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ENTITÉS ET POLITIQUE PUBLIQUE
LE REVENU
DE SOLIDARITÉ
ACTIVE
Cahier territorial :
département de l’Allier
Rapport public thématique
Évaluation de politique publique
Janvier 2022
Sommaire
Synthèse
.........................................................................................................
5
Introduction
...................................................................................................
9
Chapitre I Le déploie
ment du RSA dans l’Allier
.....................................
11
I - Le contexte économique et social du territoire
..........................................
11
A - Un territoire ancré dans la ruralité
..................................................................
11
B -
Une population moins jeune et moins qualifiée qu’au niveau national
...........
12
C - Une population en situation de fragilité sociale
..............................................
13
D -
Un marché de l’emploi sous tension
...............................................................
14
II - La stratégie des acteurs
............................................................................
15
A -
Une stratégie élaborée dans le cadre d’une démarche
participative
................
15
B - Des orientations stratégiques récemment intégrées dans un schéma
unique des solidarités
............................................................................................
16
C -
Une mise en œuvre déclinée au niveau de chaque acteur
...............................
17
D - Des outils opérationnels diversifiés
................................................................
18
Chapitre II La dépense engagée au titre du RSA et son
financement
..................................................................................................
21
I -
L’organisation territoriale des principaux intervenants
.............................
21
A -
Des organisations différentes…
......................................................................
21
B -
… qui compliquent la connaissance des coûts
................................................
23
II -
Les moyens mis en œuvre et leurs coûts
..................................................
24
A -
Une trajectoire ascendante du nombre d’allocataires du RSA
........................
24
B -
Des dépenses brutes d’allocation en forte hausse
...........................................
25
C - Des dépenses de gestion du droit en légère baisse
..........................................
27
D -
Des dépenses d’accompagnement social et professionnel diversifiées
...........
28
E -
Des dépenses d’insertion significatives
...........................................................
35
III -
Les modalités de financement des politiques d’insertion
.......................
39
A - Une fiscalité transférée stable mais insuffisante
.............................................
39
B - Des fonds dédiés à la couverture du RSA peu lisibles
....................................
39
C - La stabilité des autres fonds de concours
........................................................
41
D - Une mobilisation progressive du fonds social européen
.................................
42
E - La concentration des financements et un reste à charge
désormais important
.............................................................................................
42
COUR DES COMPTES
4
Chapitre III La gestion des allocations
et l’accompagnement
des bénéficiaires du RSA
.............................................................................
49
I - La gestion des allocations
..........................................................................
49
A -
L’accueil et la prise en charge des demandeurs par la CAF
...........................
49
B - Des efforts dans le traitement des situations de non-recours
..........................
51
C - Peu de sanctions du non-respect des droits et des devoirs
..............................
52
D - Un dispositif de lutte contre la fraude conforme aux orientations
nationales
..............................................................................................................
53
E - Une gestion des indus partagée entre la Caf et le département
.......................
54
F - Des recours administratifs et contentieux très peu nombreux
.........................
55
II -
L’accompagnement des bénéficiaires du RSA
.........................................
56
A -
Plusieurs modalités d’accompagnement
possibles
.........................................
56
B - Une primo-orientation des publics variable selon les territoires
.....................
59
C -
Des modalités d’accompagnement hétérogènes
..............................................
61
D - Comparaison des principaux indicateurs disponibles relatifs
à l’accompagnement des personnes bénéficiaires du RSA
...................................
70
E - Le « Parcours persévérance » : un investissement formation efficace
............
72
F -
Une maîtrise insuffisante de l’ense
mble des interventions sociales
et professionnelles
................................................................................................
74
G - Un enjeu
de mobilité et d’accès à l’emploi / formation à mieux prendre
en compte
.............................................................................................................
75
Chapitre IV
Les résultats de la politique d’insertion
...............................
79
I -
Le suivi et l’évaluation des actions
...........................................................
79
A - Des études et diagnostics parcellaires
.............................................................
80
B -
Un manque récurrent d’évaluations internes e
t externes
.................................
81
C -
Une pertinence insuffisante des indicateurs d’évaluation
...............................
82
II - Des résultats difficiles à mesurer
en matière de retour à l’emploi
et de réduction de l’intensité de la pauvreté
...................................................
83
III -
L’étude des trajectoires des bénéficiaires du RSA du département
........
84
Liste des abréviations
..................................................................................
87
Annexes
.........................................................................................................
89
Synthèse
Situé à la frange ouest de la région Auvergne-Rhône-Alpes, le
département de l’Allier
(337 988 habitants au 1er janvier 2020) est un
territoire contrasté aux plans économique et social. Souvent décrit comme
un département ancré dans la ruralité, il est surtout industriel et agricole.
A
vec trois bassins d’emploi principaux (Moulins, Vichy et Montluçon), sa
superficie importante, qui le classe parmi les départements les plus étendus
de France métropolitaine, est un facteur clef dans la compréhension des
mécanismes d’insertion, d’emploi et
de formation : en effet de nombreux
demandeurs d’emploi, en particulier les bénéficiaires du revenu de
solidarité active (BRSA) sont peu mobiles.
Avec une part d’environ 5
% d’allocataires dans la population
active âgée de 15 à 64 ans, soit 10 285 bénéficiaires au 31 décembre 2020,
l’Allier se place dans le 8
ème
décile des départements comptant le plus
grand nombre de bénéficiaires du RSA, juste après le Pas-de-Calais, mais
loin devant l’Ille
-et-Vilaine.
Les moyens humains et financiers mobilisés par le département,
Pôle emploi Allier, la caisse d’allocations familiales et leurs partenaires ont
augmenté ces cinq dernières années, mais de manière modérée. Les
dépenses
d’allocation
d’accompagnement
(masse
salariale
des
accompagnants)
et
d’insertion
sociale
e
t
professionnelle
sont
significatives, quoique situées dans la moyenne nationale. Les recettes liées
au financement du RSA n’ont pas permis de compenser le dynamisme des
dépenses globales, de sorte que le reste à charge
1
incombant au
département bourbonnais a doublé en volume de 2010 à 2020, passant de
10
M€ à près de 20
M€. Si cette situation est partiellement préjudiciable
aux finances sociales départementales, elle n’obère pas, contrairement à ce
que l’on constate pour d’autres départements objets de l’e
nquête, la
capacité d’autofinancement
du département
ni son effort d’investissement.
La gestion du département
permet donc au dispositif RSA d’être pour le
moment soutenable en termes financiers. Néanmoins l
’impact
complet de
1
La notion de « reste à charge » est liée à l’histoire des allocations individuelles de
solidarité et aux difficultés qui résultent des mécanismes de financement mis en place
dans le cadre de leur décentralisation. Elle désigne la part de ces allocations qui ne
sont pas financées par ces mécanismes spécifiques et qui est, de fait, financée par les
départements sur leurs autres ressources propres.
COUR DES COMPTES
6
la crise sanitaire, qui a
conduit à une augmentation pour l’instant modérée
du nombre de bénéficiaires du RSA, n’est pas évalué à ce jour : une grande
vigilance devrait donc demeurer tant au plan budgétaire que financier.
Dans ce contexte économique et social fragilisé, le retour à
l’emploi et la reprise d’activité professionnelle
des bénéficiaires du RSA
ne sont pas encore aussi dynamiques qu’escomptés. Des facteurs exogènes
liés à la faiblesse du tissu économique local et au manque d’emplois, mais
aussi endogènes, en lien avec la faible mobilité géographique des
bénéficiaires de l’allocation, leur possible démotivation ou encore leur
manque de qualifications, conduisent à mettre
en œuvre de
s projets
innovants, parfois en marge du contexte législatif ou règlementaire.
Certaines faiblesses posent la question de
l’efficacité du dispositif
.
Ainsi,
fin 2020 51 % des bénéficiaires du RSA de l’Allier sont inscrits
depuis plus de cinq ans et la proportion de personnes bénéficiant d’un
contrat d’engagements réciproques est particulièrement f
aible. Néanmoins,
en raison de la faiblesse des données disponibles dans les systèmes
d’information
de
la
collectivité
et
de
l’absence
d’évaluations
départementales, il n’est pas possible de répondre
de manière spécifique
pour l’Allier
aux questions évaluatives. R
ien n’indique
cependant que les
résultats du RSA y seraient sensiblement différents de ceux constatés au
niveau national : l
’allocation ne permet pas aux bénéficiaires de sortir de la
pauvreté mais elle les protège de la grande pauvreté ; elle ne permet le
retour durable à l’emploi que pour une minorité d’entre eux et
l’accompagnement qui leur est proposé, qu’il soit professionnel ou social,
se caractérise par la faiblesse
des actions mises en œuvre, qu
and ces
dernières peuvent être mesurées.
En effet, si
dans l’Allier
la multiplication des actions et des projets
en faveur de l’accompagnement social et professionnel des bénéficiaires
du RSA constitue un atout majeur pour densifier
l’offre de services qui leur
est destinée, elle comporte un risque réel de foisonnement peu lisible des
interventions : certains dispositifs innovants, comme le « parcours
Persévérance » ou
la délocalisation de l’appareil de formation
, demeurent
encore peu connus.
Le département
s’affirme comme un acteur pivot de la
gouvernance du dispositif mais son manque de connaissance des
trajectoires des différents publics qu’il accompagne et donc des moyens
qu’il y consacre, constitue un frein à l’efficacité des actions qu’il conduit
.
La fa
iblesse, voire l’absence de données sur le contenu et la fréquence des
accompagnements mis en place ainsi que sur l’efficacité des actions
financées constituent un frein réel à une meilleure gestion du dispositif, au
détriment tant des bénéficiaires du RSA que des financeurs.
SYNTHÈSE
7
Il est souhaitable que les services départementaux connaissent et
maîtrisent mieux les actions destinées aux bénéficiaires du RSA. Il serait
également
utile
qu’ils
disposent
d’une
analyse
exhaustive
des
caractéristiques, profils-types et trajectoires de ces derniers, par exemple
en mettant en place à brève échéance une fonction d’observatoire
départemental de l’insertion sociale et professionnelle.
Certes
depuis deux ans un consensus s’est dégagé parmi les acteurs
locaux de l’insertion et de l’emploi afin de favoriser
un accompagnement
global des bénéficiaires du RSA, en décloisonnant les approches sociales
et professionnelles. Mais cet accompagnement paraît encore marginal en
termes quantitatifs.
L’
approche volontariste bourbonnaise se heurte
souvent à la faiblesse des financements institutionnels et au manque de
spécialisation des équipes départementales. Une volonté collective existe
au plan local
: elle mérite d’être reconnue et amplifiée.
Introduction
Le revenu de solidarité active (RSA) constitue un instrument
incontournable des politiques sociales françaises de lutte contre la pauvreté
et de promotion de l’activité professionnelle. Bénéficiant à la fois aux
personnes percevant jusque-là les minima sociaux (RMI, allocation parent
isolé) et aux « travailleurs pauvres » dont le niveau de ressources s’avère
insuffisant pour vivre, ce dispositif mérite qu’on s’y attarde, afin de savoir
si dix ans après sa création, le RSA marque une avancée dans la lutte contre
la pauvreté et dans l’accompagnement vers l’insertion sociale ou
professionnelle.
Dans le département de l’Allier, l’enquête a mis en lumière le
besoin d’innovation au plan territorial et la nécessité de dépasser les
schémas habituels de l’interventio
n sociale.
Toutefois, la volonté collective de faciliter le retour à la vie active
des bénéficiaires du RSA a atteint ses limites dans certains secteurs
géographiques, là où l’emploi demeure menacé et où l’accompagnement
socio-professionnel se révèle insu
ffisant. En effet, avec une part d’environ
5
% d’allocataires dans la population active âgée de 15 à 64 ans, l’Allier se
place, avec 10 285 bénéficiaires au 31 décembre 2020, dans le 8
ème
décile
des départements comptant le plus grand nombre de bénéficiaires du RSA,
juste après le Pas-de-
Calais, mais loin devant l’Ille
-et-Vilaine. Situé à la
frange ouest de la nouvelle région Auvergne-Rhône-Alpes, le territoire
bourbonnais, à dominante rurale, apparaît contrasté tant aux plans
économique et social qu’à celu
i des innovations introduites dans le champ
de l’accompagnement social et professionnel.
COUR DES COMPTES
10
Le présent cahier territorial retrace les évolutions de la gestion du
RSA sur la période 2009-2020, en insistant sur les cinq dernières années,
et en analyse les effets sur la population bénéficiaire.
L’année 2020 ayant
été marquée par une augmentation brusque et importante du nombre
d’allocataires dont le caractère durable n’est pas certain, il a été jugé plus
approprié de calculer les principaux agrégats et ratios de dépenses sur la
bases de données 2019.
Après avoir étudié la gouvernance et les modes de financement du
dispositif RSA dans le département de l’Allier, (parties 1 et 2), seront
examinés les modalités d’accompagnement social ou professionnel des
bénéfi
ciaires du RSA (partie 3) ainsi que les processus d’évaluation
existants au plan local (partie 4).
Chapitre I
Le déploiement du RSA dans l’Allier
L’Allier
figure parmi les 25 départements les plus pauvres de
France et compte un grand nombre de bénéficiaires du RSA. La collectivité
départementale a joué un rôle moteur pour organiser une offre importante
d’actions en
leur direction.
I -
Le contexte économique et social du territoire
A -
Un territoire ancré dans la ruralité
Situé à la frange ouest du territoire régional, et formant une
transition avec l’ancien Limousin, le département de l’Allier compte parmi
les moins peuplés d’Auvergne
-Rhône-Alpes
2
. Ses 337 988 habitants
3
se
répartissent au sein de villes de petite ou de moyenne taille, la commune la
plus peuplée, Montluçon, ne dépassant pas 36 700 habitants.
La densité de population est particulièrement faible avec une
moyenne départementale de 46 habitants au km² au 1
er
janvier 2020. À la
même date, à titre de comparaison, la densité de population atteignait
117 habitants par km² en France métropolitaine.
2
C’est le 10
ème
département d’Auvergne
-Rhône-Alpes en termes de population, avant
l’Ardèche et le Cantal.
3
E
stimation de l’I
nsee au 1
er
janvier 2020.
COUR DES COMPTES
12
Le territoire connait depuis quelques années un certain déclin
démographique. Après avoir connu une période de stabilisation de sa
population, il a enregistré une décroissance démographique sur la période
2012 à 2017. Cette évolution, qui trouve principalement son origine dans
un déficit des naissances par rapport aux décès, fait de l’Allier le seul
département de la région, avec le Cantal, à voir sa population décroitre
4
.
La dynamique locale ne repose pas sur une unique ville-centre. Le
maillage territorial s'organise en effet autour de trois communes qui
concentrent à elles-seules 24 % des habitants : Moulins (avec une
population de l’ordre de 19
700 hab. en 2020), située au nord de l’All
ier,
chef-
lieu du département ; Montluçon, localisée à l’ouest
; Vichy (près de
24 200 hab. en 2020), située au sud.
B -
Une population moins jeune et moins qualifiée
qu’au niveau national
L’Allier est confrontée à un phénomène de vieillissement de sa
population plus prononcé que celui enregistré au niveau national. L'indice
de vieillissement de la population n’a cessé de progresser durant ces dix
dernières années, pour s’élever à un peu plus de 129 en 2017, année de
référence, contre un peu moins de 80 en France. La part des personnes
âgées de 25 à 64 ans dans la population a eu tendance à diminuer au cours
des dix dernières années. La même évolution peut être relevée pour les
personnes âgées de moins de 25 ans.
Les habitants de l’Allier
ont un plus faible
niveau d’études qu’au
niveau national. Le département concentre davantage de personnes non ou
peu diplômées qu’à l’échelle nationale. En 2017
, 26,1 % des personnes non
scolarisées de 15 ans et plus n’étaient en effet titulaires d’aucun diplôme
ou disposaie
nt, au plus, d’un brevet d’études du premier cycle du second
degré (BEPC), d’un brevet des collèges ou d’un diplôme national du brevet
(DNB). En comparaison, la même année la proportion nationale
s’établissait à 22,8
%. La part des diplômés de l’enseigneme
nt supérieur
est également moins importante. 4,7 % de la population non scolarisée de
15 ans et plus disposait d’un diplôme de niveau bac +5 ou plus dans le
département en 2017, alors que leur proportion atteignait 10,1 %
nationalement.
4
Source : Insee Flash n°67, « La croissance démographique régionale reste forte »,
décembre 2019.
LE DÉPLOIEMENT DU RSA DANS L
’ALLIER
13
C -
Une population en situation de fragilité sociale
Le niveau de vie des habitants de l’Allier est plus faible qu’à
l’échelle nationale. Le niveau de vie
5
médian s’élevait à 19
750 € en 2017,
alors qu’il atteignait 20
405 € sur l’ensemble du territoire français. Il plaçait
alor
s l’Allier à la 23
ème
place des départements disposant du plus faible
niveau de vie médian, sur 98 départements.
Les habitants de l’Allier sont par ailleurs davantage touchés par la
précarité. Le taux de pauvreté
6
dans le territoire était ainsi supérieur de près
d’un point à son niveau national en 2017 (taux de 15,4
% dans le
département, contre 14,5 % en France métropolitaine). La pauvreté touche
tout particulièrement les familles monoparentales, qui représentaient près
de 14 % de la population départementale en 2017.
La part représentée par les minimas sociaux dans les revenus
disponibles participe du même constat. Celle-
ci s’élevait en effet à 2,8
%
dans l’Allier, contre 2
% en France métropolitaine en 2017.
Les allocataires du RSA représentaient en 2018 5,2 % de la
population départementale âgée de 15 à 64 ans. La même année, leur
proportion au sein de la population âgée de 15 à 64 ans s’établissait à 4,6
%
en France (4,2
% en France métropolitaine). L’Allier figure ainsi au
nombre des départements français qui disposent de la plus grande
proportion de bénéficiaires du RSA au sein de leur population :
il se
positionnait fin 2018 dans la catégorie des 25 % de départements
enregistrant la plus forte part d’allocataires du RSA parmi la population
âgée de 15 à 69 ans.
En 2018 les bénéficiaires du RSA du département étaient
domiciliés à 70
% sur les territoires des communautés d’agglomération de
Vichy (29 % des allocataires), de Montluçon (24 % des allocataires) et de
Moulins (16 % des allocataires)
7
.
En outre, les principaux indicateurs du chômage mettent en
exergue la prédominance des bénéficiaires du RSA dans la part des actifs
inoccupés.
5
Au sens de l’Insee, le niveau de vie correspond au revenu disponible du ménage divisé
par le nombre d'unités de consommation.
6
Au sens de l’Insee, le taux de pauvreté correspond à la proportion d'individus (ou de
ménages) dont le niveau de vie est inférieur au seuil de pauvreté (exprimé en euros),
lequel correspond à 60 % du niveau de vie médian.
7
Source : départem
ent de l’Allier
.
COUR DES COMPTES
14
Dans le département de l’Allier, 65
% des demandeurs d’emploi
ont un niveau d’études inférieur au baccalauréat
; c’e
st le cas également
des 75
% des bénéficiaires du RSA demandeurs d’emploi. De plus,
ces
bénéficiaires représentent 32
% des demandeurs d’emploi qui ne possèdent
pas de permis de conduire, contre 19
% pour l’ensemble des demandeurs
d’emploi en Allier.
D -
Un ma
rché de l’emploi sous tension
Les départements du centre de la France sont historiquement
tournés vers les secteurs de l’industrie et de l’agriculture.
Dans l’Allier, les industries se concentrent principalement dans les
filières de l’agro
-alimentaire, de la métallurgie, de la construction
mécanique ou bien encore des produits en caoutchouc et en plastique.
Certaines entreprises présentes sur le territoire possèdent un rayonnement
international
8
. Le poids de l’industrie dans l’emploi local était supérieur d
e
près de 1,3 fois (15,6 % des emplois) à celui relevé en France
métropolitaine en 2018.
Le département dispose également de la plus grande surface
agricole utilisée de la région Auvergne-Rhône-
Alpes. L’agriculture
concentrait deux fois plus d’emplois (4,7
% des emplois) dans l’Allier
qu’en France métropolitaine en 2018.
Contrairement à la tendance relevée sur le territoire national, l’Allier
connaît une baisse du nombre de ses emplois (salariés comme non-salariés).
Le taux de chômage départemental s’établi
ssait à 9,1 % en 2019
(après 9,5 % en 2018), supérieur de 0,9 point au taux enregistré en France
métropolitaine la même année
9
. Les jeunes sont par ailleurs davantage
confrontés au chômage dans l’Allier qu’au niveau national
: le taux de
chômage des person
nes âgées de 15 à 24 ans s’établissait à 21,7
% dans le
département en 2019 alors qu’il atteignait 19
% en France métropolitaine.
8
Avec notamment Safran (aéronautique), Goodyear et PSA (automobile), Vuitton
(industrie du luxe), CAP
L’O
réal (produits de beauté) (Source : les «
chiffres clés de
l’Allier 2020
», CCI d’Auvergne
-Rhône-Alpes).
9
Après avoir dépassé de 0,8 point le taux relevé en France métropolitaine en 2018
(Source : Direccte Auvergne-Rhône-Alpes, juin 2020).
LE DÉPLOIEMENT DU RS
A DANS L’ALLIER
15
Le chômage touche tout particulièrement les populations situées
dans les zones d’emploi
10
de Montluçon (9,6 % en 2019) et de Vichy (9 %
en 2019). Le taux de chômage dans la zone d’emploi de Moulins,
essentiellement tertiaire et composée d’administrations
- estimé à 7,8 % en
2019 -
reste inférieur à celui enregistré à l’échelle nationale.
II -
La stratégie des acteurs
A -
Une stratégie élaborée dans le cadre
d’une démarche participative
Les
axes
stratégiques
en
matière
d’insertion
sociale
et
professionnelle retenus au titre de la période 2014 à 2017 ont été définis de
manière concertée dans le cadre d’une démarche participative conduite
av
ec le concours d’un cabinet extérieur.
A
fin d’une part
, de dresser un bilan du précédent programme
départemental d’insertion et d’autre part, de définir de nouvelles
orientations stratégiques, le département
a organisé durant l’année 2013
plusieurs réunions d’échanges avec l’ensemble des acteurs associatifs et
institutionnels concernés (État, missions locales, Pôle Emploi, caisse
d’allocations
familiales
-CAF-,
structures
conventionnées,
centres
communaux d’ac
tion sociale -
CCAS) ainsi qu’avec les travailleurs sociaux
et les différents services départementaux concernés par la mise en œuvre
des politiques d’insertion.
Des bénéficiaires du RSA ont également été consultés pour
recueillir leurs observations. Des ent
retiens individuels auprès d’une
vingtaine de bénéficiaires du RSA, ainsi que deux séances d’entretiens
collectifs avec une quinzaine de bénéficiaires des Ateliers de Mobilisation
Personnelle et Professionnelle à Montluçon et de chantiers d’insertion à
Vichy, ont été organisés à cette fin. Cette démarche largement participative
n’a pas empêché au cours de cette même période l’apparition d’un
enchevêtrement institutionnel complexe en matière de politique d’insertion
et la persistance d’interventions multiple
s, et parfois peu cohérentes entre
elles, ainsi qu’il sera exposé en partie 3.
