Gestion de la dette et de la
trésorerie de l’État
Note d’analyse de l’exécution
budgétaire
2021
2
COUR DES COMPTES
Gestion de la dette et de la trésorerie de l’État
Graphique n° 1 :
r
ecettes (en M €)
Graphique n° 2 :
d
épenses (en M€)
GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE
DE L’ÉTAT
3
Graphique n° 3 :
variation annuelle du solde (
en M€)
Graphique n° 4 :
s
oldes (en M€)
GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE
DE L’ÉTAT
5
Synthèse
Un besoin de financement toujours très élevé qui se réduit
partiellement
, compte tenu d’un déficit légèrement inférieur
à la
prévision de la LFI
En 2021, le besoin de financement de l’État s’est élevé à
285,2
Md€,
en diminution de 24,3
Md€ par r
apport à son point haut historique de 2020
(309,5 Md€)
.
Ce besoin de financement est inférieur de 7,8
Md€
à celui de la
prévision figurant en loi de finances initiale (LFI), à la suite notamment
d’un déficit budgétaire
moins important que ce qui était anticipé
initialement (-170,7
Md€ contre
-173,3
Md€ prévu en LFI
). Le déficit
budgétaire est également inférieur
de 34,4 Md€ à celui prévu dans le
second projet de loi de finances rectificative de 2021 (-205,1
Md€).
Le déficit budgétaire en 2021 (-
171 Md€) est
très proche du déficit
budgétaire stabilisant le poids de la dette dans le PIB (-16
5 Md€). L’écart
au solde stabilisant, qui avait atteint un montant très élevé en 2020
(272
Md€)
,
n’est plus que de
6
Md€. Ce faible écart au solde stabilisant en
2021, et nettement inférieur à celui de 2020 malgré un déficit budgétaire
proche ces deux années
(171 Md€ après 178 Md€), s’explique par la
croissance du PIB en valeur (+8,2 % en 2021 après -5,2 % en 2020). À
titre illustratif et sur la base des données de la LFI p
our 2022, l’écart du
déficit budgétaire au déficit
stabilisant pourrait augmenter pour s’établir à
74
Md€ en 2022
.
Un volume d’émissions stabilisé à un niveau très élevé
En 2021
, l’État a émis 260
Md€ de titres
de dette à moyen et long
terme nette des rachats
–
soit un volume inchangé par rapport à 2020, et
conforme à la prévision inscrite en loi de finances initiale
–
pour financer
majoritairement le déficit courant (60 %), mais également, à hauteur de
40 %, le remboursement de titres arrivés à échéance. Ces ordres de
grandeur sont proches de
ceux constatés en 2020, mais s’écartent
sensiblement de la situation qui prévalait avant la crise sanitaire, où le
financement du déficit
courant n’excédait pas 40
% du besoin de
financement total.
En 2021, un montant de 16,9
Md€ de
primes
–
nettes des décotes
–
a été enregistré
à l’émission de titres de moyen
-long terme, marquant un
repli par rapport au point haut de 2020 (30,7
Md€). Ce
lui-ci
s’explique à la
fois par la légère hausse des
taux d’intérêt
et par la moindre proportion des
6
COUR DES COMPTES
émissions sur souches anciennes par rapport à 2020. Néanmoins, le volume
de primes constaté en 2021 est proche de la moyenne des exercices 2016-
2019 (16,0
Md€).
La maturité moyenne
de la dette s’élève à 8
,4 ans (8 ans et 153
jours), soit
environ 3 mois de plus qu’en 2020, sous l’effet conjoint de la
diminution de l’encours des bons à taux fixe (BTF), c’est
-à-dire des titres
de dette à court terme, mais aussi de
l’allongement de la maturité moyenne
à l’émission de titres de moyen
-long terme. Celle-ci atteint 12,4 ans en
2021, contre 11,5 ans en 2020. Cet allongement a constitué une tendance
continue au cours de la décennie écoulée. La durée de vie moyenne de la
dette française en 2020 se situait au-dessus de celle de
l’Allemagne (6,7
ans),
l’Espagne (7,7 ans), l’Italie (7
ans) et des Pays-Bas (7 ans et 3 mois).
Elle était
en revanche nettement inférieure à l’Autriche (10,1
ans) et au
Royaume-Uni (17,8 ans).
Pour la première fois depuis 2011, une hausse de la charge
de la dette lié au contex
te de reprise de l’inflation
La persistance de taux d’intérêt exceptionnellement bas, favorisée
par la politique monétaire accommodante de la Banque centrale
européenne (BCE) a contribué à maintenir
la charge d’intérêts versés par
l’État
en 2021 à un niveau proche de celui des années précédentes
(+2,0
Md€
; 36,3
Md€ après 3
4,3
Md€ en 20
20 et 39,1
Md€ en 201
9), en
dépit d’un accroissement très significatif (+1
44
Md€
après +178 Md€ en
2020)
de l’encours de sa dette.
La charge
de la dette négociable s’est éta
blie en 2021 à 36,3
Md€,
en progression de 2
Md€ par rapport à l’exécution 2020. Elle dépasse
également de 1,5
Md€ la prévision en LFI 2021 (34,8
Md€), ce qui
constitue une rupture notable par rapport aux années précédentes, lors
desquelles l’exécution s’é
tait à chaque fois révélée inférieure à ces
prévisions initiales.
L’explication principale de cette hausse tient à
l
’accélération de l’inflation en 2021, laquelle a entraîné un net
renchérissement de la charge d’indexation du capital des titres de dette
indexés sur celle-ci : la dépense correspondante, prévue à 1,0
Md€ en LFI
2021 (elle était de 0,45
Md€ en exécution 2020)
,
s’est finalement élevée à
3,0
Md€.
Malgré leur maintien à un niveau faible,
les taux d’intérêt ont connu
une remontée progressive au co
urs de l’année 2021,
marquée cependant
par des à-
coups qui témoignent des incertitudes liées à l’évolution de la
situation sanita
ire et de la volatilité de l’environnement de marché. Ainsi,
le taux de
l’obligation assimilable du Trésor (OAT)
à 10 ans, qui constitue
le titre de référence, a augmenté de 56 points de base pour s
’établir à
0,20 % fin 2021, repassant donc en territoire
positif, tendance qui s’est
GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE
DE L’ÉTAT
7
confirmée et accélérée au cours du mois de janvier 2022. Par rapport à
l’exécution 2020
,
l’évolution
des taux d’intérêt au cours de l’année a
néanmoins continué à contribuer à la maîtrise de la charge de la dette, d’où
un « effet taux » demeurant favorable (- 1,5
Md€
, contre - 1,3
Md€ prévu
en LFI 2021). Au contraire,
l’évolution des volumes d’émissions
réalisées
au cours de l’année
a conduit à une
augmentation de l’encours de dette (
soit
un « effet volume » de + 0,9
Md€
, contre - 0,8
Md€ prévu en LFI
).
Une augmentation de la dette qui renforce l’exposition à une
éventuelle remontée des taux d’intérêt
Le quasi-doublement
de la dette de l’État entre
2008 et 2019
(+ 98
%) l’a rendu très vulnérable à une hausse des taux. La hausse
observée en 2020 et 2021 a renforcé à nouveau cette sensibilité.
L’Agence
France Trésor estime ainsi qu’une hausse d’un point de taux d’intérêt
conduirait à une majoration du service de la dette de 2,5
Md€ la première
année et de 29,5
Md€ à l’horizon de
10
ans. L’impact sur les finances
publiques à un horizon de 10 ans est ainsi nettement plus élevé que celui
estimé avant la crise sanitaire (21,2
Md€ fin 2019).
Des opérations de trésorerie toujours coûteuses
Le solde des opérations de trésorerie a poursuivi sa dégradation
(- 20
M€) et s’établit à
-1 480
M€
en 2021. Elle est essentiellement due à
la persistance de taux négatifs à court terme, entraînant un renchérissement
du
coût de la trésorerie déposée par l’État à la Banque de
France. Il est
passé de 194
M€ en 2019 à 485
M€ en 2020
et 536
M€ en 2021
.
Ce solde négatif résulte aussi, comme les années précédentes, des
conditions de rémunération
–
fixées par conventions
–
des dotations non
consommables destinées au financement des premières générations de
programmes d’investissement d’avenir (PIA)
. En 2021, les intérêts
acquittés au titre de la rémunération de ces fonds se sont élevés à 751
M€,
soit plus de la moitié des dépenses totales liées aux opérations de trésorerie.
Enfin, les dépôts des correspondants du Trésor (collectivités locales
et établissements publics nationaux principalement) ont poursuivi leur
progression (+18,7
Md€
), pour atteindre un encours de près de 175
Md€
.
Cette évolution contribue à accroître les ressources de financement dont
dispose l’
État et permet ainsi de limiter en partie le recours aux émissions
de dette. Mais elle explique également cette dégradation du solde, ces fonds
étant eux-mêmes déposés sur le compte unique du Trésor et rémunérés
négativement dans les conditions de taux actuelles.
8
COUR DES COMPTES
Recommandations
La Cour ne formule pas
de recommandation au titre de l’année
2021.
GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE
DE L’ÉTAT
9
Sommaire
Introduction
..................................................................................................
11
Chapitre I
Les résultats de l’exercice
........................................................
13
I - Un besoin de financement en recul en 2021, mais restant à un
niveau historiquement élevé
...........................................................................
13
II - Des conditions de marché affectées par les conséquences de la
crise sanitaire sur les économies
....................................................................
20
III -
Des émissions soutenues pendant la première moitié de l’année
2021
...............................................................................................................
25
IV - Les primes et décotes
..............................................................................
29
V - Une dette en très forte augmentation
.......................................................
35
VI - La soutenabilité à court et moyen terme
.................................................
42
VII - En 2021, la France première entité émettrice de « titres verts »
............
44
Chapitre II Les grandes composantes des dépenses et des recettes
........
46
I - Pour la première fois depuis 2011, une hausse de la charge de la
dette de l’État dû à l’augmentation de l’inflation
...........................................
46
II -
Des opérations de trésorerie qui continuent d’afficher un solde
dégradé
...........................................................................................................
51
III - Des opérations passées de gestion active de la dette (
swaps
)
.................
60
Chapitre III La conformité aux principes et règles du droit
budgétaire
.....................................................................................................
62
Chapitre IV Les recommandations de la Cour
........................................
63
I - Le suivi des recommandations formulées au titre de 2020
........................
63
II - Récapitulatif des recommandations formulées au titre de la gestion
2021
...............................................................................................................
63
GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE
DE L’ÉTAT
11
Introduction
En application de l’article 22
-II de la LOLF, le compte de
commerce 903 -
Gestion de la dette et de la trésorerie de l’État
retrace les
opérations budgétaires relatives à la gestion de la dette et de la trésorerie
de l’État. Il est divisé en deux sections :
-
la section 1 retrace les opérations relatives à la dette et à la gestion
de la trésorerie ;
-
la section 2 retrace les opérations de gestion active de la dette au
moyen d’instruments financiers à terme.
La section 1 est équilibrée par des versements de crédits du budget
général : à titre principal, en provenance du programme 117
–
Charge de
la dette et trésorerie de l’État
de la mission
Engagements financiers de
l’État
, mais également depuis le programme 355
–
Charge de la dette de
SNCF Réseau reprise par
l’État
, rattaché à la mission
Écologie,
développement et mobilité durables
. Est ainsi inscrite au budget général la
charge de la dette et de la trésorerie avant opérations de gestion active
(
swaps
). Conformément à l’article 113 de la loi de finances rectificative
pour 2004 du 30 décembre 2004, la section 1 fait l’objet d’une autorisation
de découvert évaluative. Cette autorisation a été maintenue à 17,5
Md€
dans la loi de finances initiale pour 2021, comme les années précédentes.
En cas de dépassement de l'autorisation de découvert, le ministre chargé
des finances informe sans délai les commissions des finances de
l'Assemblée nationale et du Sénat du montant et des circonstances de ce
dépassement.
Ne bénéficiant pas d’un abondement du budget général, la section
2
fait l’objet d’une autorisation de découvert limitati
ve dont le montant a été
fixé, comme les années passées, à 1,7
Md€ en 202
1. La section 2 est
néanmoins, comme les années précédentes, en léger excédent (25,7
M€)
,
les opérations de
swaps
en extinction continuant à produire des recettes
nettes.
