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Kann’Opé –
Bât. D - CS 18111
97181 LES ABYMES CEDEX
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RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
Collectivité territoriale de Martinique
(département de la Martinique)
Exercices 2015 à 2020
Le présent document, qui a fait l’objet d’une contradiction avec
les destinataires concernés,
a été délibéré par la chambre le 21 mai 2021
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
3
TABLE DES MATIÈRES
SYNTHÈSE __
..........................................................................................................
5
RECOMMANDATIONS __
.....................................................................................
8
INTRODUCTION __
..............................................................................................
10
1
UN DÉPARTEMENT ET UNE RÉGION QUI SE SONT MAL PRÉPARÉS À
LA CRÉATION DE LA NOUVELLE COLLECTIVITÉ
.................................
12
1.1
Une phase préparatoire distraite de ses objectifs
.........................................
13
1.1.1 Le rôle de la commission tripartite chargée de préparer la création de
la CTM
..........................................................................................................
13
1.1.2 La production des groupes de travail techniques inter-collectivités
.............
13
1.2
L’
impréparation budgétaire et comptable de la région Martinique
..............
14
1.2.1 Une information et une sincérité budgétaires insuffisantes
..........................
15
1.2.2
Un niveau d’amortissements beaucoup trop faible
.......................................
17
1.2.3 Des provisions pour risques largement sous-estimées
..................................
20
1.2.4 Cinq emprunts so
rtis indûment de l’état de la dette
......................................
21
1.3
L’impréparation du département de la Martinique
......................................
22
1.3.1 De nombreuses informations manquantes et des documents budgétaires
incomplets
.....................................................................................................
22
1.3.2 Une information comptable médiocre
..........................................................
23
2
UNE FIABILITÉ INSUFFISANTE DES COMPTES
.......................................
25
2.1
Des incohérences dans la reprise par la CTM des comptes consolidés du
département et de la région
..........................................................................
25
2.1.1
La reprise des soldes des anciennes collectivités
.........................................
25
2.1.2 La reprise du patrimoine transféré
................................................................
25
2.2
Une information budgétaire insuffisante
......................................................
26
2.2.1
L’information nécessaire au débat d’orientation budgétaire
........................
26
2.2.2 Les annexes budgétaires obligatoires
...........................................................
27
2.2.3 La mise en ligne des délibérations et des documents de préparation et
d’exécution budgétaires
................................................................................
28
2.3
Une qualité de l’information comptable à améliorer
...................................
29
2.3.1 Des provisions insuffisantes et non ajustées annuellement
..........................
29
2.3.2
L’indépendance des exercices non respectée et les délais de paiement
excessifs
........................................................................................................
31
2.4
Un inventaire lacunaire et un retard considérable dans les amortissements 35
2.4.1 Un inventaire hétérogène et très incomplet
..................................................
35
2.4.2
Des opérations achevées à intégrer à l’inventaire
.........................................
35
2.4.3
Une erreur d’environ 2,3
Md€ dans l’actif de la CTM
.................................
36
3
LA NÉCESSITE D’UNE V
ISION FINANCIÈRE PLURI-ANNUELLE
.........
37
3.1
Le financement des investissements
............................................................
37
3.1.1 Un autofinancement qui progresse
...............................................................
37
3.1.2
Une CAF qui progresse malgré la contraction de l’autofinancement des
investissements
.............................................................................................
40
3.1.3
Un besoin de financement de l’investissement en diminution sensible
........
40
3.1.4 Une dette en augmentation
...........................................................................
42
3.1.5
Des dépenses d’investissement en baisse
.....................................................
44
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
4
3.2
Les principaux indicateurs de l’équilibre financier
......................................
44
3.2.1 Le fonds de roulement a progressé
...............................................................
44
3.2.2 Le besoin en fonds de roulement a augmenté
...............................................
45
3.2.3 La trésorerie demeure insuffisante
................................................................
45
3.3
L’analyse financière rétrospective
...............................................................
47
3.3.1 Des recettes élevées et en croissance
............................................................
47
3.3.2 Des dépenses maîtrisées au cours des quatre premières années
...................
55
3.4
La projection à moyen-long terme et les effets de la crise de la Covid-19 .. 59
3.4.1
L’absence de prospective pluriannuelle explique la situation préoccupante du
patrimoine de la CTM
...................................................................................
59
3.4.2 Les conséquences financières de la crise sanitaire sur la prospective
budgétaire de la CTM ne sont pas encore mesurables
..................................
62
ANNEXES
..............................................................................................................
67
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
5
SYNTHÈSE
__
La chambre régionale des comptes a contrôlé les comptes et la gestion de la collectivité
de
Martinique (CTM) depuis sa création, fin 2015, jusqu’à la période la plus récente. Pour
apprécier les conditions de cette création, elle a ouvert le contrôle du département et de
la région de Martinique pour l’exercice 2015.
Ce contrôle porte sur la création de la CTM, la fiabilité des comptes et l
analyse
financière. Il inclut une prospective financière et une analyse des effets de la crise de la
Covid-19 sur les finances de la collectivité.
Le premier constat qui s
impose est que la région et le département de la Martinique n
ont
pas préparé la création de la nouvelle collectivité de manière satisfaisante.
Le processus conçu pour préparer la création de la CTM jusqu
à la fin de 2015 a été peu
constructif : les réunions de la commission tripartite État-région-département n
ont pas
répondu aux exigences réglementaires d
évaluation des charges, des engagements et des
garanties des deux collectivités destinées à être remplacées par la CTM. Une partie des
réunions a été absorbée par la question du coût de cette création qui a donné lieu à des
annonces de chiffres non fondées. Enfin, le résultat des groupes de travail des deux
collectivités a été peu utilisé par la nouvelle administration.
S
agissant de la région, le compte administratif de 2015 présentait de nombreuses et
graves insincérités. L
insuffisance des amortissements, de 1
Md€, a altéré fortement la
fiabilité de ses comptes. Les risques étaient aussi sous-estimés, avec une insuffisance des
provisions chiffrée à 11,5
M€. Cinq emprunts n’
apparaissent pas, à tort, sur l
état de la
dette au 31 décembre 2015, pour 103
M€, alors que leur remboursement
continuait à peser
sur la région.
S
agissant du département, la qualité de l
information comptable de
l’
exercice 2015 était
très médiocre, avec une imparfaite reprise des résultats antérieurs, un état de la dette
incomplet et des lacunes dans les états annexes obligatoires du compte administratif. Le
patrimoine n
était pas connu de manière exhaustive. L
insuffisance des amortissements
dépassait les 740
M€ et celle d
es provisions atteignait 10
M€.
Les recommandations déjà formulées par la chambre à l
issue des précédents contrôles
du département (2011) et de la région (2013) dans le domaine de la fiabilité des comptes
n
ont guère été appliquées, tout particulièrement celles qui intéressaient la région.
Les recommandations formulées à l
encontre de l
ex-département et de l
ex-région sont
transposables à la CTM qui, en cinq ans, n
a pas amélioré, ou seulement à la marge, la
fiabilité et la sincérité de ses comptes, tant sur le plan de la production d
un certain
nombre de documents obligatoires que sur celui du respect des procédures de gestion. En
particulier, la CTM n
a pas comblé le retard des amortissements du département et de la
région. L
insuffisance accumulée atteint environ 2,3
Md€. La CTM n’
a pas recouru à la
« neutralisation » qui permet, sous certaines conditions, de réduire les conséquences des
amortissements sur l
équilibre de la section de fonctionnement tout en actualisant le bilan.
Ce bilan surestime aujourd
hui largement la valeur de l
actif de la collectivité.
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
6
Le montant des provisions est insuffisant et n
est pas ajusté chaque année comme les
règles comptables le prescrivent.
La collectivité doit apurer des créances anciennes difficilement recouvrables. En sens
inverse, ses délais de paiement pénalisent les fournisseurs. Le total des retenues de
garantie et celui des avances aux sociétés d
économie mixte résultent de situations
anciennes que la CTM n
a pas encore réglées. De même, des opérations achevées
demeurent au compte 23 «
Opérations en cours
» depuis plusieurs années, ce qui retarde
d
autant le démarrage des amortissements afférents.
Le travail d
inventaire reste à réaliser et explique le déficit des amortissements. Toute la
chaîne de suivi des opérations d
investissement doit être revue pour régulariser cette
situation anormale.
La situation financière
d’ensemble est
paradoxale : alors que la CTM dispose d
une
capacité d
autofinancement abondante, le montant de ses investissements diminue, son
endettement augmente et sa capacité de désendettement se dégrade.
Le besoin en fonds de roulement de la collectivité croît à la mesure de l
augmentation des
créances sur les débiteurs, dont la collectivité peine à obtenir le recouvrement. De ce fait,
la trésorerie est insuffisante pour permettre à la collectivité
d’
honorer ses paiements sans
allongement de ses délais. Ainsi, en juillet 2020, le payeur n
était pas en mesure d
honorer
les mandats à payer par manque de trésorerie, ce qui constitue un manquement
répréhensible de la part d
une collectivité disposant d
une administration étoffée et de
ressources élevées.
La CTM dispose en effet de recettes confortables, largement supérieures par habitant à
celles des départements et régions de la France euro-continentale comparables, en
particulier en raison de l
octroi de mer - dont la gestion doit être améliorée - et de la taxe
sur les carburants. Elle maîtrise cependant ses charges de gestion et sa masse salariale, au
moins à court terme.
La collectivité ne s
est pas dotée d
une prospective budgétaire. La prospective « au fil de
l
eau » (par prolongement des tendances observées) établie par la chambre annonce une
contraction de la capacité d
autofinancement au cours des prochaines années.
Les effets de la crise de la covid-19 sur l
économie martiniquaise et sur les finances de la
CTM ne pouvaient pas être mesurés précisément à la date de rédaction du présent rapport :
les données statistiques officielles récentes manquent pour mesurer la récession
économique qui est certaine, malgré les stabilisateurs puissants que représentent les
traitements des fonctionnaires et les transferts sociaux (71 % du « PIB » martiniquais
1
).
Si la CTM anticipe une perte de recettes fiscales d
origine économique (taxe sur les
carburants, octroi de mer, droits de mutation), les engagements financiers de
compensation, annoncés par l’État,
ne se sont pas encore traduits par des notifications
permettant d
en confirmer la réalité.
La CTM a réagi fortement par des mesures de lutte contre les conséquences du
confinement et par un plan de relance ambitieux, de 148,5
M€ en dépenses
1
Le PIB correspond au total des revenus perçus sur le territoire
quelle qu’en soit l’origine, définition plus
compréhensible, pour un territoire où la production endogène est modeste et où la majorité des revenus
est d’origine publique, que ce qu’évoque l’expression
« produit intérieur brut »
.
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
7
d’investissement et de 42,9
M€ en dépenses de fonctionnement. Sa mise en œuvre a été
limitée en 2020, ce qui devait se traduire par des reports massifs de crédits sur 2021.
A
u titre de ces mesures, figure l’attribution de prêt aux entreprises dont la CTM a confié
la gestion par mandat à une association, dans des conditions juridiques à la légalité
incertaine.
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
8
RECOMMANDATIONS
__
(régularité)
Rendre accessible par internet les documents qui
doivent légalement être mis en ligne et, plus généralement, les
délibérations intégrales.
(régularité)
Ajuster chaque année le montant des provisions aux
risques encourus.
(performance)
Inscrire une provision pour charges (gros
entretien, désamiantage, CET) après en avoir expertisé le
montant.
(performance)
Augmenter la provision pour dépréciation des
comptes
de
redevables
en
fonction
d’une
évaluation
rigoureuse des risques et programmer avec le comptable un
plan d
apurement des admissions en non-valeur.
(régularité)
Lever les retenues de garantie dans les délais
légaux.
(performance)
Solder les opérations comptables anciennes du
compte 238 (avances aux SEM).
(régularité)
Mettre à jour l
inventaire afin de corriger le bilan.
(régularité)
Clore au fur et à mesure de leur achèvement les
opérations du chapitre 23.
(régularité)
Appliquer les règles relatives à l
amortissement
afin de mettre à jour le bilan de la collectivité.
(performance)
Doter la CTM d
un plan de trésorerie.
(performance)
Fonder les surcoûts, les différentiels de
taxation et les exonérations à l
octroi de mer sur des données
fiables et vérifiables.
(régularité)
Imputer les recettes de FRDE au chapitre 10
« Dotations, fonds divers et réserves »,
en tant que recette
propre d
investissement.
(régularité)
Ajuster le nombre d
emplois vacants du tableau
des effectifs aux besoins et budgéter le coût des emplois
budgétaires totaux.
(performance)
Réaliser
une
prospective
budgétaire
pluriannuelle en vue de s
assurer de la soutenabilité de la
trajectoire.
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
9
(performance)
Délibérer et mettre en œuvre le plan
pluriannuel d’investissement sans reporter davantage les
travaux indispensables.
(performance)
Ajuster le budget d’entretien du patrimoine de
la collectivité aux besoins vérifiés.
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
10
INTRODUCTION
__
Ordonnateur :
-
M. Alfred MARIE-JEANNE, président du conseil exécutif de la collectivité
territoriale de Martinique depuis sa création, le 18 décembre 2015.
Anciens ordonnateurs :
-
Mme Josette MANIN, présidente du conseil général de la Martinique
du 1
er
janvier au 18 décembre 2015 ;
-
M. Serge LETCHIMY, président du conseil régional de la Martinique
du 1
er
janvier au 18 décembre 2015.
La collectivité territoriale de Martinique a été créée par la loi n° 2011-884 du
27 juillet 2011 relative aux collectivités territoriales de Guyane et de Martinique, à la suite
de la consultation référendaire de la population martiniquaise des 10 et 24 janvier 2010.
La loi est entrée en vigueur avec l
élection des conseillers de l
assemblée de Martinique,
le 18 décembre 2015.
Conformément aux dispositions de l
article L. 211-4 du code des juridictions financières
(CJF), la gestion de la collectivité territoriale de Martinique (CTM) est examinée depuis
l
exercice 2015 jusqu
à la période la plus récente
, l’année 2015 étant prise
en compte
pour évaluer les aspects financiers de reprise de
l’ex
-
département et de l’ex
-région
Martinique.
Les recommandations formulées par la chambre sur les précédents contrôles de la gestion
du département (2011) et de la région (2013), n
ont pas toutes été suivies d
effet.
Plusieurs d
entre elles
n’ont pas été mises en œuvre
. Selon les réponses apportées par la
CTM sur les suites données aux recommandations concernant la gestion du département,
sur 19 recommandations formulées par la chambre régionale des comptes, 13 ont été
mises en œuvre (68
%
), deux partiellement mises en œuvre, trois non mises en œuvre et
une est devenue sans objet. S
agissant des suites concernant la gestion de la région, sur
18 recommandations,
seules quatre ont été mises en œuvre (
22 %), quatre partiellement
mises en œuvre, six non mises en œuvre, une devenue sans objet et trois restées sans
réponse.
Les vérifications opérées sur les obligations relatives à la prévention des conflits
d’intérêts démontrent qu’elles sont imparfaiteme
nt respectées, notamment les
déclarations d’intérêts ou de patrimoine dues à la HATVP par le président de l’assemblée
de Martinique, le président du conseil exécutif, les conseillers de l’assemblée de
Martinique et les conseillers exécutifs de Martinique q
ui disposent d’une délégation de
signature, les directeurs et directeurs-adjoints, les chefs de cabinet, les directeurs
généraux-adjoints et le directeur général des services. Lorsque les déclarations ont été
réalisées, celles-
ci n’ont pas systématiquement
respecté les délais légaux de déclaration ;
plusieurs d’entre elles ont été déposées en régularisation pendant l’instruction du présent
contrôle, notamment celles des cinq directeurs généraux-
adjoints et d’un élu
; un
conseiller de l’exécutif ayant délégation de signature ne s’est toujours pas conformé à
cette obligation.
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
11
L
ouverture du contrôle a été signifiée aux ordonnateurs successivement en fonction
durant la période contrôlée par lettres en date du 27 février 2020, ainsi qu
au président de
l
assemblée de Martinique par lettre du 3 mars 2020. Le confinement consécutif à la crise
sanitaire de la Covid-19 a conduit à tenir les entretiens d
ouverture du contrôle par
téléphone, le 26 mai 2020 avec M. Alfred MARIE-JEANNE, ordonnateur en fonction, et
le 1
er
et le 4 juin avec, respectivement, M. Serge LETCHIMY et Mme Josette MANIN,
anciens ordonnateurs. M. Claude LISE, président de l
assemblée de Martinique, a été
informé de ce contrôle lors d’un entretien avec le rapporteur
.
Les entretiens de fin de contrôle ont eu lieu le 20 juillet 2020 avec M. Alfred
MARIE-JEANNE, ordonnateur en exercice, le 17 juillet 2020 avec Mme Josette MANIN,
les 9 juillet et 10 août 2020 avec M. Serge LETCHIMY,
un second entretien s’étant révél
é
nécessaire en raison de la communication tardive de pièces par la CTM. Un entretien a
aussi eu lieu en fin de contrôle avec le président de l
assemblée de Martinique,
le 6 juillet 2020.
Après avoir entendu le rapporteur et le procureur financier en ses observations, la
chambre a arrêté, le 17 novembre 2020, un rapport d
observations provisoires qui a été
transmis à M. Alfred MARIE-JEANNE le 29 décembre 2020, avec accusé de réception
du 4 janvier 2021. Des extraits du rapport provisoire ont été communiqués, le
30 décembre 2020, aux anciens ordonnateurs des deux anciennes collectivités qui en ont
accusé réception le 6 janvier 2021.
Par ailleurs, le 30 décembre 2020, des extraits du rapport provisoire ont de même été
communiqués à six tiers mis en cause, qui en ont accusé réception le 4 janvier 2021.
L’ordonnateur en fonction, M.
Alfred MARIE-JEANNE, a adressé une réponse à la
chambre, le 26 janvier
2021. L’ancien président de l’ex
-conseil régional de la Martinique,
M. Serge LETCHIMY, a adressé la sienne le 1
er
mars
2021, complétée d’une audi
tion par
la chambre, à sa demande, le 23 mars 2021. Un tiers a adressé une réponse
le 26 janvier 2021.
Notification du rapport provisoire et réponses obtenues
Destinataire du ROP
Date d’envoi
Date
d’accusé de
réception
Date de
réponse
Enregistrement
au greffe
M. Alfred MARIE-JEANNE,
président-du conseil exécutif de la CTM
29 déc. 2020
4 janv. 2021
4 mars 2021
5 mars 2021
Mme Josette MANIN,
députée, ancienne présidente-
de l’ex
-conseil
départemental de la Martinique
30 déc. 2020
6 janv. 2021
Pas de réponse
M. Serge LETCHIMY,
ancien président de l’ex
-conseil régional de la
Martinique
30 déc. 2020
6 janv. 2021
28 fév. 2021
1
er
mars 2021
Source : chambre régionale des comptes de la Guadeloupe
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
12
Notification des extraits du rapport provisoire et réponses obtenues
Destinataire extraits du ROP
Date d’envoi
Date
d’accusé de
réception
Date de
réponse
Enregistrement
au greffe
M. Claude LISE
Président de l’assemblée de Martinique
30 déc. 2020
4 janv. 2021
Pas de réponse
M. Yann MONPLAISIR
Vice-président de
l’assemblée de Martinique
30 déc. 2020
4 janv. 2021
Pas de réponse
M. Daniel MARIE-SAINTE
Conseil exécutif de l’assemblée de Martinique
30 déc. 2020
4 janv. 2021
Pas de réponse
M. Francis CAROLE
Conseil exécutif de l’assemblée de Martinique
30 déc. 2020
4 janv. 2021
Pas de réponse
M. Marcel CLODION
Collaborateur de cabinet de l’assemblée de
Martinique
30 déc. 2020
4 janv. 2021
Pas de réponse
Mme Maguy MARIE-JEANNE
Directrice des affaires extérieures, de la
communication et de l’évaluation des
politiques
publiques de l’assemblée de la Martinique
30 déc. 2020
4 janv. 2021
15 janv. 2021
26 janv. 2021
Source : chambre régionale des comptes de la Guadeloupe
Après avoir délibéré le 21 mai 2021, la chambre formule les observations définitives
ci-après développées, s
agissant de la préparation financière et comptable du département
et de la région à la création de la CTM, de la fiabilité des comptes de la CTM et de sa
trajectoire financière depuis 2016, de ses perspectives financières et des premiers effets
de la crise sanitaire de la Covid-19
.
Ce rapport est communiqué au président du conseil exécutif en fonction et à ses
prédécesseurs qui disposent d
un délai d
un mois pour, s
ils le souhaitent, y apporter une
réponse qui engagera leur seule responsabilité. Ces réponses seront annexées au rapport
avant qu
il devienne public.
Ce rapport devra être communiqué par le président de la collectivité au conseil
d
administration lors de la plus proche réunion suivant sa réception. Il fera l
objet d
une
inscription à l
ordre du jour, sera joint à la convocation adressée à chacun de ses membres
et donnera lieu à un débat.
Ce rapport sera, ensuite, communicable à toute personne qui en ferait la demande et mis
en ligne sur le site internet des juridictions financières www.ccomptes.fr/fr/antilles-
guyane.
1
UN DÉPARTEMENT ET UNE RÉGION QUI SE SONT MAL
PRÉPARÉS
À
LA
CRÉATION
DE
LA
NOUVELLE
COLLECTIVITÉ
Aux termes de l’article L.
7211-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT),
la Martinique constitue une collectivité territoriale de la République régie par l
article 73
de la Constitution, qui exerce les compétences attribuées à un département d
outre-mer
et à une région d
outre-mer «
et toutes les compétences qui lui sont dévolues par la loi
pour tenir compte de ses caractéristiques et contraintes particulières
». L’article
L. 7211-2 du même code précise que «
la collectivité territoriale de Martinique succède
au département de la Martinique et à la région de Martinique dans tous leurs droits et
obligations
».
