de 2024, ainsi
que pour absorber le cumul des déficits
de la CNRACL depuis 2020 .
Un nouvel allongement de la durée
de vie de la Cades au-delà de 2033, s’il
était décidé, devrait impérativement
s’accompagner d’une trajectoire crédible
et durable de retour à l’équilibre . Pour
cela, un programme pluriannuel de
réformes doit être établi, accompagné
d’une trajectoire de rétablissement des
comptes .
14
Une situation financière
de la sécurité sociale à redresser
Annexe : avis sur la cohérence des tableaux d’équilibre
et du tableau patrimonial de la sécurité sociale relatifs à l’exercice 2022
Pour la première fois, un projet de
loi d’approbation des comptes de la
sécurité sociale (PLACSS) soumet
à l’approbation du Parlement des
tableaux relatifs au dernier exercice
comptable clos : des tableaux
d’équilibre, qui sont des comptes de
résultat synthétiques des régimes
de sécurité sociale et du fonds de
solidarité vieillesse (FSV) ; un tableau
patrimonial, bilan d’ensemble
des régimes, du FSV, de la caisse
d’amortissement de la dette sociale et
du fonds de réserve pour les retraites .
La Cour s’assure de la conformité
des informations figurant dans ces
tableaux avec les comptes des entités
précitées, de la correcte élimination
des opérations réciproques entre ces
entités et de la qualité de l’information
communiquée au Parlement .
Sous certaines observations, relatives
notamment aux opinions qu’elle a
émises sur les comptes du réseau des
Urssaf et des branches de prestations
du régime général de sécurité sociale,
en particulier s’agissant de la branche
famille qui fait l’objet d’un refus de
certifier, la Cour estime qu’à travers
ses tableaux d’équilibre et son tableau
patrimonial, le PLACSS pour 2022
fournit une représentation cohérente
des recettes, des dépenses et du
solde de la sécurité sociale, ainsi que
des actifs et des passifs des entités
comprises dans les champs respectifs
à ces tableaux .
Les délais induits par la réforme de la
procédure d’approbation des comptes
doivent conduire à anticiper la date
d’arrêté des comptes des régimes, la
production des tableaux ainsi que celle
à laquelle la commission des comptes
de la sécurité sociale rend son avis .
En effet, lors de ce premier exercice
d’application de la réforme, les délais
permettant à la Cour de rendre ses
avis d’audit sont restés insuffisants .
La Cour formule ainsi 4 recommanda-
tions
visant notamment à restaurer le
niveau d’information existant avant la
mise en place de la loi d’approbation
des comptes, à avancer le calendrier
de production des comptes en
conséquence de l’instauration de
cette loi et à renforcer la traçabilité
et l’explicabilité des retraitements
opérés pour la production des
tableaux d’équilibre, qui comportent
des contractions de produits et de
charges non conformes au cadre
normatif .
2 - L’évolution des dépenses
d’assurance maladie en 2022
Les dépenses relevant de l’objectif
national de dépenses d’assurance
maladie (Ondam) ont fortement
augmenté, passant de 200,4 Md€ en
2019 à 247,2 Md€ en 2022, soit une
progression de 5,6 % par an hors
dépenses liées à l’épidémie de covid 19 .
La progression était de 2,3 % par an sur
la période 2017-2019 .
Après trois années
de fortes hausses liées au « Ségur de la
santé » et aux mesures pour tenir compte
du choc inflationniste en 2022, il convient
à présent de rechercher des économies
d’efficience du système de soins afin
d’assurer le respect d’une trajectoire
prévue beaucoup plus contrainte .
15
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Une situation financière
de la sécurité sociale à redresser
Évolution de l’Ondam à périmètre courant* (en Md€)
195,5
200,4
219,3
239,8
247,2
201,0
221,5
235,5
191,1
199,5
211,6
222,8
190
200
210
220
230
240
250
2017
2018
2019
2020
2021
2022
Ondam constaté
Ondam constaté hors covid, avec Ségur
Ondam constaté hors covid,
hors Ségur de la santé
* Les dépenses d’Ondam hors covid, avec Ségur de la santé sont calculées à partir des
surcoûts covid bruts.
Source : Cour des comptes d’après les informations communiquées par la DSS
Un fort dépassement de l’Ondam en 2022
En 2022, l’objectif initial de la LFSS a
été dépassé de 10,4 Md€ (4,4 %) : les
dépenses covid ont été supérieures
de 6,8 Md€, à la provision initiale de
4,9 Md€ ; des mesures compensatoires
de l’inflation ont coûté 2,7 Md€,
dont 1,5 Md€ de revalorisations
salariales et 0,8 Md€ de rallonges aux
établissements de santé et médico-
sociaux pour faire face à la hausse
des charges d’énergie, de restauration
et de produits médicaux . 0,7 Md€ de
mesures d’urgence ont été prises pour
majorer les heures supplémentaires et
les temps de garde de nuit et de week-
end des agents de la fonction publique
hospitalière . Enfin, la dynamique
d’activité a conduit à des dépenses
non prévues de 1,5 Md€, notamment
de produits de santé et d’indemnités
journalières maladie . Ces dépenses
ont été en majorité compensées
(- 1,3 Md€) par de moindres dépenses
finalement constatées en 2021 .
En dépit de l’ampleur des dépasse-
ments en 2022, et malgré des mesures
de régulation, les dépenses relevant
de l’Ondam n’ont pas fait l’objet d’une
loi de financement rectificative de la
sécurité sociale en cours d’année . Ces
dépassements ont été entérinés par
une modification de l’Ondam dans la
partie rectificative pour 2022 de la
LFSS pour 2023 .
Par rapport à 2021, les dépenses
constatées d’Ondam hors covid ont
progressé de 6,3 %, soit 14 Md€ . Cette
dynamique porte en particulier :
- sur les établissements de santé et les
établissements et services médico-
sociaux, en raison des mesures de
revalorisation salariale du Ségur de la
santé (2,4 Md€) et de la revalorisation
du point d’indice des fonctionnaires
(1,5 Md€),
- sur les produits de santé (1,4 Md€),
- sur les indemnités journalières (1,1 Md€),
- et sur les honoraires médicaux et
dentaires (1,1 Md€) .
16
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Une situation financière
de la sécurité sociale à redresser
Exécution 2022 de l’Ondam hors covid par sous-objectifs
comparée à la LFSS et à l’exécution 2021 (en Md€)
96,3
100,5
101,0
91,5
95,0
97,3
14,1
14,3
14,5
12,1
13,3
13,7
4,9
5,9
6,2
O ndam
constaté
2021
O ndam
initial
LFSS 2022
O ndam
constaté
2022
Autres prises en charge
FIR et FMIS
Établissements pour personnes
en situation de handicap
Établissements
pour personnes âgées
Établissements de santé
Soins de ville
0
50
100
150
200
250
2,7
2,9
2,8
221,6
231,9
235,5
Source : Cour des comptes d’après les informations de la direction de la sécurité sociale
Des incertitudes sur l’exécution
de l’Ondam en 2023
Le montant de l’Ondam 2023 a été
revu à la hausse (+ 0,7 Md€) dans la
LFSS rectificative du 14 avril 2023 à
244,8 Md€, dont 1 Md€ encore liés à la
crise sanitaire . L’objectif hors covid est
en hausse de 3,8 % par rapport à 2022 .
Cette évolution inclut l’extension
en année pleine de la revalorisation
du point d’indice à mi-année 2022
(1,4 Md€), la dernière étape des
revalorisations du Ségur de la santé
(0,6 Md€) et l’extension en année pleine
de la majoration des horaires de garde
de nuit et de week-end (0,6 Md€) .
Des dépenses nouvelles (2,1 Md€)
ont été inscrites en prévision des
négociations sur les revalorisations
conventionnelles avec les médecins,
les masseurs-kinésithérapeutes et les
transporteurs sanitaires (0,7 Md€), ainsi
que des besoins des établissements et
services médico-sociaux (0,6 Md€) et
des établissements de santé (0,5 Md€) .
Des facteurs d’incertitudes pèsent
sur le respect de cet objectif en 2023,
notamment pour les dépenses de
produits de santé . Les estimations
d’économies demeurent limitées à
1,7 Md€ .
17
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Une situation financière
de la sécurité sociale à redresser
Des réformes plus vigoureuses
indispensables pour assurer le respect
de l’Ondam
La progression de l’Ondam hors covid
en 2023 reste en-deçà de 0,5 point
de l’inflation attendue (+ 4,3 %
hors tabac) . Une telle évolution
représente une forte contrainte,
même si l’inflation ne se répercute
pas intégralement sur les dépenses
de l’Ondam . Cette contrainte serait
maintenue en 2024 (progression
inférieure de 0,2 point à l’inflation) .
Le respect d’une telle trajectoire
implique de rechercher des économies
d’efficience du système de soins . La
Cour rappelle les nombreuses pistes
de réforme qu’elle a identifiées,
concernant notamment la réduction
des rentes de situation, une meilleure
organisation des acteurs du système
de santé en fonction d’objectifs
d’accessibilité, de continuité, de qualité
et de sécurité des soins, et un meilleur
encadrement des dépenses les plus
dynamiques .
5.
Rétablir le seuil d’alerte en cas de
risque de dépassement de l’Ondam
de 0,5 % sans distinction entre
dépenses covid et hors covid ;
6.
Réserver les provisions sur
les établissements de santé et
médico-sociaux aux dépenses
imprévues, notamment aux charges
additionnelles liées à l’inflation ;
7.