La structure des recettes et dépenses inscrites à la section 1
correspond aux deux actions du programme 117 : dette et trésorerie de
l’État.
En dépenses figurent les intérêts des emprunts d’État (
bons du
Trésor à taux fixe et à intérêt précompté (BTF)
d’une maturité inférieure
12
COUR DES COMPTES
ou égale à un an, et OAT, à taux fixe ou indexé, pour le financement à
moyen et long termes
) ainsi que la charge d’indexation des OAT indexé
es
sur l’inflation française ou européenne. La charge de la dette comprend
également les frais et commissions directement liés à la gestion de la dette
négociable
et les intérêts des dettes reprises par l’État,
comme celle de
SNCF Réseau, ainsi que les charges relatives aux opérations de couverture
qui leur sont rattachées.
Les recettes liées à la gestion de la dette proviennent des coupons
courus sur OAT (0,6
Md€
). Elles comprennent également les gains liés à
l’émission de BTF à taux d’intérêt négatif, significatifs depuis 2015
(1,0
Md€ en 2021)
.
Les dépenses liées à la trésorerie comprennent la rémunération des
dépôts de certains correspondants du Trésor, la cha
rge d’intérêts des
opérations sur le marché interbancaire et la rémunération du compte du
Trésor à la Banque de France lorsque le taux de la facilité marginale de
dépôt de la BCE est négatif comme cela est le cas depuis mars 2016. Elles
incluent également, depuis 2010, la rémunération des fonds non
consommables destinés au financement des investissements d’avenir.
Les recettes sont constituées des produits liés aux opérations sur le
marché interbancaire ainsi qu’éventuellement de la rémunération du solde
du compte du Trésor à la Banque de France.
Sur la section 2 du compte de commerce 903 sont imputés les
produits et charges des opérations d’échange de taux d’intérêt mises en
place dans le cadre du programme de réduction de la durée de vie moyenne
de la dette lancé en 2001 et suspendu en 2002.
Au total, le compte de commerce est, en fin d’année, excédentaire
de 25,7
M€,
ce montant correspondant aux produits nets (recettes moins
dépenses), soit un montant très proche de la prévision initiale en LFI 2021.
Tableau n° 1 :
d
onnées de cadrage du compte de commerce (M€)
Exécution
2020
LFI 2021
Exécution
2021
Recettes
38 145,8
38 534,0
40 206,3
Dépenses
38 120,8
38 509,0
40 180,5
Solde
25,0
25,0
25,7
Source : LFI 2021 et AFT
GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE
DE L’ÉTAT
13
Chapitre I
Les résultats de l’exercice
I -
Un besoin de financement en recul en 2021,
mais restant à un niveau historiquement élevé
En 2021, le besoin de financement de
l’État s’est
élevé à 285,2
Md€
,
en diminution (- 24,3
Md€)
par rapport au montant atteint en 2020, mais se
maintenant néanmoins à un niveau largement supérieur à celui constaté sur
la décennie 2010-2019 (191
Md€ en moyenne), ainsi que lors du précédent
pic relevé lors de la crise de 2009 (246,4
Md€)
.
Graphique n° 1 :
b
esoin de financement de l’
État
(en Md€)
Source : Agence France Trésor
En 2020,
sous l’effet de la crise sanitaire,
les émissions ont
fortement augmenté dans la plupart des pays de la zone euro. En 2021, ces
émissions se sont maintenues à des niveaux élevés, proches de ceux
14
COUR DES COMPTES
observés
l’année précédente.
En 2021, comme au cours des deux années
précédentes, la France a ainsi été le deuxième émetteur de la zone euro,
derrière l’Italie, qui est restée l’émetteur le plus important de la zon
e
(350
Md€ en 202
1 après 345
Md€ en 20
20
), devant l’
Allemagne (244
Md€
en 2021 après 250 Md€ en 2020
)
puis l’
Espagne (163
Md€
en 2021 après
185 Md€ en 2020
).
Graphique n° 2 :
estimation des émissions brutes des amortissements
et
nettes des rachats (en Md€)
Source : Spécialistes en valeurs du trésor, calcul Agence France Trésor
Le besoin de financement constaté en exécution en France
(285,2
Md€) est inférieur à celui prévu en LFI (293,0
Md€).
En 2021, près
de 60 % de ce besoin de financement découlent de la nécessité de financer
le déficit courant, et
le solde s’explique par
le remboursement de titres
arrivés à échéance. Ces ordres de grandeur sont similaires à ceux constatés
en 2020, mais marquent une rupture avec la tendance observée les années
précédentes, au cours desquelles la part du refinancement avait
progressivement augmenté pour devenir prépondérante
, sous l’effet de la
hausse de la dette publique, passant ainsi de 44 % en 2010 (soit 82,9
Md€)
à 58 % en 2019 (soit 130,2
Md€).
La prévision de déficit à financer retenue en LFI 2021 a été
fortement réévaluée en cours d’exercice, puisqu’elle a été d’abor
d révisée
à 220,1
Md€ dans la première loi de finances rectificative (LFR) adoptée
en juillet 2021 (+46,8
Md€), avant d’être abaissée de
15
Md€,
à
205,1
Md€, dans la seconde LFR de décembre 2021. Toutefois, le niveau
GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE
DE L’ÉTAT
15
de déficit finalement constaté en exécu
tion s’est avéré significativement
inférieur (170,7
Md€). Ces variations expliquent quasiment à elles
-seules
les évolutions du besoin de financement attendu en cours d’exercice.
Tableau n° 2 :
t
ableau de financement de l’État
Exécution
2019
Exécution
2020
LFI
2021
LFR2
2021
Exécution
2021
Besoin de financement (Md€)
Amortissement de
la dette à moyen et
long terme
130,2
136,1
118,3
118,3
118,3
Déficit à financer
92,7
178,1
173,3
205,1
170,7
Amortissement des
autres dettes
0,0
0,5
0,0
0,0
0,0
Amortissement de
la dette SNCF
Réseau
-
1,7
1,3
1,3
1,3
Autres besoins de
trésorerie
-2,4
-6,9
0,1
-3,7
-5,1
Total
220,5
309,5
293,0
321,0
285,2
Ressources de financement (Md€)
Émissions de dette
à moyen et long
terme nettes des
rachats
200
260
260
260
260
Variation nette de
l’encours des
titres d’État à
court terme
-6
54,7
19,5
5,0
-6,2
Variation des
dépôts des
correspondants
11,5
27,8
7,0
8,9
18,7
Variation des
disponibilités (1)
-5,7
-63,4
-
33,3
-4,4
Primes et décotes
19,9
30,1
6,5
13,8
17,2
Autres ressources
de trésorerie
0,8
0,3
Total
220,5
309,5
293,0
321,0
285,2
Source : Agence France Trésor
Nota bene
: (1) un signe négatif traduit une hausse de la trésorerie de l’État.
S’agissant des ressources de financement
, le montant exécuté des
émissions de dette à moyen et long termes, nette des rachats, a été conforme
à la prévision inscrite en LFI
et identique au niveau de l’année précédente,
soit 260
Md€.
En revanche, la mobilisation des autres ressources de
financement a connu des variations différentes des prévisions initiales.
16
COUR DES COMPTES
D’une
part, le faible niveau des taux de moyen-long terme et la
réémission d’anciennes souches ont occasionné la réception en trésorerie
de 18,8
Md€ de primes à l’émission
, contre 1,9
Md€ de décotes, soit un
montant net de primes
d’environ 1
6,9
Md€
.
D’
autre
part, l’AFT a recouru à une
diminution des émissions de
titres d’État de court terme
(baisse de 6,2 Md€ de l’encours net de BTF en
2021, après une augmentation de 54,7
Md€ en 2020) alors qu’une hausse
de près de 20 Md€ était inscrite en p
révision dans la LFI.
Par ailleurs, la hausse des dépôts des correspondants du Trésor
(+ 18,7
Md€),
qui résulte de la poursuite de la politique de centralisation
des trésoreries publiques
1
, a constitué un autre levier mais dans une
proportion moindre également que durant les exercices précédents.
1
Cf. l’ordonnance n°
2020-1496 du 2 décembre 2020 relative à la centralisation des
disponibilités de certains organismes au Trésor et, pris en application de cette dernière,
le décret n° 2021-29 du 14 janvier 2021 (entré en vigueur le 1
er
octobre 2021). Les
nouveaux correspondants dont la trésorerie est centralisée sont :
l’Institut de France et
les cinq acad
émies qui le constituent, l’EPIC BPI France, l’Agence nationale pour la
gestion des déchets radioactifs,
l’IFP
-Energies Nouvelles et le Fonds de garantie de
dépôts et de résolution (FGDR).
GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE
DE L’ÉTAT
17
Tableau n° 3 :
encours et variation des dépôts des correspondants du
Trésor (Md€)
Encours fin
2020
Variation
Encours fin
2021
Collectivités et
établissements
publics locaux
67,6
8,4
76,0
Dont
Régions
4,5
0,9
5,4
Départeme
nts
8,2
2,0
10,2
Communes
26,8
2,3
29,1
EPCI
16,3
2,7
19,0
Autres
11,8
0,5
12,3
Hôpitaux
7,6
0,5
8,1
Établissements
publics
nationaux
51,6
7,4
59,0
Banques
centrales
africaines
15,2
-4,9
10,3
Union
européenne
2,1
1,9
4,0
Autres
12,1
5,2
17,3
Total
156,2
18,7
174,9
Source :
Cour des comptes à partir de données DGFiP (situation mensuelle de l’État)
À
la fin de l’exercice 2020, un
fort surplus de trésorerie avait été
accumulé (63,4
Md€), conséquence d’un déficit moins élevé que prévu lors
des lois de finances rectificatives, sous l’effet d’une moindre sollicitation
des dispositifs d’urgence, et ce alors même que des émissions de trésorerie
en prévision de cette échéance avaient
déjà été effectuées. Alors que l’AFT
envisageait encore, au stade de la seconde loi de finances rectificative pour
2021, la mobilisation de plus de la moitié (33
Md€) de ce surplus pour
répondre à ce besoin de financement, la réduction du déficit budgétaire a
finalement rendu cette option inutile
, et cet encours de trésorerie s’est
au
contraire accru de 4,4
Md€.
En LFI pour 2022, le besoin de financement est attendu à
297,6
Md€
, soit une augmentation de 12,3
Md€ par rapport à l’exécution
2021. Ce besoin de financement pour 2022 est toutefois inférieur de
23
Md€ à celui prévu en LFR 2 pour 2021. Il résulterait de l’
amortissement
18
COUR DES COMPTES
de dettes de moyen à long terme arrivant à échéance à hauteur de
144,4
Md€ et d’un déficit budgétaire prévisionnel de
153,8
Md€.
Le
tableau de financement de la LFI pour 2022 a toutefois été construit sur la
base des données de la LFR2 et, en particulier, sur une prévision de déficit
pour 2021 (205,1
Md€) supérieure à l’exécution (170,7
Md€). Le besoin
de financement en 2022 pourrait ainsi être différent de celui prévu selon ce
schéma de financement du fait notamment de cette donnée d’exécution.
Les ressources de financement proviennent principalement des
émissions nouvelles de dette à moyen-long terme nettes des rachats
(260
Md€)
, l
’encours des titres de court
-terme restant quant à lui inchangé
par rapport à 2021, de même que le volume des dépôts des correspondants.
Les émissions de dette de moyen à long terme sont supposées dégager
3
Md€ de primes de trésorerie à l’émission nettes d
es décotes, sous
l’hypothèse d’une remontée très progressive des taux d’intérêt longs
retenue en LFI.
Le Gouvernement a décidé d’identifier
le surplus de déficit entre
l’exécution et la loi de finances initiale en 2020, mais également en 2021,
comme étant
la dette de l’État liée à la crise de la
Covid 19. La loi de
finances pour 2022 prévoit un dispositif de fléchage de recettes pour en
assurer un amortissement progressif. Ce dispositif, qui est sans effet sur le
volume et l’évolution de la dette, répond,
selon le Gouvernement, à un
objectif pédagogique.
GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE
DE L’ÉTAT
19
L
’identification
de la « dette C
ovid » de l’État dans la LFI
pour
2022 : un dispositif sans effet sur le niveau
et l’évolution de la dette
La loi de finances pour 2022 a créé un nouveau programme budgétaire
369 « Amortissement de la dette liée à la Covid-19 », inscrit sur la mission
«
Engagements financiers de l’
État ». La justification de ce nouveau programme
est de disposer d’un mécanisme permettant de retracer de manière distincte,
dans les comptes pub
lics, l’amortissement progressif du surcroît de dette de
l’
État imputable à la crise sanitaire.
Ce surcroît, estimé
2
à 165
Md€ pour les exercices 2020 et 2021
3
, doit
être progressivement amorti grâce à l’affectation d’une fraction de 6
% des
recettes fiscales nettes dégagées au-delà de leur niveau de 2020, retracée sous
forme de crédits budgétaires du P369, lequel doit abonder le compte
d’affectation spéciale «
Participations financières de l’
État » qui effectue un
versement correspondant à la Caisse de la dette publique (CDP). Un échéancier
prévisionnel doit être conclu entre l’
État et cette dernière. Une première
inscription budgétaire de 1,9
Md€ en crédits de paiement (pour 165
Md€,
correspondant au total précité du surcroît de « dette Covid ») a été effectuée en
PLF pour 2022.
Cette innovation, si elle conduit à l’ajout d’une nouvelle ligne
« Ressources affectées à la Caisse de la dette publique et consacrées au
désendettement
» dans la partie Ressources du tableau de financement de l’
État,
n’entraîne pas d’autres conséquences
pour la gestion opérationnelle de la dette
par l’AFT.
L’isolement d’une partie de la d
ette dans le but de lui réserver un
traitement différencié n’a
urait
d’impact sur la trajectoire de finances publiques
que si un effort de redressement structurel supplémentaire lui était associé. La
seule affectation d’une ressource existante vers l’amorti
ssement de la dette ne
modifie donc pas sa trajectoire. En l’absence d’un effort supplémentaire,
en
recettes ou en dépenses, la dette publique se réduit de la même manière avec ou
sans « cantonnement ».
2
L’estimation résulte de l’écart entre l’évaluation de la trajectoire du déficit de l’État
qui existait, fin 2019, en LFI pour 2020 et celle observée depuis lors.
3
Somme à laquelle s’ajoutent les 65
Md€ du surcroît de dette sociale liée à la crise
sanitaire, qui ont déjà été intégrés dans le transfert de 136 Md€ de
dette sociale de
l’Agence centrale des organismes de Sécurité sociale (Acoss)
vers la Caisse
d’amortis
sement de la dette sociale (Cades)
effectué à l’été 2020 (loi organique
n° 2020-991 et la loi ordinaire n° 2020-992 du 7 août 2020 relatives à la dette sociale
et à l’autonomie). Ce transfert a eu pour effet de repousser de 2024 à 2033 l’horizon de
l’amortissement de la dette portée par la Cades, et de proroger d’autant l’existence de
la ressource fiscale dédiée qu’est la contribution pour le remboursement de la dette
sociale (CRDS).
20
COUR DES COMPTES
II -
Des conditions de marché affectées par les
conséquences de la crise sanitaire sur les
économies
Le début de l’année 2021 a été marqué par
une augmentation plus
forte des taux longs par rapport aux taux courts (« pentification ») notable
de la courbe des taux américains et européens, plus spécifiquement sur la
partie longue, reflétant notamment une augmentation des anticipations
d'inflation et des taux réels. En sus du vaste programme de relance
budgétaire aux États-Unis, la hausse marquée des prix des produits de base
a ajouté une pression à la hausse sur les rendements obligataires nominaux
à long terme aux États-Unis.
En dépit d’un mouvement initialement similaire, mais transitoire,
entre janvier et février, les taux longs européens se sont, de leur côté,
stabilisés, voire légèrement réduits, en raison d’un
e reprise moins soutenue
en Europe qu’aux États
-
Unis. Cette dynamique s’est trouvée renforcée par
l’analyse par les
participants de marché de la politique monétaire en zone
euro à l’origine d’incertitudes sur l’orientation des conditions de
financement. L’annonce de l’augmentation de ses achats d’actifs mensuels
GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSO
RERIE DE L’ÉTAT
21
par la BCE au mois de mars 2021 a apaisé ces doutes, ouvrant la voie à un
second épisode de hausse des taux longs européens.
Graphique n° 3 :
t
aux d’intérêt souverains à 10 ans (en %)
Source : BCE ; dernier point : décembre 2021
En France, l
es variations du taux de l’OAT à dix ans
au cours de
l’année 20
21 ont été marquées par quatre temps distincts.
Ainsi,
durant les quatre premiers mois de l’année
2021, le taux à
10 ans est remonté d’environ 60 points de base, sous l’effet notamment
de l’annonce par la BCE de l’inflexion de sa politique d’achat d’actifs
qui a permis d’écarter le risque d’une dynamique de type déflationniste
aux yeux des participants de marché.
À compter du printemps, les taux longs européens ont enregistré un
mouvement de baisse
qui s’est inscrit dans le sillage de celui observé aux
États-Unis : à cette période,
l’inflation américaine dépassait la cible de la
Fed de 2 %, pour atteindre un pic légèrement au-
dessus de 5 % durant l’été,
et le marché du travail continuait de peiner à se remettre des effets de la
crise pandémique. Cette combinaison a ainsi alimenté
les craintes d’une
-1
0
1
2
3
4
5
6
7
janv-10
juil-10
janv-11
juil-11
janv-12
juil-12
janv-13
juil-13
janv-14
juil-14
janv-15
juil-15
janv-16
juil-16
janv-17
juil-17
janv-18
juil-18
janv-19
juil-19
janv-20
juil-20
janv-21
juil-21
Allemagne
Espagne
France
Italie
22
COUR DES COMPTES
reprise américaine moins dynamique qu’anticipé, voire d’un emballement
de l’inflation.
Au cours de
l’été, les rendements
européens ont sensiblement
diminué comme dans la plupart des économies avancées, en raison de
l'aversion au risque au niveau mondial avec la propagation rapide du
variant Delta.
En fin d’année, les marchés financiers ont observé un mouvement
de volatilité accrue qui a reflété à la fois les incertitudes sanitaires créées
par le variant Omicron du virus de la Covid-19 et
l’accentuation des
décalages conjoncturels et de politique monétaire entre l’Europe et les
États-Unis. Depuis cette date, la Réserve Fédérale américaine a modifié
son analyse et
considère désormais que l’inflation n’est plus transitoire
dans un contexte où le marché du travail reste difficilement lisible, tandis
que la BCE a indiqué pour sa part maintenir son soutien conditionnellement
à l’é
volution à venir des circonstances. Le taux à 10 ans en France a oscillé
entre +0,2 % et 0
% au cours des deux derniers mois de l’année
, reflétant
ces incertitudes.
GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE
DE L’ÉTAT
23
Graphique n° 4 :
évolution
du taux de l’OAT 10 ans en 202
1
(en %)
Source : Banque de France ; dernier point : décembre 2021
A
lors qu’il était auparavant quasiment inexistant
,
l’écart de taux
(
spread
) avec l’Allemagne
a augmenté au cours de la crise de 2008-2009,
puis à nouveau fortement au cours de la crise des dettes publiques en zone
euro en 2011 et 2012. I
l a ensuite diminué progressivement sous l’effet
notamment des mesures de politiques monétaires pour fluctuer autour de
40 points de base entre 2015 et 2021. Au cours de cette période, plusieurs
épisodes de tensions ont pu avoir des répercussions sur ces écarts de taux,
au début de la crise sanitaire au printemps 2020 notamment. L
’écart de taux
avec l’Allemagne
s’est
ensuite réduit avec les annonces puis la mise en
œuvre du nouveau programme d’achat de la BCE, pour revenir
au cours de
l’année 2021
à un niveau comparable à sa valeur moyenne sur la décennie
passée.
-0,36
0,29
0,20
-0,4
-0,3
-0,2
-0,1
0
0,1
0,2
0,3
0,4
24
COUR DES COMPTES
Graphique n° 5 :
écart de taux (
spread
) à dix ans avec l’Allemagne
(en %)
Source : BCE ; dernier point : décembre 2021
Dans cet environnement de marché, l’Agence France Trésor a pu
procéder à ses émissions dans de très bonnes conditions. Les émissions à
court terme ont été réalisées à un taux (- 0,67 % en moyenne) en diminution
par rapport à celui des deux années précédentes (- 0,57 % en moyenne)
tandis que les émissions à moyen et long terme ont à nouveau été effectuées
réalisées à un taux négatif en 2021 (- 0,05 % en moyenne) mais à des
conditions légèrement moins favorables
qu’en 2020
(- 0,13 % en
moyenne).
0,0
0,2
0,4
0,6
0,8
1,0
1,2
1,4
1,6
janv-07
juil-07
janv-08
juil-08
janv-09
juil-09
janv-10
juil-10
janv-11
juil-11
janv-12
juil-12
janv-13
juil-13
janv-14
juil-14
janv-15
juil-15
janv-16
juil-16
janv-17
juil-17
janv-18
juil-18
janv-19
juil-19
janv-20
juil-20
janv-21
juil-21
GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE
DE L’ÉTAT
25
Graphique n° 6 :
t
aux moyen à l’émission
Source : Agence France Trésor
III -
Des émissions soutenues pendant la
première moitié
de l’année 2021
Le programme d’émission a été en général en avance sur le rythme
théorique de référence qui correspond à des émissions mensuelles de
1/12
ème
de la cible annuelle. Ainsi, 66
% des émissions de l’année ont été
réalisées durant les sept premiers mois (une proportion comparable à celle
observée à la même période en 2019).
Selon l’AFT, ce rythme d’émission
permet d’une part de sécuriser le financement de l’État et de limiter les
risques d’exécution, d’autre part de suivre le rythme des investi
sseurs, qui
exécutent globalement leurs programmes entre janvier et octobre-
novembre, et à la liquidité et la profondeur des marchés (plus faibles en
août et décembre).
26
COUR DES COMPTES
Graphique n° 7 :
montant mensuel des émissions en 2019-2021
(en Md€)
Source : Agence France Trésor
Près des trois quarts (74 %) des titres de dette émis en 2021
arriveront à échéance
d’ici à 2031
; à l’inverse,
seulement un dixième
environ de ces titres émis a une maturité de 20 années ou plus, et 5 % de
30 années ou plus. La maturité moyenne des émissions à moyen et long
termes, de 12,4 ans,
n’en est pas moins en hausse par rapport à 2020
(11,5 ans), contribuant à augmenter la durée de vie de
l’encours total de la
dette en 2021 (cf.
infra
).
GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE
DE L’ÉTAT
27
Graphique n° 8 :
r
épartition par année d’échéance des émissions à
moyen et long terme réalisées en 2021
Source : Agence France Trésor
En 2021, la reprise de l’inflation en zone euro et en France
4
a
entraîné un regain d’intérêt des investisseurs pour les obligations indexé
es
sur l’inflation. La part des titres indexés qui s’établissai
t à 7 % de
l’ensemble de l’encours en 2019 et 2020 a augmenté de 1,3 point pour
s’établir à 8,3
% en 2021.
4
L’inflation en zone euro s’établissait à 4,9
% en glissement annuel en novembre 2021
pour l’inflation harmonisée et à 2,8
% en glissement annuel pour l’IPC France.
0%
20%
40%
60%
80%
100%
120%
0%
5%
10%
15%
20%
25%
2024
2027
2030
2033
2036
2039
2042
2045
2048
2051
2054
2057
2060
2063
2066
2069
2072
% cumulé des émissions (éch. droite)
% des émissions (éch gauche)
28
COUR DES COMPTES
Un intérêt des investisseurs pour les titres indexés lié aux
perspectives d’inflation
L’État a émis
, en 1998, la première
OAT indexée sur l’indic
e des
prix à la consommation (hors tabac) en France (OATi) et en 2001 la
première OAT indexée sur l’indice des prix en zone euro (OAT€i).
Depuis ces dates, l’AFT s’est engagée à émettre de manière régulière
et transparente des titres indexés sur l’inflatio
n et à construire deux courbes
réelles
(c’est
-à-dire des courbes de rendement nominaux diminué de
l’anticipation d’inflation), l’une indexée sur l’inflation française, l’autre sur
l’inflation européenne.
Les OATi et OAT€i
visent à répondre à la demande d’i
nvestisseurs
souhaitant couvrir la valeur de leur investissement contre l’inflation ou
diversifier leur portefeuille.