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
13
Conformément à l’article 21 de la loi n°
2011-884 du 27 juillet 2011 modifié par le III de
l’article 10 de la loi n°
2015-29 du 16 janvier 2015, la création de la collectivité territoriale
de Martinique (CTM) est entrée en vigueur
« à compter de la première réunion de
l
assemblée de Martinique suivant sa première élection en décembre 2015,
concomitamment au renouvellement des conseils régionaux
»
, le 18 décembre 2015.
La création de la CTM trouve son origine dans la « déclaration de Basse-Terre »,
du 1
er
décembre 1999 des présidents de conseil régional de Guadeloupe, de Guyane et de
Martinique. La révision constitutionnelle n° 2003-276 du 28 mars 2003 relative à
l
organisation décentralisée de la République, a ouvert la possibilité de création d
une
collectivité nouvelle par la loi.
En Martinique, après une première consultation des électeurs en 2003, deux référendums,
le 10 et le 24 janvier 2010, ont approuvé le principe d
une assemblée unique, remplaçant
le conseil général et le conseil régional. La création de la collectivité territoriale a ainsi
été décidée par la loi n° 2011-884 du 27 juillet 2011 relative aux collectivités territoriales
de Guyane et de Martinique.
1.1
Une phase préparatoire distraite de ses objectifs
1.1.1
Le rôle de la commission tripartite chargée de préparer la création de la CTM
Prévue par l’article 15 de la
loi n° 2011-884 du 27 juillet 2011 relative aux collectivités
territoriales de Guyane et de Martinique, une commission tripartite a été créée par l’arrêté
n° 2012054-0012 du 23 février 2012 du préfet de la Martinique. Présidée par le préfet,
elle se composait de quatre représentants de l’É
tat, de quatre représentants de la région et
de quatre représentants du département.
Cette commission tripartite devait être consultée sur les projets d’ordonnance et de décrets
devant instituer la collectivité territoriale. En vertu de la loi, elle était «
chargée d
évaluer
et de contrôler la réalité des charges, engagements et garanties du département et de la
région transférés à la collectivité unique au moyen de comptes certifiés présentant les
situations comptables au 1
er
janvier de l
année de la disparition du département et de la
région
». Elle pouvait organiser des concertations avec les organisations syndicales et
entendre toute personne extérieure.
La commission a bien enregistré les observations respectives de la région et du
département sur les projets d
ordonnance et a consulté les organisations syndicales. Elle
n
a cependant pas évalué ni contrôlé les charges, engagements et garanties à transférer
mais a tenté de chiffrer
a priori
des coûts de création de la nouvelle collectivité pour
solliciter une compensation par l
État. Elle a ainsi évalué à 52
M€
ces coûts supposés qui
ne sont en aucune façon vérifiés à la lecture comparée des comptes de gestion de 2015 et
de 2016 par rapport à la période antérieure.
1.1.2
La production des groupes de travail techniques inter-collectivités
Les deux collectivités ont disposé de quatre ans pour se préparer à la création de la
collectivité unique. Elles ont, à cet effet, mis en place des groupes de travail techniques.
Cette préparation
s’est cependant révélée très
insuffisante (voir
infra
).
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
14
Les deux enjeux principaux étaient d’améliorer la fiabilité des comptes et d’adopter des
méthodes communes pour converger à la date prévue.
À partir du 1
er
janvier 2014, la région de Martinique, le département de Martinique et les
établissements publics de ce dernier ont appliqué le référentiel budgétaire et comptable
M57, qui devait les préparer sur les plans budgétaire et comptable. Cependant, les deux
col
lectivités n’ont pas choisi la même version de la nomenclature M57
.
C
e qui était prévu en termes de transition a été peu mis en œuvre, la CTM s’appuyant
peu, à sa création, sur la production des groupes de travail techniques. La seule continuité
a été assurée par la poursuite à l
identique de l
antériorité (reprise des délibérations, actes
et contrats antérieurs), les cadres qui avaient préparé la création de la nouvelle collectivité
ayant, pour la plupart, quitté leur poste en 2016.
Dans sa réponse aux observations provisoires, M. Serge LETCHIMY apporte la précision
suivante : «
la continuité de service pour les citoyens et le chantier humain visant à
préserver le personnel des deux collectivités dans son ensemble sont des enjeux qui ont
aussi fait partie de nos préoccupations aux côtés des exigences financières que vous
rappelez
».
Le bilan qualitatif du processus préparatoire à la création de la nouvelle collectivité, de
2012 à 2015, est faible : mal préparée, la collectivité nouvelle continue de porter en elle
les travers des deux précédentes collectivités qu
elle n
a guère corrigés en cinq ans.
En réponse au rapport d
observations provisoires, M. Alfred MARIE-JEANNE observe
que la création de la CTM a engendré de nombreuses difficultés en termes
organisationnels telles que l
absence de cadre de gestion fusionnant les budgets ou la non
reprise intégrale des éléments de comptabilité lors de la bascule informatique en juin
2015. S
agissant du contexte d
impréparation et du délai de mise en place de la nouvelle
organisation fusionnée relevés par le rapport, le président du conseil exécutif souligne
que
« la nouvelle collectivité de plus de 4 000 agents, unique en son genre, induit
naturellement des changements d
ampleur en terme de management et de mobilité »
.
1.2
L
impréparation budgétaire et comptable de la région Martinique
La fiabilité des comptes des administrations publiques est un principe constitutionnel
depuis 2008 (article 47-2 de la Constitution). Elle est liée au consentement à l
impôt et
contribue au bon fonctionnement de la démocratie locale. Les citoyens, comme les
membres des assemblées délibérantes, doivent disposer d
une information générale,
complète, lisible et fiable sur les actions et les décisions engageant les finances locales.
La sincérité des comptes publics locaux
conditionne aussi l’
allocation optimale des
ressources. Sans sincérité, le niveau de performance de l
action publique ne peut pas être
mesuré.
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
15
1.2.1
Une information et une sincérité budgétaires insuffisantes
1.2.1.1
Des
lacunes dans l’information obligatoire
Les comptes administratifs de 2014 et 2015 de la région ne fournissent pas ou altèrent un
certain nombre d’
informations rendues obligatoires par la nomenclature M57. Les
comptes administratifs sont très incomplets.
Quarante-quatre états annexes ne sont pas conformes à la nomenclature M57. Plusieurs
autres annexes obligatoires ne sont pas remplies ; même parmi celles qui le sont, un
certain nombre d
informations requises ne figurent pas.
Les autorisations de programme (AP) et d
engagement (AE) ne portent pas toujours des
dénominations claires. Plusieurs portent le même no
m. S’
agissant d
engagements
pluriannuels, elles doivent porter un titre explicite et concerner une seule opération ou un
ensemble d
opérations constituant un projet unique ou de même nature ne pouvant être
dissocié.
1.2.1.2
Des restes à réaliser non sincères
Le compte de gestion (du comptable public)
d’une collectivité
arrête les engagements
dûment titrés ou mandatés et le compte administratif (de l
ordonnateur) fournit, en plus,
une information sur les restes à réaliser en recettes et en dépenses qui n
apparaissent pas
d
ans les écritures du comptable car ils n’ont pas encore donné lieu à titre de recette ou
mandat de paiement émis par l’ordonnateur et pris en ch
arge par le comptable.
Le compte administratif de 2015 du conseil régional a été adopté le 29 mars 2016 par la
collectivité territoriale de Martinique et transmis par le préfet de la Martinique à la
chambre régionale des comptes, le 7 juin 2016, en raison du déficit voté qui excédait la
tolérance permise par le code général des collectivités territoriales.
Dans son avis n° 2016-0147 du 14 septembre 2016, la chambre a corrigé le résultat du
compte administratif de 2015 sur la base des rattachements et des restes à réaliser (voir la
définition,
infra
) qui lui ont été présentés par la CTM et en inscrivant en recettes les lignes
de trésorerie non remboursées au 31 décembre, qui viennent légalement s
ajouter au total
des emprunts. Elle a ainsi redressé de 13,5 M
€ le résultat du compte administratif
, sur la
base des seuls documents communiqués par la CTM, pour aboutir à un excédent
de 0,5
M€.
Parmi les recettes, certaines correspondaient à des recettes encaissées en toute fin de
gestion 2015
, d’un montant de
6,845
M€,
que le payeur régional avait signalées à la CTM
par note du 16 février 2016 et qui
auraient dû faire l’objet de restes à réaliser. L
es services
de la région auraient dû éditer les titres de recettes avant la clôture de l
exercice. La CTM,
compétente pour arrêter les comptes administratifs des conseils régional et départemental
auxquels elle succédait, n
a pas confectionné le compte administratif avec l
ensemble des
données en sa possession et a fait apparaître sous sa responsabilité un déficit qui n
était
pas avéré.
La CTM a inscrit en recettes nouvelles en 2016 ces recettes qui auraient dû figurer en
restes à réaliser de l
année précédente.
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
16
Le législateur n
a pas conféré aux chambres régionales des comptes le pouvoir de
modifier les écritures des comptes administratifs votés. N
ayant pas constaté de déficit
après examen des restes à réaliser, au sens de l
article L. 1612-14 du CGCT, la chambre
n
a pas pro
posé de mesures de redressement à mettre en œuvre sur les exercices suivants.
1.2.1.3
Une erreur signif
icative dans l’annexe relative aux AP et AE du compte
administratif de 2015
Les autorisations d
engagement (AE) en matière de fonctionnement et les autorisations
de programme (AP)
en matière d’
investissement fixent les plafonds de dépenses des
engagements juridiques à venir. Les crédits de paiement (CP) représentent la limite
supérieure des dépenses pouvant être ordonnancées ou payées pendant l
année pour la
couverture des engagements identifiés et chiffrés dans les AP et les AE.
Au 31 décembre 2015, selon le compte administratif 2015 voté en 2016, le montant des
AP votées s
élevait à 17 226
M€ et celui des AE à
6 031
M€. Ces montants correspondent
à une programmation, respectivement, de 76 et de 51 années au rythme des réalisations
de 2015.
Cette erreur manifeste n
a pas été corrigée ni détectée par l
administration de la CTM au
moment du vote du compte administratif. Le montant des AP/AE figurant au compte
administratif de 2015 ne correspond pas aux autorisations budgétaires votées pour 2015
(budget primiti
f et décisions budgétaires modificatives de l’ex
-région).
AP/AE votées en 2015 par la région Martinique (
M€
)
CA
2014
BP
2015
DBM
15-1081-1
DBM
15-1963-1
DBM
15-1496-1
DBM
15-2467-1
Total
budget
2015
CA
2015
Différence
(CA-budget)
pour 2015
AP votées
2 129,54
169,00
214,20
14,67
31,54
823,40
1 252,81 17 226,10
15 973,29
AE votées
784,30
28,00
182,42
6,90
31,50
183,49
432,31
6 031,20
5 598,89
Source : budget primitif et décision budgétaire modificative de 2015 de la région Martinique
Le total des autorisations de programme affectées qui engageait réellement la région
au 31 décembre 2014, s
élevait à 1 231,81
M€. Celui des autorisations d’
engagements
s
élevait à 652,6
M€. Ces montants constituent une charge pour la nouvelle collectivité
de, respectivement, 5 et 4,5 ans de programmation au rythme de réalisation de 2014.
Comme mentionné dans l
avis budgétaire de 2016
2
, le total des autorisations de
programme engagées et non soldées sur les exercices antérieurs s
élevait à 2 846
M€ à la
fin de 2015, et celui des autorisations d
engagement à 1 627
M€.
2
Avis n° 2016-0147 du 14 septembre 2016
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
17
1.2.2
Un
niveau d’
amortissements beaucoup trop faible
1.2.2.1
La tenue de l’inventaire ne s’est pas améliorée depuis le précédent rapport
d’observations de la chambre
En vue de préparer le passage à la CTM, la région a édité son inventaire le 30 avril 2015,
sous la forme de deux fichiers, l
un relatif à l
inventaire foncier, le second à l
inventaire
mobilier.
Le guide des opérations d
inventaire, publié en juin 2014 par le Comité national de
fiabilité des comptes locaux, fait reposer le principe général de l
élaboration de
l
inventaire régional sur la connaissance du coût historique de chaque élément du
patrimoine régional.
L
inventaire physique de la région était insuffisant :
-
il était incomplet, s
agissant des routes par exemple ;
-
il n
attribuait pas de numéro d
inventaire aux biens recensés et ne pouvait pas
être rapproché de l
actif financier de l
ordonnateur ;
-
la valeur historique des biens mobiliers n
’était
pas indiquée, ce qui empêchait
tout rapprochement avec l
état de l
actif ;
-
s
agissant des biens immobiliers, la Maison de la canne, l
écomusée et la
Maison des volcans, ou encore tous les bâtiments de l
AFPA, figuraient à
l
euro symbolique.
L
évaluation à l
euro symbolique est utilisée lorsqu
un bien est transféré par une
collectivité à une autre à titre gratuit. La valeur à l
euro symbolique est inscrite au bilan
de la collectivité qui remet l
immobilisation et qui traduit une subvention de la valeur
réelle du bien à la collectivité bénéficiaire du transfert. Dans le patrimoine de la région
qui reçoit ces biens, c
est la valeur vénale, estimée par les domaines, qui doit figurer à
son inventaire et à son actif.
Le précédent rapport d
observations de la chambre (2013), qui portait sur les exercices
2006 à 2012, avait déjà formulé des remarques critiques sur la tenue de l
inventaire. Le
rapprochement avec l
’actif du comptable était
impossible dans ces conditions.
Dans sa réponse au rapport d
observations provisoires, M. LETCHIMY observe qu
il
«
ne saurait emporter [porter] la responsabilité des erreurs et négligences du passé tel
le cas des biens immobiliers qui figuraient à l
euro symbolique
» ou les routes transférées
à l
État en 2007, leur inventaire n
ayant démarré qu
en 2010, et observe qu
une
régularisation comptable est intervenue en 2015, portant sur un périmètre de travaux de
11 années.
1.2.2.2
Une régularisation comptable tardive d
opérations achevées depuis plusieurs
années
Les
«
Immobilisations
en
cours
»
(chapitre
23)
s’élevaient
à
266
M€
au
31 décembre 2015. Elles s
élevaient à 1 386
M€ au 1
er
janvier de la même année. Leur
part représentait 87,5 % de l
actif corporel de la région.
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
18
Afin de préparer la création de la collectivité unique, la région a procédé en 2015 à la
régularisation massive d
apurement du compte 23 par le compte 21 «
Immobilisations
corporelles
», pour tenir compte d
opérations achevées.
Écritures du compte 21 «
Immobilisations corporelles
»
et du compte 23
« Immobilisations en cours »
en 2015 (
)
Balance d
’entrée
Débit
Opérations totales
Débit
Opérations totales
Crédit
Solde
Débit
Compte 21
233 847 909
1 494 321 658
109 109 968
1 385 211 690
Compte 23
1 386 587 439
1 524 172 186
1 257 532 992
266 639 194
Source : compte de gestion 2015, région Martinique
Au regard du montant moyen de dépenses du compte 23 de 2013 à 2015, le montant
basculé au compte 21 représente 11 années de travaux. La région a donc tardé à virer au
compte 21 des opérations achevées depuis longtemps.
En admettant une durée moyenne de travaux de trois ans, la région avait jusqu
à huit ans
de retard dans la mise en œuvre de cette procédure comptable, avec de lourdes
conséquences sur les amortissements : la comptabilisation des amortissements doit
commencer en effet dès l
année qui suit l
inscription des opérations au compte 21. De ce
fait, les amortissements n
ont pas commencé alors même que les biens, dont la durée de
vie est assise sur celle de leur perte de valeur comptable, ont été mis en œuvre et ont donc
commencé à voir leur durée de vie se réduire.
Il convient que la CTM régularise les amortissements en retard concernant les opérations
transférées du compte 23 au compte 21. Ce rattrapage des amortissements représente
statistiquement un montant de l
ordre de 128
M€
mais le montant définitif ne peut être
établi que par un travail fin sur les dates respectives d
achèvement des différentes
opérations (voir
infra
).
1.2.2.3
L
insuffisance des amortissements de la région a contribué à masquer la réalité
des comptes
L
information sur les amortissements présentée dans le compte administratif de 2015 de
la région est déficiente : cinq annexes obligatoires sont absentes et cinq autres ne sont pas
remplies.
L
amortissement pour dépréciation est la constatation comptable d
un amoindrissement
de la valeur d
un élément d
actif résultant de l
usage ou du temps. Il est assis sur la durée
de vie probable du bien.
La région était tenue depuis 2005 de procéder
à l’
amortissement d
un certain nombre
d
immobilisations incorporelles (notamment l
intégralité du compte 204 «
Subventions
d
équipement versées
») et corporelles (les bâtiments, installations, matériels).
En vertu de l
article R. 4321-1 du CGCT, la durée d
amortissement des immobilisations
est fixée par délibération de la région. Les durées établies par les délibérations en date du
15 avril 2004 et du 13 décembre 2012 n
appellent pas d
observation. Cependant, plusieurs
duré
es d’amortissement n’on
t pas été précisées.
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
19
Le tableau d
amortissement sert à déterminer le montant des dotations à inscrire chaque
année au budget (compte 681). En l
absence de suivi rigoureux par l
ordonnateur,
l
inscription des amortissements en 2014, par défaut de reprise des amortissements
relatifs aux acquisitions antérieures, est erronée et celle de 2015 (pour un total de 44
M€)
est insincère en l
absence de tableau des amortissements joint au compte administratif.
Les dotations aux amortissements ont été insuffisantes en montant en 2014 et en 2015 ;
les bâtiments sont très largement sous-amortis, avec un renouvellement apparent de
199 ans. S
agissant spécifiquement de l
année 2015, la région a inscrit 10,9
M€
d
amortissements au budget primitif mais n
en a mandaté que 7,9
M€.
La
CTM subit aujourd’hui les
sous dotations aux amortissements de la région :
-
l
amortissement des biens acquis avant 2005 était facultatif ;
-
la région n
a commencé à amortir ses biens et les subventions versées
qu
en 2010 ; les amortissements des années 2005 à 2009 restent donc à
reconstituer ;
-
les dotations aux amortissements des exercices 2010 à 2015 ont été
notoirement insuffisantes.
Le montant total des amortissements en retard n
est pas connu, faute de rapprochement
possible de l
inventaire tenu par l
ordonnateur et de l
actif tenu par le comptable. Une
évaluation n
’ét
ait possible qu
au terme de travaux préalables approfondis que la région
n
’a
pas lancés.
Selon les estimations de la chambre, le retard d
amortissement au 31 décembre 2015
s’élèverait, statistiquement, à 886,9
M€
. En sus, un second déficit d
amortissements
concerne la reprise d
ancienneté réelle des travaux achevés ayant figuré au compte 23
jusqu
en 2015, comme indiqué
supra
, pour 128
M€ environ.
Le total des amortissements
en retard atteindrait donc 1 015
M€.
Imputés à l
actif de la collectivité, les amortissements rendent compte de la dépréciation
de la valeur du patrimoine régional. Le défaut d
inscription des amortissements surévalue
la valeur réelle du patrimoine de la région Martinique d
un milliard d
euros.
La région n
a pas recouru à la procédure de neutralisation (voir
infra
) qui lui aurait
permis, sous conditions, d’alléger la charge du rattrapage des amortissements
. Après
neutralisation,
il
serait
resté
de
l
ordre
de
393
M€
d’
amortissements
non
«
neutralisables
».
Symétriquement, les subventions d
équipement reçues n
’ont pas fait l’objet de
la reprise
obligatoire. Cette procédure comptable complète celle des amortissements. Elle réduit la
charge de l
amortissement en prenant pour valeur de référence de chaque bien son coût
net des subventions reçues. Ainsi, le passif du bilan, qui retrace les capitaux propres et
les dettes de la collectivité, est surévalué du fait que les subventions d
investissement
reçues et comptabilisées en fonds propres n
ont pas été amorties.
Le montant des amortissements, net des subventions et des fonds d
investissement reçus,
s
élève à environ 750
M€ (comptes 131 «
Subventions d
investissement
» et 133 «
Fonds
affectés à l
investissement
»).
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
20
La durée d
étalement de la reprise des subventions est, comme celle des amortissements,
fonction de la nature des investissements financés. L
estimation globale du montant de la
reprise est, par conséquent, seulement un ordre de grandeur : en supposant qu
il s
agisse
essentiellement de construction de bâtiments et de travaux d
infrastructure d
intérêt
national, 188
M€ seraient à reprendre, sous réserve de l’
inventaire des actifs à diligenter.
La région n
a pas fait usage, non plus, de la faculté qui lui était offerte de procéder à la
neutralisation de cette reprise. Le travail de rapprochement des subventions reçues et du
passif reste à effectuer par la CTM.
1.2.3
Des provisions pour risques largement sous-estimées
L
état IV B3 du compte administratif
détaillant l’état des provisions
constituées n
’a pas
été rempli, ni dans le compte administratif de 2014 ni dans celui de 2015.
Les provisions traduisent comptablement un risque ou une charge probable ou, encore,
d
étaler une charge à venir. En vertu du principe comptable de prudence, la région devait
enregistrer les pertes financières probables dès que de telles pertes étaient envisagées.
La région avait provisionné 16,3
M€ pour
des litiges, pour des garanties d
emprunts et
pour
d’
autres risques (comptes 151). Elle n
a pas constitué de provision pour dépréciation
de comptes de tiers (compte 491). Or, deux risques justifiaient de constituer une telle
provision
, étant noté qu’une
provision doit être constituée dès l
apparition du risque et
pour le montant susceptible d
être engagé dans l
année.
En premier lieu, les créances sur les redevables et débiteurs divers justifiaient de réévaluer
le montant de la provision associée au risque de non-paiement :
-
les créances sur les redevables et autres débiteurs ont triplé entre 2012 et 2015
(comptes 411 «
Redevables
», 416 «
Créances douteuses
» et 4672 «
Débiteurs
divers
») ; le taux de recouvrement sur exercices antérieures atteignait 73,6 % ;
-
compte-tenu de l
ancienneté des créances à risque, une provision de la moitié
des créances douteuses et de 20 % des créances contentieuses aurait été
prudente, à hauteur, respectivement, de 4 866 740
et de 709 664
.
