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Seul le prononcé fait foi
PRÉSENTATION À LA PRESSE
DU RAPPORT PUBLIC ANNUEL
Mercredi 16 février 2022
9h30
Grand’chambre
Allocution de Pierre Moscovici,
Premier président de la Cour des comptes
Mesdames et messieurs,
Bonjour à toutes et tous,
Je vous remercie d’assister aujourd’hui à cette conférence de presse à l’occasion de
la parution de notre rapport public annuel 2022, que j’ai remis hier au soir au
Président de la République.
C’est depuis la Grand chambre de la Cour
que j’ai le plaisir de m’adresser à vous
aujourd’
hui.
Je suis accompagné de notre rapporteure générale, Carine Camby, que je
veux remercier tout particulièrement et dont je veux saluer le rôle essentiel, avec ses
équipes, dans la préparation de ce rapport. Sont également présents à mes côtés les
présidents de chambre de la Cour : Christian Charpy, Annie Podeur, Louis Gautier, Gilles
Andréani, Catherine Démier, Denis Morin et enfin Jean-Yves Bertucci, président de la
récente 7
ème
chambre de la Cour des comptes en charge du contentieux. Je salue enfin les
présidentes et présidents de chambres régionales et territoriales des comptes qui nous
suivent à distance et qui sont nombreux à avoir contribué à la rédaction du rapport,
notamment Christian Martin, Frédéric Advielle, Paul Serre et Marie-Aimée Gaspari,
respectivement à la tête des CRC Île-de-France, Haut-de-France, Nouvelle-Aquitaine et
Occitanie.
La présentation aux médias de notre rapport public est toujours un exercice
particulièrement important pour notre maison.
Elle constitue un rendez-vous annuel
auquel nous sommes très attachés et auquel nos concitoyens sont, je le sais, très attentifs.
La parution du « RPA
», comme nous l’appelons familièrement, offre en effet l’occasion d’un
moment d’échange privilégié, avec vous bien sûr, les journalistes, mais
aussi, à travers vous,
avec les décideurs publics et les Français. Grâce à l’écho que vous lui donnez depuis 1946,
cette production permet à la Cour, et aux juridictions financières dans leur ensemble, non
seulement de contribuer activement à l’information
de nos concitoyens, mais aussi de faire
de la pédagogie sur la complexité des situations auxquelles les décideurs publics sont
confrontés ainsi que sur les marges d’amélioration de l’action publique, avec un regard
objectif et transversal.
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Ce moment d
e présentation est d’autant plus important qu’il intervient dans un
contexte marqué par quatre enjeux clés.
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Premier enjeu, la mise en œuvre des transformations du plan stratégique «
JF 2025 »,
que j’ai initié dès le jour de ma nomination, il y a maintena
nt 20 mois, avance à bon
rythme au sein de notre institution
. Je pense notamment au renforcement des capacités
d’analyse des données produites par l’administration, à notre réactivité pour analyser les
dépenses engagées pendant cette crise sanitaire, dans la droite lignée de ce qui avait été
fait lors du RPA 2021 au sujet de la continuité du service public éducatif et des audits flash
relatifs au financement de la recherche pour la lutte contre le Covid-19, mais aussi à
l’approfondissement de nos travaux su
r la transition écologique et au renforcement des liens
avec le monde du savoir par la signature de conventions avec plusieurs institutions
universitaires et scientifiques. Je ne suis bien sûr pas exhaustif, mais je souhaite vous
montrer l’intensité de not
re volonté et tout le chemin déjà parcouru pour renforcer notre
institution. Nous pouvons également nous réjouir d’avoir accru le rayonnement européen et
international de la Cour, ainsi qu’en témoigne l’obtention du mandat d’auditeur externe de
l’ONU, qui
va mobiliser des équipes importantes pour 6 ans.
Deuxième enjeu, l’année 2022 pourrait marquer la sortie effective –
et très espérée par
nous tous
de la crise sanitaire. En ce sens, notre rapport public annuel s’inscrit
dans la continuité des travaux réalisés par les juridictions financières au fil de la crise
sanitaire et vise également à dépasser ce cadre temporel en mettant en avant des
orientations structurelles pour faire de la France un pays plus résilient.
La crise
sanitaire a naturellement consti
tué un thème d’analyse prioritaire et récurrent dans les
différentes publications de la Cour depuis mars 2020, notamment celles consacrées aux
finances publiques. Je crois pouvoir dire que les juridictions financières, et notamment la
Cour, disposent désor
mais d’une vue d’ensemble et d’une analyse approfondie des
conséquences de la crise et de la façon dont les acteurs publics y ont fait face. Le rapport
annuel que je vous présente aujourd’hui en est une illustration.
En troisième lieu, l’année 2022 est un
e année caractérisée par des choix
démocratiques majeurs pour notre pays.
La Cour et les juridictions financières sont une
institution indépendante et impartiale, qui ne prend pas part à la vie politique. Mais, à l’image
des notes de synthèse présentant les grands enjeux structurels dans une douzaine de
domaines majeurs de l’action publique, tels que la justice ou l’emploi, que nous avons
publiées au cours de l’automne 2021, j’ai l’ambition que les données et les analyses
présentes dans le RPA permettent d’
objectiver le débat public, à un moment crucial pour
notre pays. Je suis en effet profondément attaché à la mission d’information des citoyens
donnée à la Cour par la Constitution.