Dans une perspective pluriannuelle,
poursuivre plus vigoureusement
les réformes visant une meilleure
efficience des dépenses de l’Ondam,
notamment en remédiant aux
dépassements par des dispositifs de
régulation couvrant l’ensemble des
secteurs .
Recommandations
(ministères chargés de la santé, de la
sécurité sociale et des comptes publics)
3 - L’information du Parlement
sur la situation financière des
hôpitaux : des progrès nécessaires
Les financements que verse l’assurance
maladie aux établissements de santé
avoisinent les 100 Md€ par an, soit
environ 40 % de l’objectif annuel des
dépenses de santé (Ondam) voté par le
Parlement . Au regard des enjeux de bon
fonctionnement des établissements
de santé, il importe que le Parlement
ait une vision claire et complète de
l’évolution de leur situation financière
lors du vote de la LFSS .
Une annexe au PLFSS censée
améliorer l’information du Parlement
La loi organique du 14 mars 2022 relative
aux LFSS a créé une nouvelle annexe,
jointe au PLFSS annuel (« l’annexe 6 »),
dont l’objet est de présenter la situation
financière des établissements de santé et
médico-sociaux .
Auparavant, un rapport annuel
présentait les actions menées
en matière de financement des
établissements de santé, incluant un
bilan rétrospectif et présentant les
18
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Une situation financière
de la sécurité sociale à redresser
évolutions envisagées . Ce document
ne consacrait qu’une place restreinte
à l’analyse de la situation financière
et, de surcroît, ne portait que sur les
hôpitaux publics . Aucune information
n’était fournie pour les cliniques à but
lucratif et les établissements de santé
privés d’intérêt collectif (Espic) .
La Cour s’est attachée à apprécier
la qualité de l’information portée à
la connaissance du Parlement dans
cette nouvelle annexe, produite pour
la première fois en septembre 2022 à
l’appui du projet de loi de financement
de la sécurité sociale pour 2023 .
Des informations encore insuffisantes
Sur un rapport de 61 pages, l’annexe en
consacre seulement six à la situation
financière des établissements de
santé, dont une pour les cliniques à but
lucratif et les Espic, avec des données
fournies très limitées . Les informations
sont trop succinctes pour comprendre
comment se forment les résultats des
établissements ou le lien entre les
investissements décidés et l’évolution
de l’encours de la dette financière .
Une production de l’information
sur les comptes à accélérer
L’annexe au PLFSS 2023, publiée en
octobre 2022, analyse les comptes
de 2020 . Les résultats de 2021 y sont
présentés pour les seuls hôpitaux
publics et avec des précautions
méthodologiques importantes,
comme étant
« en cours de
consolidation »
et
« provisoires »
Cela
est d’autant plus paradoxal que les
résultats des comptes de l’assurance
maladie de 2021 figuraient au PLFSS
2023 que l’annexe accompagnait .
Il conviendrait que le calendrier
de production des comptes des
établissements de santé, qui court
actuellement jusqu’au 30 juin de
l’année suivante, soit rapproché
de celui des branches du régime
général de sécurité sociale, afin
d’être complété avant le dépôt de
la loi d’approbation des comptes de
la sécurité sociale de l’année . Pour
cela, le ministre de la santé devrait,
comme il le faisait avant l’exercice
2017, prendre les décisions de dégel et
de délégation des dernières dotations
suffisamment tôt pour permettre aux
agences régionales de santé (ARS) de
les verser avant la fin de l’année aux
établissements, et non à la mi-mars .
Si nécessaires, des régularisations des
montants versés pourraient intervenir
au début de l’année suivante, au vu de
l’activité réelle .
19
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Une situation financière
de la sécurité sociale à redresser
Délais comparés d’établissement des comptes des hôpitaux publics
et de la branche maladie du régime général de sécurité sociale (« assurance maladie »)
Source : Cour des comptes
Note de lecture : les dates indiquées sont des dates limites
Des données et analyses
supplémentaires à fournir
Il conviendrait que l’annexe fournisse
une analyse des résultats financiers,
en veillant à l’homogénéité des
indicateurs de compte de résultat
et de bilan entre les différentes
catégories d’établissement .
Dans le contexte du programme
d’investissement engagé dans le
cadre du « Ségur de la santé »,
une attention particulière devrait
être portée à l’analyse du niveau
d’endettement des établissements, de
manière rétrospective et prospective .
20
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
8.
Produire, dans l’annexe 6 aux
PLFSS des années 2024 et suivantes,
pour les hôpitaux publics, les
établissements de santé privés
d’intérêt collectif et les cliniques à
but lucratif :
- une analyse de l’activité de l’année
et de son incidence sur les recettes ;
- une description des financements
de toute nature perçus par les
établissements de santé, des
conditions de leur mise en réserve et
de leur restitution, et des conditions
d’attribution complémentaire
d’aides en trésorerie à certains
établissements en difficulté ;
- une analyse rétrospective et prospec-
tive des trajectoires d’investissement
et d’endettement, en particulier
pour les établissements surendettés
(ministère de la santé et de la
prévention)
;
9.
Fournir, en vue de la préparation de
l’annexe aux PLFSS 2024 et suivants,
un niveau d’analyse de la situation
financière des établissements
de santé privés d’intérêt collectif
équivalent à celui relatif aux hôpitaux
publics et aux cliniques à but lucratif,
et calculer des indicateurs financiers
identiques pour les trois catégories
d’établissements
(Atih et ministère de
la santé et de la prévention)
;
10.
Attribuer aux établissements
de santé, avant le 31 décembre, la
totalité des dotations dues au titre
de l’année n ; en cas de dépassement
constaté de l’objectif de dépenses
des établissements de santé,
compenser le trop-versé en ajustant,
à due concurrence, le montant des
dotations de l’année n+1
(ministère
de la santé et de la prévention)
;
11.
Avancer la date limite de l’arrêté
définitif des comptes des hôpitaux
publics pour la rapprocher de celle
de l’assurance maladie (15 mars)
et fixer la date limite d’approbation
des comptes des hôpitaux par
leurs conseils de surveillance
avant celle du dépôt du projet de
loi d’approbation des comptes de
la sécurité sociale (avant le 1
er
juin)
(ministère de l’économie, des finances
et de la souveraineté industrielle et
numérique, ministère de la santé et de
la prévention).
Recommandations
Une situation financière
de la sécurité sociale à redresser
21
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Des réformes
à poursuivre
2
Les quatre chapitres de cette
deuxième partie du rapport évaluent
la mise en œuvre de mesures décidées
récemment dans le cadre des lois de
financement de la sécurité sociale .
Le bilan dressé illustre la nécessité
de poursuivre les efforts de réforme,
qu’il s’agisse des expérimentations
portant sur des règles dérogatoires à
l’organisation et à la tarification des
soins (chapitre IV), de l’organisation
de l’aide médicale urgente et des soins
non programmés en ville (chapitre
V), de l’indemnisation des congés de
maternité et de paternité (chapitre
VI) ou de la lutte contre la fraude aux
prestations sociales (chapitre VII) .
1- Expérimenter pour réformer
l’organisation et la tarification
des soins : un premier bilan de la
méthode promue par l’article 51
de la LFSS 2018
Les limites des règles d’organisation
et de financement des soins
L’organisation du système de santé
reste cloisonnée et dispersée, ce qui ne
facilite pas l’intervention coordonnée
et efficiente des professionnels
de santé au bénéfice des patients,
notamment de ceux, de plus en plus
nombreux, atteints de pathologies
chroniques .
Un cadre général d’expérimentation
Entre 2007 et 2017, 23 expérimenta-
tions avaient permis d’encourager
des initiatives de professionnels de
terrain . Peu d’entre elles avaient donné
lieu à généralisation . Certaines n’ont
pas été mises en œuvre, ou l’ont été
partiellement . D’autres n’ont pas
été poursuivies . Présenté comme
une rupture, l’article 51 de la loi de
financement de la sécurité sociale
pour 2018 a institué un cadre juridique
pour déroger à titre expérimental à
des règles générales d’organisation
ou de tarification, qui devait faciliter le
recours aux expérimentations et leur
généralisation .
22
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Des réformes à poursuivre
Expérimenter des règles de rémunération dérogatoires
Le cadre dérogatoire de « l’article 51 »
a pour but d’encourager les
professionnels de santé à adopter une
approche transversale des enjeux de
santé sans être bloqués par les règles
de financement habituelles .
La quasi-totalité des expérimentations
comportent des innovations en
matière de financement, en instituant
des prises en charge partagées entre
la ville et l’hôpital, ou de nouvelles
modalités de rémunération des soins
en ville (notamment concernant
l’intervention conjointe de plusieurs
professionnels libéraux) .
À fin 2022, plus de 120 projets
ont été sélectionnés au titre de
« l’article 51 » parmi 1 073 dossiers
de candidature déposés . Le total des
dépenses prévisionnelles (jusqu’en
2026) des projets aujourd’hui
autorisés atteint 511 M€ . De 2018
à 2022, les dépenses effectives
cumulées se sont élevées à 180 M€ .
Un trop plein d’expérimentations,
un processus d’évaluation et de tri
à reconsidérer, une stratégie
de généralisation à organiser
Afin de ne pas écarter a priori des
initiatives de terrain, les pouvoirs
publics ont décidé de ne déterminer
ni thématique prioritaire ni nombre
maximal de projets à autoriser,
au-delà de quelques grandes
orientations nationales (santé mentale,
structuration des soins primaires,
maladies chroniques, décloisonnement
de la prise en charge, personnes âgées
et handicapées, pertinence et qualité
des soins) . Les projets sont examinés
au fur et à mesure de leur dépôt,
sans vision globale ni comparative
entre eux .