10
Au sens de l’I
nsee, une zone d'emploi correspond à un espace géographique à
l'intérieur duquel la plupart des actifs résident et travaillent. Elle peut en ces termes
s’étendre au
-delà des limites départementales.
COUR DES COMPTES
16
La définition des orientations en matière d’insertion sociale et
professionnelle pour la période ouverte à compter de 2017 s’est également
inscrite dans une démarche de concerta
tion préalable, mise en œuvre avec
l’aide du même cabinet extérieur. Le
département a notamment précisé
qu’une
réunion
d’échange
associant
ses
différents
partenaires
institutionnels avait été organisée dans cette perspective en 2016.
B -
Des orientations stratégiques récemment intégrées
dans un schéma unique des solidarités
Conformément aux dispositions de l’article L. 263
-1 du code de
l’action sociale et des familles (CASF), la collectivité a formalisé la
politique définie en matière d’insertion pour la périod
e 2014 à 2017 au sein
d’un document unique, dénommé «
programme départemental d’insertion
et de lutte contre les exclusions
» (PDILE). Celui-ci retenait 16 orientations
stratégiques autour de cinq axes principaux tendant, par exemple, à
permettre l’express
ion des besoins des publics et à anticiper les évolutions
des territoires pour prévenir les situations de précarité (axe 1) ou bien
encore à construire et à animer un partenariat à plusieurs échelles pour
piloter une politique d’insertion (axe 5).
Pour la période ouverte en 2017, la collectivité a fait le choix de
fusionner son schéma unique des solidarités et son programme
départemental d’insertion et de lutte contre les exclusions, au sein d’un
«
schéma unique des solidarités
» rénové. Les orientations territoriales en
matière d’insertion portant sur la période 2017 à 2021 figurent dorénavant
dans ce document unique, embrassant l’ensemble du champ des politiques
sociales départementales. Ces dernières se répartissent au sein de cinq axes
structurants
sur les six que définit le schéma unique
portant, notamment
sur la prévention, la détection et l’expression des besoins
(axe 2) ou bien
encore sur la qualité des accompagnements (axe 5). Rédigés en des termes
généraux, ces axes, non spécifiques à la politiq
ue d’insertion socio
-
professionnelle et à l’emploi, concernent l’ensemble des politiques sociales
du département. Ils constituent un cadre de référence qui a perdu en
précision pour la politique d’insertion engagée ces cinq dernières années.
Toutefois, cette lacune est compensée par la mise en place de « feuilles de
route » annuelles, dont le bilan des réalisations est validé chaque année par
les élus départementaux, ainsi que par l’adoption du pacte territorial pour
l’insertion.
LE DÉPLOIEMENT DU RSA DA
NS L’ALLIER
17
C -
Une m
ise en œuvre déclinée
au niveau
de chaque acteur
Depuis 2017 et l’adoption d’un schéma unique des solidarités
unifié, le département élabore des « feuilles de route
» qui déclinent d’un
point de vue opérationnel, pour chaque année et pour chaque secteur
d’intervention sociale
-
dont celui de l’insertion
-, les orientations
stratégiques définies au niveau de la collectivité. Au travers de ces
documents, le département a par exemple, projeté de rédiger un guide de
l’accompagnement du bénéficiaire du RSA, dans le cadre de la mise
en
œuvre de l’axe 4 du schéma unique (feuille de route 2017) ou bien encore
prévu d’effectuer un bilan de l’expérimentation de l’insertion sociale par le
parcours de soins, au titre du déploiement de l’axe 6 de ce même schéma
(feuille de route 2018).
En ou
tre, en application des dispositions de l’article L. 263
-2 du
CASF, la collectivité a conclu un pacte territorial avec les principaux
partenaires impliqués dans la politique d’insertion, afin de préciser les
modalités de mise en œuvre des orientations stra
tégiques.
Un pacte territorial d’insertion (PTI) a ainsi été élaboré dans le
prolongement du PDILE qui a couvert la période 2014 à 2017 (PTI 2014-
2017). Un nouveau PTI a par ailleurs été conclu dans le cadre de la mise
en œuvre des orientations en matière d’insertion retenues dans le schéma
unique des solidarités portant sur la période 2017 à 2021 (PTI 2018-2021).
Ces deux PTI associent le département de l’Allier, la région
Auvergne (puis Auvergne-Rhône-
Alpes), les services de l’État et Pôle
emploi.
Ils font état d’engagements pris par chacun des partenaires et
contiennent également quelques engagements collectifs impliquant
l’ensemble des signataires (
« contribuer mutuellement à la connaissance
des publics et des dispositifs d’insertion
; contribuer
à la mise en place d’un
outil commun aux prescripteurs pour faciliter la coordination des
parcours » par exemple).
Les deux PTI rappellent que le département a un rôle de chef de
file en matière de politique d’insertion. Dans cette perspective, la
collect
ivité s’est engagée dans le PTI 2014
-2017 à coordonner l'ensemble
des acteurs intervenant dans le champ de l'insertion et à assurer l’animation
de ce travail partenarial, au travers des instances de pilotage
engagement
non formalisé dans le PTI suivant. Dans le cadre des pactes territoriaux
successivement conclus, et au-delà de cette mission de pilotage qui lui est
reconnue, le département apparait aussi comme un acteur opérationnel à
part entière dans le domaine de l’insertion. La collectivité s’engage a
insi à
intervenir directement en favorisant par exemple le développement des
clauses sociales dans l
es marchés publics qu’elle passe. Le
département
COUR DES COMPTES
18
prévoit d’intervenir également de manière indirecte, en appui d’autres
opérateurs de l’insertion, en favori
sant par exemple les liens entre les
acteurs de l’insertion et les entreprises ou bien encore en informant les
acteurs locaux sur le fonds social européen (FSE).
En outre, Pôle emploi est naturellement identifié dans chacun de
ces documents comme un acteu
r de premier plan de la politique d’insertion
des bénéficiaires du RSA. Il s’engage en particulier à assurer
à ceux qui
relèvent
d’un accompagnement professionnel
, pour lesquels il est chargé
de mettre en œuvre son offre de services de droit commun
,
l’accu
eil,
l’inscription comme demandeurs d’emploi, l’accompagnement dans le
cadre d’un projet personnalisé d’accès à l’emploi, dans un parcours de
retour à l’emploi ou de création d’entreprise, la mise en relation sur des
offres d’emploi ou bien encore l’orientation vers la formation. L’opérateur
national s’engage également à proposer des actions complémentaires à son
offre de service de droit commun.
La CAF de l’Allier a signé, comme dans les autres départements,
la convention de gestion prévue à l’article L. 2
62-
25 du code de l’action
sociale et des familles qui organise les flux d’information, de gestion et de
paiements des droits RSA avec le département
. Cette convention n’appelle
pas d’observations particulières.
L’État
contribue enfin aux côtés du département à la politique
d’insertion engagée sur le territoire soit de manière directe, en s’engageant
par exemple à mobiliser l’ensemble des outils d’insertion professionnelle
(tels que les contrats uniques d’insertion ou les contrats à durée déterminée
d’insertion), soit de façon indirecte, en s’engageant notamment à favoriser
l’accès des
bénéficiaires du RSA
à l’offre d’hébergement et au logement
dans le cadre d’intervention fixé par le plan départemental d’action pour le
logement et l’hébergement des p
ersonnes défavorisées.
D -
Des outils opérationnels diversifiés
Afin de traduire ses différents axes stratégiques, le département et
ses partenaires, en particulier Pôle emploi et la CAF, ont mis en place
plusieurs dizaines d’actions
en faveur des bénéficiaires du RSA. Si la
multiplication de ces dispositifs
, mis en œuvre tant par le
département que
par Pôle emploi ou par les CCAS partenaires, a bien permis de densifier les
interventions et les formes d’accompagnement, elle ne s’est pas
accompagnée
d’une meilleure lisibilité de l’offre de services
: ainsi, n’ont
été communiqués
lors de l’enquête
ni un document récapitulant cette offre
à l’échelle départementale ni un panorama des actions individuelles et
collectives d’insertion sociale et professionn
elle menées par le département
de l’Allier et ses
principaux partenaires.
LE DÉPLOIEMENT DU RS
A DANS L’ALLIER
19
______________________ CONCLUSION ______________________
Une vision exhaustive des dispositifs
d’
insertion sociale et
professionnelle destinés aux bénéficiaires du RSA permettrait au d, chef de
file du dispositif,
d’en identifier tant les effets positifs que les lacunes
Ce
chantier pourrait être ouvert dans le cadre du plan départemental
d’insertion et du service public de l’insertion et de l’emploi.
Chapitre II
La dépense engagée au titre du RSA
et son financement
Avant de dresser le panorama des dispositifs et des actions que les
acteurs bourbonnais mobilisent en faveur des bénéficiaires du RSA et d’en
analyser les
coûts, il convient d’exposer de manière succincte
l’organisation de l’action sociale
dans le département.
I -
L’
organisation territoriale des principaux
intervenants
A -
Des organisations différentes
Héritée de la décentralisation, l’organisation sociale et médico
-
sociale du département est basée sur le « secteur », unité territoriale
d’action sociale traditio
nnelle regroupant une ou plusieurs communes.
Fondé sur une territorialisation réelle en raison de sa superficie (7 340 km²)
le département bourbonnais est découpé en trois territoires des solidarités
départementales (TSD) : Moulins nord Allier, Montluçon ouest Allier, et
Vichy sud Allier. Chacun de ces TSD regroupe lui-même plusieurs
maisons des solidarités départementales (MSD) au sein desquelles on
retrouve l’unité territoriale de base
: le « secteur »
d’action sociale médico
-
sociale
11
. Les TSD sont un échelon territorial de proximité favorisant
11
À titre d’exemple, le TSD de Moulins nord Allier compte
sept maisons des solidarités
départementales incluant une quinzaine de « secteurs ».
COUR DES COMPTES
22
l’
intervention sociale auprès des habitants, pour majeure partie concentrés
autour des trois zones d’emploi
du département, même si une frange non
négligeable d’entre eux réside aussi en zone rurale, et sont d
onc
relativement isolés des centres d’activité.
Cette organisation offre un maillage important pour l’action
opérationnelle du service social départemental ou « service social
polyvalent ». Le département y est attentif, tant au niveau des actions
entrepr
ises au sein du plan départemental d’insertion
(PDI) qu’à celui des
partenariats institutionnels noués ces dix dernières années.
L’administration départementale en charge du RSA combine une
dimension centrale et territoriale à la fois. En effet d’une part
la
gouvernance et la gestion technique et financière du dispositif échoit à la
direction
« insertion
emploi
logement »
(DIEL),
placée
sous
la
responsabilité de la direction générale adjointe (DGA) en charge des
solidarités départementales. D’autre part, à
l’échelle territorialisée, le
dispositif combine deux types d’acteurs
:
Chaque
territoire de solidarité départementale est doté d’un «
cadre
technique RSA
», ou responsable d’insertion sur son territoire, épaulé
par un ou deux agents gestionnaires de l’a
llocation. Ces personnels,
rattachés depuis février 2020 à la DIEL, n’ont pas la charge de
l’accompagnement
socio
-professionnel
des
bénéficiaires.
Leurs
missions sont essentiellement d’appui technique, de gestion, voire
d’orientation des bénéficiaires du R
SA.
Les équipes de polyvalence de secteur assurent quant à elles au sein de
chaque TSD l’accompagnement des bénéficiaires, notamment au plan
social (cf. partie 3). Ce sont donc les assistants de service social
polyvalent, en charge de nombreux dispositifs
(protection de l’enfance,
prévention des risques sociaux, tels que les expulsions, la dépendance,
prévention des risques sanitaires et médico-sociaux, etc
…) qui suivent
les allocataires.
Le département de l’Allier n’a donc pas
mis en place
d’équipes
spécialisées dans l’accompagnement des bénéficiaires du RSA, quelle que soit
sa forme (social, professionnel, mixte), de sorte que les moyens humains,
matériels et financiers dédiés à l’accompagnement, au suivi et à la prise en
charge des bénéficiaires du RSA sont complexes à analyser, notamment en
raison du temps de travail nécessairement incomplet affecté à ce dispositif.
L
’organisation de la caisse d’allocations familiales de l’Allier suit
la même logique. Il y a une caisse principale basée à Moulins et deux sites
secondaires, à Montluçon et Vichy. Les personnels de la CAF assurent des
permanences de terrain dans les trois grands secteurs géographiques
d’intervention sociale mentionnés ci
-dessus. Ils ne se consacrent pas, ou
peu,
à l’accompagnem
ent socio-professionnel des publics concernés. Pour
LA DÉPENSE ENGAGÉE AU TITRE DU RSA ET SON FINANCEMENT
23
les exploitants et salariés agricoles, c’est le «
service famille » de la
Mutualité sociale agricole (MSA) Auvergne, issue de la fusion des quatre
anciennes MSA départementales, qui assure à Aurillac la gestion et le
paiement des droits RSA.
L
’organisation de Pôle emploi diffère quelque peu des deux acteurs
précédents. « Pôle emploi Allier » fait partie de la direction territoriale
« Puys Allier Cantal » qui dépend de la direction régionale de Pôle emploi
Auvergne-Rhône-Alpes. Le territoire de « Pôle emploi Allier », dont le
maillage est distinct des TSD
12
, est placé sous l’autorité d’un directeur
territorial bourbonnais animant le réseau de quatre agences locales (Moulins,
Vichy, Montluçon, Thiers/Ambert). À
l’exception de cinq conseillers dédiés
au suivi des bénéficiaires du RSA dans le cadre de l’accompagnement global,
les agents du Pôle emploi occupent des fonctions diverses (accompagnement
des demandeurs d’emploi de longue durée notamment, animation d’at
eliers,
etc.) et ne se consacrent pas entièrement à l’accompagnement professionnel
des seuls bénéficiaires du RSA.
B -
… qui compliquent
la connaissance des coûts
Cette organisation hétérogène a un impact sur le calcul des moyens
mobilisés en faveur des bénéficiaires et de leurs coûts.
En effet, i
l n’y a pas d’équipe dédiée en charge de l’insertion
sociale et professionnelle des bénéficiaires du RSA, à l’exception
de cinq
conseillers de Pôle emploi basés à Moulins, Vichy et Montluçon. Le calcul
des agents en équivalents temps plein (ETP) dédiés et des coûts complets
est donc extrapolé en prenant les bases suivantes :
Comme il ressort des entretiens menés sur place, un travailleur social
polyvalent du département consacre 20 % de son temps de travail à
l’accompagnement et au suivi des bénéficiaires du RSA. Ce taux
,
disparate d’un TSD à l’autre
, doit être regardé comme une moyenne
départementale.
Un conseiller de Pôle emploi Allier, en dehors de ceux spécifiquement
dédiés, consacre 20
% de son temps de travail à l’accompagnement et au
suivi des bénéficiaires du RSA. Ce taux est une moyenne, assez
homogène sur l’ensemble des agences locales bourbonnaises.
Les agents de la CAF et de la MSA, en dehors des tâches de gestion
spécifiques au dispositif RSA (accueil, calcul, paiement, lutte contre la
fraude, gestion des indus), ne peuvent être considérés comme assurant
un accompagnement. En effet, le recentrage des missions des
techniciens-
conseil sur la gestion de l’allocation a eu pour conséquence
12
Il comprend dans so
n périmètre l’agence de Thiers dans le Puy
-de-Dôme.
COUR DES COMPTES
24
un désengagement sur ce plan. Seules trois conseillères techniques
d’action sociale accompagnent les ressortissants de la caisse, dont 30
%
sont bénéficiaires du RSA. Leur temps de travail en faveur de ces
derniers doit par conséquent être évalué à 30 %.
Enfin, le partenariat en Allier est foisonnant et très hétérogène : il
est parfois difficile de rendre compte les coûts complets de l’ensemble des
actions engagées, en raison de la
fragmentation de l’action départementale
qui ne facilite pas
la consolidation des coûts relatifs à l’accompagnement
social et professionnel des bénéficiaires du RSA.
II -
Les moyens mis en œuvre et leurs coûts
A -
Une trajectoire ascendante du nombre
d’allocatair
es du RSA
Le nombre de bénéficiaires du RSA dans le département de
l’Allier est passé de 7
386 au 31 décembre 2009 à 10 285 au 31 décembre
2020, soit une augmentation en volume de près de 39,2 %, le point le plus
bas étant au 31 décembre 2010 (6 991 BRSA). Le graphique ci-après
illustre cette courbe ascendante, conforme à l’évolution nationale.
Graphique n° 1 :
l
es bénéficiaires du RSA dans l’Allier sur la période
2009 à 2020
Source : Département
de l’Allier
LA DÉPENSE ENGAGÉE AU TITRE DU RSA ET SON FINANCEMENT
25
Cette augmentation
a un impact direct sur l’évaluation des
dépenses du département consacrées aux bénéficiaires du RSA.
B -
D
es dépenses brutes d’allocation
en forte hausse
Les dépenses d’allocation sont établies à partir des comptes
administratifs du département de l’Allier po
ur la période 2010 à 2020, en
prenant en compte les mandats effectivement émis par l’ordonnateur ainsi
que les charges rattachées afférentes au paiement de l’allocation RSA.
Elles augmentent très fortement pendant la période sous revue,
passant de 36,77 M
€ en 2010, point le plus bas, à plus de 67,
67
M€ en
2020. Cela correspond à une augmentation en volume de 84 % sur la
période considérée
13
. En outre, ces dépenses connaissent une variation
annuelle moyenne importante depuis 2014.
L’augmentation en volume
-
des dépenses d’allocation est plus
importante que celle liée au nombre de bénéficiaires
comme l’illustre le
graphique ci-dessous.
Graphique n° 2 :
évolution des dépenses annuelles
d’allocation
et des bénéficiaires entre 2010 et 2020
Source : juridictions financières
d’après les comptes administratifs du département de l’Allier
13
Au plan national, selon la DGCL, les dépenses de RSA sont passées de 6,5 milliards
d’€ en 2009 à 11,07 milliards d’€ en 2019, soit une augmentation d’environ 70
% en
volume.
COUR DES COMPTES
26
La progression très significative des dépenses
d’allocation est la
résultante de trois paramètres :
-
L’augmentation
du nombre d’allocataires
. Elle constitue un premier
facteur d’explication (à h
auteur de 30 % environ). Elle est la
conséquence de la dégradation continue, notamment entre 2015 et
2018, du marché de l’emploi bourbonnais.
-
L’augmentation
du montant mensuel des allocations versées. Les
revalorisations annuelles successives approuvées par décret entraînent
une hausse des dépenses de l’ordre de 30 à 40
% suivant les exercices
(compte tenu par ailleurs de l’évolution de la composition des foyers
d’allocataires et de leurs ayants
-droits).
-
L’allongement
de la durée moyenne d’inscription
des bénéficiaires
dans le dispositif RSA. Ce phénomène, observé dans certains
territoires du sud Allier (à Vichy par exemple où les durées
d’admission au droit RSA dépassent trois, voire cinq ans) constitue un
facteur explicatif résiduel. Au 30 septembre 2020, selon la CAF, 59%
des foyers bénéficiaires du RSA avaient une ancienneté moyenne de
plus de trois ans dans le dispositif. Au plan départemental, au 31
décembre 2020 51 % des bénéficiaires du RSA sont inscrits dans le
dispositif depuis plus de cinq ans, 32 % entre deux et cinq ans, 16 %
entre un et deux ans, et 1
% depuis moins d’un an
14
.
L
’allocation du
RSA représente au 31 décembre 2019 environ 50 %
des allocations individuelles de solidarité (AIS)
du département de l’Allier
.
A
près avoir connu une relative stabilité jusqu’en 2014, autour de 43
%, la
part du RSA dans le total des AIS connaît une croissante significative
depuis 2015. En 2019, le département a consacré plus de 127
M€
au
paiement des AIS, dont 63,46
M€
pour le RSA, 51
M€ pour l’allocation
personnalisée d’autonomie (APA) et 13
M€
pour la prestation de
compensation du handicap (PCH).
L’année 2020 confirme cette tendance,
avec plus de 133
M€ consacrés au paiement des AIS, dont 67,67
M€ pour
le seul RSA, soit un ratio AI
S/ RSA d’environ 50
%.
Cette part reste toutefois en deçà du ratio national RSA/ AIS
(environ 58 %) sur la période 2009-2019. Elle est nettement en dessous des
ratios du Pas-de-Calais (60
%) et de l’Aude (62
%), classés eux aussi dans
le 8
ème
décile pour le nombre
de bénéficiaires du RSA. Ceci s’explique en
grande partie par le fait que l’Allier connaît un taux d’effort sur l’APA plus
important que ces deux départements, en raison de sa structure
démographique vieillissante.
14
Source : département de l
’Allier / D
rees.
LA DÉPENSE ENGAGÉE AU TITRE DU RSA ET SON FINANCEMENT
27
C -
Des dépenses de gestion du droit en légère baisse
Le périmètre des charges de gestion au sens strict a été défini en
incluant les gestionnaires intervenant dans le traitement du droit, de
l’ouverture jusqu’au contentieux éventuel
, au sein du département et de la
CAF de l’Allier
.
N’e
st pas pris en compte la part, trop marginale, des agents
de Pôle emploi et de la MSA de l’Allier
15
intervenant dans la gestion des
droits : aucun frais de gestion
n’
était
d’ailleurs
facturé par la MSA au
d
épartement jusqu’en 2017
16
.
Ces dépenses incluent également celles liées au traitement, à
l’animation et au contrôle des actions et prestations réalisées en faveur des
bénéficiaires (par les chargés de mission, cadres techniques RSA,
gestionnaires d’aides individuelles, etc.). Elles ne prennent pas en comp
te
les dépenses d’accompagnement social et professionnel exposées au point
suivant.
Le département consacre, selon ses déclarations, 2 ETP au pilotage
et à la gestion centrale du dispositif RSA. La gestion des aides individuelles
et l’animation des actions
du PDI mobilisent quant à elles 2,5 ETP. 1 ETP
est en outre dédié au traitement des recours administratifs et des procédures
contentieuses. Enfin, au plan territorial, sept gestionnaires de dossiers RSA
et trois responsables de l’insertion, soit
10 ETP, sont affectés à
l’animation
et à la gestion du dispositif.
Au total, 15,5 ETP du département sont dédiés annuellement à la
gestion du RSA (au 31 décembre 2019). Ce chiffre
n’a pas connu
de grande
variation entre 2014 et 2019. Le coût d’un ETP pour le
département est
extrapolé à partir d’une moyenne calculée
à partir des extractions des
fichiers de paye du personnel départemental, essentiellement ceux des
fonctionnaires titulaires.