En deuxième lieu, le non-encaissement des remboursements de prêts accordés par la
région justifiait de relever de 2,2
M€
le montant de la provision prévue, en raison de
l
absence totale de remboursement par les emprunteurs en 2014 et en 2015 :
-
l
encours total des prêts (compte 2748) et avances remboursables (compte
2745) s’élevait
à 7,8
M€ en balance de sortie au 31 décembre 2015, en
diminution de 28,32 % depuis 2012 ;
-
le tableau figurant à l
annexe IV B6 des comptes administratifs de 2014 et 2015
est très incomplet, s
agissant des prêts, et ne présente pas les avances
remboursables ; il rend compte néanmoins de la conclusion de sept nouveaux
prêts non retracés au compte de gestion ;
-
en l
absence de ce détail sur les avances remboursables, il n
est pas possible de
déterminer si une provision était nécessaire ;
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
21
-
en revanche, les prêts n’on
t donné lieu à aucun remboursement, ni en 2014 ni
en 2015 ; le total de l
annuité en capital s
élevait à 1,6
M€ en 2015, sans les
intérêts ; par conséquent, la région aurait dû constituer une provision pour
dépréciation d
actif à la hauteur du montant du principal, inscrit au compte de
gestion en balance de sortie de 2013, soit 2,2
M€.
En sus, au 31 décembre 2015, parmi les redevables et autres débiteurs des divers comptes
«
Amiables
», demeuraient 3 628 230
€ de créances à recouvrer antérieures à 2011, les
plus anciennes remontant à 1994. L
encaissement de ces créances était déjà fortement
compromis et aurait dû justifier une provision en vue d
admission en non-valeur.
Un juste montant de provisions rend compte de la réalité des charges et contribue à la
fiabilité des comptes d
’un
organisme. En l
absence d
admission en non-valeurs qui
seraient venues réduire le montant des provisions, le total des provisions aurait dû s
élever
à 27,8
M€
au lieu de 16,3
M€.
Dans sa réponse aux observations provisoires, M. LETCHIMY souligne que les
provisions ont été constituées à un niveau significatif qui correspond à 58,6 % du chiffre
de 27,8
M€ résultant des calculs de la chambre alors que celles
-ci étaient inexistantes
avant 2010 dans les comptes de la collectivité régionale.
1.2.4
Cinq emprunts sortis indûment de l
état de la dette
Au compte de gestion (du comptable public), le capital restant dû des emprunts
(compte 1641 «
Emprunts
») qui s
élevait à 236 239 696
€ en balance d’
entrée, a
diminué de 103 116 600
€,
conduisant, avec les opérations budgétaires de l
année
enregistrées au compte administratif (tenu par l
ordonnateur), à un solde créditeur
de 187 030 664
€ au 31 décembre 2015
pour ce compte.
Le débit de 103,1
M€
enregistré en 2015 correspond au transfert au Syndicat mixte du
transport en commun en site propre (SMTCSP) des opérations sous maîtrise d
ouvrage
publique conduites par la région pour la réalisation du TCSP. Au terme de celle-ci, la
région les a affectées au syndicat mixte.
La mise à disposition d
un bien intervient dans le cadre d
un transfert de compétences
entre entités publiques, dès lors que ce bien est nécessaire à l
exercice de la compétence
transférée. La région a été maître d
ouvrage des infrastructures nécessaires au TCSP
édifiées sur son patrimoine
foncier, infrastructures qu’elle a entendu
affecter au syndicat
mixte.
L’
opération comptable n
’est cependant
pas conforme à la réglementation. En effet,
comptablement, les subventions transférables reçues par la région et l
actif correspondant
devaient accompagner l
affectation des emprunts et des infrastructures, ce qui n
a pas été
le cas
. L’
ensemble des infrastructures réalisées par la région, pour 238
M€
, n
a pas été
transféré
. L’
affectation n
’était pas complète.
La région a
d’ailleurs aussi
conservé la responsabilité du remboursement des emprunts.
En effet, aux termes de la convention susmentionnée, la région s
est engagée à
« verser
au syndicat mixte à compter de la date de transfert, les montants correspondant aux
échéances de remboursement des contrats de prêt »
(article 3 de la convention). Un
mandat a ainsi été édité le 1
er
octobre 2015, de 3 250 000
€ pour
le principal et de
1 545 481,25
€ pour les intérêts.
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
22
Il
s’agit d’engagements hors bilan à hauteur de 103
M€,
qui devaient apparaître comme
tels dans les annexes du compte administratif. Le compte administratif de 2015 de la
région ne rendait compte que des deux emprunts « CMQ » (AFD) dans son
annexe IV C1.1 consacrée aux engagements hors bilan, et non des trois autres emprunts,
garantis et payés à 100 %.
La sortie des emprunts des comptes de la région a ainsi réduit artificiellement son
endettement, alors même qu
elle a conservé contractuellement la charge des
remboursements et qu
elle l
a transmise à la CTM, jusqu
en 2054 pour le prêt à la durée
la plus longue. Le «
calcul du ratio d
endettement
» du compte administratif de 2015
(annexe IV C1.2) était, par conséquent, largement sous-estimé.
Au demeurant, le syndicat mixte ayant été dissous à l
issue de la réalisation de son objet,
conformément à ses statuts, la CTM a réintégré ces emprunts dans ses comptes en 2017.
1.3
L
impréparation du département de la Martinique
Le département de la Martinique disposait
d’
un budget principal et de deux budgets
annexes :
-
le laboratoire départemental d
analyses (sécurité sanitaire des aliments et de
l
eau) créé par délibération du 3 août 1977, en tant que service public
administratif ;
-
le budget de l
unité de gestion du périmètre irrigué du Sud-Est (PISE) créé par
délibération du 27 juin 1997, en tant que service public industriel et
commercial.
1.3.1
De nombreuses informations manquantes et des documents budgétaires
incomplets
1.3.1.1
La reprise des résultats antérieurs est incomplète
Les ré
sultats antérieurs à 2015 n’o
nt pas été correctement reportés dans la vue d
ensemble
du budget principal du compte administratif de 2015 (état II.A.1). Il convenait, dans cette
situation, de prendre en compte les chiffres du compte de gestion de 2014 qui indiquait
un déficit cumulé de 25 169 008,26
en section d
investissement et un excédent de
35 806 934,38
en fonctionnement. Dans cette situation, l’excédent en fonctionnement
doit couvrir le déficit d’investissement et donner lieu à virement
via
les comptes 023
«
Virement à la section d
investissement
» et 021 «
Virement de la section de
fonctionnement
».
La vue d
ensemble du compte administratif de 2015 du budget principal de l
ex-
département comporte, à la fois, les résultats reportés du budget principal et les résultats
agrégés (budget principal et budgets annexes), ce qui fausse la vision des comptes.
Cependant, la reprise des résultats antérieurs dans la vue d
’ensemble des budgets annexes
est conforme au compte de gestion (pages 128 et 174 du compte administratif de 2015).
Une dépense inscrite au budget primitif et au budget supplémentaire de 2015 n
a pas été
engagée comptablement ni inscrite en restes à réaliser (chapitre 67 «
Dépenses
exceptionnelles
», compte 67431)
. Il s’agit d’
une subvention au laboratoire départemental
d
’analyse (LDA),
de 1 453 078,57
€,
qui a été régularisée en 2016 par la CTM.
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
23
1.3.1.2
Des annexes manquantes ou incomplètement renseignées au compte administratif
de 2015
De la même façon qu
il a été observé plus haut, s
agissant de la région, les ratios
obligatoires prévus à l
article R. 3313-3 du CGCT, portés en page IA des comptes
administratifs de 2014 et de 2015, sont inexacts en raison d
une mauvaise prise en compte
de la population.
Trente-et-un états obligatoires au compte administratif de 2015 manquent. En outre, cinq
états annexes au compte administratif ne respectent pas la maquette réglementaire.
À l
inverse, le compte administratif opérait un regroupement par catégorie des concours
attribués à des tiers (état B8.1.1 déjà cité), par une présentation bienvenue indiquant le
nombre et le coût salarial des agents mis à disposition d
organismes à titre gratuit, la
nature et la valorisation des locaux et terrains mis à disposition, la prise en charge de
prestations.
1.3.1.3
Un état de la dette incomplet, comportant un emprunt toxique
L
état de la dette figurant dans les annexes obligatoires du compte administratif a pour
objet d
informer le conseil général et les citoyens sur le niveau d
endettement de la
collectivité.
L
état de la dette figurant à l
annexe B1.2 du compte administratif de 2015 est incomplet
et ne correspond pas aux données du compte de gestion. Un écart apparaît aussi au compte
administratif de 2014 (1 549 600
€). En
l
absence de justification de cet écart, par
principe, c
est la comptabilité du comptable public qui atteste des comptes d
actif et de
passif, donc des comptes de dettes.
En sus, les autres annexes oblig
atoires relatives à la dette n’ont pas toutes été rempli
es
(annexes B1.5 à B1.9).
L’
encours de la dette est classifié « A » dans la proportion de 96,1 %, en référence à la
charte de bonne conduite entre les établissements bancaires et les collectivités locales,
dite charte
Gissler
: il s
agit d
emprunts ne présentant pas de risque.
Toutefois, un emprunt structuré de 9,8
M€, contracté auprès de la banque Dexia et géré
depuis 2013 par la Société de financement local - Caisse française de financement local
(SFIL-CAFFIL), représentait un risque pour la collectivité départementale et était traité
selon les procédures d
assistance aux collectivités pour en limiter les risques.
1.3.2
Une information comptable médiocre
1.3.2.1
Un patrimoine non connu de manière exhaustive
Le département disposait d
un inventaire physique de son patrimoine qui n
’était,
cependant, ni exhaustif, s
agissant des biens recensés, ni complet s
agissant des
informations présentées.
Un état de l
actif figure pour les deux budgets annexes dans les états du compte
administratif de 2015. Toutefois, celui du budget principal est incomplet.
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
24
Au 31 décembre 2015, l
’actif net du
département de Martinique s
élevait à 2,7
Md€.
Cependant, les immobilisations incorporelles et corporelles n
étaient pas suivies de
manière exhaustive.
Dans ces conditions, le rapprochement de l
inventaire et de l
actif n
est pas possible.
1.3.2.2
Des dotations aux amortissements manifestement insuffisantes
Entreprise dès 2005 conformément à l
obligation légale, la dotation aux amortissements
a été insuffisante jusqu
en 2010 par rapport au montant des investissements annuels, tant
pour les immobilisations incorporelles que pour les immobilisations corporelles, à
l
exception des réseaux et installations de voirie dont l
amortissement est facultatif.
Par ailleurs, bien que facultatif, l
amortissement des biens acquis avant 2004 n
’a
pas été
comptabilisé. Or, le renouvellement de ces biens doit être financé. La procédure de
neutralisation pour les bâtiments et les subventions d
équipement (voir
supra
), qui permet
de mettre à jour l
actif sans pénaliser la section de fonctionnement, n
a pas été utilisée.
La durée observée des amortissements est correcte, sauf en ce qui concerne les bâtiments
et les «
Autres immobilisations incorporelles
».
Cependant,
le
montant
cumulé
d
amortissements
ne
permet
pas
un
entretien/renouvellement satisfaisant du patrimoine bâtimentaire et des collèges en
particulier, avec un taux de renouvellement apparent de 386 ans.
Le département aurait dû amortir de l
ordre de 741
M€ de plus qu’
il ne l
a fait de 2005 à
2015. Il n
a pas, non plus, procédé à reprise des subventions transférables reçues (de
l
ordre de 84,8
M€).
1.3.2.3
Des provisions insuffisantes
Le principe de sincérité comptable impose aux collectivités locales de constituer une
provision dès l
apparition d
un risque sérieux. Aux termes des articles L. 3321-1 et
D. 3321- 2 du CGCT, les provisions constituent des dépenses obligatoires. Outre le risque
de souscription de produits financiers expressément visé par le CGCT, on entend par
provision la couverture
ab initio
de risques tels que :
-
l
ouverture d
un contentieux ;
-
l
ouverture d
une procédure collective, susceptible de mettre en jeu les
garanties d
emprunts, les prêts et créances, les avances de trésorerie et les
participations en capital accordés par la collectivité à l
organisme faisant
l
objet de la procédure collective ;
-
le recouvrement compromis de restes à recouvrer.
Au compte de gestion, à la fin de 2015, le montant provisionné s
élevait à 10 176 228,84
dont :
-
1 432 634
au titre des provisions pour litiges et contentieux ;
-
1 529 000
au titre des provisions pour garanties d
emprunts ;
-
7 214 594,84
au titre des provisions pour dépréciation de comptes de tiers.
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
25
Le compte administratif présente, dans son annexe B3.1, un total de provisions de
10,3 M
€, avec un écart positif de 170
000
par rapport au compte de gestion.
Trois des cinq types de contentieux listés au compte administratif de 2015 n
’o
nt pas donné
lieu à provision alors qu
ils remontaient à 2010 et à 2011. En outre, la provision du
conten
tieux avec l’A
ssociation du centre antillo-guyanais pour la promotion sanitaire et
sociale de l
enfant (ACAPSSE) était sous-dotée de 3,2
M€.
Au 31 décembre 2015, le total des créances passées en phase contentieuse s
élevait
à 29,5
M€. La provision pour dé
préciation de comptes de tiers, de 7,2
M€
, ne couvrait
que 24,41 % du risque d
irrécouvrabilité, ce qui est insuffisant au regard de leur
ancienneté.
Bien qu’il n’ait pas été possible de quantifier l’ensemble des risques encourus par le
département, les provisions étaient sous-
estimées au total d’au moins 10
M€.
Les créances douteuses cumulées au solde débiteur du compte 416 étaient de l
ordre de
5,6
M€. Le département ne les a pas admises en non
-valeur. Une telle procédure aurait
contribué à assainir ses comptes au moment de la création de la CTM.
2
UNE FIABILITÉ INSUFFISANTE DES COMPTES
Des faiblesses préoccupantes affectent encore la fiabilité des comptes de la CTM malgré
bientôt cinq ans d
existence, la plupart des défauts relevés
supra,
concernant la région et
le département, n
ayant pas été traitée.
2.1
Des incohérences dans la reprise par la CTM des comptes consolidés du
département et de la région
2.1.1
La reprise des soldes des anciennes collectivités
Le contrôle de la reprise, en balance d
entrée, du compte de gestion 2016 de la nouvelle
région des soldes figurant en balance de sortie des comptes des anciennes collectivités,
n
a pas pu être effectué exhaustivement.
En effet, les deux anciens budgets ont été supprimés dans l
application de la direction
générale des finances publiques (DGFiP) et basculés automatiquement dans le nouveau
budget créé pour la CTM dans Hélios, dans la colonne
« Opérations non budgétaires »
.
Le même procédé a été observé lors des fusions des régions hexagonales.
Ainsi, les montants de la balance d
entrée de 2016 de la CTM ont été ajoutés aux
opérations non budgétaires au cours de l
’année
2016.
2.1.2
La reprise du patrimoine transféré
L
actif des deux anciennes collectivités n
a pas été complètement repris au compte de
gestion de 2016 de la CTM. Il n
est conforme ni à la consolidation des comptes de gestion
du département et de la région (comptes 21 «
Immobilisations corporelles
» et 27
«
Autres immobilisations financières
»), ni à l
état de l
actif du comptable ;
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
26
Comparaison des comptes de gestion (CG) consolidés de 2015
avec le compte de gestion de 2016 et l
état de l
actif
Compte
Intitulé
Consolidation
CG 2015
dépt et région
Reprise des
comptes
CG 2016 CTM
Etat de l
’actif
au 1
er
janv. 2016
204
Subventions d
équipement versées
2 217 231 542
2 217 231 542
2 305 377 465
20 (sauf 204)
Immobilisations incorporelles
170 023 847
170 023 847
173 754 173
21
Immobilisations corporelles
3 175 459 704
3 175 460 004
3 181 522 679
23
Immobilisations en cours
342 422 198
342 422 198
450 580 545
24
Immobilisations affectées…
11 429 507
11 429 507
990 079
26
Participations et créances rattachées
47 371 829
47 371 829
47 371 829
27
Autres immobilisations financières
27 902 468
28 847 920
25 540 657
Total
5 991 841 095
5 992 786 847
6 185 137 428
Sources
comptes de gestion de 2015 du département et de la région, compte de gestion de 2016 de
la CTM, état de l
actif de l
année 2016 tenu par le comptable (édition au 30 septembre 2019)
L
écart total entre la consolidation des comptes de 2015 et la reprise au compte de 2016
de la CTM s
élève à 945 752
. Il n
est pas expliqué.
L
écart entre les comptes de gestion et l
actif du comptable s
élève à 203 624 874
. Il
n
est pas expliqué non plus. Toutes les fiches de l
actif sont déclarées «
en attente
» et
l
année d
acquisition indiquée est systématiquement 2016, alors que la date réelle devrait
apparaître. Un travail de mise à jour de l
inventaire de la CTM est indispensable afin de
compléter et de corriger l
actif.
2.2
Une information budgétaire insuffisante
Avant le vote de sa première délibération budgétaire, l
assemblée de Martinique a établi
son règlement budgétaire et financier (article L. 72-101-7 du CGCT).
Ce règlement budgétaire et financier (RBF) a pour objectif de fixer :
-
les règles de structuration du budget ;
-
les modalités de gestion des AP et AE dans le respect du cadre prévu par la
loi ;
-
les modalités d
information de l
assemblée délibérante sur la gestion des
engagements pluriannuels au cours de l
exercice.
Le RBF de la CTM n
appelle pas d
’observation. Cependant, sa mise en œuvre fait l’
objet
de critiques
infra
.
2.2.1
L
information nécessaire au débat d
orientation budgétaire
Aux termes de l
article L. 72-101-3 du CGCT, dans un délai de dix semaines précédant
l
examen du budget, un débat (DOB) a lieu au sein de l
assemblée sur les orientations
budgétaires de l
exercice ainsi que sur les engagements pluriannuels envisagés, sur la
base d
un rapport d
orientations budgétaires (ROB). Formalité substantielle pour
l
adoption du budget, le DOB doit faire l
objet d
une délibération spécifique.
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
27
Le ROB qui inclut les engagements pluriannuels envisagés, l
évolution des taux de
fiscalité, ainsi que la structure et la gestion de la dette, porte aussi sur l
état d
avancement
des mesures prévues par le plan de convergence couvrant le territoire de la collectivité. Il
est préparé et présenté par le président du conseil exécutif, comme le projet de budget de
la collectivité.
Le contenu du ROB pour les exercices 2017 à 2019 pourrait être amélioré sur les points
suivants :
-
les informations relatives aux nouvelles AP envisagées sont présentées sans
bilan du stock d
autorisations de programme et des crédits de paiement
(AP/CP) en cours ;
-
les données concernant l
effectif, les rémunérations et les avantages en nature
sont présentées dans leur globalité, sans précision sur leur répartition (effectif
par catégorie de fonctionnaires, par exemple) ni sur leur évolution par rapport
aux années précédentes ou aux projections sur les années à venir.
En réponse au rapport d
observations provisoires, le président du conseil exécutif s
est
engagé à prendre en compte ces recommandations au terme du contrôle.
Lors de la même séance que celle du DOB, le président du conseil exécutif présente un
rapport sur la situation en matière de développement durable, ainsi qu
un rapport sur la
situation en matière d
égalité entre les femmes et les hommes, ces deux rapports portant
sur les politiques que mène la CTM au sein de son administration et sur le territoire qu
elle
administre, ainsi que sur les orientations et programmes de nature à améliorer cette
situation (articles L. 72-100-2 et -3 du CGCT). Le contenu de ces rapports n
appelle pas
d
observation.
Le vote du budget primitif a lieu lors d
une séance distincte de celle du ROB. Hormis
l
année de la création de la CTM en 2016, ainsi qu
en 2018, l
assemblée délibérante a
voté le budget de la CTM avant le 31 décembre de l
année N-1 (la loi exigeant qu
il soit
voté avant le 15 avril de l
année N).
S
il est à noter que le budget est ajusté à l
occasion de quatre décisions modificatives en
moyenne, le calendrier budgétaire de la CTM n
appelle pas d
observation.
2.2.2
Les annexes budgétaires obligatoires
Les documents budgétaires comportent les annexes obligatoires (article L. 72-101-14 du
CGCT) qui correspondent à la maquette réglementaire M57.
Cependant, un certain nombre d
annexes sont incomplètement ou mal renseignées :
-
la CTM ne remplit pas exhaustivement les annexes obligatoires du compte
administratif en matière d
endettement (annexe IV. B1.2) ;
-
la liste des concours attribués à des tiers ne distingue pas les associations, les
entreprises et les personnes physiques (état annexe IV. B8.1.1) ;
-
l
inventaire intitulé «
Éléments de patrimoine
» présente les actifs acquis par
la CTM depuis 2014, pour un montant total de 1 151
M€
; sur ce total, les
amortissements s
élèvent à seulement 1,66 % du montant des biens
amortissables (hors immobilisations en cours) ;
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
28
-
l
inventaire ne reprend pas les actifs antérieurs à 2014 ; en outre, 227,7
M€
d
actifs ne comportent pas la date d
entrée ;
-
l
état du personnel (état IV.B9) n
indique pas le nombre des assistants
familiaux ;
-
les états IV.D5 et IV.D6 relatifs à la gestion des fonds européens ne sont pas
renseignés.
