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ENTITÉS ET POLITIQUES PUBLIQUES
LE SOUTIEN
DU MINISTÈRE
DE LA CULTURE AU
SPECTACLE VIVANT
Rapport public thématique
Synthèse
Mai 2022
2
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
g
AVERTISSEMENT
Cette synthèse est destinée à faciliter la lecture et l’utilisation du
rapport de la Cour des comptes.
Seul le rapport engage la Cour des comptes.
3
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
Sommaire
1
Le ministère de la culture au cœur de l’écosystème
du spectacle vivant
5
2
L’État, financeur minoritaire d’un secteur
qui lui échappe en partie
7
3
Une politique trop centrée sur l’offre qui invite
à une réarticulation des missions entre les niveaux
centraux et déconcentrés du ministère
11
4
Des résultats insuffisants au regard
des objectifs de démocratisation et de diffusion
13
Récapitulatif des recommandations
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 15
5
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
1
Le ministère de la culture
au cœur de l’écosystème
du spectacle vivant
Le soutien de l’État au spectacle vivant
(entendu comme la représentation
d’une œuvre de l’esprit, en présence
d’un public et au moins un artiste
rémunéré et physiquement présent)
est un des éléments fondateurs de la
politique culturelle depuis la création
du ministère . Cette politique, dont il
faut souligner la continuité depuis
60 ans, vise à favoriser la création
artistique, à donner un large accès
à toutes les disciplines du spectacle
vivant sur l’ensemble du territoire et
enfin à élargir et développer les publics .
L’action du ministère de la culture
se caractérise ainsi par une grande
variété de modes d’intervention,
sans équivalent à l’étranger, à l’image
d’un secteur culturel riche et varié,
représentant 2,3 % du PIB en 2019
1
La politique du ministère s’appuie sur
de grands opérateurs nationaux ainsi
que sur un ensemble de lieux labélisés
et de réseaux dont les disciplines et
le nombre de bénéficiaires se sont
progressivement étendus . Dix labels
répartis entre le théâtre, la danse, la
musique, le cirque et les arts de la
rue rassemblaient en 2019 plus de
trois cents structures réparties sur
l’ensemble du territoire
2
S’y ajoutent
de nombreuses aides bénéficiant à
plus d’un millier de compagnies, près
de deux cents résidences et cent
cinquante festivals . Par ses modes
de soutien pluriels et ses capacités
de régulation et de concertation, le
ministère de la culture demeure un
acteur clé au sein de cet écosystème
foisonnant .
L’enquête porte sur ces divers
modes d’intervention et s’intéresse
essentiellement aux acteurs répartis
sur l’ensemble du territoire national .
Sans les écarter du panorama, elle
ne traite donc pas directement
des grands établissements publics
nationaux . Par leur taille, leur
implantation géographique et leur
mode de financement, ces derniers
répondent en effet à une logique
de tête de réseau de la politique du
spectacle vivant et sont régulièrement
examinés lors des contrôles de la Cour .
1 . Hors effets sur le tourisme ou le commerce .
2 . Un nouveau label a été créé fin 2021 pour l’art de la marionnette .
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Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
Le ministère de la culture au cœur
de l’écosystème du spectacle vivant
Répartition par région des principaux équipements culturels en 2020
Hauts-de-France
96
Normandie
66
Bretagne
56
Pays de la Loire
63
Centre-Val-de-Loire
44
Nouvelle Aquitaine
112
Occitanie
104
PACA
79
Auvergne-Rhône-Alpes
134
Bourgogne-Franche-Comté
49
Grand Est
87
IDF
355
Corse
6
Lieux de création et diffusion du spectacle vivant
6
355
Sources : DEPS, Cour des comptes.
7
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
Le spectacle vivant bénéficie de finan-
cements publics importants apportés
tant par l’État que, de manière crois-
sante, par les collectivités territoriales .
L’État, financeur minoritaire
d’un secteur qui lui échappe
en partie
2
Les crédits Création - spectacle vivant par type de dépense* (CP, M€)
0,0
100,0
200,0
300,0
400,0
500,0
600,0
700,0
2011
702,6
388,9
306,3
7,4
14,3
14,2
16,5
27,8
27,5
31,5
17,6
54,1
25,2
711,0
420,9
275,8
699,9
417,0
268,7
702,6
421,5
264,6
676,1
386,5
261,8
680,8
381,6
274,0
700,7
392,2
280,9
721,5
393,1
274,4
703,0
396,9
274,6
764,7
481,1
266,0
2012
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
Total
Autres titres
Dépenses d’intervention (Titre 6)
Dépenses de fonctionnement (Titre 3, SCSP)
* programme 131-1
Source : Cour des comptes à partir des documents budgétaires
Particulièrement touché par la crise
sanitaire, le secteur a bénéficié de
soutiens publics considérables (crédits
d’urgence et de relance) qui ont fait
l’objet d’un précédent travail de la
Cour
3
Nonobstant cet accroissement
3 . Cour des comptes,
Le soutien du ministère de la culture au spectacle vivant pendant la crise
sanitaire
,
audit flash, septembre 2021 .
