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Compte de commerce
Couverture des risques
financiers de l’État
Note d’analyse de l’exécution
budgétaire
2021
OBSERVATIONS DÉFINITIVES
2
COUR DES COMPTES
Compte de commerce
Compte 910
Couverture des risques financiers de l’État
Graphique n° 1 :
Recettes
exécution 2021
(en M€)
Source : Agence France Trésor
Graphique n° 2 :
Dépenses
exécution 2021 (en M€)
COMPTE DE COMMERCE COUVERTURE DES RISQUES FINANCIERS DE
L’ÉTAT
3
Source : Agence France Trésor
4
COUR DES COMPTES
Synthèse
L’exécution du compte du commerce au titre de 2021
Institué par l’article 54
de la loi de finances pour 2006, le compte de
commerce 910
Couverture des risques financiers de l’État
retrace les
opérations destinées à protéger les dépenses du budget général de
l’appréciation des devises et de la hausse des prix des produits pétroliers
.
Effectuées au moyen de deux instruments financiers dérivés, les achats à
terme de devises et les échanges de prix d’achat à terme dits
swaps
sur
produits pétroliers, ces opérations figent le montant en euros des
contributions libellées en devises que la France doit verser à différentes
institutions internationales et des produits pétroliers qu’elle doit acheter.
L’objectif du dispositif est de sécuriser l’exécution budgétaire, en figeant
en niveau au montant inscrit en loi de finances.
Ce compte de commer
ce n’est pas doté de crédits
: ses dépenses sont
intégralement compensées par les recettes perçues des programmes
budgétaires bénéficiant des opérations de couverture. Le compte est donc
systématiquement à l’équilibre. Il ne fait l’objet que d’une autorisa
tion de
découvert, qui correspond au cumul des sommes à verser prévues aux
différents contrats, dont le montant est établi à 1,098
Md€ au titre de
l’année 2021.
Le montant des recettes et des dépenses du compte a été évalué en
loi de finances initiale à 2,088
Md€.
Le montant de l’ensemble des
opérations de couverture réalisées en 2021 atteint 2,369
Md€.
L’écart entre la valeur en euro des devises reçues et celles des
versements en provenance des programmes ou comptes bénéficiaires en
vue de la couverture des risques de change a généré une perte de 20,49
M€.
Les opérations de couverture des risques liés à l’approvisionnement en
produits pétroliers enregistrent une recette de 16,81
M€. Au total, le
compte enregistre une perte de 3,68
M€.
Des progrès dans la couverture des risques de change
À la suite des pertes de change constatées en 2015 et en réponse aux
recommandations des précédentes notes d’évaluation budgétaire de la Cour
et du rapport conjoint de l’inspection générale des finances (IGF) et de
l’inspection générale des affaires étrangères (IGAE) d’août 2016 sur la
couverture des risques de change sur le budget de l’État, les responsables
de programme, la direction du budget, la direction générale du Trésor et
COMPTE DE COMMERCE COUVERTURE DES RISQUE
S FINANCIERS DE L’ÉT
AT
5
l’Agence France Trésor (AFT) ont progressive
ment amélioré leur
coordination en matière de politique de change.
Les opérations en devises relevant des ministères économiques et
financiers recouvrent des contributions pluriannuelles à des fonds
multilatéraux dont le montant définitif en euros est connu et dont la
couverture par achat à terme de dollars est effectuée systématiquement,
sauf cas particulier, sur l’ensemble de la période de leur versement. Ce
risque est globalement maîtrisé, cette couverture étant de 97 % en 2021.
S’agissant
des contributions internationales ou des opérations de
maintien de la paix libellées en devises relevant du MEAE, il revient au
responsable de programme de prendre l’initiative de la couverture, d’en
fixer la date et les modalités techniques. Les rôles respectifs du MEAE, de
l’AFT et des SCBCM des finances et des affaires étrangères ont été
clarifiés dans la convention révisée le 12 avril 2018. Le MEAE peut
bénéficier de l’appui technique de l’AFT.
En loi de finances initiale pour
2021, ces dépenses programmées en devises sont couvertes à 82 %, et à
89 % en se limitant aux opérations libellées en dollars.