Les expérimentations autorisées sont
variées en termes de taille, de délai, de
territoire de déploiement, de ressources
mobilisées, d’objet, d’organisation et de
financement ; certaines semblent se
faire concurrence ou sont redondantes .
À titre d’exemple, 16 expérimentations
portent sur les personnes âgées ; 11 sur
l’obésité ; 13 sur la santé mentale .
Le grand nombre d’expérimentations
conduites simultanément rend
l’exercice d’évaluation complexe .
La revue systématique et le tri des
projets n’ont pas encore été engagés
et la stratégie pour préparer la
généralisation de celles qui paraissent
pertinentes, dans le respect de la
maîtrise des dépenses d’assurance
maladie, tarde à être définie .
23
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Des réformes à poursuivre
Un processus de généralisation à organiser
Les travaux de généralisation devraient
être conduits sous l’autorité d’une
structure coordonnant l’action
du ministère chargé de la santé et
de la caisse nationale d’assurance
maladie (Cnam) . Les travaux à
engager concernent notamment les
systèmes d’information, l’évolution
des compétences et des métiers, la
formation et la coordination . Ils
auraient dû être engagés bien avant
l’échéance des expérimentations, ce qui
aurait raccourci la phase de préparation
d’entrée dans le droit commun .
Des orientations doivent être données
pour conduire les évolutions juridiques
et techniques nécessaires aux
généralisations .
12.
Limiter le flux d’entrée de
nouveaux projets, en s’assurant qu’ils
correspondent aux orientations
prioritaires ;
13.
Procéder à une analyse globale
de l’évaluation des expérimentations
relevant d’une même thématique et
des impacts qui en résulteraient sur
le système de santé et les dépenses
d’assurance maladie avant de décider
de leur généralisation ;
14.
Prévoir la généralisation anticipée
des expérimentations les plus
prometteuses et l’arrêt avant leur
terme de celles n’ayant pas répondu
aux attentes ;
15.
Identifier, dès la mise en
œuvre des expérimentations,
les conditions pratiques de leur
généralisation, notamment
en matière de compétences
attendues des professionnels de
santé ou d’évolution des systèmes
d’information de prise en charge des
patients et de facturation des soins ;
16.
Organiser la conduite des
chantiers de généralisation des
expérimentations dans un cadre
coordonné entre les services de l’État
et ceux de l’Assurance maladie .
Recommandations
(ministère de la santé et de la prévention)
2 - Les Samu et les Smur,
des évolutions en cours à poursuivre
La sollicitation accrue des Samu
pour des soins sans enjeu vital
En sept ans, depuis 2014, le nombre
d’appels reçus par les services
d’aide médicale d’urgence (Samu) a
augmenté de 22 %, notamment du
fait de la croissance des demandes
de soins non programmés relevant
de la médecine de ville et des besoins
de transports vers les établissements
hospitaliers pour des soins urgents mais
n’engageant pas le pronostic vital .
24
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Des réformes à poursuivre
Répartition des appels aux Samu
27,8 M d’appels décrochés
32,3 M d’appels reçus
30 M d’appels reçus une fois déduit
ceux raccrochés en moins de 15 secondes
14,2 M de dossiers
de régulation
médicale créés
8,9 M de dossiers
de régulation
de l’aide médicale
urgente (AMU)
5,3 M de dossiers
de régulation
médicale libérale
38 % des dossiers médicaux
de régulation
2,9 M de conseils
médicaux par l’AMU
20 % des dossiers
de régulation médicale
Environs 5,25 M
d’interventions des pompiers
ou d’ambulanciers privés
37 % des dossiers
de régulation médicale
750 000 sorties SMUR
5 % des dossiers
de régulation médicale
Sources : Cour des comptes à partir des données SAE, Cnam et statistiques du ministère
de l’intérieur, 2021
Des adaptations en cours
Une réforme des transports sanitaires
urgents est intervenue en 2022, qui
prévoit notamment une extension
des plages de garde et une meilleure
rémunération des ambulanciers
privés, pour un coût annuel d’au moins
107 M€, afin d’offrir aux patients une
garantie de transport sanitaire vers les
établissements de santé .
Les services d’accès aux soins (SAS),
qui associent les Samu et des médecins
25
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Des réformes à poursuivre
régulateurs libéraux, ont été créés
en 2021 pour éviter des sollicitations
inutiles des services d’urgence
hospitaliers pour des patients pouvant
être pris en charge en ville . Les
modalités de gouvernance des SAS
restent à encore à préciser ; un texte
règlementaire d’application de la loi
est toujours attendu . Le succès du
déploiement des SAS dépendra de la
montée en puissance de l’organisation
territoriale de la médecine de
ville, à travers les communautés
professionnelles territoriales de santé
(CPTS) .
D’autres adaptations à envisager
La sphère d’action des Samu et des
Smur est départementale . Compte
tenu de leur niveau d’activité variable,
le rapprochement de certains services
de régulation médicale pourrait être
envisagé . Le recours à des infirmiers,
lorsque cela est possible, pourrait
éviter une mobilisation inutile du
temps d’activité de médecins .
La sécurité et la qualité de la prise en
charge des demandes traitées par les
Samu demeure un enjeu important :
la fonction d’assistant de régulation
médicale, insuffisamment attractive,
souffre d’un manque de professionnels
formés ; les indicateurs de qualité
de service ont stagné depuis 2016,
voire ont légèrement régressé, malgré
l’engagement d’un plan national
« Qualité-Samu » fin 2018 .
Après l’échec du projet national
SI-Samu, la modernisation des outils
numériques dont disposent les Samu
à travers la mise en œuvre d’un projet
redimensionné est une priorité .
Enfin, un recueil de description
médicalisé de l’activité des SAS et des
Samu est nécessaire pour définir les
meilleures solutions de prise en charge
des patients sur un territoire donné .
Des financements en croissance forte
dont l’impact doit être évalué
Le coût des Samu-Smur est évalué à
1,2Md€ par an . Les Samu ont bénéficié
d’un rattrapage devenu indispensable,
avec une forte progression des crédits
alloués en 2020 et 2021 (+ 81 M€) .
Le financement des Smur (837 M€ en
2020) n’est plus identifié depuis 2021
mais conjoint avec celui des services
d’urgence depuis une réforme de 2021 .
Hors Smur, le coût total des dispositifs
concourant au fonctionnement des
Samu et des SAS aura, en projection,
augmenté de 46 % en 2022 par rapport
à 2016 et pourrait atteindre 965 M€ en
2023 (soit + 62 % par rapport à 2016) .
Les ARS doivent se mettre en
situation de mieux mesurer l’impact
de l’ensemble de ces financements
sur l’accès de la population aux soins
adéquats .
26
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Des réformes à poursuivre
17.
Adapter le maillage territorial des
plateformes de régulation médicale
(Samu) pour mettre en adéquation
leur niveau d’activité et les ressources
à mobiliser .
18.
Moduler davantage les types d’in-
tervention de l’aide médicale urgente
en fonction des besoins locaux, afin
d’utiliser à bon escient les ressources
médicales (Smur, transports infirmiers
inter-hospitaliers, équipe paramédica-
lisée de médecine d’urgence) .
19.
Piloter de manière effective le
déploiement des services d’accès aux
soins, afin d’évaluer leur effet sur la
pertinence des réponses aux demandes
de soins non programmés de ville .
20.
Renforcer le suivi du plan national
« Qualité Samu » et étendre aux
activités médicales de régulation le
champ de l’accréditation de la qualité
de la pratique professionnelle des
médecins et des équipes médicales .
21.
Respecter en 2024 le nouvel
objectif de déploiement de
systèmes d’information modernisés
de régulation médicale (17 Samu
équipés) .
22.
Organiser un recueil de
description médicale de l’activité des
services de régulation médicale et
d’accès aux soins, afin d’établir des
référentiels de prise en charge dans
un territoire .
Recommandations
(ministère de la santé et de la prévention)
3 - Les dépenses de congés
de maternité et de paternité :
des droits élargis, des progrès
de gestion nécessaires
Une dépense peu dynamique,
dans un contexte de recul de la natalité
Les caisses de sécurité sociale ont
versé près de 3,3 Md€ de prestations
pour les arrêts de maternité et
de paternité en 2021, dont 328
M€ d’indemnités journalières (IJ)
de paternité . Ces montants sont en
hausse de 9 % entre 2014 et 2021
(+ 18,8 % pour les seuls congés de
paternité) alors que dans le même
temps, la natalité a reculé de 10 % .
Cette évolution résulte de la hausse de
l’assiette des salaires qui sert au calcul
des IJ (+ 2 % par an sur la période)
et de l’augmentation de la durée des
congés (+ 3 jours) .
Des droits de plus en plus proches,
mais quelques disparités résiduelles
Les conditions d’ouverture des droits et
les modalités de calcul des prestations
pour les actives indépendantes
ou exploitantes agricoles se sont
rapprochées des règles en vigueur pour
les salariées . Cependant, des différences
subsistent, qui mériteraient d’être
supprimées, pour les durées des congés
d’adoption et des congés pathologiques .
Des différences dans l’usage du droit
à congé de maternité par les mères
Les mères salariées prennent un congé
dans la quasi-totalité des cas . Il en va
différemment pour les indépendantes et
les exploitantes agricoles : en 2021, seu-
lement six sur dix prenaient leur congé
de maternité . Les durées moyennes
de ces congés ne sont en outre pas les
mêmes selon les professions .