Selon l’AFT, l
a demande pour les deux types
de produits présentant des caractéristiques spécifiques, le maintien de deux
lignes d’obligations indexées sur l’inflation permet d’élargir la base
d’investisseurs et ainsi de diminuer le coût de l’endettement de l’État.
L’émission de titres indexés permet à l’AFT d’économiser «
la prime
d’inflation
» qu’elle paye quand elle émet une OAT normale, c’est
-à-dire le
surplus de taux que les investisseurs exigent pour assurer l’État contre les
variations de l’inflation. La contrepartie de ce moindre coût à l’émission
pour l’État est une plus grande volatilité des charges d’intérêts puisqu’elles
dépendent
de l’inflation observée et ne sont donc pas fixes comme pour une
OAT.
Le niveau de la demande pour les titres indexés a évolué dans le
temps. Ainsi, à partir du début des années 2000, la part des titres indexés
dans les émissions
s’est élevée progressiveme
nt, à mesure de la montée en
puissance de ces instruments dans les portefeuilles et usages des
investisseurs. De 2003 à 2007, des proportions aux alentours de 15 % ont
permis d’asseoir ce marché. De 2010 à 2018, la proportion s’est maintenue
proche de 10 %.
GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE
DE L’ÉTAT
29
Graphique n° 9 : part des titres à moyen et long terme indexés sur
l’inflation
dans les émissions
Source : Agence France Trésor
En 2019 et en 2020, la dégradation importante des perspectives
d’inflation
,
accentuée par la baisse d’activité provoquée pa
r la pandémie, a
engendré une diminution
de l’intérêt des investisseurs sur ces instruments
indexés à l’inflation, alors qu’augmentai
ent parallèlement les montants
d’émission de dette à moyen long terme tous titres confondus. En
conséquence, la part des titres indexés dans les émissions a baissé, à un
niveau proche de celui de 2009, année où les perspectives en matière
d’inflation étaient aussi particulièrement dégradée
s.
En 2021, la reprise de l’inflation a entraîné un regain d’intérêt des
investisseurs pour les titres indexés. Elle a également conduit à une charge
d’indexation plus élevée que celle inscrite en LFI. La hausse de l’inflation
a conduit à une hausse de 2,6
Md€ de la charge d’indexation
en 2021. Les
prévisions d’inflation pour 2022 conduisent
à anticiper une charge
d’indexation de
4,1
Md€
d’après le PLF pour 2022. L’inflation plus faible
en 2019 et 2020 avait toutefois contribué à diminuer
la charge d’indexation
ces deux années-là.
IV -
Les primes et décotes
En 2021, au total, 18,8
Md€ de primes et 1,9 Md€ de décotes ont été
enregistrées à l’émission de titres de moyen
-long terme, pour un total net
30
COUR DES COMPTES
reçu de 16,9
Md€
5
. Ce montant est inférieur à celui perçu en 2020
(30,7
Md€).
La dynamique
des taux d’intérêt observée en 202
1 est à
l’origine de l’enregi
strement d
e primes à l’émission
mais d’un montant
plus faible qu’en 2020. En effet, les taux en 2021 étaient plus élevés qu’en
2020 et la part des souches anciennes dans les émissions moindres
qu’en
2020.
Tableau n° 4 :
p
rimes, nettes des décotes, à l’émission (Md€)
Souches de
référence
Souches
anciennes
Titres
indexés
Primes nettes
des décotes
2016
6,0
12
2,8
20,8
2017
1,2
6,9
2,5
10,5
2018
0,7
7,5
3,1
11,3
2019
7,8
11,2
2,2
21,2
2020
6,9
21,4
2,4
30,7
2021
1,3
11,4
4,2
16,9
Source : Agence France Trésor
Sur les souches anciennes réémises, le montant de primes nettes de
décotes s’est élevé à 11,4 Md€ en 2021. Il est en diminution par rapport à
2020 (21,4 Md€). En réponse à la demande des marchés, l’AFT a
réalisé
en 2021 près de 30 % de ses émissions sur des souches anciennes, une
proportion plus faible que celle observée en 2020 (près de 40 %) mais plus
élevée que celle observée en moyenne entre 2017 et 2019 (20 %). La
proportion de titres émis sur souches anciennes était particulièrement
élevée en 2020, du fait de
l’impact de la politique monétaire sur l
e choix
des titres à émettre, la BCE achetant des titres sur l’ensemble de la courbe
nominale. La proportion de titres émis sur souches anciennes
s’inscrit en
diminution en 2021, la BCE ayant atteint ses limites de détention sur
certaines souches obligataires à la suite des forts achats réalisés depuis
2020.
5
Ce montant, relatif aux seules primes nettes des décotes encaissées à l’émission,
s’écarte du montant figurant dans le tableau de financement (17,2
Md€ en 2021)
qui
prend également en compte les primes et décotes sur les rachats de titres.
GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORE
RIE DE L’ÉTAT
31
Tableau n° 5 :
répartition des titres émis
Titres de
référence
Souches anciennes
Titres indexés
Volume
émis
(Md€)
Écart de
taux
Volume
émis
(Md€)
Écart de
taux
Volume
émis
(Md€)
Écart de
taux
2017
160,4
0,09 %
32,8
2,16 %
20,0
1,24 %
2018
148,7
0,06 %
54,3
1,41 %
22,4
1,39 %
2019
173,3
0,37 %
55,0
2,05 %
17,3
1,41 %
2020
158,6
0,36 %
110,8
1,77 %
20,1
1,07 %
2021
179,2
0,19 %
82,2
1,40 %
23,6
1,62 %
Source : Agence France Trésor ; les écarts de taux correspondent à la différence entre le taux de
coupon moyen et le taux moyen à l’émission pour chaque année.
De nouveau, le niveau de primes, nettes des décotes, sur les
émissions et rachats, a été très supérieur au montant inscrit dans le tableau
de financement de la loi de finances initiale (16,9
Md€ contre
6
Md€).
Cette prévision est toutefois délicate étant donné sa sensibilité à
l’environnement de taux et aux caractéristiques des titres
qui seront
effectivement émis (taux de coupon et maturité).
Tableau n° 6 :
p
rimes nettes des décotes (Md€)
2017
2018
2019
2020
2021
LFI
4,0
3,0
3,0
3,0
6,0
Exécution
9,6
10,8
19,9
30,7
16,9
Source : Agence France Trésor
Lorsque l
es taux d’intérêt
remonteront, le montant des décotes
devrait alors à l’inverse excéder celui des primes, les abondements sur
souches anciennes se faisant alors à des taux plus faibles que les taux de
marché du moment.
32
COUR DES COMPTES
Les facteurs explicatifs des primes et décotes
Les émissions de titres donnent lieu à l’encaissement de primes ou
de décotes lorsque leur taux de coupon est différent du taux de marché. Elles
compensent la différence, sur la durée de vie du titre, entre les montants des
coupons versés et ceux qui l’auraient été dans le cas d’une émission au taux
du marché. Si le coupon servi est supérieur au taux de marché à l’émission,
les souscri
pteurs paient à l’émission un prix d’achat supérieur à la somme
qui sera remboursée à échéance (la valeur faciale du titre ou « pair ») : une
« prime à l’émission » est alors enregistrée. Dans le cas contraire, une «
décote à l’émission » apparaît (l’État
reçoit moins que la valeur faciale du
titre).
Les primes d’émission conduisent à des encaissements qui viennent
réduire le besoin de financement de l’État, ce qui se traduit donc, toutes
choses égales par ailleurs, par une réduction équivalente de la dette publique
de l’année. Ce gain initial se résorbe progressivement, au fur et à mesure
que les coupons versés à des taux supérieurs aux taux de marché accroissent
le besoin de financement de l’État.
L’augmentation significative du montant des primes nettes d
es
décotes encaissées par l’État depuis plusieurs années résulte de la
combinaison de deux facteurs.
Le premier facteur résulte de la baisse tendancielle des taux d’intérêt
au cours des dernières années. En adoptant une stratégie de suivi de la
demande du
marché, l’AFT a été conduite à réémettre fréquemment sur des
souches anciennes porteuses de coupons élevés alors même que le taux de
marché était plus faible. Ce mouvement a été amplifié quand les taux sont
devenus négatifs car on ne peut émettre des titres portant des coupons
négatifs. Ainsi, même des émissions sur des souches nouvelles peuvent
générer des primes à l’émission dès lors que le taux de marché est négatif.
Une grande partie des primes depuis 2015 provient ainsi des taux de
marché négatifs.
GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE
DE L’ÉTAT
33
Graphique n° 10 :
primes et
décotes et taux d’intérêt
Source : Cour des comptes à partir de données de l’AFT et de la Banque de France
Le second facteur résulte de la politique de la Banque centrale
européenne. L’activation des programmes d’achats de titres publics (en
2015 via le
Public Sector Purchase Programme
–
PSPP, ou en 2020 avec
le
Pandemic Emergency Purchase Programme
–
PEPP) a eu un effet sur
les taux d’intérêt mais elle a également créé une pression à la réémission
de titres anciens. En effet, pour ne pas créer de distorsion sur le prix des
titres français pour certaines maturités, la BCE est intervenue sur
l’ensemble des points de la courbe des taux, ce qui a eu pour effet
d’alimenter la demande pour les titres plus anciens auprès des
spécialistes
en valeurs du Trésor (SVT) car certaines maturités ne sont pas couvertes
par les titres nouveaux émis chaque année. Cette réémission de titres sur
d’anciennes souches de référence, dont le coupon a été fixé selon les
conditions de taux qui prévalaient deux, trois, cinq ou dix ans auparavant,
constitue ainsi un autre élément expliquant le dynamisme de la génération
de primes à l’émission certaines années (2015 et 2020)
.
34
COUR DES COMPTES
Graphique n° 11 :
primes nettes des décotes et variation de la dette
des administrations publiques détenue par la Banque de France
Source : Cour des comptes à partir de données de l’AFT et de la Banque de France
L’encaissement de primes a pour conséquence de réduire, de
manière temporaire, le ratio de la dette publique rapportée au PIB
6
. Selon
les estimations réalisées par
l’AFT à la demande de la Cour, l’ensemble
des primes reçues par l’État jusqu’en 2020 net de leur amortissement a
conduit, toutes choses égales par ailleurs, à diminuer
l’encours de la dette
publique d’environ
4,3 points de PIB fin 2020
7
. Cet effet mécanique est la
conséquence de la stratégie de suivi de la demande du marché. Il ne résulte
6
Un titre émis sur une souche ancienne à taux nominal plus élevé que celui du marché
a une valeur supérieure à sa valeur faciale en raison de la perspective
pour l’investisseu
r
de bénéficier pendant sa durée de vie d’un taux d’intérêt supérieur à celui
du marché au
moment de l’émission. Les investisseurs sont alors prêts à payer une prime
au moment
de l
’émission correspondant à l’écart entre
la valeur actuarielle de la somme des intérêts
attendus et celle des intérêts de marché. En comptabilité nationale, les titres émis sur
souches anciennes
sont retracés à leur valeur d’émission, plus faible qu’une OAT
qui
aurait été émise au taux de marché
parce qu’elle tient compte de cette
prime supportée
par les investisseurs. Cet effet sur le ratio de dette publique est temporaire au fur et à
mesure du paiement des coupons plus élevés de la souche ancienne sur laquelle le titre
a été émis.
7
. Le chiffre de 4,3 points de PIB est obtenu en
additionnant pour chaque année jusqu’en
2020 le montant des primes nettes des décotes auquel est soustrait leur amortissement.
Ce dernier représente la différence entre les charges d’intérêts supportées par le budget
de l’État et retracées en comptabilité budgétaire d’une part, et les charges d’intérêt
évaluées en comptabilité nationale d’autre part.
Le chiffre pour 2021 sera connu après
l’arrêté des comptes de l’État en comptabilité générale.
GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE
DE L’ÉTAT
35
pas, selon l’analyse de la Cour
8
, d’une volonté de l’AFT de réduire en
apparence le niveau de la dette.
Si l’encaissement de primes a pour contrepartie le versement chaque
année de coupons plus élevés, l’impact sur la charge d’intérêts est
neutralisé en comptabilité nationale mais il est réel en comptabilité
budgétaire.