Enfin, nous présentons le RPA 2022 alors que la France a pris, le 1
er
janvier dernier, la
présidence du Conseil de l’Union européenne.
Dans ce contexte, la Cour des comptes a
souhaité avancer la date de publication du rapport au 15 février. Cette anticipation a
nécessité une mobilisation accrue de nos équipes- je les en remercie sincèrement- pour
pouvoir exploiter nos constats, diagnostics et recommandations à l’occasion de la
conférence internationale relative à l’avenir de l’Europe que la Cour des comptes organise
les 14 et 15 mars prochains. Je redirai, à cette occasion, ma c
onviction qu’une maîtrise
effective des finances publiques exige une gouvernance européenne renouvelée,
approfondie et cohérente. Je vous donne dès à présent rendez-vous à cette conférence.
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Le RPA est avant tout le fruit d’un travail collectif accompli
pendant une année
charnière dans la lutte contre la pandémie du Covid-19 et dans la refonte de notre
modèle socio-économique.
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Il se structure autour de 19 chapitres, précédés par un chapitre introductif relatif aux
finances publiques
. La présence de ce chapitre liminaire est essentielle, tant la situation
des finances publiques conditionne la conduite de la politique de la Nation.
Les 19 autres chapitres portent sur la gestion de la crise sanitaire par les acteurs
publics.
Deux ans après le début de la pandémie, le rapport public annuel de 2022 propose
un premier bilan et les principaux enseignements à tirer de la crise et de ses conséquences
budgétaires, financières, économiques et sociales. Il ne s’agit plus seulement d’analyser nos
comportements dans
l’urgence, mais d’apprécier notre résilience et notre capacité à
remédier aux faiblesses structurelles que la crise a révélées ou accentuées.
Les
observations, diagnostics et recommandations, issus des travaux de la Cour et des
chambres régionales et territoriales des comptes, rendent compte des résultats obtenus et
des progrès restant à faire, tant en termes de services rendus aux citoyens que de soutien à
l’activité et à la croissance économique. Plusieurs initiatives sont ainsi évaluées dans les
domaine
s de l’action publique les plus variés. Je cite par exemple la création des Prêts
Garantis par l’Etat (PGE), le soutien à la vie étudiante et le plan «
Un jeune / Une solution »,
la lutte contre les ruptures d’approvisionnement en produits de santé ou enco
re la gestion de
la crise sanitaire dans les EHPAD
j’aurai l’occasion au cours de mon allocution de
développer ces points et les autres.
*
*
*
Avant cela, je souhaite rappeler que pour faire face à la pandémie, les moyens publics
déployés ont é
té d’une ampleur inédite.
Si cette action était nécessaire, pour préserver
l’activité et nourrir la croissance à venir, elle va durablement peser sur le déficit et la dette
publics. Le nécessaire redressement des finances publiques passera aussi inéluctablement
par des efforts sans précédent de maîtrise de nos dépenses.
Le chapitre introductif du rapport, consacré à la situation d’ensemble des finances
publiques montre que, si l’année 2021 a été celle du rebond de l’activité économique,
cette reprise s’accompagne d’un déficit public profond et structurel.
Le déficit public se
maintient à un niveau élevé en 2021, à hauteur de 8,2 points de PIB, ramené à 7 points
selon les dernières déclarations du Gouvernement, et serait encore de 5 points en 2022. Ce
qui e
st inquiétant pour l’année 2022, c’est la dimension structurelle de cette donnée. Corrigé
de l’impact de la conjoncture, le déficit prévu en 2022 correspond au double de son niveau
d’avant crise
! Même si certaines dépenses qui entrent dans son calcul ont vocation à
disparaître, comme les dépenses sociales d’urgence ou les dépenses du plan de relance
non financées par le plan de relance européen, son niveau n’en reste pas moins très élevé.
La dette publique représenterait 113,5 points de PIB en 2022, et dépasserait alors de
16 points de PIB son niveau de 2019. La mesure de cantonnement de la « dette Covid » de
l’État introduite dans le PLF 2022 ne modifie en rien la trajectoire de la dette publique, car
aucune ressource supplémentaire nouvelle et aucun nouvel effort de redressement
structurel, ne sont attachés à son amortissement.
Vous l’aurez compris, pour atteindre de tels niveaux de déficit et d’endettement
publics, les dépenses publiques françaises ont considérablement augmenté, au-delà
même des mesures temporaires, et ont atteint un niveau nettement supérieur à leur
niveau d’avant crise.