La CAF de l’Allier consacre
pour sa part près de 60 ETP à la
gestion, à l’in
struction et au traitement des droits RSA : ce sont des
techniciens conseils basés à Moulins, Vichy et Montluçon. Ils ne sont
toutefois pas intégralement affectés au dispositif et peuvent intervenir dans
l’établissement des droits aux prestations familiales ou sur d’autres minima
sociaux tels que l’allocation aux adultes handicapés. La part de leur temps
consacré au traitement en gestion du seul dispositif RSA peut être évaluée
à 15 %. Ce taux est conforme aux tendances nationales observées par la
Cnaf. Ce
volume d’ETP
est constant pendant la période sous revue. Si la
15
Pour la MSA Auvergne, la gestion du RSA dans l’Allier représente 1 ETP rémunéré
annuellement, soit environ 26
000 € pour l’année 2019.
16
La part des ressortissants de la MSA dans la population bénéficiaire du RSA (droits
ouverts et payés) est de 0,03 %, soit 296 bénéficiaires sur 9 238 au 31 décembre 2019.
COUR DES COMPTES
28
gestion du dispositif RSA pour le compte du département est réalisée par
la CAF à titre gracieux, conformément à la loi et comme dans l’ensemble
des départements français, un raisonnement en coûts complets permet
toutefois, à partir des données de masse salariale, de déterminer le coût de
gestion du
RSA par le personnel de la caisse bourbonnaise. Il est donc
intégré dans le tableau ci-après.
En outre la CAF, comme dans plusieurs autres territoires, facture
au département des frais de gestion correspondants aux services
supplémentaires rendus dans le cadre de la convention de gestion
mentionnée plus haut. Ces missions supplémentaires sont centrées sur la
détermination des revenus des trav
ailleurs indépendants d’une part et sur
les contrôles domiciliaires ou sur pièces effectués à la demande du
département
d’autre part. Il en est de même
depuis 2018
17
pour la MSA de
l’Allier
qui détermine les revenus des travailleurs et exploitants agricoles.
La facturation de ces frais est résiduelle. Elle oscille entre 3 000
et 11 000
€ par an environ
entre 2014 et 2019.
Les dépenses de gestion rapportées aux dépenses totales
d’allocation
RSA apparaissent modestes : le ratio est de 2,8 % en 2019. Il
approche, voire est légèrement supérieur à, celui des départements de
décile comparable retenus dans l’échantillon national
: il est de 2,1 % en
Seine-Saint-Denis, et de 2,45 % dans le Pas-de-Calais la même année.
En Allier toutefois, ces dépenses évoluent à la baisse entre 2017 et
2019, notamment en raison de la chute des coûts de gestion de la CAF
18
.
D -
D
es dépenses d’accompagnement s
ocial
et professionnel diversifiées
Conformément aux dispositions de l’article L. 262
-27 du code de
l’action sociale et des familles, tout bénéficiaire de l’allocation RSA est
accompagné par un référent unique chargé de suivre son parcours
d’insertion sociale et professionnelle. Désigné systématiquement par le
président du conseil départemental, le référent unique est un professionnel
de l’accompagnement social et/ ou professionnel travaillant au plus près
des allocataires. Dans l’Allier, le référent unique peut exercer ses fonctions
dans différents organismes ou institutions :
17
Aucun frais de gestion n’était facturé par la MSA au département de l’Allier jusqu’en
2017.
18
Ces coûts de gestion, comptabilisés au plan national par la Cnaf pour chaque caisse,
bais
sent en 2019 en raison notamment d’une baisse des dépenses d’encadrement et
d’animation du dispositif.
LA DÉPENSE ENGAGÉE AU TITRE DU RSA ET SON FINANCEMENT
29
-
dans les services départementaux de polyvalence de secteur (service
social départemental) ;
-
dans
un centre communal d’action sociale (CCAS), lorsque le
département a conventionné avec celui-ci, pour que le centre assure la
référence de bénéficiaires sur le territoire de la commune (CCAS de
Vichy, Moulins, Bellerive-sur- Allier et Commentry);
-
dans une agence du Pôle emploi (à Vichy, Montluçon et Moulins) ;
-
dans
une mission locale pour l’emploi des jeunes, lorsque l’allocataire
du RSA est âgé de moins de 26 ans et chargé de famille ;
-
dans
une structure d’accompagnement spécifique, dédiée notamment
aux travailleurs indépendants ou aux exploitants agricoles ayant droit
à l’allocation RSA. Les missions d’accompagnement de ces structures
font l’objet de marchés à procédure adaptée lancés annuel
lement par
le département
de l’Allier.
L’accompagnement social et/ ou professionnel est effectué
stricto
sensu
par les différents types de référent précités. Les dépenses relatives à
l’accompagnement sont
extrapolées à partir des données fournies par les
services, correspondant aux cinq catégories de référents. Elles
n’incluent
par conséquent pas les dépenses liées
à l’insertion, la mobilité ou la
formation professionnelle, même si certaines institutions les qualifient de
«
dépenses d’accompagnement
». Ces dépenses sont considérées en effet
dans ce rapport
comme des dépenses d’insertion.
Il convient également de
prendre en compte dans le calcul le coût, marginal,
de l’accompagnement
social de la CAF destiné aux
bénéficiaires du RSA, alors que la caisse n’est
pas pour autant le référent unique au sens de l’article L. 262
-27 du CASF.
1 -
Les travailleurs sociaux du département
La masse salariale des travailleurs sociaux de polyvalence du
département constitue le premier poste de dépenses consacré à
l’accompagnement des bénéficiaires du RSA. Entre 2014 et 2019, ce sont
près de 105 ETP, représentant 4,5
M€
par an de masse salariale brute
chargée totale qui sont affectés à la polyvalence de secteur. Toutefois, ce
chiffre doit être fortement relativisé car chaque travailleur social de secteur
consacre en moyenne, selon les déclarations des services ordonnateurs,
20
% de son temps à l’accompagnement des allocataires du RSA, le reste
étant réparti sur des missions de prévention sociale (logement notamment),
de protection de l’enfance, ou encore de traitement de la dépendance et de
promotion de l’autonomie (personnes âgées, personnes handicapées…).
COUR DES COMPTES
30
Les travailleurs sociaux assurent l’accompagnement
social des
bénéficiaires du RSA et interviennent peu dans l’accompagnement mixte
socio-professionnel, celui-ci reposant essentiellement sur les ressources du
Pôle emploi et des organismes accueillant des catégories spécifiques
(travailleurs indépendants par exemple).
Le tableau ci-
après récapitule le nombre d’ETP en volume dédié à
l’accompagnement des bénéficiaires, le nombre d’ETP relatif, ainsi que les
dépenses afférentes.
Tableau n° 1 :
les dépenses d
’accom
pagnement social
du département (2014-2019)
Année
ETP
ETP
recalculés
coût total brut
coût recalculé à 20%
en €
2014
105
21
4 467 485
893
497 €
2015
107
21,4
4 445 168
889
033,6 €
2016
105
21
4 535 716
907
143,2 €
2017
105
21
4 542 621
908
524,2 €
2018
106
21,2
4 593 709
918
741,8 €
2019
104
20,8
4 549 346
909
869,2 €
Source
: données communiquées par le département de l’Allier
; logiciel Anafi des juridictions
financières
Pour les trois dernières années sous revue, le département a suivi,
selon ses déclarations, respectivement 2 022, 1 300 et 1 324 personnes. Les
dépenses d
’accompagnement s’établi
ssent pour le seul suivi social
départemental, par an et par bénéficiaire, à 449
en
2017, à 706 €
en 2018
et à 687 €
en 2019.
Le tableau ci-après retrace en moyenne le nombre de bénéficiaires
du RSA suivis par les travailleurs sociaux du département. Les
bénéficiaires du RSA sont moins fréquemment suivis directement par les
services
départementaux
depuis
2018,
en
raison
notamment
de
l’externalisation de l’accompagnement mixte et/ ou social (Pôle emploi,
CCA
S, marchés d’accompagnement des publics spécifiques…)
: le ratio de
bénéficiaires du RSA suivis par travailleur social diminue entre 2017 et
2019.
LA DÉPENSE ENGAGÉE AU TITRE DU RSA ET SON FINANCEMENT
31
Tableau n° 2 :
nombre de bénéficiaires du RSA suivis par travailleur
social du département
Année
Nbe de TS du
CD03 en ETP
Nbe de
bénéficiaires
suivis
BRSA/TS
2017
21
2 022
96
2018
21,2
1 300
61
2019
20,8
1 324
63
Source : D
épartement de l’Allier, retraitement juridictions financières
D
ans l’hypothèse où des équipes départementales dédiées
spécifiquement à la prise en charge des bénéficiaires du RSA seraient mises
en place, le ratio de 63 bénéficiaires du RSA suivi par travailleur social
correspondrait, pour
l’année 2019, à celui de 65
bénéficiaires suivis par un
conseiller
de Pôle emploi chargé de l’
« accompagnement global ».
2 -
Les conseillers de Pôle emploi
Pôle emploi Allier compte trois agences sur le territoire
bourbonnais. Cinq conseillers (en ETP) sont dédiés
à l’accompagnement
dit « global » (ou mixte : social et professionnel) des publics les plus en
difficulté, dont une large majorité de bénéficiaires du RSA (environ 2/3 des
publics suivis). Leur masse salariale est comprise dans le calcul des
dépenses, comme celle des équipes « ordinaires » des trois agences qui
suivent les bénéficiaires du RSA en accompagnement professionnel, de la
même manière que les autres
demandeurs d’emploi.
La méthode de mesure du suivi de l’activité (MSA)
utilisée au plan
national par Pôle emploi depuis 2017 permet une approche analytique des
coûts consacrés à l’accompagnement
des bénéficiaires du RSA. On
dénombre, après retraitement analytique de l’ensemble de la masse
salariale dédiée à l’accompagnement des bénéficiaires du RSA, 26 à 30
postes (en ETP) de conseillers qui y sont affectés. Ce chiffre inclut les cinq
agents dédiés à l’accompagnement global. Le tableau ci
-après détaille les
données pour la période 2017 à 2019 (les données pour les années 2014 à
2016 ne sont pas disponibles en l’absence de co
mptabilité analytique). La
masse salariale augmente au cours des trois années sous revue de 17 % en
volume. Il faut noter que les dépenses de la section 3 correspondent à des
dépenses d’insertion et ne peuvent être regardées comme des dépenses
d’accompagne
ment social et professionnel au sens retenu par cette
évaluation.
COUR DES COMPTES
32
Tableau n° 3 :
évaluation des moyens alloués par Pôle emploi
à l’accompagnent des BRSA
Année
Masse salariale
Section 3
ETPT
2017
1 560 704
2 097 262
26
2018
1 602 835
1 563 900
27
2019
1 829 194
3 028 325
30
Source : délégation régionale Pôle emploi Auvergne-Rhône-
Alpes / Pôle emploi Allier
3 -
Le conventionnement avec les centres communaux
d’action sociale
Le département a conventionné avec quatre CCAS pour la
désignation de référents uniques chargés de l’accompagnement social des
bénéficiaires du RSA. Dans les communes de Vichy, de Bellerive-sur-
Allier,
de
Moulins
et de
Commentry,
il
délègue
le
suivi
et
l’accom
pagnement social des bénéficiaires du RSA aux CCAS, par une
orientation sociale systématique vers ces derniers en application des
dispositions combinées des articles L. 262-32 et L. 262-36 du CASF.
La contribution départementale en faveur des CCAS
19
revêt en
réalité un caractère forfaitaire, et ce même si le nombre de bénéficiaires
suivis évolue à la hausse pendant la période sous revue.
À titre
d’exemple le CCAS de Moulins a assuré l’accueil en
entretien et l’accompagnement social de 230 bénéficiai
res du RSA en
2019,
soit un coût de 70
€ par bénéficiaire. Celui de Commentry a
accompagné 18 bénéficiaires du RSA pour une subvention départementale
de 7 000
€, soit un coût de 389
€ par bénéficiaire. Ce montant atteint 307
par bénéficiaire pour le CCAS de Vichy, pour un total de 65 bénéficiaires.
Ces taux sont disparates et n’obéissent à aucune clef de répartition
particulière. Ils sont en outre peu comparables avec le coût d’un
bénéficiaire du RSA suivi par un travailleur social du département, qui
oscille
entre
449
et
706
€.
L’absence
de
référentiel
commun
d’accompagnement social des bénéficiaires du RSA, qu’il soit
élaboré par
le d
épartement ou par l’État, et de grille d’évaluation des coûts
d’intervention sociale dans le champ de l’insertion expliqu
e sans doute,
pour partie au moins, les disparités de « prix de revient » constatées
pendant la période sous revue.
19
Qui oscille entre 3 000 et 20
000 € par an selon le CCAS conventionné.
LA DÉPENSE ENGAGÉE AU TITRE DU RSA ET SON FINANCEMENT
33
4 -
Les accompagnants exerçant au sein des missions locales
pour l’emploi
Les trois missions locales pour l’emploi des jeunes basées à
Moulins,
Vichy et Montluçon assurent le suivi et l’accompagnement des
jeunes de moins de 25 ans allocataires du RSA chargés de famille, en
application du 1° de l’article L. 262
-4 du CASF. Le soutien départemental
en faveur de ces structures apparaît important, au regard du volume encore
modeste du public suivi. Le financement annuel départemental oscille de
140 000 à 171
000 € selon les années et les structures conventionnées.
Le soutien du département aux missions locales apparaît constant
pendant la période analy
sée. Il varie légèrement d’une structure à l’autre,
même si dans l’ensemble la logique d’aide départementale s’apparente à
une subvention de fonctionnement « forfaitisée ».
En 2019, ce sont environ 1 550 jeunes allocataires du RSA
20
de
moins de 25 ans qui ont été accompagnés par les trois structures, entraînant
une dépense départementale moyenne d’accompagnement par bénéficiaire
de 290
par an. Ce ratio se distingue de ceux mentionnés pour les
allocataires suivis par les CCAS, sans que les services du département
puissent expliquer ces écarts.
5 -
L’accompagnement des publics catégoriels
Le département a approuvé, par délibérations successives en 2017,
2018 et 2019, la passation de marchés à procédure adaptée en vue d’assurer
l’accompagnement des publics dit
s « catégoriels
», prévus à l’article L.
262-7 du CASF. Ce sont essentiellement les travailleurs indépendants et
les
exploitants agricoles qui entrent dans cette catégorie. Il s’agit d’un
accompagnement mixte (social et professionnel), essentiellement tourné
vers la dynamisation du bénéficiaire.
20
346 jeunes à Moulins, 676 jeunes à Montluçon, et 516 à Vichy (
source : département
de l’Allier, direction de l’insertion).
COUR DES COMPTES
34
Tableau n° 4 :
l
es marchés d’accompagnement des publics
catégoriels
(2016 à 2020)
Année
Travailleurs indépendants
Exploitants agricoles
2016
100
000 €
36
000 €
2017
88
985 €
33
974 €
2018
100
000 €
40
000 €
2019
120
000 €
25
000 €
2020 (prévisionnel)
100
000 €
60
000 €
Source
: département de l’Allier (direction de l’insertion)
Les exploitants agricoles bénéficiaires du RSA représentent
50 allocataires en moyenne annuelle de 2016 à 2019. Le nombre de
travailleurs indépendants suivis oscille entre 253 en 2016 et 356 en 2019,
selon les services ordonnateurs.
L
e coût moyen d’un accompagnement annuel pour les travailleurs
indépendants s’élève en 2019 à 337
€, alors que celui des exploitants
agricoles, moins nombreux, avoisine 500
€ par bénéficiaire. Et ce sans que,
là encore, cette différence puisse être expliquée par les services du
département.
Si la présence de cahiers des charges dans les marchés à procédure
adaptée constitue un élément de transparence dans le coût des prestations
d’accompagnement social et professionnel, elle ne permet
cependant pas
d’expliquer les disparités de prix de revient d’une structure titulaire à une
autre.
6 -
Le rôle résiduel de la CAF dans l’accompagnement social
Alors que son action est essentiellement tournée vers la gestion des
droits et le paiement de l’allocation, la CAF de l’Allier a maintenu deux à
trois emplois de conseille
rs techniques d’action sociale
(2 à 3 ETP
rémunérés selon les années) et en finance partiellement un (1 ETP) en
partenariat avec l’UDAF de l’Allier sous la forme d’une subvention
annuelle. Ces personnels, issus du travail social, ont pour mission
d’accompagner tous les publics allocataires de la CAF, notamment en cas
de difficultés de logement ou de santé, ou agissent en prévention des
situations de fragilité psycho-sociale. Même si les conseillères techniques
d’action sociale ne constituent pas
stricto sensu
les référents uniques au
sens de l’article L. 262
-27 précité du CASF, il est possible de prendre en
LA DÉPENSE ENGAGÉE AU TITRE DU RSA ET SON FINANCEMENT
35
compte l’accompagnement social qu’elles réalisent, sur la base d’un ratio
de 35 % de leur temps de travail consacré aux bénéficiaires du RSA, ratio
admis par la CAF. Le coût annuel de la masse salariale correspondante,
variant entre 90 000 et 150 000
€ sel
on les années, est pris en compte à
hauteur de ce ratio.
Les charges d’accompagnement social
de la caisse varient donc
entre 33 000 et 53
000 € selon les années considérées.
Ces dépenses sont
très faibles
au regard des autres acteurs de l’accompagnement s
ocial ou
professionnel. Toutefois, il doit être pris en compte dès lors que plusieurs
CAF ne favorisent plus de telles interventions sociales
21
. Le tableau ci-
après récapitule les dépenses engagées au titre de
l’accompagnement social
par la CAF de l’Allier
de 2017 à 2019.
Tableau n° 5 :
dépenses d
’accompagnement social engagé
es
par la CAF de l’Allier (2017 à 2019)
Année
ETPR
Coût total brut
en €
Coût recalculé
à 35%
2017
3
152
703 €
53
446 €
2018
2
89
300 €
31
255 €
2019
2
90
231 €
31
580 €
Source
: CAF de l’Allier
E -
D
es dépenses d’insertion
significatives
Les dépenses relatives
aux prestations d’insertion englobent les
dépenses de fonctionnement dédiées à la mise en œuvre d’ateliers
d’insertion, de remobilisation sociale et professionnelle, de formations
qualifiantes
ou
diplômantes,
de
chantiers
d’insertion,
d’actions
d’encadrement des bénéficiaires tout au long de leur parcours, de mobilité,
de parrainage des allocataires, ou encore d’aides à l’embauche.
Elles
résultent dans leur grande majorité de dépenses de fonctionnement
engagées annuellement par le département dans le cadre du plan
départemental d’insertion (y compris au titre de l’insertion par l’activité
économique-
IAE) ou par d’autres acteurs publics tels que Pôle emploi.
21
Pour sa part, la MSA Auvergne n’assure pas l’accompagnement social et
professionnel des BRSA.
COUR DES COMPTES
36
Les dépenses d’insertion
sont évaluées annuellement en prenant
en compte les subventions de fonctionnement accordées aux organismes
partenaires (par exemple un centre communal ou intercommunal d’action
sociale) ou aux opérateurs privés ou associatifs (porteurs de projets de
chantiers d’inser
tion par exemple). Elles correspondent la plupart du temps
à six types d’actions répertoriés dans la typologie de la D
rees.
L
es actions d’insertion
1/ Actions visant à trouver des activités, stages ou formations
destinés à acquérir des compétences professionnelles.
2/ Actions visant à s'inscrire dans un parcours de recherche d'emploi
(ateliers
d’élaboration
de
CV,
de
présentation
de
son
parcours
professionnel, actions de « remobilisation professionnelle » spécifiques aux
BRSA, actions liées à la valorisation des « savoir-être »).
3/ Actions visant à faciliter le lien social (développement de
l'autonomie sociale, activités collectives, bénévolat etc..).
4/ Actions visant l’accès à un logement, ou à l’insertion par l'habitat.
5/ Actions visant l'accès
aux soins, et à l’amélioration de la santé
psychique.
6/ Actions visant à la conciliation vie familiale / vie professionnelle,
à la parentalité (soutien familial, garde d'enfant, etc…) et à la mobilité
L’ensemble de ces actions vise à lutter contre l’inact
ivité et à lever
les nombreux freins à la remise à l’emploi des bénéficiaires du RSA
: elles
sont détaillées au plan qualitatif en partie 3.
1 -
Les dépenses d’insertion supportées par le
département
Les dépenses d’insertion
du d
épartement de l’Allier
augmentent
pendant la période sous revue, à rebours du phénomène observé au plan
national
: en effet, elles oscillent entre 2,5 et 3 millions d’euros par an sur
les années 2018 à 2020. Si elles connaissent une fluctuation à la baisse
certaines années, elles se maintiennent dans le temps à un niveau
relativement important, contrairement à d’autres départements de
l’échantillon
retenu pour l’évaluation
.
LA DÉPENSE ENGAGÉE AU TITRE DU RSA ET SON FINANCEMENT
37
Tableau n° 6 :
l
es dépenses d’insertion du
département
de 2018 à 2020
2018
2019
2020
2
960 315 €
2
832 330 €
2
987 445 €
En % des dépenses
d’allocation
En % des dépenses
d’allocation
En % des dépenses
d’allocation
4,75 %
4,35 %
4,65 %
Source
: comptes administratifs du département de l’Allier (l’année 2020 étant prévisionnelle)
Ainsi en 2018, la Seine-Saint-Denis a consacré
26,7 M€ aux actions
d’insertion de toute nature, soit 5,3
% du budget total dédié aux allocations
RSA, alors que
l’Allier a
utilisé 4,75
% de son budget d’allocations en faveur
de ces actions. Avec une variation annuelle moyenne de
1,5 % sur la
période 2014-2019, oscillant entre 25 et 30
M€, le soutien de ce département
francilien approche, en tendance, celui de l’Allier. Le ratio bourbonnais de
dépenses d’insertion / dépenses d’allocation est toutefois inférieur à celui du
Bas-Rhin,
qui s’élève à 8,2
% pour la même année.
En revanche, la comparaison avec le Pas-de-Calais laisse
apparaître un ratio nettement supérieur en Allier : avec 1,73 % de dépenses
d’insertion / dépenses d’allocation, le département nordiste se place en
deçà de l’effort bourbonnais, alors qu’il est rangé dans le même décile
(8
ème
) en nombre de bénéficiaires du RSA.
En 2018 le département a consacré près de 3
M€
à l’insertion des
bénéficiaires du RSA, approchant la moyenne nationale, qui est de 5 %.
22
.
Les prestations mobilisées sont exclusivement dédiées aux
bénéficiaires du RSA. Les postes de dépenses les plus significatifs
concernent en premier lieu les actions liées à l’accès à l’emploi, octroyées
au secteur privé associatif ;
en second lieu le soutien à l’insertion par
l’activité
économique (IAE), en particulier par le financement des postes
d’encadrement social et technique dans les chantiers d’insertion, et par les
aides à l’emploi en faveur des bénéficiaires du RSA (soit plus d’un tiers
des prestations d’accompagnement et d’inse
rtion) ; en troisième lieu, sont
financées des aides à la formation et au parcours qualifiant, comme le
dispositif « Persévérance » exposé ci-après.