Concernant l’effet change des rémunérations du personnel du
MEAE en euros, qui n’entre pas dans le champ de la convention précitée
et pour lequel le risque de change n’
est pas provisionné, des progrès ont
été réalisés grâce à l’expérimentation ouverte par lettre
plafond en 2019
et reconduite en 2020 et en 2021. Celle-ci vise à mobiliser la réserve de
précaution en fin de gestion pour couvrir le risque de change, à la baisse
comme à la hausse, sur les dépenses d’indemnités de résidence à l’étranger
(368,7
M€
exécutés
en 2021,
libellées
en
euros
mais
ajustées
trimestriellement au titre du change et du prix) et sur la masse salariale des
agents de droit local (130,2
M€ exé
cutés en 2021). Cette faculté, encore au
stade de l’expérimentation, n’a pas eu à être mobilisée en 2021.
Ces progrès vont dans le sens de la recommandation antérieure de
la Cour. Le risque est reconnu et sa maîtrise est recherchée par les trois
principaux
ministères concernés et l’appui technique est organisé. Le
MEAE dispose désormais d’un moyen de se prémunir contre l’effet change
des rémunérations de son personnel, dont la pérennisation reste toutefois à
confirmer.
Il conviendrait de compléter cette démarche en vérifiant par un
recensement des dotations budgétaires exposées au risque de change que
tout programme susceptible de représenter un enjeu budgétaire significatif
ait fait l’objet d’un examen sur l’opportunit
é de prévoir un dispositif de
couverture de change ou de financement de ce risque. Tout en invitant les
différentes parties à conforter les efforts entrepris, la Cour ne reconduit pas
sa recommandation.
6
COUR DES COMPTES
Sommaire
Chapitre I
L’exécution budgétaire 2021
....................................................
9
I - Le solde du compte pour 2021
...................................................................
9
II -
L’évaluation des recettes, les prévisions des dépenses
et leur exécution
.............................................................................................
10
III - La conformité aux principes et règles de droit budgétaire
......................
12
Chapitre II Les recommandations de la Cour
..........................................
14
I -
Les limites du compte Couverture des risques financiers de l’État
...........
14
II -
Les actions mises en œuvre de 2016 à 2020
............................................
15
III -
L’analyse de la Cour au titre de la gestion 2021
.....................................
16
Annexes
.........................................................................................................
19
COMPTE DE COMMERCE COUVERTURE DES RISQUE
S FINANCIERS DE L’ÉT
AT
7
Introduction
Le compte de commerce
Couverture des risques financiers de
l’État
, créé par l’article 54
de la loi de finances pour 2006, retrace les flux
financiers liés aux opérations de couverture desdits risques, à l’exception
de celles liées à la gestion de la dette négociable et non négociable et de la
trésorerie de l’État, qui, en application de l’art
icle 22 de la loi organique
relative aux lois de finances du 1
er
août 2001 (LOLF), relèvent d’un compte
distinct.
Le recours aux opérations de couverture des risques financiers
prévues par ce compte spécial
a pour objectif de sécuriser l’exécution
budgétaire en figeant les montants en euros des contributions que la France
doit verser à différentes institutions internationales et des produits
pétroliers qu’elle doit acheter.
Le compte de commerce
Couverture des risques financiers de l’État
ne représente que la partie des opérations de couverture de change et de
prix pétroliers exécutée par l’Agence France Trésor (AFT). D’autres
activités de couverture de risques monétaires sont exécutées pour le compte
de l’État par Natixis et Bpifrance Assurance Export et
sont retracées
comme telles dans le compte général de l’État
1
ou dans le compte de
commerce 915
Soutien financier au commerce extérieur
2
.
Ces opérations, qui sont de nature industrielle et commerciale, sont
exécutées par l’AFT, à titre accessoire de sa mis
sion de gestionnaire de la
dette et de la trésorerie de l’État.
L’AFT recourt à deux types d’instruments financiers
: les contrats
d’achats de devises à terme et les contrats d’échange de prix à terme dits
swaps
de produits pétroliers.
1
Le compte général de l’État
pour 2020 donne des informations utiles sur ces
couvertures de change, cf. note 22.2.1.4 Garantie au titre de la procédure de stabilisation
de taux d’intérêt des crédits à l’exportation, que Natixis gère conformément à l’article
41 de la loi de finances rectificative pour 1997 (engagement de stabilisation et contrats
de couverture associés) et la note 22.4.3.2 Instruments financiers à terme négociés par
Bpifrance Assurance Export, pour la garantie de change accordée aux exportateurs.
2 La section 3 dénommée « Change » retrace les opérations couvrant le risque de
change constituant un risque monétaire, dans le cadre des garanties publiques pour le
commerce extérieur
accordées pour des opérations d’assurance des risques monétaires,
au sens du a du 1° de l’article L. 432
-2 du code des assurances.