27
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Des réformes à poursuivre
Durée moyenne des congés de maternité pris
En jours
2014
2021
Progression
Salariées régime général
105
108 soit 15,4 semaines
3 %
Salariées agricoles
125
121 soit 17,3 semaines
-3 %
Exploitantes agricoles
91
91 soit 13,0 semaines
0 %
Indépendantes
73
98 soit 14,0 semaines
34 %
Source : Cour des comptes
Des droits à congé de paternité
plus longs mais diversement utilisés
Le congé de paternité a été instauré
par la loi de financement de la sécurité
sociale pour 2002 . Sa durée était alors
de onze jours, en complément des trois
jours du congé de naissance rémunérés
par l’employeur . Depuis 2021, sa durée
légale a été portée à 25 jours pour
une naissance unique, quel que soit
le régime d’affiliation du père (salarié
du régime général, indépendant ou
agriculteur) .
En 2021, les pères faisant usage de leur
droit à congé se sont arrêtés 22 jours
en moyenne (sur les 25 jours possibles) .
Cependant, selon une étude
4
portant
sur la période de 2010 à 2017, si 74 %
des pères ont, en moyenne, fait usage
de leur droit à congé de paternité, ils
ne sont que 33 % parmi les travailleurs
indépendants . Par ailleurs, les pères
salariés en CDI font davantage usage
de leur droit à congé de paternité
(87 %) que les salariés en contrat à
durée déterminée (65%) .
Des circuits de financement à clarifier
Depuis leur création, le congé de
maternité et le congé d’adoption sont
financés par la branche maladie, tandis
que le congé de paternité est financé
par la branche famille . Il n’y a pas de
justification claire à cette disparité . La
LFSS 2023 a prévu un transfert de la
branche famille à la branche maladie
correspondant à la couverture du
congé post-natal, pour environ 2 Md€ .
Il conviendrait d’achever le transfert
des dépenses à la branche famille, en
veillant à assurer son équilibre financier .
De longs délais de versement,
des risques de fraudes
En 2021, les délais de versement ont
été de 34,5 jours pour les indemnités
versées aux mères, 42,6 jours pour
celles versées aux employeurs en
remboursement de l’avance faite par
ces derniers aux salariés (subrogation) .
Sans attendre la généralisation de la
subrogation, la transmission aux caisses
de sécurité sociale des attestations
de salaire nécessaires au calcul des
indemnités devrait être fondée sur la
déclaration sociale nominative .
4 .
« Quels freins limitent encore le recours au congé paternité chez les jeunes pères »
, 2022, étude
sur la période 2010-2017, Céreq .
28
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Des réformes à poursuivre
Des zones de risque importantes
En cas de reprise anticipée du
travail non signalée par l’employeur,
le versement des indemnités est
interrompu à la date présumée de
la naissance et la poursuite des
versements est subordonnée à la
réception par la CPAM de l’acte
de naissance de l’enfant . Cette
vérification n’existe pas pour les
indépendantes, qui attestent sur
l’honneur leur interruption d’activité,
souplesse qui est source de fraudes
avérées .
Le non cumul des indemnités
journalières et d’autres prestations - de
Pôle emploi pour le chômage, ou de
la Cnam elle-même pour les pensions
d’invalidité - doit aussi faire l’objet
d’une vérification au cas par cas par
les caisses, à leur initiative . Le système
d’information ne fournit pas d’alerte .
Un suivi insuffisant, défavorable
à la prévention et au contrôle
des congés pathologiques.
Les dépenses de congés pathologiques
ne sont pas identifiées en tant que
telles, et les durées correspondantes
sont incluses dans les durées globales
observées pour les congés maternité .
Les médecins ne sont pas tenus de
préciser le motif des arrêts délivrés .
La Haute autorité de santé n’a pas
émis de recommandation relative à la
prescription du congé pathologique . Le
service médical de la Cnam n’analyse
pas non plus les motifs des arrêts .
Cette méconnaissance générale
des congés pathologiques est
regrettable . La disponibilité de
données permettrait de mieux
apprécier la santé des femmes actives
pendant et après leur grossesse, les
liens éventuels avec la prématurité
des nouveau-nés ou le handicap à la
naissance . Les liens avec le temps de
trajet quotidien ou avec les conditions
de travail par secteur d’activité
mériteraient d’être étudiés, dans une
perspective de prévention .
23.
Achever le transfert du
financement des congés de
maternité et de paternité vers
la branche famille en veillant à
préserver l’équilibre financier de la
branche
(ministère des solidarités,
de l’autonomie et des personnes
handicapées, Cnam, Cnaf)
;
24.
Développer des outils statistiques
de suivi de la santé des femmes
enceintes et du non recours au
congé de maternité
(ministère des
solidarités, de l’autonomie et des
personnes handicapées, Cnam, Cnaf)
;
Recommandations
29
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Des réformes à poursuivre
25.
Afin d’améliorer le suivi et de
réduire les délais de versement des
indemnités journalières, limiter à la
seule déclaration sociale nominative
l’information relative aux arrêts
de travail liés à la grossesse en
provenance des employeurs
(ministère
des solidarités, de l’autonomie et des
personnes handicapées, Cnam)
;
26.
Aligner la durée des droits relatifs
au congé d’adoption et au congé
pathologique des non-salariés sur
celle des salariés
(ministère des
solidarités, de l’autonomie et des
personnes handicapées)
4 - La lutte contre les fraudes
aux prestations sociales : une action
plus dynamique, à renforcer encore
En septembre 2020, la Cour des
comptes a formulé, dans une
communication adressée à la
commission des affaires sociales
du Sénat, une quinzaine de
recommandations pour lutter plus
efficacement contre la fraude aux
prestations sociales . La Cour a souhaité
examiner dans un délai rapide les
suites données à ses recommandations
et porter une appréciation actualisée
sur les actions visant à lutter contre les
fraudes, dans un contexte modifié par
de nouvelles dispositions introduites
par les LFSS, par des réorganisations
administratives et par les incidences de
la crise sanitaire .
Des mesures législatives nombreuses,
qui restent pour l’essentiel à appliquer
Les dernières lois de financement de
la sécurité sociale ont prévu diverses
mesures utiles, mais certains textes
d’application restent à publier et
certains chantiers informatiques
nécessaires à la mise en œuvre de ces
mesures à finaliser .
Une action administrative
mise en tension
En décembre 2020, les ministres
chargés de la santé, du travail et
des comptes publics ont confié au
directeur de la sécurité sociale une
feuille de route fixant cinq orientations
à la lutte contre la fraude sociale
5
Créée en juillet 2020, la mission
interministérielle de coordination
antifraude (Micaf) joue un rôle actif
d’impulsion et de coordination .
Des progrès encore insuffisants
d’évaluation du montant des fraudes
La Cnaf évalue périodiquement depuis
2010 de manière solide la fraude aux
prestations légales (2,8 Md€ en 2021) .
La Cnav estime les indus résultants
d’erreurs fautives, mais pas
spécifiquement la part de fraudes
intentionnelles qu’elles peuvent
comporter . Pour les bénéficiaires du
minimum vieillesse, qui est la principale
5 . L’établissement d’éléments de cartographie comprenant une estimation biennale des
montants ; la lutte contre les fraudes aux prestations commises par les assurés ; la lutte contre
les fraudes des professionnels de santé en ville et des établissements ; la lutte contre les fraudes
aux prélèvements sociaux ; le recouvrement des indus frauduleux .
30
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Des réformes à poursuivre
prestation pour laquelle les caisses
de retraite détectent des fraudes et
des fautes, la condition de résidence
effective en France, d’une durée de
six mois, est contrôlée à partir de la
détection d’anomalies éventuelles dans
les informations disponibles .
De son côté, la Cnam s’est fixée l’horizon
2024 pour achever les travaux d’évalua-
tion qu’elle a récemment engagés .
Ceux-ci ne couvrent pour l’instant que
27 % du total des prestations légales
versées par l’assurance maladie .
L’application d’une simple règle de trois
aux montants déjà estimés conduit
à un montant de fraudes de l’ordre
de 3,8 à 4,5 Md€ . Seule l’extension à
l’ensemble du champ des prestations
(hors forfaits aux professionnels de
santé et dotations aux établissements)
des travaux déjà engagés permettra de
disposer d’une estimation rigoureuse
des montants en jeu .
Des actions de contrôles
à renforcer substantiellement
Comparés aux estimations disponibles
de la fraude, les montants des fraudes
effectivement détectés par les
contrôles conduits par les caisses de
sécurité sociale sont modestes . Les
nouvelles conventions d’objectifs et de
gestion (COG) doivent impérativement
leur fixer des objectifs plus ambitieux .