Le taux de dépenses publiques représenterait 59,8% du PIB en 2021
et 55,7% en 2022 et serait ainsi supérieur de près de deux points de PIB à son niveau de
2019. Bien pl
us que les mesures de soutien, qui n’expliqueraient qu’à hauteur de 2 points de
PIB la hausse de la dépense publique entre 2019 et 2022, c’est bel et bien la mise en place
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de nouvelles dépenses pérennes qui vient lourdement dégrader le solde structurel. Nous
avons eu l’occasion de démontrer à plusieurs reprises que la progression des dépenses
publiques pèse lourdement sur notre équilibre budgétaire. Entre 2000 et 2019,
l’augmentation de la part des dépenses publiques dans le PIB (+
4,5
points) s’explique à
hauteur de + 2,8 points par les dépenses de retraite et de + 1,7 point par les dépenses
publiques de santé. Il est nécessaire de modérer la progression des dépenses sociales. À ce
sujet, nous avons dédié un chapitre du rapport public annuel de 2022 à un thème très précis,
mais pourtant essentiel, relatif aux réserves des régimes de retraite. Le développement de
l’activité partielle et l’octroi de délais pour le versement des cotisations ont en effet eu des
répercussions sur les ressources des régimes et la crise met en lumière la nécessité de
réformer notre cadre réglementaire des placements d’actifs devenu désuet et inadapté face
aux rapides évolutions des marchés financiers.
S’agissant des recettes, nous soulignons dans le RPA que leur hausse,
portée par le
rebond de l’activité en 2021, a été
freinée par d’importantes baisses d’impôts.
En 2021
et 2022, les prélèvements obligatoires augmenteraient respectivement de 5,1% et 4,6%, soit
moins que l’activité économique du fait de mesures nouvelles de baisses d
e prélèvements
obligatoires, soit décidées antérieurement à la crise sanitaire (suppression progressive de la
taxe d’habitation et baisse de l’impôt
sur les sociétés), soit dans le cadre du plan de relance
(suppression de 10 Md€ d’impôts de production), soit face à la hausse du coût de l’électricité
(baisse de la TICFE). Le taux de prélèvements obligatoires baisserait donc d’un peu plus
d’un point ces
deux années, passant de 44,5% en 2020 à 43,8% en 2021 et 43,4% du PIB
en 2022.
L’état des lieux que je dresse est d’autant plus préoccupant qu’un recul de la
croissance
parlons plutôt d’un retour à la normale après une année exceptionnelle,
2021, et une année de croissance forte, 2022 - est attendu après 2022.
Elle passerait,
selon les prévisions du gouvernement, de 4% cette année à 1,6% en 2023. Un
ralentissement de la croissance conjugué à un maintien à un haut niveau du déficit public
entrainerait un
e hausse du ratio d’endettement, et risquerait donc de fragiliser la confiance
des acteurs économiques dans la capacité de la France à honorer ses engagements passés
et à venir. J’insiste sur ce point
: comme la Cour l’a déjà souligné dans son rapport au
Gouvernement en juin 2021 proposant une stratégie de finances publiques pour la sortie de
crise, assurer la soutenabilité de la dette publique est un enjeu de souveraineté. C’est une
condition nécessaire pour faire face aux chocs économiques, mais aussi pour être en
mesure de financer les priorités d’action pour le pays, ainsi que le fonctionnement courant
des administrations publiques.
Un tel objectif ne peut être atteint qu’en menant une politique budgétaire ciblée visant
à redresser la trajectoire des finances publiques.
Face à ce défi, quelles sont les pistes
que nous proposons ?
La sortie de la crise et du « quoi qu’il en coûte » doit être l’occasion de
réformer profondément la gouvernance des finances publiques
et de
parachever, deux décennies plus
tard, notre « constitution financière ». L’adoption de
la loi organique relative à la modernisation de la gestion des finances publiques et de
la loi ordinaire relative au Haut Conseil des finances publiques et à l’information du
Parlement sur les finances
publiques poursuit ces objectifs, et je m’en réjouis.
À l’échelon national, des réformes d’envergure doivent également être
poursuivies dans les domaines prioritaires que nous identifions
, et en particulier
le système des retraites,
l’assurance maladie, la politique de l’emploi, les minima
sociaux et la politique du logement.
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Au niveau européen, et ce sera mon dernier point, une réforme du cadre de
gouvernance des finances publiques, avant la levée de la clause dérogatoire
prévue en 2023, doit aboutir
.
Cette clause a permis de suspendre l’application du
pacte de stabilité et de croissance, et donc les règles des 3% de déficit et de 60% de
dette publics, durant la crise sanitaire. Une approche pragmatique devrait désormais
être privilégiée, par exemple en
déterminant un taux d’endettement propre à chaque
pays en fonction de leur situation macroéconomique. Il s’agit en réalité d’axer les
nouveaux critères de gouvernance sur l’évaluation de la qualité des dépenses
publiques et la soutenabilité de la dette afin de permettre aux États membres, et
a
fortiori
à la France, de gagner en capacité de projection et d’anticipation.
En définitive, c’est grâce à ce mouvement de convergence entre la réforme du cadre
de gouvernance des finances publiques, la maîtrise des dépenses et la refonte des
grandes politiques publiques que la France retrouvera une situation budgétaire
assainie,
condition
sine qua non
du maintien de sa légitimité économique et budgétaire et
de sa crédibilité internationale.
*
Le constat sur les finances publiques étant posé, nous avons fait le choix de traiter
dans ce RPA des sujets sectoriels importants, par leur ampleur opérationnelle ou par
les masses financières en jeu.