V -
Une dette en très forte augmentation
En 2021
, en raison d’un déficit budgétaire à financer
très élevé
(171 Md
€),
la dette a progressé de 144
Md€ pour s’établir à
2 145
Md€ à
la fin de l’année.
Tableau n° 7 :
e
ncours de dette de l’État (en Md€)
2019
2020
2021
Encours de dette
1 822,8
2001,0
2 145,1
Titres à
moyen/long
terme
1 715,9
1839,4
1 989,7
dont titres
indexés
226,4
220,1
236,4
Titres à court
terme
106,9
161,6
155,4
Part des titres
indexés
12,4 %
11,0 %
11,0 %
Part des titres à
moyen/long
terme
94,1 %
91,9 %
92,8 %
Source : Agence France Trésor
Le déficit budgétaire en 2021 (-
171 Md€) est très proche du d
éficit
budgétaire stabilisant le poids de la dette dans le PIB (-16
5 Md€). L’écart
au déficit stabilisant, qui avait atteint un montant très élevé en 2020
(272
Md€) a
ainsi fortement diminué
par rapport à l’année précédente
,
8
Cf. Cour des comptes,
La gestion de la dette publique et l’ef
ficience du financement
de l’État par l’Agence France Trésor
, Communication à la commission des finances,
de l’économie générale et du contrôle budgétaire de l’Assemblée nationale, février
2022.
36
COUR DES COMPTES
puisqu’il n’est plus que de
6 M
d€.
Cet
te particularité d’un
écart au déficit
stabilisant faible en 2021 et nettement inférieur à celui de 2020, malgré un
déficit budgétaire proche (171 Md€ après 178 Md€)
,
s’explique par la
croissance du PIB en valeur (+8,2 % en 2021 après -5,2 % en 2020). Ce
rebond marqué du PIB diminue ainsi le poids de la dette héritée du passé.
D’après les données présentées dans la LFI pour 2022, l’écart au
déficit budgétaire stabilisant devrait à nouveau augmenter en 2022 sous
l’effet du ralentissement de la croissance du PIB en valeur et d’un déficit
bu
dgétaire demeurant à un niveau élevé (153,8 Md€).
À titre illustratif et
sur la base des données de la LFI pour 2022, l
’écart du solde budgétaire au
solde budgétaire stabilisant pourrait ainsi s’établir à
74
Md€,
soit un niveau
supérieur à celui observé en moyenne entre 2010 et 2019 (47
Md€)
.
Graphique n° 12 :
écart au
déficit budgétaire stabilisant (Md€)
Source : Cour des comptes
. L’estimation pour 2022 est
fondée sur les prévisions de
déficit budgétaire et de PIB en valeur de la LFI pour 2022.
La baisse des émissions de dette à court terme (-6,2
Md€)
alors
qu’une hausse était inscrite
dans la LFI (+19,5
Md€) a
fait diminuer la part
de ces titres dans l’encours d
e dette à la f
in de l’année 202
1 à 7,2% après
8,1 %, en 2020. Ce niveau demeure toutefois inférieur au regard de la
moyenne de ces 20 dernières années.
GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE
DE L’ÉTAT
37
Graphique n° 13 :
part de la dette à court terme (BTF)
Source : Agence France Trésor
La maturité moyenne de la dette française était de 8,4 ans en 2021
après 8,2 ans en 2020, en forte augmentation par rapport à 2003 (5,8 ans).
L’évolution observée en 2021 résulte de la diminution de la part relative
des BTF dans l’encours total, mais aussi de l’allongement de près d’un an
de la maturité moyenne des titres de moyen-long terme émis en 2021 (12,4
années contre 11,5 années).
En 2020, la durée de vie moyenne de la dette française se situait au-
dessus de celle des pays de la zone euro comparables à la France comme
l’Allemagne (6,7 ans), l’Espagne (7,
7
ans), l’Italie (7 ans) et les Pays Bas
(7 ans et 3 mois). Elle est en revanche nette
ment inférieure à l’Autriche
(10,1 ans) et au Royaume Uni (17,8 ans). Tous les pays européens ont vu
cette durée de vie moyenne augmenter depuis 20 ans.
Cette maturité moyenne
ne peut pas varier fortement d’une année
sur l’autre car 90
% du stock des titres de moyen et long termes est
inchangé d’une année sur l’autre.
En revanche la maturité des titres de
moyen et long termes émis chaque année est plus élevée. Elle est supérieure
à 10 ans depuis 2016 et atteignait 11,5 années en 2020 et 12,4 années en
2021. Par ailleurs, la France a le plus gros encours de dette de maturité
supérieure à 30 ans au sein de la zone euro. D’un montant proche de
100
Md€, elle représente près 50
% de l’encours à plus de 30 ans en zone
euro.
Cet allongement de la maturité traduit l’évolution de la demande des
investisseurs dans un univers de taux d’intérêt bas, notamment à la suite de
la mise en place des programmes d’a
chats
d’actifs de la BCE.
38
COUR DES COMPTES
Graphique n° 14 :
durée de vie moyenne de la dette (en années)
Source : Agence France Trésor
Si le dernier titre de dette actuellement sur le marché doit être
remboursé en 2072, une partie importante de la dette arrivera à échéance
dans les toutes prochaines années. Ainsi, environ un quart (24,6 %) de la
dette à moyen et long terme devra être remboursé
d’ici
fin 2024, et près de
la moitié (49,2
%) arrivera à échéance d’ici
fin 2027, puis plus des deux
tiers (68,5
%) à l’horizon 2030
. En volume, cela correspond à plus de
1 360
Md€ de dette négociable à amortir d’ici la fin de la décennie, un
montant supérieur à ce qui était encore l’encours de dette total en 20
14. En
procédant à des rachats
de titres arrivant à échéance l’année en cours
(
N
),
et les deux années suivantes
(
N+1
et
N+2
) comme elle le fait de manière
régulière
, l’AFT
pourra néanmoins rééchelonner
les arrivées à l’échéance
substantielles des prochaines années.
GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE
DE L’ÉTAT
39
Graphique n° 15 :
dette de moyen-
long terme arrivée à l’échéance
par année
(Md€)
Source : Cour
des Comptes à partir de données de l’Agence France Trésor
Note : Les calculs sont basés sur la dette de moyen long-terme et excluent les encours de BTF pour
l’année
2022. Des émissions de long terme arrivant à échéance en 2060, 2066 et 2072 pour des
montants de 16,7
Md€, 14,1
Md€ et 8,5
Md€ respectivement
ne figurent pas sur le graphique.
En 2021,
l’AFT a procédé à des rachats anticipés d’OAT
à hauteur
de 25,1
Md€
(dont 19,6
Md€ de titres à échéance 20
22 et 5,5
Md€ de titres
à échéance 2023
9
).
Ce volume de rachat est inférieur à celui de 2020 (30,5
Md€) ainsi
qu’à la moyenne de la décennie passée, y compris
en faisant abstraction
des deux années 2015 et 2019, où les rachats avaient atteint des niveaux
exceptionnellement élevés
10
. Pour rappel ces rachats, neutralisés dans le
tableau de financement adopté en LFI, ne donnent pas lieu à un objectif en
LFI
11
.
9
Les primes payées sur ces rachats (écart entre le prix payé au rachat et la valeur faciale
des titres, enregistrées en comptabilité en « pertes sur rachats ») se sont élevées au total
à -0,3
Md€ en 2021
.
10
Les rachats très élevés observés en 2015 s’expliq
uent par les rachats de titres arrivant
à échéance l’année en cours (pour 20 Md€, dont 12 Md€ de BTF).
Ces rachats de titres
arrivant à échéance en année N
s’apparentent à des placements de la trésorerie. Ils
s’insèrent donc dans la stratégie générale de placement de la trésorerie de l’État.
Selon
l’AFT, c
es rachats infra-annuels étaient en 2015 intéressants dans un contexte où les
taux sur titres d’État à court terme restaient supérieurs à la rémunération des liquidités.
11
Par ailleurs, aucun montant prévi
sionnel n’est transmis à ce titre aux SVT.
40
COUR DES COMPTES
Graphique n° 16 :
r
achats de titres de dette (en Md€)
Source : Agence France Trésor
En 2021, ces opérations de rachats ont par ailleurs été effectuées à
un rythme relativ
ement linéaire tout au long de l’année, à la différence de
2020 où ils avaient été réalisés pour l’essentiel au second semestre, et de
2019 où 45
% des rachats avaient à l’inverse déjà eu lieu dès la fin mars
.
De telles opérations permettent à l’AFT de
racheter les titres les plus
coûteux et de lisser les tombées de souches à venir en rachet
ant à l’avance
les tombées de souche les plus importantes. À défaut de procéder à un tel
lissage, l’AFT
devrait mener une gestion de trésorerie plus délicate en
cours d
’année
, avec des émissions très élevées certains mois, certaines
tombées de souches représentant des volumes de plus de 40
Md€ alors que
l’AFT a émis
des montants de
l’ordre de
24
Md€
en moyenne par mois en
2021.
L’achat de titres publics par la BCE dans l
e cadre de ses opérations
de politique monétaire non conventionnelle a fait reculer la part détenue
par les non-résidents depuis 2014
12
.
La réduction du programme d’achats
nets de la BCE puis son arrêt fin 2018, conjugués
au maintien d’une
demande soutenue
et variée de la part d’investisseurs internationaux, ont
12
La part de la dette détenue par la Banque de France dans le cadre des programmes
d’achats de la BCE est classée dans la dette détenue par les résidents. Elle comprend
des titres qui auparavant étaient détenus par des résidents ou des non-résidents. Les
achats de dette par la Banque de France font donc mécaniquement diminuer la part
détenue par des non-résidents.
0
10
20
30
40
50
60
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
Rachats de titres de maturité n
Rachats de titre de maturité supérieure à 1 an
GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE
DE L’ÉTAT
41
contribué au relèvement de la part détenue par les non-résidents en 2019.
La part détenue par les non-résidents a de nouveau reculé en 2020 et 2021
avec la mise en place du n
ouveau programme d’achats
d’actifs (PEPP).
Graphique n° 17 :
proportion de non-résidents
dans l’encours
total
de la dette
et dans l’encours
hors opérations de rachats de la BCE
Source :
Cour des comptes à partir de données de l’
Agence France Trésor et de la
Banque de France
À fin décembre 2021, la Banque de France détenait pour 703,2
Md€
de titres émis par des administrations publiques, sur un total de 2 813
Md€
de titres en circulation, soit une proportion de
l’ordre de
25 %, en
augmentation de près de 5 points par rapport à la fin de l’année 2019
. Après
s’être quasiment stabilisés à
un montant légèrement inférieur à 400
Md€
en 2018 et 2019, les montants détenus par la Banque de France ont en effet
fortement augmenté depuis la
fin de l’année 2019, du fait du nouveau
programme massif d’achats de titres mis en œuvre au début de la crise
sanitaire et augmentée depuis.
42
COUR DES COMPTES
Graphique n° 18 :
dette des administrations publiques détenue par
la Banque de France (en Md€)
Source : Banque de France
VI -
La soutenabilité à court et moyen terme
Les hypothèses de remontée des ta
ux d’intérêt de la LFI pour 202
2
(le taux des BTF à trois mois
s’établirait à
-0,5 % en moyenne annuelle et
le taux des OAT à dix ans atteindrait 0,75
% à la fin de l’année 202
2)
apparaissent en ligne avec les évolutions
de début d’année
13
. Néanmoins,
les éléments disponibles en février 2022
14
conduisent à anticiper une
inflation légèrement supérieure à
l’hypothèse retenue en loi de finances
initiale. Cependant la charge de la dett
e a fait l’objet d’une réévaluation par
l’intermédiaire d’un amendement augmentant de 1,1 Md€
15
le niveau des
crédits ouverts pour le programme 117. Par ailleurs, les incertitudes
récentes créées par la situation géopolitique
en Europe de l’Est
pourraient
13
À la mi-février 2021, le taux des BTF 3 mois atteignait -0,66 % et celui des OAT à
10 ans 0,67 %.
14
Dans sa note de conjoncture de décembre 2021, l’Insee attend, à la fin du premier
semestre 2022, une inflation sous-jacente en France de 2,2 % en glissement annuel alors
qu’elle est prévue à 1,5
% en LFI pour l’année 2022 dans son ensemble.
