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ENTITÉS ET POLITIQUES PUBLIQUES
LA FORMATION
EN ALTERNANCE
Cahier régional
Provence-Alpes-
Côte d’Azur
Rapport public thématique
Juin 2022
Sommaire
Procédures et méthodes
................................................................................
5
Synthèse
.........................................................................................................
9
Introduction
..................................................................................................
13
Chapitre I
Des marges de développement de l’apprentissage,
malgré une dynamique soutenue depuis 2019
...........................................
17
I -
Un nouvel essor de l’apprentissage
...........................................................
17
A - Des jeunes parmi les plus exposés à un risque de chômage et de
pauvreté en France métropolitaine
........................................................................
17
B -
Une dynamique de rattrapage des effectifs d’apprentis plaçant
désormais la région au sixième rang
.....................................................................
18
II -
Une performance limitée en matière d’insertion professionnelle
.............
23
III - Des dispositifs de suivi régionaux insuffisamment actualisés
................
26
Chapitre II Le rôle des acteurs redéfini par la réforme, un
financement plus unifié
................................................................................
29
I - Une prise en main des nouvelles compétences contrastée, mais
facilitée par la collaboration des acteurs
........................................................
29
A -
Un conseil régional désormais en retrait des questions d’apprentissage
.........
29
B -
Des services de l’État qui se mobilisent pour assurer l’animation et le
suivi de l’apprentissage des jeunes
.......................................................................
30
II - Des CFA désormais mieux financés, sauf en matière
d’investissement
.............................................................................................
34
A - Un financement régional des CFA bien inférieur à la moyenne
nationale avant la réforme de 2018
.......................................................................
34
B - Un ciblage des moyens entièrement renouvelé par la réforme de 2018
..........
37
C - Une situation financière des CFA en 2020, à apprécier selon leur
modèle historique de financement
........................................................................
40
D - Un risque de sous-investissement désormais critique dans les CFA
...............
43
Chapitre III Le passage à une offre de formation entièrement
libéralisée sans mécanisme de régulation régional
....................................
49
I - Une offre de formation plus importante et réactive mais aussi de
nature différente
.............................................................................................
49
A - Avant la réforme, une offre pilotée mais qui manquait de souplesse
..............
49
B -
Le développement massif de l’offre avec la mise en œuvre de la
réforme
.................................................................................................................
52
COUR DES COMPTES
4
II - Une animation
régionale de la politique d’apprentissage en pleine
transition
........................................................................................................
58
Chapitre IV Des jeunes à mieux accompagner vers et pendant
leur formation en alternance
.......................................................................
61
I -
L’orientation
..............................................................................................
61
A -
Des points d’orientation multiples mais peu efficients
...................................
61
B -
L’absence de m
esures de remédiation à proprement parler
............................
63
C -
Un frein d’image difficile à lever
....................................................................
63
D -
Un accompagnement vers l’apprentissage à l’efficacité contrastée
................
63
II -
La relation tripartite entre le jeune, le CFA et l’entreprise
: des
marges de progrès
..........................................................................................
64
A -
L’appariement avec les entreprises
: des innovations inégalement
mobilisées
.............................................................................................................
64
B - Des taux de
rupture des contrats d’apprentissage très importants
...................
66
III - Une refonte des aides aux apprentis, désormais moins ciblées
...............
69
A - Des services collectifs et des aides très ciblées sur les apprentis en
difficulté sociale avant la réforme de 2018
...........................................................
69
B - Une prise en charge par les Opco depuis 2020 qui laisse de côté les
aides au transport
..................................................................................................
71
IV -
L’impact de la crise sanitaire
..................................................................
73
A - Une tentative pour poursuivre la formation dans le respect des règles
sanitaires
...............................................................................................................
73
B -
Les conséquences en matière de pédagogie et d’
accueil des apprentis
...........
73
Conclusion générale
.....................................................................................
75
Liste des abréviations
..................................................................................
77
Annexes
.........................................................................................................
79
Procédures et méthodes
Les rapports de
la Cour des comptes sont réalisés par l’une des
six
chambres thématiques
1
que comprend la Cour ou par une formation
associant plusieurs chambres et/ou plusieurs chambres régionales ou
territoriales des comptes.
Trois principes fondamentaux gouvernent l’organisation et l’activité
de la Cour ainsi que des chambres régionales et territoriales des comptes,
donc aussi bien l’exécution de leurs contrôles et enquêtes que l’élaboration
des rapports publics : l’indépendance, la contradiction et la collégialité.
L’indépendance
institutionnelle des juridictions financières et
l’indépendance statutaire de leurs membres garantissent que les contrôles
effectués et les conclusions tirées le sont en toute liberté d’appréciation.
La contradiction
implique que toutes les constatations et
appréciations faites lors d’un contrôle ou d’une enquête, de même que toutes
les
observations
et
recommandations
formulées
ensuite,
sont
systématiquement soumises aux responsables des administrations ou
organismes concernés ; elles ne peuvent être rendues définitives qu’après
prise en comp
te des réponses reçues et, s’il y a lieu, après audition des
responsables concernés.
La collégialité
intervient pour conclure les principales étapes des
procédures de contrôle et de publication. Tout contrôle ou enquête est confié
à un ou plusieurs rapport
eurs. Le rapport d’instruction, comme les projets
ultérieurs d’observations et de recommandations, provisoires et définitives,
sont examinés et délibérés de façon collégiale, par une formation
comprenant au moins trois magistrats. L’un des magistrats assur
e le rôle de
contre-rapporteur et veille à la qualité des contrôles.
Sauf pour les rapports réalisés à la demande du Parlement ou du
Gouvernement, la publication d’un rapport est nécessairement précédée par
la communication du projet de texte, que la Cour se propose de publier, aux
ministres et aux responsables des organismes concernés, ainsi qu’aux autres
personnes morales ou physiques directement intéressées. Leurs réponses
sont présentées en annexe du rapport publié par la Cour.
1
La Cour comprend aussi une chambre contentieuse, dont les arrêts sont rendus publics.
COUR DES COMPTES
6
La présente enquête, qui
s’est déroulée de février à novembre 2021,
a été pilotée par une formation commune associant les troisième et
cinquième chambres de la Cour des comptes et cinq chambres régionales
des comptes : CRC Grand Est, Normandie, Nouvelle-Aquitaine, Pays de la
Loire et Provence-Alpes-
Côte d’azur.
Les travaux se sont appuyés sur les enquêtes conduites dans les
cinq régions précitées, qui illustrent la diversité des situations en matière
d’apprentissage. Ces enquêtes ont reposé sur des échanges avec les
principaux acte
urs régionaux : services de l’État (Dreets
2, rectorat), région,
chambres consulaires, opérateurs de compétences, réseaux de CFA. Des
visites ont été organisées dans des CFA de statut privé comme public, gérés
par une chambre consulaire, une branche profess
ionnelle, l’éducation
nationale ou encore un établissement de l’enseignement supérieur, et
représentant la diversité des situations au regard du niveau des formations
proposées comme du milieu urbain ou rural. Au cours de ces visites, les
rapporteurs ont recueilli le point de vue des apprentis en formation. Des
tables rondes avec les acteurs chargés de l’accompagnement des jeunes sur
le territoire ont été organisées.
Des investigations ont été conduites au niveau national auprès des
ministères concernés
: ministère du travail, de l’emploi et de l’insertion,
ministère de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports, ministère de
l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, ministère de
l’économie, des finances et de la relance.
Des échanges ont également eu lieu avec de nombreux autres
interlocuteurs, notamment France compétences, l’Onisep, le Céreq,
l’association Régions de France, les partenaires sociaux, les représentants
des réseaux de CFA, France Universités et l’association nat
ionale des
apprentis de France.
Les juridictions financières ont principalement utilisé les données
produites ou analysées par les services statistiques ministériels des
ministères chargés du travail, de l’éducation nationale et de l’enseignement
supérieur (Dares, Depp, Sies) et les études du Céreq.
2
Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités.
PROCÉDURES ET MÉTHODES
7
Le projet de rapport a été préparé, puis délibéré le 24 février 2022,
par une formation interjuridictions, présidée par Mme Démier, présidente
de chambre, et composée de MM. Lefebvre et Aulin, conseillers maîtres,
Mme Soussia, conseillère maître, présidente de section et contre-
rapporteure,
MM.
Duboscq
et
Oseredczuk,
conseillers
maîtres,
MM. Diringer et Serre, conseillers maîtres et présidents de chambre
régionale des comptes, M. Contan, président de section de chambre
régionale des comptes, ainsi que, en tant que rapporteure générale,
Mme Fau, conseillère référendaire, en tant que rapporteurs généraux
adjoints, MM. Potton, conseiller maître, et Briseul, conseiller de chambre
régionale des comptes, en tant que rapporteurs, Mme Choquet, auditrice,
MM. Roux, Vandamme et Engel, conseillers référendaires en service
extraordinaire, M. Mérot, président de section de chambre régionale des
comptes, Mme Bennasr-Masson, première conseillère de chambre régionale
des comptes.
Le comité du rapport public et des programmes de la Cour des
comptes, composé de M. Moscovici, Premier président, Mme Camby,
rapporteure générale du comité, MM. Morin et Andréani, Mme Podeur,
MM. Charpy, Gautier, Mme Démier et M. Bertucci, présidents de chambre,
MM. Martin, Meddah, Lejeune et Advielle, Mmes Bergogne et Renet,
présidents de chambre régionale des comptes, ainsi que Mme Hirsch,
Procureure générale, a été consulté sur le rapport le 29 mars 2022.
Le Premier président en a approuvé la publication le 17 juin 2022.
Les rapports publics de la Cour des comptes sont accessibles en ligne
sur le site internet de la Cour et des chambres régionales et territoriales des
comptes : www.ccomptes.fr.
Ils sont diffusés par La Documentation Française.
Synthèse
Un essor majeur des effectifs et de l’offre de formati
on en 2020
Avec le troisième taux de chômage le plus élevé des jeunes âgés de
15 ans à 24 ans en métropole, la région Provence-Alpes-
Côte d’Azur est
face à un défi significatif en matière de formation et d’emploi des jeunes.
Alors que la région avait une
tradition d’apprentissage correspondant à la
place de l’artisanat dans son tissu économique, les effectifs en alternance
se sont effondrés après la crise économique de 2008, à l’instar d
u reste de
la France
. La région a conservé des effectifs bas jusqu’en
2018, avant un
rattrapage très significatif dans les dernières années, et particulièrement en
2020, gagnant 37 % en un an pour atteindre plus de 42 000 apprentis.
Toutefois, en tenant compte du déport de contrats de professionnalisation
vers l’apprentissag
e,
la hausse du nombre total d’entrées en alternance
s’établit à 20 % en 2020
.
Cette croissance s’explique par
une diversité de
facteurs : accès aux aides exceptionnelles
mises en place par l’
É
tat à l’été
2020,
développement de l’offre de formation, confin
ements de la fin 2020
moins contraignants, meilleure image
de l’apprentissage
.
En effet, l’offre de formation en Provence
-Alpes-
Côte d’Azur a
connu un net essor. Contingentée jusqu’en 2019, dans le cadre d’une carte
des formations élaborée par la région, elle avait gagné 10 % de places
supplémentaires entre 2016 et 2019
. Avec la pleine mise en œuvre
en 2020
de la réforme issue de la loi du 5 septembre 2018
pour la liberté de choisir
son avenir professionnel
, l
e nombre d’
organismes de formation a triplé
entre 2019 et 2021. Cette offre nouvelle correspond à des niveaux de
qualification plus élevés
qu’auparavant
et à des spécialités tertiaires ; les
caractéristiques des effectifs d’apprentis ont évolué de manière similaire e
n
2020. Elle ne semble pas apporter de réponse à certains secteurs en tension
qui peinent à recruter
dans la région, tout particulièrement l’hôtellerie
-
restauration, l’industrie, certains métiers artisanaux, faute d’attractivité de
ces métiers pour les jeunes.
Des dépenses de fonctionnement des CFA mieux prises en charge
Les ressources perçues par les CFA (comprises
entre 6 865 € et
7
451 €
par apprenti entre 2016 et 2018) apparaissent plus faibles en
Provence-Alpes-
Côte d’Azur qu’en France métropolitaine.
37 à 40 % des
COUR DES COMPTES
10
ressources des CFA étaient issus de la subvention d’équilibre versée,
chaque année, par la région qui conservait
pour d’autres emplois près d’un
tiers des recettes (autour de 50
M€)
qu’elle percevait pour exercer sa
compétence dans le domaine
de l’apprentissage
.
Le nouveau schéma de financement issu de la réforme, qui consiste
principalement en un financement au contrat par les opérateurs de
compétences (Opco), a constitué un grand bouleversement, financièrement
favorable aux CFA en 2020. Les effectifs en formation ont fortement crû
cette année-là et les niveaux de prise en charge de chaque contrat par les
Opco sont apparus comme étant globalement satisfaisants. En outre, les
dépenses ont été amoindries par les confinements et la région, qui perçoit
désormais une dotation peu élevée de la part de France compétences pour
compléter le financement des dépenses de fonctionnement des CFA, a
soutenu les formations déficitaires.
En revanche, le financement de l
’investissement
des CFA, qui repose
sur une enveloppe attribuée à la région par France compétences et par un
financement des Opco,
n’
apparaît
pas en mesure d’assurer l’équipement des
centres de formation régionaux. La dotation régionale versée par France
compétences, est très limitée par rapport à celle des autres régions, tandis que
les Opco sont soumis à de fortes contraintes réglementaires pour le
financement des investissements et alors que l’autofinancement par les CFA
ne saurait suffire à financer les grands projets.
La nécessité d’une
animation régionale de la politique
d’apprentissage
La réforme de 2018 a également profondément modifié les rôles
respectifs des acteurs en Provence-Alpes-
Côte d’Azur
. Ne disposant plus
que de compétences résiduelles
en matière d’apprentissage, le
conseil
régional a recentré ses moyens sur l’observation
et la découverte des
métiers, correspondant à ses priorités en matière de développement
économique et à
sa nouvelle compétence en matière d’orientation
. Les
services de l’État, en particulier la Dree
ts
3
, ont été fortement mobilisés par
le déploiement de la réforme et leur propre réorganisation. Les Opco, créés
au 1
er
avril 2019, avaient inégalement digitalisé et fait converger leurs
procédures en direction des CFA. La sortie de la crise sanitaire et
l
’a
chèvement
de la réforme de l’organisation territoriale de l’État
comme
des Opco
doivent permettre aux acteurs de l’apprentissage de
redéfinir et
stabiliser leur nouveau
cadre d’intervention.
3
Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités.
SYNTHÈSE
11
Les enjeux
d’attractivité et d’adéquation de l’offre
aux besoins des
jeunes, des entreprises et des territoires impliquent un suivi de la politique
d’alternance au niveau régional, où les acteurs impliqués sont nombreux.
Confrontée à des enjeux d’organisation interne, la Dreets est en mesure
d’assurer une animation performante de ce tissu d’acteurs en s’associant
plus étroitement à la région, en lien avec les Opco. Cette dernière dispose
en effet encore d’un savoir
-
faire avéré dans le champ de l’apprentissage,
mais surtout conserve deux enveloppes de financement des CFA
(constituées des deux dotations qui lui sont allouées par France
compétences)
, ainsi qu’un rôle central en matière de cartographie des
enjeux économiques du territoire, deux leviers essentiels pour promouvoir
une offre pertinente pour les besoins du territoire.
Des marges de progrès significatives dans l’accompagnement
des apprentis
Il existe une multitude de points d’orientation en Provence
-Alpes-
Côte d’Azur (centre d’information et d’orientation –
CIO, Office national
d'information sur les enseignements et les professions
Onisep, Carif-
Oref),
mais leur action a été amoindrie par le manque de lisibilité de l’offre
de formation engendrée par la réforme de 2018. De plus, si l’apprentissage
n’est plus cons
idéré comme une voie uniquement destinée aux élèves en
difficulté scolaire, des marges de progrès existent encore au sein de
l’éducation nationale pour faciliter l’orientation
après la classe de troisième
vers cette voie de formation ; le rôle des enseignants est à cet égard
déterminant. En outre, plusieurs dispositifs d’accompagnement vers
l’apprentissage sont expérimentés
, sans être évalués, en Provence-Alpes-
Côte d’Azur
et ne présentent pas de résultats saillants. Pour certains jeunes,
les difficultés matérielles demeurent prégnantes.
De ce point de vue, la réforme a conduit à modifier la logique en
vigueur en Provence-Alpes-
Côte d’Azur. La région privilégiait le
financement de services collectifs assurés par le CFA et concentrait les
autres ressources sur les apprentis en situation de précarité. Les Opco
attribuent désormais aux CFA des financements pour la prise en charge de
frais annexes pour chaque contrat éligible, mais le fonds d’aide ou fonds
social pour les apprentis dépend désormais du CFA.
Les résultats de la région en matière de taux de rupture des contrats
d’apprentissage
comme de taux
d’insertion professionnelle
six mois après
la fin du contrat sont inférieurs à la moyenne nationale. Les marges de
manœuvre financières nouvelles et l’aiguillon
de la certification qualité
« Qualiopi » des CFA, ainsi que la concurrence entre centres, doivent
contribuer à soutenir une meilleure démarche de prévention et de lutte
COUR DES COMPTES
12
contre les ruptures de contrat
dans l’appareil de formation
régional. Dans
un contexte
de croissance de l’offre,
il importe que tous les organismes de
formation, y compris ceux qui n
’appartiennent à aucun
réseau ou sont de
petite taille
, s’approprient davantage encore ces enjeux. Les médiateurs
consulaires,
aujourd’hui inexistants dans le pa
ysage régional, pourraient y
contribuer, de même que les Opco et la mission de contrôle pédagogique
académique.
Une meilleure qualité
de l’accompagnement des jeunes en cours de
formation favoriserait leur insertion professionnelle. La publicité renforcée
donnée aux indicateurs
d’insertion dans l’emploi
déclinés régionalement,
établissement par établissement, pourrait être une voie de progrès pour
améliorer l’orientation des jeunes et stimuler les efforts des CFA
. À moyen
terme, ces indicateurs doivent aussi contribuer à
un meilleur suivi de l’offre.
Introduction
Au 31 décembre 2020, la région Provence-Alpes-
Côte d’Azur
comptait 42 324 apprentis présents en centre de formation des apprentis
(CFA), alors qu’ils n’étaient plus que 27
632 en 2016, après une baisse
continue depuis 2011. Entre 2016 et 2020, les effectifs ont donc connu une
hausse globale de 53,2 %, légèrement supérieure à celle de la France entière
(+ 52,7 %)
4
, induisant une dynamique de rattrapage significative
depuis 2019.
Parallèlement au développement de l’apprentissage et sans
outil statistique pour démontrer un effet de déport, le nombre d’entrées en
contrat de professionnalisation des moins de 30 ans a fortement chuté en
2020 (- 63 % par rapport à 2018). La région est désormais la sixième région
de la France métropolitaine où l’apprentissage est le plus répandu, alors
qu’elle était dixième en 2016. Le tissu économique local dominé par les
petites entreprises est particulièrement adapté à un recours renforcé à cette
modalité de formation, qui demeure sous-utilisée.
L’effort financier global des acteurs était limité dans la région. En
effet, la politique d’apprentissage était sous
-financée au regard des
ressources qui lui étaient théoriquement destinées : la région, en particulier,
ne mobilisait pas l’ensemble de la fraction de taxe d’apprentissage perçue
de l’État pour soutenir le fonctionnement et l’investissement des centres de
formations des apprentis (CFA).
L’offre de formation disponible reflèt
e le clivage démographique du
territoire, entre agglomérations côtières dynamiques et arrière-pays
connaissant un développement économique de proximité. Ainsi, elle s’est
concentrée dans les zones d’emploi de Marseille
-Aubagne, Toulon et Nice,
tandis que l
a région a maintenu de l’offre dans les territoires enclavés
(comme Briançon, Manosque, Draguignan ou Gap), et que les autres zones
d’emploi connaissent baisse ou stagnation de leurs effectifs.
À la suite de la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté
de choisir son avenir professionnel, la pleine entrée en vigueur de la réforme
de l’apprentissage en 2020, dans un contexte marqué par la crise sanitaire et
la mise en place d’
aides exceptionnelles
aux employeurs d’apprentis
, a
entraîné une recomposition de ce paysage, permise notamment par la liberté
de création de CFA et un mode de financement au contrat. Une nouvelle offre
de formation et de nouveaux employeurs ont émergé.
4
Données de l’enquête SIFA (Depp).
COUR DES COMPTES
14
Les grandes lignes de la réforme de l’apprentissage
résultant de la loi du 5 septembre 2018
La réforme a supprimé au 1
er
janvier 2019 l’autorisation d’ouverture
de centres de formation (CFA) et de classes d’apprentis, ainsi que la carte
des formations en apprentissage qui relevaient de la compétence des
régions, au profit d’un
e simple déclaration effectuée auprès des directions
régionales de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (Dreets).