L
état de la dette annexé au compte administratif, comparé au solde du compte 164
«
Emprunts auprès des établissements financiers
» du compte de gestion, fait apparaître
des discordances :
L
état de la dette (
)
Encours de dette du budget
principal au 31 décembre N
2016
2017
2018
2019
Compte de gestion (A)
559 934 192
566 599 749
673 893 396
669 625 855
Compte administratif (B)
560 724 947
568 535 503
675 829 151
671 561 609
Différence (B)
(A)
790 755
1 935 755
1 935 755
1 935 754
Source : Comptes de gestion et comptes administratifs
En outre, en 2018, la CTM a inscrit en opérations non budgétaires aux comptes 1641
«
Emprunts
» et 242 «
Mise à disposition de la collectivité dans le cadre de transfert de
compétences
» la réintégration des emprunts relatifs au TCSP que la région Martinique
avait externalisés vers le SMTCSP en 2015 (voir
supra
, chapitre sur la fiabilité des
comptes de la région Martinique) :
-
la ligne 1641 n
est pas adaptée pour cette écriture car il ne s
agit pas d
un
nouvel emprunt ; elle vient cependant corriger l
inscription à laquelle avait
procédé la région en 2015 qui diminuait artificiellement le stock de dettes ;
-
la ligne 2421 n
est pas, non plus, adaptée pour cette écriture ; ce compte
correspond aux constructions scolaires et terrains de sports mis à disposition
des collectivités.
2.2.3
La mise en ligne des délibérations et des documents de préparation et d
exécution
budgétaires
L
article L. 4313-1 du CGCT prévoit qu
un certain nombre de documents soient mis en
ligne sur le site internet de la collectivité : une présentation brève et synthétique retraçant
les informations financières essentielles relative au budget primitif et au compte
administratif, le ROB, le rapport du président du conseil exécutif annexé au budget
primitif et celui annexé au compte administratif.
Ces documents dont la publication sur internet est obligatoire depuis juin 2016, ne sont
pas mis en ligne sur le site internet de la CTM. En lieux et place, en réponse à la recherche
par mot-clé, le moteur du site internet propose des discours, des extraits de débats de
l
assemblée plénière et des communiqués de presse.
Il est possible que ces documents soient en ligne, en raison de la publication électronique
intégrale des délibérations et de leurs annexes au recueil des actes administratifs (RAA)
de la CTM. Cependant, les recueils de plus de 500 pages, voire de plus de 1 000 pages,
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
29
chacun, ne permettent pas de recherche par mot-clé et ne sont pas aisés à consulter. Leur
titre et leur date de publication ne permettent pas d
identifier la séance plénière dont ils
contiennent les délibérations. Ils ne contiennent pas toutes les délibérations de la même
séance, celles-ci étant réparties dans deux ou trois RAA mensuels successifs.
Il appartient à la CTM
d’
améliorer l
accessibilité des documents qui doivent légalement
être mis en ligne et, plus généralement, l
accessibilité des délibérations sur le site internet
de la CTM, par exemple par une recherche par numéro, par date ou par mot-clé.
En réponse au rapport d
observations provisoires, le président du conseil exécutif a
indiqué avoir procédé à la mise en ligne de toutes les délibérations depuis la création de
la CTM, tous les documents budgétaires et leurs annexes depuis 2018 et les rapports
d
orientations budgétaires depuis 2018. Il ressort toutefois de la consultation du site que
les délibérations sont mises en ligne mais de manière irrégulière, parfois avec plusieurs
mois de retard.
:
(régularité)
Rendre accessible par internet les documents
qui doivent légalement être mis en ligne et, plus
généralement, les délibérations intégrales.
2.3
Une qualité de l
information comptable à améliorer
2.3.1
Des provisions insuffisantes et non ajustées annuellement
2.3.1.1
Les provisions pour risques sont insuffisamment évaluées et ne sont pas suivies
dans le temps
Au 31 décembre 2019, les soldes des comptes de provisions pour risques s
établissaient
comme il suit :
-
compte 15111
« Provisions pour litiges »
, 13,16
M€
;
-
compte 15171
« Provisions pour garanties d
emprunt »
, 4,53
M€
;
-
compte 15181
« Autres provisions pour risques »
, 1,58
M€
;
soit un total provisionné de 19,27
M€.
Ces provisions n
ont jamais donné lieu à apurement ni à réévaluation depuis la création
de la CTM en 2016. Ils proviennent du département et de la région qui, eux-mêmes, les
reconduisaient régulièrement depuis plusieurs années.
Les annexes obligatoires IV.C1.1 du compte administratif n
ont jamais été remplies,
de 2016 à 2019.
Au cours de la période sous revue, hormis la reprise par opération d
’ordre
non budgétaire
des provisions constituées par les deux anciennes collectivités, la CTM n
a provisionné
aucun montant à hauteur des risques encourus, en particulier en matière de créances
irrécouvrables et de risque contentieux.
Les provisions pour litiges doivent être revues à la baisse car le total des prétentions des
demandeurs s
élève à 5 837 203,52
€ au 31 décembre 2019 et non à 13,6
M€.
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
30
À l
inverse, les provisions pour garanties d
emprunt doivent être réévaluées de 12,5
M€
en raison des garanties appelées concernant les emprunts souscrits par le SMTCSP
pour 16,8
M€ et
par l
Association départementale de parents et d
amis des personnes
handicapées mentales (ADAPEI) pour 232 344
.
Les autres provisions (comptes 15181 et 1582), non réévaluées depuis 2016, n
ont pas été
justifiées par la CTM et doivent être annulées.
Provisions pour risques de la CTM (
)
Compte
Intitulé
CG 2019
Correction CRC
Provision totale
15111
Provisions pour litiges et contentieux
13 157 703.92
-7 320 500,40
5 837 203.52
15171
Provisions pour garanties d
emprunt
4 452 000,00
12 504 572,98
17 033 572,98
15181
Autres provisions
1 579 049,16
-1 579 049,16
0,00
Total
19 265 753,08
3 605 023,42
22 870 776,50
Sources : comptes administratifs et de gestion 2015 (région et département) et 2016 à 2019 de la CTM,
état annexe IV. B 3.1 du budget primitif pour 2020
La politique de provisionnement de la CTM est insuffisamment développée. La pratique
de la CTM n
est pas satisfaisante sur ce point. En réponse au rapport d
observations
provisoires, le président du conseil exécutif s
est engagé à corriger ces insuffisances.
:
(régularité)
Ajuster chaque année le montant des
provisions aux risques encourus.
2.3.1.2
Des provisions pour charges n
ont pas été constituées
La CTM a constitué une provision pour charge de 13 015,49
au compte 1582 «
Autres
provisions pour charges
».
Même si les provisions pour charges ne sont pas obligatoires (article L. 4321-1 du
CGCT), le principe de bonne gestion justifie de les prendre en compte. Elles sont
d
ailleurs prévues par la nomenclature M57.
De telles provisions visent à anticiper différentes charges de la collectivité, telles que :
-
les comptes épargne-temps (CET), dont le personnel peut demander le
paiement ;
-
les travaux de désamiantage, de remise en état ou de démolition d
un
immeuble ;
-
les travaux d
entretien des couvertures et charpentes, des descentes d
eaux
usées et pluviales, de peinture, traitement et nettoyage des façades, de
réparation des menuiseries, d
entretien important des équipements (ascenseurs,
électricité), de curage des égouts ou d
’élagage des arbres…
La provision finance un plan pluriannuel d
entretien qui répartit les travaux de gros
entretien sur cinq ans, par glissement. Cette provision (compte 1572 «
Provision pour
gros entretien ou grandes révisions
») doit être constatée à la hauteur du montant estimé
de la charge et ajustée tous les ans.
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
31
La nature même de l
activité de la région justifie une telle provision.
En ce qui concerne le désamiantage, un dossier technique amiante (DTA) est obligatoire
depuis 2011 (décret n° 2011-629 du 3 juin 2011, annexe 13-9 du code de la santé
publique) :
-
la provision doit être constatée dès que de l
amiante est détectée dans un
bâtiment public (compte 6152 «
Entretien et réparations sur biens
immobiliers
») ; une provision doit être constituée pour couvrir les frais du
désamiantage ;
-
la région Martinique n
a pas réalisé les diagnostics obligatoires (elle a lancé un
appel d’offres dans ce but à la fin de l’année 2019)
; il n
est pas possible, dans
ces conditions, de déterminer le montant de la provision.
:
(performance)
Inscrire une provision pour charges (gros
entretien, désamiantage, CET) après en avoir expertisé
le montant.
2.3.2
L
indépendance des exercices non respectée et les délais de paiement excessifs
2.3.2.1
L
indispensable apurement des créances anciennes difficilement recouvrables
Malgré un travail important en 2019, des créances très anciennes restent à apurer. Le
montant du stock de créances anciennes est élevé : 43,2
M€ antérieur
es à 2016
dont 24,2
M€ antérieur
es à 2012.
Évolution du stock de créances (€)
Au 31 décembre de l
’exercice
2016
2017
2018
2019
Montant des restes à recouvrer
83 582 815
105 028 789
122 556 950
106 580 878
Montant des créances contentieuses
15 236 704
15 220 964
15 176 121
11 649 704
Source :
comptes de gestion
Le payeur territorial a proposé d
inscrire 2,5
M€ en 2019 pour une première série de
demandes d
admission en non-valeur, qui a été inscrite au budget lors d
une décision
modificative, à l
exception d
un dossier concernant une association (ACAPSSE). Cette
somme n
a cependant pas été mandatée en 2019.
Une partie notable des créances anciennes correspond à des petits montants dont le
recouvrement paraît difficile. Les créances antérieures à 2016 encore considérées
« amiables »
doivent être placées en
« contentieux »
.
Une provision supplémentaire devrait être prise à hauteur de 20 % des créances de 2015
et de 20 % supplémentaire par année antérieure, dans la perspective d
un plan
d’admission en non
-valeur (ANV) sur proposition du payeur, comme il suit :
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
32
Montant des créances anciennes au 31 décembre 2019 à provisionner
(
)
Créances anciennes
Part à provisionner
Provision
Antérieures à 2012
24 157 278
100 %
24 157 278
2012
4 047 945
80 %
3 238 356
2013
6 583 349
60 %
3 950 009
2014
5 192 196
40 %
2 076 879
2015
3 189 721
20 %
637 944
Total
43 170 488
34 060 466
Source :
payeur de la CTM
Déduction faite des provisions déjà constituées depuis 2016, la provision pour
dépréciation des comptes de redevables (compte 491) devrait être augmentée de 26,8
M€
dès 2020.
La collectivité devra, dans un second temps, programmer un plan d
apurement des non-
valeurs, d
une durée qui ne saurait être supérieure à deux ans au regard de l
ancienneté
des créances concernées.
En réponse au rapport d
observations provisoire, l
ordonnateur a indiqué avoir mis en
place un plan d
apurement pour les admissions en non-valeur en mentionnant
l’inscription au budget su
pplémentaire de 2019 de 2,5
M€ de crédits pour admission en
non-valeur. Il ressort toutefois à la lecture des comptes 2019, qu
aucune admission en
non-valeur n
est intervenue en 2019 et que la collectivité a attendu 2020 pour engager le
processus d
apurement, avec 0,83
M€ comptabilisés au compte administratif de 2020.
:
(performance)
Augmenter
la
provision
pour
dépréciation des comptes de redevables en fonction
d
une évaluation rigoureuse des risques et programmer
avec le comptable un plan d
admission en non-valeur.
2.3.2.2
Des reports de paiement aux montants non négligeables qui pèsent sur la
trésorerie des entreprises
Le montant des factures parvenues en année N et engagées comptablement ou payées en
N+1 s
élève chaque année à plusieurs dizaines de millions
d’euros
. Le principe
d
indépendance des exercices
n’est pas respecté
, ce qui altère la sincérité du résultat de
clôture annuel.
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
33
Reports
d’engagement et de mandatement
en N+1 de factures reçues
en année N (
)
Engagement comptable en N+1
de facture reçues en N
Mandatement en N+1
de factures reçues en N
2016
11 506 881,96
14 144 202,11
2017
27 300 895,16
40 740 610,97
2018
16 148 290,57
74 884 526,16
2019
9 803 443,85
Non connu
Moyenne 2016-2018
18 318 689,23
43 256 446,41
Source :
CTM - extraction des engagements par année
Les engagements régularisés
ex-post
refluent en 2019. Cependant, le montant des
mandatements effectués en N+1 sur cet exercice
n’est pas connu.
La CTM n
est pas suffisamment rigoureuse sur le respect des principes d
indépendance
des exercices et d
annualité budgétaire.
Le principe de l’engagement préalable n’est pas
respecté et les délais de paiement dépassent le plafond réglementaire (30 jours,
conformément au décret n
o
2013-269 du 29 mars 2013) :
il s’élève à 63 jours en
moyenne
sur la période contrôlée, selon le comptable, sur la base des seules factures dont la date
de réception a été renseignée par l’ordonnateur dans sa transmission
au comptable. Il
atteint même 84 jours au premier semestre de 2020 en raison de la crise sanitaire de
la Covid-19.
De tels délais s
expliquent par les difficultés de trésorerie (voir
infra
). En effet, au
16 juillet 2020, les restes à payer s
élevaient à 43 896 484,15
alors que le compte au
trésor n’était
crédité que de 3 547 658
à la même date.
Les dépassements de délais de paiement ont donné lieu à des intérêts moratoires dans des
volumes très inférieurs à ce qui aurait dû être appliqué (30 196,86
en 2016 et 230,18
en 2018 et 62 680,96
en 2019). Or, les intérêts moratoires
« doivent être liquidés et
mandatés automatiquement sans que l
entreprise ait à les réclamer. Ils sont dus de
droit. »
.
Il appartient à la CTM d
améliorer le traitement des factures, de chiffrer et de liquider les
intérêts moratoires dans le but de ne pas léser les entreprises avec lesquelles elle a
contracté, aucun développement économique n
étant possible sans confiance et sans
respect des échéances de paiement.
2.3.2.3
Des retenues de garantie non levées
La retenue de garantie a pour seul objet de couvrir les réserves à la réception des travaux,
fournitures ou services ainsi que celles formulées pendant le délai de garantie. En
l
absence de réserve, les retenues de garantie sur les fournisseurs d
’immobilisations
(compte 40471) sont normalement libérées un mois au plus tard après l
expiration du
délai de garantie, qui est d
un an à compter de la date d
effet de la réception, ou de six
mois si le marché ne concerne que des travaux d
entretien ou des terrassements.
Au 31 décembre 2019, le solde du compte 40171
« Fournisseurs
Retenues de
garanties »
s
élève à 2,5
M€ alors que celui du compte 40471
« Fournisseurs
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
34
d
immobilisations
retenues de garantie »
était de 12,9
M€. Ces montants représentent
cinq ans de retenues de garanties.
Très peu de retenues de garanties ont été libérées sur présentation des pièces justificatives
nécessaires.
Le payeur rejette systématiquement les demandes de paiement des retenues de garanties
aux entreprises, faute de pouvoir vérifier les décomptes généraux et définitifs (DGD)
propres à chaque opération d
investissement.
Le comptable a alerté plusieurs fois l
ordonnateur sur cette situation au regard des
exigences légales.
La libération des retenues de garantie représenterait 7 942 lignes d
’écriture
au 1
er
juin 2020.
La CTM indique rencontrer des difficultés pour identifier et réaliser les DGD des
opérations terminées datant d
avant sa création. Elle n
a pas consenti les efforts
nécessaires pour régulariser cette situation et expose les entreprises à la déchéance
quadriennale, à l’encontre des intérêts de
celles-
ci et de la confiance qu’elles devraient
pouvoir placer dans une collectivité publique chargée du développement économique.
L’ordonnateur doit é
mettre les certificats, pour les opérations achevées, dans les délais
légaux après édition du décompte général et définitif en vue de procéder aux
remboursements des retenues de garantie.
:
(régularité)
Lever les retenues de garantie dans les délais
légaux.
2.3.2.4
Des avances aux SEM non soldées
Le compte 238 «
Avances versées sur commandes d
immobilisations corporelles
»
présente un solde de 31,6
M€ au 31 décem
bre 2019. Ce solde retrace les avances
consenties aux SEM dans le cadre de conventions de mandat. Le stock représente un flux
d
avances d
environ dix années.
Une partie significative de ce montant correspond à des opérations soldées qui devraient
être inscrites au compte 21 «
Immobilisations corporelles
» et dont l
amortissement n
a
pas pu commencer.
Ce retard de gestion des opérations sous mandat provient quasi-exclusivement
d
opérations gérées par l
ex-région qui n
ont été régularisées qu
à hauteur de 9,9
M€ en
quatre ans par la CTM. La chambre rappelle sa recommandation déjà formulée en 2013.
La CTM doit clore
dans l’année
les opérations comptables anciennes du compte 238.
:
(régularité)
Solder les opérations comptables anciennes
du compte 238 (avances aux SEM).
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
35
2.4
Un inventaire lacunaire et un retard considérable dans les amortissements
Au 31 décembre 2019, l
actif net de la CTM s
élevait à 6,738
Md€.
La valeur des fonds propres au bilan de la CTM (5,94
Md€), constitués par les apports et
les subventions d’investissement, les réserves
, le report à nouveau, le résultat de
l
exercice et les neutralisations et régularisations, est inférieure à la valeur affichée de son
actif immobilisé (6,47
Md€), ce qui s
uscite de fortes réserves sur ce dernier montant.
2.4.1
Un inventaire hétérogène et très incomplet
La CTM ne tient pas d
inventaire physique de son patrimoine dans un document unique.
Il existe plusieurs «
inventaires
», héritage des deux anciennes collectivités, qui ne
revêtent pas de caractère exhaustif, compte tenu de l
ampleur du patrimoine à identifier
et à suivre.
L
inventaire intitulé «
Éléments de patrimoine
» comporte la liste des actifs acquis par la
CTM depuis 2014, pour un montant total de 1 151
M€. O
r, l
actif brut immobilisé de la
collectivité au 31 décembre 2019 s
élève à 6 470
M€.
L
inventaire ne reprend pas les actifs antérieurs à 2014. En outre, 227,7
M€ d’
actifs ne
comportent pas de date d
entrée.
Une démarche d
élaboration d
un inventaire physique est en cours depuis 2018 mais le
ch
antier peine à aboutir. Sans l’affectation
d
’une équipe au recensement et à l’évaluation
du patrimoine de la CTM, ce travail continuera à se faire attendre.
La CTM doit mettre à jour l
inventaire, développer un système d
information
patrimoniale qui assure la liaison entre les données physiques et comptables du
patrimoine régional, corriger l
actif de la collectivité et effectuer le rapprochement avec
l
état de l
actif du comptable.
:
(régularité)
Mettre à jour l
inventaire afin de corriger
le bilan.
2.4.2
Des opérations achevées à intégrer à l
inventaire
Au 31 décembre 2019, le chapitre 23 «
Immobilisations en cours
» faisait apparaître un
solde de 658,55
M€.
Un total de 342,4
M€ d’
opérations d
équipement était en cours (compte 23
«
Immobilisations en cours
») au 1
er
janvier 2016, ce qui représente deux années
d
opérations en cours du département et de la région. Aucune des opérations en question
n
a été déclarée achevée et aucun virement du compte 23 au compte 21 n
a été opéré de
2016 à 2019. Sur la base d
une durée moyenne d
opération de trois ans, environ 160
M€
auraient dû être virés du compte 23 au compte 21 dès 2017 et autant en 2018.
Le défaut de transfert des immobilisations en cours (compte 23) vers le compte
d
immobilisation
définitif
(comptes
20
«
Immobilisations
incorporelles
»
et 21
«
Immobilisations corporelles
») au moment de leur mise en service nuit à la fiabilité des
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
36
comptes car il a pour effet de minorer les dotations aux amortissements des
immobilisations et conduit à fausser en partie le résultat de la section de fonctionnement.
Plus généralement, la CTM devrait fiabiliser le processus d
intégration de ses
immobilisations. Il lui appartient de mieux suivre comptablement ses opérations de
transfert à effectuer au fil de l
’eau et de c
lore, au fur et à mesure de leur achèvement, les
opérations en cours du chapitre 23, de virer les montants correspondants au compte 21
«
Immobilisations corporelles
» et
d’
effectuer le rattrapage des amortissements en retard.
:
(régularité)
Clore au fur et à mesure de leur achèvement
les opérations du chapitre 23.
2.4.3
Une erreur d’environ
2,3
Md€
dans l’
actif de la CTM
2.4.3.1
La CTM n
a pas procédé au rattrapage des amortissements en retard des deux
anciennes collectivités
La CTM n’a pas procédé au rattrapage des amortissements très en retard de la
région et du département (voir
supra
), pour un montant statistique net de 2
Md€, ce qui
réduit son actif net réel de 5,7
Md€ à 3,7
Md€
:
Estimation de la dépréciation de l
actif de la CTM au 1
er
janvier 2016
(
M€
)
« Neutralisable »
À amortir
Total actif
Passif
Reste à amortir*
Subventions
d
équipement
Bâtiments
Autres
amortissements
Reprise des
subventions
reçues
1 193,0
453,2
494,6
2 324,8
366,6
128,0
*
après neutralisation
Source :
chambre régionale des comptes
Seuls sont obligatoires, depuis 2004, les amortissements des subventions versées et des
biens acquis. Cependant, le fait de ne pas prendre en compte les amortissements des biens
acquis antérieurement fausse l
analyse du bilan.
Le rattrapage des amortissements en retard serait de nature à compromettre l’équilibre de
la section de fonctionnement. C’est pourquoi l’
article D. 72-103-4 du CGCT autorise la
CTM à procéder à la neutralisation budgétaire de la dotation aux amortissements :
-
des bâtiments publics ;
-
des subventions d
équipement reçues pour le financement de ces équipements ;
-
des subventions d
équipement versées.
In fine
, la CTM doit rattraper statistiquement 128
M€ d’amortissements, après
neutralisation de ce qui p
eut l’être.
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
37
2.4.3.2
La CTM n
amortit pas, depuis 2016, les immobilisations de l
ex-région
Le montant des amortissements cumulés au 31 décembre 2015 n
est pas le même au
compte de gestion de 2016 (180 561 198
) et au compte administratif de 2016
(136 442 413
) de la CTM.
Le montant inscrit au compte administratif de la CTM est celui des amortissements
cumulés du seul département, comme le détaille l
état annexe IV. B12.1, par comparaison
avec les amortissements du compte administratif de 2015 du département. Par
conséquent, les amortissements de 2016 sont insincères.
La même observation peut être formulée pour chaque exercice depuis 2016. Le montant
s
élève à environ 40 M
€ par an. La CTM doit donc rattraper, du fait de son inaction,
environ 200
M€ d’amortissements
, en plus du montant mentionné plus haut imputable au
défaut des deux anciennes collectivités.