Les différents chapitres ne permettent pas, bien sûr, de
dresser un bilan exhaustif et définitif de la gestion de la crise sanitaire, mais ils nous livrent
déjà des enseignements clés sur la période passée, pour affronter les défis à venir en 2022
et au-delà. Dans le tableau général que je souhaite dresser devant vous, je mettrai en avant,
dans un premier temps, la forte réactivité dont l’administration a fait preuve durant la crise
malgré un défaut criant d’anticipation, puis je pointerai les lacunes ou, à tout le moins, les
domaines d’amélioration possibles. Enfin, je présentera
i les défis structurels auxquels nous
allons devoir faire face, et qui apparaissent comme la clé de voute de notre futur commun.
*
*
*
Je voudrais souligner, en guise de premier enseignement de ce RPA 2022, qu’en dépit
d’une anticipation insuffisante, l’administration française a été globalement réactive
face à la crise et a fait preuve d’une très grande capacité d’adaptation, et même
d’innovation, pour protéger la population, assurer la continuité des services publics et
préserver le tissu économique.
Tout d’abord, malgré les contraintes initiales qui étaient les leurs et l’intensité de l’activité à
laquelle ils devaient répondre, les acteurs publics ont su se mobiliser rapidement et
moderniser leur fonctionnement.
Le chapitre relatif à la direction générale des finances publiques (DGFiP) et à la
direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) illustre parfaitement la
mobilisation du personnel administratif, le développement des méthodes de travail à
distance ainsi que la numérisation des procédures.
Il faut rappeler, et le chapitre le fait à
juste titre, que la DGFiP et la DGDDI n’étaient pas prêtes
quand la crise sanitaire s’est
emballée : les outils de gestion de crise, tels que les plans de continuité de l’activité et les
modalités de travail à distance, étaient peu développés, pour ne pas dire inexistants. Seuls
27% des agents de la DGDDI (hors branche surveillance) et 17% des agents de la DGFiP
étaient équipés d’ordinateurs portables en mars 2020. Là où l’administration a été
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perfor
mante, c’est donc dans sa réactivité
! Les deux directions ont en effet pris la mesure de
la crise sanitaire en s’adaptant très rapidement, notamment grâce à l’acquisition
d’ordinateurs portables entre mars 2020 et juin 2021, portant leur taux d’éq
uipement à 81%.
C’est grâce à de telles initiatives, forgées par et dans l’urgence de la situation que le
versement d’aides aux entreprises
via
le fonds de solidarité, et que l’approvisionnement du
pays en équipements de protection individuelle, dont les masques de protection et le
matériel médical, ont pu être réalisé par ces deux administrations. Nous avions déjà, dans le
RALFSS de cet automne, fait un constat identique pour les administrations de sécurité
sociale, en soulignant que malgré les contraintes résultant de la crise sanitaire, le versement
des prestations sociales avait pu être assuré sans aucune discontinuité. Je le dis avec force
et le crois profondément : au travers de ces mesures, en apparence simples mais en réalité
très exigeantes et nécessaires,
c’est toute l’agilité de l’administration qui a été démontrée, et
qu’il convient de pérenniser. Un tel objectif permettra de renforcer notre degré de préparation
aux crises à venir
je suis convaincu que l’administration en est capable et elle doit se
don
ner les moyens d’agir dans l’intérêt des citoyens.
L’administration pénitentiaire et la protection judiciaire de la jeunesse ont également
été particulièrement réactives face à la crise.
Le chapitre qui y est dédié souligne que la
direction de l’administ
ration pénitentiaire (DAP) et la direction de la protection judiciaire de la
jeunesse (DPJJ) étaient peu préparées à la gestion d’une crise sanitaire telle que celle liée à
l’épidémie de Covid
-19
: pas de plan de continuité d’activité des services, une gra
nde
faiblesse du secrétariat général du ministère face aux directions « métiers » et une inégale
implication de ces dernières au sein de la cellule de suivi et d’anticipation. Toutefois, la
continuité du service a été assurée au prix d’une adaptation des m
odalités de
fonctionnement en milieu fermé et d’une forte réduction des activités en milieu ouvert.
Comme cela a été fait partout en Europe, l’administration pénitentiaire a accéléré les sorties
de détenus condamnés à des peines légères ou présentant les meilleures chances de
réinsertion. En milieu ouvert, les services pénitentiaires d’insertion et de probation ont
accordé une priorité au suivi des personnes considérées comme les plus dangereuses ou
les plus vulnérables. Ce recalibrage dans l’urgence, et vers l’urgence, est à souligner. Bien
qu’il ait permis de garantir la sécurité sanitaire des agents et des personnes sous
-main de la
justice tout en évitant un dérapage budgétaire, nous en soulignons, et c’est notre rôle, les
limites. Nous émettons notamment une importante réserve concernant la politique vaccinale
des détenus et du personnel pénitentiaire, qui n’a pas été considérée, à tort, comme
prioritaire par le Gouvernement.
Ensuite, je voudrais souligner le rôle clé joué par l’État, qui a choisi d’app
orter, « quoi
qu’il en coûte
», un soutien massif aux secteurs les plus fortement touchés par la
crise sanitaire et à l’activité économique du pays.
L’une des meilleures illustrations consiste en la mise en place du dispositif des prêts
garantis par l’Ét
at (PGE).