Les contrats d’apprentissage, dont la règlementation a été assouplie et qui
peuvent désormais être conclus par des jeunes âgés de 16 ans à 29 ans
révolus, ne font plus l’objet d’un enregistrement par les chambres
consulaires, mais par les nouveaux opérateurs de compétences, créés à
compter du 1
er
avril 2019, qui deviennent également les premiers financeurs
de l’apprentissage.
Avant la réforme, les CFA étaient financés par des versements
directs des entreprises sur la base de coûts par diplôme définis par arrêté
préfectoral et d
es subventions d’équilibre des régions, qui percevaient
, à
cette fin, une fraction du produit de la ta
xe d’apprentissage
. Depuis le
1
er
janvier 2020, ils sont financés par les opérateurs de compétences en
fonction du nombre de contrats d’apprentissage et des niveaux de prise en
charge de ces contrats définis par les branches professionnelles (ou, à défaut,
par l’État, sur proposition de France compétences, nouvel établi
ssement
public). Les opérateurs de compétences bénéficient de fonds répartis par
France compétences à partir de la collecte des contributions versées par les
entreprises (destinées à financer les contrats mais aussi des aides aux
apprentis : hébergement, restauration, équipement). France compétences
verse également des fonds
aux régions, pour qu’elles puissent
majorer les
niveaux de prise en charge des contrats de certains CFA au titre de
l
’aménagement du territoire et d
u développement économique et soutenir
l’investissement
des CFA.
L’État reprend à sa charge, en lieu et place des régions, et simplifie
les aides versées aux entreprises pour l’embauche d’un apprenti ; la nouvelle
aide unique est recentrée sur les entreprises de moins de 250 salariés qui
signent un contrat d’apprentissage préparant à une certification équivalant
au plus au baccalauréat.
INTRODUCTION
15
Toutefois, en raison de la crise sanitaire, pour la première année des
contrats signés entre juillet 2020 et juin 2022, l’aide unique est remplacée
par une aide exceptionnelle versée à tous les employeurs et pour tous les
niveaux de diplôme jusqu’à bac+5
. C
ette aide exceptionnelle, d’un montant
de 5 000 € pour les jeunes mineurs et de 8
000
€ pour les jeunes majeurs,
est également versée aux employeurs embauchant un jeune en contrat de
professionnalisation. Afin de renforcer l’attractivité de l’apprentissage, la
grille de rémunération minimale des apprentis a été revalorisée au
1
er
janvier 2019 et une aide financière à la préparation du permis de conduire
a été créée pour les apprentis majeurs.
Enfin, la collecte des contributions des entreprises, effectuée par les
opérateurs de compétences pendant une période transitoire, est transférée
aux Urssaf et à la Mutualité sociale agricole (MSA) à compter du
1
er
janvier 2022 pour le compte de France compétences. À cette date, les
CFA devront avoir obtenu, comme les autres organismes de formation, la
certification « Qualiopi » pour continuer à bénéficier de financements
publics ou mutualisés au titre de l’appren
tissage.
Ce cahier régional examine successivement le contexte régional,
l’évolution des effectifs en alternance de 2016 à 2020 et les résultats
obtenus en matière d’insertion, la prise en main par les acteurs de leurs
nouvelles compétences, le financement de l’alternance, l’évoluti
on de
l’offre de formation, l’accompagnement des jeunes et les conséquences de
la crise sanitaire.
Chapitre I
Des marges de développement de
l’apprentissage, malgré une dynamique
soutenue depuis 2019
Si la région Provence-Alpes-
Côte d’Azur a, comme les autres, connu
un essor marqué de l’apprentissage avec la mise en œuvre de la réforme (I),
les taux
d’insertion professionnelle d
es apprentis y sont inférieurs à la
moyenne nationale (II). Les dispositifs
de suivi régionaux mériteraient d’être
actualisés pour mieux mesurer les effets de la réforme (III).
I -
Un
nouvel essor de l’apprentissage
A -
Des jeunes parmi les plus exposés à un risque de
chômage et de pauvreté en France métropolitaine
1 -
Une région polarisée entre le littoral
et l’arrière
-pays
Avec une population actuelle de cinq
millions d’habitants, la région
Provence-Alpes-
Côte
d’Azur
a
connu
une
forte
progression
démographique depuis 1962, liée aux trois quarts à l'arrivée de migrants de
tous âges issus pour moitié des régions limitrophes et de la région Île-de-
France. La répartition de la population demeure toutefois très inégale,
COUR DES COMPTES
18
entre des zones de grande densité démographique et des espaces désertifiés.
Trois habitants sur quatre occupent un dixième du territoire le long de la
bande littorale, fortement urbanisée.
Le tissu économique est marqué par l'importance des entreprises de
moins de 50 salariés et des microentreprises. Environ 1,3 million de
personnes sont salariées en Provence-Alpes-
Côte d’Azur.
Les activités
tertiaires représentent 8 emplois sur 10 : si le tourisme balnéaire, rural et
hivernal occupe naturellement une place particulière, les services aux
entreprises et l'emploi industriel sont également bien représentés.
2 -
Une population plus exposée au chômage
La région demeure l’une des régions les plus concernées par le
chômage des jeunes, avec un taux supérieur à 22 % chez les 15-24 ans
(presque deux points au-dessus de la moyenne nationale). Seuls 67,6 % des
jeunes ayant terminé leurs études sont en emploi, contre 71,4 % pour la
France de province. Les jeunes de Provence-Alpes-
Côte d’Azur restent
plus longtemps chez leurs parents que ceux des autres régions.
Le taux de chômage moyen annuel des jeunes varie fortement d’un
département à l’aut
re : il est plus élevé dans le Vaucluse et les Alpes-de-
Haute-Provence, et plus faible en Hautes-Alpes et dans les Alpes-Maritimes.
La région compte 128 quartiers prioritaires de la politique de la ville
(QPV), soit un QPV sur dix en France métropolitaine. L'unité urbaine de
Marseille-Aix couvre à elle seule près de la moitié des QPV de la région.
B -
Une dynamique de rattrapage des effectifs
d’apprentis plaçant désormais la région au sixième rang
1 -
Un rattrapage des effectifs
d’
apprentis au profit des
formations supérieures et des Bouches-du-Rhône
Sur le temps long, la région Provence-Alpes-
Côte d’Azur a connu une
baisse durable des effectifs en apprentissage, particulièrement marquée entre
2011 et 2014, dans un contexte économique global peu favorable. À partir
de 2015, les effectifs se consolident puis croissent très lentement. Le recul
des apprentis dans l’enseignement secondaire
tient, p
our l’observatoire
régional emploi-formation (Oref), à une moindre orientation des jeunes vers
la voie professionnelle, au rajeunissement des élèves de seconde et de
première, lié à la raréfaction du redoublement, et aux effets de la
DES MARGES DE DÉ
VELOPPEMENT DE L’APP
RENTISSAGE,
MALGRÉ UNE DYNAMIQUE SOUTENUE DEPUIS 2019
19
transformation du BEP en baccalauréat professionnel. Toutefois, en 2019,
les jeunes âgés de 15 à 18 ans représentaient encore 45,7
% de l’ensemb
le
des apprentis accueillis dans des CFA conventionnés par la région.
Les effectifs sont repartis à la hausse en 2019 (+ 8 %), et surtout en
2020 (+ 37 %), connaissant une hausse globale de 53,2 % de 2016 à 2020,
comparable à celle de la France entière (+ 52,7 %)
5
. Concrètement, les
apprentis sont passés de 27 632 en 2016 à 42 324 sur cette période. Les
entrées en apprentissage ont crû de 19,5 % et 52 % en 2018-2019 et 2019-
2020, passant en trois ans de 21 443 à 39 061.
Si la proportion des apprentis parmi les 16-
25 ans s’est durablement
située sous la moyenne nationale et se trouvait encore en 2019 à 5,4 %
(contre 5,7 % en France métropolitaine), en 2020, la région est passée au-
dessus de la moyenne métropolitaine,
avec 5,8 % d’apprentis parmi les
16-
29 ans (contre 5,6 %). Elle est désormais la sixième région de France
métropolitaine où l’apprentissage est le plus répandu, alors qu’elle était
dixième en 2016. Cette croissance a principalement été le fait de
l’académie d’Aix
-Marseille, qui est passée de 4,7 % à 6 % en quatre ans.
Cette hausse, tout particulièrement en 2020,
s’est accompagnée
d’
une évolution importante des caractéristiques des effectifs. Les
formations de l’enseignement supérieur
d’Azur
représentaient en 2020
45 % des apprentis (contre 27 % en 2016). Leurs effectifs ont crû de 155 %
entre 2016 et 2020, une croissance plus soutenue qu’en France entière
(+ 112
%) mais qui ne permet pas à la région d’atteindre une répartition à
parts égales des effectifs comme au national ; le BTS (+ 147 %), les
niveaux licences (+ 310 %) et masters (+ 151 %)
constituent l’essentiel de
la croissance. Cette croissance dans l
’enseignement
supérieur et le secteur
tertiaire, où les filles sont plus représentées quelle que soit la modalité
d’enseignement, a
eu pour effet une féminisation des effectifs (+ 4 points
entre 2016 et 2020, pour atteindre 38 % de filles parmi les apprentis).
5
Données de l’enquête SIFA (Depp).
COUR DES COMPTES
20
Graphique n° 1 :
effectifs
d’apprentis
par niveau
Source : Depp, SIFA
Graphique n° 2 :
é
volution du nombre d’e
ntrées en contrat
d’apprentissage par département
Source : Dares, Deca.
DES MARGES DE DÉ
VELOPPEMENT DE L’APP
RENTISSAGE,
MALGRÉ UNE DYNAMIQUE SOUTENUE DEPUIS 2019
21
Cette évolution emporte une certaine métropolisation, liée au
développement des formations dans l
’enseignement
supérieur et, enfin, une
reconfiguration des CFA au bénéfice des établissements privés sous contrat
(+ 244 % de 2017 à 2020), des universités et écoles (+ 3 000 %), et des
CFA
d’organisation
s professionnelles
ou d’entreprises (+
405 %), tandis
que les CFA gérés par des collectivités locales ou la chambre des métiers
ont perdu respectivement 8 % et 1 % de leurs effectifs.
Certaines constantes demeurent cependant.
Ainsi, l’apprentissage
était déjà fortement orienté vers le secteur tertiaire dans la région, en
cohérence avec
la structure d’emploi locale.
En 2016, deux-tiers des
entrées en contrat d’apprentissage a
vaient lieu dans le secteur tertiaire
(4
points de plus qu’en France entière). Cette tendance s’est maintenue : en
2020,
près des trois quarts des entrées en contrat d’apprentissage
concernent le secteur tertiaire (identique aux données en France entière).
Dans le détail, si les entrées dans le secteur de l’hébergement et de la
restauration sont demeurées stables
6
, elles ont crû respectivement de 130 %
dans le secteur du commerce et de la réparation automobile et de 164 %
dans les services de soutien aux entreprises.
De même, la typologie d
es employeurs n’
a pas significativement
évolué : si la croissance a été plus forte dans les entreprises de plus de
200 salariés, en cohérence avec le développement des effectifs dans
l’enseignement supérieur, ces entrepris
es demeurent sous-représentées en
Provence-Alpes-
Côte d’Azur au regard de la répartition nationale des
employeurs. En 2020, les nouveaux apprentis ont été embauchés à 57 % au
sein de TPE (contre 48 % en France entière).
Les facteurs de cette croissance des effectifs sont pluriels. À la
marge, elle est alimentée par les entrées en apprentissage des jeunes de 26-
29 ans qui en étaient antérieurement exclus et par un élargissement de la
zone de chalandise des CFA régionaux, notamment s’agissant des jeunes
plus âgés qui sont plus mobiles. Ainsi, la part des apprentis résidents hors
de la région a crû durant les dernières années, passant de 7,8 % à 8,8 % des
effectifs entre 2016 et 2020.
Le principal facteur,
qu’il n’a pas été possible de mesurer en tant
que tel, mais qui a été systématiquement mentionné par les acteurs de
l’apprentissage
au cours de l’enquête
, est le bénéfice des aides
exceptionnelles aux employeurs
mises en place par l’
É
tat à l’été 2020 pour
soutenir la rentrée 2020 dans le contexte de la crise sanitaire. De
6
Hausse globale de 5 % des entrées en quatre ans mais une part des entrées globale
divisée par deux (passant de 13 % à 7 %). Les entrées se sont stabilisées bien avant la
crise sanitaire, dès les années 2017-2018.
COUR DES COMPTES
22
juillet 2020 à juin 2022, les employeurs peuvent percevoir cette aide pour
la première année de contrat, pour un montant sans commune mesure avec
les aides versées antérieurement. Ainsi, dans le cas du CFA de la branche
propreté,
le nombre d’employeurs a doublé en 2020, soutenu par les PME
.
Un autre facteur de la croissance des contrats d’apprentissage, s
ouvent
évoqué
,
est
l’existence
d’un
effet
de
déport
des
contrats
de
professionnalisation vers les contrats d’ap
prentissage pour la préparation
de certains diplômes, dans l’enseignement supérieur.
2 -
Une croissance régulière des entrées en alternance depuis 2017,
avec une recomposition des types de contrats
Entre 2015 et 2018,
contrairement aux contrats d’
apprentissage, les
entrées en contrats de professionnalisation ont connu une croissance dans un
contexte de développement économique global. Toutefois, le point haut atteint
en 2018 correspondait seulement au retour au niveau atteint en 2012.
L’
observatoire régional de
l’emploi et de la formation prof
essionnelle (Oref)
conclut en 2018 que les deux contrats étaient plutôt complémentaires, la
logique de l’employ
eur et les certifications étant différentes : le contrat de
professionnalisation, centré sur les qualifications et moins sur les diplômes,
jouait sur une période plus courte comme un pré-recrutement. Par ailleurs, les
profils des jeunes et des établissements recruteurs étaient différents avec des
jeunes plus diplômés,
d’une part
, et des grandes entreprises plus nombreuses.
Cette situation a connu une inflexion majeure en 2019-2020 avec un
effondrement des entrées en contrat de professionnalisation (- 55 % en
un an). Si cette baisse a touché de manière homogène les moins de 26 ans
et les 26-30 ans, les secteurs
7
et les différents territoires, les entrées se
concentrent désormais encore davantage sur les entreprises de plus de
250 salariés et la structure par qualification a fortement évolué. Le nombre
d’entrées est
resté stable pour les certificats de qualification professionnelle
(CQP) et les qualifications de branche, mais a été divisé par 3 au niveau du
baccalauréat, par 8,5 pour les niveaux bac+2 (passant de 32 % des contrats
à 9 %), et par 2,5 au niveau bac+3. Cette évolution reflète un possible effet
de dépo
rt des contrats de professionnalisation vers l’apprentissage. En
effet, le nombre des entrées est resté identique pour les qualifications pour
lesquelles l’apprentissage n’entrait pas en
concurrence
, tandis qu’il s’est
effondré pour les qualifications qui ont connu une hausse très forte des
entrées en apprentissage, avec un effet de concurrence directe, comme au
niveau bac+2, notamment pour les BTS.
7
La répartition est restée presque stable entre 2016 et 2020 : 0,3 % dans le secteur agricole,
17 % à 16
% dans l’industrie et la construction, 82 % à 84
% dans le secteur tertiaire.
DES MARGES DE DÉ
VELOPPEMENT DE L’APP
RENTISSAGE,
MALGRÉ UNE DYNAMIQUE SOUTENUE DEPUIS 2019
23
Graphique n° 3 :
évolution des entrées en contrats d'apprentissage
et de professionnalisation (moins de 30 ans)
Source : ju
ridictions financières d’après données
Dares (Extrapro, Deca)
In fine
, s’agissant des moins de 30 ans, le nombre d’alternants a cr
û
entre 2016 et 2020 de 36 %, dont près de 20 % entre 2019 et 2020.
L’effet
de la réforme, qui a libéralisé l’offre, s’est
davantage fait sentir en 2020 (et
en 2021) qu’en 2019
, en raison des aides exceptionnelles dont ont bénéficié
les employeurs d’apprentis à partir de l’été 2020.
II -
Une performance limitée en matière
d’insertion professionnelle
Il faut souligner la faiblesse d
es données disponibles sur l’insertion
des apprentis dans la région. En effet, contrairement à la plupart des
académies de France métropolitaine, les rectorats de Nice et d’Aix
-Marseille
ne publiai
ent pas d’exploitation
de
l’enquête annuelle sur l’insertio
n
professionnelle des lycéens et apprentis à sept mois (dite IVA-IPA),
disponible jusqu’en 2019
et
qui permettait de comparer l’insertion des jeunes
COUR DES COMPTES
24
selon la voie choisie. En effet, les taux de réponse des apprentis à ces
enquêtes étaient particulièrement faibles dans la région (Aix-Marseille :
30,9 % et Nice : 33,6 %, à comparer à la moyenne nationale de 57,8 %).
La seule source de données disponible est
InserJeunes
. Il s’agit d’un
appariement, réalisé par la
direction de l’évaluation, de la prospective et
de
la performance du ministère chargé de l’éducation nationale (Depp)
et la
direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques du
ministère chargé du travail (Dares), entre les bases élèves et la déclaration
sociale nominative qui permet
d’identifier la situation des jeunes
à 6 et à
12 mois après leur sortie d
’alternance
. Cet appariement a porté pour
l’instant sur les sorties d'une dernière année de formation professionnelle
en CFA du niveau CAP à BTS, en 2018 et 2019. La région Provence-
Alpes-
Côte d’Azur présente le taux d’insertion des apprentis le
plus bas, à
l’exception de la Corse et des outre
-mer : 55
% d’anciens apprentis en
emploi à 6 mois et 61 % à 12 mois, contre 62 % et 66 % pour la France
entière.
Les
résultats
d’insertion
des
apprentis
sont
cependant
significativement supérieurs à ceux des lycéens en voie scolaire, avec un
différentiel légèrement moindre qu’au niveau national. En effet, six mois
après leur sortie d’une form
ation professionnelle, seuls 41 % des lycéens
sont en emploi, le même niveau qu’en France entière.
Il existe de fortes disparités départementales qui peuvent être
largement expliquées par des effets de composition, le critère central pour
l’insertion étant
in fine
le niveau de qualification. La région Provence-
Alpes-
Côte d’Azur
présente
l’un des
taux d’insertion des apprentis le
s plus
bas,
alors qu’il existe des régions dont les taux de chômage chez les jeunes
sont significativement plus élevés (Occitanie ou Hauts-de-France). Or,
cette situatio
n ne se retrouve pas chez les lycéens dont le taux d’emploi est
plus conforme au positionnement de la région au regard du chômage des
jeunes. Ces données illustreraient une moindre performance comparée de
l’apprentissage en matière d’insertion professionne
lle dans la région que
dans des régions comparables.
DES MARGES DE DÉ
VELOPPEMENT DE L’APP
RENTISSAGE,
MALGRÉ UNE DYNAMIQUE SOUTENUE DEPUIS 2019
25
Graphique n° 4 :
taux d'emploi à 12 mois et taux de chômage
des jeunes comparés
Source
: juridictions financières d’après
données Dares, Depp, InserJeunes 2020, Insee, taux de
chômage localisés en 2020.
Aucune donnée
n’est disponible sur l’insertion professionnelle des
jeunes en contrat de professionnalisation à l’échelle régionale.
Une sous-représentation en apprentissage des jeunes résidant dans
les quartiers prioritaires de la politique de la ville
Provence-Alpes-Cô
te d’Azur
est la troisième région la plus
concernée par les quartiers prioritaires de la politique de la ville. Au moins
1 570 contrats
d’apprentissage ont été
signés en 2017 avec un jeune résidant
dans un QPV dans la région, soit seulement 8,9 % du total des contrats
d’apprentissage
, alors que cette proportion atteignait 11 % des contrats
signés l’année précédente au niveau national
. La situation n
’a
que très
légèrement progressé depuis 2012
8
.
8
Observatoire régional des métiers,
Publics QPV et apprentissage en région
,
communication du 7 mars 2019.
COUR DES COMPTES
26
III -
Des dispositifs de suivi régionaux
insuffisamment actualisés
L’
Oref de la région, dénommé Observatoire régional des Métiers
(ORM), a élaboré avec le soutien de la Dreets une monographie très
complète, intitulée
L’apprentissage : du potentiel en Provence
-Alpes-Côte
d’Azur. De l’état des lieux aux pistes d’action
,
qui offre un panorama
territorialisé par zone d’emploi détaillé. Publié et accessible à l’ensemble
des acteurs locaux, ce document a notamment constitué un outil de pilotage
pour le conseil régional qui avait sollicité sa production pour alimenter la
réflexion sur la carte des formations. Toutefois, ce type de monographie
présente
l’inconvénient d’
être rapidement périmé
en cas d’évolution
majeure
de l’offre et des effectifs, comme dans le cas d’une réforme.