La CTM ne peut pas rattraper en un an le montant total à inscrire des amortissements à
rattraper (228
M€)
. Elle doit donc programmer la mise à niveau de son inventaire et le
rapprochement avec l
actif, puis le rattrapage des amortissements, l
ensemble de ces
opérations ne devant pas s
étaler sur plus de six ans.
:
(régularité)
Appliquer
les
règles
relatives
à
l
amortissement afin de mettre à jour le bilan de la
collectivité.
3
LA
NÉCESSITE
D
UNE
VISION
FINANCIÈRE
PLURI-
ANNUELLE
L
analyse financière qui suit porte sur le seul budget principal. Elle s
appuie sur les
données issues des comptes de gestion, des comptes administratifs, du logiciel
d’analyse
financière des juridictions financières, alimenté en données par la direction générale des
finances publiques, et des fiches financières de la DGCL pour les exercices 2016 à 2019.
3.1
Le financement des investissements
Les ressources d
investissement sont constituées par :
-
les ressources propres (excédent de la section de fonctionnement, cession de
biens, recettes propres d
investissement) ;
-
certaines dotations de l
Etat affectées à l
investissement ;
-
les subventions d
équipement reçues, de diverses origines ;
-
l
emprunt.
3.1.1
Un autofinancement qui progresse
La capacité d
autofinancement (CAF) brute d
une collectivité territoriale correspond à la
différence entre ses recettes et ses dépenses de fonctionnement, hors certains éléments
exceptionnels. La CAF mesure donc l
épargne dégagée par le fonctionnement courant,
disponible pour le financement des dépenses d
investissement (dépenses d
équipement et
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
38
remboursements d
emprunts). Aussi, la CAF brute est-elle le premier indicateur pour
apprécier la situation financière d
une collectivité territoriale.
La CAF brute de la CTM se présente comme il suit :
Formation de la capacité d
autofinancement brute
(montants €)
2016
2017
2018
2019
Évolution
moyenne
annuelle
2016-2019
Produits de gestion (A)
900 460 532
921 830 089
947 432 271
956 170 625
2,0 %
Charges de gestion (B)
836 673 126
860 560 296
848 000 157
835 405 972
- 0,1 %
Excédent brut de fonctionnement (A-B)
63 787 407
61 269 794
99 432 114
120 764 653
23,7 %
en % des produits de gestion
7,1 %
6,6 %
10,5 %
12,6 %
+1,8 point
+/- Résultat financier
- 12 748 100
- 13 403 528
- 12 440 770
- 9 897 598
- 8,1 %
- Subventions exceptionnelles versées aux services
publics industriels et commerciaux (autres que les
services de transport, d
eau et d
assainissement)
(jusqu
en 2017 inclus)
1 550 000
1 430 000
0
0
- 100,0 %
+/- Solde des opérations d
aménagements de terrains
- 13 884
- 675
0
0
- 100,0 %
+ Autres produits et charges excep. réels (jusqu
en
2017 inclus), Titres et mandats annulés sur exercices
antérieurs (à compter de 2018)
- 4 714 131
6 039 056
- 3 605 551
- 2 741 038
- 16,5 %
= CAF brute
44 761 292
52 474 647
83 385 794
108 126 018
34,2 %
en % des produits de gestion
5,0 %
5,7 %
8,8 %
11,3 %
+2,1 points
Source : chambre régionale des comptes à partir des comptes de gestion (logiciel ANAFI)
En raison du niveau de ses charges de fonctionnement, la CTM dispose d
une CAF brute
inférieure, non seulement à celle de la moyenne de l
ensemble « régions + départements »
mais, aussi, à celle des départements, classiquement plus faible que celle des régions.
CAF brute des départements et des régions, rapportée aux produits de
gestion
2016
2019
Évolution
Départements
11,76 %
14,03 %
2,27 points
Régions
19,96 %
22,25 %
2,30 points
Ensemble
13,94 %
16,56 %
2,26 points
Source : chambre régionale des comptes à partir des statistiques DGCL
La CAF brute s
est fortement rétractée en 2016 sous l
augmentation de 6,51 % des
charges de gestion qui sont passées de 785,5 à 836,7
M€. Pour autant, la CAF brute de
l
ex-département comme celle de l
ex-région étaient déjà notablement inférieures en 2015
à la moyenne des départements et des régions.
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
39
Comparaison de la CAF brute de 2015 et de 2016 (
)
Département
2015
Région 2015
Département
+ Région
2016
Evoution.
2016/2015
Produits de gestion (A)
626 243 121
246 959 791
873 202 912
900 460 532
3,12 %
Charges de gestion (B)
572 234 791
213 288 314
785 523 106
836 687 009
6,51 %
Excédent brut de fonctionnement (A-B)
54 008 329
33 671 477
87 679 806
63 773 523
-27,27 %
% des produits de gestion
8,62 %
13,63 %
10,04 %
7,08 %
-2,96 points
CAF brute
44 352 325
24 266 153
68 618 478
44 761 292
-34,77 %
% des produits de gestion
7,08 %
9,83 %
7,86 %
4,97 %
-2,91 points
Source : comptes de gestion
Entre 2016 et 2019, l
épargne brute de la CTM s
est redressée, passant de 63,8
M€ en
2016, soit 5 % des produits de gestion, à 108,1
M€, soit 11,3
% des produits de gestion.
Le dynamisme des recettes (+2 % par an en moyenne) conjugué à une maîtrise des
dépenses de gestion au cours de la période sous revue (- 0,1 % par an en moyenne) a
conduit à cette hausse.
La CAF nette mesure la capacité de la collectivité à financer ses dépenses
d
investissement grâce à ses ressources propres, une fois acquittée la charge obligatoire
de remboursement de l
annuité de dette en principal.
Comparaison de la CAF nette de 2015 et 2016 (
)
Département
2015
Région 2015
Département
+ région
2016
2017
2018
2019
Évolution
annuelle
moyenne
CAF brute
44 352 325
24 266 153
68 618 478
44 761 292
52 474 647
83 385 794 108 126 018
17,6 %
Annuité en capital de la dette
26 519 998
9 042 432
35 562 430 134 780 591
33 334 443
36 503 408
44 267 542
5,6 %
CAF nette
17 832 328
15 223 721
33 056 048
-90 019 298
19 140 203
46 882 385
63 858 476
27,3 %
% des produits de gestion
2,8 %
6,2 %
3,8 %
NP
2,1 %
4,9 %
6,7 %
Source : comptes de gestion
Compte-tenu de ce qui a été écrit plus haut au chapitre sur la fiabilité des comptes de la
région Martinique et sur l
externalisation des emprunts du TCSP, la CAF nette de la
région Martinique était en réalité inférieure à ce qu
affichait le compte de gestion : il
convient de la corriger du montant de l
emprunt renégocié de 97,95
M€ qui ne correspond
pas à un accroissement de la dette. Ainsi corrigée, la CAF nette de 2016 s
élève à
7 935 317
€, ce qui représente
0,88 % des produits de gestion.
Même si elle restait positive, la CAF nette de 2016 ne pouvait pas contribuer au
financement des investissements.
Le redressement important de la CAF nette depuis 2016, malgré la réintégration en 2018
de l
encours des emprunts du TCSP, a permis de dégager une épargne significative
en 2019, de 63,86
M€, propre à financer 27,06
% des investissements de l
’année
.
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
40
3.1.2
Une CAF qui progresse malgré la contraction de l
autofinancement des
investissements
La CAF nette et les recettes d
investissement constituent l
autofinancement de la CTM.
Les recettes d
investissement se composent :
-
des recettes propres (chapitre 10 «
Dotations, fonds divers et réserves
») telles
que le fonds régional pour le développement et l
emploi (FRDE), la part de
l
octroi de mer affectée à la section d
investissement, improprement enregistré
par la CTM au chapitre 13 (voir
infra
), le fonds de compensation de la taxe sur
la valeur ajoutée (FCTVA) et quelques autres recettes, dont les dotations du
compte 1021 ;
-
des recettes fiscales d
investissement (chapitre 73 «
Recettes fiscales
») telles
que la taxe d
aménagement et la part dite « Grenelle » de la taxe intérieure de
consommation sur les produits énergétiques (TICPE) ;
-
des subventions d
investissement reçues (chapitre 13) constituées en premier
lieu du fonds européen de développement régional (FEDER) avec 41,8
M€ en
2019, suivie par les dotations régionale et départementale d
équipement des
collèges et scolaire (34,2
M€).
Évolution du financement propre disponible de 2015 à 2019 (
)
2015
consolidé
2016
2017
2018
2019
Évolution
CAF nette ou disponible
33 056 048
-90 019 298
19 140 203
46 882 385
63 858 476
93,0 %
+Recettes d
investisst hors emprunt
142 426 016
107 821 867
63 146 298
95 436 298
112 273 214
-21,2 %
= Financement propre disponible
175 482 064
17 802 569
82 286 501
142 318 683
176 131 690
0,4 %
Source : comptes de gestion
Les recettes d
investissement représentent 81 % du financement propre en 2015 et leur
part se réduit progressivement pour atteindre 63,7 % en 2019, sous l
effet de leur propre
affaissement et de la progression de la CAF nette. Au total, le financement propre
disponible retrouve en 2019 le niveau consolidé des deux collectivités départementale et
régionale de 2015.
Les recettes d
investissement hors emprunt diminuent de 21,2 % de 2015 à 2019 en
marquant un creux en 2017, à 44 % du montant cumulé de l
ex-région et de
l
’ex
-département en 2015.
3.1.3
Un besoin de financement de l
investissement en diminution sensible
Le besoin de financement égale la différence entre le financement propre disponible et
les dépenses
d’équipement
, subventions d
équipement et participations. Le besoin de
financement de la CTM, tout au long de la période, a évolué comme il suit :
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
41
Besoin de financement de la CTM de 2015 à 2019 (
)
2015
2016
2017
2018
2019
Évolution
2019/2015
Financemt propre disponible
175 482 064
17 802 568
82 286 501
142 318 683
176 131 690
0,4 %
- Dépenses d
équipement
189 593 943
118 730 913
85 400 672
62 637 149
105 300 517
- 44,5 %
- Subv. d
équipemt versées
101 021 600
88 145 922
74 106 906
94 557 909
79 088 742
- 21,7 %
- Partic. et inv. financiers nets
1 429 428
-2 361 811
531 060
-599 949
3 128 062
118,0 %
Besoin (-)
ou capacité (+)
de financement propre
-225 337 339
-186 712 456
Corrigé* :
-88 757 840
-77 752 138
-14 276 426
-11 385 631
- 90,0 %
NB :
seuls les items pertinents ont été renseignés
*
le besoin de financement de 2016 doit être corrigé de l
effet de la renégociation de dette, qui le
ramène à - 88 757 840
.
Source :
comptes de gestion
En 2015, le département
disposait d’
une capacité de financement de 108,7
M€ tandis que
la région avait un besoin de financement de 225,3
M€, présentant deux situations
diamétralement opposées : celle d
une collectivité départementale qui investissait peu en
raison du poids de ses charges de gestion dans son budget, notamment de ses dépenses
sociales, tandis que la région, collectivité chargée de l
aménagement, investissait
beaucoup.
Le besoin de financement de la CTM demeure mais s
’est
réduit fortement (de 90 %),
passant de 186,7
M€ en 2016 à 11,4 en 2019. Cette évolution s’
explique par le double
effet de la progression de l
autofinancement et de la diminution des investissements.
Les dépenses d
équipement de la collectivité ont baissé de 44 % de 2015 à 2019 avec, de
surcroît, un creux en 2017 et en 2018 dont les dépenses s
élèvent à 33 % du cumul de
celles de l
ex-département et de l
ex-région en 2015. Tout au long de la période, le volume
des investissements a été inférieur à celui de la seule région en 2015 (144,5
M€). L
a baisse
du FCTVA rend compte de cette diminution des investissements.
Les subventions d
équipement suivent la même tendance, à un rythme moindre (- 1,7 %).
Le niveau des subventions d
équipement est celui de l
ex-région (80,2
M€ en 2015).
Cette évolution résulte d
une mauvaise programmation des investissements : le taux de
réalisation s
est élevé à 72,4 % en 2019. Avec une exécution de 90 %, la CTM aurait
présenté un besoin de financement de 32,2
M€.
La situation de faible besoin de financement a permis à la CTM de n
emprunter que
40
M€, tandis qu’
elle remboursait 41,6
M€ de capital de la dette
.
Pour autant, le respect de l’
obligation de couverture des dépenses
d’investissement
par
les ressources propres (article L. 1612-4 du CGC
T) n’a pas été atteint en 2016 et en 2018.
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
42
Évolution des dépenses à couvrir par des ressources propres (
)
2016
2017
2018
2019
Évolution
2019/2016
Dépenses à couvrir
par les ressources propres
216 629 011
41 879 586
89 942 880
69 304 018
-68,32 %
Ressources propres
126 014 547
115 479 099
85 236 153
103 148 277
-18,15 %
Solde
-90 614 464
73 599 513
-4 706 727
33 844 259
Source :
comptes administratifs
3.1.4
Une dette en augmentation
Au 31 décembre 2019, l
encours de dette de la CTM s
’élevait à 669,6
M€, c’est
-à-dire à
1 784
par habitant. Ce ratio est proche du double de celui de l
’ensemble des
« départements + régions » de métropole dont la dette par habitant s
élevait à 880
€ en
2018. Il représente aussi le double du ratio cumulé « département + région » de la
Guadeloupe.
3.1.4.1
Après corrections, l
endettement augmente plus vite que
l’endettement moyen
de
l
ensemble des régions et des départements
L
encours de dette a augmenté de 38 % du 31 décembre 2015 au 31 décembre 2019
(
cf.
annexe n° 2).
En 2015, la région Martinique a transféré au SMTCSP les dettes contractées à son
bénéfice, à hauteur de 103,1
M€ (voir
supra
, au chapitre fiabilité des comptes de la région
Martinique).
Un syndicat mixte doit légalement être dissous à la fin de l
opération pour laquelle il a
été constitué (CGCT, art. L. 5721-7). Avec l
engagement de la procédure de liquidation,
les emprunts en question ont été réintégrées au budget de la CTM en 2018, pour 83,8
M€.
En réintégrant la dette dans l
encours de la région puis de la CTM pour les exercices 2015
à 2017, l
évolution est la suivante :
Évolution corrigée de l
endettement de la CTM (
)
2015
(consolidation
région + dépt.)
2016
2017
2018
2019
Evolution
2019/2015
Dette au 31 déc.
587 876 768
559 934 192
566 599 748
590 096 340
669 625 854
13,9 %
Source : comptes de gestion
Après cette correction, l
évolution de la dette régionale demeure très supérieure à celle
de l
ensemble des départements et régions (0,28 %), et supérieure à celle des régions
seules (8,54 %).
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
43
3.1.4.2
La renégociation de prêts en 2016 n
a pas réduit les frais mais a permis d
étaler
la charge de la dette
En 2016, l
annuité du remboursement en capital s
est élevée à 134
M€. En effet, la CTM
a procédé à une opération de renégociation et de reprofilage de 11 emprunts pour un total
de 97,95
M€. Il s’
agissait de prêts de l
AFD, conclus de 2002 à 2014 avec des taux
initiaux de 1,93 à 3,98 %, renégociés auprès du même prêteur pour une durée de 20 ans.
Le taux d
intérêt apparent de ces 11 emprunts s
élevait à 2,77 % en 2016. S
agissant
d
emprunts d
une ancienneté moyenne de neuf ans en 2016 et d
une durée résiduelle
moyenne de sept ans, le profil d
amortissement conduit à constater que la charge
d
intérêts avait été déjà largement payée. Seuls deux emprunts, de 2011 et 2014,
pouvaient rendre financièrement intéressante une renégociation mais leur taux d
intérêt,
respectivement de 2,08 % et de 1,96 %, ne le justifiait pas au regard du taux du nouvel
emprunt.
La renégociation a permis d
allonger la durée de remboursement, réduisant la charge
annuelle du capital et des intérêts à rembourser, en étalant sur 20 ans une charge répartie
initialement sur sept
ans. Pour autant, le coût total de l’emprunt augmente en proportion
de l’allongement du prêt.
Le profil de la dette est sécurisé, les emprunts étant tous classés A1 (non risqués) selon la
classification, dite
Gissler
, introduite après la crise des emprunts structurés.
Jusqu
’en
2018 cependant, la CTM comptait dans son portefeuille un emprunt à risque
(voir
supra
), remboursé par anticipation en 2018, pour un capital restant dû (CRD) de
9,1 M
€ au 31 décembre 2016, avec
une indemnité de rachat anticipé (IRA) de sortie de
2,6 M
€, soit une pénalité de 28,77
% du CRD.
3.1.4.3
Les ratios obligatoires du CGCT traduisent l
amélioration de la capacité de
désendettement malgré l
augmentation de la dette
Les données synthétiques sur la situation financière de la collectivité, prévues aux articles
R. 3313-1 et R. 4313-1 du CGCT, comportent onze ratios obligatoires dont trois relatifs
à la dette. Ils figurent en page IA du compte administratif de la CTM.
L
encours de dette par habitant est passé de 1 255
en 2015 à 1 784
€ en 2019, soit
+ 42,08 % (9,18 % par an). Dans le même temps, le volume d
investissements, passant
de 331,5
M€ à 236
M€,
a diminué de 29 %.
Ainsi, les nouveaux emprunts contractés ont financé 24,07 % du cumul des
investissements de 2016 à 2019.
L
’encours de la dette atteignait
70 % des recettes réelles de fonctionnement (RRF) en
2019, contre 61 % en 2016.
À l
inverse, l
épargne de la collectivité traduit une diminution du poids cumulé relatif des
dépenses réelles de fonctionnement et du remboursement de la dette en capital, qui
représentaient 94 % des RRF en 2019 contre 99 % en 2016. La capacité de
désendettement de la CTM s
est améliorée et rapprochée des standards nationaux des
régions et départements.
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
44
La capacité de désendettement de la CTM, après un maximum à 12,5 ans en 2016, est
revenue à 6,2 ans en 2019. Il est à noter qu
’en 2015,
le département se situait à 6,7 ans et
la région à 7,7 ans apparemment mais, en fait, à 12 ans après réintégration des emprunts
sortis du bilan.
3.1.5
Des dépenses d
investissement en baisse
En volume, les dépenses d
investissement ont reculé de 41 % de 2015 à 2019. Un tel
volume d
investissement est inférieur à ce qu
y consacrait la région en 2015
.
Les dépenses réelles d
équipement ont diminué de 50,9 % sur cette même durée. La
modeste reprise en 2019 n
a pas atteint le niveau des dépenses observé en 2016.
Les subventions d
équipement versées (- 21,7 % sur la période 2015-2019) ont moins
diminué que les dépenses d
équipement.
3.2
Les principaux indicateurs de l
équilibre financier
L
analyse de l
équilibre financier des collectivités s
effectue à partir du bilan fonctionnel.
Celui-ci reclasse les postes du bilan en grandes unités afin de mettre en évidence le fonds
de roulement, le besoin en fonds de roulement et la trésorerie qui caractérisent la structure
financière de la collectivité. Ces agrégats sont liés par la relation fondamentale : fonds de
roulement - besoin en fonds de roulement = trésorerie.
3.2.1
Le fonds de roulement a progressé
Le fonds de roulement (FDR) correspond à l
excédent des ressources stables (capitaux
propres, amortissements et provisions, dettes financières) sur les emplois stables (actif
immobilisé brut). Il représente la part des ressources stables qui peuvent être affectées au
financement des actifs circulants (stocks, créances et disponibilités) pour compenser le
décalage entre l
encaissement des recettes et le paiement des dépenses.
Évolution du fonds de roulement de la CTM de 2016 à 2019 (€)
2016
2017
2018
2019
Var. annuelle
moyenne
Ressources stables (A)
6 137 382 277
6 217 493 726
6 464 746 285
6 638 011 593
2,6 %
Emplois immobilisés (B)
6 074 201 286
6 196 833 945
6 404 056 574
6 554 167 915
2,6 %
Fonds de roulement net global (A-B)
63 180 991
20 659 781
60 689 710
83 843 677
9,9 %
En nombre de jours de charges courantes
28
9
26
37
-
NB :
les emplois immobilisés incluent les opérations sous mandat, ce qui explique la différence avec
la présentation du compte de gestion
Source :
chambre régionale des comptes à partir des comptes de gestion (logiciel ANAFI)
Le FDR de la CTM a progressé de 32,7 % entre 2016 et 2019 (+ 9,9 % par an), soit plus
que celui de la moyenne des régions et des départements. L
amélioration du résultat de
fonctionnement, qui est passé de 19,9
M€ d’
excédent en 2016 à 70,7
M€ en 2019, y a
contribué fortement. En 2019, le FDR net représentait 37 jours de charges courantes
contre 28 en 2016. L
année 2017 a connu une situation tendue avec un FDR représentant
seulement neuf jours de charges courante en moyenne.
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
45
3.2.2
Le besoin en fonds de roulement a augmenté
Le besoin en fonds de roulement (BFR) est égal à la différence entre l
ensemble des
créances et stocks et les dettes à court terme (dettes fournisseurs, dettes fiscales et
sociales...). Une créance constatée, non encaissée, engendre un besoin en FDR (c
est-à-
dire de financement) alors qu
une dette non encore réglée vient diminuer ce besoin. Le
BFR traduit le décalage entre encaissement des recettes et paiement des dépenses.
Un BFR négatif constitue une ressource, la collectivité recouvrant ses créances avant
d
honorer ses dettes.