15
Cette révi
sion se décompose en un effet de + 0,8 Md€ dû à une révision à la hausse
des prévisions d’inflation en zone euro et un effet de + 0,3 Md€ lié à l’intégration des
émissions de dette et des taux effectivement constatés entre début septembre et mi-
octobre 2021,
GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE
DE L’ÉTAT
43
a
voir des conséquences sur la dynamique des taux d’intérêt qu’il est
difficile d’appréhender à ce stade.
La forte croissance de la dette de l’État
entre 2008 et 2019 (+ 98 %)
l’a rendu
très vulnérable à une hausse des taux. La hausse observée en 2020
et 2021 a renforcé à nouveau cette sensibilité.
L’AFT estime qu’une hausse
d’un point des taux d’intérêt renchérirait la charge d’intérêts de 2,5
Md€ la
première année, 6,1
Md€ la deuxième
année et 29,5
Md€ à l’horizon
de 10 ans
16
.
L’impact de ce choc à un horizon de 10 ans est ainsi nettement
plus élevé que celui estimé fin 2019 (+21,2 Md€).
À titre d’illustration,
cette hausse de 29,5
Md€ à l’hori
zon de dix ans reviendrait, toutes choses
égales par ailleurs, à augmenter de 76 % le poids de la charge de la dette
par rapport au niveau attendu en LFI pour 2022.
Graphique n° 19 :
Impact d’un choc de taux à la hausse de 1
% (+100
points de base)
sur la charge d’intérêts
maastrichtienne
17
de la dette
de l’État (Md€)
Source : PAP du programme 117
–
Charge de la dette et trésorerie de
l’État
- annexé au PLF
pour 2020 et pour 2022.
16
L
es rachats, par ailleurs nécessaires pour lisser les tombées d’échéances de souches
de volume important, sont susceptibles d’accélérer légèrement l’effet affiché d’une
hausse des taux sur la charge d’intérêts.
17
La charge d’intérêts maastrichtienne d
iffère de la charge budgétaire sur la
comptabilisation des intérêts versés (les charges sont enregistrées en continu et non au
moment de leur décaissement), des primes et décotes qui font l’objet d’un étalement sur
la durée de vie du titre quand la comptab
ilité budgétaire n’enregistre aucune écriture et
de la charge d’indexation du capital des titres indexés.
44
COUR DES COMPTES
VII -
En 2021, la France première entité
émettrice de « titres verts »
En 2021
, l’AFT a poursuivi s
es émissions de «
l’obligation verte
»
auxquelles elle avait procédé pour la première fois en 2017.
Plus précisément, elle a procédé à la réémission, par deux
adjudications tenues en février puis en novembre 2021, du titre initial qui
avait déjà fait l’objet d’abondements successifs au cours des années
précédentes. L’encours de cette première OAT verte a
tteint ainsi 30,9
Md€
à la fin 2021, contre 27,4
Md€ en 2020. En mars 2021, l’AFT a en outre
lancé une deuxième obligation verte par voie de syndication
18
, avant de la
réémettre en juin puis en septembre de la même année, pour un montant
cumulé de 11,4
Md€.
Ainsi, le total de la « dette verte » française atteint
désormais 42,3
Md€ au 31 décembre 2021, confirmant le statut de la
France comme première entité débitrice de « titres verts », devant la
Kreditanstalt für Wiederaufbau
(KFW) et la Banque européenne
d
’investissement (BEI) dont les encours respectifs d’obligations vertes
s’élèvent à 33,5 Md€ et 33,3
Md€.
L’association
de
financements
à
des
dépenses
à
finalité
environnementale
, qui caractérise l’
« OAT verte », demeure toutefois
conventionnelle dans la mesure où ces dépenses sont réalisées dans le cadre
du budget de l’État, sans sources de financement affectées, conformément
au principe d’universalité budgétaire.
Par ailleurs, contrairement aux titres
indexés sur l’inflation, les OAT vertes sont des inst
ruments de financement
très semblables aux OAT standards. En tant qu’instrument financier, la
seule différence avec une OAT standard est en effet que le montant qui
peut être émis chaque année est plafonné par le niveau des dépenses vertes
éligibles à ce type de financement.
Une telle contrainte de plafonnement aurait pu avoir des
conséquences sur la liquidité de ces titres et par conséquent les rendre plus
coûteux que des OAT. Le choix fait par l’AFT de les placer à des maturités
proches de 20 ans a permi
s à ces titres d’avoir une liquidité semblable à
une OAT de maturité similaire. En effet, à cet horizon, les abondements
annuels qui peuvent être faits sur l’OAT verte, plafonnés par le montant
18
Le choix d’émettre une nouvelle OAT verte, en sus des réabondements de celle
préexistante, tient notamment à la circonstance qu’à partir de 2021, le
s dépenses de
l’État en soutien aux énergies renouvelables, auparavant financées par une taxe affectée
dans le cadre du compte d’affectation spéciale
Transition énergétique
, sont devenues
éligibles à un financement par de la dette verte du fait de leur réintégration dans le
budget général.
GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE
DE L’ÉTAT
45
des dépenses éligibles, fixé à 15 Md€ en 2021, correspondent a
ux
abondements annuels qui auraient été effectués pour une OAT standard de
même maturité, ce qui garantit une liquidité similaire entre l’OAT verte et
l’OAT standard de même maturité.
La demande très dynamique sur ce type de produits a pu les rendre
légèr
ement moins coûteux que les OAT standard. Selon l’AFT, ce gain
pourrait être de l’ordre 1 à 2 points de base et donc permettre des gains de
charges d’intérêt de l’ordre de 80 M€ à 160 M€ annuels, soit un montant
nettement supérieur aux coûts de ce type d’é
mission (évaluation des
dépenses éligibles, fonctionnement du secrétariat général du comité
d’évaluation, ressources nécessaires au sein de l’AFT, etc.).
L’AFT envisage de poursuivre cette diversification en 2022 avec, si
les conditions de marché le permet
tent, l’émission d’une OAT verte
indexée sur l’inflation.
46
COUR DES COMPTES
Chapitre II
Les grandes composantes des dépenses
et des recettes
I -
Pour la première fois depuis 2011, une hausse
de la charge de la dette de l’
État dû à
l’augmentation de l’inflation
L’exécution des dépenses
et recettes du compte de commerce liées
aux opérations relatives à la dette s’établit comme suit :
GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE
DE L’ÉTAT
47
Tableau n° 8 :
dépenses et recettes relatives à la dette
Dépenses
M€
Recettes
M€
Intérêts des OAT
hors OAT indexées
32 334
Coupons courus
des OAT
639
Intérêts des OAT
indexées
2 522
Produit des
émissions de BTF
à taux d'intérêt
négatif
1 034
Charge d'indexation
du capital des OAT
indexées
3 022
Frais et
commissions
43
Intérêts sur les
instruments fi. à
terme au titre de la
couverture des
risques affectant
les titres d'État et
les dettes reprises
par l'État
4
Intérêts sur autres
dettes reprises par
l'État
773
Total
38 693
1 678
Solde avant
équilibrage
37 016
Versement du
budget général
37 016
Solde après
équilibrage
0
Source : Agence France Trésor
Les dépenses relatives à la charge de la dette représentent un total
de 38,7
Md€ et correspondent essentiellement à des dépenses d’i
ntérêts
d’OAT à long terme (
35
Md€) et de la capitalisation des intérêts des
obligations indexées (3,0
Md€). À l’inverse, le compte spé
cial enregistre
des recettes de coupons courus (correspondant aux reprises des provisions
de l’ann
ée précédente), à hauteur de 0,6
Md€, et des recettes liées aux taux
d’in
térêts négatifs sur les BTF (1,0
Md€).
Cette charge de la dette a augmenté de 2,0 Md
€
entre 2020 et 2021.
Cette augmentation est essentiellement liée à
l’impact de l’accroissement
du volume de dette de l’État
19
(+0,9
Md€)
reflétant essentiellement
l’augmentation de l’encours de dette à moyen et long terme
et à
19
Pour évaluer l’effet volume, l’AFT
considère l’accroissement de l’encours de dette
au cours de l’année précédant l’année
évaluée, en y appliquant le taux de coupon des
titres émis cette même année. L
’accroissement de la
dette à moyen-long terme pris en
compte dans le calcul est de
129,5 Md€ (260
Md€ émis net des rachats, moins 130,5
Md€ amortis
en 2020). Sur la base
d’un coupon moyen de 0,69% pour les titres émis
en 2020, cela représente une charge d’intérêt supplémentaire de 0,9 Md€ en 2021.
48
COUR DES COMPTES
l’augmentation de l’inflation
(+2,6
Md€).
Ces effets ont plus que compensé
l’impact de la poursuite de la baisse des taux d’intérêt
20
(-1,5
Md€).
Graphique n° 20 :
c
ontributions à l’évolution de la charge d’intérêts
(en Md€)
Source : Agence France Trésor
De ce fait, le taux apparent de la dette, c’es
t-à-dire le rapport entre
la charge totale d’intérêts versées et la dette totale émise par l’Ét
at,
s’est
établit à 1,7 % en 2021 comme en 2020.
20
Pour évaluer l’effet taux, l’AFT
applique au volume amorti en 2020 (130,5 Md€)
l’écart entre le taux de coupon moyen des titres amortis en 2020 (1,77%) et le taux de
coupon moyen des titres émis en 2020 (0,69%). Le refinancement en 2020 à des taux
de coupon moindres aboutit ainsi à un allègement de la charge de coupon de 1,4 Md€
en 2021.
GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE
DE L’ÉTAT
49
Graphique n° 21 :
e
ncours de dette de l’État, charge d’intérêts et
taux apparent associés
Source : Agence France Trésor
Au cour
s de la dernière décennie la charge d’intérêts a été très
souvent inférieure en exécution par rapport à la prévision inscrite en LFI
du fait notamment de prévisions de taux d’intérêt qui se sont révélées
systématiquement supérieures aux observations.
50
COUR DES COMPTES
Une
charge d’intérêts en exécution fréquemment inférieure à la
prévision au cours de la dernière décennie
Depuis 2010, la charge de la dette et de la trésorerie a été
fréquemment inférieure en exécution à ce qui était inscrit en prévision en
LFI. Entre 2010 e
t 2021, l’exécution a été supérieure à la prévision
seulement quatre années. L’écart s’est établi en mo
yenne à -
1,4 Md€ au
cours de la période considérée. La sous-exécution a été particulièrement
forte entre 2012 et 2016 puis en 2019 et 2020.
Cette exécution en dessous de la prévision inscrite en LFI s’explique
pour l’essentiel par les hypothèses de taux d’intérêt retenues en loi de
finances initiale. Au cours de la dernière décennie, les taux à 10 ans se sont
révélés systématiquement en-dessous de ceux qui ont été utilisés pour
élaborer la prévision de la charge d’intérêts (
cf
. tableau)
21
. En moyenne sur
la période 2012-2021, les taux à 10 ans ont été inférieur de 1 % par rapport
aux prévisions retenues en LFI.
Graphique n° 22 : c
harge d’intérêts en prévision et en exécution
(2010-2021)
Source : LFI, diverses années
21
Un constat similaire est établi en comparant les prévisions de taux à court terme
(BTF) à leur réalisation.
GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE
DE L’ÉTAT
51
Tableau n° 9 :
h
ypothèses de taux d’intérêt à 10 an
s et taux observés
En %
2012
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
moyenne
Prévision
3,7
2,9
3,3
2,2
1,9
0,9
1,5
2,2
0,7
0,7
2,0
Observé
2,7
2,2
1,9
0,9
0,5
0,8
0,8
0,1
-0,2
0,0
1,0
Écart
-1,0
-0,7
-1,4
-1,3
-1,4
-0,1
-0,7
-2,1
-0,9
-0,7
-1,0
Source : LFI, diverses années et Banque de France
II -
Des opérations de trésorerie qui continuent
d’afficher un solde dégradé
La gestion de la trésorerie vise à minimiser les émissions tout en
permettant l’exécution des dépenses et le maintien d’un solde crédit
eur du
compte du Trésor à la Banque de France. Le résultat des opérations de
trésorerie est constitué du résultat des opérations de placement d’une part
et de la rémunération des fonds déposés au Trésor d’autre part (dépôts des
correspondants et dotations non consommables des PIA notamment).