8
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
L’État, financeur minoritaire d’un secteur
qui lui échappe en partie
conjoncturel des financements,
ce rapport analyse les évolutions
structurelles de la politique mise en
œuvre par le ministère de la culture
jusqu’à 2020 . Le soutien financier du
ministère de la culture est en effet
demeuré relativement stable entre
2011 et la crise sanitaire (766 M€
en 2019, 839 M€ en 2020 dans
le contexte de la crise sanitaire ) .
A contrario,
l’enquête a permis d’évaluer
les financements des collectivités
territoriales, en particulier ceux des
communes, et d’établir qu’ils ont
progressé depuis 2015 et représentent
au minimum 2,47 Md€ en 2019 .
Dépenses de fonctionnement moyennes des communes et EPCI par habitant en €
(2014-2020)
Dépenses de fonctionnement par habitant (en €)
30
20
10
0
Dépenses de fonctionnement
par habitant (en euros)
15
20 2530
10,9
Source : Cour des comptes à partir de données DGFiP et de l’Insee
(pour les données de population).
9
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
L’État, financeur minoritaire d’un secteur
qui lui échappe en partie
Par ailleurs, le régime de l’intermittence,
quoiqu’extra-budgétaire, constitue un
élément indispensable de l’écosystème,
les allocations versées aux intermittents
du seul spectacle vivant ayant été
estimées par la présente enquête à au
moins 450 M€ en 2017
4
Jusqu’à 2020, le secteur du spectacle
vivant (public comme privé) a connu
une croissance dynamique qui s’est
traduit par une forte augmentation
du nombre d’entreprises et de salariés
et par une offre de spectacles très
abondante . Les effectifs salariés du
secteur ont augmenté de 46 % entre
2000 et 2017 pour s’établir, alors,
à plus de 217 000 salariés . Cette
croissance soutenue, y compris dans
le champ public, apparaît difficile à
réguler puisque ses principaux facteurs
sont pour l’essentiel extérieurs au
ministère de la culture, qu’il s’agisse
de la volonté des collectivités
territoriales de proposer une offre
diversifiée et d’investir dans de
nouveaux équipements, ou du régime
de l’intermittence dont le réglage
appartient aux partenaires sociaux
sous l’égide du Gouvernement .
4 . L’intermittence n’est toutefois pas spécifiquement étudiée dans le présent rapport car il
s’agit d’un régime social piloté par les partenaires sociaux qui concerne également le secteur
audiovisuel, et dont l’examen aurait largement débordé le champ de la présente enquête .
11
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
Au cours des années récentes, la
politique de soutien au spectacle
vivant s’est distinguée par une offre
abondante . Le ministère de la culture
a progressivement renforcé la gestion
de cette politique, et notamment
du pilotage des lieux et des équipes
artistiques qu’il finance . La loi du
7 juillet 2016 relative à la liberté
de la création, à l’architecture et au
patrimoine (dite loi LCAP) est venue
consolider les outils de gestion des
labels et la contractualisation avec les
collectivités territoriales partenaires .
Les règles en matière de nomination
des directeurs de ces structures ont
également été améliorées .
Grâce à ces leviers d’intervention,
et alors que les collectivités locales
apportent désormais près de trois
quarts des financements du spectacle
vivant, l’État continue à jouer un rôle
d’impulsion, notamment en matière de
création artistique . Les relations avec
les collectivités locales apparaissent,
dans l’ensemble, constructives
et bien structurées, dans le cadre
d’une gouvernance renouvelée des
lieux s’appuyant sur des cahiers des
missions et des charges régulièrement
évalués .
Cependant, l’administration centrale
ne dispose pas des outils de collecte
et d’exploitation des données
permettant d’éclairer utilement l’action
publique . Comme le soulignait déjà
la Cour dans un précédent rapport
en 2010
5
, les données relatives à
l’activité, aux moyens et aux résultats
des structures sont fragiles et peu,
voire pas, exploitées par le ministère
pour des approches transversales . Le
déploiement en cours de l’outil SIBIL,
qui permettra de disposer des données
de billetterie de toutes les structures
diffusant des spectacles vivants, devrait
concourir à améliorer sensiblement la
connaissance d’ensemble du secteur et
son pilotage stratégique .
De même, le rôle crucial des DRAC
dans la mise en œuvre de la politique
du spectacle vivant au niveau régional
devrait également être mieux valorisé
par l’échelon central du ministère, dans
le cadre d’une animation de réseau
rénovée et d’orientations stratégiques
mieux hiérarchisées .