Évolution du besoin en fonds de roulement de la CTM de 2016 à 2019
(€)
2016
2017
2018
2019
Var. ann.
moyenne
Redevables et comptes rattachés
23 397 393
22 334 589
23 722 408
21 977 434
-2,1 %
- Encours fournisseurs
87 563 900
113 335 511
75 826 173
66 547 257
-8,7 %
= Besoin en fonds de roulement de gestion
-64 166 507
-91 000 921
-52 103 765
-44 569 822
-11,4 %
+ Créances - dettes fiscales, sociales et autres dettes
43 071 823
11 054 863
66 234 573
77 768 717
21,7 %
Besoin en fonds de roulement net global (A-B)
-21 094 684
-79 946 058
14 196 471
33 198 894
En nombre de jours de charges courantes
-9
-34
6
14
Source : comptes de gestion
Le besoin en fonds de roulement a fortement augmenté sous l
effet conjugué de la relative
diminution de l
encours dû aux fournisseurs et de l
augmentation des créances. Malgré
l
allongement de ses délais de paiement pour réduire le besoin en fonds de roulement, le
BFR moyen de 33,2
M€ en
2019 ne représentait que 14 jours de fonctionnement de
la CTM.
Le montant constamment élevé des créances traduit les difficultés de recouvrement : les
créances excédaient les dettes fiscales et sociales de 77,8
M€ en 2019,
notamment les
créances sur les «
Débiteurs divers
» (compte 4672) qui s’élevaient à 54
M€.
3.2.3
La trésorerie demeure insuffisante
Différence entre le fonds de roulement et le besoin en fonds de roulement, la trésorerie
mesure la capacité de la collectivité à honorer ses engagements financiers.
Déduction faite des provisions semi-budgétaires qui demeurent égales à 26,5
M€ tout au
long de la période sous-revue, le fonds de roulement budgétaire a été négatif en 2017,
situation qui engendre de graves difficultés de trésorerie. La collectivité a, en réaction,
allongé les délais de paiement de ses fournisseurs.
Une telle gestion met en danger les fournisseurs qui financent ainsi, malgré eux, la
trésorerie de la CTM (63 jours en moyenne en 2019).
Au cours du premier semestre de 2020, 26 jours ont connu un solde du compte 515
«
Compte au Trésor
» inférieur à 3
M€ dont onze jours à moins de 1
M€.
Le 2 juillet 2020, le
solde ne s’élevait qu’à
240 000
.
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
46
Trésorerie nette de la CTM (compte 515) au cours du premier semestre 2020
Source : payeur de la collectivité
Cette situation est d
autant plus préoccupante que le besoin de trésorerie, calculé sur
l
’année 2019, atteignait
3 085 220
par jour.
Le payeur n
est pas en mesure d
honorer les mandats à payer, ce qui n
est pas normal
pour une collectivité de cette importance. Ainsi, le 29 juin 2020, 44 497 589,54
correspondant à 196 mandats étaient en attente de paiement.
Les débits d
office opérés sur le compte 515 que sont les remboursements de prêts
(0,9
M€ au 1
er
juillet 2020), ainsi que les traitements des agents publics (12,6
M€ chaque
mois en 2019) et le versement du RSA (17,0
M€ par mois en 2019), dépenses
obligatoires
prioritaires, privent le comptable des moyens de payer à échéance normale les autres
dettes.
Parmi les créanciers, au 29 juin 2020, figurait la caisse d
allocations familiales (CAF) à
laquelle la CTM rembourse les allocations versées aux bénéficiaires du RSA, pour
32,3
M€, soit deux mensualités de retard.
Figuraient aussi la sécurité sociale (CGSS 972)
et la caisse de retraite (CNRACL) pour, respectivement, 3,1
M€ et 2,3
M€, ce qui
représente plusieurs mois de retard de paiement.
Cette situation n
est pas nouvelle. Au 31 décembre 2019, la CTM avait un trimestre de
paiement en retard à la CAF concernant le RSA, pour un montant total de 3,6
M€,
au titre
de l
exercice 2019 (compte non tenu des autres arriérés).
La CTM ne s
est pas dotée d
un plan de trésorerie. Ses crédits de trésorerie sont
insuffisants (45
M€ tirés en 2019 sur un droit de tirage autorisé
de 123,4
M€).
En réponse au rapport d
observations provisoires, l
ordonnateur en fonction a indiqué que
«
la trésorerie de la Collectivité est suivie au quotidien. L’objectif pour la CTM est de
trouver un équilibre optimal entre les dotations prévisionnelles de
l’État et subventions et
l’utilisation des lignes de crédit
».
:
(performance)
Doter la CTM d
un plan de trésorerie.
- 10,00
10,00
30,00
50,00
70,00
90,00
110,00
janv.-20
févr.-20
mars-20
avr.-20
mai-20
juin-20
(en millions d'euros)
2020
Tresorerie nette ( >0) Solde compte 515
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
47
3.3
L’analyse financière rétrospective
3.3.1
Des recettes élevées et en croissance
3.3.1.1
Les recettes de fonctionnement par habitant de la CTM ont augmenté 2,4 fois plus
vite que
les recettes moyennes de l’
ensemble des régions et des départements
En 2015, les recettes réelles de fonctionnement (RRF) du département et de la région de
Martinique, additionnées et rapportées au nombre d
habitants, étaient supérieures de
68,5 % à la moyenne nationale des recettes par habitant des régions et départements. En
2019, cette différence était de 80,7 %.
Les RRF/hab. de la CTM ont augmenté de 2,23 % depuis 2015 et de 3,02 % par habitant,
soit plus vite que l
inflation qui a été de 0,85 % par an en moyenne. Elles ont aussi crû
2,4 fois plus vite que celles des régions et des départements ensemble.
Recettes réelles de fonctionnement (RRF) comparées entre la CTM
et les autres régions et département, de 2015 à 2019
2015
2016
2017
2018
2019
Evol. ann.
moyenne
Martinique
Région et dépt
Collectivité territoriale
RRF
879,5
M€
905,1
M€
930,9
M€
950,4
M€
960,5
M€
2,23 %
RRF/hab.
2 265
2 348
2 425
2 495
2 551
3,02 %
Ensemble des régions et départements (métropole et outre-mer)
Régions RRF/hab.
344
365
401
423
434
5,98 %
Dépts RRF/hab.
1 000
1 008
1 001
983
978
-0,55 %
Ensemble RRF/hab.
1 344
1 373
1 402
1 406
1 412
1,24 %
Source : comptes administratifs et de gestion (département, région, CTM), DGCL
La CTM perçoit, en vertu de
l’article L.
72-102-1 du CGCT, les mêmes recettes que celles
des départements et des régions de métropole, auxquelles s
ajoutent les recettes des
départements et des régions d
outre-mer.
Évolution des recettes de la région, du département
et de la collectivité territoriale de Martinique, 2015 à 2019 (
)
2015
2016
2017
2018
2019
Evol. ann.
moyenne
Martinique
Région et dépt
Collectivité territoriale
70 Prod. des serv. et du dom.
3 659 164
6 126 753
6 867 352
4 642 598
21 261 499
55,26 %
73 Recettes fiscales
575 794 059
601 352 121
622 649 035
637 478 239
649 837 270
3,07 %
74 Dotat. et participations
281 857 001
277 372 903
277 330 136
279 360 886
269 410 854
- 1,12 %
75 Autres prod. de gest. cour.
11 892 905
15 534 776
15 011 848
25 950 548
13 526 232
3,27 %
76 Produits financiers
141 572
158 846
84 926
45 152
77 489
-13,99 %
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
48
77 Produits exceptionnels
3 498 759
2 676 576
6 855 152
0
0
- 100,00 %
78 Reprises sur amorts et prov.
2 282 038
0
0
0
0
0,00 %
Total des recettes
879 125 497
903 221 974
928 798 450
947 477 423
954 113 344
2,12 %
Source : chambre régionale des comptes à partir des comptes de gestion
Les recettes fiscales (chapitre 73) représentent la première recette de la CTM. Leur poids
s
accroît de 2,6 points de pourcentage dans le total pour atteindre 68,1 % des ressources
de fonctionnement en 2019. En contrepoint, les dotations et participations reculent de
3,8 points pour atteindre 28,2 % des ressources de fonctionnement en 2019. Au total,
l
autonomie financière de la CTM se renforce, passant de 67,9 % à 71,8 %, de même que
son autonomie fiscale qui caractérise les recettes fiscales sur lesquelles elle dispose d
un
pouvoir d
assiette ou de taux, passant de 65,5 % à 68,1 % de ses recettes.
3.3.1.2
Les recettes fiscales connaissent une croissance annuelle très supérieure à
l’inflation
À la différence des régions de métropole, la CTM dispose d
un pouvoir de taux sur la
moitié de ses recettes fiscales.
En sus, les DROM, dont la Martinique, conservent le pouvoir de taux sur leurs deux
principales recettes fiscales indirectes, la taxe sur les carburants et l
octroi de mer, qui
représentaient, ensemble, 24,2 % des recettes fiscales de la CTM en 2019. Au total, les
recettes régionales de la CTM contribuent à hauteur de 53,59 % aux recettes à pouvoir de
taux de la CTM et cette part va se renforcer encore en 2021.
La loi n° 2017-256 du 28 février 2017 de programmation relative à l
égalité réelle outre-
mer (article 139) a par ailleurs donné la possibilité à la région, dès lors qu
elle signait
avec l
Etat un plan de convergence, ce qui a été fait le 31 décembre 2018 (voir
infra
), de
fixer par délibération un taux supplémentaire d
octroi de mer régional ne pouvant
excéder 2,5 %. La CTM n
a pas envisagé, pour le moment, de recourir à cette faculté.
Elle n
a pas augmenté les taux d
imposition en 2016, ni depuis lors, par rapport aux taux
pratiqués par le département et par la région en 2015. Seuls, ont été modifiés les taux de
l
octroi de mer à raison, notamment, des modifications de la nomenclature mais, aussi, de
l
extension des listes européennes en 2019 (voir
infra
).
L’
évolution générale des recettes fiscales est donc très favorable à la collectivité
territoriale de Martinique.
Évolution chapitre 73
« Recettes fiscales »
de la région, du
département
et de la collectivité territoriale de Martinique, 2015 à 2019 (
)
2015
2016
2017
2018
2019
Evol. ann.
moyenne
Martinique
Région et dépt
Collectivité territoriale
731 Fiscalité locale
369 145 348
377 110 667
384 826 327
387 080 824
398 994 289
1,96 %
732 Fiscalité reversée
40 012 458
44 740 921
39 498 565
39 502 643
44 380 608
2,62 %
734 Fiscalité outre-mer
166 636 253
180 762 853
199 569 729
197 837 410
195 241 053
4,04 %
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
49
735 Fraction de TVA
0
0
0
14 510 977
15 490 860
6,75 %
739 Reverst et restitut.
0
- 1 262 320
- 1 245 586
- 1 453 616
0
NP
Total
575 794 059
601 352 121
622 649 035
637 478 239
649 837 270
3,07 %
Nota :
les comptes ont été retraités par rapport à la nomenclature de 2019 pour comparer les années
Source :
comptes de gestion
La croissance des recettes fiscales repose en premier lieu sur les recettes locales qui
représentent 40,3 % de la croissance (+ 29,9
M€), puis
sur les recettes spécifiques à
l
’outre
-mer pour 38,6 % de la croissance (+ 28,6
M€)
et, enfin, sur la fraction de TVA,
recette apparue en 2018, pour 20,9 % de la croissance (+ 15,5
M€).
La fiscalité locale (compte 731) se compose de fiscalité directe et de la fiscalité indirecte.
La fiscalité directe, payée par le contribuable local, comporte la taxe foncière sur les
propriétés bâties (TFPB, taxe d
origine départementale), la cotisation sur la valeur ajoutée
des entreprises (CVAE) et l’imposition forfaitaire
sur les entreprises de réseau (IFER),
impositions départementales et régionales. Elle augmente globalement plus vite que
l
inflation.
En 2019, la TFPB a contribué à hauteur de 74,42
M€ aux recettes fiscales de la CTM.
C
est, avec la taxe intérieure de consommation des produits énergétiques (TICPE) et la
taxe sur les carburants (voir
infra
), la principale ressource de la collectivité.
Ensemble, CVAE et IFER représentaient 10 % des recettes fiscales de la CTM en 2018.
Les recettes fiscales indirectes comprennent :
-
les droits d
’enregistrement, de
28
M€ en 2019, particulièrement dynamiques
avec une croissance de 12,9 % par an sur la période, suivant la courbe des
ventes immobilières ;
-
les impôts et taxes sur la production et sur la consommation énergétiques et
industrielles qui représentent 26,5 % des recettes fiscales totales.
De 165,04
M€ en 2019, la TICPE
-LRL reste la première recette de la CTM, en
contraction de 3,4
M€ depuis 2015. La CTM perçoit
depuis 2016 une deuxième part de
TICPE, dite Grenelle, pour les compétences transférées en 2015
; elle s’est élevée à
4,3
M€ en 2019.
Les taxes liées aux transports et aux véhicules comprennent la taxe sur le permis de
conduire (moins de 300 000
en 2019), supprimée au 1
er
janvier 2020, et la taxe sur les
certificats d
immatriculation, perçues au bénéfice des régions. La CTM n
a pas utilisé le
levier que représente la possibilité de délibérer en modulant cette taxe par un système de
bonus-malus selon leur degré de pollution des véhicules pour assainir le parc automobile
martiniquais et contribuer ainsi à sa politique environnementale et de santé publique.
Les taxes sur les activités de services comportent, notamment, une fraction de la taxe
spéciale sur les conventions d
assurances (TASCA), de 29,1
M€,
ressource dynamique
(+3,17 % par an).
Au titre des taxes sur les activités de services, figurent les recettes destinées au
financement de l
apprentissage qui a fortement évolué depuis 2015, année de prise de
compétence
complète
des
régions
en
la
matière,
que
la
loi
n° 2018-771
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
50
du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, dite loi Pénicaud,
a profondément réformée.
Au total, la quinzaine de taxes indirectes perçues par la CTM représente 45,78 % de ses
recettes fiscales en 2019.
La CTM est aussi bénéficiaire nette de la fiscalité reversée, mécanisme de péréquation
horizontale entre collectivités : la fiscalité reversée correspond à des ressources fiscales
dites de péréquation horizontale, c
est-à-dire prélevées et reversées entre collectivités.
Elle se décompose en six fonds. La CTM a perçu à ce titre 44,4
M€ en 2019, soit 6,83
%
de ses recettes fiscales totales, et elle contribue, en sens inverse, aux fonds de solidarité
pour 2,1
M€ en 2019,
ce qui dégage un solde net de 42,2
M€.
Outre ces recettes de fonctionnement, la CTM perçoit une part du produit des radars et
le FRDE (voir
supra
), recettes fiscales d
investissement.
La fiscalité spécifique à l
outre-mer (compte 734) alloue en outre à la CTM des recettes
de fiscalité indirecte sans équivalent en métropole :
-
la taxe sur les carburants (TSC),
-
l
o
ctroi de mer régional (ODMR) qui se substitue à la TVA payée à l’Etat en
métropole (les taux de TVA sont réduits outre-mer à cet effet).
-
la taxe due par les entreprises de transport public.
Dans l
ensemble, la fiscalité spécifique à l
outre-mer progresse deux fois plus vite que la
fiscalité directe locale et quatre fois plus vite que la fiscalité indirecte locale. Recette
assise sur la consommation, elle représente en tout 31,03 % des recettes fiscales totales et
a gagné 2,05 points de pourcentage depuis 2015.
Recettes fiscales comparées entre la CTM et les régions et
départements
de France eurocontinentale, en 2016 et en 2019 (
/hab.)
Recette/habitant
Fiscalité directe
et fiscalité reversée
Fiscalité
indirecte
Fiscalité spécifique
à l’outre
-mer
Total
2016
2019
2016
2019
2016
2019
2016
2019
CTM
400
691
779
429
469
519
1 560
1 726
Rég. et dépts de France eurocont.
420
536
632
450
0
0
956
1 082
Régions
77
168
238
129
0
0
245
367
Départements.
343
368
394
321
0
0
711
715
Différence CTM-(rég. et dép.)
- 20
155
147
- 21
469
519
604
644
Sources : comptes de gestion 2016et 2019 de la CTM, DGCL.
En 2019, hors fiscalité spécifique, la CTM a perçu 134
€/hab.
(155
21) de plus que la
recette moyenne par habitant additionnée des régions et départements de métropole. La
fiscalité spécifique aux DROM qui compte pour 30,04 % des recettes fiscales totales, a
procuré à la CTM 519
€/hab. supplémentaires
. Ainsi, la CTM a bénéficié de recettes
fiscales supérieures de 644
€/hab. à celle d
es régions et départements de France euro-
continentale en 2019 (59,6 %).
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
51
3.3.1.3
La gestion de l
octroi de mer régional justifie plusieurs critiques
Une présentation synthétique du régime de l
octroi de mer figure en annexe n° 3 du
présent rapport.
Des délibérations irrégulières
En premier lieu, les délibérations n° 17-512-1 du 19 décembre 2017 et n° 18-117-1 du
4 avril 2018 ont été publiées au RAA, sous la responsabilité du président de l
assemblée
de Martinique, sans leur annexe, ce qui est une entorse à l
obligation de publication des
délibérations dans leur intégralité, compromettant le droit à l
information des assujettis et
plus généralement des citoyens. Cette omission pénalisante a été corrigée en 2019 avec
la publication intégrale de la délibération n° 19-539-1 du 19 décembre 2019.
En second lieu, la délibération n° 19-29-1 du 14 février 2019 accorde, entre autres
dispositifs, une exonération d
ODM sur les affrètements des «
aéronefs utilisés par des
compagnies de navigation aérienne dont les services à destination ou en provenance de
l
étranger ou des collectivités et départements d
outre-mer, représentent au moins 80 %
des services qu
elles exploiten
t ».
Le fondement légal de cette délibération est l
article 7-1 de la loi 2004-639 du 2 juillet
2004, dans sa version modifiée par la loi n° 2014-765 du 29 juin 2015, qui prescrit que le
conseil régional (la CTM) peut exonérer d
ODM les importations «
de carburants
destinés à un usage professionnel qui ont fait l
objet d
une adjonction de produits
colorants et d
agents traceurs conformément à l
article 265 B du code des douanes. Cette
exonération est accordée par secteur d
activité économique
. ».
La restriction par la CTM de l
exonération, sous couvert d
une formulation d
intérêt
général,
ne bénéficie qu’à
une seule compagnie, le critère établi conduisant à en faire la
seule bénéficiaire, ce qui est illégal.
La jurisprudence européenne considère qu
une mesure qui accorde un avantage
conditionné par la réalisation d
une opération économique peut être qualifiée d
aide
d
État dès lors qu
elle est « sélective », c
est-à-dire qu
elle vise une entreprise
déterminée. Dans ce cas, la Commission européenne présume qu
il y a une distorsion de
la concurrence. L
entreprise bénéficiaire court donc le risque de devoir rembourser l
aide
perçue.
Le site de la CTM propose aux entreprises de demander une exonération des droits
d
octroi de mer à l
importation. Bien que la délibération soit prise au bénéfice de
l
ensemble du secteur activité économique concerné, le caractère monopolistique d
une
partie notable de l
économie locale place les entreprises en situation de dépendance vis-
à-vis de la CTM. Quant aux secteurs dans lesquels existe une concurrence, une telle
demande les place en situation d
inégalité car la demande profite au demandeur qui est
prêt à financer son projet. Au demeurant, si la loi avait autorisé un régime d
’exoné
ration
individuelle
, elle aurait prévu un dispositif de mise en œuvre.
Dans sa réponse aux observations provisoires, l
ordonnateur en fonction a précisé que
pour chaque secteur, il existe «
une liste de biens d’équipements et de matières premières
donnant
lieu à exonération des droits d’octroi de mer. Les évolutions à la fois tarifaires et
techniques conduisent les entreprises à solliciter l’ajout ou le retrait de produits dans les
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
52
listes d’équipements et de matières exonérés. Il n’y a cependant aucun acte
concernant
une décision d’exonération individuelle prise par la Collectivité
». Le président du conseil
exécutif ajoute que « bien que portée par un opérateur, la décision de modification
impacte l’ensemble du secteur, se traduit par une modification de la
liste des biens
exonérés et bénéficie immédiatement et automatiquement à tous les opérateurs qui le
sollicitent au travers de leurs déclarations d’importation
» et il en conclut «
qu’il n’y a
donc pas de décision d’exonération individuelle même pour celui
qui est à l’origine de la
demande ».
La réponse de l
ordonnateur conforte l
analyse présentée par la chambre d
un
fonctionnement à la carte, l
exonération étant sollicitée par les entreprises intéressées
même si elle est accordée ensuite impersonnellement à un secteur. Si le processus ne
donne pas lieu à exonération individuelle, compte tenu des modalités de fixation des
champs d
exonération et des limitations introduites, le résultat concourt à répondre
favorablement à une demande d
exonération d
une entreprise, de manière étroite et
ciblée, ce qui est équivalent.
Des « surcoûts » allégués mais fondés sur des données non fiables ni transparentes
En ce qui concerne les produits de liste qui bénéficient d
un écart de taxe qui les protège
de la concurrence des produits « importés », les différentiels sont fondés sur les surcoûts
allégués, dont le mode de calcul n
’est pas recevable.
La région Martinique a, en effet, élaboré en 2014 et 2015, sur la base d
un échantillon
d
entreprises volontaires, un calcul des surcoûts des productions locales, pour justifier les
écarts de taux d
octroi de mer des listes européennes A, B et C. Selon le rapport de la
CTM rendu public en 2017,
« le taux de surcoût de chacun des postes
[de surcoût a été
calculé]
en se fondant sur les dires des industriels, leur connaissance des coûts supportés
par leurs compétiteurs sur le continent européen, ou encore sur les bilans publiés par
certaines entreprises en Europe. Quand plusieurs entreprises relèvent du même produit,
ou du même secteur, une analyse comparée a été utilement menée »
.
Les données présentées par les entreprises de l
échantillon consistent en des «
dires
» et
des «
connaissances
»
et sont, donc, purement déclaratives et unilatérales. C’est pourtant
de cette collecte subjective que, dans ses rapports officiels, la CTM tire des statistiques
d
écarts et d
évolution interannuelle de ces écarts à la virgule près.