Si
l
’ORM publie régulièrement
des informations sur les métiers et les
formations, il ne le fait que
de manière irrégulière sur l’apprentissage
autour de thématiques spécifiques (quartiers prioritaires de la politique de
la ville, handicap).
Les outils d’observation de l’alternance disponibles en région,
même
non publics, ont fait l’objet d’un référencement par le réseau
régional « Connaissance du territoire
» et l’ORM
en 2019. Outre les
sources nationales (Dares et Depp), des sources régionales existaient qui
ont disparu avec la réforme : la base apprentis de la région ou des
extractions de bases nationales à la maille régionale réalisées par les
services déconcentrés de l’
État. En matière de suivi statistique continu des
effectifs, l
’ORM propose une cartographie des effectifs en formation
professionnelle par z
ones d’emploi et niveaux de formation (y compris
l’apprentissage), mais les mises à jour se sont interrompues en 2016, ce qui
prive largement l’outil d’intérêt pour les acteurs locaux.
L
’observatoire a
été mobilisé davantage sur l’articulation entre métier
s et secteurs.
Aujourd’hui, demeure la base de l’offre de formation du
Carif-Oref
régional et des données d’effectifs issues des
réseaux de CFA très
structurés, comme les chambres consulaires (chambres de commerce et
d'industrie
CCI - départementales,
chambre de métiers et de l’artisanat
régionale
) ou les rectorats d’académie. Les Opco pourraient jouer un rôle
significatif
via
le développement de leurs observatoires de branche, mais
cette évolution n’est pas encore mature.
DES MARGES DE DÉ
VELOPPEMENT DE L’APP
RENTISSAGE,
MALGRÉ UNE DYNAMIQUE SOUTENUE DEPUIS 2019
27
______________________ CONCLUSION ______________________
Avec le troisième taux de chômage des 15-24 ans parmi les régions
métropolitaines, la région Provence-Alpes-
Côte d’Azur est face à un défi
significatif en matière de formation et d’emploi des jeunes.
À la différence
d’autres régions
, Provence-Alpes-
Côte d’Azur
a
conservé des effectifs
d’apprentis bas jusqu’en 2018, avant un rattrapage
très significatif dans les dernières années et particulièrement en 2020,
gagnant 37 % en un an pour atteindre plus de 42 000 apprentis. Sur
l’ensemble des alternants (en contrat d’apprentiss
age et en contrat de
professionnalisation), la progression des nouveaux contrats est de 20 % en
2020, évolution bien supérieure à celle constatée les années précédentes.
Les facteurs de cette hausse sont pluriels mais difficiles à pondérer,
faute de données. L
’accès aux aides exceptionnelles à la rentrée 2020 a permis
de développer l’offre de contrats et a pu conduire à déporter une partie du
public habituel des contrats de professionnalisation vers l’apprentissage.
D’autres facteurs comme l’évolution de l’image de l’apprentissage ou le
développement de l’offre de formations sont abordés
infra
.
En revanche, des marges de progrès existent en matière d’insertion
professionnelle des apprentis, notamment pour faciliter l’entrée en emploi
plus rapidement à la fin
du contrat d’apprentissage
, les résultats obtenus
dans la région étant inférieurs à ceux obtenus dans d’autres régions dont les
marchés de l’emploi sont comparables. La question de l’accompagnement
des jeunes en cours de formation se pose. Une publicité renforcée donnée à
ces indicateurs déclinés régionalement, au-delà des résultats fournis par
InserJeunes
établissement par établissement, serait utile.
Chapitre II
Le rôle des acteurs redéfini par la
réforme, un financement plus unifié
Face
aux
bouleversements
introduits
par
la
réforme
de
l’apprentissage issue de la loi du 5 septembre 2018, les acte
urs de
l’apprentissage s’approprient leurs nouvelles compétences (I). Si le
nouveau mode de financement des CFA
n’a pas déstabilisé l’équilibre
économique des établissements en 2020, des inquiétudes sont apparues sur
le financement des dépenses d’investiss
ement (II).
I -
Une prise en main des nouvelles compétences
contrastée, mais facilitée par la collaboration
des acteurs
A -
Un conseil régional désormais en retrait
des questions d’apprentissage
Avant la réforme, le conseil régional était impliqué dans les efforts
pour mobiliser les employeurs, développer les voies d’accès à
l’apprentissage, valoriser son efficacité et faciliter l’orientation vers cette
filière. À ce titre, la région entretenait des échanges réguliers avec
l’éducation nationale
. Ce thème était régulièrement abordé au sein du
comité régional de l’emploi, de la formation et de l’orientation
professionnelles
(Crefop) qu’elle
co-préside.
COUR DES COMPTES
30
Désormais, la région
se concentre sur l’information des jeune
s,
notamment dans le cadre de s
a nouvelle compétence d’o
rientation sur les
métiers, et sur la gestion des deux dotations allouées par France
compétences
pour
compléter
le
financement
des
dépenses
de
fonctionnement des CFA et financer l’investissement. E
lle ne procède plus
à une analyse globale de
l’offre de for
mation par alternance, hormis avec
le Carif-Oref dans le cadre de la mission générale de celui-ci de
recensement de l’offre de formation.
La perte de compétence de la région a conduit à réorganiser ses
services administratifs. Avant la réforme, 14 agents étaient affectés à
l’apprentissage.
En 2021, ils n’étaient plus que
2,5 équivalents temps plein
(ETP), notamment pour réaliser les derniers paiements
d’aides aux
employeurs sur les contrats signés préalablement à la réforme.
B -
Des services de l’État qui se mobilisent pour assurer
l’animation et le suivi de l’apprentissage des jeunes
1 -
La Dreets comme nouveau point d’ancrage régional
de l’apprentissage
Comme préconisé par la
délégation générale à l’emplo
i et à la
formation professionnelle (DGEFP) du ministère chargé du travail, la
Dreets a procédé en 2019 à la désignation d'un agent « référent régional
apprentissage » pour accompagner les acteurs dans l'appropriation de la
réforme, mais également pour améliorer l'image de l'apprentissage, limiter
les ruptures de contrat, garantir la meilleure diffusion de l'information aux
publics concernés, piloter les Opco et assurer l'articulation de ces initiatives
avec la mise en œuvre au niv
eau local de l'appel à projets « Prépa-
apprentissage »
lancé dans le cadre du plan d’investissement dans les
compétences (PIC)
9
.
9
Une collaboration régulière est mise en place avec les têtes de réseaux des CFA
(Ardir), les missions locales (ARDML), les 11 Opco, l'Agence de services et de
paiement (ASP), le rectorat, la région, les chambres consulaires, les membres du Crefop
(
groupe de travail sur l’a
pprentissage), le Centre national de la fonction publique
territoriale (CNFPT) et l'Agefiph. En outre, la Dreets collabore avec le rectorat,
notamment avec les deux directeurs académiques de la formation professionnelle
initiale et continue que compte la région. Une réunion d'information avec l'ensemble
des CFA, des missions locales et de la
plateforme de suivi et d’appui aux décrocheurs
(Psad) a été organisée début mars 2021. La Dreets souhaite, en outre, se rapprocher des
LE RÔLE DES ACTEURS REDÉFINI PAR LA RÉFORME, UN FINANCEMENT
PLUS UNIFIÉ
31
En outre, la Dreets se charge de l’élaboration d'un guide relatif à la
procédure d'alerte (en cas de harcèlement ou toute autre situation
complexe) à destination des apprentis et des organismes de formation et
des CFA, en collaboration avec les agents du pôle travail en son sein, les
services de renseignement des DDETS et les coordonnateurs de la mission
académique de contrôle pédagogique de l'éducation nationale.
2 -
Un rectorat attentif à la promotion et au développement
de l’apprentissage
L'éducation nationale est membre du groupe de travail sur
l’apprentissage au sein du Crefop. C’est la
direction régionale académique
de la formation professionnelle initiale et continue (Drafpic) qui pilote
l’apprentissage au niveau régional
dans les établissements de l’éducation
nationale. Dès la loi du 5 septembre 2018, des Greta-CFA ont été créés
dans
l’académie d’Aix
-Marseille et le CFA académique a été maintenu
dans
l’académie de Nice, avec l’objectif de mieux faire connaître, faciliter
la mise en œuvre et développer l’apprentissage dans tous les
établissements
publics locaux d’enseignement (EPLE)
de la région académique par des
organismes de formation-
CFA de l’é
ducation nationale.
L
e rectorat dispose d’outils d’analyse des besoins
,
de l’offre et des
effectifs en apprentissage. L’analyse statistique se fait essentiellement de
manière qualitative (études de marché) à deux niveaux : au niveau local,
par les conseillers en formation continue chargés des formations étudiées
10
,
et au niveau académique, par les responsables de filière chargés de
consolider l’analyse locale,
de la valider et, si besoin
, d’
accompagner le
développement de cette offre de formation. En attendant le déploiement du
système d’information
SI2G, actuellement en cours de développement au
niveau national, le rectorat utilise le système Yparéo
, l’outil utilisé pa
r la
très grande majorité des organismes de formation-CFA.
Enfin, le rectorat conduit des actions de promotion en faveur de
l’alternance
: présentation au sein des classes, lors de salons généralistes
ou
ciblés, accompagnement des jeunes dans la recherche d’une entreprise,
travail avec les branches professionnelles et les entreprises pour
promouvoir les métiers, formation des tuteurs, suivi renforcé des jeunes
écoles de commerce (
par exemple, l’
école de commerce et de management
Kedge
basée
à Marseille) ou des écoles d'ingénieurs.
10
L’analyse porte sur les besoins des entreprises et des branches professionnelles, ainsi
que sur l’offre possible (plateaux techniques, etc.). L’étude de marché est ensuite
confrontée aux publics présents sur le territoire (niveau d’étude, freins possibles
, etc.).
COUR DES COMPTES
32
durant leur cursus de formation
11
. Le rectorat collabore également avec le
conseil régional au travers des campus des métiers.
3 -
Des Opco qui cherchent à harmoniser un service
rendu encore inégal
Les onze Opco sont présents en région par l’intermédiaire de leurs
antennes régionales. Invités aux réunions du Crefop lorsqu'un des sujets
abordés concerne leur périmètre d'intervention, les Opco participent aussi
en Provence-Alpes-
Côte d’Azu
r aux réunions du service public régional de
l’orientation (SPRO) avec la Cité des Métiers de Marseille sur le territoire
de Marseille-
Berre l’Étang.
Pour la mise en œuvre de leurs missions, les Opco mobilisent
plusieurs dizaines de conseillers formation sur le terrain pour faire la
promotion de l’alternance, analyser
les besoins des entreprises et y
répondre
, vérifier l’éligibilité des contrats, accompagner
les employeurs
dans leurs démarches et faire le lien avec les CFA. Certaines équipes de
gestionnaires sont
affectées à l’alternance, avec un numéro téléphonique et
une adresse électronique spécifiques, pour instruire les contrats, en vérifier
la conformité, être en lien avec les organismes de formation-CFA le cas
échéant, assurer les paiements. Enfin, certains Opco ont nommé au niveau
régional un « référent alternance » qui travaille étroitement avec le niveau
national ainsi qu’avec l
e « référent apprentissage » de la Dreets. Ils sont
sollicités en fonction de l'actualité de l'apprentissage (par exemple, sur la
question des jeunes sans contrat) ou encore pour travailler avec un acteur
de l'apprentissage sur des thématiques précises (réunion avec l'ASP pour
améliorer la gestion des flux).
La qualité du service rendu, inégale d’un Opco
à l’autre, témoigne
des difficultés rencontrées par les opérateurs sur le plan des ressources
humaines (par exemple : recrutement et montée en compétences de leurs
équipes), notamment dans le contexte de la création des Opco et de la crise
sanitaire. La c
rainte d’une baisse d’activité au titre de l’
apprentissage
(- 30
% constaté à l’été 2020) s’est finalement traduite par une forte hausse
sur la période concentrée de fin d’année (+
40 % en novembre 2020).
Toutefois, leur organisation et procédures demeurent à ce jour tournés vers
les besoins des branches et de leurs entreprises. Par ailleurs, leur offre de
11
Depuis 2019, les sites internet déployés par le rectorat sont dotés de compteurs
spécifiques permettant de vérifier que son offre de formation est de mieux en mieux
connue du grand public. Des banques « emplois » permettent aussi de suivre l’évo
lution
de la demande des employeurs. Des dépliants spécifiques ont été réalisés sur chaque
territoire. L’éducation nationale est également
plus présente sur les réseaux sociaux.
LE RÔLE DES ACTEURS REDÉFINI PAR LA RÉFORME, UN FINANCEMENT
PLUS UNIFIÉ
33
services et les outils diffè
rent d’un opérateur à l’autre. À ce titre, la plate
-
forme informatique unique inter-Opco est attendue avec beaucoup
d’impatience par certains CFA qui souffrent du manque d’interopérabilité
des outils existants. L
a relation de confiance s’installe peu à peu entre CFA
et Opco au prix d’un effort partagé
: d’une part, les CFA ont modifié leur
modèle économique et adapté la qualité des informations transmises pour
le déclenchement du paiement des acomptes
; d’autre part, les Opco ont
cherché à améliorer et harmoniser leur fonctionnement dans la région
12
.
4 -
Une chambre de métiers et de l’artisanat régionale active
dans le domaine de l’ap
prentissage
La chambre de métiers et
de l’artisanat (CMA), dont le périmètre est
régional depuis le 1
er
janvier 2016, assure la gestion de sept CFA implantés
dans quatre départements, qui accueillent environ 6 000 apprentis, mais ne
couvrent pas les deux plus grandes métropoles que sont Aix-Marseille et
Nice. Des démarches pour reprendre en gestion ou participer à une
structure commune de gestion ont été engagées (CFA de Salon-de-
Provence, Aix et Carros)
13
.
La CMA participe au Crefop, aussi bien en formation plénière que
dans les différentes commissions (orientation, développement des
compétences, emploi et continuité des parcours professionnels, suivi-
évaluation, etc.) et groupes de travail (apprentissage)
14
.
12
Par exemple, à travers l’élaboration d’un
vade-mecum
pour adopter un langage
commun, la convergence de
process
, le partage de bonnes pratiques, etc..
13
Les infrastructures de quatre de ces CFA demandent à être modernisées.
14
La CMA siège également au conseil d’administration du Carif
-Oref et co-administre
l’ARDML (association régionale des missions locales) et l’Irfedd (institut régional de
formation à l’environnement et au développement durable).
COUR DES COMPTES
34
II -
Des CFA désormais mieux financés,
sauf en matière
d’investissement
A -
Un financement régional des CFA bien inférieur
à la moyenne nationale avant la réforme de 2018
1 -
Une ressource globale par apprenti initialement basse
mais croissante
Jusqu’en 2018, la
première ressource des CFA était le financement
de la région, même si sa part
s’
est légèrement amoindrie passant de 40 %
à 37 % entre 2016 et 2018
15
, en parfaite corrélation avec la croissance de
la ressource en taxe d’apprentissage versée directement par les entreprises
(passée de 27 % à 31 %). Le financement de la région est lui-même
principalement issu de la fraction régionale de la taxe d'apprentissage qu’il
perçoit chaque année. Si le financement par les branches est resté stable
(autour de 7 %), les autres ressources émanant des organismes
gestionnaires, de l’
État et
d’
autres personnes publiques ou encore des
familles ont fortement varié, pour des montants certes beaucoup plus
limités (un quart du financement global).
La variation du montant des ressources au cours de cette période est
principalement due à la variation :
-
des ressources consacrées à l’investissement
, avec une année haute en
2017 (+ 36 % puis - 68 %) ;
-
des ressources consacrées au fonctionnement, qui ont fortement crû
entre 2017 et 2018, du fait de la vente de prestations et d
’importants
retraitements comptables.
Les ressources perçues par les CFA, comprises entre 6 865
€ et
7 451
par apprenti au cours de la période, apparaissent plus faibles en
Provence-Alpes-
Côte d’Azur qu’en moyenne pour la France métropolitaine
(entre - 15 % et - 11 % sur les trois années). Dans le détail (voir tableau en
annexe n° 3), la ressource par jeune dans la région apparaît :
-
significativement plus faible mais également plus dynamique pour le
fonctionnement des CFA (6 639
€ en 2018, + 13
% en deux ans, contre
7 075
€ pour la moyenne nationale)
;
15
Les ressources des CFA de la région sont retracées en annexe n° 3.
LE RÔLE DES ACTEURS REDÉFINI PAR LA RÉFORME, UN FINANCEMENT
PLUS UNIFIÉ
35
-
aussi variable et d’un montant comparable pour l’investissement
(848
€ de moyenne entre 2016
-2018, contre 874
€ pour la F
rance
métropolitaine)
; l’évolution a épousé la même dynamique qu’au
niveau national, avec un pic en 2017 ;
-
significativement moins élevée pour les aides au transport, à
l’
hébergement et à la restauration (172
€ contre 308
€ en 2018, une
moyenne nationale masquant une distribution extrêmement large de
montants moyens selon les régions).
Pour les années 2019 et 2020, il n’est cependant pas possible de
fournir les mêmes données, faute de consolidation nationale à la suite de la
réforme.
2 -
Des moyens d’interv
ention limités à la disposition
de la région à la suite de la réforme
De 2016 à 2019, la région bénéficiait de trois ressources principales
pour financer l’apprentissage
: la fraction régionale de la taxe
d'apprentissage et une part du produit de la taxe intérieure de
consommation sur les produits énergétiques (TICPE) pour financer les
CFA ; une autre part de TICPE pour compenser les aides aux employeurs
d’apprentis. Or, les dépenses associées aux primes pour les employeurs
comme les dotations aux CFA étaient bien moins élevées. Chaque année,
la région a ainsi affecté entre 48,4
M€ et 55,2 M€ à d’autres emplois
, soit
autour d’un tiers des recettes globales de l’apprentissage dont elle
disposait. Aucune autre région de France métropolitaine n’était dans cette
situation financière.
La région minore ces reliqu
ats qu’elle estime à 24,5
M€ à 29,5 M€
par an. En effet, elle retranche à sa recette
de taxe d’apprentissage une part
correspondant au produit de 44
% de l’ancienne contribution
au
développement de l’apprentissage
qui finançait historiquement la
formation professionnelle continue
, conformément à l’analyse de Régions
de France. Cette minoration figure dans les comptes administratifs
postérieurs à 2016. Mais cette analyse a été écartée en 2019 dans le rapport
remis au Premier ministre par
l’inspection générale de l’administration,
l’inspection générale des affaires sociales et l’inspection générale des
finances sur la compensation aux régions du transfert de compétence de
2019, dont les conclusions ont été tirées par la loi de finances pour 2020.
COUR DES COMPTES
36
La variation des dépenses régionales de 2016 à 2019 s’explique
largement par
l’
investissement, la légère croissance de la dotation moyenne
par apprenti et la modification de la législation
16
.
Depuis 2020, du fait de la réforme de 2018, la région dispose de
deux dotations allouées par France compétences pour compléter le
financement des dépenses des CFA, dont le montant est fixe (7,7 M
€ de
fonctionnement et 3,5 M
d’investissement), ainsi que d’une majoration du
prélèvement sur recettes de l’État de 2
,8 M
€ «
afin de participer à la
couverture des charges afférentes à la politique de l'apprentissage ainsi
qu'aux reliquats de dépenses incombant aux régions
(…) jusqu’
en 2021
»
(cf. article 76 de la loi de finances pour 2020)
, soit un total de 14 M€.
Le
montant des dotations régionales a été fixé proportionnellement à la
moyenne des dépenses constatées pour chaque région au titre des exercices
2017 et 2018
17
.
En conséquence, la région dispose de l’avant
-dernière
enveloppe de fonctionnement et de la dernière enveloppe d’investissement,
en ressource par apprenti (France métropolitaine).
Tableau n° 1 :
ressource de la région par apprenti comparée
à la moyenne nationale
Dotations
Montant
en €
Effectif
d’apprentis
Ressource en €
par apprenti
Fonctionnement
Provence-Alpes-
Côte d’Azur
7 698 100
44 481
173
France métropolitaine
239
Investissement
Provence-Alpes-
Côte d’Azur
3 508 000
44 481
79
France métropolitaine
296
Source
: juridictions financières d’après règlementation
Avec la réforme, les recettes d’apprentissage de la région ont été
divisées par dix et les dépenses par cinq (cf. annexe n° 4).
En 2020, la région a consacré 20,3
M€
aux dépenses d’apprentissage
correspondant au versement de dotations aux CFA, au financement
d’investissements des CFA
et au
versement d’aides
aux employeurs au titre
des contrats d’apprentissage signés avant la réforme
. Hors recettes issues
16
À compter du 1
er
janvier 2019, les aides aux employeurs d'apprentis liées aux
nouveaux contrats d'apprentissage relèvent de l’État
.
17
Cf. article R. 6211-4 du code du travail.