22
Selon la Drees, le ratio national de dépenses d’insertion/ dépenses d’allocation RSA
s’établit pour l’année 2018, à 5,4
% (contre 12,7 % en 2009). En 2019, selon la lettre
de l’ODAS (décembre 2020), ce taux national s’établit à 5,3
%. Les dépenses
d’inser
tion au plan national ont subi une baisse de
6,3 % entre 2018 et 2019, passant
de 560
M€ à 525
M€.
COUR DES COMPTES
38
En Allier, l’effort annuel moyen par bénéficiaire en matière
d’insertion a été respectivement de 321
€, 30
7
€ et de 295
€, pour la période
2018 à 2020.
2 -
Les dépenses d’insertion engagées par Pôle emploi
L’établissement public national consacre une part non négligeable
de ses crédits de fonctionnement à l’accompagnement des bénéficiaires du
RSA. En effet, ses dépenses incluent la rémunération de prestataires
accompagnant les bénéficiaires, le montant des aides à la mobilité
(transports, permis de conduire…) ou encore les crédits de fonctionnement
liés au coût d’actions de formations qualifiantes (rémunération des
organismes de formation). Ils sont évalués par la comptabilité analytique,
selon Pôle emploi, à 2,1
M€ en 2017, 1,6
M€ en 2018 et 3
M€ pour 2019.
3 -
Les
aides à l’insertion de la CAF
Les prestations d’accompagnement et d’insertion mobilisées par la
CAF de l
’Allier correspondent le plus souvent à l’octroi d’aides
individuelles de solidarité. Ce sont principalement des aides financières
destinées
aux
allocataires
à
la
suite
d’un
évènement
familial
important (
décès d’un enfant, séparation des conjoints, naissance d’un ou
plusieurs enfants en milieu social défavorisé) ou encore des allocations
d’équipement mobilier ou ménager bénéficiant aux familles très modestes.
Parfois ces aides sont octroyées à des allocataires étudiants ou en parcours
scolaire, ou encore au
x personnes handicapées, pour la réalisation d’un
projet précis. Il est à noter que les bénéficiaires du RSA sont éligibles en
outre, comme les autres allocataires de la branche « famille », aux
prestations et aides relatives aux vacances familiales, ou à celles des
enfants, ainsi qu’aux divers fonds de secours accordés localement en
application du règlement intérieur d’action sociale.
Les bénéficiaires du RSA aidés par la CAF représentent environ
un tiers des publics visés par ces aides essentiellement matérielles. Selon
la CAF, le montant en faveur des bénéficiaires oscille entre 211 000
€ en
2017 et 215 000
€ en 2019, en légère augmentation (+2
%). De son côté, la
MSA Auvergne consacre en 2019 près de 22
000 € d’aides sociales extra
-
légales pour les bénéficiaires du RSA.
LA DÉPENSE ENGAGÉE AU TITRE DU RSA ET SON FINANCEMENT
39
III -
Les modalités de financement des politiques
d’insertion
Sont exposées ci-après les différentes sources de financement du
d
épartement destinées au financement des politiques d’insertion. Si ces
ressources conservent globalement une dynamique favorable, elles ne
suffisent néanmoins pas à pallier «
l’effet de ciseaux
» constaté.
A -
Une fiscalité transférée stable mais insuffisante
L’allocation RSA est majoritairement financée par le transfert
d’une fraction de la taxe intérieure sur la consom
mation des produits
énergétiques (TICPE), dont un tiers du produit national environ échoit aux
collectivités territoriales. Cette enveloppe à destination des départements
constitue la contrepartie financière des transferts de compétences mis en
œuvre à l’occasion de l’acte II de la décentralisation, en particulier depuis
l’intervention de la loi n°2004
-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et
responsabilités locales.
Dans l’Allier, les transferts de TICPE se sont élevés à environ
36
M€ chaque année ent
re 2014 et 2019, oscillant entre 36,5 et 36
M€. Le
caractère atone de cette recette contraste avec l’augmentation très forte des
dépenses qu’elle finance
. La recette a financé en 2014 73 % des dépenses
brutes d’allocation RSA, alors qu’elle ne représente p
lus en 2019 que 57 %
de la couverture financière du dispositif. La couverture par cette taxe du
RSA (hors accompagnement) a donc baissé de 16 points durant la période
sous revue.
B -
Des fonds dédiés à la couverture du RSA peu lisibles
Quatre fonds ont été créés en lois de finances pour abonder le
financement de l’action sociale
départementale, en particulier les aides
individuelles de solidarité que sont le RSA,
l’allocation personnalisée
d’autonomie (APA) et la prestation de compensation du handicap (PCH).
Ils
financent indifféremment les trois AIS, de sorte qu’il est peu aisé
d’estimer la part venant au soutien du seul RSA. A été retenue l’hypothèse
selon laquelle les ressources destinées au RSA sont estimées à partir de la
part que représente ce dernier dan
s les dépenses nettes globales d’AIS. Le
tableau ci-après retrace cette part, qui oscille entre 45 % et 50 % des
dépenses totales d’AIS.
COUR DES COMPTES
40
Tableau n° 7 :
p
art du RSA dans les dépenses nettes d’AIS (en %)
2014
2015
2016
2017
2018
2019
45,65
46,68
47,10
46,63
47,25
49,76
Source
: DGCL et département de l’Allier
1 -
Le dispositif de compensation péréquée
Le dispositif de compensation péréquée (DCP) a été institué en
2012 par l’État afin de compenser les revalorisations du RSA intervenues
par voie réglementaire entre 2009 et 2013. Financé par le produit des frais
de gestion sur la taxe foncière des propriétés bâties (TFPB), ce fonds a été
abondé d’un milliard d’euros environ en 2019. Au titre du DCP, le
département de l’Allier a bénéficié, selon les données issues de la direction
générale des collectivités locales (DGCL), en moyenne de 7,9
M€ par an
entre 2014 et 2019, dont environ 3,6
M€ au titre de l’année 2014 –
point le
plus bas- et
3,9 millions d’euros pour l’année 2019 –
point le plus haut-,
cette ressource variant, logiquement, en fonction de la part des dépenses de
RSA dans le total des AIS.
2 -
Le fonds de solidarité en faveur des départements
Le fonds de solidarité en faveur des départements (FSD) est un
dispositif de péréquation horizontale
23
créé en 2014 ; il est financé par un
prélèvement de 0,35
% sur l’assiette des droits de mutation à titre onéreux
(DMTO), soit un montant national de 589
M€ en 2019.
Contrairement à
d’autres départements de l’échantillon national, l’Allier a été bénéficiaire
net du FSD sur l’ensemble de la période considérée et a perçu une somme
globale de 35 860
759 €
24
, soit une moyenne annuelle de 5 976 793
€. En
2014, sur la base d’un calcul en année moyenne, 45,65
% de ces crédits
étaient employés pour le financement du RSA, soit environ 2,75
M€
(2,97
M€ en 2019).
23
Transferts entre départements, sans contribution nette du budget de l’
État.
24
Sur la période sous revue 2014 à 2019 (source : DGCL).
LA DÉPENSE ENGAGÉE AU TITRE DU RSA ET SON FINANCEMENT
41
3 -
Le fonds de soutien exceptionnel et le fonds de stabilisation
Fondés
sur des critères stricts liés au taux d’épargne brute
départementale, au potentiel fiscal, à la population et au montant des
dépenses nettes d’AIS, ces deux fonds sont des instruments financiers qui
ont été mis en place par l’État, successivement pour les
périodes 2015 à
2017 puis 2019 à 2021, afin de venir en aide aux départements
«
connaissant
une
situation
financière
particulièrement
dégradée
notamment du fait de leurs dépenses sociales
». En 2019, 31 départements
ont perçu le fonds de stabilisation. Contrairement à plusieurs départements
de l’échantillon national, l’Allier a bénéficié du fonds de stabilisation en
2019 pour un montant total de 1 614
013 €, dont la moitié au titre du RSA,
soit 807
000 €. Il a perçu au titre de 2016 une somme de 1
453 601
25
:
cela correspond à un crédit affecté au financement du RSA (47,1 % des
AIS en 2016) à hauteur de 684
646 €.
C -
La stabilité des autres fonds de concours
Face à l’augmentation des charges incombant aux départements en
matière de RSA et à la nécessité de mieux articuler insertion sociale et
insertion professionnelle des bénéficiaires, l’État a mis en place dès l’année
2014 plusieurs fonds de concours tels que le fonds de mobilisation
départementale pour l’insertion (FMDI)
et
le fonds d’appui aux politique
s
d’insertion (FAPI).
1 -
Le fonds de mobilisation
départementale pour l’insertion
Le FMDI a pour objet le financement des actions de toutes natures
en faveur du retour à l’emploi des bénéficiaires du
RSA. Ce fonds de
concours, d’un montant global moyen de 500 M€, a été stable pour la
période 2014-2019
: pour l’Allier, il représente une enveloppe budgétaire
moyenne de 2,6 M€ par an sur la période sous revue.
25
Pour les années 2015 et 2017
, le département de l’Allier n’a perçu aucun crédit du
fonds de soutien exceptionnel. En outre, il n’a pas perçu un crédit pour l’année 2018
au
titre de l’un ou de l’autre de ces deux fonds.
COUR DES COMPTES
42
2 -
Le fonds d’appui aux
politiques
d’insertion et le fonds de lutte
contre la pauvreté et d’accès à l’em
ploi
Dans le cadre de la loi de finances pour 2017 a été créé le fonds
d’appui aux politiques d’insertion (FAPI), doté de 50 M€
. En 2017,
90 départements
–dont l’Allier
- ont signé une convention triennale avec
l’État afin de développer des actions d’inser
tion socio-professionnelle en
faveur des bénéficiaires du RSA. Dans ce cadre, l’Allier a reçu 354
125 €
en
2017. En 2018, ce montant s’est élevé à 269
097 €
.
En 2019, le fonds de
lutte contre la pauvreté et d'accès à l'emploi, dans le cadre du « plan
Pauvreté » national
s’est ajouté au FAPI, pour une recette globale de
779
445 € en faveur du département.
D -
Une mobilisation progressive
du fonds social européen
Le FSE et les autres programmes européens en faveur de l’emploi
ont été mobilisés de manière progres
sive par le département de l’Allier. La
collectivité est un organisme intermédiaire au sens de la règlementation
communautaire dès lors qu’il instruit, finance et contrôle les actions
d’insertion sociale et professionnelle engagées non seulement par lui
-
même mais aussi par les porteurs de projets qui s’adressen
t à lui. La
direction de l’insertion de l’emploi et du logement (DIEL) a la charge, en
lien avec le service FSE de la collectivité, du pilotage et de la gestion des
actions cofinancées dans ce cadre. Le FSE vient cofinancer non seulement
les ressources hum
aines dédiées à l’animation et à l’appui technique du
dispositif (cadres départementaux en charge de l’insertion par exemple)
mais aussi le développement d’actions innovantes en faveur du retour à
l’emploi ou de la remobilisation sociale des bénéficiaires
du RSA (ateliers
relatifs aux savoir-être, formations qualifiantes et diplômantes, etc.).
Les recettes perçues par le département au titre du FSE pour la
période 2014 à 2019 ont augmenté de 60,6 % en variation annuelle moyenne.
Ces recettes oscillent entre 142
559 € en 2014 et 1
521
040 € en 2019.
E -
La concentration des financements
et un reste à charge désormais important
Au cours de la période 2009 à 2020, la multiplicité des outils
financiers créés par l’État, issus à la fois de la fiscalité transférée, d
es divers
fonds de soutien ou des fonds de concours susceptibles d’être mobilisés,
LA DÉPENSE ENGAGÉE AU TITRE DU RSA ET SON FINANCEMENT
43
masque la concentration des sources de financement des politiques sociales
départementales, en particulier du dispositif RSA. À cet égard dans l’Allier
les ressources budgétaires destinées au financement du RSA proviennent
presque exclusivement des trois recettes que sont la TICPE, le dispositif de
compensation péréquée et le fonds de solidarité pour les départements. Ces
trois recettes représentent 75 %, 9 % et 8,5 % des ressources perçues en
2019 pour le financement du RSA
26
. Le FMDI, le fonds de soutien
exceptionnel et le fond de stabilisation représentant seulement 6,5 % et 1 %
des recettes perçues au cours de la même année.
Sur la période 2014 à 2019, les financements nets comptabilisés
au titre de la TICPE, du DCP, du FSD du FMDI n’ont pas connu de très
grandes variations : on observe une baisse en volume de près de 25 % du
FMDI
27
, compensée par une hausse en volume d’environ 37
% du DCP
28
,
et une hausse plus significative du FSD à hauteur de 44 %
29
. Les dispositifs
de péréquation et de redistribution horizontale ont joué en faveur de
l’Allier, contrairement à d’autres collectivités incluses dans l’échantillon
national.
Au final, les recettes enregistrées de 2014 à 2019 ont varié dans
une fourchette resserrée, comprise entre 44,8 M€ et 48,6 M€. Cette relative
stabilité des enveloppes budgétaires est en grande partie imputable au poids
de la TICPE dont l’enveloppe est quasi
-
constante d’une année sur l’autre.
Toutefois, cett
e constance n’a pas permis de couvrir les
dépenses nettes
30
incombant au département, qui ont augmenté très rapidement entre 2014 et
2019, passant de 54
M€ à 67
M€.
Par ailleurs, le solde entre les allocations RSA et les recettes de
financement constitue un reste à charge pour le budget des départements.
Entre 2014 et 2019, malgré la création des fonds de soutien précités, la
situation économique et sociale de l’Allier a fragilisé nombre de ses
habitants, dans un contexte de faible mobilité en milieu rural, de sorte que
le reste à charge pour le d
épartement est globalement passé de 11 à 19 M€
au cours de cette même période, augmentant presque du simple au double.
26
Le total des recettes perçues
s’élève en 2019 à 48
339
275 €
(hors FAPI, dont le
montant est très marginal). Il se décompose comme : 36 085
209 € (TICPE), 2
909 154
€ (FMDI), 4
400
033 € (DCP affectée au RSA), 803
133 € (FSOU et FSTAB), et
4 141
746 € (FSD affecté au RSA). Par suite, c’est sur cette base qu
e les taux ci-avant
ont été extrapolés.
27
Passant de près de 3,8 à 2,9 millions d’€ entre 2009 et 2019.
28
Passant de 3,2 à 4,4 millions d’€ entre 2014 et 2019 (avant 2014, le DCP n’existait pas).
29
Passant de 2,8 à 4,1 millions d’€ entre 2014 et 2019 (avant 2014, ce fonds n’existait pas).
30
Prises au sens large, c’est
-à-dire incluant les allocations et les dépenses
d’accompagnement/ d’insertion (hors coûts de gestion du dispositif et hors masse
salariale des travailleurs sociaux accompagnants).
COUR DES COMPTES
44
La notion de reste à charge
« La notion de « reste à charge » est liée à l’histoire des alloc
ations
individuelles de solidarité et aux difficultés qui résultent des mécanismes de
financement mis en place dans le cadre de leur décentralisation. Elle désigne
la part de ces allocations qui ne sont pas financées par ces mécanismes
spécifiques et qui est, de fait, financée par les départements sur leurs autres
ressources propres. Après avoir intégré la part de TICPE transférée (2004)
et le FMDI (2006), le « reste à charge » a fait l’objet d’une première
définition législative par l’article 131 de la loi
de finances rectificative pour
2016 pour y intégrer les divers mécanismes mis en place à partir de 2014.
Cette première définition a été ajustée
a posteriori
par l’article 196 de la loi
de finances pour 2020 afin d’y intégrer, contre l’avis des départemen
ts, les
ressources tirées du relèvement des taux maximum d’imposition pesant sur
les droits de mutation à titre onéreux (DMTO). Aujourd’hui, la notion de «
reste à charge » n’est donc pas consensuelle entre État et départements, et
son niveau dépend du périmètre des ressources prises en compte. »
Le tableau ci-
après récapitule l’évolution des recettes et des
dépenses nettes affectées au financement du RSA dans l’Allier pour la
période de 2014 à 2019. Les dépenses «
d’accompagnement
» dans ce
tableau sont de
s dépenses d’insertion, hors dépenses liées à la gestion et
hors masse salariale des travailleurs sociaux accompagnants.
LA DÉPENSE ENGAGÉE AU TITRE DU RSA ET SON FINANCEMENT
45
Tableau n° 8 :
évolution des recettes et des dépenses nettes affectées
au RSA en Allier (période de 2014 à 2020- hors FSE et DTMO)
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
TICPE-RSA
36 401 878
36 364 940
36 434 859
36 566 264
36 380 957
36 085 209
31 895 159
FMDI
2 299 707
2 453 840
2 626 436
2 659 233
2 646 477
2 909 154
2 950 624
DCP
3 261 319
3 436 523
3 632 402
3 765 694
3 895 206
4 400 033
4 651 835
FSOU et FSTAB
684 636
803 133
632 393
FSD
2 859 525
3 099 890
1 968 648
2 305 114
2 603 894
4 141 746
5 738 166
FAPI
354 125
269 097
779 445
720 074
TOTAL
RECETTES hors
DTMO
44 822 429
45 355 193
45 346 980
45 650 430
45 795 631
49 118 721
46 588 251
Allocations nettes
51 053 162
55 954 075
58 207 581
59 024 478
61 552 377
63 466 158
64 704 643
Dépenses
d'insertion hors
masse salariale
4 765 109
4 629 833
3 861 721
3 488 882
511 726
4 379 869
4 445 568
TOTAL
DEPENSES
55 818 271
60 583 908
62 069 302
62 513 360
66 064 103
67 846 027
69 150 211
Reste à charge hors
DTMO
10 995 842
15 228 715
16 722 322
16 862 930
20 268 472
18 727 306
22 561 960
Taux de
couverture
(recettes sur
dépenses)
80,30 %
74,86 %
73,06 %
73,03 %
69,32 %
72,40 %
67,37 %
Source : juridictions financières à partir des données DGCL et département de l'Allier
Alors que le taux de couverture des dépenses par les recettes
relatives au RSA s’établissait à 80,3
% en 2014, il baisse significativement
pour atteindre 67,37 % en 2020.
Le relatif dynamisme des recettes n’a pas
permis de compenser la hausse des dépenses, tant pour l’allocation elle
-
même que pour l’accompagnement (hors coûts de gestion et hors masse
salariale des personnels d’accompagnement du département). L’érosion
du
taux de couverture est moins la conséquence d’un financement atone de la
part de l’État que la résultante d’une hausse continue et rapide des
COUR DES COMPTES
46
allocations RSA dans le département. En effet, si les recettes affectées au
financement du RSA ont augmenté de
44,8 M€ à 49,1 M€ entre l’année
2014 et l’année 2019, les dépenses nettes ont connu une très forte
croissance au cours de la même période, passant de 55,8 M€ à 67,8 M€.
Elles atteignent près de 70 M
€ pour l’année 2020.
Cette asymétrie dans l’évolution des
dépenses et recettes, dont une
des causes se trouve notamment dans les revalorisations successives du
montant garanti lié au RSA, a été soulignée par la juridiction
administrative. Ainsi, dans un jugement du tribunal administratif de Paris
du 30 juin 2020, non définitif, le juge administratif estime que «
si les
décrets en cause de 2014 à 2018 de revalorisation ne constituent pas, il est
vrai, un transfert ni une création, ni une extension de compétence sociale
départementale, dans le champ de la prise en charge des bénéficiaires du
RSA, ces revalorisations successives représentent une « modification des
règles relatives à l’exercice des compétences transférées
». Les juges du
fond indiquent «
qu’il est constant que ces revalorisations ont entraîné des
dépenses nouvelles pour les départements
» et que «
si l’É
tat fait valoir
que des compensations financières ont été accordées depuis l’année 2014
aux départements demandeurs
via
un mécanisme financier à trois étages,
relatif aux AIS (allocations individuelles de solidarité), cette circonstance
ne rend pas inutile l’édiction de tels arrêtés ministériels dont il est reproché
l’absence
», ceux-ci servant à constater le montant du droit à compensation
des départements requérants. Le tribunal administratif a enjoint aux
ministres concernés de prendre, dans le délai de six mois à compter du
jugement notifié, les arrêtés financiers en litige. C’est en ce sens que le
gouvernement a pris l
’arrêté du 2 décembre 2020 fixant le montant des
accroissements
de
charge
résultant
pour
les
départements
des
revalorisations exceptionnelles du RSA.
Il convient néanmoins
de signaler que, contrairement à d’autres
départements de l’échantillon national
retenu pour cette évaluation, la
situation financière globale de l’Allier n’affiche pas d’indicateurs
dégradés. Sa capacité d’autofinancement nette ou disponible atteint plus de
21 millions d’euros en 2019
et son excédent brut de fonctionnement
s’établit à hauteur de plus de 58 millions d’euros la même année. Si le reste
à charge lié au financement du RSA a presque doublé en l’espace de six
ans, il n’obère donc que très marginalement la capacité d’autofinancement
nette de la collectivité, compte tenu de sa gestion « prudentielle » retracée
au travers de ses principaux agrégats financiers.
LA DÉPENSE ENGAGÉE AU TITRE DU RSA ET SON FINANCEMENT
47
______________________ CONCLUSION
___________________
Si les coûts de gestion du dispositif sont maitrisés et évoluent peu
pendant
la
période
sous
revue,
les
dépenses
d’insertion
et
d’accompagnement
d
es
allocataires
demeurent
soutenues.
Elles
proviennent non seulement du département lui-même mais aussi du soutien
volontariste de Pôle emploi et dans une moindre mesure, de la CAF de
l’Allier. Toutefois, la multiplicité des dispositifs instaurés en faveu
r des
bénéficiaires du RSA ne permet pas de cibler les aides financières sur les
actions les plus efficaces, quel que soit l’acteur concerné.
En outre, le dynamisme des recettes de financement du dispositif
RSA par l’État ne suffit pas à compenser la forte
hausse des dépenses au
sens large (allocations, accompagnement, insertion), de sorte que les
dépenses devant être financées par le département
croissent d’année en
année. Elles ont doublé en volume entre 2014 et 2019. Avec un taux de
couverture passant de 80,3 % à 69,31 % -son plus bas niveau
en 2018-, la
prise en charge des dépenses liées au RSA par l’État n’est que partielle.
Néanmoins, cette situation n’obère que très marginalement les capacités
de financement du département : sa capacité
d’autofinancement nette
augmente entre 2014 et 2019 (de 12 à 21
M€) et son encours de dette
annuel augmente modérément, oscillant en fin
de période sous revue
autour de 280
M€, contre 260
M€ en 2014.