8
COUR DES COMPTES
Les instruments financiers de couverture des risques
Pour les dépenses en devises, les contrats de change à terme
consistent à fixer, au moment de la négociation du contrat, les montants
en devises et en euros qui seront échangés à échéance (la banque apporte
les devises,
l’État apporte les euros). Ces contrats sont négociés par
l’AFT sur instruction du ministère ordonnateur. Plusieurs banques sont
sollicitées, la mieux-disant est retenue.
Pour les achats de produits pétroliers, des contrats d’échange à
terme dits
swaps
sur prix de produits pétroliers prévoient le versement,
une fois par mois, du différentiel entre la moyenne des prix de marché
observés depuis un mois et du prix convenu au contrat d’échange ou
swap
. La banque paie le prix de marché, l’État paie le prix f
ixé au
contrat. Le différentiel est versé par la contrepartie dont le prix est le
plus élevé. Les opérations de couverture des approvisionnements en
produits pétroliers sont réalisées par l’AFT au profit du service des
essences des armées (SEA).
Il appartient aux responsables des programmes bénéficiant
d’opérations de couverture d’en définir la stratégie et d’en arrêter les
modalités (date, désignation de la devise, du montant et des échéances).
Les principaux ministères concernés par ce dispositif sont :
-
le ministère de l’Europe et des affaires étrangères (MEAE)
notamment au titre des contributions aux organisations internationales et
aux opérations de maintien de la paix financées sur les programmes 105
Action de la France en Europe et dans le monde
et 209
Solidarités à
l’égard des pays en développement
;
-
le ministère de l’économie, des finances et de la relance
au titre des
contributions aux institutions multilatérales de développement financées
par le programme 110
Aide économique et financière au développement
et
au titre des prises de participations dans les banques de développement, via
le compte d’affectation spéciale
Participations financières de l’État
(CAS PFE) ;
- le ministère des armées
au titre des opérations du compte de
commerce 901
Approvisionnement des armées en produits pétroliers
.
Les opérations non couvertes réalisées par l’AFT sont retracées
dans le compte d’opérations monétaires 953
Pertes et bénéfices de change.
COMPTE DE COMMERCE COUVERTURE DES RISQUE
S FINANCIERS DE L’ÉT
AT
9
Chapitre I
L’exécution
budgétaire 2021
I -
Le solde du compte pour 2021
Conformément
à l’article 22 de la LOLF, le compte de commerce
ne fait l’objet, en loi de finances initiale, que d’une autorisation de
découvert. Les évaluations des recettes et les prévisions des dépenses ont
un caractère purement indicatif.
Par construction, ce compt
e n’a pas d’existence autonome en termes
budgétaires
: par jeu d’écriture, il isole les gains et pertes nets réalisés sur
les opérations de couverture qui se retrouvent dans les programmes
concernés. Il est systématiquement à l’équilibre et son solde est n
ul. Il
fonctionne de la manière suivante :
- il enregistre en recettes les crédits des programmes bénéficiaires
des instruments de couverture, puis il les retrace en dépenses après avoir
versé ces crédits aux établissements financiers chargés de mettre en œuvre
la couverture des risques ;
- en sens inverse, il enregistre, en recettes, les contreparties versées
par les établissements financiers, puis en dépenses les reversements aux
programmes bénéficiaires.
Tableau n° 1 :
Solde du compte de commerce 910 en 2021
Montants en M€
Exécution
2020
LFI 2021
Exécution
2021
Recettes
1 517,70
2 088,00
2 368,80
Versements en provenance des programmes ou
comptes bénéficiaires, au titre de l'acquisition des
instruments de couverture des risques
763,31
1 044,00
-1 186,24
Flux financiers reçus des contreparties financières
754,40
1 044,00
-1 182,56
Dépenses
1 517,70
2 088,00
2 368,80
Versements aux contreparties financières, pour
l'acquisition des instruments de couverture des risques
763,31
1 044,00
1 186,24
Autres charges et versements
754,40
1 044,00
1 182,56
Solde
0
0
0
Source : Agence France Trésor
10
COUR DES COMPTES
Le fonctionnement actuel du compte ne permet pas de donner une
vision
économique des activités effectuées par l’AFT et nécessite de
retraiter certains flux pour faire apparaitre le solde effectif.