Estimations disponibles des fraudes aux prestations
Montant
estimé
de fraudes
et de fautes
En % du
montant
des dépenses
concernées
Montant
détecté
de fraudes
et de fautes
% détecté du
montant estimé
de fraudes
et de fautes
CAF (2020)
2,5 à 3,2 Md€
3,1 à 4,0 %
0,3 Md€
11,0 %
C2S (2018)
177 M€
8,7 %
1,4 M€
0,8 %
Médecins généralistes
(2018 2019)
185 à 215 M€
3,1 à 3,5 %
3,7 M€ (2019)
4 M€ (2018)
1,7 à 2,2 %
Infirmiers (2018)
286 à 393 M€
5,0 à 6,9 %
17,8 M€
4,5 à 6,2 %
Masseurs-
Kinésithérapeutes
(2018 2019)
166 à 234 M€
5,2 à 6,7 %
7,9 M€ (2019)
11,3 M€ (2018)
1,8 à 2,8 %
Pharmaciens
(2018-2019)
91 à 105 M€
0,5 à 0,6 %
4,3 M€ (2019)
4,7 M€ (2018)
8,8 à 10,8 %
Transport de patients
(2018 2019)
145 à 177 M€
3,9 à 4,9 %
6,9 M€ (2019)
12,3 M€ (2018)
4,8 à 6,9%
Retraite (2020)
100 à 400 M€
0,1 à 0,3 %
19,7 M€
4,9 à 19,7 %
Source : Cour des comptes d’après les informations de la Cnaf (fraudes) de la Cnam (fraudes et
fautes), de la Cnav (fautes)
Des actions à mener de manière
prioritaire
L’assurance maladie doit notamment
s’attacher à mettre en échec les
surfacturations émanant des
professionnels et des établissements
de santé, en faisant évoluer ses
systèmes informatiques de gestion des
remboursements pour qu’ils puissent
31
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Des réformes à poursuivre
effectuer des contrôles automatiques
des factures qui lui sont présentées .
La dématérialisation des ordonnances
médicales permettra aussi d’éviter le
règlement indu de prestations non
conformes aux prescriptions .
Le recouvrement des indus constitue
aussi une priorité . L’assurance maladie
doit faire usage de la possibilité qui lui
a été ouverte par la LFSS 2023 d’ex-
trapoler, de manière contradictoire, à
l’ensemble de l’activité d’un profession-
nel, les indus constatés à l’occasion d’un
contrôle partiel . La branche famille
doit, quant à elle, faire évoluer ses
systèmes d’information pour recouvrer
les indus sur l’ensemble des périodes
non prescrites (cinq ans ou plus), au lieu
de deux ou trois ans aujourd’hui .
Des actions plus fermes et vigoureuses
doivent être menées par l’ensemble
des branches pour sanctionner les
auteurs des fraudes, notamment en
cas de récidive .
La Cour réitère ses recommandations
antérieures et en formule de surcroît
quatre nouvelles .
Recommandations
27.
Publier les textes réglementaires
permettant d’assurer une application
rapide et entière des dispositions
organiques et législatives parues
depuis 2020 qui concourent à lutter
plus efficacement contre la fraude
sociale
(ministère du travail, du plein
emploi et de l’insertion, ministère de
la santé et de la prévention, ministère
des solidarités, de l’autonomie et des
personnes handicapées, ministère
de l’économie, des finances et de
la souveraineté industrielle et
numérique,)
;
28.
Adapter les systèmes
d’information afin de constater et
mettre en recouvrement les indus
frauduleux sur l’ensemble des
périodes non prescrites selon les
règles de droit en vigueur
(ministère
du travail, du plein emploi et de
l’insertion, ministère de la santé et de
la prévention, ministère des solidarités,
de l’autonomie et des personnes
handicapées, Cnaf et Cnam)
;
29.
Dans le cadre du projet
METEORe de refonte de la chaîne
informatisée de règlement des frais
de santé, déployer des contrôles
automatisés permettant de bloquer
les règlements de l’ensemble des
facturations des professionnels et
des établissements de santé qui
présentent un caractère irrégulier au
regard des nomenclatures tarifaires
en vigueur
(ministère de la santé et de
la prévention, Cnam)
;
30.
Afin de réduire notablement
les fraudes non détectées, porter
dès 2024 le nombre de contrôles a
posteriori à un niveau plus élevé que
celui de 2019, antérieur à la crise
sanitaire
(ministère du travail, du plein
emploi et de l’insertion, ministère de
la santé et de la prévention, ministre
des solidarités, de l’autonomie et des
personnes handicapées, ministère
de l’économie, des finances et de
la souveraineté industrielle et
numérique, Cnaf, Cnam et Cnav).
32
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
33
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Des évolutions
nécessaires
3
La Cour s’est intéressée à quatre
domaines qui n’ont pas fait l’objet de
réformes ou mesures récentes dans
le cadre des lois de financement de
sécurité sociale .
Les enquêtes conduites mettent
en évidence la nécessité de mieux
prendre en compte des enjeux variés,
qu’il s’agisse des conditions à réunir
pour rendre plus efficaces les actions
de l’assurance maladie portant sur la
pertinence des actes et prescriptions
médicales (chapitre VIII), des écarts de
pensions de retraite entre les femmes
et les hommes (chapitre IX), de la
gestion du régime de sécurité sociale
du secteur maritime (chapitre X) ou
de celle des litiges entre les assurés
et les organismes de sécurité sociale
(chapitre XI) .
1 - La maîtrise médicalisée
des dépenses de santé :
une régulation inaboutie
Au tournant des années 90 et 2000, il
est apparu que le respect des objectifs
d’évolution des dépenses maladie
nécessitait d’agir sur les pratiques
médicales afin de favoriser à la fois
l’utilisation, à efficacité égale, des
techniques les moins coûteuses et la
réduction du nombre des actes réalisés
et des produits dispensés inutilement .
La maîtrise médicalisée participe à la
gestion du risque, au côté de la lutte
contre la fraude et de la prévention .
Elle a aussi pour but la pertinence de
la dépense, en recherchant à éviter un
recours inutile aux soins .
34
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Des évolutions nécessaires
Gestion du risque, maîtrise médicalisée et pertinence des soins
GESTION DU RISQUE
RÉGULATION PERTINENCE
MAÎTRISE MÉDICALISÉE
Prévention
Lutte contre la fraude
Actions contre le sur-recours
Action contre le sous-recours
-
Prescriptions de produits
de santé inadaptée :
indication (dont une partie
du hors AMM), posologie, durée
-
Prescription injustifiée
de transports sanitaires
-
Prescriptions injustifiées
des indemnités journalières
-
Actes dangereux,
redondants, inutiles
-
Accès à un professionnel
de santé
-
Accès à l’innovation rapide
-
Lutte contre le renoncement
au soin
-
Lutte contre les inégalités
sociales de santé
Pertinence des soins
Maîtrise médicalisée
Gestion du risque
(champ d’application du programme Rénov’Gdr de la Cnam)
Source : Cour des comptes
Un champ d’application étroit
La maîtrise médicalisée a concerné
jusqu’ici un champ d’application
étroit, réduit pour l’essentiel aux
médicaments, soit pour en limiter
la prescription lorsqu’elle est peu
justifiée, soit pour favoriser leur
fourniture sous la forme plus
économique de génériques ou
de biosimilaires (équivalent des
génériques pour les médicaments
biologiques) . Elle ne s’est appliquée
qu’aux dépenses de « soins de
ville » de l’Ondam, c’est-à-dire aux
prescriptions émises par les médecins
généralistes, par les spécialistes et
les dentistes, ainsi qu’à celles, de plus
en plus nombreuses, formulées à
l’hôpital mais exécutées en ville .
Les actions de maîtrise médicalisées
se matérialisent, pour l’essentiel, par
de l’information (courriers) et par des
visites de délégués de l’assurance-
maladie et de médecins conseils
auprès des professionnels de santé,
afin de les inciter à améliorer leurs
pratiques . Elles ne visent pas à
sanctionner les professionnels ou les
patients, contrairement, par exemple,
à la lutte contre la fraude .
35
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Des évolutions nécessaires
Des objectifs d’économies peu
documentés, des résultats mal étayés
Alors que l’organisation de coopération
et de développement économiques
(OCDE) a pu estimer que
« près d’un
cinquième des dépenses de santé
apportent une contribution nulle, ou
très limitée, à l’amélioration de l’état de
santé de la population
6
»,
un objectif
d’économies annuelles compris entre
700 M€ et 800 M€ est demandé à
l’assurance maladie . Cet objectif
apparaît limité, au regard du ratio
précité, qui conduirait à 12 à 18 Md€
des prescriptions, de toute nature,
effectuées par les médecins de ville .
Le rendement financier des actions
conduites fait l’objet d’évaluations
selon des méthodologies discutables :
le chiffrage des économies envisagées
ne repose pas sur une simulation ou
sur une prospective argumentée des
effets des actions prévues, lesquelles
ne sont pas détaillées . Le montant
indiqué repose essentiellement sur
une reconduction de l’objectif affiché
l’année précédente . La maîtrise
médicalisée s’exprime ainsi comme
un objectif macro-économique, au
fondement flou, censé sécuriser
l’Ondam . L’assurance maladie produit,
chaque année, un tableau affichant le
montant des économies considérées
comme réalisées grâce à la maîtrise
médicalisée, détaillées par type de
dépense . Les montants d’économies
présentés
7
doivent cependant être lus
avec réserve .
Une mesure des résultats peu convaincante
Selon l’annexe n° 1 du PLFSS les
économies imputables à la maîtrise
médicalisée des dépenses de santé
résultent de la différence entre
« le
montant tendanciel »,
c’est-à-dire le
« montant qui aurait été réalisé sans
intervention de l’assurance maladie »,
et
« le montant observé des dépenses
d’assurance maladie »
Or, aucun
élément précis n’est communiqué
à l’appui des chiffres pour expliquer
comment le « tendanciel » est estimé,
et comment est évaluée la part des
économies imputable aux actions de
maîtrise médicalisée .
De plus, les économies réalisées sont
généralement inférieures à celles
annoncées dans le PLFSS initial .
Le calcul du niveau tendanciel des
dépenses est aussi sujet à caution .
Enfin, la présentation des économies
tend à les attribuer en totalité à la
maîtrise médicalisée alors qu’elles
peuvent résulter de multiples
facteurs autres que la rationalisation
des pratiques : démographie,
épidémiologie, innovations
techniques .
6 .