Dès lors, si le reste à charge du dispositif RSA a, dans une certaine
mesure, contribué à l’augmentation des dépenses de fonctionnement au
sein du budget annuel du département, le financement de la politique
d’insertion bourbonnaise demeure, toutes choses égales par ailleurs,
soutenable au plan financier.
Chapitre III
La gestion des allocations
et l’accompagnement des bénéficiaires
du RSA
Le présent chapitre s’attache, après avoir exposé le circuit de la
gestion de l’allocation, de l’ouverture du droit et de la primo-orientation du
demandeur, à analyser les différentes formes d’accompagnement social ou
professionnel offertes en Allier aux bénéficiaires du RSA. L’hétérogénéité des
interventions socio-professionnelles au sein du territoire porte en elle un risque
d’éparpillement des acteurs, de confusion institutionnelle, voire d’inefficience,
en raison notamment d’un manque de connaissances fines et de maîtrise de
l’ensemble des dispositifs locaux d’accompagnement des allocataires.
I -
La gestion des allocations
A -
L’accueil et la prise en charge des demandeurs
par la CAF
1 -
Les modalités de réception et d’instruction des demandes
Ainsi que le permettent les dispositions des articles L. 262-15,
L. 262-16 et D. 262-
26 du code de l’action sociale et des familles, les
demandes d’accès au dispositif du RSA sont recueillies et instruites par la
COUR DES COMPTES
50
CAF (ou par la MSA pour les salariés et exploitants agricoles du
département). Près de 3 500 demandes ont
fait l’objet d’un traitement de la
part des services de la CAF de l’Allier en 2019.
Les services de la CAF peuvent être sollicités par les personnes
s’estimant éligibles au RSA selon plusieurs modalités : après une
simulation effectuée sur le site www.Caf.fr, laquelle est susceptible de
déclencher une demande par téléprocédure ; par une demande réalisée par
mail, contact téléphonique, courrier ou visite à l'accueil ; dans le cadre de
l’identification d'un droit potentiel par un gestionnaire conseil (à
l’occasion, par exemple, d’une séparation d’une personne sans ressources
ou du dépôt d’une déclaration de grossesse par une personne isolée) ; à la
suite d’une demande transmise par un travailleur social.
La CAF de l’Allier a précisé que des rendez
-vous spécifiques
d’une durée de 40 minutes étaient proposés aux personnes ayant demandé
le bénéfice du RSA, sur les trois points territoriaux d’accueil de la caisse
(à Moulins, Montluçon et Vichy), afin de permettre l’étude de l’ensemble
de leur situation et d’assurer
l’ouverture de tous les droits auxq
uels elles
pouvaient prétendre.
Pour les demandes impliquant une décision individuelle relevant
de la compétence discrétionnaire du président du conseil départemental -
n’ayant donc pas fait l’objet d’une délégation
- la CAF et la MSA
transmettent le dossier par mail aux services concernés du département afin
de recueillir l’arbitrage de la collectivité (près de 500 demandes transmises
dans ce cadre en 2019). Il peut s’agir de dossiers répondant aux conditions
de l’artic
le L. 262-8 du CASF, notamment les jeunes stagiaires ou étudiants
chargés de famille, ou encore les travailleurs indépendants employant du
personnel.
Les informations nominatives produites par la CAF à l’occasion
du traitement des demandes sont mises à la disposition des services du
département de façon dématérialisée, afin que ces derniers puissent
procéder à l’orientation des bénéficiaires.
2 -
Les principales difficultés rencontrées lors de l’instruction
des demandes
La CAF a précisé que les gestionnaires rencontraient deux
difficultés majeures dans le traitement des demandes qui leur étaient
soumises.
LA GESTION DES ALLOC
ATIONS ET L’ACCOMPAG
NEMENT
DES BÉNÉFICIAIRES DU RSA
51
La première difficulté tient à l’évolution constante de la législation
applicable et à sa complexité (avec par exemple des ressources à prendre
en compte qui diffèrent suivant les prestations - net à payer mensuel, net
imposable mensuel, imposable annuel). La caisse a précisé que la création
de la prime d’activité, avec des règles propres touchant notamment aux
modalités de calcul des droits, avait contribué à rendre plus complexe le
travail de traitement des demandes d’ouverture des droits, tout autant que
la compréhension des dispositifs par les allocataires.
Le second facteur de difficulté réside dans l’absence d’in
tégration
dans le système d'information de tous les éléments devant être pris en
compte dans le cadre de l’instruction des demandes.
Le département a pour sa part indiqué que certaines personnes
s’estimant éligibles au RSA n’avaient pas d’accès à interne
t et ne pouvaient
donc pas effectuer de demande d’ouverture de droits de manière
dématérialisée. Cette situation qui, comme le relève la CAF, dépend non
seulement du niveau d’équipement des individus mais aussi des possibilités
d’accès à des points numériq
ues ou aux Maisons France Services ainsi que
de l
’accompagnement par des professionnels,
est de nature à allonger la
durée de l’opération de traitement des demandes (transmission des pièces
justificatives par courrier ou sur rendez-vous). La CAF a néanmoins
constaté que la formulation
de demandes d’ouverture de droits de manière
dématérialisée, qui constitue une possibilité relativement récente, était en
progression régulière, au niveau national comme départemental.
B -
Des efforts dans le traitement des situations
de non-recours
Le traitement des situations de non-recours est principalement mis
en œuvre par les services de la CAF.
La CAF de l’Allier est engagée depuis plusieurs années dans une
démarche visant à améliorer l’accès des allocataires à leurs droits.
La caisse
a pris plusieurs engagements dans son contrat pluriannuel d’objectifs et de
gestion 2018-2022 dans le but de lutter contre les situations de non-recours
aux droits au sens large. En particulier, elle s’engage à mener des actions
devant permettre de mieux identifier les bénéficiaires potentiels de droits
(par exemple : améliorer sa connaissance des profils d’allocataires ;
développer les échanges de données sous forme dématérialisée avec ses
partenaires).
COUR DES COMPTES
52
Des initiatives récemment engagées par les services de la caisse
témoignent de cette volonté de lutter contre le non-recours par un effort de
ciblage des publics visés. Ainsi la CAF a envoyé un courriel en avril 2020
à 26 personnes qui avaient été identifiées comme pouvant potentiellement
bénéficier du RSA afin de les inciter à réaliser une simulation et à vérifier
l’état de leurs droits. L’opération s’est soldée par l’ouverture de droits au
RSA pour 6 d’entre elles. Durant le mois de juin 2020, la caisse a également
lancé une campagne d’informa
tion à destination de certains allocataires
bénéficiant de la prime d’activité, par l’envoi de mails et de sms, portant
sur le droit au RSA. Sur les 317 allocataires contactés à l’occasion de cette
démarche, 9 personnes ont alors bénéficié de l’ouverture d
es droits au
RSA. Si elles ne sont pas massives, ces actions sont récurrentes et elles
permettent d’améliorer la situation de non
-recours.
C -
Peu de sanctions du non-respect
des droits et des devoirs
Conformément aux dispositions de l’article L. 262
-37 du CASF, le
département applique des sanctions lorsque les allocataires ne respectent pas
leurs engagements en matière d’insertion sociale ou professionnelle. Les
contrats d’engagements réciproques établis par le
département avec les
bénéficiaires stipulent
d’ailleurs, de manière explicite, que «
le non-respect
des engagements peut entrainer une suspension de l’allocation RSA
».
D’un point de vue opérationnel, la décision de sanction est prise
par le chef de service insertion de chaque territoire de solidarités
départementales, après avis de l’équipe pluridisciplinaire territoriale
concernée, conformément à l’article précité du CASF.
Les sanctions applicables sont prévues dans le règlement commun
des équipes pluridisciplinaires territoriales et prennent la
forme d’une
réduction temporaire du montant du RSA versé, voire d’une radiation pure
et simple du dispositif. Ces sanctions sont graduées et comportent un
premier niveau, correspondant à une réduction du montant du RSA à
hauteur de 100
€ pour une durée de
trois mois maximum, un deuxième
niveau correspondant à une réduction de 50 % du montant du RSA pour
une durée de quatre mois maximum, avant une éventuelle radiation qui
constitue le troisième niveau de sanction administrative.
L’équipe pluridisciplinaire t
erritoriale (EPT) de Montluçon a été la
plus sollicitée en 2019, avec 236 avis rendus. Près de la moitié des avis
rendus cette année là par les trois EPT de l’Allier se prononçaient en faveur
d’une sanction de
premier niveau (278 avis sur un total de 545 avis rendus
par l’ensemble des EPT). 92 avis proposaient une radiation des bénéficiaires.
LA GESTION DES ALLOC
ATIONS ET L’ACCOMPAG
NEMENT
DES BÉNÉFICIAIRES DU RSA
53
Les décisions prononcées à titre de sanction des droits et des
devoirs sont rarement contestées par les allocataires. Un seul recours
gracieux a été formulé par an à l
’encontre de ces décisions entre 2017 et
2019. Ces trois recours ont donné lieu à une décision de rejet de la part de
la collectivité (maintien de la décision initiale). Aucun recours contentieux
n’a par ailleurs été engagé durant la même période, contrair
ement à ce
qu’ont connu d’autres départements de l’échantillon national.
La collectivité bourbonnaise a précisé qu’
était en cours un projet
d’évolution des sanctions, tendant à durcir le dispositif (avec une sanction
plus importante dès le premier niveau et un raccourcissement des délais
avant la radiation).
D -
Un dispositif de lutte contre la fraude conforme
aux orientations nationales
De manière préventive, le département adresse à tous les nouveaux
entrants dans le dispositif RSA un courrier signé par le président du conseil
départemental et l’élue en charge de l’insertion, leur rappelant leurs droits
et devoirs. Aux mêmes fins, la CAF a indiqué que des lettres de mise en
garde sont envoyées aux bénéficiaires et que des campagnes de
communication sur la fraude sont réalisées.
Lorsque la CAF et la MSA détectent des fraudes à l’occasion de
contrôles sur pièces ou sur place ou bien lors d’un croisement de fichiers
informatiques, elles transmettent les dossiers au département (direction de
l’insertion) qui peu
t alors, en cas de suspicion de fraude, engager trois types
d’actions :
adresser un avertissement à l’allocataire lorsqu’il s’agit d’une première
fois et que l’allocataire peut être de bonne foi ;
Prononcer une amende administrative en application des dispositions de
l’article L. 262
-
52 du CASF, après avis de l’équipe pluridisciplinaire
départementale et sur la base d’un barème annexé au règlement de ces
équipes distinguant les sanctions encourues en cas d’omission de
déclaration, de fausse déclaration ou de faux et usage de faux ou
escroquerie ;
Faire un dépôt de plainte pour les suspicions de fraudes les plus graves,
ou lorsque l’amende administrative n’est pas possible (en particulier
lorsqu’une pénalité a déjà été appliquée par la CAF au titr de l’articl
e L.
114-17 du code de la sécurité sociale).
COUR DES COMPTES
54
La CAF a précisé avoir contrôlé 97 % des bénéficiaires de RSA en
2019. Cette même année, près de 90 dossiers de fraude ont été transmis au
département. 60 % environ (soit un peu plus de cinquante) ont donné lieu
à un dépôt de plainte de la part de la collectivité.
E -
Une gestion des indus partagée entre la CAF
et le département
Les indus générés dans le champ du RSA ont connu des variations
au cours de la période 2014-2020, oscillant entre 5 129
528 €, point
le plus
haut en 2016, et 3 546
411 € en 2020, leur point le plus bas. Ils représentent,
en moyenne annuelle sur la même période, un volume de 4 133
960 €. Afin
de prévenir tout versement indu de RSA, le département envoie un courrier
aux nouveaux entrants dans le dispositif pour les inviter à informer la CAF
ou la MSA de tout changement de situation les concernant. La collectivité
a précisé qu’un tel rappel était également réalisé lors de l’entretien
d’orientation avec le bénéficiaire.
Lorsqu’un versemen
t indu est détecté par la CAF ou la MSA, une
procédure est enclenchée afin de permettre le remboursement du trop-perçu
par l’allocataire. Deux situations doivent alors être distinguées :
-
Si la personne perçoit des prestations de la part de la caisse,
l’i
ndu
est récupéré à partir des mensualités du RSA à échoir ou, à défaut, des
mensualités des autres prestations à échoir (prestations familiales,
aides au logement, allocation aux adultes handicapés). Les montants
des retenues sont alors déterminés en fonction de la composition de la
famille, de ses ressources, des charges de logement, des prestations
servies par les organismes débiteurs des prestations (prestations
familiales, aides au logement). Les éventuelles demandes de remise de
dette formulées à cette
occasion font l’objet d’un examen par la
commission de recours amiable (CRA) de la caisse. Par exception, et
par application de la dernière convention de gestion du RSA conclue
entre la CAF et le département pour la période 2018-2020, la caisse
est habilitée par délégation de la collectivité à examiner les demandes
de remise de dette de RSA lorsque les sommes en cause sont
inférieures à trois fois le montant forfaitaire du RSA pour un
allocataire, soit 1
690 € environ.
-
Si la personne ne perçoit plus de prestations de la part de la caisse
(ni
RSA ni autres prestations), la CAF transmet au département
, à l’issue
d’un délai de trois mois suivant la détermination de l’indu de RSA, un
état des créances RSA à recouvrer, sauf si un échéancier de
remboursement est en cours et respecté par l’allocataire débiteur.
LA GESTION DES ALLOC
ATIONS ET L’ACCOMPAG
NEMENT
DES BÉNÉFICIAIRES DU RSA
55
120 indus de RSA ont ainsi été transférés au département en 2019 (pour
un montant total de l’ordre de 275
000 €). En 2020, le montant des titres
pour des indus RSA entrant dans cette situation s’est élevé à 246
055,69
; le montant total des recouvrements sur ces mêmes titres s’est élevé à
69 935,79
€.
Le département, après avoir constaté la créance de la
collectivité, émet un titre de recettes qui est transmis au payeur
départemental pour une mise en recouvrement. Un avis de somme à
payer est alors adressé à la personne débitrice par la paierie
départementale.La convention de gestion du RSA précise à cet égard
que la caisse est habilitée, par délégation de la collectivité, à gérer les
indus de RSA pendant les trois premiers mois suivant la détermination
de l’indu de RSA –
donc avant la saisine du département - en cas de fin
de droit à l’allocation et après recouvrement sur les prestations à échoir.
F -
Des recours administratifs et contentieux
très peu nombreux
Chaque année, des recours administratifs sont exercés auprès du
président du conseil départemental, par des personnes souhaitant contester
des décisions prises en matière notamment d’ouverture des droits ou de
récupération des indus.
Le nombre de ces recours préalables obligatoires, avant toute
saisine du tribunal administratif, a eu tendance à décroitre durant ces
dernières années, pour s’établir à une trentaine en 2019. La plupart donnent
lieu à une décision de rejet (maintien de la décision initiale). Ainsi le
président du conseil départemental a prononcé 19 décisions de rejet sur
recours gracieux en 2019 (pour 10 décisions d’acceptation).
Le nombre de recours contentieux devant le juge administratif
exercés à l’encontre des décisions de rejet prises par l’exécutif départemental
s’avère relativement faible. Leur nombre annuel n’a pas excédé cinq recours
depuis 2014. Et aucun recours contenti
eux n’a, à ce titre, été engagé durant
l’année 2019. Par ailleurs, les quelques recours ainsi exercés n’ont qu’à de
très rares occasions conduit à une décision d’annulation de la part du juge
administratif (une seule décision d’annulation juridictionnelle d’une décision
de refus du département en 2017 et 2018).
COUR DES COMPTES
56
II -
L’accompagnement
des bénéficiaires
du RSA
A -
Plusieurs modalités
d’accompagnement
possibles
L’article L. 262
-27 du CASF prévoit que, dans le cadre de la
logique des droits et devoirs du bénéficiaire, l
’allocataire a droit à un
accompagnement professionnel, social ou mixte adapté à sa situation
personnelle et à ses besoins. À cet effet, en application des dispositions de
l’article L. 262
-29 du même code, le président du conseil départemental
oriente le bénéficiaire soit vers Pôle emploi, en vue de favoriser son
insertion professionnelle, soit vers ses propres services sociaux ou vers une
institution en faisant office (un CCAS ou le réseau CAP emploi par
exemple) pour entamer un parcours d’insertion social
e et / ou
professionnelle, soit vers une mission locale pour l’emploi, dans le cas où
le bénéficiaire du RSA est âgé de moins de vingt-cinq ans.
Le corpus juridique issu des articles L. 262-34, L. 262-35 et
L.262-36 du CASF complète le dispositif
d’orientation en aménageant la
conclusion d’un contrat d’engagements réciproques (CER).
Les différentes modalités des contrats d’engagements réciproques
Lorsque la situation d’un demandeur est proche de l’employabilité
ou d’une insertion rapide au plan pro
fessionnel et que ses compétences
professionnelles sont immédiatement transférables sur le marché de
l’emploi, le bénéficiaire conclut un contrat qui prend le nom de projet
personnalisé d’accès à l’emploi (PPAE) avec Pôle emploi (article L. 262
-34
du CASF)
: son référent RSA, qui l’accompagne dans ses démarches
multiples, est le conseiller ou la conseillère du Pôle emploi situé(e) dans son
agence territoriale de rattachement. Il en résulte qu’un BRSA peut ne pas
avoir de contacts avec les services sociaux départementaux, et ce alors
même que le département est responsable du financement et du pilotage de
l’allocation RSA
; le PPAE vaut en réalité CER au sens de l’article L.262
-
34 du CASF. Le département
n’a pas de connaissances précises de
l’ensemble des P
PAE, qui échappent alors à son analyse, voire à son
contrôle. Cette situation concerne en majorité les demandeurs d’emploi
proches de l’emploi, la part des BRSA dans les trois catégories principales
de demandeurs d’emploi (A, B, C) étant plus importante dans l’Allier que
dans le reste de la région Auvergne-Rhône-Alpes (ARA) : elle représente
22
% des demandeurs d’emploi, contre 16
% environ en ARA.
LA GESTION DES ALLOC
ATIONS ET L’ACCOMPAG
NEMENT
DES BÉNÉFICIAIRES DU RSA
57
Lorsque le demandeur est proche de l’employabilité mais n’est pas
orienté vers Pôle emploi, parce qu’il peut relever d’un autre réseau
d’accompagnement professionnel prenant appui sur le service public de
l’emploi ou sur un organisme habilité œuvrant pour l’insertion
professionnelle des BRSA (le réseau CAP emploi, un organisme d’intérim
d’insertion, une structure appartenant à un réseau de créateurs d’entreprise
ou d’accompagnement d’exploitants agricoles), l’allocataire, après avoir été
orienté vers un accompagnement professionnel, conclut un contrat
d’engagements réciproques ou CER (article L. 262
-35 du CASF) avec la
structure dédiée, laquelle agit ici par mandat du département
. En d’autres
termes, il s’agit là d’un CER orienté sur «
volet professionnel », dont les
modalités diffèrent en principe peu de celles développées dans le cadre du
premier type d’accompagn
ement susmentionné ; si ce CER peut parfois
contenir des mesures sociales, notamment en faveur des exploitants
agricoles,
il
demeure
essentiellement
orienté
en
pratique
vers
l’accompagnement professionnel.
Lorsque le demandeur connaît des freins importants à son insertion
directe sur le marché du travail, du fait notamment de la persistance de
difficultés sociales (santé, logement, garde d’enfants, mobilité, problèmes
de socialisation, maîtrise de la langue française etc.), l’allocataire conclut
un contrat
d’engagements réciproques avec le président du conseil
départemental afin d’être suivi, accompagné et conseillé par les service
sociaux départementaux ou par un organisme chargé du suivi social
(un CCAS par exemple) mandaté à cet effet par l’autorité dépar
tementale.
Il s’agit, dans ce cadre, d’un CER orienté sur le «
volet social » (L. 262-36
du CASF).
Il en résulte en pratique un relatif cloisonnement des deux types
d’accompagnement professionnel et social, bien qu’en droit l’article
L.262-36 précité du CASF permet de conclure un CER contenant
au
moins alternativement- les deux volets social et professionnel. Cet article
dispose en effet que «
le bénéficiaire du RSA ayant fait l'objet de
l'orientation mentionnée au 2° de l'article L. 262-29 [sociale] conclut avec
le département, représenté par le président du conseil départemental, sous
un délai de deux mois après cette orientation, un
contrat librement débattu
énumérant leurs engagements réciproques en matière d'insertion sociale
ou professionnelle »
. Les deux accompagnements ne sont donc pas
exclusifs l’un de l’autre.
Pour pallier ce relatif cloisonnement, Pôle emploi a mis en place
depuis 2015, avec le soutien des départements, un accompagnement mixte
qualifié «
d’accompagnement global
». Non exclusivement dédié aux
bénéficiaires du RSA, ouvert aux personnes affrontant une « double
barrière
sociale
et
professionnelle
»,
l’accompagnement
global,
progressivement installé dans l’Allier, fait l’objet d’une analyse
ci-après.
COUR DES COMPTES
58
Si les résultats de cette démarche apparaissent probants en termes
d’insertion durable, elle demeure toutefois insuffisante eu égard au nombre
de bénéficiaires concernés.
En dernier lieu, selon la Drees
, l’orientation des BRSA
(professionnelle, sociale, voire mixte) est hétérogène d’un dépa
rtement à
l’autre. En
France, au 31 décembre 2018, en moyenne 43 % des
bénéficiaires du RSA sont orientés vers Pôle emploi en vue de conclure un
PPAE. Or
cette moyenne ne reflète pas la réalité de l’Allier. En effet, il
résulte de l’enquête statistique ann
uelle menée par la Drees (OARSA) pour
l’année 2018 et des données communiquées par le
département et Pôle
emploi Allier que 64 % des bénéficiaires du RSA en Allier sont suivis par
Pôle emploi, plaçant le département bourbonnais dans le 10
ème
décile en ce
domaine.
La situation au 31 décembre 2019 accentue encore cette tendance,
avec un taux de suivi par Pôle emploi de 72 %. À cette même date, sur les
9
238 bénéficiaires du RSA comptabilisés dans l’Allier 8
883 allocataires
étaient effectivement suivis, après orientation, par les différents services
susmentionnés, soit un taux de suivi effectif de 96 %. 72 % des
bénéficiaires du RSA bourbonnais sont accompagnés par Pôle emploi,
contre 14,5 % par le département. Ce taux départemental était pourtant de
20 % nationalement au 31 décembre 2018, selon les données de la Drees
comptabilisées à partir des états déclaratifs des conseils départementaux.