II -
L’évaluation des recettes, les prévisions des
dépenses et leur exécution
Les évaluations de recettes et les prévisions de dépenses en loi de
finances initiale
, qui ne concernent que les principaux contrats de devises
à terme engagés au moment du projet de loi de finances (PLF) sont
évaluées à 1,044
Md€ et se répartissent comme suit
:
- 379
M€ au titre des contributions
internationales et opérations de
maintien de la paix du programme 105
Action de la France en Europe et
dans le monde
;
- 664,9
M€ au titre du programme 110
Aide économique et
financière au développement
, dont 454
M€ de crédits de paiement (CP)
pour la con
tribution à l’association internationale de développement (AID),
146
M€ de CP pour la contribution au fonds africain de développement
(FAD), 53,2
M€ de CP pour la contribution au fonds pour l’environnement
mondial (FEM) et 11,7
M€ de CP pour la contributio
n au fonds
international de développement agricole (FIDA)
3
.
Le montant des
swaps
sur les produits pétroliers est considéré
comme nul en prévision, car il repose sur un différentiel entre le prix
convenu et le prix effectif à terme qui ne peut être anticipé. Le montant
notionnel d’achat de 54
M€ mentionné dans l’annexe au PLF pour 2021
sur les comptes de commerce sert à déterminer le montant maximal du
découvert autorisé.
L’exécution des opérations de change se réalise en deux phases
:
-les sommes en euros convenues au taux fixé à la souscription du
contrat à terme et provenant des programmes budgétaires bénéficiant de la
couverture sont inscrites en recettes (1) et leur versement à la contrepartie
bancaire est inscrit en dépenses (2) ;
- les devises reçues de la contrepartie bancaire converties en euros
au taux de change du jour du dénouement du contrat sont inscrites en
3 Le fonds asiatique de développement
FAsD
(11,5
M€ de CP) couvert l’an dernier
pour le même montant et le fonds vert pour le climat (151
M€ de CP) ne sont pas
mentionnés dans les contrats d’achat de devises à terme engagés au moment du PLF
pour 2021, bien que leur couverture soit prévue (page 20 de l’annexe au PLF pour 2021
sur le programme 110 Aide économique et financière au développement).
COMPTE DE COMMERCE COUVERTURE DES RISQUE
S FINANCIERS DE L’ÉT
AT
11
recettes (3) et les montants correspondants versés au programme
budgétaire bénéficiant de la couverture sont inscrits en dépenses (4).
Tableau n° 2 :
Exécution du compte de commerce
Couverture des
risques financiers de l’État
au 31 décembre 2021
(M€)
Recettes constatées
Dépenses constatées
1)
Réception des montants provenant des
programmes et comptes bénéficiaires des
instruments de couverture des risques
2)
Versement
de
ces
montants
aux
contreparties financières pour l’acquisition
des instruments de couverture des risques
- depuis le programme 110
Aide
économique et financière au
développement
674,93
-
au titre de l’aide économique et
financière au développement
674,93
- depuis le compte de commerce
901
Approvisionnement
des
armées en produits pétroliers
1,57
- au titre des approvisionnements
en produits pétroliers
1,57
- depuis le programme 105
Action de la France en Europe et
dans le monde
419,11
-
au titre de l’action de la France
en Europe et dans le monde et de
la solidarité à l’égard des pays en
développement
419,11
- depuis le CAS PFE
90,64
- au titre du CAS PFE
90,64
Total 1) 1 186,24
Total 2) 1 186,24
3)
Réception des flux financiers de la part
des contreparties financières
4) Autres charges et versements
(reversement dans les programmes)
-
au titre de l’aide économique et
financière au développement
652,62
-
pour l’aide économique et
financière au développement
652,62
- au titre des approvisionnements
des armées en produits pétroliers
18,37
- pour les approvisionnements des
armées en produits pétroliers
18,37
-
au titre de l’action de la France
en Europe et dans le monde
419,35
-
pour l’action de
la France en
Europe
419,35
- au titre du CAS PFE
92,20
- pour le CAS PFE
92,20
Total 3) 1 182,56
Total 4) 1 182,56
Total recettes 1) + 3) 2 368,80
Total dépenses 2) + 4) 2 368,80
Source : Agence France Trésor
Note de lecture : «
l’État apporte les
euros » : 674,93
M€
prévus aux taux fixés par les contrats à
terme sont prélevés du programme 110 pour être
inscrits en recettes (1) et versés à l’établissement
bancaire le mieux-disant (2). Inversement « la banque apporte les devises » : 652,62
M€ résulta
nt
de la conversion de devises au taux du jour du dénouement du contrat sont inscrits en recettes
pour solde du compte de la banque (3), et en dépenses pour être reportés dans le programme 110
concerné (4).