Face au risque majeur de resserrement du crédit, la France, dans
le cadre juridique fixé par la Commission européenne, a mis en place des « ponts de
liquidité » pour les entreprises en leur donnant accès aux désormais célèbres PGE. Au-delà
du dispositif lui-même, ce que nous mettons en avant, ce sont la rapidité et le bon calibrage
des PGE. Ce succès a été favorisé par la coopération étroite entre l’administration, les
acteurs financiers et Bpifrance. En 2020, les PGE ont largement dominé les autres crédits
publics et privés, représentant alors 120,8 milliards d’euros d’encours.
Si les PGE ont été une grande réussite, l’État a également fait le choix d’intervenir
directement dans des secteurs spécifiques. Dans notre RPA 2022, nous évoquons
notamment le monde sportif.
Face à la chute drastique du chiffre d’affaires du secteur,
estimée à 20 milliards d’euros en 2020, l’État a mis en place des aides importantes en faveur
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du sport.
Les entreprises et les associations sportives ont ainsi pu avoir accès aux
dispositifs de droit commun à hauteur de 4,2 milliards d’euros, auxquels se sont ajoutés
3,1
milliards d’euros de PGE et 523 millions d’euros d’aides spécifiques.
À
l’image de la crise elle
-même, des mesures fiscales exceptionnelles ont été mises
en place.
Nous montrons, au travers d’un chapitre entièrement dédié à ces mesures,
comment l’administration fiscale française a pris des décisions adéquates pour soutenir la
trésorerie des entreprises. C’est bien sûr le travail en bonne intelligence entre
l
’administration et les entreprises qui a facilité la mise en place de mesures pertinentes et
rapides, garantissant leur plus grande efficacité. La force de l’État durant la crise sanitaire a
indéniablement été sa capacité à adopter une approche globale, précise et massive.
Enfin, l’État a été particulièrement présent pour maintenir la bonne gestion des biens
de première nécessité, comme l’électricité et les transports collectifs qui ont été
lourdement frappés par la crise.
Le maintien de l’alimentation e
n électricité est un bel exemple de coopération et de
coordination entre l’ensemble des acteurs publics et privés du secteur électrique.
Dans notre chapitre sur la production de l’électricité, nous montrons que l’État y a joué un
rôle structurant. L’État a
su protéger. Au plus fort de la crise sanitaire, il a agi en faveur des
consommateurs et des entreprises face la hausse des factures d’électricité en prolongeant,
par exemple, la trêve hivernale et en permettant les reports de factures. L’État a également
su soutenir. Il a en effet apporté un soutien financier à Électricité de France, principal
producteur d’électricité en France, au travers d’une émission obligataire de l’entreprise d’un
montant de 960 millions d’euros.
Autre secteur clé : les transports.
Les chapitres dédiés aux réseaux de transports
collectifs de la région Île-de-
France, à l’opérateur public Transdev et aux aéroports français
soulignent bien que l’État a joué un rôle majeur. En particulier, l’enquête de la Cour sur les
transports collectifs en Île-de-
France a montré qu’Île
-de-France Mobilités et les opérateurs,
la RATP et la SNCF, ont choisi de maintenir une offre largement supérieure à la
fréquentation, en chute brutale, afin d’assurer le transport des salariés des première et
deuxième lignes et de permettre le respect des règles de distanciation. Île-de-France
Mobilités et les opérateurs ont subi de très grosses pertes financières liées à la contraction
des recettes tarifaires mais l’Etat a accepté de les compenser massivement. Pour aut
ant, le
choc subi par les réseaux de transports a révélé la nécessité urgente de conforter leur
financement dans un contexte de grande incertitude liée à l’évolution du comportement des
usagers, avec le développement du télétravail et des nouvelles mobilités.
Il me semble important de rappeler que c’est cette présence positive de l’État qui a permis à
notre pays de faire face aux vagues épidémiques et au spectre de la récession économique.
L’État ne peut pas tout, mais la crise nous a toutefois démontré qu
e, dans des périodes
aussi dramatiques, l’État peut beaucoup
!
En miroir de ces réussites, que j’ai à cœur de rappeler, le RPA 2022 revient également
sur les dysfonctionnements, qui ont émergé au cœur de la crise sanitaire. Nul n’est
parfait, et c’est là
le deuxième enseignement de ce RPA 2022 : la crise sanitaire a
révélé, voire accentué, des défauts de ciblage, de coordination et de contrôle des
moyens déployés.
Premièrement, la gestion de la crise sanitaire a été marquée par un manque de ciblage
des mo
yens déployés, qui s’est traduit par une moindre efficacité de certains
dispositifs de soutien et de relance.
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Je pense notamment au plan « Un jeune / Une solution ».
Pour éviter une hausse
massive du taux de chômage des jeunes, déjà trop élevé avant la crise, le Gouvernement a
mis en place un plan de soutien, estimé à près de 10 milliards d’euros, qui n’a pas eu
d’équivalent dans les pays comparables à la France. Si une intervention massive de l’État
était légitime en la matière, sa mise en œuvre a reposé sur des objectifs qui n’ont pas assez
tenu compte des réalités locales
: elle s’est essentiellement traduite par une amplification
des moyens sur l’ensemble du territoire, de manière quasi
-uniforme, y compris dans les
zones où la situation des jeunes au re
gard de l’emploi ne donnait guère de signes de
dégradation. Par ailleurs, ces aides n’ont pas été suffisamment ciblées sur les jeunes les
plus en difficulté. Il s’agit pourtant de l’intégration par le travail de notre jeunesse, celle qui
façonnera la France de demain
nous nous devons de faire mieux et nous le pouvons, j’en
suis certain.