L’Allier se situe donc largement au
-dessus de la moyenne
nationale en matière d’accompagnement des
bénéficiaires du RSA par Pôle
emploi. Outre le facteur de non-spécialisation des services départementaux
en matière d’insertion professionnelle, voir
e mixte,
l’émergence depuis
2015 de «
l’accompagnement global
» de Pôle emploi n’est pas étrangère
au résultat d’une telle segmentation. Le
marché de l’accompagnement
global en Allier est en effet principalement capté par Pôle emploi. La
collectivité départementale soutient financièrement le développement de
ce type de suivi
31
par Pôle emploi, notamment depuis l’année 2020. Il n’est
donc guère étonnant que Pôle emploi conserve une place de premier rang
dans l’accompagnement professionnel ou mixte des bénéficiaires,
laissant
aux services départementaux la responsabilité du suivi des bénéficiaires du
RSA engagés dans un parcours à visée essentiellement sociale.
31
Une convention
de recettes d’un montant de 96
000 € a été signée fin 2020 entre le
département de l’Allier et Pole emploi, pour le financement de deux postes de
conseillers emploi.
LA GESTION DES ALLOC
ATIONS ET L’ACCOMPAG
NEMENT
DES BÉNÉFICIAIRES DU RSA
59
B -
Une primo-orientation des publics variable
selon les territoires
Après identification des flux mensuels de bénéficiaires enregistrés
par la CAF, les services de la direction de l’insertion du département de
l’Allier procèdent, depuis septembre 2019, à l’orientation des primo
-
allocataires dans les deux jours qui suivent la réception des flux. Les
bénéficiaires d
e l’allocation RSA déjà inscrits en DEFM de catégorie A
, B
ou C sont quasi systématiquement orientés, après entretien individuel avec
un agent du département, vers les services de Pôle emploi. La notification
d’orientation intervient dans les jours qui sui
vent la primo-orientation vers
Pôle emploi. Ce processus est d’ailleurs stipulé aux articles 4 et 5 de la
convention pluri-
annuelle relative à l’orientation et à l’accompagnement
des bénéficiaires du RSA pour la période 2020-
2022 signée par l’ensemble
des acteurs majeurs du dispositif.
Les autres bénéficiaires font l’objet d’une comptabilisation
individuelle- par chaque gestionnaire RSA (basé dans chacun des trois
territoires de solidarités départementales) en début de mois, dans le délai
de sept jours après la réception des flux RSA. Le taux de présentéisme des
bénéficiaires du RSA
aux
entretiens d’orientation oscille entre 75 et 85
%.
Se présentent alors plusieurs hypothèses :
Les jeunes bénéficiaires âgés de moins de vingt-cinq ans sont orientés
vers
les missions locales pour l’emploi
de Moulins, Vichy et Montluçon.
Les conseillers insertion de ces structures sont habilités par le
département de l’Allier à être référents uniques au sens de l’article
L.262-27 du CASF. Le bénéficiaire du RSA est informé dans le délai de
quinze jours suivant la réception des flux RSA de cette orientation vers
la mission locale, puis est convoqué à un entretien d’orientation au sein
de cette structure dans le délai de quinze jours maximum.
Les bénéficiaires de l’allocation
RSA (en couple sans enfant, ou
personne seule) domiciliés sur les communes de Moulins, Vichy,
Commentry et Bellerive-sur-Allier sont orientés vers les travailleurs
sociaux des quatre CCAS éponymes, dûment habilités par le
département par voie conventionnelle à intervenir en leur qualité de
référents uniques. Les allocataires sont informés de cette orientation
dans un délai de quinze jours puis sont convoqués dans le même délai,
soit au plus tard quatre semaines et demi environ après la réception des
flux RSA.
COUR DES COMPTES
60
Tous les autres allocataires sont convoqués par les services du
département en vue de leur primo-orientation : ils reçoivent à cet effet
un courrier dans le mois qui suit leur ouverture de droits au RSA. Dans
le TSD de Moulins nord Allier, c’est le gestionnaire RSA (personnel
administratif de catégorie C ou B la plupart du temps, formé à cet effet)
qui procède à l’examen, avec la personne convoquée, du questionnaire
socio-professionnel (QSP) en vue de déterminer de manière précise son
orientation
32
. Cette rencontre dure en général trente à soixante minutes.
Il s’agit pour l’agent départemental d’identifier les atouts et les freins de
l’allocataire en début de parcours socio
-professionnel, son niveau de
qualification,
ses
expériences
passées,
ainsi
que
ses
attentes
individuelles. Dans les TSD de Vichy sud Allier et Montluçon ouest
Al
lier, c’est le travailleur social qui procède à l’examen du
questionnaire,
au cours d’un rendez
-
vous d’une heure environ. Il établit
un plan
d’intervention ou d’aide sociale, global ou spécialisé, de nature à
permettre à l’allocataire son suivi ultérieur p
ar le service social
départemental, ou le cas échéant, par un autre acteur du service public
de l’emploi (Cap emploi par exemple).
Quelle que soit la modalité adoptée, le résultat du questionnaire
conduit l’agent du service social départemental à orienter
le bénéficiaire
soit vers les services sociaux de polyvalence de secteur, soit vers un service
d’accompagnement et d’orientation essentiellement professionnelle
: Pôle
emploi, réseau de créateurs d’entreprise, organisme d’accompagnement
des travailleurs indépendants ou des exploitants agricoles.
Le délai au cours duquel s’effectue cette orientation est en
moyenne trois à quatre semaines selon les TSD, et conforme aux données
relevées au 31 décembre 2019 par la Drees dans son enquête OARSA pour
le départemen
t de l’Allier. En effet, les structures extérieures ou les
services sociaux départementaux signent, environ 21 jours après le rendez-
vous d’orientation, un CER avec le bénéficiaire du
RSA contenant une ou
plusieurs actions positives au plan social et/ ou professionnel.
Le délai total qui
s’écoule entre l’admission au RSA (création du
droit RSA en base par la CAF ou la MSA) et le rendez-vous de primo-
orientation sociale ou mixte oscille en Allier entre 50 et 60 jours selon les
publics. Ce délai est inférieur à la moyenne nationale constatée par la Drees
dans son enquête annuelle OARSA pour 2019 : pour les personnes
32
Cette expérimentation a été menée à partir de septembre 2019 et a été pérennisée depuis
l’été 2020. Après une évaluation interne, la pratique du TSD de Moulins nord Allier est
déployée en 2021 sur le TSD de Montluçon ouest Allier. Une évaluation interne a en effet
été conduite par les services départementaux courant 2020, dont la teneur a conduit
l’exécutif départemental à étendre ce circuit de l’orientation à d’autres TSD.
LA GESTION DES ALLOC
ATIONS ET L’ACCOMPAG
NEMENT
DES BÉNÉFICIAIRES DU RSA
61
orientées vers un accompagnement social, 94 jours
soit trois mois
environ-
s’écoulent en moyenne entre la date d’entrée dans le RSA et c
elle
de la première orientation, puis 58 jours jusqu’à la signature du premier
CER quand celui-ci existe.
Le rendez-vous de primo-orientation revêt une importance
particulière dès lors qu’il sert à déterminer
de manière quasi définitive
l’orientation socia
le, professionnelle ou mixte (accompagnement global
par exemple) du bénéficiaire du RSA. En effet, peu de réorientations
surviennent en cours de parcours (moins de 5 % des dossiers). Or selon
l’orientation choisie, l’accompagnement
sera différent.
C -
Des modalités
d’accompagnement
hétérogènes
1 -
Un partenariat formalisé au plan territorial
L
a mise en œuvre des actions et missions d’accompagnement des
publics bénéficiaires du RSA a un caractère partenarial. Quel que soit le
type d’accompagnement retenu, il résulte
notamment du pacte territorial
pour l’insertion
signé le 25 octobre 2018 entre l’État, le
département, Pôle
emploi et la Région Auvergne-Rhône-
Alpes, que l’ensemble des acteurs
mobilise les outils d’accompagnement d
u département, de Pôle emploi, des
services de l’
État et du tissu associatif local. Ces outils sont formalisés
chaque année dans la convention annuelle d’objectifs et de moyens
(CAOM) signée entre l’État et le département de l’Allier
: elle traduit les
engagements des acteurs à «
promouvoir une politique cohérente et stable
de nature à favoriser l’accès des personnes sans emploi rencontrant des
difficultés sociales et professionnelles particulières, des
bénéficiaires du
RSA, à un parcours d’insertion adapté à leurs besoins
». L’enjeu de cette
convention est d’optimiser les interventions financières de la collectivité et
de l’État
33
.
33
L’Allier n’a pas été retenu dans l’expérimentation territoriale d’un service public de
l’insertion (SPI) p
our la période 2019-2021.
COUR DES COMPTES
62
La CAOM priorise les outils de remise à l’emploi direct en faveur des
bénéficiaires du RSA. Peuvent être notamment cités :
-
la conclusion des c
ontrats d’inclusion dans l’emploi départemental
(CIED) financés dans le secteur marchand par le département
34
et
prenant appui sur le régime juridique des anciens contrats initiative
emploi (CIE) ; il en est de même pour les contrats emploi et
compétence (dénommés « parcours emploi compétences »
PEC),
assimilés aux contrats aidés dans le secteur non marchand ;
-
la promotion de l’insertion des bénéficiaires du
RSA par l’activité
économique, tant en entreprise d’insertion, structures d’insertion par
l’activité
économique (SIAE) et
chantiers d’insertion
;
Parallèlement à cette palette à visée professionnelle, le département et
Pôle emploi ont développé plusieurs autres outils de remobilisation ou
d’aide à l’obtention d’une qualification ou d’un diplôme
:
-
les ateliers de remobilisation sociale, de mobilisation des savoir-être
(image et confiance en soi pour la recherche d’emploi), ou encore les
actions collectives de recherche d’emploi
;
-
le dispositif « parcours Persévérance » visant à inciter les bénéficiaires
du
RSA à entrer dans un parcours de qualification en vue d’une
reconversion ou d’une insertion dans l’emploi durable. Ce dispositif
innovant est exposé ci-après.
Toutefois, de l’aveu même des acteurs en charge de l’emploi et de
l’insertion
, certains de ces dispositifs ne sont pas, ou trop peu, connus des
professionnels de l’accompagnement. Ainsi, si l’ensemble des outils sont
connus des acteurs de Pôle emploi, des missions locales ou des CCAS sur
le territoire de Moulins nord Allier, notamment en raison de la mise en
place d’une animation et d’une instance territoriale
ad hoc
, il n’en est pas
de même sur les deux autres territoires de solidarités départementales
(TSD), faute d’un pilotage effectif de l’ensemble des acteurs de l’insertion
sur le terrain par le Département. Certains TSD souffrent du manque de
lisibilité des interventions du département, de l’État, ou de Pôle emploi.
34
Il s’agit d’une aide à l’embauche pour les employeurs qui recrutent un bénéficiaire
du RSA, dans le secteur marchand, en CDD de douze mois ou en CDI, pour un temps
de travail hebdomadaire de 26 heures minimum (temps plein ou temps partiel autorisé).
Cette aide, initialement fixée à 5
000 € par embauche, a été portée en juillet 2020 par
délibération du conseil départemental, à 10
000 €. Après un démarrage lent du dispositif
en 2019, le département escomptait octroyer une centaine
d’aides à l’embauche pour
l’année 2020
: selon l’administration départementale, la moitié de cet objectif serait
atteint.
LA GESTION DES ALLOC
ATIONS ET L’ACCOMPAG
NEMENT
DES BÉNÉFICIAIRES DU RSA
63
Cette lacune pourrait être aisément comblée par la création d’une
instance locale ad hoc d’animation des dispositifs d’insertion socio
-
professionnelle en faveur des bénéficiaires du RSA, traduisant sur le
terrain les orientations du pacte territorial pour l’insertion (PTI)
et du
service public de l’insertion et de l’emploi
.
2 -
Le contenu de
l’accompagnement
social et / ou professionnel
a)
L’accompagnement
social
Le Département
n’a fourni
aucune donnée précise, ni aucunes
statistiques relatives à la fréquence des interventions ou des rendez-vous
organisés par le référent unique RSA, et ce quelle que soit son origine. Le
logiciel du Département, SOLIS (applicatif dédié aux politiques sociales,
en particulier au parcours RSA), ne permet pas de générer de telles
données, pourtant indispensables à la mesure objective, au plan quantitatif
à tout le moins, de l’accompagnement mis en place en faveur de chaque
bénéficiaire.
L’intervention
sociale
revêt
un
caractère
pluri
-forme :
établissement d’un diagnostic sur la situation de la personne, son parcours
antérieur, sa santé
; aide à la recherche de logement ou d’un mode de
garde ; aide à la mobilité
; interventions en faveur de l’autonomisation de
l’allocataire suivi (travail sur l’image de soi, sur la parentalité, la
valorisation des compétences, etc.). Si les équipes d’action sociale en Allier
parlent volontiers de cet accompagnement généraliste, spontanément, et
quelle que soit l’institution, il n’a pas été possible de tr
ouver un référentiel
d’accompagnement
social
en
faveur
des
bénéficiaires
du
RSA
communément approuvé ou mis en œuvre, ni tout autre document en
faisant office. En effet, les notes administratives ou les documents transmis
ne mentionnent pas qu’un tel référ
entiel serait en place au sein des équipes
territorialisées du Département, de Pôle emploi, de la CAF, ou des CCAS
conventionnés. À
tout le moins jusqu’à la fin 2019,
on ne pouvait trouver
un outil commun aux acteurs, ni
une modélisation de l’a
ccompagnement
social ou professionnel
35
.
35
Une telle modélisation était pourtant en cours de rédaction entre l’association des
départements de France (avec l’appui de plusieur
s départements) et le ministère de
l’emploi. L’issue de ce travail a d’ailleurs été trouvée lors de la concertation nationale
sur le service public de l’insertion et de l’emploi du 16 décembre 2020 (élaboration
«
d’une stratégie de parcours
»).
COUR DES COMPTES
64
Ce constat doit toutefois être atténuée pour la période la plus récente :
d’une part, le département de l’Allier a élaboré en novembre 2019 un
«
guide de l’accompagnement du bénéficiaire du RSA dans
l’Allier
», qui
est un
vade-mecum
à la fois administratif et d’intervention sociale. En effet,
destiné à tout professionnel chargé de l’accompagnement, il rappelle les
procédures d’admission et de primo
-orientation et a pour triple objectif :
d
’exposer
le cadre juridique des droits et devoirs de chaque allocataire,
d
’analyser
les missions et le rôle du référent RSA, de fournir les outils
nécessaires au diagnostic socio-professionnel du bénéficiaire et à
l’établissement du contrat d’engagements réciproques.
Appelé à être mis régulièrement à jour, ce guide pourrait être
complété annuellement par un panorama des différents outils socio-
professionnels déployés par les trois acteurs majeurs de l’insertion que sont
le département de l’Allier, Pôle emploi, et l’État.
L’accompagnem
ent social, dénommé parfois « accompagnement
social exclusif » se prêterait encore peu à une modélisation stricte des
interventions auprès des personnes, selon les services départementaux et
les acteurs de l’intervention sociale. En effet, les difficultés
sociales,
économiques et monétaires auxquelles sont confrontés les personnes sont
hétérogènes et sujettes à une variabilité extrême
: il n’est pas rare d’avoir
constaté au travers des dossiers d’allocataires examinés que se succèdent
de manière plus ou moins soudaine des problèmes de logement, de
séparation conjugale, de garde d’enfants, de mobilité, d’apprentissage de
la langue, de handicap, ou même encore, de manière récurrente, des
difficultés importantes de santé physique ou psychique. Il apparaît alors
difficile, selon les équipes sociales, de systématiser ou de « modéliser » un
plan d’aide ou d’intervention sociale, même si une réflexion collective sur
ce plan mériterait d’être engagée
dans le cadre d’une refonte globale de
l’offre de services sociaux
et médico-sociaux à destination des
bénéficiaires du
RSA de l’Allier.
Ce chantier aurait le mérite de mieux définir le rôle et les missions
précises du service social départemental de l’Allier.
De plus, il pourrait
s’avérer indispensable dans la perspective d’une redéfinition des tâches et
des moyens affectés à l’accompagnement socio
-professionnel des
bénéficiaires du RSA, notamment en cas de création d’équipes
spécialisées, le Département
ayant exprimé sa volonté d’engager une
réflexion sur ce champ.
LA GESTION DES ALLOC
ATIONS ET L’ACCOMPAG
NEMENT
DES BÉNÉFICIAIRES DU RSA
65
b)
L’accompagnement
professionnel
L’accompagnement à visée professionnelle proposé par Pôle
emploi prend largement appui sur le référentiel national élaboré par sa
direction générale. Il est différencié en fonction de l’autonomie de la
personne dans la
recherche d’un emploi, afin de pouvoir accompagner en
priorité ceux qui en ont le plus besoin.
À cet égard, quatre niveaux de prestations fournies aux
demandeurs d’emploi, et donc aux bénéficiaires du RSA, sont identifiés
:
Les demandeurs d’emploi dont l
e projet professionnel est défini et
cohérent avec les besoins du marché du travail local et qui sont
autonomes dans leur recherche d’emploi et à l’aise avec le numérique
sont suivis par les conseillers en modalité « suivi ».
L
es demandeurs d’emploi dont l
e projet professionnel est défini et
cohérent avec les besoins du marché du travail local mais dont les
techniques
de
recherches
d’emploi
ou
l’autonomie
numérique
nécessitent d’être renforcées sont accompagnés par les conseillers en
modalité « guidé ».
Le
s demandeurs d’emploi dont le projet professionnel n’est pas finalisé
sont accompagnés par les conseillers de la modalité « accompagnement
renforcé » afin de travailler avec eux leur projet professionnel.
Ces accompagnements sont exclusivement à visée professionnelle.
Ils s’appuient sur un diagnostic personnalisé des freins à l’emploi, sur des
ateliers de recherche d’emploi, de valorisation des compétences, sur
des
bilans des compétences le cas échéant, ainsi que sur des actions de
formation ou de remobilisation professionnelle.
Comme au niveau national,
dans l’Allier
une grande majorité des
bénéficiaires du RSA est dans des modalités
d’accompagnement
professionnel de faible intensité (suivi et guidé). Ainsi, au 31 décembre
2019, sur les 5 715 bénéficiaires du RSA suivis par Pôle emploi
36
, 71 %
étaient positionnés dans une modalité d’accompagnement de faible
intensité
(68 %
au
plan
national).
Un
meilleur
ciblage
de
l’accompagnement des bénéficiaires du
RSA apparaît donc nécessaire.
Si le conseiller Pôle emploi (ou le travailleur social du
département) repère des difficultés d’ordre social et professionnel, le
demandeur d’emploi pourra être accompagné par un conseiller de la
modalité « accompagnement global ».
36
Soit 20,3
% des demandeurs d’emploi enregistrés dans l’Allier (catégories A, B, C).
COUR DES COMPTES
66
c)
L’accompagnement
global: un outil efficace mais encore peu utilisé
Pôle emploi a développé une offre de services spécifique afin
d’aider les demandeurs d’emploi présentant à la fois des difficultés sociales
et des freins à l’emploi, en raison notamment d’une impossibilité de faire
valoir
leurs compétences et d’un éloignement avéré du le marché du travail.
Cette double logique sociale et professionnelle, connue sous le nom
«
d’accompagnement global
» prend appui sur une démarche volontaire du
demandeur d’emploi.
65 % environ des bénéficiaires de cet accompagnement en Allier
sont des allocataires du RSA. Mise en place en 2015 dans le département,
l’offre de services globale a d’abord concerné près de 570 entrées dont
400 étaient des bénéficiaires du RSA. En 2018, la montée en charge du
dispositif, à la faveur du recrutement de cinq conseiller(e)s équivalent
temps plein pour les trois agences locales de Moulins (1), Vichy (2) et
Montluçon (3), s’est confirmée avec près 720 entrées dont 400 allocataires
du RSA. Enfin, en 2019, sur 450 entrées, près de 270 personnes étaient des
bénéficiaires de l’allocation, soit 60
%.
Conformément à la convention de partenariat entre Pôle emploi et
le département de l’Allier signée le 12 février 2019 relative à l’approche
globale de l’accompagnement pour la péri
ode 2019-2020 et à son avenant
n°1 du 27 juillet 2020, les deux institutions ont convenu d’une procédure
visant à réduire le délai d’entrée dans le dispositif. Pôle emploi et le
département
établissent, à l’initiative de l’un ou de l’autre, un diagnostic
partagé de la personne accueillie. L’entrée en accompagnement global
démarre immédiatement dès que l’un des deux prescripteurs a identifié et
formalisé sur la fiche de diagnostic les freins sur la base des critères
d’orientation définis conjointement
37
. Dès
qu’un bénéficiaire potentiel est
identifié, le prescripteur initial informe son partenaire par mail de l’entrée
en accompagnement et lui transfère la fiche de diagnostic dématérialisée
pour validation. L’absence de réponse du partenaire dans les deux sema
ines
qui suivent l’envoi de la fiche vaut accord tacite de sa part et
l’accompagnement peut alors
commencer.
37
Quatre critères sont établis conjointement : 1/ la personne est inscrite à Pôle emploi
comme demandeur d’em
ploi ; 2/ l
a personne accepte d’engager une démarche
d’insertion professionnelle dans le cadre d’un acc
ompagnement par un conseiller Pôle
emploi dédié ; 3/ les difficultés sociales rencontrées par la personne nécessitent un suivi
par un intervenant social.
LA GESTION DES ALLOC
ATIONS ET L’ACCOMPAG
NEMENT
DES BÉNÉFICIAIRES DU RSA
67
I
l s’agit avant tout d’une modalité intensive d’accompagnement
très rapproché, avec un rendez-vous une fois tous les quinze jours
38
. Le
bénéficiaire du RSA est suivi pour une durée de douze mois. Le conseiller
Pôle emploi, référent unique, travaille la plupart du temps en binôme avec
un travailleur social du service social départemental, ou avec l’un de ceux
exerçant en CCAS conventionné. Le référent unique, qui appréhende à la
fois la problématique sociale et professionnelle du demandeur, peut faire
appel à l’intervenant social en tant que de besoin. Des fiches de liaison et
des contacts téléphoniques sont instaurés de
manière régulière,
hebdomadaire dans certains cas.
Selon
les
conseillers
de
Pôle
emploi
en
charge
de
l’accompagnement global rencontrés sur les sites de Moulins et de Vichy,
le processus mis en œuvre s’apparente très largement à l’ancien suivi
mensuel personnalisé pour les personnes les
plus éloignées de l’emploi en
vigueur jusqu’en 2008. Il fait toutefois intervenir, en
plus du conseiller Pôle
emploi, un
professionnel de l’action sociale, généraliste ou spécialisé, en
fonction des besoins et freins sociaux identifiés par le référent unique de
Pôle emploi.
Il représente donc un soutien social individualisé tout autant
qu’une aide concrète au déblocage des freins à l’emploi.
En 2019, selon la direction territoriale de Pôle emploi Allier, 60 %
des sorties du dispositif ont concerné des bénéficiaires du RSA.