LE RÔLE DES ACTEURS REDÉFINI PAR LA RÉFORME, UN FINANCEMENT
PLUS UNIFIÉ
37
de la compensation de la perte de la compétence
18
, la région a réalisé pour
la première fois depuis 2016 un effort propre en faveur de l’apprentissage
de plus de 6
M€
, mais son objectif est de faire converger à terme le niveau
de dépenses avec le niveau des dotations allouées par France compétences.
B -
Un ciblage des moyens entièrement renouvelé
par la réforme de 2018
1 -
Un dialogue de gestion régional fondé sur une analyse
financière avant la réforme
Avant 2020, les ressources clefs pour les CFA de la région étaient à
parts égales la dotation régionale et la
taxe d’apprentissage perçue
directement. Si la dotation régionale correspondait à moins de 40 % du
total des ressources, elle constituait
un outil de pilotage de l’ensemble de
la dépense des CFA. Depuis 2006, la région Provence-Alpes-Côte d'Azur
avait instauré un dialogue de gestion avec chacun des CFA, pour la fixation
de la dotation annuelle, conçue comme une
dotation d’équilibre
complétant
les autres ressources prévisionnelles. Cependant, la région
n’
était pas tenue
de contribuer aux charges dépassant le montant du budget de référence
transmis dans le cadre du dialogue de gestion.
La région allouait les fonds après évaluation de la qualité et des
sous-jacents de la dépense, en évitant des ruptures trop fortes
d’une année
sur l’autre
. Si 12 CFA sur 59 percevaient une dotation régionale inférieure
de plus de 10 % à leur dotation d
’équilibre prévisionnelle,
seuls 3 CFA ont
obtenu
une dotation inférieure d’au moins 5
% à la dotation prévisionnelle
de l’année antérieure. Cet écart s’explique par des
interrogations sur les
rémunérations ou des provisions insuffisamment motivées.
L’analyse était
effectuée à partir des budgets prévisionnels des années n et n-1, des
nouvelles formations et effectifs prévisionnels, du compte financier de
l'année n-2 et de
l'analyse des coûts de formation d'apprenti de l’année
n-2
(notamment, les dépenses de personnel). La région
s’appuyait
sur la
contribution d’un prestataire externe, qui réalisait un rapport d’audit par
organisme gestionnaire.
18
La redéfinition de la compétence régionale en matière d'apprentissage
a conduit l’
État
à verser à la région Provence-Alpes-
Côte d’Azur
une com
pensation financière d’un
montant de 50 M€, correspondant aux ressources utilisées avant réforme à d’autres
emplois que l’apprentissage
.
COUR DES COMPTES
38
La région procédait à une analyse du même type concernant les
coûts des services collectifs (hébergement-restauration et transports). En
2019, sur 2 M€ demandés, les CFA ont obtenu 1,
9
M€.
Le dialogue de gestion était purement financier, ne prenant en
compte ni les résultats obtenus par les CFA, ni une éventuelle démarche
qualité. Les innovations pédagogiques devaient être financées sur les fonds
propres de l’organisme gestionnaire, même si l’individualisation des
parcours des apprenants était inscrite dans la convention de création passée
entre la région et celui-ci et constituait donc une mission reconnue du CFA.
Les CFA pouvaie
nt s’inscrire dans la démarche
qualité transverse à
l’ensemble des organismes de formation que propos
ait la région, au travers
d’
un label administré en commun
avec d’autres financeurs centrés sur la
formation continue (Pôle emploi, Fongecif devenu Association Transition
Pro et Agefiph). 11 CFA ont ainsi été reconnus (les 7 CFA de la chambre
de métiers et de l’artisanat régionale
et les 4 Greta-CFA
de l’éducation
nationale). Cette
labellisation a pu faciliter l’obtention de la certification
Qualiopi (obligatoire depuis le 1
er
janvier 2022
), en ouvrant la voie d’un
audit allégé. Pour les autres CFA,
l’obtention de la certification
était
majoritairement
perçue
comme
chronophage,
tout
en
permettant
d’uniformiser et capitaliser sur les pratiques existantes.
2 -
L’évolution des modalités de financement des CFA
:
des montants de prise en charge des contrats plus élevés
La convention entre la région et les CFA
s’appu
yait sur la notion de
« coût de formation » par apprenti qui était prise en compte dans le calcul
de la subvention versée par le conseil régional (article R. 6233-9 du code
du travail). Elle déterminait
le montant qu’une entreprise d
evait verser
directement au CFA formant son ou ses apprentis, dans la limite de 26 %
de la taxe d’apprentissage totale due (article L. 6241
-4 du code précité). Ce
montant était fixé chaque année par arrêté préfectoral (sur proposition de
la région).
En Provence-Alpes-Côte
d’Azur, le calcul du «
coût préfectoral »
ou « coût de formation » était réalisé sur la base des données de
comptabilité analytique du CFA. Ces coûts complets étaient propres à
chaque formation et chaque CFA.
L’an
alyse des coûts (cf. annexe n° 5)
illustre leur forte variabilité selon les CFA, leur implantation géographique
et l’année concernée
, mais surtout selon
les effectifs de l’année
précédente.
Il n’y avait pas de dynamique de convergence, sauf volonté d’un organisme
(pour éviter une concurrence entre
ses sections d’apprentissage
, par
exemple), mais une simple adaptation au réalisé de l’année précédente.
LE RÔLE DES ACTEURS REDÉFINI PAR LA RÉFORME, UN FINANCEMENT
PLUS UNIFIÉ
39
Avec la réforme de 2018, le financement est désormais assuré très
majoritairement par les Opco dont les niveaux de prise en charge des
contrats sont fixés pour chaque formation au niveau national. Les montants
des niveaux de prise en charge sont plus élevés que les coûts préfectoraux,
mais pas de manière homogène. S
’agissant du CAP
Cuisine, par exemple,
le niveau de carence (c’est
-à-dire le niveau utilisé si les branches
professionnelles n
’ont pas fixé de montant
)
est supérieur d’un tiers à la
moyenne des coûts préfectoraux, le niveau de prise en charge le plus bas
étant supérieur de 18 %. S
’agissant du baccalauréat professionnel
Commerce, ces valeurs sont respectivement supérieures de 15 % et 1 %.
3 -
Un dispositif de financement régional complémentaire
conforme à la logique de la réforme
Avec la réforme, le financement au contrat bénéficie aux formations
à gros effectifs et recrutant dans les branches dont les niveaux de prise en
charge sont les plus élevés. Il demeure cependant une part de financement
qui fait l’objet d’un ciblage précis
: l’enveloppe régionale alloué
e au
fonctionnement des CFA qui doit répondre aux besoins d'aménagement du
territoire et de développement économique que la région identifie. La
dotation versée par France compétences à la région Provence-Alpes-Côte
d’Azur
à cet effet est d’un montant par apprenti très réduit.
Les priorités de la région, qui ont peu évolué entre 2020 et 2021,
sont les suivantes :
-
la sécurisation de l’offre de formation existante qui pourrait être
affectée par la réforme et, temporairement, par la crise sanitaire
19
;
-
les formations « orphelines » sur un département ou un territoire
enclavé, y compris le maintien de services à destination des apprentis
(offre de transport, restauration collective) ;
-
les formations préparant à des métiers rares ou en tension sur le
territoire en lien avec les opérations d’intérêt régional (OIR) ou
identifiés par les partenaires économiques (croissance verte, emplois
non délocalisables) ;
-
les formations localisées en zone sensible ou en souffrance
, c’est
-à-
dire dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville
principalement ;
19
La région intervient selon une logique de majoration des niveaux de prise en charge
par les Opco : le CFA
doit fournir une étude d’impact
de ceux-ci et démontrer leurs
effets sur l’équilibre financier de la formation déficitaire.
COUR DES COMPTES
40
-
les formations accueillant des publics spécifiques résidant dans les
territoires identifiés précédemment.
Si des crédits restent disponibles, la région peut financer des projets
portés par les CFA en vue de la promotion de la mixité des filières de
formation, d’un investissement dans la préservation de l’environnement,
de l’innovation pédagogique.
En 2021, la région a également contribué à
financer des actions d
’amélioration de la qualité de vie des apprentis
(mobilité européenne, tutorat, etc.) et de promotion des métiers et de
valorisation de
l’apprentissage.
Sur ce dernier point, il est permis de
s’interroger sur le recours à la dotation de France compétences,
alors que
la région dispose d’autres ressources pour
financer les actions de soutien à
l’orientation (qu’elle a obtenues en compensatio
n du transfert de
compétences,
notamment). La tentation d’élargir son périmètre était
grande, dès lors que la dotation avait été sous-consommée
de près d’un
tiers en 2020 (du fait de la nouveauté du dispositif mais aussi des montants
élevés associés aux prises en charge des Opco). 31 sites de tous types de
CFA ont bénéficié de subventions au titre de l’amorçage (11
%), du soutien
aux filières (43 %)
20
, de la réponse à des déficits (25 %) et de projets
spécifiques (18 %).
C -
Une situation financière des CFA en 2020, à
apprécier selon leur modèle historique de financement
Les CFA avaient des modèles économiques différents selon leur
statut, leur enclavement, les formations proposées (niveau de qualification)
et le type d’employeurs recourant à leurs formations
(certains employeurs
étant exonérés du versement de la taxe
d’apprentissage
21
) : ils dépendaient
donc très inégalement de la subvention régionale
d’équilibre
:
-
CFA disposant de moins de 15 % de ressource régionale
: l’essentiel
des CFA d
e l’enseignement
supérieur, le plus souvent « hors les
murs », qui rassemblent notamment des écoles de commerce
parvenant
à
mobiliser
une
part
très
significative
de
taxe
d’apprentissage
et des financements
de l’organisme gestionnaire
;
c’est également le cas du CFAI des Bouc
hes-du-Rhône, dépendant de
20
Il existe des filières en difficultés comme des métiers en tension : aéronautique,
construction navale, BTP, hôtellerie-restauration, tourisme, mais aussi banque-
assurance et relations client.
21
Sont exonérées du paiement de la t
axe d’apprentissage les
entreprises dont la masse
salariale est inférieure à six SMIC annuels et les personnes morales intégralement
exonérées de l’impôt sur
les sociétés, par exemple les agriculteurs.
LE RÔLE DES ACTEURS REDÉFINI PAR LA RÉFORME, UN FINANCEMENT
PLUS UNIFIÉ
41
la branche de la métallurgie, dont les ressources proviennent à part
égale de la taxe d’apprentissage et de la branche
professionnelle ;
-
CFA disposant de 30 % à 40 % de ressource régionale : ce sont les
CFA disposant de taxe d’ap
prentissage et de financement de branches
ou d’organismes gestionnaires (par exemple, l’autre CFA de l’IUMM,
l’I
fria, CFA de la branche des industries agroalimentaires ou encore
les Compagnons du devoir)
; c’est aussi le cas de CFA proposant des
formations postbac, comme les CFA consulaires portés par les
c
hambres de commerce et d’industrie (CCI)
ou les instituts de
formation aux métiers de la santé ;
-
CFA disposant de 50 % à 70 % de ressource régionale
: il s’agit de
CFA dont les apprentis sont majoritairement employés par des TPE et
proposant une majorité de formation pour les niveaux infrabac (CFA
consulaires dépendant de la c
hambre des métiers et de l’artisanat qui
se trouvent, en outre, tous hors des grosses agglomérations, CFA
dépendant de la branche du
BTP, CFA de l’éducation nationale,
maisons familiales et rurales) ;
-
CFA disposant de plus de 80 % de la ressource régionale : ce sont des
CFA dont tous les employeurs sont des entreprises exonérées du
paiement de la taxe
d’apprentissage
(CFA privés de la coiffure et CFA
agricoles).
Ces modèles économiques ont été bouleversés par le passage au
financement presqu’intégral par les Opco. Les CFA peuvent également
bénéficier, à la marge, des aides de la région ou de l’organisme gestionnaire
et, en dernier lieu, puiser dans le fonds
de roulement de l’établissement. Le
levier central en matière de ressources est constitué par l’augmentation des
effectifs et l’optimisation des dépenses
via
des mutualisations de plateaux
techniques et l’amélioration des coûts de gestion.
Ce nouveau modèle de financement a conduit à des réorganisations.
Les CFA
des établissements publics locaux d’enseignement
de
l’académie
d’
Aix-Marseille ont été fusionnés a
u sein d’un
Greta
. Dans le cas d’un CFA
interprofessionnel « hors les murs », le choix a été fait d
’internalis
er les
fonctions CFA au sein des organismes de l’e
nseignement supérieur et de
créer un nouveau CFA mutualisé pour les formations
jusqu’au
niveau
bac+2 relevant du champ consulaire. Avec la réforme, un CFA consulaire
peut désormais être à l’équilibre avec les prises en charge des Opco. Pour
les écoles de commerce, les montants de taxe d’apprentissage collectée
précédemment étaient plus importants que les prises en charge des Opco.
Pour autant, elles ne renoncent pas à internaliser le CFA en leur sein.
COUR DES COMPTES
42
Comme en témoigne la sous-consommation du fonds de soutien de
la région en 2020, les CFA n’ont pas connu de difficultés financières
significatives cette année-là, sauf cas particulier. Plusieurs facteurs peuvent
expliquer cette situation, au-delà des niveaux élevés de prise en charge des
contrats par les Opco :
-
lors du transfert de compétences à fin 2019, la région a permis à tous
les CFA de conserver le reliquat de taxe
d’apprentissage disponible
;
-
les dépenses ont été moindres en 2020 du fait de la crise sanitaire : les
confinements ont joué sur les frais généraux et de déplacement ainsi
que sur les frais de promotion de l’apprentissage. Les dépenses
supérieures pour acquérir des solutions numériques ou pour renforcer
leurs services financiers
22
n’ont pas c
ompensé cette baisse.
Pour autant, l’année 2020
-2021 a été une année compliquée du point
de vue de la trésorerie. En effet, les lenteurs de traitement des dossiers ont
entraîné des retards de mises en paiement. Les CFA ont mis un certain temps
à se saisir des nouveaux outils de facturation, dans un contexte de
démultiplication des titres de paiement à éditer. Les Opco ont initialement
adopté
des positions divergentes dans l’interprétation de la réglementation
et
pu commettre des erreurs, dans un contexte de réorganisation qui mettait à
mal leurs systèmes d’information et leurs processus. L’absence de
plateforme de gestion des contrats chez l’
ensemble des Opco a conduit à une
gestion par courriels et tableaux Excel préjudiciable à la qualité et la
traçabilité de la dépense.
In fine
, les CFA et les Opco partagent le sentiment
d’une amélioration
dans le cadre de la rentrée 2021, à mesure que se construit
la coopération entre eux et la montée en expertise de leurs services respectifs,
sans compter le développement de nouveaux outils numériques partagés
entre les différents Opco que les CFA appellent unanimement de leurs vœux.
L’enjeu à moyen terme
concerne les relations avec les entreprises
contractantes. En effet, la suppression de l’enregistrement des contrats par
les chambres consulaires a conduit les CFA à internaliser une fonction de
conseil aux entreprises (tout en cherchant à les responsabiliser) pour les
formalités liées au contrat, y compris à la demande des Opco en cas
d’incomplétude des dossiers soumis. L’existence de
créances non soldées
continue à poser problème. Ainsi, en juin 2021, un CFA consulaire de
niveau régional présentait une c
réance de 4,2 M€, du fait de
l’engagement
tardif en 2021 de créances rattachables à des contrats commencés en 2020,
mais aussi à des retards propres à la facturation 2021.
22
Sur la base des données recueillies, on pourrait estimer le ratio d’au moins 1 ETP
supplémentaire pour 500 apprentis à la suite de la réforme ; ces recrutements sont
réalisés, selon les CFA, en intérim pour la période de rentrée ou sur des contrats plus
longs pour développer la fonction financière.
LE RÔLE DES ACTEURS REDÉFINI PAR LA RÉFORME, UN FINANCEMENT
PLUS UNIFIÉ
43
Ce constat positif sur la santé financière des CFA est à nuancer. De
l’analyse conduite par le prestataire d’audit
du conseil régional, il ressort que
le fonds de roulement moyen des CFA fin 2020 se situe en moyenne aux
alentours de deux mois, au lieu de quatre mois antérieurement, fin 2019. Il
est particulièrement difficile d’expliquer c
ette baisse : paradoxalement, les
CFA peuvent avoir été tentés de recourir à l’autofinancement.
D -
Un risque de sous-investissement désormais critique
dans les CFA
1 -
Avant la réforme, un investissement irrégulier
mais de bon niveau
Avant la réforme de 2018,
l’investissem
ent des CFA de Provence-
Alpes-
Côte d’Azur
était de bon niveau, quoique très irrégulier, y compris
dans les sources de financement qu’ils mobilis
aient. La dépense globale
par apprenti,
supérieure à la moyenne nationale en 2016 et 2017, s’
est
effondrée en 2018
dans l’attente de la réforme
23
. Si cette forte variabilité
des dépenses
est propre aux dépenses d’investissement, dépendant du
calendrier des travaux immobiliers
, s’y ajoute dans le cas de
Provence-
Alpes-
Côte d’Azur
une grande variété de financeurs, ce qui rend difficile
l’analyse des dynamiques à l’œuvre.
L
a part de taxe d’apprentissage
parmi les ressources des CFA était
conforme à la moyenne nationale. En revanche, la part de la région était
particulièrement basse en comparaison des autres régions. Toutefois, les
opérations en maîtrise d’ouvrage directe du conseil régional et les
investissements dans les lycées professionnels n
’étaient
pas pris en compte,
ne passant pas par les comptes des CFA. C’est pourquoi les financements
retracés dans les comptes administratifs de la région sont différents et, de
manière générale, un peu plus élevés.
Au total, 32,7 M€ ont été investis de
2016 à 2019 par la région : 13,9
M€ pour le financement de 622 dossiers
d’investissement pédagogique et 18,8 M€ pou
r des projets immobiliers,
principalement en cofinancement au titre des investissements d’avenir
24
.
En matière d’investissement pédagogiques, les demandes prioritaires
recouvraient avant tout les investissements nécessaires à l'ouverture d'une
23
Elle est plus que divisée par deux si l’on neutralise le financement issu du Programme
d’investissement d’avenir émanant de l’État
.
24
Projet de campus sud des mét
iers porté par la chambre de commerce et d’industrie
des Alpes-Maritimes sur Nice :
84 M€ d’investissements
dont 15,3 M€ du PIA et
24,4
M€ de la région.
COUR DES COMPTES
44
nouvelle for
mation dans le cadre du programme régional d’apprentissage
(qui peut donner lieu à l’installation de ligne
s
de production, d’un atelier
de
boucherie, etc.), puis les mises aux normes des ateliers ou classes avec l'avis
de la commission de sécurité, le renouvellement ou l'acquisition de matériels
pédagogiques, la mise en sécurité des sites avec l’installation de la
vidéosurveillance,
l’équipement
en
technologies
informatiques
et
multimédia, voire l’achat de véhicules. Les branches professionnelles étaient
consultées annuellement, en lien avec la carte des formations, sur les
demandes d’investissements déposées par les CFA.
S’agissant des organismes gestionnaires,
leur part dans le financement
était significative, compte tenu du fait que ne passent pas par les comptes des
CFA les opérations relatives au patrimoine de ces organismes ou concernant
des structures juridiques distinctes du CFA (par exemple, des sociétés civiles
immobilières, des foyers, etc.), ce qui impliquerait de majorer
in fine
le
financement perçu des organismes gestionnaires.
Tableau n° 2 :
ressources des CFA de Provence-Alpes-
Côte d’Azur
consacrées à l’investissement pour les années 2016 à 2018
En €
2016
%
2017
%
2018
%
Taxe d'apprentissage
2 496 408
11 %
8 234 287
27 %
6 821 629
38 %
Participation des branches
891 915
4 %
1 443 888
5 %
924 003
5 %
Organismes gestionnaires
3 306 167
15 %
3 470 947
11 %
768 663
4 %
Conseil régional
3 391 174
15 %
3 255 530
11 %
2 977 934
17 %
État
379 635
2 %
1 288 158
4 %
5 217 457
29 %
Autres collectivités publiques
4 055 951
18 %
691 632
2 %
857 852
5 %
Autres ressources
7 690 902
35 %
11 880 375
39 %
447 358
2 %
Total
22 212 153 100 % 30 264 817 100 % 18 014 896 100 %
Effectif pondéré
27 366
27 687
28 115
Ressource par jeune
812
1 093
640
Moyenne France
656
1 061
904
Source
: juridictions financières d’après le rapport annuel sur le financement et les effectifs de l’apprentissage 2016
(Cnefop), 2017 (Cnefop), 2018 (France compétences).