L’exécution des dépenses et des recettes du compte de commerce
liées aux opérations relatives à la trésorerie s’établit comme suit :
52
COUR DES COMPTES
Tableau n° 10 :
dépenses et recettes relatives à la gestion de la
trésorerie
Dépenses
M€
Recettes
M€
Gestion de la trésorerie : intérêts des
comptes de dépôts des
correspondants du Trésor et
assimilés
163
Gestion de la trésorerie :
rémunération des opérations
effectuées sur le marché
interbancaire, avec les États de la
zone euro et de pensions livrées
0
Gestion de la trésorerie : intérêts
résultant des opérations effectuées
sur le marché interbancaire, avec les
États de la zone euro et de pensions
livrées
31
Gestion de la trésorerie : intérêts du
compte courant du Trésor à la
Banque de France
536
Recettes diverses
2
Rémunération des fonds non
consommables versés par l’État
751
Total
1 482
2
Solde avant équilibrage
1 480
Versement du budget général
1 481
Solde après équilibrage
0
Source : Agence France Trésor
Le solde des opérations de trésorerie
s’est légèrement dégradé en
2021 (- 20
M€), poursuivant une tendance continue sur les derniers
exercices.
A -
Les facteurs liés au
maintien de taux d’intérêt
négatifs et à la rémunération de dotations pour le
financement des investissemen
ts d’avenir
La poursuite de cette baisse est due, en premier lieu, à la diminution
des taux d’intérêt (négatifs) à court terme
, laquelle a renchéri le coût de la
trésorerie déposée par l’État à la Banque de
France, passé de 485
M€ à
536
M€ entre 2020 et 20
21. En 2019, ce coût était de 194
M€, soit un
niveau plus de deux fois et demi inférieur à celui constaté fin 2021. Fin
20
20, la trésorerie active s’éle
vait à 113,2 Md
€, contre
51,0 Md
€ fin 2019.
Elle résultait essentiellement du compte courant du Trésor à la Banque de
France, dont la position avait augmenté de 63,4 Md
€ par rapport à fin 2019
pour atteindre 115,2 Md
€ au 31 décembre 2020.
Au 31 décembre 2021, le
solde était de 119,6
Md€.
GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE
DE L’ÉTAT
53
Sur une plus longue période, cette dégradation est essentiellement
liée
à la baisse des taux d’intérêt et aux conditions de rémunération de la
trésorerie accordées à certains déposants. Les taux négatifs conduisent à
« rémunérer négativement
» les dépôts de l’État placés à la Banque de
France ou dans d’autres institutions
financières.
Graphique n° 23 :
solde des opérations de trésorerie
Source : Cour des comptes à partir de données Agence France Trésor
Par ailleurs, les dépôts de correspondants effectués dans le cadre de
programmes d’investissement public en faveur de l’enseignement
supérieur et de la recherche
–
Plan Campus à partir de 2008, puis
programmes d’investissement d’avenir (PIA) 1 et 2 en 2010 puis en 2014
conservent des conditions très favorables de rémunération (4 % pour le
Plan Campus et respectivement 3,4 % et 2,5 % pour les PIA 1 et 2)
22
dans
un contexte de taux très bas. De ce fait, le solde des opérations de trésorerie
est négatif depuis 2008. Pour 2021, les intérêts acquittés au titre de la
rémunération des dotations non consommables précitées ont atteint
751
M€, soit près de 51
% des dépenses liées à ces opérations.
De nombreuses conventions entre l’État et les opérateurs de PIA et
de Plan Campus, pour un total 22
Md€ de trésorerie déposée sur les
comptes de l’État sous la forme de dotations non consommables, devaient
arriver à échéance en 2020. Ces conventions ont été reconduites avant leur
22
Ces conditions de rémunération ont été fixées par des arrêtés du 15 juin 2010 (pour
le PIA 1 et le Plan Campus) et du 3 juin 2014 (pour le PIA 2).
54
COUR DES COMPTES
échéance aux mêmes conditions de taux, alors que les taux ont
significativement baissé depuis la mise en place de ces conventions.
Pour rappel, la Cour avait critiqué, dans les NEB précédentes et de
manière plus récente
23
, le traitement inadéquat de ce vecteur de
financement budgétaire. En effet, la recondu
ction à l’identique
des
conditions établies par ces conventions montre que ces versements de
trésorerie correspondent bien à des dotations fixes et reconductibles à ces
organismes
, plutôt qu’à la rémunération d’un placement financier soumis
à
des
variations
économiques.
Cette
déconnexion
est
rendue
particulièrement manifeste dans le contexte actuel de faibles taux d’intérêt.
Il est vrai qu’il a été ensuite mis fin, à compter de la troisième vague des
PIA, à ce mécanisme des dotations non consommables, et que celui-ci
présentait, en affichage, la garantie de perspectives financières nominales
stables sur plusieurs années consécutives pour les affectataires de ces
fonds.
B -
Le facteur de l
’évolution des dépôts des
correspondants du Trésor
Si le principe général posé par le décret n° 2012-1246 du
7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique
(GBCP) est celui de l’absence de rémunération des fonds déposés au
Trésor, les déposants obligatoires (collectivités locales et établissements
publics), sur autorisation expresse ou de droit
24
, et les déposants facultatifs
peuvent placer leurs liquidités sur un ou plusieurs comptes à terme (CAT)
ou sur un compte de placement rémunéré (CPR). Les modalités de
rémunération de ces comptes sont fixées conformément aux dispositions
de l’arrêté du 24 janvier 2013
25
.
Ces comptes sont rémunérés en référence aux taux courts avec un
plancher à 0
% qui s’applique actuellement
, si bien que ces comptes ne sont
aujourd’hui pas rémunérés. Certains CPR présentant des moda
lités de
fonctionnement spécifiques disposent de conditions de rémunération
ad
hoc
, en vertu de décisions ministérielles ou de conventions bilatérales.
23
Cf. «
La mise en œuvre du programme d’investissement d’avenir
», relevé
d’observations définitives publié en octobre 2021.
24
S
’agissant des fonds libres provenant de libéralités ou d’aliénation d’éléments du
patrimoine.
25
Arrêté du 24 janvier 2013 portant application des articles 43 à 47, 134, 138, 141, 142,
143, 195 et 197 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion
budgétaire et comptable publique et encadrant les comptes de disponibilité et les dépôts
de fonds au Trésor.
GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE
DE L’ÉTAT
55
En 2021
, les intérêts payés par l’État aux déposants
ont diminué
d’environ 20
M€ par rapport à 2020
, pour un total de 163,5
M€, mais ce
total masque des évolutions différenciées selon les catégories de déposants.
Tableau n° 11 :
i
ntérêts des comptes des déposants (M€)
2017
2018
2019
2020
2021
Bpifrance
47,8
42,6
90,7
91,9
113,9
Banques centrales
africaines
38,5
54,8
62,6
68,8
38,2
Compte de dépôt de
l’IEOM
39,2
29,8
23,0
22,0
0,0
Autres
0,3
0,3
0,3
0,3
0,3
Total
125,8
127,6
176,7
183,0
163,5
Source : Agence France Trésor
Dans un sens, on constate ainsi l’accroisseme
nt de 22
M€ des
intérêts versés par l’État à la Banque de France au titre du placement de la
trésorerie de Bpifrance sur le compte courant du Trésor
–
les taux d’intérêt
étant négatifs. La rémunération de Bpifrance avait plus que doublé en 2019
par rapport aux années précédentes,
du fait de l’ouverture d’un compte de
dépôts rémunéré en août 2018 pour recevoir les sommes allouées au Fonds
pour l’innovation et l’industrie
(FII). La dotation en numéraire du FII, qui
était initialement de 1,6 Md€, a été abondée
d’une dotation complémentaire
de 1,9
Md€ en juillet 2020, soit un total de 3,5
Md€
26
. Sa rémunération a
été fixée à 2,50 %
par l’arrêté du 7 août 2018, qui prévoit cependant une
révision à la baisse à partir de 2023 dans le cas où le taux des OAT à 50 ans
serait inférieur à 2,50 % à cette date. En application de ce taux, le montant
des intérêts acquittés au titre du FII s’est élevé à 87,5
M€ en 2021.
Par ailleurs, Bpifrance
dépose des fonds sur le compte de l’État à la
Banque de France afin de gérer sa prop
re trésorerie. Il s’agit principalement
des « fonds de garantie » (actifs sécurisant des garanties accordées par
l’établissement
) dont les dépôts
au Trésor peuvent l’être sur des comptes à
terme, ouverts pour une durée déterminée (entre 2 ans et 15 ans), en étant
rémunérés au taux des emprunts d’État sur cette maturité
27
au moment de
l’ouverture du compte. La maturité moyenne des comptes ouverts ne peut
dépasser 6 années. Lorsque ces comptes arrivent à échéance, Bpifrance
peut replacer les fonds ainsi libérés sur de nouveaux comptes à échéance.
26
La dotation en numéraire ne représente qu’une fraction de la valeur totale de ce fonds,
qui est constitué pour l’essentiel d’actions cotées des sociétés
EDF et Thalès, dont les
seuls revenus issus des dividendes sont consommés.
27
Taux « TEC 2 » à « TEC15 ».
56
COUR DES COMPTES
Cependant, compte tenu du caractère négatif des taux, aucun nouveau
compte à échéance n’a été ouvert
en 2021, comme au cours des quatre
années précédentes. Ces fonds restent déposés au Trésor, sur un compte à
vue rémunéré en référence aux taux BTF avec un plancher à 0 %.
À
l’inverse,
après avoir augmenté continument entre 2017 et 2020
du fait de la hausse de
leurs encours placés sur le compte du Trésor à la
Banque de France, la rémunération des dépôts des banques centrales
africaines
–
la Banque centrale des États d’Afrique de l’ouest (BCEAO),
la Banque centrale des États d’Afrique centrale (BEAC) et la Banque
centrale des Comores (BCC)
–
, qui est régie par des accords de coopération
entre la France et les États de ces unions monétaires, a diminué de 30
M€
en 2021. Cette baisse est imputable à la clôture du compte courant de la
BCEAO, conséquence de l’accord
de coopération monétaire signé le
21 décembre 2019
avec l’Union économique ouest
-africaine (UEMOA) :
ayant pris effet en novembre 2020, cet accord a permis à la BCEAO de
pouvoir disposer à cette date pleinement de son épargne
28
tout en
continuant à bénéficier de la garantie de l’État
.
Pour les deux autres banques centrales africaines, les conditions de
rémunération de leurs dépôts sont demeurées inchangées en 2021, à
savoir :
-
Pour la BEAC, le taux de la facilité de prêt marginal de la BCE
(maintenu inchangé à 0,25
%) jusqu’à la moitié des avoirs
extérieurs totaux avec un plancher à 0,75
% (qui s’applique
donc actuellement), et le taux principal des opérations de
refinancement de la BCE (actuellement à 0 %) au-delà ;
-
Pour la BCC, le taux de la facilité de prêt marginal de la BCE
(0,25 % actuellement) avec un plancher de 2,5 % qui trouve
donc à s’appliquer.
La rémunération de l’Institut d’émission d’outre
-mer (IEOM), qui
avait connu une diminution de près de 7
M€
entre 2018 et 2019 (du fait
d’une révision des conditions de dépôt qui faisait suite à une
recommandation de la Cour dans sa NEB 2017
29
), avant de se stabiliser
entre 2019 et 2020, n’est désormais plus retracée par le compte de
commerce 903 : la LFI 2021 a en effet opéré une rebudgétisation de cette
rémunération au sein du programme 305
–
Stratégies économiques
.
28
Jusqu’alors, la BCEAO devait déposer au moins la moitié de ses avoirs sur le compte
du Trésor à la Banque de France, soit 9,7
Md€ à fin 2020.
29
Le taux de rémunération a progressivement été ramené de 3,00 % en 2018 à 2,75 %
en 2019. De surcroît, depuis
le 1er janvier 2018, ce taux ne s’applique qu’au solde
créditeur jusqu’à 800
M€, le solde au
-delà de 800
M€ étant rémunéré à Eonia moins
0,15 % (avec un plancher à 0,00 %).
GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE DE
L’ÉTAT
57
Sur longue période, les dépôts des correspondants se sont nettement
accrus. Cet accroissement provient notamment des collectivités locales et
des établissements publics nationaux. Si une partie de l’explication pour
les établissements publics nationaux tient à l’interdiction d’endettement de
la plupart d’entre eux depuis 2014 et aux abondements liés aux
programmes d’investissements d’
avenir, plan Campus et fonds divers,
l’accroissement des dépôts des collectivités locales ne s’explique pas
simplement.