Les sorties positives, c’est
-à-dire celles conduisant à la
qualification ou à l’emploi durable, représentent 42
% des cas mais les
« bascules »
vers l’accompagnement social ou professionnel restent
importantes (28 % environ). En outre, 30 % des bénéficiaires du RSA
entrés dans le dispositif l’abandonnent à l’issue des douze mois, en raison
notamment d’un déménagement, d’un retrait définitif du marché du travail
(retraite, handicap lourd), ou d’un abandon «
sec ». Néanmoins le taux de
sorties positives
39
se situe nettement au-delà des taux nationaux de sortie
positive des bénéficiaires du
RSA, admis par l’I
nsee, lesquels oscillent
selon le sexe, l’âge, l’ancienneté dans le dispositif, et la composition
familiale, entre 6 % et 20 %. Ce t
aux n’est pas davantage comparable avec
celui retenu par le ministère du travail dans son rapport annuel de
performance établi pour la loi de finances.
38
Ainsi, en 2019, selon les données du Pôle emploi Allier, chaque conseiller
accompagnement global effectue entre 1,5 à 2 entretiens en moyenne (variable selon
les territoires), sur une période d’un mois.
39
Ou taux de retour à l’emploi de plus de six mois.
COUR DES COMPTES
68
Au demeurant, ce taux bourbonnais de sorties positives en
accompagnement global rejoint, en fourchette haute, les taux des autres
départements de l’échantillon national retenu. Il résulte également d’un
ratio « portefeuille bénéficiaires du RSA / par conseiller référent unique »,
favorable. En effet, en cas d’accompagnement global, le nombre de
demandeurs
d’emploi suivi en Allier par conseiller est de 65 environ (59
au
plan national en 2019), contre 363 demandeurs d’emploi en «
suivi », 211
en « guidé » et 97 en « renforcé ».
Néanmoins les personnes allocataires du RSA retenues dans le
dispositif d’accompag
nement
global ne représentent sur la période 2016 à
2019 que 900 allocataires sur les 9 000 à 10 000 bénéficiaires du RSA du
département, soit moins de 10 % au total. Cette modalité demeure donc
marginale. L’étude des profils des demandeurs d’emploi et des
bénéficiaires du RSA bourbonnais tend à démontrer la part encore très
insuffisante des bénéficiaires du
RSA dans l’accompagnement global.
Même s
’il est
vrai que tous les bénéficiaires du RSA ne peuvent se
voir proposer ce type d’accompagnement, compte ten
u de leurs handicaps
ou freins sociaux
,
une réflexion pourrait
être engagée, sous l’égide du
Département en
lien avec Pôle emploi, en vue d’amplifier la portée de ce
dispositif. Par ailleurs, le Département paraît être en mesure de
démultiplier ce type d’accompagnement tant auprès de Pôle emploi qu’au
sein de ses propres services départementaux.
3 -
L’analyse d’un échantillon de contrats d’engagements
réciproques
Un échantillon de 250 contrats d’engagements réciproques (CER
),
établi à partir des données de la caisse nationale des allocations familiales
relevées au 30 juin 2020, a été analysé. Cet échantillon est représentatif en
termes de sexe, d’âge, de domiciliation, de type de parcours suivi et de type
de référent RSA (service social départemental, mission locale pour
l’emploi, CCAS)
40
. Plusieurs enseignements peuvent être tirés.
L
’établissement d’un CER à visée sociale ou mixte
est
systématique pour
l’ensemble des dossiers examinés.
Les bénéficiaires du
RSA sont couverts à 99 % par un primo-CER ou un renouvellement de
contrat
41
, dont la durée correspond, dans 60 % des cas, à 12 mois. Les
40
Les BRSA
de l’échantillon retenu
sont majoritairement des femmes (59 %),
célibataires (72 %) et de nationalité française (91 %).
41
En l’espèce, sur 250 dossiers examinés, 246 contenaient un CER signé. Ce taux est bien
supérieur à celui de 51 % en moyenne nationale (source Drees/ enquête OARSA).
LA GESTION DES ALLOC
ATIONS ET L’ACCOMPAG
NEMENT
DES BÉNÉFICIAIRES DU RSA
69
bénéficiaires sont informés dans 91 % des cas des droits et devoirs de
l’allocataire et du risque de suspension des droits à l’allocation
en cas de
non-respect des obligations y afférentes. Les résultats
obtenus par l’analyse
de cet échantillon de contrats
diffèrent de ceux issus de l’analyse des bases
de données départementales présentée en fin de rapport et qui montrent
qu’un nombre non
négligeable de bénéficiaires de la cohorte étudiée ne
disposait pas de CER.
Cependant, c
ertains bénéficiaires n’ont qu’une fiche d’orientation
signée par le professionnel accueillant (service social départemental,
CCAS) : cette dernière récapitule toutefois la ou les actions à entreprendre
par le bénéficiaire du
RSA ou le service prescripteur, à partir d’un
diagnostic il est vrai succinct.
Le diagnostic socio-
professionnel de l’allocataire, présent dans
96 % des dossiers examinés, est succinct et rédigé en des termes généraux,
sa rédaction variant selon le professionnel rédacteur. Les documents les
plus élaborés émanent des missions locales pour l’emploi
: ils sont précis,
contextualisés et étayés. Les documents
42
émanant du département sont
homogènes et suffisamment clairs pour comprendre les enjeux et objectifs
du parcours de chaque bénéficiaire. Il en est de même pour ceux provenant
des structures en charge des publics catégoriels tels que les exploitants
agricoles et les travailleurs indépendants en cour
s de création d’activité.
Ces deux dernières structures sont d’ailleurs les seules à avoir quantifié
précisément le nombre de rendez-
vous, d’entretiens et d’heures passées
avec chaque personne accueillie, ce que n’ont pas fait les services du
Département, ni ceux des CCAS ou de Pôle emploi.
Les CER retracent en majorité (52 %) des problématiques relatives
à la santé (129 dossiers sur 246). Ils contiennent l’expression de besoins
sociaux (classés dans la rubrique « autres ») tels que la poursuite de
démarches
administratives,
l’accès
aux
droits,
la
parentalité
ou
l’apprentissage des savoirs de bases (y compris apprentissage de la langue
française). La part de ces besoins sociaux n’est pas négligeable : elle
représente 100 occurrences sur 246, soit 41
% de l’expression des
bénéficiaires du
RSA. Les problématiques de garde d’enfants, de logement
considéré dans quelques cas examinés comme vétuste- ou de mobilité au
sein du territoire départemental sont plus habituelles.
42
Sur 246 CER enregistrés, 111 ont été élaborés avec le travailleur social du département,
soit 45 %. 21
% l’ont été par les CCAS conventionnés, 19
% par les missions locales pour
l’emploi des jeunes, 15
% par les structures conventionnées d’accompagnement des
publics catégoriels (travailleurs indépendants, non-salariés agricoles).
COUR DES COMPTES
70
Les besoins professionnels, qui apparaissent 113 fois au sein des
246 CER examinés (45 % des cas), sont orientés majoritairement vers la
création d’entreprise et l’auto
-entreprenariat (44 %) ou encore vers la
formation professionnelle (33 %).
Dès lors c’est sans surprise que les
domaines principaux dans
lesquels des actions sont entreprises par les intéressés sont la santé,
l’accomplissement de démarches administratives et d’accès aux droits, le
logement, la mobilité et la garde d’enfants. En ce qui concerne les parcours
à dominante professionnelle, les deux actions les plus fréquentes sont la
création d’entreprise et la recherche de formations qualifiantes ou
diplômantes.
I
l n’a pas été rare de constater que pour les bénéficiaires du
RSA
les plus proches de l’admission à la retrai
te, et pour les femmes allocataires
élevant un ou plusieurs enfants, l’ouverture du droit RSA correspond dans
bien des cas à un substitut au droit à pension non encore ouvert ou au congé
parental d’éducation.
Ainsi peut-on lire dans plusieurs contrats que le «
CER RSA est ouvert dans l’attente pour l’intéressé de faire valoir ses droits
à la retraite
», que
l’intéressé
(e) «
pourvoit à l’éducation de ses enfants
»,
«
élève les enfants
», ou encore «
peut difficilement se consacrer à la
recherche d’une activité du fait de l’éducation des enfants
».
Ce constat interroge sur l’utilité et la finalité de l’accompagnement
social et / ou professionnel proposé dans certains cas
par l’autorité
administrative. Implicitement, cela revient en effet
à faire de l’allocatio
n
RSA un revenu d’attente, dont le versement est réalisé dans un objectif
autre que celui qui avait présidé à sa création en 2009.
D -
Comparaison des principaux indicateurs disponibles
relatifs à l’accompagnement des personnes bénéficiaires
du RSA
Le tableau ci-dessous présente un état des lieux des principaux
indicateurs relatifs
à l’accompagnement des personnes bénéficiaires du
RSA dans l’Allier
, établis à partir des trois sources exploitées
: l’instruction
auprès des services départementaux, l’enquête OARSA de la D
rees et les
travaux d’exploitation des bases de données départementales
(BDD).
LA GESTION DES ALLOC
ATIONS ET L’ACCOMPAG
NEMENT
DES BÉNÉFICIAIRES DU RSA
71
Tableau n° 9 :
p
rincipaux indicateurs relatifs à l’accompagnement
des BRSA en 2019
Indicateurs au 31/12/2019
Données
issues de
l’instruction
Données
Drees
Exploitation
bases de données
départementales
Taux des BRSA soumis droits et devoirs (SDD)
96,0 %
ND
83,8 %
Taux d'orientation des personnes SDD dans l'année
40 %
36,4 % (1)
Délais d'orientation pour les personnes SDD dans l'année
55 jours
114 jours
69 jours (1)
Type d'orientation dans l'année
vers un accompagnement pro
75,9 %
72,0 %
Impossible à calculer
compte tenu de la part
de non-renseignement
des structures
(81,4 %) (1)
dont accompagnement PE
75,9 %
65,0 %
vers un accompagnement social
18,8 %
28,0 %
dont accompagnement CD
14,9 %
16,0 %
vers un accompagnement mixte
autre
5,3 %
Taux d'orientation des personnes SDD
60,0 %
70,4 % (1)
Délais d'orientation des personnes SDD orientées
Taux de contractualisation pour les personnes SDD non
orientées vers PE dans l'année
72,0 %
28,6 % (2)
Délais de contractualisation pour les personnes SDD non
orientées vers PE et ayant signées un contrat dans l'année
21 jours
4,6 jours (2)
Taux de contractualisation pour les personnes SDD non
orientées vers PE
39,0 %
23,2 % (1)
Délais de contractualisation pour les personnes SDD non
orientées vers PE et ayant signées un contrat
ND
(1) La variable indiquant la structure vers laquelle le bénéficiaire est orienté est très incomplète. Par défaut, une
autre variable a été utilisée (date d’orientation ultérieure à la date de début de présence au RSA) pour calculer le
taux et le délai d’orient
ation,
(2) Manque de significativité (12 BRSA sur 14 ont une date de début de CER
égale à la date d’orientation)
Sources
: Cour des comptes, d’après données départementales
; Drees enquête OARSA 2019, et exploitation des
bases de données départementales
Les principaux écarts entre ces différentes sources sont les
suivants :
le taux de bénéficiaires du RSA soumis à droits et devoirs ;
les taux et les délais d’orientation des personnes issus des données
départementales : ils sont difficilement exploitables compte tenu du
manque d’informations enregistrées dans les bases de données
;
COUR DES COMPTES
72
les taux et les délais de contractualisation des personnes bénéficiaires du
RSA : ils sont également peu exploitables car les données disponibles
portent sur un trop faible effectif.
E -
Le « Parcours persévérance » : un investissement
formation efficace
Ni le schéma unique des solidarités ni le pacte territorial pour
l’insertion 2018
-2021 ne contiennent de mention sur le développement de
la formation professionnelle pour les allocataires du RSA. Néanmoins le
département de l’Allier et ses partenaires majeurs, Pôle emploi et les
structures d’accompagnement des publics particuliers, se sont engagés
dans une politique volontariste d’accompagnement «
formation » des
bénéficiaires du
RSA et des demandeurs d’emploi de plus de douze mois.
En octobre 2009 déjà, le diagnostic préalable au PTI 2010-2014 avait mis
en évidence la nécessité d’un développement de l’offre de formations.
C’est donc assez logiquement que le PTI 2018
-2021 contient un axe de
mobilisation par la R
égion d’une offre de formation spécifique aux
allocataires du RSA et aux personnes les plus éloignées de l’emploi.
Au 31 décembre 2019, 75 % des bénéficiaires du RSA inscrits à
Pôle emploi ont un niveau de formation inférieur au niveau baccalauréat.
Parmi eux, un quart est sans diplôme et la moitié a un niveau CAP/ BEP.
Or
lorsqu’un
bénéficiaire
du
RSA
entre
dans
une
formation
professionnelle, le statut de stagiaire a pour effet de lui faire perdre le droit
au RSA. En effet, le revenu procuré par ce statut (entre
420 et 660 € par
mois)
conduit à la réduction, voire la suppression, du RSA en raison d’un
dépassement du plafond de ressources règlementaire.
Conscients que les bénéficiaires du RSA sont peu enclins à entrer en
parcours de formation, du fait notamment de cette possible perte du revenu
RSA mais aussi parfois d’une faible motivation, le
Département et la
Région Auvergne-Rhône-Alpes se sont engagés aux côtés de Pôle emploi
et des trois missions locales bourbonnaises pour mettre en place un
dispositif incitatif à la qualification. Ce dispositif, réservé aux bénéficiaires
du RSA en recherche de projet professionnel, de reconversion ou de
réorientation profess
ionnelle, s’intitule «
parcours Persévérance ». Il
s’articule autour de deux éléments centraux
:
-
l’octroi du statut de stagiaire de la fo
rmation professionnelle par la
Région, assurant une rémunération à la personne en parcours de
formation qualifiante ou diplômante d’au moins 650 heures (avec au
moins 25 % du temps en « immersion entreprise ») ;
LA GESTION DES ALLOC
ATIONS ET L’ACCOMPAG
NEMENT
DES BÉNÉFICIAIRES DU RSA
73
-
le bénéfice pour le stagiaire concerné d’une allocation équivalente à
84 % du montant du RSA (pour une personne seule) soit 472
€ par
mois, à la charge du département. Le département
l’inci
te ainsi à entrer
dans un parcours de formation en maintenant une allocation
dénommée «
prime exceptionnelle ou garantie départementale
». La
garantie départementale est accordée pendant toute la durée de l’action
de formation conventionnée.
En outre, dan
s un délai de six mois à l’issue de la formation qualifiante
ou diplômante, si la personne a trouvé un emploi en CDI ou CDD de plus
de trois mois, une prime de 500
€ lui est versée par l
a région Auvergne-
Rhône-Alpes
43
.
Inspiré d’un ancien dispositif régional auvergnat, «
parcours
Persévérance » est particulièrement incitatif pour les bénéficiaires du RSA.
L
e dispositif permet de cumuler deux rémunérations, l’une versée en
application de l’ancien livre IX du code du travail, l’autre au titre de l’aide
sociale facultative prévue à l’article L. 121
-4 du CASF. Préparées dans le
cadre d’un accompagnement mixte, les entrées dans le «
parcours
Persévérance » sont principalement prescrites par les conseillers Pôle
emploi ou ceux des missions locales, plus rarement par les travailleurs
sociaux du département.
Cofinancé par le FSE, la Région, le département de l’Allier
(à hauteur de 150 000
€ en 2019)
et Pôle emploi, ce dispositif a prouvé son
efficacité. En 2018, 40 % des sortants ont trouvé un emploi ou se sont
engagés dans une formation qualifiante plus longue. Au 31 décembre 2019,
sur 97 personnes, 50 % des sortants ont obtenu un CDD de plus de trois
mois ou un CDI, y compris en alternance. Le bilan 2020, en cours de
réalisation, semble indiquer une tendance similaire.
M
ême si le taux d’abandon reste important à hauteur de 20
%
44
, ce
dispositif de qualification favorise l’insertion sur le marché du travail. Il
permet également aux personnes de gagner en autonomie, en confiance et
en image de soi, éléments qui, s’ils sont difficiles à mesurer, n’en restent
pas moins essentiels pour la sortie du RSA.
Toutefois, un tel dispositif demeure très marginal quantitativement
puisqu’il ne concerne chaque année qu’environ 1% des bénéficiaire
s du RSA.
43
Versée en deux fois : la moitié de la prime est octroyée à la signature du contrat de
travail
; l’autre moitié est versée à l’issue de trois mois si le bénéficiaire est toujours en
emploi ou s’il a si
gné un contrat à durée indéterminée.
44
Abandons « sec », sorties en raison de problèmes sociaux importants, sorties pour
occuper un emploi court.
COUR DES COMPTES
74
Le « parcours Persévérance » pourrait concerner davantage de
bénéficiaires et ces derniers devraient être mieux suivis au plan
longitudinal (par exemple, six, douze et dix-huit mois après leur sortie
définitive du dispositif).
F -
Une maîtrise insuffisante
de l’ensemble
des interventions sociales et professionnelles
Les entretiens conduits auprès des travailleurs sociaux et des
conseillers pour l’insertion du
département et de ses partenaires majeurs
ont mis en évidence l’existence de freins importants à l’insertion sociale
et / ou professionnelle des bénéficiaires du RSA, et ce quel que soit le type
d’accompagnement (social, professionnel, mixte) et sa modalité (suivi,
guidé, renforcé, global).
Comme dans d’autres territoires de l’échantillo
n national étudié, il
existe plusieurs causes exogènes de nature à freiner l’insertion, sur
lesquelles ni les allocataires, ni leur référent n’ont réellement de prise
:
-
l’absence d’emplois disponibles dans les trois bassins les plus
importants du département, en particulier sur celui de Vichy,
fortement touché par la crise sanitaire liée à la covid 19 en raison du
caractère touristique et thermal de l’activité du bassin
;
-
l’absence de liaisons en transports en commun pour les allocataires
résidant dans des
lieux éloignés des bassins d’emploi ou de vie habituels
;
-
la difficulté de se loger au sein du parc public ou privé dans les centres
urbains proches des entreprises et des services publics, notamment
pour les familles monoparentales, nombreuses dans le département,
disposant de faibles revenus.
Le contexte économique et social demeure fragile et ne permet pas
toujours d’offrir aux personnes éloignées de l’emploi un travail ou un début
d’activité professionnelle.
D’autres causes liées au bénéficiaire du RSA
ne doivent pas pour
autant être négligées. Il n’a pas été rare de constater, lors de l’analyse des
dossiers de CER, la récurrence de problèmes de santé physique ou
psychique empêchant l’allocataire de regagner en autonomie de vie et
d’emploi, ou encore des
difficultés liées à la maîtrise de la langue et des
apprentissages de base (calcul, gestion d’un budget, expression écrite…).
Pour certains, l’illettrisme et l’absence de compétences numériques
représentent un frein majeur. Pour d’autres, le manque de con
fiance en soi,
l’isolement géographique ou social, exacerbé par la crise sanitaire de
LA GESTION DES ALLOC
ATIONS ET L’ACCOMPAG
NEMENT
DES BÉNÉFICIAIRES DU RSA
75
l’année 2020, ou encore l’inadéquation emploi / formation
ne les poussent
pas à prendre en main leur parcours de vie. Enfin, le fait d’être aidant
familial ou mère isolée
, parent d’enfants en bas âge, proche de la retraite
ou encore d’avoir une grande ancienneté dans le dispositif décourage des
allocataires, qui apparaissent alors
« démobilisés »,
selon le mot des
équipes sociales départementales.
De ces constats découle
pour le moment l’impossibilité de quantifier
l’impact et les effets de l’accompagnement social auprès des bénéficiaires
du RSA. Faute de référentiel d’intervention
des acteurs, la mesure de
l’efficacité de leur action s’avère impossible.
De plus le département
, pourtant pilote de l’ensemble du dispositif
RSA, n’a pas une connaissance suffisante des interventions menées en
faveur des bénéficiaires : une cartographie des outils et dispositifs dédiés
pourrait pourtant être établie sous l’égide du
département et de Pôle emploi,
dans le cadre du SPIE par exemple.
Enfin si le département et ses partenaires ont pu en 2018, à
l’occasion du diagnostic territorial préalable au PTI, établir
ab initio
des
profils de bénéficiaires du RSA, ces derniers devraient être analysés chaque
année. Cela permettrait de connaître plus finement les différents profils des
publics et de mettre en place des actions mieux ciblées. Cela apparaît
d’autant plus important qu’actuellement les bénéficiaires du
RSA gérés par
Pôle emploi sont peu connus du département.
Le pilotage du système bourbonnais souffre donc à la fois d’un
manque d’analyse des profils des bénéficiaires et de l’absence d’une vision
globale des dispositifs créés en leur faveur.
Cette lacune pourrait être comblée par la mise en place d’un
dispositif départemental permanen
t d’observation et d’évaluation,
que le
département a indiqué envisager.
G -
Un enjeu de mobilité et d’accès à l’emploi /
formation à mieux prendre en compte
Les demandeurs d’emploi du département, et particulièrement les
bénéficiaires du RSA, ont une faible mobilité géographique. C’est
pourquoi les actions visant à la développer sont en nombre important dans
les contrats d’engagements réciproques
: certains s’
engagent à passer le
permis de conduire, d’autres à se rapprocher des centres urbains par
l’utilisation des plate
- formes de mobilité mises en place par le département
et le secteur associatif.
COUR DES COMPTES
76
Les responsables de Pôle emploi Allier sont également conscients du fait
que de nombreux BRSA n’entrent pas dans les dispositifs de formation
qualifiante en raison de l’absence d’offre adéquate sur le territoire, ou de
son éloignement géographique puisqu’elle est souvent localisée à
Montluçon. Outre le dispositif d
’incitation à la qualification décrit au point
précédent, deux actions peuvent être néanmoins mentionnées :
-
La construction de la route centre Europe atlantique (RCEA) entraîne
un fort besoin de recrutement de coffreurs/bancheurs. Le chantier
principal con
cerne la périphérie de la ville de Moulins. Or l’organisme
de formation AFPA ne proposait une formation coffreurs bancheurs
que dans ses locaux de Montluçon. Suite à la demande de Pôle emploi,
l’AFPA a cherché une société à Moulins afin d’y implanter un pl
ateau
technique délocalisé. Elle a ainsi installé sa formation au sein de
l’entreprise
Chomette Dupleix
. La formation « coffreur bancheur » a
démarré en juin 2020 avec douze stagiaires originaires de Moulins.
Elle s’est terminée en janvier 2021. Des entret
iens avec Eiffage,
principal recruteur sur le chantier RCEA, ont eu lieu en septembre
2020, rendant une insertion possible pour ces demandeurs d’emploi.
Cette action a été reconduite en novembre 2020 (sortie prévue à l’été
2021).