12
COUR DES COMPTES
S’agissant des opérations de couverture sur les p
roduits pétroliers,
le montant correspond au différentiel entre le prix convenu au départ et le
prix effectif à terme.
Les opérations constatées en 2021, dont le détail est ventilé dans le
tableau n°
2, s’élèvent à 1
186,24
M€ et le montant total des dépen
ses et
des recettes se porte à 2 368,80
M€.
S’agissant des opérations de change, l’écart entre les opérations
prévues (1 044
M€) et réalisées (1
186,24
M€) est principalement dû aux
contrats à terme demandés et négociés après la loi de finances initiale. Ces
écarts s’élèvent à 142,24
M€ (+40
M€ pour le programme 105, +10
M€
pour le programme 110, +91
M€ pour le CAS PFE).
S’agissant des opérations liées aux prix pétroliers à échéance, leur
anticipation en loi de finances initiale ne peut être réalisée. Elles ont
représenté 1,57
M€ en 2021.
Au titre de l’année 2021, l’écart entre la valeur des taux de change
négociés et la valeur des taux de change le jour même a généré une perte
de 20,49
M€, répercutée sur les programmes et comptes bénéficiaires des
couvertures.
Les contrats sur produits pétroliers ont dégagé en 2021 une recette
nette de 16,80
M€ au bénéfice du compte de commerce
Approvisionnement
des armées en produits pétroliers.
Au total, le compte enregistre une perte de 3,68
M€. Cette perte
représente le solde du compte après retraitement des dépenses et recettes
enregistrées en contrepartie des flux reçus des contreparties financières.
III -
La conformité aux principes et règles
de droit budgétaire
La régularité des opérations réalisées à partir du compte de
co
mmerce s’apprécie au regard de l’article 22 de la LOLF qui prévoit un
caractère limitatif au découvert déterminé en loi de finances. L’autorisation
de découvert représente le solde déficitaire (cumul depuis le début de
l’année des dépenses nettes des recet
tes) que le compte de commerce a
interdiction de dépasser à tout moment de l’année. En cas de dépassement,
le ministre chargé des finances doit en informer les commissions de
l’Assemblée nationale et du Sénat chargées des finances.
L’autorisation de découv
ert déterminée en loi de finances initiale
permet à l’AFT de prendre des engagements à l’égard des établissements
financiers sur les contributions à couvrir et en vue d’approvisionner le SEA
en produits pétroliers, dans l’hypothèse où les crédits en proven
ance des
COMPTE DE COMMERCE COUVERTURE DES RISQUE
S FINANCIERS DE L’ÉT
AT
13
différents programmes et comptes n’auraient pas encore été versés sur le
compte dédié. Or, les contrats conclus prévoient un échange de flux de
paiement le même jour : une dépense et une recette sont toujours
enregistrées simultanément de sorte qu
e le compte de commerce 910 n’est
en principe jamais à découvert en fin de journée. En exécution ce principe
a été respecté et le découvert autorisé n’a jamais été dépassé.
Pour 2021, l’autorisation de découvert en loi de finances s’élevait à
1,098
Md€. Ce
montant correspond, par convention, à la somme des
contrats de change à terme prévus au moment de la rédaction du PLF pour
les contributions (1,044
Md€) et l’approvisionnement de produits
pétroliers (54
M€), en supposant que les parités de change constaté
es au
dénouement seront égales à celles convenues aux contrats.
En exécution, le volume d’opérations relatives au versement des
contributions (1,186
Md€) est supérieur à leur évaluation de la loi de
finances (1,044
Md€), principalement du fait des contrats
à terme
demandés et négociés après la loi de finances initiale, sans que cela
n’entraîne un dépassement du plafond de découvert autorisé.
14
COUR DES COMPTES
Chapitre II
Les recommandations de la Cour
I -
Les limites du compte Couverture des risques
financiers de l’État
Ainsi que le souligne la Cour depuis l’exécution budgétaire 2013,
l’utilisation du compte
Couverture des risques financiers de l’État
pour couvrir
les risques de change présente des limites, tant en termes d’exhaustivité des
risques couverts que d’efficaci
té du mécanisme de couverture.