En outre, la CTM ne retient que l
aide au fret et les exonérations d
octroi de mer interne
pour calculer le taux de compensation des surcoûts. Or, le même rapport établit que les
entreprises de l
échantillon ont bénéficié parallèlement de 72,7
M€ d’
autres aides
diverses ayant le même objectif d
aide aux productions locales, dont les exonérations
d
octroi de mer externe. Au total, les entreprises de l
échantillon ont pu bénéficier d
aides
à hauteur de 45,75 % de leur chiffre d
affaires (moyenne 2014-2015), soit bien au-delà
du taux prétendu de surcoût.
En l
absence de justification objective des calculs de surcoûts, l
ensemble du dispositif
d
octroi de mer est susceptible de porter atteinte à la libre-concurrence. En effet, la
décision européenne du 17 décembre 2014 souligne que le respect de l
article 349 du
TFUE suppose que «
le différentiel de taxation autorisé
[n
excède pas]
les surcoûts
justifiés
[…]
afin de ne pas nuire à l
intégrité et à la cohérence de l
ordre juridique de
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
53
l
Union, y compris le maintien d
une concurrence non faussée dans le marché intérieur
et les politiques en matière d
aides d
État
».
Dans sa réponse au rapport d
observations provisoires, l
ordonnateur observe qu
il
n
existe « aucun référentiel ni national ni communautaire sur la méthode de calcul des
surcoûts en dépit des nombreuses initiatives observées depuis 1999 y compris au niveau
communautaire ». Ainsi, face à ces réalités, un prestataire a été mandaté, lequel « réalise
annuellement des enquêtes qui touchent aujourd
hui la quasi-totalité des entreprises
assujetties et redevables de l
octroi de mer ». L
ordonnateur remarque que « la méthode
de calcul de surcoût et des parts de marché alimentant les rapports aux instances
communautaires n
ont ce jour soulevé aucune objection même si celles-ci sont
perfectibles » et relève que « la création de l
observatoire de l
octroi de mer engagé
depuis 2019 et le conventionnement avec un centre de recherche devraient contribuer à
la
fiabilité
des
données
communiquées
notamment
dans
la
structure
des
surcoûts ». S
agissant de la méthode de calcul des surcoûts, le président du conseil
exécutif observe qu
il n
y a pas de méthode officielle de calcul ni
d’
approche partagée de
cette notion, et cite le rapport Legrand de 2012 commandé par la Commission européenne
comme référentiel pouvant être pris en compte.
:
(performance)
Fonder les surcoûts, les différentiels de
taxation et les exonérations
de l’octroi de mer
sur des
données fiables et vérifiables.
Une mauvaise imputation comptable du fonds régional pour le développement
économique (FRDE)
Recette d
investissement, le versement du FRDE devrait figurer au chapitre 10
« Dotations, fonds divers et réserves »
du budget de la CTM et être affecté prioritairement
au financement «
des projets facilitant l
installation d
entreprises et la création
d
emplois ou contribuant à la réalisation d
infrastructures et d
équipements publics
nécessaires au développement
» (article 49 de la loi n° 2004-639). Or, le FRDE est
improprement inscrit en recettes au chapitre 13 dans les comptes de la CTM (compte 1337
«
FRDE
»). Il en va de même du produit des amendes de radar, imputées à tort au compte
1335, alors qu
il s
agit aussi de ressources propres de la CTM.
Dans sa réponse au rapport d’observations provisoires, l’ordonnateur en fonction
s’engage à prendre en compte cette recommandation.
:
(régularité)
Imputer les recettes de FRDE au chapitre 10
« Dotations, fonds divers et réserves »
en tant que recette
propre d
investissement.
3.3.1.4
Des dotations et participation qui enregistre une diminution
Le compte 74 «
Dotations et participations
» retrace, d
une part, les versements reçus au
titre des dotations d
e l’
État (comptes 741 et 746) et, d
autre part, au compte 747, les
versements (participations) reçus de divers tiers, soit en vertu de la réglementation, soit
en exécution de contrats ou conventions, soit sur décision unilatérale du tiers versant.
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
54
Avec 269,4
M€ en 2019, les dotations et participations se sont contractées de 1,12
% par
an en moyenne au cours de la période sous revue. Cette évolution est contrastée selon les
composantes.
Évolution 2015-2019 des dotations et participations (
)
Chapitre 74
2015
(consolidation)
2016
2017
2018
2019
Evolution
annuelle
moyenne
741 Dotation globale de fonctionnt
177 678 411
169 310 348
161 651 045
146 765 443
145 690 108
- 4,84 %
744 FCTVA
4 123 340
1 479 848
ns
745 Dotat. apprent. et form. profess.
3 418 200
7 975 799
ns
746 Dotat. générale de décentralis.
40 878 492
40 717 528
40 683 184
40 909 396
40 894 462
0,01 %
747 Participations
46 311 051
42 663 915
57 683 085
61 588 878
65 879 369
9,21 %
748 Compensations
16 989 047
21 262 912
17 312 822
17 754 481
15 467 067
- 2,32 %
Total
281 857 001
277 372 903
277 330 136
279 387 338
269 410 854
-1.12 %
ns :
non significatif
Nota :
Les comptes ont été retraités par rapport à la nomenclature de 2019 pour comparer les années
Source :
comptes de gestion
La dotation globale de fonctionnement (DGF) se subdivise entre DGF du département et
DGF de la région. La DGF du département voit sa composante forfaitaire diminuer de
32 % sur la période, soit 8
M€ par an en moyenne,
tandis que ses trois autres composantes
sont maintenues ou diminuent de moins de 1 %. La DGF régionale (18,8
M€ en 2015) a
été supprimée en 2018. La principale dotation du compte 741 est désormais la dotation
de compensation des départements (compte 741223) qui s
’est élevée
à 99,6
M€ en 2019.
Le compte 7488 enregistre les participations des familles, notamment au titre de la
restauration et de l
hébergement scolaires, pour un montant annuel qui varie fortement et
qui a chuté de 3,3
M€ à 0,7
M€
de 2016 à 2019.
Depuis 2016, la part des recettes « régionales » s
est renforcée dans le panier de recettes
de la CTM par rapport à la part « départementale » :
-
en 2015, le département de la Martinique représentait 71,31 % du budget
consolidé (hors budgets annexes) de l’ensemble qui prép
are sa fusion ;
-
depuis 2016, les recettes fiscales « régionales » ont progressé trois fois plus
vite que les recettes « départementales » et contribué à accroître de 2,5 points
l’autonomie financière de la CTM, qui atteint 68,18
% en 2019.
En réponse au rapport d
observations provisoires, l
ordonnateur en fonction a indiqué que
«
malgré l’augmentation de certaines recettes, celles
-ci ne permettent pas de compenser
le reste à charge important que doit supporter la CTM en lieu et place de l’État
; ceci est
particulièrement vrai pour les allocations individuelles de solidarité en constante
augmentation. De 2004 à 2020, ce sont en effet, près de 924
M€ qui n’ont jamais été
compensés par l’État. En 2020, le reste à charge financé par la CTM s’élève ainsi
à 87
M€
».
La chambre relève que le chiffre du reste à charge non documenté par l
ordonnateur doit
être considéré avec précaution, dès lors qu
il est
a minima
surévalué de 21,15
M€ à raison
de la comptabilisation de dépenses relatives au RSA relatives à des exercices antérieurs
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
55
qui n
avaient pas été rattachées. Ainsi, le reste à charge s
élèverait à 65,85
M€ au lieu de
87
M€, ce qui représentent 7
% des produits de gestion.
3.3.2
Des dépenses maîtrisées au cours des quatre premières années
Les dépenses réelles de fonctionnement (DRF) ont évolué comme il suit :
Évolution des dépenses réelles de fonctionnement de 2015 à 2019
(
M€
)
2015
2016
2017
2018
2019
Évolution
annuelle
moyenne
Département
Région
Consolidé
Collectivité de Martinique
DRF
(M€)
582,97
225,50
808,47
859,63
878,40
867,06
852,74
1,34 %
Par hab.
(€)
1 486
581
2 082
2 230
2 288
2 276
2 265
2,13 %
Source : chambre régionale des comptes à partir des comptes de gestion
Sur la période 2015-2019, les DRF ont augmenté de 1,34 % en moyenne annuelle (2,13 %
par habitant). Elles ont connu un maximum en 2017 et diminuent depuis lors (-3 %).
L
évolution des charges est contrastée sur la période (voir annexe n° 4) :
-
les charges à caractère général, les charges financières et l
’indemnisation du
RSA diminuent mais, à l
inverse, l
allocation personnalisée d
autonomie
(APA) augmente de 34,05 %, en relation avec le vieillissement de la population
martiniquaise ;
-
les dépenses totales ont atteint un maximum de 915
M€ en 2017 puis le niveau
de 2019 est redescendu à celui de 2016.
3.3.2.1
Une évolution en accordéon des charges à caractère général
Après avoir fortement augmenté de 2015 à 2016, en relation avec les factures sur
exercices antérieurs non rattachées, les charges à caractère général ont diminué de 44 %
de 2016 à 2019.
Seules les locations immobilières et les remboursements de frais ont augmenté depuis
2016. Tous les autres postes de charge ont diminué.
Cette maîtrise des charges est évidemment positive, sous réserve qu
elle soit durable et
réaliste.
3.3.2.2
Une masse salariale contenue mais porteuse de risque de dérive financière à
moyen terme
Les charges de personnel s
élèvent à 207,3
M€ en 2019. Elles ont augmenté de 6
% au
cours de la période 2015-2019, ce qui correspond à une moyenne annuelle de 1,5 %.
Pour autant, avec 23,9 % de dépenses de personnel sur les dépenses réelles de
fonctionnement en 2018, la CTM se situe au-dessus du ratio des régions métropolitaines
(16,7 %) et des départements métropolitains (21,2 %), bien qu
elle se situe dans la
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
56
moyenne des départements d
outre-mer et au-dessous des autres régions et collectivités
uniques ultramarines.
Elle hérite une situation déjà très marquée par les dépenses de personnel excessives : de
2011 à 2015, l
augmentation des charges de personnel de la région et du département
étaient largement supérieure à celle de leurs homologues de la France eurocontinentale.
L
augmentation de la masse salariale en 2016 (+
7,2 M€
) n
est pas due principalement à
l
effet de la refonte des régimes indemnitaires. En effet, la majeure partie de cette
augmentation de la masse salariale résulte des recrutements opérés en 2015 :
-
l
effectif régional s
est accru de 167 agents en 2015, dont 82 % au premier
grade, ce qui ne correspond pas à un besoin lié à l
évolution des compétences
de la région ; compte-tenu de la concentration des recrutements à la fin de
l
année 2015, l
effet de ces recrutements en année pleine 2016 peut être estimé
à 5,7
M€
;
-
l
effectif départemental a crû de 115 agents au cours de l
année 2015, très
majoritairement en catégorie C ; en particulier, le nombre d
assistants
familiaux est passé de 346 à 407, sans qu
un état des besoins justifie cette
augmentation soudaine.
De 2015 à 2019, la masse salariale a augmenté de 6 %, comme il suit :
Évolution de
s charges de personnel (M€
)
2015*
2016
2017
2018
2019
Évolution
annuelle
moyenne
Rémunération du personnel
146,3
151,9
152,5
150,3
152,0
1,0 %
Charges sociales, impôts et taxes
48,5
46,8
53,1
56,1
54,9
3,1 %
Autres charges de personnel
0,8
4,0
2,6
0,3
0,3
-18,8 %
Total
195,6
202,7
208,3
206,7
207,3
1,5 %
*
consolidation des comptes du département et de la région Martinique
Source :
comptes de gestion
Au cours de la mandature actuelle, de 2016 à 2019, la masse salariale n
a augmenté que
de 2,2 %, soit 0,7 % par an.
Or, par son origine, cette évolution de la masse salariale est porteuse de risques à moyen
et à long terme :
-
l’effectif
total a progressé de 319 agents de 2016 à 2019, passant de 3 409
à 3 728 personnes ;
-
cette évolution
s’explique
par le départ, non remplacé, de 169 titulaires et par
l
embauche concomitante de 488 non-titulaires ;
-
les non-titulaires, globalement plus jeunes et moins qualifiés, coûtent moins
cher et contribuent dans un premier temps à la diminution des charges de
personnel ;
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
57
-
en particulier, les adjoints techniques (y compris ceux des établissements
scolaires) sont passés de 1 328 à 1 545 (+16,34 %), soit 68,03 % de
l
augmentation totale de l
effectif ;
-
une titularisation aux premiers grades de ces contractuels qui occupent des
emplois permanents, se traduirait par une reprise de l
augmentation mécanique
de la masse salariale par le seul effet GVT.
En réponse au rapport d
observations provisoires, l
ordonnateur a expliqué l
importance
des recrutements des non titulaires par «
la diminution des emplois aidés dans les
établissements scolaires
» et les «
besoins de remplacement de nombreux agents en arrêt
maladie prolongés et pour certains atteints de troubles musculo-squelettiques
».
En outre, les emplois budgétaires non pourvus ne sont pas budgétés, ce qui est irrégulier,
pour un coût de 33,9
M€ en 2019. Bien que le nombre d’
emplois vacants ait diminué
de 45 de 2016 à 2019, avec 611 unités, il demeure trop élevé et la CTM est invitée à
ajuster ce nombre à celui dont le recrutement ou la promotion sont réellement prévus.
:
(régularité)
Ajuster le nombre d
emplois vacants du
tableau d
effectif aux besoins et budgéter le coût des
emplois budgétaires totaux.
3.3.2.3
Une augmentation modérée mais durable des autres charges de gestion
Les
« Autres charges de gestion courante »
(chapitre 65) incluent les aides à la personne
(compte 016
« APA »
et 017
« RSA »
). Elles ont augmenté en moyenne de 2,01 % par an
de 2016 à 2019, comme il suit :
Évolution des autres charges de gestion
(M€)
2016
2017
2018
2019
Évolution
annuelle
moyenne
Aides directes à la personne
386,50
378,59
376,06
374,57
-1,04 %
Indemnités des élus
3,31
2,93
2,90
2,84
-4,97 %
Contributions obligatoires
38,73
36,00
34,30
41,29
2,15 %
Participations et subventions de fonctionnement
115,75
170,72
177,93
159,05
11,18 %
Total
544,29
588,24
591,20
577,75
2,01 %
Source : comptes de gestion
Les autres charges de gestion connaissent des évolutions très différentes. Les aides
directes à la personne ont diminué en valeur absolue sous l
effet, notamment, de la baisse
du nombre d
allocataires du RSA ; de même, les indemnités des élus ont diminué. À
l
inverse, les participations et subventions ont augmenté de 11,18 % par an.
3.3.2.4
Une proportion de la fonction « services généraux »
qui brouille l’analyse d
es
dépenses par fonction
Si les dépenses par fonction augmentent de 3,46 % au cours de la période, l
évolution est
contrastée, ainsi qu
en rend compte le tableau suivant.
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
58
Évolution des dépenses par fonction de 2015 à 2019
(€)
2015
(consolidée)
2016
2019
Évolution
930
« Services généraux »
143 098 333
217 501 939
190 061 450
32,82 %
930-5
« Gestion des fonds européens »
-
9 036 537
8 753 054
NP
931
« Sécurité »
15 225 933
18 006 336
17 101 093
12,32 %
932
« Enseigt formation prof. et apprentissage »
113 943 011
83 829 980
78 301 901
-31,28 %
933
« Culture, vie soc., jeun., sports et loisirs »
30 782 539
9 685 775
21 768 633
-29,28 %
934
« Santé et action sociale »
163 312 996
127 519 693
136 205 980
-16,60 %
934-3
« All. personnalisée d
autonomie (APA) »
48 585 020
60 099 798
65 128 545
34,05 %
934-4
« Revenu de solidarité active (RSA) »
218 392 050
217 348 926
210 616 443
-3,56 %
935
« Aménagement du territoire et habitat »
1 551 508
2 578 682
2 521 072
62,49 %
936
« Action économique »
27 971 385
16 524 637
14 900 263
-46,73 %
937
« Environnement »
9 435 745
8 736 985
9 529 226
0,99 %
938
« Transports »
37 555 534
78 461 748
83 010 389
121,03 %
Total
809 854 054
849 331 035
837 898 049
3,46 %
Source : comptes administratifs
La CTM a choisi de faire figurer plus de 25,6 % de ses dépenses dans la catégorie 930
« Services généraux »
, notamment la grande majorité des dépenses de personnel (158
M€
en 2019), ce qui entrave l
analyse.
Cela explique la diminution de la plupart des dépenses des fonctions budgétaires. La
transparence et la qualité de l
information budgétaire y ont perdu. La CTM devrait répartir
les charges de personnel dans les différentes fonctions, sauf les fonctions support à
l
évidence partagées.
La plus grande part des efforts consentis depuis 2016 sur les dépenses porte sur ces
services généraux (-27,5
M€), notamment sur les charges à caractère général non
individualisées.
Par grande masse, c
est le champ social (trois fonctions) qui représente la première
dépense de la CTM, avec 49,16 % des dépenses par fonction en 2019. Parmi les dépenses
sociales, le RSA représente 25,14 % des dépenses par fonction de la CTM.
Quelques fonctions connaissent une augmentation des dépenses, notamment :
-
à compter de 2016, la CTM est autorité de gestion du FEDER, du FEADER et
d
une partie du FSE, et organisme intermédiaire avec une subvention globale
pour certaines mesures régionalisées du FEAMP et du FSE-Inclusion de
l
État ; les dépenses demeurent faibles, en raison de retards dans l
exécution ;
-
la sécurité a pour principale dépense le financement du service départemental
d
incendie et de secours (SDIS), pour 18
M€ en 2019
;
-
l
APA augmente, en cohérence avec le vieillissement et la dépendance de la
population, comme indiqué
supra
;
-
le
logement
social
explique
l
’augmentation
de
la
f
onction 935
« Aménagement »
;
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
59
-
la fonction 938
« Transports »
qui représentait 37,6
M€ en 2015, a progressé
dès 2016 pour atteindre 78,5
M€ puis 83
M€ en 2019, dont 58,5
M€ de
subvention au syndicat mixte Martinique Transport.
3.4
La projection à moyen-long terme et les effets de la crise de la Covid-19
La CTM ne s
est pas dotée d
une analyse prospective pluriannuelle ni de la capacité d
en
produire une. La projection financière est donc annuelle, dans le cadre de la préparation
et de l
exécution budgétaire.
La prospective budgétaire est un exercice indispensable pour une collectivité de cette
importance, enserrée dans un ensemble d
’obligations et d
e contractualisations qui
contraignent ses marges de manœuvre en l’
engageant à court, moyen et long terme. Elle
l
est d
autant plus dans le contexte de la crise sanitaire de la Covid-19.
La prospective budgétaire a pour objectif
d’éclairer les choix suivants
:
-
à fiscalité constante, déterminer le montant possible des investissements sans
modifier les grands équilibres de la collectivité ;
-
à programme d
investissement maintenu et à dépenses de fonctionnement
constantes,
déterminer
le
montant
nécessaire
de
recettes
fiscales
supplémentaire et, donc, d
augmentation des taux ;
-
à programme d
investissement maintenu et à fiscalité constante, déterminer le
montant des économies nécessaires sur les dépenses de fonctionnement.
3.4.1
L
absence de prospective pluriannuelle explique la situation préoccupante du
patrimoine de la CTM
3.4.1.1
La CTM ne s
est pas dotée d
une méthode de prospective pluriannuelle
La CTM a consenti d
importants efforts de maîtrise et de réduction de ses dépenses
compressibles. Ce travail ne peut pas être poursuivi sans que soient identifiées
précisément les lignes budgétaires et les fonctions sur lesquels ces efforts peuvent être
maintenus, voire accentués, ou, au contraire, les services qui pourraient être privés des
moyens de leur action.
La CTM doit engager une expertise des économies possibles et mettre un terme à la
diminution indifférenciée des dépenses.
En matière de recettes, outre le pouvoir de taux, la CTM ne recourt pas aux informations
lui permettant d’optimiser l
es recettes dues (TFPB et octroi de mer notamment), au-delà
de
ce
qui
est
prévu
au
schéma
régional
de
développement
économique,
d
internationalisation et d
innovation (SRDEII)
3
.
L’expérience des observatoires fiscaux
a permis à de nombreuses collectivités de recouvrer d’importantes sommes dues, en
partenariat avec la DRFiP.
3
Le SRDEII et ses fiches-actions prévoient une «
étude de métabolisme
» réduite aux flux physiques de
biens au sein de la Martinique et une veille prospective réduite aux formations et aux besoins en emplois,
à l’ingénierie financière, à une approche individuelle de la difficulté de l’entreprise, à l’observation du
tourisme.
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
60
La CTM doit fonder sa stratégie fiscale et optimiser les recettes à partir des données
d
observation économique et fiscale.
La CTM n
a pas réalisé d
ordinogramme des risques financiers. Parmi ces risques
figurent en particulier les risques provisionnés et les engagements hors bilan mais, aussi,
par exemple, la fraude (sur les aides sociales ou sur les recettes fiscales déclaratives
comme l
octroi de mer).
:
(performance)
Réaliser une prospective budgétaire
pluriannuelle en vue de vérifier la soutenabilité de la
trajectoire suivie.
3.4.1.2
La soutenabilité des engagements n
est pas assurée
Le patrimoine bâti de la collectivité comporte 332 bâtiments, pour 935 000 m² de surface
de plancher. Il s
agit d
un patrimoine d
une ancienneté moyenne de 45 ans :
-
au 31 décembre 2015, la région déclarait 428 736 m² de surface utile de
bâtiments pour une valeur comptable de 424,5
M€
; elle consacrait 26,1
M€ de
travaux aux bâtiments en 2015, soit 60,9
/m² ;
-
à la même date, le département ne déclarait pas ses surfaces bâties mais celles-
ci peuvent être déduites de celles de la CTM (506 000 m²) ; ce patrimoine était
déclaré pour une valeur de 668
M€
; le département y consacrait 17,2
M€ de
travaux, soit 34
€/m².
Au vu de la valeur cumulée des investissements sur le patrimoine, rapportée à la surface
bâtie respective, l
état global du patrimoine départemental se présentait, au 31 décembre
2015, dans un état plus dégradé que celui de la région, mieux entretenu.