Dans le même esprit, le chapitre relatif aux mesures européennes en faveur de
l’emploi fait ressortir des lacunes dans le pilotage du ministère chargé du Travail.
La
France a proportionnellement moins réorienté les crédits du Fonds social européen vers des
actions de soutien aux travailleurs et aux publics vulnérables que ses partenaires de l’Union
européenne. Elle se singularise aussi par une dispersion des financements vers une
multitude d’actions et de porteurs de projets, ce qui complique la gestion et l’audit des fonds
correspondants. Nous insistons donc sur un point : la culture de maîtrise des risques doit
être renforcée ! Il en va de la bonne utilisation des fonds européens dont la France peut
bénéficier jusqu’en 2026 dans le cadre de la Facilité pour la reprise et la résilience.
Plus globalement, il ressort de nos travaux que le manque de calibrage des dispositifs
pourrait provenir d’une insuffisante connaissance
de leurs bénéficiaires potentiels.
Ainsi, le chapitre relatif aux dispositifs de soutien à la vie étudiante, qui déplore la prise en
charge tardive de la communauté étudiante lors de la crise, reflète l’éloignement et le
manque de données et d’information
s sur la population des étudiants. En effet, les dispositifs
mis en œuvre ont essentiellement été fléchés vers les publics connus, à savoir les boursiers,
plutôt qu’en direction des étudiants en situation de grande précarité, moins visibles des
services ad
ministratifs. Cette méconnaissance s’est révélée source de faible performance, et
il faut la combattre avec d’autant plus de vigueur qu’elle impacte directement notre vivier de
talents futurs, notre jeunesse, notre avenir.
S’agissant du manque de coordin
ation, je tiens à évoquer en priorité les travaux
réalisés par les chambres régionales et territoriales des comptes, qui mettent en
lumière la difficile articulation des interventions des acteurs publics nationaux et
locaux.
Le chapitre dédié aux interve
ntions économiques des collectivités locales d’Occitanie
révèle la nécessité de mieux encadrer les dispositifs de soutien en évitant
l’éparpillement de moyens, qui pourrait être préjudiciable à leur efficacité.
Ainsi, bien
que l’État ait créé un fonds de s
olidarité national (FSN) pour éviter la multiplication
désordonnée de régimes d’aides allouées par les collectivités locales aux entreprises de
leurs territoires, l’effort de rationalisation est resté lettre
-morte puisque les différents niveaux
de collectivités ont tous développé leurs propres mécanismes de soutien, parfois même au
prix d’une stratégie de contournement des règles définissant leurs compétences.
Le chapitre relatif au contrôle des délégations de service public dans les Hauts-de-
France soulig
ne quant à lui que, faute d’avoir une stratégie claire pour faire face aux
impératifs de continuité et d’adaptation du service public, les autorités délégantes ont
trop souvent accédé, sans réelle discussion, aux demandes des entreprises
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délégataires, en dépit de la chute des activités déléguées et de la baisse de la qualité
de service aux usagers.
Le manque de coordination, mais surtout l’asymétrie d’information
entre les collectivités locales et les délégataires, a donc conduit à une gestion perfectible. La
crise sanitaire nous rappelle une nouvelle fois la nécessité de replacer les usagers au cœur
des décisions contractuelles !
Enfin, nous déplorons que les aides accordées n’aient généralement pas été assorties
de précautions suffisantes pour éviter les
effets d’aubaine et limiter les risques de
fraude.
Le suivi des mesures fiscales exceptionnelles dont j’ai souligné toute la pertinence
auparavant, a été difficile en raison des rigidités liées aux systèmes d’information de
l’administration fiscale.
L’impossibilité d’instruire les reports de paiement dans les
applications de gestion a notamment alourdi leur traitement et amoindri la qualité de leur
pilotage. Le contrôle de la bonne utilisation et du respect des conditions d’octroi est si
nécessaire qu’il
doit être renforcé !
Une attention similaire doit être portée au suivi des PGE.
Il est aujourd’hui difficile d’en
estimer le coût total pour l’État, qui dépend du taux de défaut des bénéficiaires. Les
informations disponibles à ce jour, entourées de nombreuses incertitudes, nous permettent
d’estimer ce taux à 4%, soit un coût net pour l’État inférieur à 3 milliards d’euros. Par ailleurs,
il faut rappeler que si les caractéristiques retenues pour les PGE en France ont permis à ce
stade d’éviter les phénomènes de fraude massive qui ont été rencontrés dans d’autres pays,
notamment au Royaume-
Uni, les risques d’optimisation doivent être contrôlés et les outils de
pilotage financier doivent être améliorés.
À cet égard, l’évaluation complète du dispositif des
PGE, à laquelle nous procédons actuellement, doit permettre de mesurer si, au-delà du
« pont de liquidités
» immédiat, les prêts garantis par l’État ont contribué à assurer
durablement la viabilité d’entreprises affectées par la crise sanitaire. Il est impo
rtant de créer
des outils de suivi de la trésorerie des entreprises suffisamment fins pour mesurer l’impact
des mesures de soutien et les adapter. Cette qualité du suivi décuplera la puissance du
dispositif !