LE RÔLE DES ACTEURS REDÉFINI PAR LA RÉFORME, UN FINANCEMENT
PLUS UNIFIÉ
45
Tableau n° 3 :
f
inancement de l’investissement
des CFA
par la région entre 2016 et 2020
En €
2016
2017
2018
2019
2020
Dépenses
8 377 740,43
3 291 892,77
3 703 649,30
8 536 104,12
5 579 238,95
Source : région
2 -
Depuis la réforme, des
moyens d’intervention de la région
particulièrement limités
Avec la réforme,
l’investissem
ent des CFA, au sens des travaux et
équipements amortissables en plus de trois ans
25
, est principalement
financé par :
-
une dotation de France compétences allouée à la région et mobilisable
pour tout investissement ;
-
des subventions des Opco (article L. 6332-14 2° du code du travail)
réservées aux «
équipements nécessaires à la réalisation des
formations
», que la majorité des Opco limite aux investissements
pédagogiques.
La région perçoit de France compétences une dotation de 3,5
M€
par an, soit
l’
enveloppe la plus faible
de l’ensemble des régions
métropolitaines en montant par apprenti (79
par an
, contre 296 €
en
moyenne nationale).
Le montant de l’enveloppe est également
limité
rapporté au nombre croissant de CFA éligibles. Ce montant correspond à
la moyenne des dépenses d'investissement constatées au titre des exercices
2017 et 2018
26
.
En matière d’investissement, la région
peut financer des
travaux et des équipements pédagogiques. Elle intervient, par ordre de
priorité, au profit des formations relatives à des métiers en tension,
identifiées par les partenaires économiques, liée
s aux opérations d’intérêt
régional (OIR) ou relevant des secteurs de la croissance verte ou permettant
de créer des emplois non délocalisables, c’est
-à-dire les mêmes filières de
formation ciblées pour l’enveloppe de
financement des dépenses de
25
Les prises en charge des Opco au titre des coûts de formation contribuent à
l’amortissement d
es biens, dès lors que celui-ci ne dépasse pas trois ans. Les Opco
peuvent, en outre, accorder des subventions aux CFA pour contribuer au financement
d’
équipements nécessaires à la réalisation des formations
dont la durée d’amortissement
dépasse trois ans.
26
Ce mode de calcul par moyenne des dépenses annuelles, figurant dans la loi de 2018, a
été modifié par l’article 76 de la loi de finances pour 2020, qui a exclu le millésime 2019.
COUR DES COMPTES
46
fonctionnement de CFA. La région soutient aussi les investissements qui
s’inscrivent dans une démarche environnementale.
La pression est forte sur cette enveloppe
d’investi
ssement : en 2020
et 2021, entre 120 et 150 dossiers ont été déposés pour un total de
demandes de financement supérieures à 10 M€.
Compte tenu des engagements importants des années précédentes
restant à mandater, les dépenses de la région sont plus élevées que le
montant de la dotation annuelle dont elle dispose. La région avait fait
signaler ce point aux services
de l’
État dans le cadre de la préparation de
la réforme. À terme, elle prévoit de faire correspondre ses dépenses aux
recettes perçues de France compétences.
Dans leur ensemble, les Opco ne proposent pas non plus de
financement significatif. Le montant mobilisable est en effet fortement
plafonné dans le nouveau cadre posé par la réforme : ces dépenses se
rattachent à la catégorie des emplois non éligibles à la péréquation
interbranches mise
en œuvre par France compétences
, plafonnés à 10 %
des fonds de la section alternance des Opco
27
. En outre, les Opco financent
des investissements de nature différente. À
titre d’exemple, l’Opco 2i a
répondu favorablement en 2020 à trois
demandes d’investissement
en
Provence-Alpes-
Côte d’Azur
pour un
montant global de plus de 1,5 M€
;
la même année, l
’Opco EP a alloué 0,8 M€ pour 40 projets.
Enfin
, l’accès au financement des Opco n’est pas aisé pour les CFA
interprofessionnels. En effet, les appels à projets comprennent des
conditions d’éligibilité comme un pourcentage significatif d’apprentis
relevant des branches adhérentes de l’Opco.
En conséquence, contrairement à
l’objectif assigné par la législation,
les CFA et réseaux de CFA rencontrés
au cours de l’enquête
conçoivent les
prises en charge des contrats (au titre du fonctionnement) comme leur outil
central pour constituer une capacité d’in
vestissement, en autofinancement.
Ainsi, l’un des réseaux consulaires
réserve 25 % des prises en charge des
Opco à
l’investissement. Dans une logique de cofinancement des
investissements, il est logique que les CFA envisagent la constitution de
fonds propres à cette fin. Cependant, cette conception conduit les CFA
, d’une
part, à considérer le niveau actuel de prise en charge comme insuffisant et,
d’autre part,
à demander une stabilisation des prises en charge, pour leur
permettre de programmer leur investissement à moyen terme.
27
Les Opco ne peuvent bénéficier de la péréquation (indispensable à leur financement)
que sous réserve d’avoir affecté au moins 90
% des fonds de la section alternance sur
les emplois éligibles.
LE RÔLE DES ACTEURS REDÉFINI PAR LA RÉFORME, UN FINANCEMENT
PLUS UNIFIÉ
47
Dans le cas de la région Provence-Alpes-
Côte d’Azur,
compte tenu
de la croissance des effectifs et du niveau particulièrement bas de
l’enveloppe
régionale
, le choix des CFA s’avèr
e rationnel pour éviter un
sous-investissement. Il est cependant prévu que la redéfinition des niveaux
de prise en charge des contrats oriente ceux-ci à la baisse.
Fin 2021, à la demande des régions, le ministère chargé du travail a
autorisé une certaine fongibilité entre les deux dotations versées par France
compétences aux régions, afin d’alléger la pression sur l’enveloppe
d’investissement.
COUR DES COMPTES
48
______________________ CONCLUSION ______________________
La réforme du 5 septembre 2018 a profondément modifié le rôle des
acteurs.
Ayant
perdu
l’essentiel
de
sa
compétence
en
matière
d’apprentissage, la région a recentré ses moyens sur l’observation dans un
objectif de cohérence avec ses propres priorités en matière de
développement économique. Les services de l’État, en particulier ceux de la
Dreets, ont dû d
éployer la réforme auprès d’acteurs de plus en plus
nombreux. Les Opco, de constitution récente, ont peiné à proposer une offre
harmonisée en direction des CFA. Cela étant dit, le contexte des années 2020
et 2021
n’a pas été propice à l’organisation d’une
collaboration plus étroite
entre les acteurs. La sortie de la crise sanitaire et l
’achèvement
de la réforme
de l’organisation territoriale de l’État doivent permettre aux acteurs de
l’apprentissage de définir un cadre d’intervention
mieux partagé.
C
haque
année,
près
d’un
tiers
des
recettes
globales
de
l’apprentissage dont la région disposait n’était
pas consacré au financement
des CFA de la région. La ressource par apprenti y apparaissait ainsi plus
faible qu’en France métropolitaine, bien qu’elle so
it plus dynamique. Sur le
plan technique, la région conduisait un dialogue de gestion annuel de qualité
avec les CFA pour déterminer le financement à leur allouer, sans mettre en
œuvre de véritable logique de convergence
entre eux.
Avec la mise en œuvre de
la réforme de 2018, les CFA sont désormais
financés par les Opco en fonction de leurs effectifs d’apprentis, sur la base
de niveaux de prise en charge par diplôme déterminés nationalement. En
2020, tandis que les effectifs d’apprentis croissaient très for
tement et que les
dépenses étaient perturbées par la crise sanitaire, les niveaux de prise en
charge ont permis de couvrir sans difficulté les dépenses de fonctionnement.
En conséquence, la très grande majorité des CFA a connu une situation
financière satisfaisante cette année-là, malgré des tensions de trésorerie
liées aux décaissements tardifs des Opco.
En revanche, le schéma de financement de l’investissement issu de la
réforme de 2018 apparaît particulièrement problématique, du fait de
l’enveloppe très
limitée dont la région dispose pour financer les CFA, alors
que les Opco sont très contraints dans leur possibilité de contribuer au
financement de l’investissement
. Cela incite les CFA à considérer que le
financement de leur fonctionnement doit aussi couv
rir l’investissement. Or,
les besoins sont significatifs, particulièrement pour les formations
artisanales et industrielles, soumises à une forte concurrence
.
Chapitre III
Le passage à une offre de formation
entièrement libéralisée sans mécanisme
de régulation régional
La réforme de 2018 a eu pour effet un développement important de
l’offre de formation (I), alors que l’animation régionale de la politique
d’apprentissage est encore en pleine transition (II).
I -
Une offre de formation plus importante
et réactive mais aussi de nature différente
A -
Avant la réforme, une offre pilotée
mais qui manquait de souplesse
La carte des formations par apprentissage, ou plan régional
d’apprentissage
, était établie par la région en cohérence avec le schéma
régional de développement de l’économie, de l’innovation et de
l’internationalisation, le contrat de plan régional de développement d
es
formations et d'orientation professionnelles (CPRDFOP) et les opérations
d’intérêt régional (OIR).
De mai à décembre n-1, les organismes gestionnaires déposaient des
demandes d’évolution
: ouverture, évolution, fermeture de formations. Ces
COUR DES COMPTES
50
demandes étaient élaborées dans le cadre du conseil de perfectionnement et
reposaient sur un diagnostic des enjeux économiques et de la demande
sociale sur le territoire. Elles se faisaient également au regard d’objectifs
fixés par le plan régional : complémentarité entre les voies de formation,
maîtrise du financement et optimisation des ressources, diversification des
publics accueillis, équilibre entre demande sociale et prise en compte des
besoins des entreprises, développement équilibré du territoire, concertation
avec les partenaires de la formation (adéquation avec les OIR, réponse aux
besoins des entreprises au vu de leurs engagements, mobilisation des
branches professionnelles
28
), qualité des formations. Les demandes étaient
instruites par la région, les services académiques d’inspection de
l’apprentissage et la
direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et
de la forêt (Draaf)
29
. Des demandes d’avis étaient faites aux
branches
professionnelles, au niveau régional, notamment
via
les commissions
paritaires régionales de l’emploi. Outre les critères précités, l’instruction
déterminait la qualité du projet et de son portage (optimisation des plateaux
techniques, logique de parcours, etc.). La carte était finalement votée au
premier trimestre de l’année
n. Il était possible de réaliser une seconde
session avant la rentrée en cas d’instructions complémentaires pour des
projets déjà connus ou d’événements nouveaux en matière d
e développement
économique
: disparition d’une formation, hausse des effectifs recherchés
,
etc. Indépendamment de la carte des formations, il était également loisible
aux CFA
de faire une demande de dépassement exceptionnel d’effectif
s sur
une section, sou
s réserve des conditions d’accueil et de sécurité des apprentis
et après évaluation des conséquences financières.
En 2018, les formations par apprentissage étaient organisées sur
l’ensemble du territoire régional par 58 centres de formation d’apprentis
dans 326 sites de formation. Les CFA régionaux étaient essentiellement
des organismes disposant d’un seul site de formation (47
% des CFA) et
recevant moins de 500 apprentis (63 % des CFA). Ces centres de formation
d’apprentis
dispensaient
1
313
formations
po
ur
un
total
de
559 certifications différentes et de 53 191 places. La répartition du nombre
de formations et de places par niveau est restée stable de 2016 à 2019 :
-
les formations de niveau 3 (CAP) représentaient 40 % du nombre total
de formations ;
28
Les demandes devaient obligatoirement mentionner les débouchés
vers l’emploi sur
le territoire, les entreprises intéressées et le no
mbre de contrats prévus pour l’année
d’ouverture
.
29
Le conseil régional et les autorités académiques avaient, en outre, créé un comité
opérationnel régional d’évolution de
la carte des formations (Copref), où siégeaient les
représentants des deux académies, de la Draaf et de la région.
LE PASSAGE À UNE OFFRE DE FORMATION ENTIÈREMENT LIBÉRALISÉE
SANS MÉCANISME DE RÉGULATION RÉGIONAL
51
-
les formations de niveau 4 (baccalauréat), 28 % ;
-
les formations de niveau 5 (bac+2), 19 % ;
-
les formations de niveaux 6 (licence) et 7 (master), respectivement
6 % et 7 %.
Plus les niveaux étaient bas, plus les sections étaient nombreuses,
par choix, mais aussi car les sections étaient de plus petite taille et plus
dispersées.
Carte n° 1 :
offre de formation 2018-2019 par département
Source : Région.
Pour autant, entre 2016 et 2019, la région a créé 248 nouvelles
formations représentant 6 296 places, soit 10 % des places nouvelles en
apprentissage, réparties à parts égales entre les formations postbac et les
formations infrabac. Outre le développement d’une offre
de diplômes de
niveau 5 (bac+2),
l’accent a été mis sur la diversification du type d
e
certification
à travers l’ouverture de plusieurs titres professionnels en lien
avec les branches pour répondre directement aux besoins des entreprises
COUR DES COMPTES
52
(plus de vingt titres professionnels de soudeur, de gestionnaire de paie, de
chaudronnier, de conducteur livreur, de conducteur de transport interurbain
de voyageurs, de technicien réseaux câbles, etc.).
Ces nouvelles places se sont substituées pour partie à des places
existantes, à la suite de fermetures de formations, si bien que le nombre
global de places ouvertes
n’a crû que d’un peu plus de 1
100 places (2 %).
L’enjeu
était
de faire évoluer l’offre, de la diversifier ou de créer des filières
efficaces, pas
d’ouvrir
de nouvelles places. En effet, ces capacités restaient
largement théoriques, le taux d’occupa
tion anticipé des places restant
stable de 2016 à 2019 à 52 % ou 53 %. Ainsi, en 2019, sur 54 999 places,
les capacités réelles à mobiliser étaient estimées à 28 999, ce qui
correspond aux effectifs à fin d’année.
Le taux de sélectivité des demandes a été
inégal. La région n’a rejeté
pour les années 2017-2018 et 2018-2019 que 15 % des demandes de
création ou de modification des formations émanant des CFA, mais 28 %
pour 2016-2017.
Cohérente, l’offre régionale était donc assez peu évolutive.
Les
points de v
ue divergent sur l’ampleur des effets de cette procédure.
Même
les acteurs historiques les plus enracinés et proches de la région considèrent
que
l’inertie de la procédure
était très forte, avec des délais de latence (au
moins 18 mois entre le dépôt de la
demande et la mise en œuvre),
conduisant en cas de besoin à examiner
d’abord
l’ouverture de nouvelles
formations préparées par le biais du contrat de professionnalisation. Les
initiatives pouvaient également
être freinées par l’attention de la région à
limiter la mise en concurrence de certaines formations sous statut scolaire,
notamment au niveau du BTS. La région cherchait à composer avec la
demande des jeunes
et de leurs familles, sans qu’il existe
de consensus sur
sa doctrine en la matière : certains CFA estiment que la région priorisait
l’équilibre global de l’appareil de formation, tandis que d’autres
soulignaient que les besoins des entreprises pouvaient ne pas être
suffisamment pris en compte au regard des demandes des familles.
B -
Le développement m
assif de l’offre
avec la mise en œuvre de
la réforme
La libéralisation de la création des CFA et l’adossement du statut
des CFA à celui des organismes de formation continue ont conduit à une
démultiplication du nombre d’opérateurs déclarés comme CFA auprès
de
la Dreets
. La plupart d’entre eux
proposait déjà des contrats de
professionnalisation. En 2019, la région dénombrait 58 CFA ; en juin 2021,
LE PASSAGE À UNE OFFRE DE FORMATION ENTIÈREMENT LIBÉRALISÉE
SANS MÉCANISME DE RÉGULATION RÉGIONAL
53
la Dreets dénombrait 192 organismes de formation et d’apprentissage
(OFA) et 13 demandes supplémentaires étaient
en cours d’instruction, soit
205
organismes.
Ceux-ci
étaient
très
majoritairement
privés
(192 organismes privés contre 13 organismes publics). Ils recouvraient au
moins 173 organismes de formation et 22 CFA historiques, dont la
composition a elle-même changé. En effet, désormais, les EPLE ne sont
plus CFA mais sous-traitants du CFA « hors les murs » que constitue le
Greta-CFA ou le GIP-CFA, tandis que les maisons familiales et rurales
(MFR), auparavant rassemblées au niveau départemental, ont acquis leur
indépendance. En outre, certains CFA historiques étaient susceptibles de
ne pas encore avoir déposé leur déclaration d’activité.
L’implantation des OFA déclarés ne permet pas d’identifier l’offre
réellement disponible sur le territoire, puisqu’ils pe
uvent avoir des
antennes situées ailleurs que dans le département du siège ; en revanche, la
déclaration d’activité suppose d’avoir
accueilli un premier apprenti. Les
OFA peuvent conventionner avec d’autres opérateurs non déclarés pour
leur sous-traiter certaines prestations de formation. Ainsi, la base de
données des formations du Carif-Oref identifiait 382 organismes opérant
des formations en apprentissage en novembre 2021. Quel que soit le
périmètre auquel on s’attache, l’offre nouvelle
a enrichi tous les
départements, y compris les moins dotés
au plan de l’apprentissage, dont
le nombre de formations s’est également développé
30
. La nouvelle offre a
permis de développer des formations en apprentissage en dehors des
Bouches-du-Rhône qui en concentrait plus de la moitié en 2018. Ces
données doivent cependant être relativisées dans la mesure où il s’agit là
d’une offre théorique sans précision sur les capacités d’accueil. Les acteurs
locaux n’anticipent pas pour autant de fortes concurrences dans
les zones
rurales ou moins reliées aux agglomérations.
30
La base duplique la même formation dès lors que les dates en sont différentes, ce qui
accroît la hausse du nombre de formations au regard de la situation antérieure. En outre,
le caractère effectif des formations, c’est
-à-d
ire le fait qu’elles parviennent à recruter et
donc à avoir effectivement lieu, n’est pas connu. Une partie de cette offre n’est pas mise
en œuvre.
COUR DES COMPTES
54
Tableau n° 4 :
évolution de la répartition des organismes
de formation en apprentissage par département
Part des CFA
en 2018
Part des OFA
en 2020
Évolution du nombre
d’organismes offrant
des formations
en apprentissage
entre 2018 et 2020
Alpes-de-Haute-
Provence
3 %
3 %
250 %
Hautes-Alpes
2 %
2 %
400 %
Alpes-Maritimes
17 %
20 %
300 %
Bouches-du-Rhône
58 %
52 %
203 %
Var
10 %
15 %
400 %
Vaucluse
10 %
8 %
183 %
Région
100 %
100 %
242 %
Source
: juridictions financières d’après les données de suivi des déclarations d’activité à juin
2021 de la Dreets et des coûts de formation par CFA de la région en 2018.
Tableau n° 5 :
évolution du nombre de formations ouvertes
en apprentissage en 2018 et 2021
2018
2021
Évolution
2018-2021
Alpes-de-Haute-Provence
55
299
444 %
Hautes-Alpes
23
241
948 %
Alpes-Maritimes
213
1 118
425 %
Bouches-du-Rhône
716
2647
270 %
Var
167
1 276
664 %
Vaucluse
176
724
311 %
Source
: juridictions financières d’après les données de suivi des coûts de formation par CFA de
la région en 2018 et de la base de données des formations du Carif-Oref en novembre 2021.
L’offre nouvelle a, en revanche, significativement évolué en
matière
de niveaux de qualification proposés
: plus de la moitié de l’offre est de
niveau égal ou supérieur au niveau bac + 2 en 2021, contre 32 % en 2018.
LE PASSAGE À UNE OFFRE DE FORMATION ENTIÈREMENT LIBÉRALISÉE
SANS MÉCANISME DE RÉGULATION RÉGIONAL
55
Tableau n° 6 :
r
épartition par niveau de l’offre de formations
en apprentissage en 2018 et 2021
Niveaux
2018
2021
7
7 %
8 %
6
6 %
10 %
5
19 %
31 %
4
28 %
22 %
3
40 %
28 %
Source
: juridictions financières d’après les données de suivi des coûts de formation par CFA de
la région en 2018 et de la base de données des formations du Carif-Oref en novembre 2021.
L’autre
évolution majeure concerne les spécialités de formation. Les
six principaux groupes formation-
emploi de l’offre de formation à la
rentrée 2019
31
sont : services aux personnes (19 %), échanges et gestion
(19 %), mécanique, électricité, électronique (17 %), transformations
(14 %), génie civil, construction, bois (10 %), agriculture, pêche, forêts et
espaces verts (8 %). En 2021, les six principaux rattachements déclarés par
les organismes de formation et d’apprentissage sont les suivants
: échanges
et gestion (33 %), services aux personnes (16 %), communication et
information (13 %), services à la collectivité (8 %), domaine des capacités
individuelles (6 %), formation adaptée (4 %). Si les données sont de nature
différente entre 2019 et 2021, l’offre de format
ion a évolué au bénéfice des
formations tertiaires, notamment de services aux personnes et de soutien
aux entreprises, mais au détriment des formations dans les domaines
industriels et de la construction. En effet, contrairement aux formations à
lourds
plateaux
techniques,
ces
formations
ne
nécessitent
pas
d’investissements significatifs pour augmenter leurs capacités d’accueil,
d’autant que l’aide à l’équipement
que les Opco versent pour le compte des
apprentis (cf.
supra
)
permettre de financer l’équipemen
t numérique.