« Lutter contre le gaspillage dans les systèmes de santé »,
OCDE, 2017 .
7 . De 376 à 708 M€, selon les années entre 2015 et 2019 .
36
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Des évolutions nécessaires
L’impact de la maîtrise médicalisée
apparaît limité, au regard des
comparaisons internationales qui
situent la France en mauvaise place
par rapport à ces voisins européens :
malgré trente années de mise en
œuvre, avec une consommation de
médicaments par habitant et par
an dans la moyenne des pays de
l’OCDE (589 $ en 2021), la France
reste éloignée des pays les moins
dispendieux (301 $ pour le Danemark,
419 $ pour les Pays-Bas), soit une
différence de l’ordre de 11 à 19 Md€ .
La consommation de médicaments, des résultats encore insuffisants
Les génériques représentent,
dans le total des prescriptions
de médicaments (dans et hors
répertoire), en France, 38 % du
marché en volume (920 millions de
boîtes) et 19 % en valeur (3,615 Md€),
contre une moyenne européenne de
60 % en volume (80 % en Allemagne) .
S’agissant des prescriptions
médicamenteuses chez le sujet âgé
polypathologique, l’étude
REview of
potentially inappropriate MEDIcation
pr[e]scribing in Seniors
(REMEDI[e S),
réalisée en 2021, a constaté que
657 M€ de prescriptions étaient
inappropriées (médicament non
indiqué au regard du diagnostic, voire
dangereux ; dose trop forte ; durée trop
longue ; duplication médicamenteuse),
dont 507 M€ ont été remboursés par
l’assurance maladie et auraient donc
pu être économisés .
Au-delà des ajustements récemment
mis en œuvre par la Cnam à travers
son programme
« Rénov’GDR »,
un nouvel élan doit être donné aux
politiques de recherche d’efficience des
pratiques médicales . Cela suppose de
concevoir et de mettre en œuvre avec
résolution les outils qui font défaut
ou sont insuffisamment développés
aujourd’hui, principalement les
référentiels de pratique à l’attention
des professionnels de santé, ainsi que
la codification des diagnostics et des
prescriptions sous la forme de données
structurées pour en permettre des
exploitations numériques, tant par
les médecins prescripteurs que par
l’assurance maladie pour la conception
et la mise en œuvre de ses actions de
maîtrise .
Recommandations
31.
Justifier les économies attendues
au titre des actions de maîtrise
médicalisée inscrites dans le projet
de loi de financement de la sécurité
sociale, en précisant les déterminants
de la dépense (prix et volume)
retenus pour fixer les objectifs
d’économie, et détailler le mode de
calcul des résultats pour le dernier
exercice connu
(ministère de la santé
et de la prévention, Cnam)
;
37
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Des évolutions nécessaires
32.
Enrichir les données médicales
et de vie du patient et les organiser
en vue de leur consolidation au
niveau national, afin d’améliorer les
actions de maîtrise médicalisée et
leur évaluation
(ministère de la santé
et de la prévention, Cnam)
;
33.
Rendre obligatoire l’utilisation
de la prescription électronique,
notamment pour les médicaments
et les dispositifs médicaux, ainsi que
la mention des indications médicales
justifiant ces prescriptions
(ministère
de la santé et de la prévention,
Cnam)
;
34.
Faire appliquer plus
rigoureusement l’obligation pour
le prescripteur de mentionner sur
les ordonnances l’utilisation des
médicaments en dehors du champ
prévu par leur autorisation de mise
sur le marché (« hors-AMM ») et
encadrer plus précisément cette
utilisation (durée, posologie…)
(ministère de la santé et de la
prévention, Cnam, ANSM, HAS)
2 - Les retraites des femmes :
une réduction des écarts avec celles
des hommes à poursuivre
Des écarts de pension persistants
Alors que la loi a fixé au système de
retraite par répartition des objectifs de
solidarité, notamment celui d’assurer
l’égalité entre les femmes et les
hommes, les pensions de droit direct
perçues par les femmes étaient, en
2020, inférieures de 40 % à celles des
hommes (respectivement 1 154 et
1 931 €) . L’importance des écarts de
pension s’est cependant réduite durant
les dernières décennies .
Évolution des écarts de pension de droit direct
entre les femmes et les hommes, par génération
60
50
40
30
20
10
1930
1932
1934
1936
1938
1940
1942
1944
1946
1947
1948
1949
1950
Pension de droit direct en « équivalent carrière complète »
Pension de droit direct
En %
Lecture : la pension de droit direct des femmes née en 1930 est en moyenne inférieure de
54 % à celle des hommes. Cet écart est de 42 % en «équivalent carrière complète» c’est-
à-dire dans l’hypothèse où la durée validée dans le régime correspond à la durée requise
pour le taux plein.
Champ : retraités résidant en France ayant perçu une pension de droit direct.
Source : Drees
38
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Des évolutions nécessaires
Des causes diverses
Cette situation s’explique principalement
par le fait que les montants des pensions
sont directement en relation avec les
durées d’activité professionnelle et les
revenus tirés de ces activités . Or, malgré
des progrès notables, il y a moins de
femmes que d’hommes en activité ;
celles qui le sont ont trois fois plus
souvent que les hommes un emploi à
temps partiel et les salaires horaires
des femmes restent inférieurs à ceux
des hommes .
Des taux d’activité en hausse, des écarts de salaire persistants
La part des femmes en emploi ou au
chômage a augmenté de 30 points
depuis 1975, pour atteindre, en
2020, 67,6 % contre 74,5 % pour
les hommes . Parmi celles-ci, 27,4 %
sont à temps partiel contre 8,4 % des
hommes .
L’écart de salaire moyen entre
les femmes et les hommes s’est
légèrement réduit en 25 ans, passant
de 27,4 % en 1995 à 22,3 % en 2019 .
Il reflète à la fois, pour près des
trois-quarts, des écarts de salaire
horaire et, pour le reste, des écarts
de nombre d’heures de travail dans
l’année du fait d’une activité plus
souvent à temps partiel .
À ces causes principales, s’ajoutent les
effets de règles générales de calcul du
montant de la pension, dont certaines
ont évolué à l’occasion des réformes
des retraites intervenues depuis 1993 .
Ainsi la décote, qui s’applique lorsque
l’assuré n’a pas l’ensemble des
trimestres requis pour bénéficier
d’une pension à taux plein, pénalise
particulièrement les femmes, dont les
carrières sont plus souvent incomplètes,
sauf à ce qu’elles repoussent l’âge
de leur départ à la retraite . Grâce à
la progression du taux d’emploi des
femmes, l’écart entre les âges moyens
de départ à la retraite des femmes nées
en 1950 (60,9 ans) et des hommes
nés la même année (60,1 ans), s’est
cependant réduit de moitié par rapport
à la génération née 20 ans plus tôt .
Par ailleurs, deux règles introduites
en 1993, utilisées depuis pour le
calcul des droits à retraite, à savoir
les 25 meilleures années de salaire
et l’indexation de ces salaires
sur l’inflation, sont, en pratique,
défavorables aux assurés dont les
carrières sont courtes et les salaires
bas, ce qui est le cas de la majorité
des femmes . En revanche, les reports
de l’âge légal de départ et de l’âge de
suppression de la décote résultant
de la réforme de 2010 ainsi que
l’allongement de la durée d’assurance
requise pour un départ à taux plein
résultant de la réforme de 2014 aurait,
39
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Des évolutions nécessaires
selon une étude
8
, contribué à réduire
les écarts des montants de pension,
cumulés sur la durée de perception,
entre les femmes et les hommes, d’un
point pour la génération 1960 à un peu
plus de trois points pour la génération
1980, au prix pour les femmes d’un
report de l’âge moyen de leur départ
à la retraite .
Des dispositifs de solidarité et de
réversion réduisent les écarts de
pension entre les hommes et les
femmes
Les dispositifs de solidarité du
système de retraite accordent des
droits, qui s’ajoutent à ceux liés aux
périodes d’emploi et qui ne sont pas la
contrepartie de cotisations versées par
leurs bénéficiaires . Les dispositifs de
réversion s’en distinguent au sens où
ils peuvent être considérés comme une
contrepartie des cotisations versées
par le couple .
Les dispositifs de solidarité ont un
effet important de réduction de l’écart
de pensions entre les femmes et
les hommes . Sans les dispositifs de
solidarité, la pension moyenne de droit
direct des femmes aurait été inférieure
de 50 % à celle des hommes, et non de
42 % comme constaté par une étude
en 2016 . L’écart (près de 11 points)
favorable aux femmes du poids de ces
dispositifs dans les pensions de droit
direct (cf . tableau ci-après) résulte
principalement des droits familiaux de
retraite (écart de 10 points) .
Près de 90 % des bénéficiaires des
pensions de réversion sont des
femmes, compte tenu des écarts
d’espérance de vie et d’âge au sein
des couples . En 2020, les pensions
de réversion réduisent l’écart de
pension moyenne entre les femmes
et les hommes, qui passe de 40 %
pour les droits directs à 28 % après
prise en compte des réversions . Pour
celles qui en bénéficient, soit un tiers
des femmes retraitées, la réversion
représente en moyenne environ la
moitié de la pension totale .
8 . « Les réformes des retraites de 2010 à 2015 : une analyse détaillée de l’impact pour les affiliés
et pour les régimes », Les dossiers de la Drees n° 9, décembre 2016 .