De manière plus sectorielle, nous identifions des limites similaires pour les aides de
l’État en faveur du mouvement sportif.
D’une part, les moyens dédiés au contrôle ont été
quasi-
inexistants. D’autre part, le déploiement des aides s’est fait dans une grande confusion
entre les mesures d’urgence et
les mesures de relance. Les critères d’attribution ont été,
dans certains cas, trop généraux et l’instruction préalable des demandes a été réalisée, dans
des délais il est vrai contraints, avec une rigueur insuffisante. Il est donc impératif de
développer
dans les fédérations, comme à l’ANS et à la direction des Sports, une véritable
fonction de contrôle de gestion et d’audit. Si l’État veut pouvoir réagir vite, il doit se doter
d’une capacité de rétrocontrôle plus poussée.
Ainsi, l’État a agi avec volon
tarisme pendant la crise, parfois avec brio, parfois moins
bien.
Il n’est pas question ici de dénigrer les actions menées par l’État, mais notre RPA
souligne la nécessité de tirer des leçons de la crise pour continuellement améliorer le service
rendu à nos
concitoyens. À cet égard, une phrase de Churchill me vient à l’esprit, lorsqu’il
disait : «
il ne faut jamais gaspiller une bonne crise
». C’est cette vigueur d’esprit que l’État
doit adopter pour transcender la crise et renforcer son modèle organisationnel et
opérationnel.
*
*
*
Enfin, et c’est le troisième enseignement de ce RPA 2022, les faiblesses structurelles
de notre système productif, de notre modèle social et de transition écologique ont été
Seul le prononcé fait foi
10
accentuées pendant la crise sanitaire. Autant de défis à relever pour répondre
pleinement aux attentes des citoyens et promouvoir le modèle français !
La
pandémie
a
tout
d’abord
rappelé
que
nous
étions,
individuellement
et
collectivement, vulnérables, alors que nous avions eu tendance à l’oublier. Cette
vulnérabilité a notoirement affecté notre système productif.
La première de ces vulnérabilités, c’est bien évidemment notre production de produits
de santé.
La hausse brutale de la demande, en particulier concernant les médicaments
utilisés pour la prise en charge des patients dans les services de soins intensifs ainsi que les
masques de protection sanitaire, a ainsi mis à mal le fonctionnement de nos chaînes
d’approvisionnement. Le chapitre du RPA relatif à l’approvisionnement en produits de santé
démontre
que les pénuries auxquelles nous avons dû faire face ne s’expliquent pas que par
la conjoncture. Au contraire, ces pénuries exposent au grand jour notre dépendance,
désormais bien documentée, à l’égard de certains produits importés. Ayons bien à l’esprit
le
fait que les principes actifs des médicaments commercialisés dans l’Espace économique
européen proviennent majoritairement d’Inde et de Chine
! Certes, la législation a évolué ces
dernières années, dans le sens d’un renforcement des obligations des indu
striels, de façon à
mieux prévenir la survenance des pénuries. Mais la reconstruction ambitieuse de notre tissu
productif est désormais un impératif sur lequel il n’est plus possible de transiger.
La deuxième vulnérabilité dont je souhaiterais parler a trait au secteur alimentaire.
Bien qu’aucune rupture majeure d’approvisionnement n’ait eu lieu pendant la crise, il
convient de rester prudent. Je pense tout particulièrement aux vulnérabilités liées à notre
dépendance à certaines importations et au développement insuffisant des circuits de
proximité. L’élaboration d’une véritable stratégie de préparation et de conduite de crise doit
donc s’accompagner d’un travail plus prospectif sur notre modèle agricole.
Ensuite, la crise sanitaire a bien sûr éprouvé notre modèle social, qui a résisté et a su
protéger nos concitoyens, mais qui doit être consolidé.
J’ai une pensée particulière pour les 600
000 résidents des établissements pour
personnes âgées dépendantes (EHPAD), qui figurent parmi les personnes ayant le
plus souffert de la crise.
Entre mars 2020 et mars 2021, la pandémie a provoqué près de
34 000 décès parmi eux, soit 36% des décès constatés en France du fait du Covid-19. Cette
vulnérabilité particulière ne s’explique pas uniquement par la fragilité physi
que des résidents.
Le chapitre portant sur la gestion de la crise dans les EHPAD met en exergue les difficultés
structurelles de ces établissements. Je pourrais en citer de nombreuses. À titre d’exemple,
pensons à l’insuffisance de la prise en charge médic
ale, aux fortes tensions sur les
ressources humaines et à la faible insertion dans les réseaux d’acteurs de la santé. Ces
difficultés ne peuvent être traitées avec fatalisme ! Et je rappelle ici que les crédits ouverts
dans le cadre du « Ségur de la Santé », ainsi que la hausse de 33,6
% pour 2022 de l’objectif
global de dépenses en faveur des personnes âgées, ne suffiront pas à restructurer en
profondeur notre système médico-
social. Comme l’actualité récente l’illustre tristement, c’est
le modèle de l’EHPAD
en lui-même qui doit encore évoluer. Cette question fait, je le sais,
l’objet d’un grand débat. La Cour y apporte ici son éclairage spécifique, et elle le fera pour
d’autres travaux. Je rendrai d’ailleurs prochainement un rapport spécifique au Sénat sur c
e
sujet et ferai des propositions d’élargissement des compétences des juridictions financières
pour contrôler mieux ce secteur d’activité.