Ces évolutions se sont directement traduites dans la répartition des
entrées en contrat
d’apprentissage
en 2020, concentrées sur certains niveaux
de qualification et secteurs. L’offre rencontre alors la demande des jeunes et
de leurs familles pour des métiers du tertiaire, dans un contexte où l’image
associée aux métiers de l’industrie et de la construction
32
demeure dégradée,
malgré les ten
sions sur l’emploi et les perspectives de parcours pour les
31
Ces parts correspondent à l’offre de formation incluse la deuxième ou troisième année
menant au diplôme.
32
Le BTP résiste mieux que l’industrie, ce qui correspond d’ailleurs à la situation de
tension sur le marché du travail régional pour les ouvriers qualifiés du bâtiment moins
problématique que dans le reste de la France.
COUR DES COMPTES
56
apprentis. Ainsi, la croissance des entrées dans l’industrie en 2020 est trois
fois moins importante que celles dans le secteur tertiaire. Les effectifs dans
le secteur de l’hébergement et de la r
estauration ont également stagné depuis
2016 : si la crise sanitaire a empêché le secteur de bénéficier de la rentrée
très favorable de 2020, les facteurs semblent plus structurels et peuvent
correspondre également à un image défavorable liée aux conditions de
travail, difficiles, dans un contexte de nombreux emplois vacants.
Tableau n° 7 :
r
épartition des entrées en contrat d’apprentissage
par secteur de 2016 à 2020
2016
2017
2018
2019
2020
Évolution
2016/2020
Agriculture, sylviculture et pêche
413
382
428
446
594
+ 44 %
Industrie
3 413
3 364
3 309
3 795
4 864
+ 43 %
Construction
3 223
3 454
3 718
4 105
5 218
+ 62 %
Commerce ; réparation auto & moto
4 000
4 118
4 320
5 247
9 185
+ 130 %
Hébergement et restauration
2 752
2 576
2 527
2 688
2 882
+ 5 %
Soutien aux entreprises
2 045
2 152
2 302
3 119
5 406
+ 164 %
Autres secteurs tertiaires
4 550
4 590
4 840
6 222 10 911
+ 140 %
Total
20 397 20 635 21 443 25 622 39 061
+ 92 %
Source
: juridictions financières d’après Dares, SIA.
Au plan des CFA et réseaux de CFA historiques, certains ont mis en
oeuvre des projets rejetés par la région, sur des niveaux 5 et 6,
principalement dans le domaine tertiaire, en travaillant le cas échéant avec
un certificateur externe pour un déploiement rapidement de l’ingénierie
pédagogique. La plupart réfléchissent à développer leurs effectifs, par le
biais de la formation professionnelle continue (le cas échéant en sous-
traitance), y compris pour tester de nouvelles filières sur des appels à
projets de Pôle emploi ou de la région, avant de développer une offre en
apprentissage. Certains CFA consulaires ou de branche proposant
principalement des formations de niveau 5 et 4, avec des plateaux
techniques conséquents, cherchent plutôt à consolider leur positionnement
actuel par des partenariats avec d’autres CFA/UFA (voire des ab
sorptions)
pour développer l’offre de manière concertée et limiter des effets néfastes
de concurrence pour des formations dont le recrutement n’est pas toujours
simple. Si les relations sont bien établies entre ces CFA et l’éducation
nationale, une inquiétude se fait jour quant aux effets à moyen terme du
LE PASSAGE À UNE OFFRE DE FORMATION ENTIÈREMENT LIBÉRALISÉE
SANS MÉCANISME DE RÉGULATION RÉGIONAL
57
développement de classes mixtes
33
au sein des lycées professionnels
excentrés, dans des bassins où les jeunes sont peu nombreux.
C
omme l’illustre le tableau ci
-après, les CFA ont profité inégalement
de la hausse des entrées en 2020 : pas du tout pour les CFA de la chambre de
métiers et de l’artisanat régionale
ou municipaux tournés vers les niveaux
infrabac et les métiers artisanaux ; massivement pour les établissements de
l’enseignement supérieur ou
releva
nt d’entreprises ou de branche
s.
Tableau n° 8 :
effectifs en CFA selon le statut
de l’
organisme gestionnaire
Organisme gestionnaire
2017
2018
2019
2020
Évolution
2017-2020
EPLE
34
914
552
518
714
- 22 %
EPLE agricoles
2 067
2 036
1 966
2 962
+ 43 %
Établissements privés sous contrat
461
549
609
1 588
+ 244 %
Établissements de formation
ou de recherche (université, école)
0
0
988
3 293
+ 3 293 %
Collectivités locales
2 810
2 629
2 527
2 574
- 8 %
Chambres de commerce et d’industrie
2 338
2 408
2 610
2 659
+ 14 %
Chambres des métiers et de l’artisanat
5 498
5 524
5 348
5 425
- 1 %
GIP
1 331
1 701
1 763
2 835
+ 113 %
Associations
11 864
12 736
14 436
17 850
+ 50 %
Organisations professionnelle, entreprises
480
507
66
2 424
+ 405 %
Total
27 763
28 642
30 831
42 324
+ 52 %
Source : Depp, SIFA
La création de places dans de nouveaux CFA rend particulièrement
nécessaire l’exercice de la mission de contrôle pédagogique spécifique aux
CFA. Or, comme dans d’autres régions, celle
-ci peine à se mettre en place.
33
Les classes mixtes accueillent à la fois des élèves sous statut scolaire et des apprentis.
34
L’essentiel des effectifs rattachés historiquement aux EPLE (lycées) est désormais
décompté au sein de la catégorie GIP, du fait de la réorganisation des CFA de
l’éducation nationale autour de Gret
a et du CFA académique porté par un GIP.
COUR DES COMPTES
58
La mission de contrôle pédagogique des formations
en apprentissage en Provence-Alpes-Côte d'Azur
À
l’instar des autres régions, le lancement de la mission dans son
volet contrôle a connu des retards, notamment faute d’experts issus des
branches à désigner. Après une première vague de nominations en
février 2021 de 42 experts, complétée par 3 nouvelles candidatures en
octobre 2021 (11 représentant les chambres consulaires et 34 les
commissions paritaires nationales ou régionales de l'emploi), certaines
branches professionnelles ne sont pas encore représentées. Si la mission est
pleinement opérationnelle depuis le 1
er
septembre 2021, après deux
contrôles test, destinés à valider les protocoles et les outils de contrôle en
avril, la mission de contrôle demeure largeme
nt à mettre en œuvre.
À la suite des travaux du service académique d’inspection de
l’apprentissage (Saia) qui préexistait à la réforme, la MCPA conserve ses
missions de conseil et d’animation auprès des CFA, au titre des diplômes de
l’éducation nationale. Dans ce cadre, elle tente de toucher l’ensemble des
organismes de formation avec une attention spécifique pour les nouveaux
organismes déclarés, par des enquêtes qualité annuelles et la mise à
disposition de très nombreuses ressources en ligne, y compris une cellule de
réponses aux questions des CFA. En outre, plusieurs guides ont été élaborés
en commun avec la Dreets et la Draaf, à destination de l’ensemble des acteurs.
II -
Une animation régionale de la politique
d’apprentissage en pleine transition
Depuis la
mise en œuvre de la réforme qui a conduit à la mise en
retrait du conseil régional en 2019, une nouvelle gouvernance se dessine,
sans atteindre un niveau de maturité satisfaisant. Les relations entre les
services de l’État, la région, les Opco
- dont les directions régionales ont
des capacités et des mandats inégaux - et les CFA manquent de fluidité et
aucun acteur n’émerge pour coordonner efficacement les questions
d’alternance des jeunes, comme, côté apprentis, l’orientation, y compris
l’accès à l’information sur l’offre de formation, et l’attractivité des métiers
et, côté employeurs, la remontée efficace des besoins des branches vis-à-
vis
de l’appareil de formation.
Faisant désormais fonction, par défaut, d’animatrice de la politique
d’alternance, en raison des responsabilités exercées dans le déploiement de
la réforme de 2018, la Dreets peine pourtant à trouver sa place parmi les
acteurs de l’apprentissage.
Fortement mobilisées par la transformation de
LE PASSAGE À UNE OFFRE DE FORMATION ENTIÈREMENT LIBÉRALISÉE
SANS MÉCANISME DE RÉGULATION RÉGIONAL
59
la Direccte en Dreets depuis le 1
er
avril 2021, les équipes de la direction
régionale de l’État
ont principalement cherché à contribuer à la
fluidification des relations entre Opco et CFA et à assurer la mise en œuvre
d
es mesures décidées dans le cadre de la crise sanitaire. L’objectif était
d’assurer une sort
ie positive aux apprentis sans contrat ayant bénéficié de
la garantie de formation jusqu’à six mois, et de répondre aux difficultés
d’entreprises ne percevant pas l
es aides exceptionnelles.
Il est impossible pour le référent régional de développer des
relations étroites avec l’ensemble des organismes de formation dont le
nombre a fortement augmenté et fort difficile d’assurer seul un suivi des
enjeux parfois très loc
aux en matière d’offre. Une
meilleure coordination
est nécessaire entre
l’échelon régional et les services
dans les départements
(DDETS
) pour s’assurer d’une remontée d’information suffisante
.
Au-
delà de l’implication des services de l’État, des voies de
coopération et de coordination doivent être recherchées avec la région qui,
malgré la perte de sa compétence générale, demeure un acteur pivot du
dispositif. Outre des compétences directement liées à l’apprentissage,
comme les enveloppes financières à sa m
ain, le soutien à l’attractivité des
métiers ou encore la carte des formations initiales (et des formations
sanitaires et sociales), elle occupe surtout toujours une place centrale dans
l’animation du développement économique et continue à animer les
instr
uments centraux en matière d’i
dentification des besoins des filières
métiers (OIR, campus des métiers et des qualifications). En 2022, elle a
engagé
une politique conventionnelle avec les Opco incluant l’alternance
et engagé l’actualisation du contrat de p
lan régional de développement de
la formation et de l’orientation professionnelle (CPRDFOP)
. Son
implication est déterminante pour garantir la cohérence de l’offre de
formation en apprentissage à moyen terme. Plusieurs axes de coopération
existent donc entre la Dreets, le rectorat, la région et les Opco, dont par
exemple :
-
la mise à disposition de
données régionales en matière d’alternance et
leur valorisation, en étroite collaboration avec le Carif-Oref, pour
remédier aux asymétries d’informations importan
tes, du fait de la
transmission parfois tardive des données nationales consolidées par
les services statistiques ministériels ;
-
l’optimisation des dispositifs d’accompagnement et de formation des
jeunes les plus éloignés de l’emploi (
notamment ceux qui ne sont ni
en études, ni en formation, ni en emploi).
COUR DES COMPTES
60
______________________ CONCLUSION ______________________
L’offre de formation en Provence
-Alpes-
Côte d’Azur a connu un net
essor quantitatif, au cours de la période récente, malgré le contexte
sanitaire. Elle était contingentée jusqu’en 2019, dans le cadre d’une carte
des
formations élaborée par la région, sur la base de demandes d’évolution
des CFA, en tenant compte de l’avis des autorités académiques, des
branches professionnelles et du Crefop. Dans ce contexte, l’offre a crû
entre 2016 et 2019 de 10 % (en nombre de places) et de nouvelles
formations ont été créées, à parts égales dans les niveaux infrabac et
postbac. Elle demeurait cependant fortement contrainte par l’enveloppe
financière globale de la région et ses priorités, ainsi que par les délais de
latence entre l’expression de besoins et la réalisation, en moyenne 12 à
18 mois plus tard.
Avec la pleine mise en œuvre de la réforme en 2020, le paysage des
formations a été bouleversé. Le nombre d’organismes de formation a triplé
entre 2019 et 2021, portant la part des structures de droit privé à plus de
80 %. Du fait de la nouvelle liberté de création des CFA, de nombreux
organismes de formation opérant dans le champ de la formation continue
(en contrat de professionnalisation, tout particulièrement) ont développé
des formations en apprentissage, tandis que certains CFA historiques ont
également étendu leur offre (par le développement de classes mixtes dans
les EPLE, la création de nouvelles sections,
etc.). Il n’est pas possible de
connaître en
l’état des données les capacités réelles des formations
proposées par les organismes de formation au regard de celles des CFA
historiques. Cette offre nouvelle correspond à des niveaux de qualification
plus élevés et des spécialités tertiaires (soutien aux entreprises, commerce,
informatique, services aux personnes, etc.), ce qui est reflété par les
caractéristiques des effectifs d’apprentis. Elle n’apporte pas de réponse
pour certains secteurs en tension dans la région, tout particulièrement
l’hôtellerie
-
restauration, l’industrie, certains métiers artisanaux, faute
d’ailleurs d’attractivité de ces métiers pour les jeunes.
Ces enjeux d’adéquation de l’offre comme d’attractivité impliquent
un suivi de la politique d’alternance au niveau régional, où les acte
urs
impliqués sont à la fois nombreux et éclatés. Confrontée à des enjeux
d’organisation interne, la Dreets
serait
en mesure d’assurer une animation
performante de ce tissu d’acteurs en s’associant plus étroitement à la
région et, à terme, avec les Opco.
Chapitre IV
Des jeunes à mieux accompagner vers et
pendant leur formation en alternance
La mise en œuvre de la réforme n’a
pas permis de répondre à toutes
les difficultés rencontrées pour faciliter l’entrée en apprentissage et
sécuriser les parcours de formation. Des marges de progrès existent,
notamment en matière d’orientation (I) et d’accompagnement des jeunes
(II), ainsi que dans les aides allouées aux jeunes (III). La crise sanitaire a
par ailleurs perturbé le déroulement des formations (IV).
I -
L’orientation
A -
Des points d’orientation multiples
mais peu efficients
Depuis le 1
er
janvier 2015, le service public régional de l’or
ientation
(SPRO) réunit une pluralité d’acteurs dont la vocation est de conforter le
droit de chacun à l’orientation professionnelle tout au long de la vie par la
mise en réseau de l’ensemble des acteurs de l’orientation du territoire et
par la coordination de leurs actions
35
.
A
ux côtés de l’éducation nationale, qui demeure le principal
opérateur pour l’accueil, l’information et l’orientation des jeunes sous
statut scolaire, le CIO (Centre d'information et d'orientation) accueille tous
35
Article L. 214-16-
1 du code de l’éducation.
COUR DES COMPTES
62
publics et en priorité les élèves, leur famille, les étudiants et les apprentis ;
il les informe sur les études, les formations professionnelles, les
qualifications, les professions, en leur apportant un conseil individuel.
L’information est dispensée de manière neutre, gratui
te et pédagogique. Le
CIO travaille en étroite liaison avec l'Onisep qui réalise et met à disposition
des ressources et outils pour les élèves, les familles et les équipes
éducatives à tous les niveaux de la scolarité et dans tous les domaines
économiques.
Le
Carif
Espace
Compétences,
désormais
fusionné
avec
l’observatoire régional au sein d’un Carif
-Oref, occupe une place majeure
en tant que centre de ressources régional sur l’orientation
, la formation et
l’emploi.
Il joue
un rôle d’information et de professionnalisation des
acteurs grâce à sa plateforme multimodale, qui constitue un point d'entrée
unique, ouverte à tous. La Cité des métiers de Marseille et Provence-Alpes-
Côte d’Azur
intervient pour sa part dans la transmis
sion de l’information
et la valorisation des métiers pour l’orientation avec un déploiement
régional. Enfin, la
chambre de métiers et de l’artisanat régionale
a conduit
des actions utiles pour rendre attractive l’offre de formation en assurant un
premier niveau de proximité sur tous les territoires de la région, notamment
grâce à son réseau de proximité de centres d’aide à la décision (CAD)
, qui
rassemblent des personnels qualifiés autour de l’orientation des mineurs.
Toutefois, le
service d’orientation
demeure globalement sous-
efficient dans la région, et ce, pour plusieurs raisons. En premier lieu,
l
’ensemble des acteurs institutionnels rencontrés
mettent en exergue le
manque de visibilité de
l’offre de formation depuis la réforme
de 2018.
Dans une analyse publiée fin 2020
36
, le conseil économique, social et
environnement régional (Ceser)
regrette également que l’éducation
nationale entretienne si peu de relations avec les entreprises : si des
initiatives existent (guides, rencontres et ateliers), certains établissements
de l’
a
cadémie d’Aix
-
Marseille relèvent qu’il manque aux jeunes la
possibilité de découvrir de manière suffisamment approfondie les
entreprises et
les métiers. Les possibilités de se déplacer à l’extérieur pour
participer à un événement (de type forums des métiers, etc.) sont également
rares. Enfin, les stages de découverte s’avèrent insuffisants en
matière
d’accueil et de qualité.
La quasi-totalité des jeunes rencontrés en lycées professionnels ou
CFA
au cours de l’enquête a
connu la voie de l’apprentissage par
le
bouche-à-oreille
plus que par l’intermédiaire d
es coûteux dispositifs de
36
Conseil économique, social et environnement régional,
Les facteurs de réussite pour
l'accueil, l’information et l’orientation des jeunes en région
, 15 décembre 2020.
DES JEUNES À MIEUX ACCOMPAGNER VERS ET PENDANT LEUR
FORMATION EN ALTERNANCE
63
communication déployés par les institutions.
L’action nouvelle d
e la région
en la matière n’a pas pu être évaluée.
B -
L’absence de mesures de remédiation
à proprement parler
Les moyens alloués à la remédiation des jeunes, entendue comme
l’ensemble des dispositifs pour
combler des lacunes et corriger des
apprentissages erronés, demeurent difficiles à cerner en Provence-Alpes-
Côte d’Azur. En effet, l’image de l’apprentissage s’est progressivement
transformée, passan
t d’un dispositif
considéré comme une solution pour
des jeunes en difficulté scolaire à un dispositif préparant à des diplômes
réputés et reconnus pour
leurs performances d’insertion
.
C -
Un frein d’image difficile à lever
Plusieurs mesures ont été mises en œuvre par la
région pour
s’assurer que les dispositifs d’accès aux formations par apprentissage
soient connus et appréhendés de manière plus valorisante par les jeunes et
leurs familles.
Mais de nombreux acteurs économiques continuent de considérer
que l’image de l’apprentissage donnée par l’éducation nationale reste
dévalorisante pour les métiers pour lesquels la qualification préparée est de
niveau inférieur ou égal au baccalauréat.
D -
Un accompagnement vers l’apprentissage
à l’efficacité contrastée
Très peu de temps avant la réforme de 2018, le conseil régional avait
investi la piste des « classes préparatoires à
l’apprentissage
» le long du
littoral mais aussi dans l’arrière
-pays. Ce dispositif visait à faire découvrir
l’environnement professionnel à tout jeune volontaire ayant atteint l’âge
effectif de 15 ans au moment de la rentrée scolaire et qui avait déjà un
projet d’orientation vers la voie professionnelle, en particulier par la voie
de l’apprentissage.
Faute de recul
, il est difficile d’en tirer des conclusions.
En parallèle, les académies ont été encouragées à mettre en place
des « sas apprentissag
e » préparant à l’entrée en formation sous statut
d’apprenti et des dispositifs d’accompagnement permettant aux jeunes de
débuter leur formation à temps plein, puis de la poursuivre en alternance
COUR DES COMPTES
64
dès la signature d’un contrat. En outre, la région est signataire d’une
convention de partenariat renforcé avec Pôle emploi dans laquelle figurait
des dispositions relatives à l’apprentissage
.
Ces dispositifs « prépa-apprentissage » attirent difficilement les
jeunes et ne remplissent pas la moitié des places offertes. Certaines limites
freinent le succès des recrutements : au-
delà du manque d’attrait pour la
filière apprentissage, les difficultés pour se loger, les carences en matière
de transport, le manque de ressources pour se restaurer sont
systématiquement évoqués. En outre, la plupart des jeunes décrocheurs,
souvent en perte de repères, manquent de motivation et peuvent trouver
difficile de s’engager doublement à terme (à savoir, auprès du centre de
formation et auprès de l’employeur).
Ces points faibles semblent toutefois moins marqués quand
l’établissement de formation mobilise des moyens spécifiques au bénéfice
d’un
public très ciblé, comme par exemple les jeunes étrangers. Ainsi, le
CFA régional Urma Paca a expérimenté un module « accompagnement du
public allophone » sur son campus de Gap (Hautes-Alpes).