Une politique trop centrée
sur l’offre qui invite à une
réarticulation des missions
entre les niveaux centraux
et déconcentrés du ministère
3
5 . Cour des comptes,
Les dépenses d’intervention du ministère de la culture et de la
communication au titre de l’action « soutien à la création, à la production et à la diffusion du
spectacle vivant »
,
communication à l’Assemblée nationale, septembre 2009 .
12
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
Par ailleurs, la création en 2020 du
Centre national de la musique
(succédant au Centre national de la
chanson, des variétés et du jazz) a
permis à l’État de disposer d’un acteur
puissant pour l’ensemble de la filière
musicale incluant le spectacle vivant,
la musique enregistrée et les éditeurs,
toutes esthétiques confondues .
Compte tenu du périmètre
d’intervention de ce nouvel opérateur
et du rôle qui lui a été confié par le
ministère durant la crise sanitaire,
l’articulation de ses missions avec
celles de l’administration centrale et
déconcentrée requiert une définition
et un cadrage plus précis .
Une politique trop centrée sur l’offre qui invite
à une réarticulation des missions entre les
niveaux centraux et déconcentrés du ministère
13
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
L’objectif de démocratisation
culturelle et d’élargissement des
publics a été au cœur de la politique
du spectacle vivant depuis plus de
60 ans . Malgré des efforts soutenus
et des financements accrus, les
résultats apparaissent en demi-teinte .
En particulier, la politique d’inclusion
à et par la culture suppose des
articulations à renforcer avec d’autres
politiques publiques, et notamment
l’éducation nationale .
Des résultats insuffisants
au regard des objectifs de
démocratisation et de diffusion
4
Fréquentation du spectacle vivant selon l’âge, 1973-2018
1973
1981
1988
1997
2008
2018
0
10
20
30
40
50
60
Ont assisté à un spectacle vivant au cours des 12 derniers mois
%
48
48
50
51
41
35
47
49
49
46
43
43
27
16
33
20
39
24
41
29
46
40
31
17
15-24 ans
25-39 ans
40-59 ans
60 ans et plus
Source : DEPS, Les pratiques culturelles des Français, 2019
14
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
La faible diffusion des spectacles,
la difficulté à produire des séries
ou à augmenter le nombre de
représentations constituent un autre
point faible de la politique développée
depuis 50 ans . À titre d’exemple, la
Cour a pu calculer qu’en 2019 le
nombre moyen de représentations
pour un spectacle était de 3,7 dans
un centre dramatique national et
de 2,3 pour une scène nationale . Ce
constat était déjà celui du rapport
de la mission de Bernard Latarjet,
Pour un débat national sur l’avenir du
spectacle vivant,
en 2004 . Une partie
de ce qui est créé et financé n’est que
très peu diffusé . Même si les facteurs
qui y concourent sont multiples,
cette situation est imputable, pour
l’essentiel, à des systèmes d’aide
publique historiquement centrés sur
le renouvellement de la création .
Pour autant, rien n’a véritablement
été entrepris pour redéfinir l’équilibre
entre création et diffusion .
En mettant en lumière les fragilités et
les incohérences du système actuel,
la crise sanitaire a encore souligné la
nécessité d’un rééquilibrage au plan
économique, budgétaire et artistique .
Cela passe par une réflexion sur
les modes de production, de
programmation et de diffusion, ainsi
que par des évolutions des cadres
réglementaires et des pratiques .
Conscient de cette problématique, le
ministère a engagé un état des lieux
sur les conditions de production des
spectacles, en lien avec les DRAC et
l’ensemble des partenaires concernés
(État, collectivités, lieux labellisés
et non labellisés, compagnies, etc .) .
Seule une approche globale permettra
en effet de réaliser les changements
souhaitables .
Des résultats insuffisants au regard des
objectifs de démocratisation et de diffusion
15
Synthèse du rapport public thématique de la Cour des comptes
1.
Définir les grandes orientations
de la politique de l’État en faveur
du spectacle vivant
(Ministère de la
culture).
2.
Établir des objectifs de diffusion
plus
ambitieux
en
associant
l’ensemble des parties prenantes
(État,
collectivités,
organisations
professionnelles
du
secteur)
(Ministère de la culture).
3.
Associer l’objectif de renforcement
de la diffusion des spectacles à celui
du renouvellement des publics et
de démocratisation
(Ministère de la
culture).
4.
Doter la direction générale de la
création artistique (DGCA) des outils
et de l’organisation lui permettant
de disposer au plus vite de données
fiables et complètes pour piloter
la politique en faveur du spectacle
vivant
(Ministère de la culture).
5.
Associer plus étroitement les
DRAC à l’élaboration des orientations
de la politique du spectacle vivant
(Ministère de la culture).
Récapitulatif
des recommandations