Enfin, et bien que le temps me contraigne, je souhaite évoquer un autre sujet de la
plus grande importance : celui de la transition écologique.
La crise sanitaire nous a
rappelé, s’il le fallait encore, toute l’urgence d’agir pour penser différemment notre mode de
Seul le prononcé fait foi
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vie en prenant en compte le changement climatique et le défi de la transition énergétique.
Vous le savez, les exemples pour illustrer les conséquences directes et concrètes du
changement climatique sur nos vies quotidiennes sont nombreux.
Nous avons choisi d’illustrer les répercussions du changement climatique au travers
de la situation des stations de moyenne montagne des Pyrénées-Atlantiques.
Derrière
ce sujet en apparence bucolique, voire anecdotique, se cachent la lourde réalité des
difficultés économiques et financières des stations de ski en raison des mesures sanitaires,
mais aussi, et surtout, la nécessité de renouveler un modèle économique désuet et
insoutenable en raison des réalités environnementales actuelles et futures. À l’horizon de 20
à 30
ans, il ne devrait sans doute plus subsister qu’une seule station pyrénéenne dotée d’un
enneigement nature
l acceptable. Il est donc nécessaire d’agir dès maintenant pour faire des
montagnes, et plus largement de la France, un territoire durable et résilient !
Ce besoin de résilience s’illustre également lorsqu’on observe les risques pesant sur
la disponibili
té de l’énergie nucléaire.
Cette situation nous incite, voire nous contraint, à
analyser les transitions écologique et énergétique comme les deux faces d’une même pièce.
Rappelons en effet le caractère « décarboné » du nucléaire qui est essentiel pour atteindre
les objectifs de neutralité que la France s’est fixés. Dans le chapitre relatif à la production
d’électricité, nous préconisons aussi de restaurer les marges de notre système de production
en développant des incitations à la modulation de la consomma
tion d’électricité des
entreprises et des ménages en période de fortes tensions.
*
*
*
Vous le voyez, mesdames et messieurs, notre rapport public annuel pour 2022 illustre
la diversité des sujets traités par les juridictions financières, mais aussi leur capacité
à être en phase avec l’actualité et les réalités du terrain.
Les thèmes que nous avons choisi d’aborder
défendent tous une conviction : quand
on aborde la crise sanitaire et les préoccupations des Françaises et des Français, il
n’y a pas d
e petit sujet
. Nous avons donc voulu éviter de nous focaliser, dans ce rapport,
sur une politique ou un secteur d’administration en particulier. Nous voulions au contraire
refléter la diversité de l’action publique, nationale comme territoriale, lorsqu’ell
e est
confrontée à une situation de crise.
Ce que ce RPA dresse, c’est un tableau objectif de la France en sortie de crise, avec
ses réussites et ses faiblesses, les défis qu’elle doit relever, avec ses atouts et ses
lacunes.
Ce rapport ne prétend pas à l
’exhaustivité, mais je crois qu’il donne une série
d’éclairages précieux et représentatifs. La Cour répond ici à sa mission d’information du
citoyen, en objectivant des situations naturellement complexes, peu ou mal connues, parfois
sujettes à des actions de désinformation, des «
fake news
». Avec réalisme et sans
complaisance, notre rapport public annuel reflète le rôle essentiel joué par les acteurs
publics en situation de crise et lance un appel à poursuivre cette dynamique placée sous le
signe de l’adaptation, de la remise en question et surtout de l’action.
Somme toute, il
présente des défis que notre pays est capable de relever grâce à des efforts et des
réformes, grâce à de la persévérance et du courage.
Je veux en effet être optimiste, avec l’optim
isme de la volonté, mais aussi celui de la
rationalité.
L’année 2022 sera peut
-
être, nous l’espérons tous, celle de la fin du Covid
-19.
Elle devrait, en tout cas, être celle de sa « banalisation », du passage du stade pandémique
à un mode épidémique, et cette perspective ne doit pas nous faire céder à la morosité, au
Seul le prononcé fait foi
12
contraire. Une nouvelle fois, nous devons nous adapter, et c’est la nature de l’Homme que
de savoir affronter le changement et les difficultés.
Je ferai ainsi miens les mots de Jean Jaurès lo
rsqu’il disait que «
Il ne faut avoir
aucun regret pour le passé, aucun remords pour le présent, et une confiance
inébranlable pour l'avenir
».
Nous devons faire face aux obstacles du présent de manière
collective et solidaire, en un mot
: faire advenir l’
avenir. 2022 sera une année à très forts
enjeux et nous saurons répondre à l’appel des citoyens et des décideurs pour éclairer leurs
choix, pour améliorer notre collectif et poursuivre notre mission avec exigence et excellence.
Notre rapport public annuel se veut être une première pierre, qui offre des bases de réflexion
solides pour adopter une attitude prospective.
Je vous remercie de votre attention et répondrai volontiers à vos questions, avec les
présidentes et présidents qui m’entourent.