Part des dispositifs de solidarité dans le total des pensions de droit direct
tous régimes en 2016
En % du total des pensions de droit direct
Femmes
Hommes
Droits familiaux de retraite
13,2 %
3,2 %
Minima de pension
6,2 %
1,1 %
Périodes assimilées
(chômage, maladie, maternité, invalidité)
4,7 %
5,3 %
Départs anticipés pour carrière longue
1,7 %
2,6 %
Autres
3,3 %
6,1 %
Total des dispositifs de solidarité
29,1 %
18,3 %
Source : Cour des comptes à partir des données de la Drees
40
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Des évolutions nécessaires
Des dispositifs coûteux
à l’efficacité perfectible
Les droits familiaux de retraite (plus
de 20 Md€ en 2021) et les dispositifs
de réversion (36 Md€) sont coûteux
(18 % du coût total des prestations de
retraite) et imparfaitement efficaces .
Les droits familiaux
9
compensent
mal l’incidence des enfants sur la
carrière des mères : ils attribuent trop
de trimestres de retraite par rapport
aux réductions d’activité, alors qu’ils
compensent peu les pertes de salaire
associées . Ces droits mériteraient en
conséquence d’être, à coûts constants,
aménagés au profit de majorations de
pension et simplifiés, dans l’objectif
d’une meilleure harmonisation entre
les régimes de retraite .
Par ailleurs, les dispositifs de réversion
sont très disparates selon les régimes .
Ils ne permettent pas de préserver
le niveau de vie des femmes dont les
pensions de droit direct sont les plus
faibles . La prévalence croissante des
divorces invite également à revoir le
principe actuel de la proratisation de
la pension de réversion en présence
de plusieurs conjoints, qui pose des
questions d’équité entre les divorcées
dont l’ex-mari s’est remarié et qui ne
bénéficieront que d’une part de la
réversion, et celles dont l’ex-mari ne
s’est pas remarié et qui en percevront
l’intégralité dans la plupart des régimes .
9 . Cour des comptes,
« Les droits familiaux de retraite : des dispositifs à simplifier et à harmoniser »,
in La Sécurité sociale - rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale,
chapitre VII, octobre 2022 .
3 - Le régime de sécurité sociale des marins, une normalisation indispensable
Les ressortissants du régime spécial des marins
Au titre de leur activité professionnelle,
34 000 actifs sont affiliés à l’Énim .
La branche maladie du régime
compte environ 90 000 affiliés, dont
70 000 assurés de droit direct et 20 000
ayants droit . La branche vieillesse du
régime spécial verse des pensions à
environ 65 000 retraités de droit
direct (90 % bénéficient également de
pensions versées par d’autres régimes
de retraite au titre d’autres activités
professionnelles durant leur carrière) .
Un financement en provenance
pour l’essentiel de l’État
et de l’assurance maladie
Parmi les régimes de sécurité sociale
comptant un nombre significatif d’actifs, il
est le plus subventionné : le finan
cement
du régime procède essentiellement
du budget de l’État pour ses dépenses
de retraite (997 M€ en 2021) et de
l’assurance maladie pour celles de
son régime de prévoyance (420 M€) .
Les cotisations sociales acquittées par
ses cotisants et leurs employeurs ne
constituent que 10 % de ses recettes .
41
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Des évolutions nécessaires
Une réglementation spécifique
et complexe
Les cotisations sociales ne sont pas
assises sur les salaires réels mais sur des
salaires forfaitaires . Les montants des
salaires forfaitaires sont très inférieurs
aux rémunérations réelles dans le
secteur maritime . Pour le secteur du
commerce, les rémunérations réelles
sont de l’ordre de 650 M€ en 2021, soit
un montant 2,5 fois plus élevé que celui
de l’assiette forfaitaire pour ce secteur
(253 M€) . Pour le secteur de la pêche, les
rémunérations brutes sont également
supérieures à l’assiette forfaitaire .
Un dispositif de classement obsolète
Les salaires forfaitaires sont
répartis en vingt catégories, elles-
mêmes déterminées par référence
à 280 fonctions à bord, dont la liste
a été fixée par un décret de 1952 .
Chaque marin doit être rattaché à
une catégorie, et sa fonction à bord
précisée à chaque embarquement,
dont dépendent le niveau de ses
cotisations et ses droits à prestation
acquis au titre du régime . En pratique,
les cinq principales fonctions
regroupent près de 40 % de l’effectif
affilié à l’Énim ; 166 fonctions
comptent moins de 200 marins et
79 fonctions n’en comptent aucun .
Certaines fonctions n’existent plus,
mais figurent toujours dans la grille
réglementaire figée depuis l’origine ;
d’autres, apparues depuis, ne sont
pas prévues . Les nouvelles exigences
internationales de qualification pour le
renouvellement des brevets maritimes
n’ont pas été prises en compte .
Un régime de retraite hors normes, des
prestations maladies en partie alignées
sur celles versées par le régime général
Le rendement technique effectif du
régime de retraite peut avoisiner 30 %,
ce qui revient à ce que le bénéficiaire
récupère la totalité des cotisations
versées au cours de sa vie active en
seulement trois ans de service de sa
pension .
Des règles de calcul des retraites très dérogatoires
La pension du régime peut être
versée dès 50 ans à partir d’une
durée d’affiliation de 25 ans, quelles
que soient les secteurs d’activité, les
fonctions exercées et les types de
navire ou de navigation . La moitié des
pensions servies par l’Énim sont des
pensions dites « spéciales » liquidées
à partie de 55 ans pour une durée
d’affiliation courte (entre 3 mois et
15 ans pour une durée médiane de
3,5 ans) . Avant 1987, date à laquelle
la durée minimale pour en bénéficier
a été abaissée de 5 ans à 3 mois, ces
pensions étaient dans leur majorité
calculées selon les règles du régime
général et non selon les règles du
régime spécial . Enfin, 26 % des
dépenses de pension de l’Énim sont
imputables aux pensions de réversion,
42
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Des évolutions nécessaires
contre 11 % en moyenne pour
l’ensemble des régimes de retraite . Ce
coût important découle du fait que
les assurés sont en immense majorité
des hommes, qui ouvrent droit à leur
femme à leur décès, mais aussi du fait
que la réversion n’est soumise à aucune
condition d’âge ni de ressources,
contrairement aux autres régimes de
retraite dans le secteur privé .
Les remboursements des frais de
soins sont identiques à ceux versés
aux salariés par le régime général . En
revanche, les indemnités journalières
d’arrêt de travail obéissent à des
règles complexes et sont globalement
défavorables en matière de montant
perçu et de délai de liquidation (jusqu’à
20 jours de plus qu’au régime général) .
En dépit d’un taux d’accidentalité élevé,
le secteur maritime n’est pas couvert
par un régime d’accident du travail
responsabilisant les employeurs .
L’exactitude des cotisations
recouvrées et des prestations perçues
devenue structurellement incertaine
La gestion du régime a été
profondément déstabilisée par trois
réformes récentes, relatives pour la
première aux règles de la circulation
maritime, pour la deuxième au
transfert du recouvrement des
cotisations dues à l’Énim a été
transféré à l’Urssaf Poitou-Charentes
au 1
er
janvier 2020 et pour la
troisième à l’utilisation du système de
déclaration sociale nominative (DSN) .
Il s’en est suivi que les paramètres,
souvent désuets, nécessaires au calcul
des cotisations et des prestations
en espèces servies par le régime ne
peuvent plus être collectés dans des
conditions en garantissant l’exactitude .
En effet, les « lignes de service »
qui contenaient les informations
nécessaires au calcul des salaires
forfaitaires et taux de cotisations
applicables ne sont plus saisis
ni contrôlés par les services des
affaires maritimes depuis 2017 . Les
employeurs ont de leurs côtés la plus
grande difficulté à transmettre ces
éléments à travers les déclarations
sociales nominatives . Les contrôles des
déclarations des employeurs et des
indépendants du secteur maritime ne
sont désormais plus exercés .
43
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Des évolutions nécessaires
Suppression du contrôle des rôles d’équipage
Source : Cour des comptes
Rédige
Affaires
maritimes
Contrôlent les données
Déclaration employeur
Rôle d’équipage
remis avant embarquement
Avant 2017
Affaires
maritimes
Contrôlent les données
Employeur
Après 2017
Un contrôle des déclarations de salaires devenu impossible
Le contrôle des déclarations dans
le secteur maritime est une tâche
extrêmement complexe qui nécessite
la vérification de 27 points différents
(sur les caractéristiques du marin, de
l’employeur et du navire) .
Cependant, l’organisation des
flux de données issus de la DSN
entre l’Urssaf et l’Énim a abouti
à cloisonner les informations
auxquelles chacun a accès et
ne permet pas un contrôle des
déclarations individuelles .
Une réforme en profondeur
indispensable
Une réforme en profondeur du régime
de sécurité sociale des marins est
désormais inéluctable . Elle devra
concilier la prise en compte de la
situation économique différenciée des
différents secteurs qui composent le
monde maritime et d’enjeux multiples,
qu’il s’agisse de la préservation des
droits déjà constitués, de l’équité
par rapport à l’ensemble des assurés
sociaux, de la pénibilité et de la
dangerosité de certains des métiers
maritimes . La Cour formule à cet effet
une série de recommandations .
44
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Des évolutions nécessaires
35.
Refonder l’assiette des cotisations
et l’acquisition de droits aux
prestations de sécurité sociale des
marins sur la base du revenu brut
en préservant les droits à retraite
antérieurement constitués dans le
régime spécial sur la base des salaires
forfaitaires ;
36.
Restaurer la durée de cinq ans
d’affiliation en-dessous de laquelle
les marins ne sont pas éligibles
à la pension spéciale et introduire
des conditions d’âge minimum et
de ressources pour le bénéfice de la
pension de réversion ;
37.