II -
La relation tripartite entre le jeune, le CFA
et l’entreprise
: des marges de progrès
A -
L’appariement avec les entreprises
: des innovations
inégalement mobilisées
La relation du jeune avec l’entreprise est un
élément clef de la
réussite de l’apprentissage du début à la fin. En effet, l’accès à une
formation en apprentissage est conditionné à l’obtention d’un contrat avec
un employeur, avant l’entrée au CFA ou dans les trois mois suivants (portés
à six mois dans le cadre de la crise sanitaire). Par ailleurs, le décrochage au
sens scolaire revient à un risque de rupture du contrat dans le cadre de
l’apprentissage, donc l’enjeu clef pour la réussite de parcours est le
maintien de la relation contractuelle.
La région a soutenu deux initiatives qui constituent des standards de
l’action des régions en matière d’apprentissage, avec un succès
inégal :
le soutien au recrutement de
développeurs
de l’apprentissage
(par une
aide à la rémunération du poste à hauteur de 12 00
0 €
), qui a permis de
doter 20 CFA d’un tel poste en 2018. Le rôle du développeur est d’être
le lien entre le CFA et l'employeur public ou privé afin de prospecter,
DES JEUNES À MIEUX ACCOMPAGNER VERS ET PENDANT LEUR
FORMATION EN ALTERNANCE
65
promouvoir l’apprentissage
et détecter les besoins en compétences. Il
accompagne l’entreprise dans sa recherche d’un apprenti, facilite la
signature des contrats d’apprentissage et aide l’entreprise à mobiliser les
aides. Enfin, il contribue par sa relation privilégiée avec
l’employeur
à
prévenir les ruptures de contrat. Le poste est centré sur
l’entreprise
et ses
besoins dans la région, mais certains CFA, notamment consulaires,
développent des approches davantage à parts égales entre entreprise et
apprenti dans la définition des tâches des développeurs, avec l’idée de
capitaliser sur la bonne connaissance
de l’apprenti pour
cibler
l’
entreprise adaptée ;
la
bourse régionale d’offres de contrats en apprentissage
baptisée
banque r
égionale de l’
e
mploi et de l’
apprentissage (Brea), créée en
juin 2016, vise à faciliter la mise en relation de
l’offre et de la demande
de stage, d
’apprentissage et d’emploi, en facilitant la découverte d’offres
et en permettant des échanges directement
via
un espace sécurisé ; elle
joue aussi le rôle de plateforme d’information
.
Fondée sur un partenariat avec Pôle emploi, la bourse régionale est
en réalité ciblée sur la recherche d’emploi. Ainsi, depuis sa création, sur
plus de 100 000 offres déposées, on ne compte que 3 481 offres de stage
ou d’apprentissage
; la fonction «
demande de contrat d’apprentissage
» est
également très peu utilisée (quelques centaines par an). Les CFA ne se sont
pas appropriés la Brea, certains considérant
qu’elle vise la mise en relation
directe entre les jeunes et les entreprises. Cependant, la sous-utilisation de
la plateforme illustre
la nécessité de susciter l’offre chez les entreprises et
le fait que l’ensemble des acteurs fonctionne plutôt en filière courte et en
proximité, dans une logique de réseau et de confiance mais aussi
d’efficacité. Le fait que la B
rea existe sans lien avec les systèmes
d’information des CFA (notamment de gestion des contrats) limite son
intérêt pour ces derniers. Dans un contexte de croissance forte des effectifs
et d’éventuelles tensions sur certains secteurs, la bourse pourrait jouer un
rôle renouvelé, à c
ondition d’être réellement appropriée par les chefs
d’entreprise et les jeunes, c’est
-à-dire intégrée aux processus des CFA.
Les CFA proposent tous une collecte des offres de recrutement,
accessible sur demande au CFA, et une liste d’employeurs recourant
r
égulièrement à l’apprentissage. Les réseaux proposent aussi désormais des
conseils en matière de rédaction des
curriculum vitæ
et de mise en relation.
Certains CFA proposent, en outre, des ateliers en amont de la rentrée. Ces
dispositifs sont ciblés sur les plus jeunes et les bas niveaux de qualification.
Pour les niveaux BTS et supérieurs, l’accompagnement est très limité. La
recherche de contrats est inégalement difficile selon la tension du marché
du travail sur les métiers concernés. L’obtention d’un co
ntrat implique
COUR DES COMPTES
66
d’anticiper suffisamment la rentrée en apprentissage et le soutien du CFA
n’est accessible qu’une fois acquise la pré
-inscription qui se concrétisera à
la signature du contrat, sauf cas particuliers. Certains CFA conçoivent
également certains parcours de « prépa-apprentissage » comme des sas
permettant de faciliter le recrutement par la suite.
B -
Des taux de rupture des contrats d’apprentissage
très importants
Durant la formation, les CFA assurent un suivi
via
le livret de
formation complété par l’employeur et une visite en entreprise (parfois
deux,
dont une durant la période d’essai, dans certains CFA). L’axe central
de l’action du CFA est la prévention des ruptures, ces dernières pouvant
signifier à terme la sortie de formation.
L’enquête
InserJeunes
témoigne d’
une situation dégradée en
Provence-Alpes-
Côte d’Azur
, où
les taux d’interruption en cours de contrat
sont, à tous les niveaux de qualification, supérieurs à la moyenne nationale.
Tableau n° 9 :
taux
d’interruption de contrats
des sortants 2018-2019
Niveaux
Provence-Alpes-
Côte d’Azur
France entière
(sauf Mayotte)
CAP
47 %
39 %
Mention complémentaire niveau 3
28 %
21 %
Autre qualification niveau 3
28 %
21 %
Baccalauréat professionnel
42 %
32 %
Brevet professionnel
40 %
32 %
Mention complémentaire niveau 4
13 %
11 %
Autre qualification niveau 4
24 %
22 %
BTS
30 %
26 %
Autre qualification niveau 5
29 %
21 %
Ensemble
42 %
33 %
Source : Dares, InserJeunes.
DES JEUNES À MIEUX ACCOMPAGNER VERS ET PENDANT LEUR
FORMATION EN ALTERNANCE
67
La région et les CFA calculent différemment les taux de ruptures de
contrat. P
our l’année 2017
-2018, les taux étaient les suivants :
-
taux de rupture sur l’année de formation
(et non sur la durée du
contrat) : 21 % selon les données régionales ;
-
taux de rupture net (prenant en compte la signature
d’un nouveau
contrat après une rupture) : 14,5 %
37
.
La région réalisait une enquête annuelle de suivi des ruptures de
contrat, CFA par CFA, avec des données qualitatives, que ne permet pas
d’obtenir l’enquête
InserJeunes
.
Tableau n° 10 :
devenir des apprentis en rupture de contrat
à trois
mois pour l’année 2017
-2018
Suites
Part des jeunes ayant
connu une rupture de
contrat
Emploi
12,5 %
Retour en formation hors apprentissage
0,8 %
Retour en formation initiale sous statut scolaire
4,5 %
Retour en formation en contrat de
professionnalisation
0,6 %
Signature
d’un
nouveau contrat d'apprentissage
avec changement d'entreprise et de diplôme
5,3 %
Signature
d’un
nouveau contrat d'apprentissage
avec changement d'entreprise et même diplôme
25,8 %
Signature
d’un
nouveau contrat d'apprentissage
avec même entreprise et changement de diplôme
1,1 %
Autres (non connus)
35,8 %
Sans signature de nouveau contrat d'apprentissage
13,6 %
Total
100 %
Source : région
37
L’enquête
InserJeunes
évalue une probabilité de rupture du contrat sur sa durée
complète (en moyenne, autour de 18 mois) ; les CFA évaluent le taux de rupture annuel,
comme le nombre de jeunes ayant connu une rupture de contrat pendant l’année de
formation, rapporté au total des effectifs en apprentissage ; ils suivent aussi le taux de
rupture net, c’est
-à-dire, le nombre de jeunes en rupture de contrat dont on déduit le
nombre de jeunes ayant signé un nouveau contrat par la suite, rapporté à l’effectif gl
obal.
COUR DES COMPTES
68
Les causes des ruptures de contrat sont diverses, comme le souligne
le tableau ci-après, ce qui implique un accompagnement global du jeune,
bien que centré sur la relation avec l’employeur.
Tableau n° 11 :
motifs de la rupture du contrat
pour l’année 2017
-2018
Motifs
Effectifs
%
Rupture en période d'essai
1 253
20 %
Rupture amiable
3 615
59 %
Rupture après réussite à l'examen
232
4 %
Situation conflictuelle
195
3 %
Rupture à l’initiative de l’apprenti, dont
:
731
12 %
Conditions de travail
241
4 %
Déménagement
97
2 %
Erreur d'orientation
326
5 %
Plein droits (décès, invalidité, etc.)
4
0 %
Raisons médicales
63
1 %
Rupture à l’initiative de l’employeur dont
:
150
2 %
Cessation d'activité
93
2 %
Embauche de l'apprenti
46
1 %
Licenciement
10
0 %
Perte de l'habilitation
1
0 %
Total
6 176
100 %
Source
: juridictions financières d’après les données de la région.
La principale mesure de la réforme de 2018 en matière de prévention
des ruptures de contrat a été le renforcement du rôle des médiateurs
consulaires, compétents pour l’ensemble des
CFA. Ces médiateurs sont
largement inconnus des CFA de la région, y compris au sein des réseaux
consulaires.
La crise sanitaire et l’absence de communication à ce sujet
n’ont pas favorisé leur montée en puissance
. Cependant, le nouveau mode
de financement
comme les marges de manœuvre financières nouvelles de
CFA, en même temps que la certification Qualiopi, pourraient avoir un
effet sur les taux de rupture, en permettant le recrutement de personnels
consacrés à la relation tripartite entre le jeune, le CFA
et l’
entreprise.
DES JEUNES À MIEUX ACCOMPAGNER VERS ET PENDANT LEUR
FORMATION EN ALTERNANCE
69
III -
Une refonte des aides aux apprentis,
désormais moins ciblées
A -
Des services collectifs et des aides très ciblées sur les
apprentis en difficulté sociale avant la réforme de 2018
L’alternance conduit à des dépenses supplémentaires pour les
apprentis, en matière
de mobilité, d’hébergement, de restauration ou
d’équipement. Les régions ont développé des aides pour que ces dépenses
ne constituent pas des freins d’accès à l’apprentissag
e ou des motifs de
rupture de contrat et, plus généralement, pour soutenir les apprentis.
La politique d’aides aux apprentis de la région
Provence-Alpes-Côte
d’Azur
passait par deux vecteurs :
-
la participation financière aux services collectifs de transports, de
restauration ou d’hébergement
gérés par les CFA ;
-
des aides individuelles aux apprentis, d’ampleur limitée.
La participation financière aux services collectifs proposés par les
CFA par la région s’él
evait
à plus de 1,7 M€ par an au titre des année
s 2017
à 2019, soit environ
60 € par apprenti et par an. La hausse des dotations en
2019 correspond à une double dépense pour 2018-2019, afin de solder les
dépenses de la région dans le cadre du transfert de compétences et de
faciliter la transition vers le financement des frais annexes pris en charge
par les Opco à compter du 1
er
janvier 2020.
Graphique n° 5 :
dépenses régionales en matière de services collectifs
THR (transport, hébergement, restauration) entre 2016 et 2019
Source : région.
COUR DES COMPTES
70
En outre, la région finançait
trois types d’aides individuelles
très
ciblées :
-
l’aide à l’acquisition du premier équipement professionnel
: cette aide
forfaitaire était attribuée aux apprentis de première année, dont la
formation nécessitait un équipement spécifique dans les niveaux 3
et 4
; d’un montant annuel moyen de 1,5 M€
, ce dispositif touchait à
peu près 30
% des effectifs, soit 185 € par apprenti en moyenne
;
-
des aides financières ponctuelles
via
un fonds d’aide régional aux
apprentis (Fara) permettant de soutenir les apprentis en situation de
précarité dans leurs dépenses quotidiennes en matière de transport
(dont éco-bonus et aide au permis de conduire), de santé, de
restauration et d
’hébergement
(cf. encadré) ;
-
la mobilité européenne des apprentis : la région soutenait des stages
d’une
durée
d’une
à
huit
semaines
dans
un
pays
de
l’Union
e
uropéenne par la participation aux frais d’hébergement, de
restauration et de transport. En 2018, 36 projets pour 590 apprentis ont
été financés.
Le fonds d’aide régional aux apprentis
(Fara)
Les dépenses du fonds se sont élevées à
1 M€ en 2018
. Le montant
moyen de l’aide s’éleva
i
t de 856 € en 2016 à 981 € en 2019 par apprenti (
le
plafond étant fixé à 1
200 €).
Il pouvait financer les dépenses suivantes :
-
la mobilité : financement calculé sur un barème kilométrique, permettant
le remboursement sur justificatifs de transports en commun hors
dispositifs de transport financés par la région (abonnement Zou !, etc.) et
le soutien à l’obtention du permis de conduire
;
-
la restauration au titre des périodes de formation : prise en compte des
dépenses engagées attestées par le CFA et sur facture acquittée au nom de
l’apprenti, dans le cas des internats ou service de restauration
; sinon,
forfait de 4 €
;
-
l’hébergement
: participation aux frais eng
agés par l’apprenti sur
présentation de justificatifs, dépenses acquittées plafonnée à 250 €
; en cas
d’internat, prise en charge à hauteur de 50 % de la facture acquittée au
nom de l’apprenti
; en cas d’hébergement personnel, prise en charge à
hauteur de
50% d’une facture acquittée au nom de l’apprenti avec
déduction des éventuelles aides sociales ;
DES JEUNES À MIEUX ACCOMPAGNER VERS ET PENDANT LEUR
FORMATION EN ALTERNANCE
71
-
la santé : prise en charge à 100 % de la facture annuelle de la mutuelle au
nom de l’apprenti, dans la limite de 50 €
.
Le fonds était sollicité fortement par les apprentis inscrits dans
certaines formations, très stables sur les années 2016-2019 : formations
courtes d’apprentis peu qualifiés dans les activités de comptabilité
et gestion,
de jardiniers paysagistes ou encore en cuisine et coiffure ; formations plus
longues pour les managers ou les conseillers de clientèle-banque.
De manière générale, d’après les comptes des CFA en 2018, la
dépense en aides
au titre du transport, de l’hébergement et de la restauration
par apprenti de la région était significativement inférieure à la moyenne
nationale (
172 € contre 308 € en 2018).
B -
Une prise en charge par les Opco depuis 2020
qui laisse de côté les aides au transport
Avec la mise en œuvre de la réforme de 2018, les Opco ont repris
l’essentiel des aides facultatives r
égionales antérieures, au titre des frais
annexes des formations (article D. 6332-83 du code du travail). Mais ces
frais doivent être directement supportés par les CFA pour être pris en
compte. Ils sont catégorisés ainsi :
-
frais de restauration et d’héberg
ement : montant par repas et par nuitée
(le plafonnement en vigueur a été remplacé par un forfait national
d’un
montant en avril 2020 respectivement de 3
€ et 6 €)
;
-
frais de premier équipement
: forfait déterminé par l’Opco en fonction
des activités de l’apprenti (identique pour l’ensemble des CFA), dans
la limite de 500 €
; ces frais sont très différents selon les Opco : si la
plupart sont au maximum, certains identifient des formations pour
lesquelles il n’y a pas de prise en charge de frais
;
-
frais de mobilité internationale
: forfait déterminé par l’Opco
(identique pour l’ensemble des CFA).
La prise en charge des frais annexes a été perturbée en 2020, en
raison des retards de traitement de la prise en charge des contrats eux-
mêmes, dont les procédures de facturation et le calendrier de décaissement
diffèrent.
Les Opco n’ont pas de compétences en matière d’aides au transport,
ce qui est problématique pour les CFA non accessibles par les transports
en commun, notamment dans les Hautes-Alpes ; les CFA de la chambre de
COUR DES COMPTES
72
métiers et de l’artisanat régional
ont été conduits à autofinancer la desserte
historique, avec l’appui de l
eur organisme gestionnaire.
Il n’existe plus non plus de soutien particulier pour les apprentis en
situation de précarité, qu’il incom
berait désormais aux CFA eux-mêmes
d’assumer, dans un contexte où la plupart des frais sont avancés par
l’apprenti et compensés
par la suite
, selon un calendrier qu’il ne maîtrise pas.
La question des apprentis en situation de précarité est d’autant plus p
régnante
si l’objet est d’orienter vers l’apprentissage davantage de jeunes ni
en études,
ni en formation, ni
en emploi, souvent en difficulté d’insertion sociale.
L’étude de l’U
rhaj Paca & Corse sur les freins liés au logement
L’U
rhaj Paca & Corse a réalisé une étude pour la Dreets en
novembre 2019 afin d’identifier, sur le territoire Ouest Provence
-Martigues,
les freins liés au logement dans le développement de l’apprentissage,
particulièrement au profit des jeunes suivis par les missions locales.
Le
rapport souligne l’implication des acteurs locaux dans
l’apprentissage pour élargir le vivier habituel mais également le manque de
logements adaptés, en particulier sur le secteur Istres
Miramas, qui a pour
conséquence une « perte » directe en inscriptions évaluée entre 35 et
50
jeunes par an. Il s’agit de jeunes ayant renoncé à s’inscrire faute de
solution de logement après s’être renseignés auprès de l’établissement ou
avoir entamé des démarches d’inscription. La problématique
du logement
est liée aux spécificités des apprentis : jeunes et peu autonomes ; ayant
besoin du logement de manière séquentielle ; faiblement rémunérés ; ne
pouvant pas bénéficier des aides liées au logement pour deux résidences.
Concrètement, la zone couvre 1 000 places en apprentissage et près
du même nombre d’apprentis. L’offre de logement identifiée est de
400 places : 250 places dans les internats en lycée professionnel, 130 places
dans des résidences, 20 places dans des logements de courte durée ou des
chambres chez l’habitant ; s’y ajoutent 400 places aujourd’hui non
mobilisées à cette fin, correspondant à la résidence de l’A
fpa et à
l’internat
du lycée général.
Les leviers d’action pour développer l’offre sont limités et connus :
démarche partenariale globale entre établissements de formation et avec les
organismes d’insertion et
les collectivités ; intermédiation locative ;
identification de zones cibles pour y mobiliser le potentiel sous-utilisé.
In
fine
, la principale solution repose sur le soutien à la mobilité. La
problématique du logement est aggravée dès lors que la desserte en
transports en commun est limitée, ce qui implique de résider en proximité
du CFA ou de l’employeur plutôt qu’au domicile familial
, par exemple.
DES JEUNES À MIEUX ACCOMPAGNER VERS ET PENDANT LEUR
FORMATION EN ALTERNANCE
73
IV -
L’impact de la crise sanitaire
A -
Une tentative pour poursuivre la formation
dans le respect des règles sanitaires
Au plus fort de la crise sanitaire, le taux de maintien de l’activité de
formation ou de poursuite à distance en Provence-Alpes-
Côte d’Azur était
proche, bien que légèrement inférieur, de la moyenne nationale. Ont été
mises en place des mesures sanitaires
ad hoc
, ainsi que des dispositifs de
formation à distance de qualité inégale. L
a Dreets, par l’intermédiaire du
service de l’inspection du travail, a conduit une série de contrôles pour
garantir la santé des apprentis accueillis au sein des établissements.
Les mesures de sécurité et de continuité mises en place ont par la suite
évolué au fil des mois. Dans un premier temps, les CFA de Provence-Alpes-
Côte d’Azur ont
, pour la plupart, renforcé leur protocole sanitaire, avec le
port du masque obligatoire, le respect des règles de distanciation, le
dédoublement des groupes d’apprentis, l’instauration d’un mélange de
pédagogie en présentiel et en
distanciel et l’adaptation des emplois du temps.
B -
Les conséquences en matière de pédagogie
et d’accueil des apprentis
Après le premier confinement du printemps 2020, les CFA ont été
pour la plupart
dans l’obligation de réaménager le
urs locaux et de
s’approvisionner en matériel.
Les responsables de CFA relèvent que la
solution du distanciel ne peut demeurer que provisoire, dans la mesure où
la technologie est encore peu adaptée à la transmission du savoir et des
gestes techniques enseignés aux apprentis.
La tendance actuelle est à
l’hybridation des cours, entre
téléformation et présence dans des salles aménagées. Les visites
d
’organismes proposant des formations en
apprentissage dans le cadre de
l’enquête ont
confirmé
que l’apprentissage de la manipulation de machines
ou de matériaux rend impossible d’envisager,
à court terme, la
digitalisation complète des enseignements professionnels. Même pour des
formations tertiaires sur logiciel, les apprentis rencontrés préfèrent le
maintien de cours en présentiel, que les enseignants maîtrisent souvent
mieux, faute de formats et de contenus adaptés à la voie numérique.
COUR DES COMPTES
74
______________________ CONCLUSION ______________________
Il existe une multitude de points d’orientation en Provence
-Alpes-
Côte d’Azur (CIO, Onisep, Carif
-Oref) mais leur action est affaiblie par le
manque de clarté de l’offre de formation engendrée
par la réforme
de
2018. De plus, si l’apprentissage n’est plus considéré comme une voie
réservée aux jeunes en difficulté scolaire, de nombreux acteurs
économiques continuent à considérer
que l’image donnée par l’éducation
nationale de l’apprentissage rest
e dévalorisante, pour les formations ne
dépassant
pas
le
niveau
du
baccalauréat.