-
Fin 2017, après les dépôts
successifs de plusieurs offres d’emploi de
technicien d’usinage, l’agence Pôle emploi de Moulins a contacté les
entreprises pour quantifier leurs besoins. Cette démarche a permis
d’identifier une cinquantaine de postes vacants. Ne disposant pas de
demande
urs d’emploi formés à ces emplois sur Moulins, l’agence a
contacté l’AFPA qui propose un titre professionnel de technicien
d’usinage sur Montluçon. Face aux difficultés rencontrées par les
demandeurs d’emploi de Moulins pour se rendre à Montluçon, et afin
de répondre à la demande des entreprises, Pôle emploi a mis en
relation l’AFPA avec une entreprise d’usinage de Moulins, la
SOMAB. Cette dernière disposait d’un espace et d’un parc de
machines suffisants pour permettre la réalisation de la formation.
L’AFP
A a pu ainsi louer du matériel et une partie des locaux de la
société. Fin 2020 trois sessions complètes de formation qualifiante,
d’une dizaine de stagiaires chacune, ont pu être réalisées. Elles ont été
principalement financées par la Région Auvergne-Rhône-Alpes, Pôle
emploi Allier et le fonds de revitalisation de l’État. Afin de pérenniser
cette solution il a été décidé de mettre en place un parcours individuel
de formation et de développement de compétences, comprenant un
engagement de l’entreprise à re
cruter la personne qui le termine.
LA GESTION DES ALLOC
ATIONS ET L’ACCOMPAG
NEMENT
DES BÉNÉFICIAIRES DU RSA
77
______________________ CONCLUSION ______________________
Avec une enveloppe de 4 à 5 millions d’euros consacrée
annuellement
à
l’
insertion
(hors
allocation
et
masse
salariale
d’accompagnement), soit environ 5
% des dépenses totales d’allocation
RSA, l’Allier se situe dans la fourchette haute des départements faisant
partie de l’échantillon étudié.
L
e cas de l’accompagnement global
apparaît singulier parmi les
différents accompagnements proposés. Rompant avec une segmentation
encore trop importante des dimension sociale et professionnelle des
parcours, il permet à des bénéficiaires de sortir du dispositif RSA. Mais
cette modalité demeure encore marginale : ces trois dernières années, elle
n’a concerné qu’environ 6 à 10
% des allocataires selon les territoires.
Certains
dispositifs mériteraient d’être mis en exergue au plan
national
: que ce soit la délocalisation par l’Afpa et Pôle e
mploi de
l’appareil de formation professionnelle au plus près des publics et des
besoins des entreprises, ou encore le montage de dispositifs novateurs de
formation permettant le cumul du statut de stagiaire de la formation
professionnelle et d’une garanti
e financière départementale équivalente à
85 % du RSA. Ces mécanismes innovants incitent fortement à la reprise
d’activité par la voie de la qualification et de la reconversion, gages d’une
meilleure insertion durable sur le marché du travail. Ils ne concernent
cependant encore que trop peu de bénéficiaires du RSA.
Chapitre IV
Les résultats de la politique d’insertion
Dans le pacte territorial pour l’in
sertion de la période 2018 à 2021,
les institutions signataires ont souhaité «
s’engager à capitaliser le résultat
des évaluations des dispositifs et actions d’insertion après avoir élaboré
une méthodologie d’évaluation
». Cet objectif commun vise à mesurer
l’efficacité des actions entreprises, à en corriger la trajectoire, voire à
remettre en cause les dispositifs d’accompagnement social et professionnel
existants. Pourtant, si cette volonté collective est clairement affichée dans
les orientations stratégiques du département et de ses principaux
partenaires, elle peine, de l’aveu même des acteurs concernés, à se
concrétiser : le suivi des actions est parcellaire et les évaluations sont
inexistantes.
I -
Le suivi
et l’évaluat
ion des actions
La direction de l’insertion du
département dispose de tableaux de
bord de suivi mensuel retraçant les flux physico-
financiers de l’allocation,
en lien avec la CAF. Ces tableaux dotés d’indicateurs d’alerte sont utiles
pour la bonne
gestion en temps réel des budgets consacrés à l’allocation et
aux actions d’accompagnement. Ils n’incluent cependant pas la masse
salariale des personnels départementaux affectés au dispositif (gestion et
accompagnement des bénéficiaires en particulier). La connaissance de ce
flux relève en effet traditionnellement de la direction des ressources
humaines de la collectivité.
La direction de l’insertion assure également le pilotage mensuel
des tableaux de bord relatifs au nombre d’allocataires et aux actions
financées dans le cadre des crédits départementaux d’accompagnement et
COUR DES COMPTES
80
des dépenses d’insertion, les flux financiers du FSE étant «
cogérés » par
la direction thématique et le service FSE de la collectivité départementale.
En outre un tableau de bord retrace mensuellement les décisions de
suspension des droits, de réduction de l’allocation, ou encore celles
relatives à la fraude (plainte, sanctions administratives).
Les documents fournis et les entretiens conduits avec les acteurs
territoriaux de l’insertion ont permis de constater que l’ensemble des
marchés de prestations et d’accompagnement contractés par le département
de l’Allier sont suivis tous les trois mois au sein d’un comité organisé par
le cadre territorial d’insertion et les prestataires concerné
s. Cela permet de
suivre les parcours des participants et de réorienter l’accompagnement si
nécessaire. Au plan départemental a été également mis en place un comité
de pilotage semestriel des marchés d’accompagnement, notamment pour
les publics spécifiques : il est chargé de les suivre aux plans statistique et
financier et de les évaluer.
Ces modalités de suivi et de vérification de l’atteinte des objectifs
de chaque marché sont complétées par le contrôle de service fait effectué
par la direction de l’inse
rtion lors du paiement des acomptes
intermédiaires, du solde des factures et des autres subventions
départementales. Une approche similaire est empruntée par le département
pour le soutien annuel aux missions locales pour l’emploi, aux CCAS
conventionnés
et aux structures d’insertion par l’activité économique
(SIAE). La collectivité départementale dispose donc,
sinon d’une vision
globale du dispositif RSA dans l’Allier, à tout le moins de la connaissance
de ses propres actions. Mais plusieurs lacunes importantes subsistent.
A -
Des études et diagnostics parcellaires
À l’exception des deux diagnostics menés lors de l’élaboration des
plans départementaux d’insertion successifs, il n’y a eu aucun diagnostic
global de la situation des bénéficiaires du RSA dans le département
bourbonnais, d’analyse de leurs profils types ou de leurs caractéristiques,
alors même que l’exploitation du logiciel applicatif SOLIS permettrait à
tout le moins une première analyse « macro-économique » départementale.
Il n’existe pas non plus
d’observatoire départemental ou inter
-
institutionnel des politiques sociales ou de leurs publics cibles.
Cette fonction d’observation pourrait être développée dans la
perspective du prochain plan départemental d’insertion déployé à compter
de l’année 20
22.
LES RÉSULTATS DE LA
POLITIQUE D’INSERTIO
N
81
Néanmoins plusieurs études sectorielles ont été conduites durant
la période sous revue, dans un cadre toujours partenarial. Elles ont porté
sur la problématique de la mobilité départementale des demandeurs
d’emploi, sur les effets concrets de l’insertion par l’activité économique
(IAE) auprès des bénéficiaires du RSA, ou encore sur les modes de garde
d
’enfants. De même, le
d
épartement s’est associé à Pôle emploi pour
conduire une étude professionnelle sur les emplois d’aide à domicile dans
l’Allier. Mais de l’aveu même des acteurs départementaux, cette fonction
d’étude et d’observation demeure encore trop parcellaire et segmentée en
fonction des différents acteurs, et dépend des bonnes volontés des uns et
des autres.
Aucune étude ou analyse n’a été jusqu’à présent conduite au plan
départemental sur les pratiques d’accompagnement social, professionnel
ou mixte, sur les effets de la territorialisation de l’action sociale
départementale, ou sur les pratiques partenariales en matière
d’insertion
des bénéficiaires du RSA. Or, ces actions sont pourtant nombreuses et
porteuses d’innovation.
Elles
pourraient faire l’objet d’une analyse
départementale, notamment dans l’optique de la création d’un prochain
service public de l’insertion et de l’emploi (SPIE), dont la généralisation a
été annoncée le 16 décembre 2020.
Face à ce constat, la direction générale en charge des solidarités
départementales a demandé en 2019 aux responsables de chacun des
territoires de solidarités départementales d’élaborer un diagnostic de
territoire, qui est encore en cours de réalisation à ce jour. De même, alors
que le règlement intérieur des équipes pluri- disciplinaires prévoit
explicitement la rédaction d’un diagnostic par bassin des besoins et des
caractéristiques des bénéficiaires du RSA, ces documents n’ont pas été
élaborés.
B -
Un manque récurrent
d’évaluations
internes et externes
Ni le département
ni ses partenaires n’ont conduit une évaluation
interne des actions déployées à l’échelle départementale, au sens de
l’article L. 312
-8 du CASF. Cet article prévoit en effet que «
dans un
objectif d'amélioration continue de la qualité, les établissements et services
mentionnés à l'article L. 312-1
[du CASF]
évaluent et font procéder à
l'évaluation de la qualité des prestations qu'ils délivrent
(…)
». S’il est vrai
que ces dispositions ne s’appliquent pas
stricto sensu
à la collectivité
départementale, à Pôle emploi ou aux CCAS, il n’en demeure pas moins
que la gouvernance du dispositif RSA n’a pas encore intégré de stratégie
COUR DES COMPTES
82
d’évaluation interne. Le
département fait cependant valoir que les bilans
écrits annuels des actions déployées et les réunions de suivi avec les
prestataires et les structures conventionnées permettent de faire ressortir les
besoins non couverts et les axes d’amélioration des politiques d’insertion
sociale et professionnelle. Selon lui, ces bilans constitueraient des
évaluations internes.
Or, si l’évaluation au cas par cas des dispositifs ou projets mis en
œuvre durant la période sous revue
est un atout dans la connaissance fine
des publics bénéficiaires du RSA, elle reste insuffisante au regard des
enjeux
: évaluer à l’échelle départementale le dispositif RSA ne se résume
pas à l’évaluation de
certaines
actions mises en œuvre par l’exécutif
départemental et ses partenaires.
L’évaluation externe n’a donc pas été mise en place
ni au sein du
Département, ni à Pôle emploi Allier, et ce, malgré la volonté collective
affichée en ce sens dans les PTI successifs.
Eu égard aux enjeux sociaux et budgétaires, il est étonnant que ni
l’administration départementale de l’État ni celle de la collectivité
bourbonnaise n
’aient jamais commandité de telles évaluations externes, ni
ex-post
, par exemple après l’achèvement du PTI 2014
-2017, ni
ex-ante
,
pour la rédaction du PTI actuel.
Dans la perspective de la mise en place du prochain service public
de l’insertion et de l’emploi, les acteurs départementaux gagneraient à
disposer d’une évaluation externe du dispositif RSA.
C -
Une pertinence insuffisante des indicateurs
d’évaluation
Les acteurs de l’insertion ont systématisé ce
s cinq dernières années
les évaluations internes « micro-économiques » sectorielles. Si des bilans
annuels ou semestriels sont établis dans le champ de l’insertion sociale et
professionnelle, ils apparaissent essentiellement centrés sur des indicateurs
qua
ntitatifs. Ainsi, les SIAE, les CCAS, les structures d’accompagnement
des publics catégoriels, ou encore les trois missions locales pour l’emploi
rédigent à l’attention des élus et des services départementaux plusieurs
bilans écrits, dotés d’indicateurs pr
ovenant la plupart du temps de Pôle
emploi et du ministère du travail, ou élaborés à la demande du département
lui-même. Ces bilans intègrent au demeurant les spécificités évaluatives
liées aux cofinancements provenant du fonds social européen.
LES RÉSULTATS DE LA
POLITIQUE D’INSERTIO
N
83
Or, la pertinence de ces seuls indicateurs quantitatifs pose
question. Comme il a été signalé pour d’autres départements, no
tamment
en Nouvelle-Aquitaine, l
es bilans d’action et les évaluations internes
pourraient intégrer quelques indicateurs qualitatifs, tenant à
l’enjeu de
remobilisation sociale des bénéficiaires du RSA ou à l’accomplissement de
démarches de nature à revaloriser l’image et la confiance en soi des
personnes, et ce même si la conception de tels indicateurs apparaît, de
prime abord, peu aisée. À ce titre, les recommandations
45
de l’ex
-ANESM
(agence
nationale
d’évaluation
sociale
médico
-sociale)
désormais
fusionnée au sein de la Haute autorité de santé (HAS), constitueraient un
exemple utile pour le champ de l’inclusion sociale.
Le département et ses partenaires pourraient entamer un travail
de réflexion sur la prise en compte d’indicateurs qualitatifs dans les bilans
et évaluations des actions entreprises en direction des bénéficiaires du
RSA.
II -
Des résultats difficiles à mesurer en matière
de retour
à l’emploi et de réduction
de
l’intensité
de la pauvreté
Les acteurs de l’insertion, en particulier l
e département
et l’
État,
n’ont pas de méthodologie d’évaluation de l’impact des actions entreprises
sur la reprise d’activité des bénéficiaires du
RSA. Ce
n’est donc que sous
l’angle partiel des bilans annuels de telle ou telle acti
on ou projet que sont
es
timés les résultats, nécessairement segmentés, de la politique d’insertion
sociale et professionnelle. Ce constat doit être cependant nuancé par les
résul
tats mesurables de la politique départementale d’insertion que les
différents intervenants ont pu fournir. Pour louable que ce soit cette volonté
collective de mesurer les effets des projets déployés, elle demeure toutefois
insuffisante.
Outre le caractère parcellaire des résultats de la politique
d’insertion, l’essentiel des bilans d’actions ou de projets réalisés est centré
sur le taux de retour à l’emploi durable (CDD de plus de trois mois ou CDI)
ou sur le taux d’abandon des allocataires en cours de parcours d’insertion
sociale et / ou professionnelle. Pour intéressants et nécessaires que soient
ces taux, il est à noter qu’aucune évaluation d’action, même sectorielle, ne
tire d’enseignements sur les effets de chaque action auprès des
45
Recommandations de bonnes pratiques au plan social et médico-social.
COUR DES COMPTES
84
bénéficiaires du RSA, en termes de remobilisation sociale, de satisfaction
personnelle, d’image de soi, ou encore d’effort de qualification. Au surplus,
et quand bien même faudrait-
il s’en tenir au seul indicateur du taux de
retour à l’emploi et à la reprise d’activité, le di
spositif RSA en Allier
souffre d’un manque important d’analyse sur le retour à l’emploi. Il n’a pas
été possible, à cet égard, d’extrapoler un taux de retour à l’emploi des
bénéficiaires du RSA à l’échelle départementale, de sorte que l’effet
des
efforts humains et financiers déployés au cours du PTI 2018-2021 est
impossible à mesurer.
Une méthode d’agrégation –
partagée avec Pôle emploi et les
acteurs concernés-
du taux de retour à l’emploi observé dans chacun des
bilans annuels permettrait d’avoir une vis
ion exhaustive de la réalité du
retour à l’emploi des bénéficiaires du RSA en Allier.
De plus, il n’existe pas de suivi informatique d’indicateurs de
satisfaction, ni même d’enquête de satisfaction, sectorielle ou plus
générale, auprès des publics concernés. Ces derniers sont pourtant
représentés dans les réunions des équipes pluri- disciplinaires locales et
départementales instituées par l’article L. 262
-39 du CASF.
III -
L’étude des
trajectoires des bénéficiaires
du RSA du département
Une étude des trajectoires des bénéficiaires du RSA a été réalisée
à partir des données extraites des bases de gestion du département, pour les
années 2014 à 2019.
Cet exercice s’est tout d’abord
heurté à des difficultés de
disponibilité des données dans
les bases. C’est pourquoi n’ont pu être
retenues qu’un petit nombre de variables, à caractère administratif,
relatives à la situation individuelle des personnes (notamment genre, âge,
situation familiale, mais pas le niveau de formation, absent des bases) et à
leur situation dans le RSA (présence dans le RSA, signature d’un contrat
d’accompagnement). En revanche, les données s’avèrent peu fiables
concernant l’organisme d’accompagnement et aucune information relative
au contenu de l’accompagnement, comme la
tenue de rendez-vous de suivi
ou la prescription de formations ou d’autres prestations, n’est renseignée
dans les systèmes d’information. L’absence de saisie de ces données
constitue une limite importante pour la gestion du dispositif
RSA, qu’il
convient
de souligner indépendamment de l’étude menée ici.
LES RÉSULTATS DE LA
POLITIQUE D’INSERTIO
N
85
Les trajectoires d’accompagnement et de sortie du RSA sont
calculées pour la génération des allocataires entrés au RSA au premier
trimestre de 2014, sur une durée totale de six ans. Sur les 589 individus
considérés, l’analyse des enchaînements de situations permet de dresser les
constats suivants :
- les sorties sont rapides au début de la période (23 % de la cohorte est
sortie à 6 mois, 54 % en deux ans, 70 % en trois ans) avant de ralentir (77 %
au bout de six ans) ;
-
la majorité des sorties du RSA sont le fait d’allocataires ne bénéficiant
pas de contrat d’accompagnement, notamment pour ceux qui sortent
rapidement ;
-
il existe une proportion significative d’allocataires qui demeurent sans
contrat tout au long de la période du fait du délai significatif entre
l’entrée au RSA et la signature d’un CER
;
-
à une date donnée, pour ceux qui sont encore dans le dispositif, la
proportion d’allocataires bénéficiant d’un contrat représente entre 4 e
t
11 % des cas seulement.
______________________ CONCLUSION ______________________
Le d
épartement s’affirme comme un acteur pivot de la
gouvernance du dispositif RSA mais son manque de connaissance des
trajectoires des différents publics qu’il accompagne
et
des moyens qu’il y
consacre constitue un frei
n à l’efficacité des actions qu’il conduit. La
faiblesse, voire l’absence de données sur le contenu et la fréquence des
accompagnements mis en place ainsi que sur l’efficacité et l’efficience
des
actions financées est un frein réel à une meilleure gestion du dispositif, au
détriment tant des bénéficiaires du RSA que des financeurs.
Il est donc souhaitable que les services départementaux
qu’ils
conduisent des évaluations régulières sur ce dispositif.
Liste des abréviations
AAH
Allocation aux adultes handicapés
AFPA
Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes
AIS
Allocation individuelle de solidarité
APA
A
llocation personnalisée d’autonomie
BEPC
...........
B
revet d’études du premier cycle du second degré
BRSA
...........
Bénéficiaire du revenu de solidarité active
CAF
..............
C
aisse d’allocations familiales
CAOM
.........
C
onvention annuelle d’objectifs et de moyens
CASF
............
C
ode de l’action sociale et des familles
CCAS
...........
Centre communal
d’action sociale
CD
................
Conseil départemental
CER
..............
C
ontrat d’engagements réciproques
CIAS
............
C
entre intercommunal d’action sociale
CIE
...............
Contrat initiative emploi
CIED
............
C
ontrat d’inclusion dans l’emploi départemental
CNAF
...........
Caisse nationale des allocations familiales
CRA
.............
Commission de recours amiable
DCP
.............
Dispositif de compensation péréquée
DEFM
..........
D
emandeurs d’emploi en fin de mois
DGA
.............
Direction générale adjointe
DIEL
............
Direction « insertion emploi logement »
DIRECCTE .. Direction
régionale
des
entreprises,
de
la
concurrence,
de la consommation, du travail et de l’emploi
DMTO
..........
Droits de mutation à titre onéreux
DNB
............
Diplôme national du brevet
DREES
.........
D
irection de la recherche, des études, de l’évaluation et des
statistiques
EPT
..............
Équipe pluridisciplinaire territoriale
ETP
..............
Équivalent temps plein
ETPR
............
Équivalent temps plein rémunéré
FAPI
.............
F
onds d’appui aux politiques d’insertion
COUR DES COMPTES
88
FMDI
............
F
onds de mobilisation départementale pour l’insertion
FSD
..............
Fonds de solidarité en faveur des départements
FSE
...............
Fonds social européen
FSOU
...........
Fonds de soutien exceptionnel
FSTAB
.........
Fonds de stabilisation
IAE
...............
I
nsertion par l’activité économique
INSEE
..........
Institut national de la statistique et des études économiques
ML
................
Mission locale
MSA
.............
Mutualité sociale agricole
MSD
.............
Maison des solidarités départementales
PCH
..............
Prestation de compensation du handicap
PDI
...............
P
lan départemental d’insertion
PDILE
..........
P
rogramme départemental d’insertion et de lutte contre les
exclusions
PE
.................
Pôle emploi
PEC
..............
Parcours emploi compétences
PPAE
............
P
rojet personnalisé d’accès à l’emploi
PTI
................
P
acte territorial d’insertion
QSP
..............
Questionnaire socio-professionnel
RCEA
...........
Route centre Europe atlantique
RMI
..............
R
evenu minimum d’insertion
RSA
..............
Revenu de solidarité active
SDD
..............
Soumis aux droits et devoirs
SIAE
.............
S
tructure d’insertion par l’act
ivité économique
SMP
..............
Suivi mensuel personnalisé
SPIE
.............
S
ervice public de l’insertion et de l’emploi
TFPB
............
Taxe foncière des propriétés bâties
TICPE
..........
Taxe intérieure sur la consommation des produits énergétiques
TS
.................
Travailleur social
TSD
..............
Territoire des solidarités départementales
UDAF
...........
Union départementale des associations familiales
Annexes
Annexe n° 1 :
dépenses et financement du RSA
.........................................
90
COUR DES COMPTES
90
Annexe n° 1 :
dépenses et financement du RSA
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
Financeur
Coût des moyens humains dédiés à la gestion des prestations par le
conseil départemental ( aa )
390 885
400 988
394 905
431 768
439 549
450 940
455 449
Conseil
départemental
Autres dépenses de gestion du conseil départemental ( ab )
Conseil
départemental
Pour information : créances admises en non valeur, titres annulés,
remises gracieuses
19 030
45 673
1 832
Conseil
départemental
Pour information : contentieux
(emplois dédiés et coût des
procédures, notamment les frais d’avocats)
Conseil
départemental
Total dépenses de gestion du CD (aa+ab) = [J]
390 885
400 988
394 905
431 768
439 549
450 940
455 449
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
Financeur
Coût de gestion pour la CAF (ac)
1 797 056
1 607 758
1 352 339
1 352 339
CAF
Coût de gestion pour la MSA (ad)
30 668
31 899
32 089
MSA
Total autres dépenses gestion (ac+ad) = [K]
0
0
0
1 797 056
1 638 426
1 384 238
1 384 428
TOTAL GESTION [J]+[K] = [L]
390 885
400 988
394 905
2 228 824
2 077 975
1 835 178
1 839 877
59 072 020
63 874 715
68 846 657
76 297 609
79 613 101
83 724 042
90 636 651
Montant des dépenses de gestion du conseil départemental
TOTAL COUTS = [F]+[I]+[L]
Coûts de gestion (dont moyens humains dédiés à la gestion des prestations
)
Montant des
dépenses de gestion des autres acteurs