Une couverture des risques pour un nombre limité d’opérations et
un mécanisme qui a montré ses limites en 2014-2015
Alors que le compte de commerce
Couverture des risques financiers
de l’État
a été conçu notamment pour couvrir le risque afférent à
l’appréciation durable des contributions de la France aux organisations
internationales libellées en devises, ce mécanisme a trouvé ses limites à
partir de l’été 2014, la dépréciation de l’euro vis
-à-vis du dollar conduisant
paradoxalement le ministère des affaires étrangères et du développement
international (MAEDI) à cesser d’y recourir. En effet, la convention passée
entre le MAEDI et l’AFT ne précisant pas les conditions de mise en œuvre
du dispositif et le niveau de taux de change « acceptable » lors de la
passation des ordres d’achat, la pratique retenue a consisté à ne faire jouer
la couverture que si le taux de change est égal ou supérieur au « taux de
budgétisation
4
» afin de ne pas créer de dépense non couverte par des
crédits budgétaires et figer ainsi des pertes.
En 2015, le MAEDI s’est donc trouvé confronté à des problèmes de
soutenabilité en exécution, car la position de l’euro par rapport au dollar a
continué à se dégrader, générant ainsi une perte estimée à 101,7
M€ pour
les seules contributions internationales et opérations de maintien de la paix.
Ces difficultés ont été évoquées dans les notes d’exécution budgétaire
relatives aux exercices 2015, 2016 et 2017 ainsi que dans la communication
de la Cour à la commission des
finances, de l’économie générale et du
contrôle budgétaire de l’Assemblée nationale sur les contributions
internationales de la France 2007-2014 en octobre 2015.
4 Or, selon la direction du budget, le taux de change mentionné dans les documents
budgétaires ne revêt qu’une valeur indicative et ne constitue pas, selon elle, un taux
plancher en deçà duquel le ministère ne devrait pas recourir à une couverture.
COMPTE DE COMMERCE COUVERTURE DES RISQUE
S FINANCIERS DE L’ÉT
AT
15
Dans sa communication d’octobre 2015 sur les contributions
internationales de la France 2007 - 2014, à la commission des finances, de
l’économie générale et du contrôle budgétaire de l’Assemblée nationale, la
Cour recommandait de :
« mettre en place, après une analyse économique
rétrospective et prospective, un mécanisme efficace de couverture du
risque de change, sans préjudice d’un ajustement des crédits dans le cadre
de la programmation budgétaire ».
II -
Les actions mises en œuvre
de 2016 à 2020
À la demande du Parlement, le Gouvernement a saisi l'inspection
générale des affaires étrangères (IGAE) et l'inspection générale des
finances (IGF) pour produire : «
un rapport établissant un bilan de
l'utilisation du mécanisme d'achat à terme de devises utilisé depuis 2006
et un bilan du recours à la réserve de précaution pour couvrir les risques
de change auxquels sont exposés les crédits de la mission Action extérieure
de l'État. Ce rapport examine également l'opportunité d'introduire un
mécanisme budgétaire automatique et pérenne de couverture de ces
risques de change.
»
5
Le rapport IGF-IGAE, remis au Parlement en octobre
2016, reprend à son compte le constat et la recommandation de la Cour et
formule 37 recommandations opérationnelles.
L’analyse de ces recommandations en 2017 par un groupe de travail
interministériel
6
a principalement abouti le 12 avril 2
018 à l’actualisation
de la convention entre le MEAE, l’AFT et les SCBCM des finances et des
affaires
7
. Les deux années suivantes, des échanges entre le MEAE et le
MACP ont permis d’améliorer la compréhension de l’impact de l’effet de
change, associé à l’effet prix, sur la dépense à l’étranger.
Dans l’attente de l’aboutissement d’autres travaux du groupe de
travail précité, la Cour a reconduit la recommandation qu’elle avait émise
en 2018 pour cette note d’évaluation budgétaire et celle relative au compte
d’opérations monétaires 953
Pertes et bénéfices de change
, en la
reformulant, jusqu’en 2021. Elle visait à recenser les opérations
5
Selon l’article 129 de la loi de finances initiale de 2016.
6 Le groupe de travail est constitué de représentants de la direction du budget (bureau
des affaires étrangères et du développement), du MEAE (direction des affaires
financières), de la direction générale du Trésor (bureau aide publique au
développement), l’AFT (cellule trésorerie), des SCBCM, de la direction générale des
finances publiques (département comptable ministériel et Mission Chorus), de la
direction spécialisée des fina
nces publiques pour l’étrange et l’agence pour
l’informatique financière de l’État. Sa coordination a été confiée à la direction du
budget.
7 Non signataire de la convention, la direction du budget a participé à sa révision.
16
COUR DES COMPTES
susceptibles d’être exposées au risque de change, à établir un cadre de
référence commun qui faciliterait l’action des respo
nsables de programme,
à ce qu’un soutien technique soit apporté à ces responsables dans
l’engagement d’opérations de couverture et à clarifier le traitement
budgétaire des risques non couverts.