Plusieurs
dispositifs
d’accompagnement vers l’apprentissage sont expérimentés
dans la région,
sans toutefois parvenir à lever les difficultés matérielles des jeunes en
matière de logement ou de mobilité.
Les marges de manœuvre financières nouvelles et l’aiguillon de la
certification Qualiopi et de la concurrence entre centres doivent contribuer
à soutenir une démarche renforcée de prévention et de lutte contre les
ruptures de
contrat d’apprentissage
. Dans un contexte de croissance de
l’offre, l’enjeu est que tous les organismes de formation, y compris ceux
qui ne bénéficient pas d’un réseau ou de moyens significatifs,
s’approprient davantage encore ces enjeux, notamment sous l’angle de la
prévention. Les médiateurs consulaires,
aujourd’hui inexistants dans le
paysage régional, devront y contribuer, ainsi que la sensibilisation par les
Opco ou la mission de contrôle pédagogique.
La réforme conduit à un bouleversement significatif du paysage
des aides aux apprentis, ou plutôt de la prise en charge de leurs frais. Si la
région privilégiait le financement de services collectifs proposés par les
CFA, décidés dans le cadre du dialogue de gestion annuel, et concentrait
les autres ressources sur les seuls apprentis en situation de précarité, les
Opco contribuent aux frais annexes
de restauration et d’hébergement de
tous les apprentis en contrat, dès lors que les coûts sont supportés par le
CFA. En revanche, certains services collectifs ne sont plus pris en
charge dans le nouveau cadre, notamment en matière de dessertes de
transport dans les territoires enclavés.
Enfin,
les CFA comme les services de l’
État ont fait preuve de
réactivité face à la crise sanitaire. Les réflexions sur les conséquences et
les leçons à en tirer demeurent toutefois trop limitées à ce stade pour
définir un modèle d’offre d’apprentissage tout à fait résilient au bénéfice
des jeunes.
Conclusion générale
En Provence-Alpes-
Côte d’Azur, à l’instar du reste de la France, la
réforme de 2018 a permis une croissance des effectifs en apprentissage
contribuant à une dynamique de rattrapage après leur baisse durable. Elle
est à relier au
développement de l’offre de formation
, principalement en
direction des formations tertiaires postbac en agglomération, engendré par
la libéralisation de la création des CFA. Une part de ces effectifs comme
de l’offre semble découler d’un effet de déport de contrats de
professionnalisation vers les contrats d’apprentissage. Ont aussi émergé de
nouveaux employeurs d’apprentis, grâce à un renforcement de la
communication et surtout aux aides exceptionnelles mises en place à
l’été
2020 pour faire face à la crise sanitaire. Dans le contexte régional
marqué par un tissu de petites entreprises artisanales et par les secteurs
touristique et industriel, le renforcement des effectifs était un enjeu clef qui
trouve désormais une réponse.
Dans un souci d’équilibre territorial, dans une région marquée par
des phénomènes d’enclavement, et de développement des métiers
artisanaux en tension, il convient de demeurer attentif au maintien de
formations de proximité aux effectifs faibles à moyens, qui peuvent
désormais être soutenues par l’enveloppe régionale de majoration des
financements versés par les Opco aux CFA au titre de leurs dépenses de
fonctionnement. La réforme a mis un terme à la coopération des acteurs
régionaux, historiques comme nouveaux (les opérateurs de compétence,
par exemple),
sur les questions d’apprentissage, même si les réseaux de
CFA travaillent à leur échelle à des partenariats et à de la mutualisation
pour renforcer leur performance, par-delà le climat général de concurrence
qui prédomine. En conséquence, on peut s’interroger sur le risque d’un
désalignement à moyen terme entre l’offre tirée par la
demande des jeunes
et de leurs familles - mais aussi les offres de contrats des entreprises - et
les besoins structurels des filières économiques de la région pour construire
le renouvellement de leurs ressources humaines. Le présent rapport, centré
sur l’année 2020, par ailleurs perturbée par les aides exceptionnelles et la
crise sanitaire, ne permet pas de tirer de conclusion définitive en la matière.
Liste des abréviations
Agefiph
.........
Association de gestion du fonds pour l'insertion des personnes
handicapées
Ardir
.............
Association régionale des directeurs de CFA
ARDML
.......
Association régionale des missions locales
ASP
.............
Agence de services et de paiement
BEP
..............
Brevet d'études professionnelles
Brea
..............
Banque régionale de l’emploi et de l’apprentissage
BTP
..............
Bâtiment et travaux publics
BTS
..............
Brevet de technicien supérieur
BUT
..............
Bachelor universitaire de technologie
CAD
............
C
entre d’aide à la décision
CAP
..............
Certificat d'aptitude professionnelle
Carif-Oref
.....
Centre animation ressources d'information sur la formation -
Observatoire régional emploi formation
CCI
...............
Chambre de commerce et d’industrie
Céreq
............
Centre d’études et de re
cherches sur les qualifications
Ceser
............
Conseil économique, social et environnemental régional
CFA
..............
Centres de formation d'apprentis
CIO
...............
Centre d’information et d’orientation
CMA
............
Chambre de métiers et de l’artisanat
CNFPT
.........
Centre national de la fonction publique territoriale
Copref
……..Comité opérationnel régional d’évolution de la carte des formations
CPRDFOP
....
Contrat de plan régional de développement des formations et de
l’orientation professionnelles
CQP
..............
Certificat de qualification professionnelle
Crefop
..........
Comité régional de l'emploi, de la formation et de l'orientation
professionnelles
Dares
............
Direction de l’animation de la recherche, des études et des
statistiques
Depp
.............
Direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance
DGEFP
.........
Délégation gén
érale à l’emploi et à la formation professionnelle
Draaf
............
Direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt
COUR DES COMPTES
78
Drafpic
.........
Direction régionale académique à la formation professionnelle
initiale, continue et l'apprentissage
Dreets
...........
Direction rég
ionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des
solidarités
DUT
.............
Diplôme universitaire de technologie
EPLE
............
Établissement public local d'enseignement
ETP
.............
Équivalent temps plein
Fara
.............
F
onds d’aide régional aux apprentis
GIP
...............
Groupement d'intérêt public
Greta
.............
Groupement d’établissements
Ifria
...............
Institut de formation agroalimentaire
Irfedd
...........
Institut régional de formation à l’environnement et au
développement durable
IUMM
..........
Union des industries et métiers de la métallurgie
MCPA
..........
Mission de contrôle pédagogique des formations par apprentissage
MFR
............
Maisons familiales et rurales
MSA
............
Mutualité sociale agricole
Psad
.............
Plateforme de suivi et d’appui aux décrocheurs
OFA
..............
Organismes de formation et d’apprentissage
OIR
...............
Opération d’intérêt régional
Onisep
.........
Office national d'information sur les enseignements et les
professions
Opco
.............
Opérateur de compétences
QPV
..............
Quartier de la politique de la ville
Saia
...............
Service académique d’inspection de l’apprentissage
SPRO
...........
S
ervice public régional de l’orientation
TPE
..............
Très petite entreprise
TICPE
..........
Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques
Urma
............
Université régionale des métiers et de l'artisanat
Annexes
Annexe n° 1 : indicateurs
régionaux en matière d’emploi
.............................
80
Annexe n° 2
: les aides aux employeurs d’apprentis
......................................
82
Annexe n° 3 : les ressources des CFA en Provence-Alpes-
Côte d’Azur
de 2016 à 2018
...............................................................................................
83
Annexe n° 4
: dépenses et recettes d’apprentissage de la région
Provence-Alpes-
Côte d’Azur
..........................................................................
85
Annexe n° 5 : comparaison entre les coûts préfectoraux et les niveaux
de prise en charge
...........................................................................................
86
COUR DES COMPTES
80
Annexe n° 1 :
indicateurs régionaux
en matière d’emploi
Graphique n° 6 :
r
épartition des entreprises par secteur d’activité
en
Provence-Alpes-
Côte d’Azur
et en France métropolitaine à fin 2017
Source : Insee et Pôle emploi
ANNEXES
81
Graphique n° 7 :
évolution
de l’emploi salarié par secteur
en Provence-Alpes-
Côte d’Azur
Source : Insee
COUR DES COMPTES
82
Annexe n° 2 :
les aides aux employeurs
d’apprentis
À compter du 1
er
janvier 2019,
quatre dispositifs d’aide aux
employeurs d’apprentis
, dont deux qui étaient versés par les régions, ont
été remplacés par une nouvelle aide unique. La région a encore versé en
2019 et en 2020 (et marginalement en 2021)
la prime d’apprentissage au
titre des contrats dont la signature était antérieure au 1
er
janvier 2019.
Tableau n° 12 :
aides aux employeurs versées par la région
Type d’aide
2016
2017
2018
2019
Prime à
l'apprentissage
(1
000 € par année
de formation)
Montants décaissés (€)
10 012 925 10 250 791 10 017 719
6 300 818
Nombre d'aides
8 532
14 575
14 495
4 610
Aide moyenne (€)
1 174
703
691
1 367
Aide au recrutement
d'apprenti
supplémentaire
(1 000
€ pour les
entreprises de moins
de 250 salariés)
Montants décaissés (€)
5 885 000
6 903 000
7 017 000
4 032 000
Nombre d'aides
1 946
7 284
7 178
4 138
Aide moyenne (€)
3 024
948
978
974
Source : région
Au titre des aides exceptionnelles
à l’apprentissage
mises en place
par le Gouvernement à l’été 2020, l’Agence de services et de paiement
(ASP) a validé en Provence-Alpes-
Côte d’Azur
32 524 dossiers de
demandes entre juillet 2020 et avril 2021 pour un montant de plus de
160
M€, présentés à
94 % par des entreprises de moins de 250 salariés
38
.
Selon la Dares, 41 872
entrées en contrat d’apprentissage
ont été
décomptées sur la même période : au moins 78 % de ces entrées ont
bénéficié de l’aide exceptionnelle
.
38
2
520 dossiers ont été validés pour un montant minimal de 12,6 M€ au titre de l’aide
exceptionnelle aux contrats de professionnalisation. 83% des dossiers validés ont été
présentés par des entreprises de moins de 250 salariés.
ANNEXES
83
Annexe n° 3 :
les ressources des CFA
en Provence-Alpes-
Côte d’Azur de 2016 à 2018
Tableau n° 13 :
ventilation des ressources par origine des CFA
en Provence-Alpes-
Côte d’Azur de 2016 à
2018
En €
2016
2017
2018
Taxe d'apprentissage
50 104 737
27 %
60 764 605
30 %
65 970 984
31 %
Participation des branches
12 652 689
7 %
13 667 493
7 %
13 590 014
6 %
Organismes gestionnaires
9 250 410
5 %
7 887 636
4 %
5 753 925
3 %
Région
75 469 930
40 %
76 114 456
38 %
77 947 215
37 %
État
1 297 423
1 %
1 910 784
1 %
6 194 561
3 %
Autres collectivités publiques
6 734 338
4 %
4 240 021
2 %
4 703 566
2 %
Ventes prestations
3 233 833
2 %
2 847 864
1 %
8 247 267
4 %
Famille
3 880 225
2 %
7 600 886
4 %
6 436 337
3 %
Quote-part de subventions
9 001 047
5 %
9 210 884
5 %
11 823 005
6 %
Reprise sur amortissement
285 080
0 %
828 843
0 %
1 796 500
1 %
Transfert de charges
882 469
0 %
570 368
0 %
1 211 676
1 %
Produits financiers
199 297
0 %
114 725
0 %
220 284
0 %
Autres ressources
14 866 479
8 %
16 879 468
8 %
5 723 753
3 %
Total
187 857 988 100 % 202 638 033 100 % 209 619 087 100 %
Effectif pondérés
27 366
27 687
28 115
Ressource par jeune en
Provence-Alpes-Côte d'Azur
6 865
7 319
7 451
Ressource par jeune en
France métropolitaine
7 924
8 445
8 287
Source : juri
dictions financières d’après le rapport annuel sur le financement et les effectifs de l’apprentissage 2016
(Cnefop), 2017 (Cnefop), 2018 (France compétences).
COUR DES COMPTES
84
Tableau n° 14 :
ventilation des ressources des CFA
par destination de 2016 à 2018
En €
2016
2017
2018
Ressources consacrées au fonctionnement
161 076 604 167 388 971 186 759 762
Ressource par jeune en Provence-Alpes-Côte d'Azur
5 886
6 046
6 639
Ressource par jeune en France métropolitaine
6 935
7 063
7 075
Ressources consacrées aux aides THR*
4 569 231
4 984 245
4 844 429
Ressource par jeune en Provence Alpes-Côte d'Azur
167
180
172
Ressource par jeune France métropolitaine
333
321
308
Ressources consacrées à l'investissement
22 212 153
30 264 817
18 014 896
Ressource par jeune en Provence Alpes-Côte d'Azur
812
1 093
640
Ressource par jeune France métropolitaine
656
1 061
904
Total des ressources
187 857 988 202 638 033 209 619 087
* THR : transport, hébergement, restauration
Source
: juridictions financières d’après le rapport annuel sur le financement et les effectifs de l’apprentissage 2016
(Cnefop), 2017 (Cnefop), 2018 (France compétences).
ANNEXES
85
Annexe n° 4 :
dépenses et recettes d
’apprentissage
de la région Provence-Alpes-
Côte d’Azur
Tableau n° 15 :
é
volution des dépenses et recettes d’apprentissage
de la région entre 2016 et 2020
En €
2016
2017
2018
2019
2020
Dépenses
95 382 504,48
94 799 991,84
99 667 308,30
99 267 951,87
20 295 328,24
Dotations aux CFA
71 106 838,98
74 354 307,73
78 928 941,00
78 584 446,31
9 843 866,93
Aides aux employeurs
15 897 925,07
17 153 791,34
17 034 718,00
12 147 401,44
4 872 222,36
Investissements
8 377 740,43
3 291 892,77
3 703 649,30
8 536 104,12
5 579 238,95
Recettes
143 795 512,85
148 332 943,05
150 226 500,82
154 503 253,06
14 087 160,17
Fraction régionale de
taxe
d’apprentissage
102 263 846,00
111 773 883,00
114 530 406,00
115 224 693,00
-
TICPE apprentissage
10 613 109,00
10 473 521,96
10 654 568,60
10 983 889,85
-
TICPE primes
employeurs
29 635 557,00
26 015 527,27
25 031 692,89
27 921 930,89
-
France compétences -
Fonctionnement
-
-
-
-
7 698 100,00
Recettes PIA
1 001 637,94
1 167,37
-
-
-
France compétences -
Investissements
-
-
-
-
3 508 000,00
Autres ressources
281 362,91
68 843,45 €
9 833,33
372 739,32
101 286,17
Majoration du produit du
prélèvement sur recettes
« compétences
facultatives »
-
-
-
-
2 779 774
Reliquats de recettes
48 13 008,37
53 32 951,21
50 59 192,52
55 35 301,19
- 6 208 168,10
Recettes affectées à la
formation
professionnelle continue
- 23 900 000,00
- 24 900 000,00
- 25 498 339,77
- 25 706 833,73
- 23 300 000
Reliquats de recettes
(selon la région)
24 513 008,37
28 632 951,21
25 060 852,75
29 528 467,46
20 574 758,93
39
Source
: juridictions financières d’après les comptes administratifs et la réponse au questionnaire adressé à la région.
39
La région intègre, en recette supplémentaire, la compensation de la suppression de la
compétence apprentissage, soit 50
M€
, ce qui entraîne un reliquat de recettes de
20,6
M€
.
COUR DES COMPTES
86
Annexe n° 5 :
comparaison entre les coûts
préfectoraux et les niveaux de prise en charge
Tableau n° 16 :
coûts préfectoraux et niveaux de prise en charge
comparés pour deux diplômes
CAP Cuisine
Coûts préfectoraux (e
n €
)
2016
2017
2018
CFA RÉGIONAL URMA CAMPUS DE GAP
GAP
4 467
5 861
4 125
CFA RÉGIONAL FACULTÉ DES MÉTIERS
CANNES-LA BOCCA
4 806
4 412
4 423
CFA RÉGIONAL DE L'ACADÉMIE DE NICE
NICE
4 520
2 164
CFA MÉTROPOLE D'AIX-MARSEILLE
AIX-EN-PROVENCE
3 599
4 176
CFA RÉGIONAL INTERPROFESSIONNEL COROT
MARSEILLE
6 884
7 574
7 756
CFA RÉGIONAL MAISONS FAMILIALES RURALES PACA
ARLES
4 750
5 524
4 164
CFA RÉGIONAL DE L'ACADÉMIE D'AIX-MARSEILLE
AIX-EN-PROVENCE
2 024
3 579
2 499
CFA RÉGIONAL DE L'ACADÉMIE D'AIX-MARSEILLE
AIX-EN-PROVENCE
3 958
3 000
2 499
CFA RÉGIONAL DE L'ACADÉMIE D'AIX-MARSEILLE
AIX-EN-PROVENCE
3 000
2 499
CFA RÉGIONAL URMA CAMPUS DU BEAUSSET
LE BEAUSSET
2 631
2 985
2 872
CFA RÉGIONAL URMA CAMPUS DE SAINT-MAXIMIN
SAINT-MAXIMIN
3 336
3 831
3 384
CFA RÉGIONAL URMA CAMPUS DES ARCS
LES ARCS
2 988
3 476
3 812
CFA RÉGIONAL CCIT 84
AVIGNON
5 301
5 580
5 269
CFA
RÉGIONAL
ÉDUCATION
NATIONALE
DU
VAUCLUSE
CARPENTRAS
2 377
3 776
Moyenne
4 151
4 199
3 957
ANNEXES
87
Niveau de prise en charge 2020
Moyenne CPNE
6 127 €
Minimum
4 687 €
Maximum
8 564 €
Valeur de carence
5 250 €
Baccalauréat professionnel Commerce
2016
2017
2018
CFA RÉGIONAL URMA CAMPUS DE DIGNE
DIGNE-LES-BAINS
8 196
8 096
7 564
CFA RÉGIONAL URMA CAMPUS DE GAP
GAP
6 492
6 549
6 742
CFA RÉGIONAL INSTITUT FORMATION PHARMA SANTÉ
06
ST LAURENT-DU-VAR
5 795
6 595
7 207
CFA RÉGIONAL FACULTÉ DES MÉTIERS
CANNES-LA BOCCA
7 008
6 964
7 400
CFA RÉGIONAL DE L'ACADÉMIE DE NICE
NICE
6 058
5 468
CFA RÉGIONAL SALON-DE-PROVENCE
SALON-DE-PROVENCE
6 013
6 754
7 976
CFA RÉGIONAL DE LA BOURSE DU TRAVAIL
MARSEILLE
5 884
5 614
5 610
CFA MÉTROPOLE D'AIX MARSEILLE
AIX-EN-PROVENCE
7 206
8 042
8 086
CFA RÉGIONAL INTERPROFESSIONNEL COROT
MARSEILLE
10 987
12 718
12 501
CFA RÉGIONAL MAISONS FAMILIALES RURALES PACA
ARLES
7 881
7 713
7 410
CFA RÉGIONAL INTERCONSULAIRE MEDITERRANEE
MARSEILLE
9 710
6 000
CFA RÉGIONAL URMA CAMPUS DE SAINT-MAXIMIN
SAINT-MAXIMIN
5 234
5 032
4 921
CFA RÉGIONAL URMA CAMPUS DES ARCS
LES ARCS
4 607
3 883
4 388
CFA RÉGIONAL URMA CAMPUS DE LA SEYNE-SUR-
MER
LA SEYNE-SUR-MER
6 888
6 363
5 895
CFA RÉGIONAL CCIT 84
AVIGNON CEDEX 3
6 330
6 311
6 464
COUR DES COMPTES
88
2016
2017
2018
CFA RÉGIONAL URMA CAMPUS D'AVIGNON
AVIGNON CEDEX 1
5 052
4 535
5 414
CFA
RÉGIONAL
EDUCATION
NATIONALE
DU
VAUCLUSE
CARPENTRAS
4 924
7 773
CODEV
AIX-EN -PROVENCE
3 000
-
ÉCOLE SUPÉRIEURE INTERNATIONALE DÉCLIC 83
NICE
-
3 000
-
ÉCOLE SUPÉRIEURE INTERNATIONALE DÉCLIC 83
ST RAPHAËL
-
3 000
-
CFA RÉGIONAL INTERCONSULAIRE MEDITERRANEE
MARSEILLE
-
Moyenne
6 834
6 170
6 505
Niveau de prise en charge 2020
Moyenne CPNE
7 579 €
Minimum
6 581 €
Maximum
8 832 €
Valeur de carence
7 465 €
Source : juridictions financières