Affilier les marins à la branche
maladie du régime général en
commençant par les prestations
en nature et en poursuivant par les
prestations en espèces et la couverture
des accidents du travail et des maladies
professionnelles pour les actifs ;
38.
Appliquer un seul taux de
cotisation patronale à tous les
employeurs maritimes et prévoir un
dispositif simplifié de réduction ou
d’exonération de charges modulable
uniquement en fonction des
contraintes économiques propres à
chaque secteur maritime .
Recommandations
(ministère du travail, du plein emploi
et de l’insertion, ministère de la santé et de la prévention, secrétariat
d’État auprès de la Première ministre, chargé de la mer)
4 - Les litiges des particuliers et des
entreprises avec les organismes du
régime général de sécurité sociale :
des progrès à amplifier
La loi du 18 novembre 2016 de
modernisation de la justice du
XX
e
siècle a réformé en profondeur
l’organisation du traitement des
contentieux entre les particuliers et les
organismes de sécurité sociale, confié
désormais aux juridictions ordinaires
de l’ordre judiciaire ou administratif .
Une simplification des voies de recours
Le tribunal des affaires sociales
(TASS) et le tribunal du contentieux
de l’incapacité (TCI) ont été
supprimé . C’est désormais le tribunal
judiciaire (TJ) qui traite l’ensemble
quasi complet
10
des contentieux de
la sécurité sociale au sein d’un pôle
social, créé à cet effet . S’agissant des
contentieux relatifs aux allocations
financées par l’État, les commissions
départementales d’aide sociale ont été
également supprimées, les tribunaux
administratifs traitant désormais
du contentieux de l’aide médicale
de l’État, au côté du contentieux du
RSA, de la prime d’activité et de l’aide
personnelle au logement qu’ils avaient
déjà en charge .
10 . Le contentieux de la tarification AT-MP est géré, en premier instance, par la cour d’appel d’Amiens .
45
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Des évolutions nécessaires
Ce progrès concerne en particulier
les risques professionnels : avant la
réforme, le Tass jugeait l’étendue
des séquelles, leur imputabilité
à un accident du travail ou à une
maladie professionnelle et la date
de consolidation de l’état de santé
du salarié
11
, tandis que le TCI était
compétent pour le taux d’incapacité .
Il était fréquent que le TCI doive
surseoir dans l’attente du jugement
du Tass ou que la Cour nationale de
l’incapacité et de la tarification de
l’assurance des accidents du travail
(Cnitaat) soit saisie d’un appel
contre le jugement du TCI sur le
taux d’incapacité, tandis qu’une cour
d’appel l’était contre celui du Tass
sur l’imputation de l’accident ou de la
maladie à l’employeur .
Le transfert du contentieux de la
sécurité sociale à des juridictions
judiciaires apporte aussi des éléments
de solidité au traitement contentieux
des litiges : indépendance par rapport
à l’administration de la sécurité sociale,
présidence des juridictions par un
magistrat professionnel, normalisation
du financement et des emplois qui
dépendent désormais du budget du
ministère de la justice .
Une réorganisation inachevée
À la suite de la réforme de 2016,
juge judiciaire et juge administratif
restent compétents selon des règles
peu compréhensibles pour l’usager .
L’attribution au juge judiciaire de
l’ensemble des contentieux dits de
l’aide sociale traités par le juge
administratif simplifierait l’accès à la
justice pour les requérants .
11 . La date de consolidation correspond au moment à partir duquel l’état d’un patient est
considéré comme stabilisé .
Une simplification à parachever
Les allocataires des Caf doivent
saisir à la fois le juge judiciaire et le
juge administratif s’ils contestent la
réalité de situations (notamment la
composition et les ressources du foyer)
qui affectent à la fois les prestations
familiales de sécurité sociale, dont
les litiges relèvent des tribunaux
judiciaires, et celles versées pour le
compte de l’État ou des départements,
qui, sauf exception (allocation pour
adulte handicapé), relèvent des
tribunaux administratifs (RSA, prime
d’activité et aides au logement) .
Les tribunaux administratifs traitent
les contestations relatives au rejet
par les caisses d’assurance maladie
des demandes d’attribution de l’aide
médicale de l’État, financée par l’État .
Pourtant, ces demandes sont instruites
dans les mêmes conditions que les
demandes d’attribution de l’assurance
maladie obligatoire de base et de la
complémentaire santé solidaire .
En matière de handicap, les
contestations visant les décisions
des Caf des conseils départementaux
46
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Des évolutions nécessaires
et des commissions des droits et
de l’autonomie des personnes
handicapées sont réparties entre
les ordres judiciaire et administratif
de manière très peu lisible pour les
requérants .
La procédure devant les TJ et les
cours d’appel est orale . L’oralité
peut desservir les requérants, faute
d’argumentaires suffisamment établis .
Si les entreprises recourent souvent
à des conseils juridiques, cela est plus
rare pour les particuliers, malgré la
fragilité de leur état de santé ou leur
situation sociale . Comme c’est le cas
pour les contentieux prud’hommaux
depuis 2016, l’instauration, au stade
de l’appel, d’une procédure écrite
avec représentation obligatoire par
une personne qualifiée améliorerait
l’argumentaire des requérants .
Des performances encore insuffisantes
Malgré une augmentation de plus de
42 % du nombre de magistrats en
activité affectés au contentieux de
sécurité sociale, les délais de jugement
en première instance se sont accrus
(24,1 mois en 2021 contre 17,6 mois
en 2019) . En appel, les délais moyens
de traitement sont passés de 17,9 mois
en 2019 à 21,4 mois en 2020 et à
23 mois en 2021 (contre 19 mois en
2017 et 20,5 mois en 2018 pour les
cours d’appel et la Cnitaat) .
Une organisation précontentieuse
perfectible
Avant de saisir le juge judiciaire, les
cotisants et les bénéficiaires des
prestations doivent dans tous les cas
porter leurs contestations par écrit
devant des commissions de recours
amiable (CRA) . Ces commissions
sont composées d’administrateurs
(conseillers pour les CPAM) des
caisses locales du régime général .
Elles doivent être saisies dans un
délai de deux mois suivant la décision
contestée . Leurs décisions, le plus
souvent défavorables aux requérants,
s’imposent aux organismes .
Une simplification nécessaire pour le précontentieux du recouvrement
des cotisations dues par les travailleurs indépendants
Les recours des employeurs au titre des
cotisations et contributions sociales
sont examinés par des instances
départementales d’instruction des
recours amiables (Idira), composées
au sein des conseils départementaux
des Urssaf . Sauf exception, les CRA
des Urssaf, de ressort régional,
suivent les propositions des Idira . Les
redéploiements de comptes cotisants
entre les sites départementaux des
Urssaf régionales et entre les Urssaf
rendent de moins en moins pertinent
l’échelon départemental d’examen
des recours . Les Idira pourraient être
supprimées en contrepartie d’un
élargissement de la composition des
CRA à des membres des conseils
départementaux concernés par les
dossiers .
47
Synthèse du rapport sécurité sociale 2023
Des évolutions nécessaires
La loi du 10 août 2018 pour un État
au service d’une société de confiance
(« Essoc ») a rendu obligatoire la présence
de médiateurs dans les organismes
de sécurité sociale, qui peuvent être
sollicités librement par les usagers . Les
médiateurs formulent des avis valant
recommandations en toute impartialité,
sans recevoir aucune instruction des
organismes de sécurité sociale . Ils
font œuvre de pédagogie auprès des
requérants et recherchent des solutions
acceptables dans le cadre d’échanges
avec les requérants et les services des
organismes . Sans méconnaître les règles
de droit, ils prennent en compte des
considérations d’équité .
Les caisses du régime général de
sécurité sociale auraient avantage
à privilégier la médiation comme
mode de résolution des contestations,
au regard des avantages qu’elle
présente pour la qualité du service
rendu aux requérants . À cet effet,
il conviendrait notamment que les
organismes du régime général
de sécurité sociale mentionnent
expressément et systématiquement,
dans les notifications de décisions
défavorables aux usagers, la possibilité
pour ces derniers, non seulement de
saisir la CRA comme c’est déjà le cas
aujourd’hui, mais aussi celle de saisir le
médiateur .
39.
Effectuer une étude d’impact
détaillée d’un transfert du juge
administratif au juge judiciaire des
contentieux dits de l’aide sociale,
destiné à faciliter pour les particuliers
l’accès à la justice
(ministère de la
justice) ;
40.
Instaurer une représentation
obligatoire des requérants,
particuliers et entreprises, par un
avocat ou une association de leur
choix devant les chambres sociales
des cours d’appel qui traitent des
contentieux de la sécurité sociale
(ministère de la justice) ;
41.
Accroître la place de la médiation
dans la résolution des contestations
à l’encontre des décisions des
organismes du régime général,
en intégrant progressivement à
l’ensemble des notifications de
décisions défavorables la mention
de la possibilité de saisir le médiateur
(ministère du travail, du plein emploi
et de l’insertion, ministère de la
santé et de la prévention, ministère
des solidarités, de l’autonomie et des
personnes handicapées, Acoss, Cnaf,
Cnam, Cnav) ;
42.
Accélérer les délais de traitement
des recours par les commissions
de recours amiable des Urssaf, en
supprimant l’intervention préalable
des instances départementales
d’instruction des recours amiables
et des commissions des instances
régionales de la protection sociale
des travailleurs indépendants
(ministère de l’économie, des finances
et de la souveraineté industrielle et
numérique).
Recommandations