En réponse à la recommandation de la Cour, la direction générale du
Trésor et l’AFT indiquent ne pas souhaiter une couverture maximale du
risque de change de l’État, qu’elles considèrent comme son propre
assureur, en faisant valoir que les aléas de change auraient une incidence
globalement neutre pour le budget de l
’État sur longue période. Elles
envisagent toutefois d’encourir un coût de couverture afin de sécuriser
l’exécution budgétaire pour les opérations de fort montant très prévisibles.
III -
L’analyse de la Cour
au titre
de la gestion 2021
L’exposition au change re
présente un risque important pour
l’exécution budgétaire des ministères concernés et pour la mise en œuvre
des politiques publiques dont ils ont la charge. En cas de dépréciation
significative de l’euro face aux autres devises comme en 2015, les pertes
budgétaires peuvent être rapidement importantes
8
.
Les principaux risques de change identifiés dans ce compte portent
sur les opérations en devises non couvertes par contrat d’achats de devises
à terme. En effet, les contrats d’échange de prix à terme dits
swaps
de
produits pétroliers utilisés par le ministère des armées ne posent pas de
difficulté majeure et n’appellent pas de commentaire.
Les opérations en devises relevant des ministères économiques et
financiers recouvrent des contributions pluriannuelles à des fonds
multilatéraux versés sur une base triennale (AID, FAD et FIDA) ou
quadriennale (FEM et FAsD), dont le montant définitif en euros est connu
et dont la couverture par achat à terme de dollars est effectuée
systématiquement sur l’ensemble de la péri
ode de leur versement. Cette
couverture étant de 97 % en 2021, ce risque est globalement maîtrisé
9
.
8 Pour illustrer ce point, selon la mission IGF-IGAE de 2016, pour la seule année 2015 et
les seules dépenses en dollars et francs suisses identifiées par Chorus, 330
M€ au minimum
de dépenses auraient pu être évitées si une couverture à terme avait été passée globalement
au regard des prévisions d'engagement de l'État en dollars et francs suisses à l'été 2014.
9 Les 3
% de dépenses non couvertes (initiative pour favoriser l’accès des femmes au
financement en Afrique ou AFAWA, initiatives pour l’inclusion numérique financière
des femmes en Afrique, fonds pour le Liban) le sont parce que le montant définitif
COMPTE DE COMMERCE COUVERTURE DES RISQUES
FINANCIERS DE L’ÉTAT
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Les opérations exposées au risque de change relevant du MEAE
relèvent de deux ordres :
-
concernant les dépenses liées à des contributions internationales ou à
des opérations de maintien de la paix libellées en devises, il revient au
responsable de programme de prendre l’initiative de la couverture,
d’en fixer la date et les modalités techniques. Les rôles respectifs du
MEAE,
de l’AFT et des SCBCM des finance
s et des affaires
étrangères ont été clarifiés dans la convention révisée le 12 avril
2018
10
. Le MEAE peut bénéficier de l’appui technique de l’AFT.
En
loi de finances initiale pour 2021, ces dépenses programmées en
devises sont couvertes à 82 %. En se limitant aux opérations libellées
en dollars, cette couverture est d’environ 89
%
;
-
s’agissant de l’effet change des rémunérations du personnel du MEAE
en euros, qui n’entre pas dans le champ de la convention précitée et
pour lequel le risque de change n’es
t pas provisionné, des progrès ont
été réalisés grâce à l’expérimentation ouverte par lettre
plafond en
2019 et reconduite en 2020 et en 2021. Celle-ci vise à mobiliser la
réserve de précaution en fin de gestion pour couvrir le risque de
change, à la bai
sse comme à la hausse, sur les dépenses d’indemnités
de résidence à l’étranger (368,7
M€ exécutés en 2021, libellées en
euros mais ajustées trimestriellement au titre du change et du prix) et
sur la masse salariale des agents de droit local (130,2
M€ exécu
tés en
2021).
Cette faculté, encore au stade de l’expérimentation, n’a pas été
mobilisée dans la mesure où les effets conjugués de la crise sanitaire
et d’une évolution favorable des taux de change sur la masse salariale
du MEAE, en particulier en 2021, on
t conduit à d’importantes sous
-
consommations sur les dépenses de personnel. Le MEAE a demandé
de reconduire cette expérimentation pour 2022 et suppose qu’elle est
tacitement accordée par la direction du budget.