En 2020, les dépôts des correspondants ont poursuivi leur hausse par
rapport à 2019 (+27,8
Md€) principalement du fait des établissement
s
publics nationaux (+20,9
Md€)
30
, des collectivités locales (+6,1
Md€) et
dans une moindre mesure des hôpitaux (+2,1
Md€).
En 2021, les dépôts des correspondants ont poursuivi leur
augmentation à un rythme soutenu mais néanmoins plus limité
qu’en 2020
(+1
8,7 Md€)
.
L’accroissement de
s dépôts des collectivités locales
correspond globalement à une poursuite de la tendance passée
(+8,4 Md€)
,
l
’accroissement de la trésorerie des établissements publics nationaux
provient pour sa part notamment de flux en provenance de la Société du
Grand Paris (SGP) qui, comme en 2020, a profité
de l’environnement de
taux bas pour émettre par anticipation.
30
La trésorerie des établissements publics nationaux provenait en 2020 de flux
« exceptionnels » : accroissement des liquidités détenues par la Société du Grand Paris
(SGP), qui s’est davantage endettée sur des échéances de long terme que ce que
nécessitaient ses stricts besoins de trésorerie (+8,4
Md€). L’Agence de Services et de
Paieme
nt (ASP), opérateur gestionnaire des crédits de l’activité partielle, s’est retrouvé
fin 2020 avec un surcroît de trésorerie de 4,5
Md€, l’État lui ayant versé l’intégralité
des fonds pour financer l’activité partielle alors qu’une partie de ces dépenses s
ont
intervenues en 2021.
58
COUR DES COMPTES
Graphique n° 24 :
dépôts des correspondants
Source : Cour des comptes à partir de données DGFiP
Par ailleurs, une partie de cette augmenta
tion s’explique par la
centralisation de la trésorerie de nouveaux établissements publics sur le
compte du Trésor, avec notamment en 2021 l’intégration de
dix nouveaux
organismes aux correspondants du Trésor
31
.
La hausse des dépôts des correspondants du Trésor a ainsi contribué
à accroître les ressources de financement au cours des dernières années.
Dans un contexte où les besoins de financement de l’État vont rester élevés
dans les années à venir, la centralisation des trésoreries des organismes
publics sur le compte du Trésor devrait être poursuivie
et l’évolution des
dépôts des correspondants devra être regardée avec une vigilance
particulière dans les années à venir.
De manière générale et compte tenu des conditions de marché et de
taux bas, l’ensemble de
s rémunérations de ces comptes de correspondants,
voire l’absence de facturation de la trésorerie déposée sur ces comptes,
correspond à des subventions implicites aux organismes bénéficiaires. Il ne
31
Voir l’o
rdonnance n° 2020-1496 du 2 décembre 2020 et le décret n° 2021-29 du 14
janvier 2021. Les nouveaux correspondants dont la trésorerie est centralisée sont :
l’Institut de France et les cinq académies qui le constituent, l’
EPIC BPI France,
l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs
,
l’IFP
-Energies Nouvelles et
le Fonds de garantie de dépôts et de résolution. Par ailleurs, des mesures ont également
été prises pour renforcer la centralisation d’organismes qui d
éposaient déjà une partie
de leurs fonds au Trésor :
France Compétences, l’Agence nationale pour la rénovation
urbaine, le Commissariat à l’énergie atomique, la Monnaie de Paris, le Conseil
économique, social et environnemental, l’Institut national de l’au
diovisuel, certaines
autorités publiques indépendantes (l’Autorité des marchés financiers, la Haute Autorité
de santé, le Conseil supérieur de l’audiovisuel, le Haut Conseil du commissariat aux
comptes).
GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE
DE L’ÉTAT
59
peut être exclu que certains de ceux-
ci s’endettent à tau
x négatif tout en
déposant les fonds ainsi collectés au Trésor, sans que cela leur occasionne
des frais. Par ailleurs, dans un contexte de taux négatifs, l’État ne peut pas
bénéficier d’une rémunération sur ses dépôts et prêts, mais supporte plutôt
un coût pour placer ses excédents de trésorerie. Cette augmentation du coût
provient essentiellement de la hausse du coût des dépôts à la Banque de
France.
Tableau n° 12 :
r
émunération de la trésorerie de l’État (M€)
en M€
2017
2018
2019
2020
2021
Encours
moyen
2021
Taux
d'intérêt
moyen 2021
Pensions livrées
0,0
0,0
-0,2
0,0
0,0
0
0 %
Prêts interbancaires
-24,9
-35,2
-35,4
-32,3
-31,1
6 327
-0,49 %
Compte courant à la
Banque de France
-145,2
-151,4
-194,2
-485,0
-536,2
105 920
-0,50 %
Billets de trésorerie
ACOSS
-0,9
-2,0
-2,2
-2,6
0
0
0 %
Divers
2,1
0,0
-1,0
-3,7
-0,2
43
-0,47 %
Total
-168,9
-188,6
-233,2
-523,6
-567,5
Source : Agence France Trésor
(à partir de données provisoires sur l’encours moyen)
L’AFT place les fonds disponibles sur le compte unique du Trésor
à la Banque de France, par voie de mise en concurrence auprès de
contreparties bancaires, sous forme de prêts sans collatéral ou de prises en
pension de titres d’État. Ces liquidités peuvent également être utilisées
pour des prêts de court terme à des entités de la sphère publique ou à
certains Trésors ou institutions de la zone euro avec lesquels l’AFT a
conclu des accords d’échange de trésorerie. Les opérations de placement
obéissent à une politique de maîtrise des risques fondée sur des limites de
montant par contrepartie (qui sont fonction notamment de leur notation de
crédit) et par des limites de maturité suivant que la contrepartie est un
établissement de crédit ou un État de la zone euro.
Dans l’intérêt financier de l’État, ces placements sont effectués
s’ils
sont mieux rémunérés que le compte du Trésor à la Banque de France
32
.
La gestion de la trésorerie dans un contexte de taux négatifs et de
politique monétaire très expansionniste s’avère être moins propice à des
32
Celui-
ci est rémunéré, au taux EONIA jusqu’au seui
l de 820
M€ (ce seuil est révisé
chaque année en fonction de l’évolution du PIB), et au taux de la facilité de dépôt de la
BCE (-0,50% depuis septembre 2019) au-delà de ce seuil.
60
COUR DES COMPTES
arbitrages de rendement sur les placements à très court terme. Du fait de
l’abondance de liquidités résultant de la politique d’assouplissement
quantitatif mené par la BCE, les taux proposés sur le marché interbancaire
par les banques les plus sûres, avec lesquelles l’AFT traite prioritairemen
t,
sont généralement inférieurs au taux servi sur le compte à la Banque de
France. En conséquence, depuis mi-
2015 l’AFT place une faible part des
liquidités disponibles. En 2021, l’activité de placements de l’Agence
France Trésor s’est poursuivie de façon
réduite, conséquence de la mise en
place de mesures par la Banque centrale européenne pour contrer les effets
de la situation économique et sanitaire.
En pratique, les placements de trésorerie de l’AFT permettent de
dégager des revenus par rapport à une situation où la seule option serait de
déposer les fonds sur le compte de la Banque de France. Compte tenu des
volumes de trésorerie en jeu, ces volumes peuvent représenter des sommes
très importantes, et jusqu’à plusieurs centaines de M€ au total.
Ces placements de trésorerie prennent parfois la forme de détention
de billets de trésorerie émis par l’Acoss (0,56
Md€ en moyenne sur l
es
années 2019 et 2020).
L’encours de billets de trésorerie à l’Acoss en 2021
est nul car l’Acoss n’a
pas exprimé de besoin. Le dernier titre de court
terme négocié avec l’Acoss date ainsi d’avril 2020. L’État avait alors prêté
des fonds à l’Acoss en mars et avril 2020,
pour faire face aux tensions du
marché, en amont de la mobilisation des services de la DG Trésor pour la
constitut
ion d’un plan de financement. Ce plan
a
permis à l’Acoss de ne
pas avoir à recourir aux billets de trésorerie souscrits avec l’État.
III -
Des opérations passées de gestion active de
la dette (
swaps
)
L’AFT a mis en place entre septembre 2001 et juillet 2002 un
programme de gestion active de la dette visant à réduire la durée de vie de
la dette. Cette stratégie a été suspendue, les conditions de marché ne
justifiant plus son activation. L’encours de
swaps
de l’État
était ainsi
résiduel et stable ces dernières ann
ées, s’étant maintenu à 1,0
Md€ entre
2016 et 2020 (contre 5,8
Md€
en 2015)
33
. Cet encours est désormais nul,
les derniers
swaps
du portefeuille étant arrivés à échéance en octobre 2021.
Avant cette date, les opérations de
swaps
ont généré pour l’exercice
2021 des revenus (nets des coûts associés)
d’environ
26
M€
, à un niveau
proche des montants observés depuis 2017. Ces opérations sont retracées
dans la seconde section du compte de commerce.
33
Correspondant pour moitié à des swaps « receveur taux fixe / payeur taux variable »
et pour moitié à des swaps « payeur taux fixe / receveur taux variable ».
GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE
DE L’ÉTAT
61
Graphique n° 25 :
e
ncours de contrats d’échange (
swaps
) en Md€
Source : Agence France Trésor
Tableau n° 13 :
r
émunération de la gestion active de la dette (M€)
Dépenses
M€
Recettes
M€
Gestion active de
la dette : intérêts
des instruments
financiers à terme
5
Gestion active de la
dette : intérêts perçus
au titre des contrats
d'échange de taux
d'intérêt
30
Gestion active de
la dette : intérêts
des appels de
marge sur contrats
d'échange de taux
d'intérêt
-
Gestion active de la
dette : rémunération
des appels de marge
sur contrats
d'échange de taux
d'intérêt
1
Total
5
30
Solde
26
Source : Agence France Trésor
61,2
41,6
5,8
0,0
10,0
20,0
30,0
40,0
50,0
60,0
70,0
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
62
COUR DES COMPTES
Chapitre III
La conformité aux principes et règles du
droit budgétaire
L’alinéa 9 de l’article 34 de la LOLF prévoit que la LFI de l’année
«
fixe le plafond de la variation nette, appréciée en fin d’année, de la dette
négociable de l’État d’une durée s
upérieure à un an
». Pour l’exercice 202
1,
le «
plafond de la variation nette, appréciée en fin d’année et en valeur
nominale, de la dette négociable de l’État d’une durée supérieure à un an
est fixé à 142,5
milliards d’euros
» (article 93 de la LFI 2021). Ce plafond
est demeuré inchangé par les deux lois de finances rectificatives adoptées
en cours d’exécution.
Comme la LOLF ne précise actuellement pas l’agrégat sur lequel
porte ce plafond, la Cour a demandé dans ses notes sur l’exécution
budgétaire depuis 2017 que la LFI apporte cette précision chaque année.
En l’espèce, ce plafond
a été respecté en 2021.
La loi de finances pour 2021 autorise, en son article 97 (« état E »),
un découvert en cours d’année de chaque section du compte de commerce.
En pratique, l
e suivi du compte de commerce ne s’appuie pas sur une
restitution quotidienne du solde du compte mais sur les paramétrages
Chorus qui garantissent l
e respect de l’équilibre et sur les arrêtés
décadaires. Les découverts des première et deuxième sections ont atteint
leurs points les plus hauts respectivement lors de la dernière décade d’avril
(11,2
Md€)
, lors de la dernière décade de mai (8,2
Md€) et
lors de la
dernière décade d’octobre (
9,9 Md
€). Les découverts maximaux autorisés
en loi de finances de chacune des deux sections du compte de commerce
(respectivement de 17,5
Md€ et 1,7
Md€) ont donc été respectés
34
.
34
Ces autorisations n’ont pas été revues dans les LFR de 2021.
GESTION DE LA DETTE ET DE LA TRÉSORERIE DE L
’ÉTAT
63
Chapitre IV
Les recommandations de la Cour
I -
Le suivi des recommandations formulées au
titre de 2020
La Cour n’a p
as formulé de recommandation au
titre de l’
année 2020.
II -
Récapitulatif des recommandations
formulées au titre de la gestion 2021
La Cour ne formule pas de recommandation au titre de l’année 2021