Ces progrès vont dans le sens de la recommandation antérieure de
la Cour. Le risque est reconnu et sa maîtrise est recherchée par les trois
principaux ministères concernés. La direction du budget, la direction
générale du Trésor et l’AFT ont fourni le cas échéant un appui technique
aux responsables d
e programme. Le MEAE dispose désormais d’un moyen
de se prémunir contre l’effet change des rémunérations de son personnel,
dont la pérennisation reste à confirmer.
n’était pas connu (AFAWA), pas prévu
ex ante (Liban), ou parce que les montants en
jeu étaient faibles (inclusion numérique financière).
10 Son article 10 stipule que : « Le MEAE en ta
nt qu’ordonnateur principal est le seul
juge de l’opportunité des achats à terme et seul responsable de la justification de
l’opération de couverture vis
-à-vis de la Cour des comptes. »
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COUR DES COMPTES
Il conviendrait de compléter cette démarche en vérifiant par un
recensement des dotations budgétaires exposées au risque de change que
tout programme susceptible de représenter un enjeu budgétaire significatif
ait fait l’objet d’un examen sur l’opportunité de prévoir un dispositif de
couverture de change ou de financement de ce risque.
Tout en invitant les différentes parties à conforter les efforts
entrepris, la Cour ne reconduit pas sa recommandation.
COMPTE DE COMMERCE COUVERTURE DES RISQUE
S FINANCIERS DE L’ÉT
AT
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Annexes
Annexe n° 1.
....
Liste des publications récentes de la Cour des comptes en lien
avec les politiques publiques concernées par la note d’évaluation
budgétaire
......................................................................................................
20
Annexe n° 2.
......
Suivi des recommandations
formulées au titre de l’exécution
budgétaire 2020
.............................................................................................
21
20
COUR DES COMPTES
Annexe n° 1.
Liste des publications récentes de la Cour
des comptes en lien avec les politiques publiques
concernées par
la note d’évaluation budgétaire
Cour des comptes,
Les contributions internationales de la France
2007-2014
, Communication à la commission des finances, de
l’économie générale et du contrôle budgétaire de l’Assemblée
nationale, Octobre 2015.
Annexe n° 2.
Suivi des recommandations formulées au titre de l’exécution bud
gétaire 2020
Recommandation formulée au sein
de la note d’exécution budgétaire
2020
Réponse de l’administration
Analyse de la Cour
Appréciation
par la Cour du
degré de mise
en œuvre*
1
(direction du budget, direction
générale du Trésor)
:
renforcer la
maîtrise des risques liés aux aléas
de change sur le budget de l’État
par un recensement des opérations
susceptibles d’y être exposées, par
un cadre de référence commun et
un soutien technique des
responsables de programme dans
l’engagement d’opérations de
couverture, et par une clarification
dans le cadre de la procédure
budgétaire du traitement des risques
non couverts (
recommandation
reformulée
).
Réponse de la direction générale du Trésor et de l’Agence France Trésor :
La mise en place d’une couverture
du risque de change a toujours un coût financier,
les instruments de couverture n’étant pas gratuits. Pour la plupart de ces instruments, le coût
se matérialise sous la forme d’un taux de change garanti par l’instrument légèrement moins
avantageux que l’e
spérance du taux à échéance. Dans la mesure où la granularité importante
des opérations de change de l’État permet de limiter le risque de change du fait de la loi des
grands nombres, la politique de couverture de change s’aligne sur la politique plus géné
rale
selon laquelle l’État est son propre assureur. Il n’est donc pas souhaitable de rechercher une
couverture maximale du risque de change de l’État.
Des exceptions sont possibles pour les opérations de fort montant très prévisibles
pour lesquelles il
peut être justifié d’encourir un coût de couverture afin de sécuriser
l’exécution budgétaire. Les gestionnaires de programme sont les mieux à même d’analyser
ces situations et sont invités à se rapprocher de l’AFT le cas échéant lorsqu’ils veulent
couvrir des dépenses en devise. Ils restent maîtres de la gestion du programme qui leur
incombe et l’AFT n’intervient qu’en exécution des couvertures qu’ils ont décidées.
La Cour constate les
progrès
réalisés
dans la mise en
œuvre
de
la
couverture
de
change
dans
le
cadre
de
la
convention de 2018
et
de
la
lettre
plafond du MEAE
de 2019.
Mise en œuvre
* Totalement mise en œuvre, mise en œuvre incomplète, mise en œuvre en cours, non mise en œuvre, refus, devenue sans objet
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COUR DES COMPTES