La CTM a évalué à 75
M€ par an le besoin de mise aux normes, de gros en
tretien et de
travaux.
De 2014 à 2019, les crédits exécutés ont été les suivants :
Dépenses d
investissement sur les bâtiments,
de 2014 à 2019 (M€)
Région + Département
CTM
2014
2015
2016
2017
2018
2019
48,8
43,3
37,6
29,1
42,6
62,0
Source : comptes de gestion
Les travaux d
investissement sur le patrimoine de la collectivité sont inscrits dans un plan
pluriannuel d
investissement (PPI), document interne qui n
a pas été délibéré. La version
actualisée de ce PPI glissant, en projection 2020-2025, comprend aussi une partie relative
au coût de fonctionnement des bâtiments et installations (entretien et maintenance).
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
61
Besoins de financement du patrimoine régional retracé dans le PPI
(
M€
)
2021
2022
2023
2024
2025
Total
En investissement
95,8
121,0
113,0
98,7
96,8
525,3
En fonctionnement
4,9
4,9
4,9
4,9
4,9
24,5
Total
100,7
125,9
117,9
103,6
101,7
549,8
Source : PPI 2020-2025 de la CTM (édition avril 2020)
Le tableau de suivi des AP au 7 décembre 2017 présente la programmation pluriannuelle
2018-2022. Un certain nombre d
opérations ont été rayées, comme le désamiantage,
l
accessibilité et la protection contre les risques naturels des établissements scolaires.
Les opérations déprogrammées en décembre 2017 ont été reprogrammées au PPI 2020-
2025 et prévues pour l
exercice 2020 mais n
ont pas été votées au budget primitif, à
l
exemple du désamiantage, du renforcement parasismique ou paracyclonique des
bâtiments administratifs ou de leur mise en accessibilité. Ces opérations sont
«
reportées
» d
année en année, dont 13,1
M€ de 2020 à 2021. Au total, sur 85,48
M€
proposés par les services et validés au PPI, seulement 48,9
M€ ont été votés au BP
pour 2020.
Il s
agit pourtant de travaux prioritaires qui portent, non seulement, sur la sécurisation de
l
’existant
mais, aussi, sur des obligations légales et réglementaires. Un certain nombre de
ces opérations figurait déjà au PPI de 2012 de la région. Ainsi, le patrimoine de la
collectivité est insuffisamment entretenu et se dégrade du fait de ces reports réitérés de
travaux.
Selon le PPI, 110
M€/an seraient nécessaires jusqu’
en 2025 pour assurer la remise en état
et l’entretien du patrimoine de la collectivité.
Au demeurant, le PPI ne prévoit aucune dépense en matière de développement durable
(récupération des
eaux de pluie, installations photovoltaïques…). Son taux de réalisation
pour la période 2016-2020 n
est pas connu.
:
(performance)
Délibérer et mettre en œuvre le plan
pluriannuel d
investissement sans reporter davantage
les travaux indispensables.
:
(performance)
Ajuster
le
budget
d’entretien
du
patrimoine de la collectivité aux besoins vérifiés.
3.4.1.3
La prolongation
jusqu’en 2022
des tendances conduit à constater une contraction
de la CAF nette
La poursuite
jusqu’en 2022
des tendances observées au cours de la période 2016-2019,
c
’est
-à-dire une maîtrise des dépenses de fonctionnement et un endettement raisonnable
(capacité de désendettement de 7,3 ans en 2022), révèle une contraction significative de
l’épargne nette de la collectivité et, donc, de l’autofinancement des investissements. Cette
prospective a été bâtie sous hypothèse de maintien des recette
s, c’est
-à-dire d
une
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
62
compensation par l
État des pertes de recettes fiscales économiques de la CTM au cours
de la crise économique consécutive à la pandémie de Covid19, par rapport à la moyenne
des trois exercices précédents.
Projection 2020-2022 de la capacité d
autofinancement
(M€)
2019
2020
2021
2022
Produits de gestion
956 17
934,05
931,39
940,62
Charges de gestion
835,41
833,89
832,52
831,28
Excédent brut d
exploitation
120,76
100,17
98,87
109,34
CAF brute
108,13
86,53
85,47
96,47
CAF nette
63,86
42,46
36,67
44,49
Source : chambre régionale des comptes
Au titre de son budget supplémentaire des 30 et 31 juillet 2020, la CTM a voté un emprunt
de 160
M€, en plus des 70
M€ votés au BP, ce qui portera
à 850
M€ le capital restant dû
(CRD) au 31 décembre 2020. Une telle projection d
’emprunt améliorera
la capacité à
financer les investissements mais dégradera la capacité de désendettement de la
collectivité (9,8 ans, 10
ans constituant un niveau d’alerte
).
3.4.2
Les conséquences financières de la crise sanitaire sur la prospective budgétaire de
la CTM ne sont pas encore mesurables
3.4.2.1
Une crise économique dont la gravité ne peut pas encore être mesurée
Au moment de la production du présent rapport, les incertitudes qui pèsent sur la
croissance mondiale, européenne, française et martiniquaise conduisent à prendre avec
précaution les éléments chiffrés qui suivent.
Les chiffres du recul de l
activité qui a suivi le premier confinement (mars à mai 2020)
ont beaucoup varié : - 27 % (CEROM, 7 mai 2020), - 30 % (IEDOM, 14 mai 2020)
- 20 % (INSEE Flash n° 137, juin 2020). Ces chiffres sont construits selon une
modélisation de l
INSEE modulée par l
indicateur de confiance des affaires (ICA) de
l
IEDO
M.
Aucune
estimation
n’a
su
ivi
le
deuxième
confinement
(octobre-
novembre 2020).
La reprise de l
activité consécutive à la levée des deux confinements n
est pas moins
délicate à mesurer. Les statistiques officielles ont souvent six mois de décalage sur les
événements et les publications les plus récentes ne prennent pas encore en compte les
effets de la crise.
Quelques indicateurs relatifs au premier semestre de 2020 sont néanmoins disponibles :
-
la consommation finale des ménages a diminué de 8 % au cours du premier
confinement (- 215
M€) et la sortie du confinement ne s’
est pas traduite par un
rattrapage, ce même montant se retrouvant dans les comptes à vue et spéciaux
des ménages, fin juin 2020 (source : IEDOM) ;
-
le nombre de demandeurs d
emploi de catégorie A a augmenté de 9 % au
second trimestre 2020 (+3 540 personnes) et s
établit à 42 240 (+4,3 % en un
an) ;
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
63
-
la consommation d
électricité a reculé de 7,66 % au cours des neuf semaines
du premier confinement par rapport à la même période de 2019 et de - 0,16 %
au cours des 12 semaines (du 11 mai au 2 août) qui ont suivi le déconfinement
(source : EDF) ;
-
l
immatriculation de véhicules neufs a baissé de 24 % de janvier à août par
apport à la même période de 2019 (source : IEDOM) ;
-
la fréquentation de l
aéroport Aimé-Césaire a chuté de 48,60 % au premier
semestre 2020.
La mesure de
l’impact de l’épidémie sur
l
activité marchande est sujette à caution en
raison de l
importance du secteur informel qui peut être estimé, par différence entre le
revenu disponible et le revenu déclaré, à 14,4 % du « PIB » martiniquais, au moins et en
nombre d
emplois. La part du secteur informel dans la chute ou, au contraire, le maintien
de l
activité, comme dans la reprise qui l
a suivie, est impossible à établir.
Dans ce contexte, la dépense publique reste déterminante :
-
l
effet des mesures de l
Etat venant au soutien de l
économie devrait être
significatif mais n
est pas encore mesurable sur le « PIB » 2020 de la
Martinique ;
-
les décisions de la CTM prises de mars à juillet 2020 (voir ci-dessous)
représentent 2 % du PIB martiniquais de 2019 ; un second plan de relance était
en préparation par la collectivité en fin d’année.
De manière générale, au-
delà de l’action des pouvoirs publics en réaction à la crise, l
a
récession économique aura été atténuée par l
importance du secteur public et des
transferts sociaux dans l’économie locale
. Ainsi, ces facteurs ont joué comme
stabilisateurs, limitant la diminution de la consommation des ménages :
-
les retraites représentent 22 % des revenus des ménages et les prestations
sociales et indemnités de chômage 15 %, soit 3 360
M€ au total (2019)
;
-
s
agissant des agents publics, la masse des traitements et indemnités,
indifférents au niveau d’activité, a représenté 3
088
M€ en 2019
;
-
ensemble, ces revenus représentent 71 % du « PIB » martiniquais
4
en 2019
contre un peu moins de 39 % en moyenne nationale.
3.4.2.2
Une action rapide et déterminée de la CTM mais dont la mise en œuvre
démarre
seulement
Par délibérations du 9 avril 2020, la CTM a décidé de compléter le dispositif de l
État par
la création d
aides et de prêts aux entreprises (voir annexe n° 4), pour un total de près
de 50
M€.
Le budget supplémentaire du 30 et du 31 juillet 2020 programme 208,9
M€
d
investissements supplémentaires en dépenses réelles (+82,6 % par rapport au BP pour
2020), dont 148,5
M€ au titre du plan de relance
. Il autorise 56,3
M€ de dépenses
4
Le PIB correspond au total des revenus perçus sur le territoire
quelle qu’en soit l’origine, définition plus
compréhensible, pour un territoire où la production endogène est modeste et où la majorité des revenus
est d’origine publique, que ce qu’évoque l’expression
« produit intérieur brut »
.
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
64
supplémentaires en fonctionnement, dont 42,9
M€ de dépenses au titre de la lutte contre
les conséquences de la Covid-19, couvertes par 54,6
M€ de rece
ttes réelles
supplémentaires.
Au total, le besoin de financement supplémentaire s
élève à 176
M€,
dont, hors plan de
relance, 69,7
M€ directement au titre de la Covid
-19, comme il suit :
Effets de la COVID-19 sur le budget de la CTM - Estimation au 31
juil
let 2020 (M€)
Dépenses
Recettes
Investissement
Aides et prêts aux entreprises
42,00
Cofinancement État-FEDER Covid
24,90
Relance de la commande publique
106,47
Total investissement
148,47
Total investissement
24,90
Fonctionnement
Appel à projets FSE
0,90
Octroi de mer régional
- 1,09
Aide aux ménages chèques vacances
1,00
Taxe sur les tabacs
- 1,14
Subvention au LTA
0,77
Droits de mutation à titre onéreux
- 2,57
Moyens généraux (matériel, nettoyage)
1,60
Taxe sur les carburants
- 4,32
RSA
27,19
Autres taxes
- 0,61
Chantiers d
insertion, IAE, ESS
5,00
Formation et reconversion publics impactés
5,00
Santé et action sociale
1,40
Total fonctionnement
42,86
- 9,73
Total général
191,33
15,17
Nota :
estimation par la CTM au 31 juillet 2020, ne sont retenues que les variations en relation avec
la Covid-19
Source
délibérations du 9 avril 2020 et budget supplémentaire du 30 juillet 2020, CTM
Représentant plus de 2 % du PIB de la Martinique, ce budget supplémentaire était une
réponse prop
ortionnée à l’effet récessif attendu, évalué à 2
% à l’été à la fois par
l’INSEE
et par l’IEDOM. Le deuxième confinement n’a pas encore été pris en compte dans les
estimations du PIB par ces instituts. La CTM envisage un accroissement des dépenses au
titre de son plan de relance pour contrer les effets du deuxième confinement.
Ces 208,9
M€ d’investissement supplémentaires ont
cependant été décidés à un moment
tardif dans l
année, ce qui engendrera un report massif en restes à réaliser sur
l
année 2021.
La CTM a estimé les pertes de recettes fiscales à 9,7
M€. Or, l
a loi de finances
rectificative du 30 juillet 2020 établit un principe de compensation des recettes fiscales
directes et des recettes fiscales économiques des collectivités sur la base de la moyenne
des recettes des trois dernières années. À la date de production du présent rapport, les
notifications de l’État n’étaient pas encore parvenues à la collectivité. I
l n
’était donc
pas
possible,
à
cette
date,
de
prévoir
l
atterrissage
budgétaire
de
la
CTM
au 31 décembre 2020.
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
65
3.4.2.3
La gestion de prêts du plan de relance de la CTM par une association quasi-
transparente
Dans le cadre du plan de relance de la CTM, une délibération
d’avril 2020 confie
, par
marché public, la gestion des prêts à taux zéro à une structure privée. La délibération ne
détermine pas de critères d
attribution et renvoie la définition des actions financées par la
CTM à un projet de convention non joint à la délibération.
Cette structure privée est présidée par une personnalité cooptée par les membres de
l
association en tant que
« personnalité qualifiée »
, par ailleurs conseiller exécutif de la
CTM. Le vice-président et le secrétaire de l
association sont aussi des élus de l
assemblée
de Martinique. La CTM dispose ainsi de trois des six membres du bureau.
En dehors de l
adhésion annuelle des adhérents (500
par organisme, à l
exception des
associations qui cotisent pour 25
, les personnes physiques étant dispensées de
cotisation), les ressources de l
association proviennent exclusivement de subventions de
fonctionnement de la CTM.
Part des subventions de la CTM dans le budget de l
’association
(
)
Année
Budget de
l’association
Subvention de la CTM
Part de la subvention dans le budget
2016
442 000
442 000
100 %
2017
442 000
442 000
100 %
2018
442 000
353 600
80 %
2019
805 400
805 400
100 %
2020
805 000
483 000
60 %
Source : association
Les locaux sont mis à disposition par la CTM, cette mise à disposition étant valorisée à
75 000
par an, mais ce soutien supplémentaire, en nature, ne figurent pas au compte
administratif de la CTM. En outre, deux agents de la CTM sont mis à disposition de la
structure mais leur traitement chargé n
a pas été remboursé avant 2019. L
annexe au bilan
financier de 2018 de l
association rend compte de l
attente de subventions (628 654
pour les exercices 2016 à 2018).
La proportion d’élus de la CTM au bureau et la proportion des ressources de l’association
justifient pour la CTM la qualification de contrat
«
in house
»
, que la jurisprudence admet
entre deux personnes morales distinctes mais dont l’une peut être regardée comme le
prolongement administratif de l’autre, en termes de contrôle par la personne publique sur
le cocontractant et de part de commande de la première dans l’activité du second
.
La dotation relative aux prêts Covid-19 s
élève à 5
M€, dont 3,27
M€ au titre des mesures
nouvelles du plan d
urgence et 1,73
M€ au titre de sommes disponibles provenant de
précédents fonds de garantie de la CTM (fonds de garantie court terme de la région
Martinique et fonds de garantie post-crise 2009 de la région Martinique).
C’est l’association, et non la CTM, qui a conclu une
convention avec chaque entreprise
bénéficiaire.
Par ailleurs, les fonds confiés par la CTM à cette association n
apparaissent pas au compte
administratif de la CTM comme un engagement hors bilan (état annexe B8.4). Cette
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
66
annexe ne retrace pas, non plus, les prêts consentis dans le passé par la région aux
entreprises
via
cette association.
La convention de gestion relative à l
a mise en œuvre du prêt Covid
-19 qui est une
convention de mandat, a été signée le 11 juin 2020 avec
l’association
.
L’
association
n’a pas de statut bancaire. Les prêts accordés ne relèvent pas de ses fonds
propres mais d’une dotation de la CTM qu’elle gère
, donc, par mandat.
Une partie du fonds Covid-19 est allouée en fonds propres des entreprises, ce qui ne
correspond pas aux termes de la délibération de la CTM.
L
encours de prêt accordé par l
association s
élevait à 10 870 332
de prêts
au 31 décembre 20
19. Sur cet encours, l’association
en a inscrit 5 058 189
, soit
46,53 %, en provisions pour dépréciation.
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
67
ANNEXES
Annexe n° 1 :
Suites données aux recommandations précédentes de la chambre .. 68
Annexe n° 2 : Dette de la CTM
...............................................................................
71
Annexe n° 3 : Octroi de mer
....................................................................................
72
Annexe n°
4 : Coût pour la CTM du dispositif d’aides aux entreprises dans le cadre
de la crise de la COVID-19 (
)
..........................................................
76
Annexe n° 5 : Glossaire des sigles
..........................................................................
77
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
68
Annexe n° 1 :
Suites données aux recommandations précédentes de la chambre
Suites données aux recommandations issues du rapport n° 1191 du 27 octobre 2011 de la CRC sur les comptes et la gestion du département de la Martinique
Intitulé
Recommandation
Suites données
1. La fiabilité des comptes
Tenue des amortissements
Éditer l’inventaire, rapprocher l’actif de l’inventaire
Non
mise en œuvre
Généraliser les dotations aux amortissements des biens corporels
Partiellement mise en œuvre
Provisions et engagements hors bilan
Provisionner les risques
Partiellement mise en œuvre
Inscrire la totalité des engagements hors bilan en annexe au compte administratif
Mise en œuvre
Comptes 471 et 472
Régulariser les écritures des comptes de tiers
Mise en œuvre
2. Les budgets annexes
Centre culturel
Regrouper les structures culturelles
Mise
en œuvre
Laboratoire départemental d
analyse
Supprimer les subventions
Mise
en œuvre
L
UGPISE
Créer une DSP de l
irrigation afin d
optimiser les recouvrements et diminuer la participation du conseil général
Non mise
en œuvre
3. Le suivi des organismes extérieurs
Le BSOE
Formaliser une stratégie
sur le suivi et l’audit des organismes extérieurs
Mise en œuvre
COSDEM
Clarifier le fonctionnement du comité des œuvres sociales (COSDEM)
Sans objet
SAEM Le Galion (production sucrière)
Régulariser la situation juridique et financière de la SAEM.
Non
mise en œuvre
SEMAM
Régulariser les relations contractuelles du conseil général avec la SEMAM
Mise en œuvre
4. La gestion des ressources humaines
Assistants familiaux
Améliorer la coordination entre les services, notamment en charge de l’enfance
Mettre en place une gestion informatisée du suivi des assistants familiaux
Mise en œuvre
Mise en œuvre
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
69
5. La commande publique
Cellule achat
Renforcer le profil acheteur et les moyens techniques de la cellule achat
Mise en œuvre
Transport scolaire
Analyser les
causes de la baisse de fréquentation pour tenter d’inverser la tendance
Mise en œuvre
Respecter le code des marchés publics, tant au niveau des procédures de passation des contrats qu’au niveau de leur
exécution.
Mise en
œuvre*
Procéder à la mise en
place d’un contrôle effectif des acteurs du transport scolaire
Mis en œuvre
Régulariser la gestion financière des transports scolaires
Mis en œuvre
*
Tous les contrats ont été remis à plat et renouvelés ; ils n
ont pas été contrôlés dans le cadre du présent rapport.
Source :
Rapport définitif de 2011 de la chambre régionale des comptes sur les comptes et la gestion du département de la Martinique, et réponses de la CTM
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
70
Suites données aux recommandations issues du rapport n° 1047 du 3 octobre 2013 de la CRC sur les comptes et la gestion de la région Martinique
Intitulé
Recommandation
Suites données
1. La fiabilité des comptes
Immobilisations
Mettre en place et tenir l
inventaire et l
état de l
actif
Partiellement mis en
œuvre
Procéder aux écritures des comptes 23 au compte 21 des opérations qui le justifient
Mise
en œuvre
Amortissements
Mettre en œuvre l’
amortissement des biens et des subventions versées
Très partiellement mise
en œuvre
Mettre à jour la délibération sur les amortissements et le règlement financier
Mise
en œuvre
Amortir correctement les subventions reçues
Non mise
en œuvre
Provisions et sûretés
Déclarer en temps utile les créances auprès des mandataires judiciaires
Pas de réponse
Stocks
Assurer la traçabilité des biens de la collectivité
Sans objet
Redevables
Mettre en place une autorisation générale de poursuite pour le comptable de la collectivité
Prévoir de nouveaux modèles de conventions
Mise en œuvre
Procédures d
achat
Mettre en place des procédures formalisées de réception des fournitures et matériels, afin notamment de
permettre un contrôle et de pallier les difficultés en cas d
absence d
un agent
Partiellement mise
en œuvre
Rattachement des charges
Procéder au rattachement des charges
Partiellement mise
en œuvre
Suivi des opérations d
investissement
Généraliser le suivi des opérations d
investissement à l
aide de fiches d
opérations
Pas de réponse
2. L
audit et le contrôle interne
Construire un service d
audit conformément aux méthodologies et standards internationaux
Pas de réponse
3. La gestion des ressources humaines
Tableau de l’effectif
Supprimer les postes ouverts non pourvus au tableau de l’effectif
Non mise en œuvre
GPEEC
Mettre en place une gestion prévisionnelle des
emplois et de l’effectif en vue de la création de la CTM
Non mise en œuvre
4. La politique touristique
Gouvernance de la politique touristique
Mettre en place une convention d’objectifs avec le CMT
Non mise en œuvre
Le secteur hôtelier
Mettre en place les outils financiers permettant aux entreprises du secteur de renforcer leurs fonds propres
Mise en œuvre
Conditionner les subventions à des critères de formation des dirigeants et de responsabilité sociale des entreprises
Non mise en œuvre
La croisière
Réaliser des études d
impact écologique et économique avant la mise en place d
investissements lourds
Non mise en œuvre
Source :
Rapport définitif de 2013 de la chambre régionale des comptes sur les comptes et la gestion de la région Martinique, et réponses de la CTM
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
71
Annexe n° 2 :
Dette de la CTM
Évolution de la dette de 2015 à 2019 (
)
Dépt 2015
Région 2015
Consolidé 2015
2016
2017
2018
2019
Evol.
2019/2015
Encours au 1
er
janvier
284 231 042
236 258 156
520 489 198
484 760 168
559 934 192
566 599 749
673 893 396
29 %
Annuité en capital
26 519 998
9 042 432
35 562 430
134 780 591
33 334 443
36 503 408
44 267 542
24 %
Intégration de dettes
0
- 103 116 600
- 103 116 600
0
0
83 797 056
0
-100 %
Nouveaux emprunts
40 000 000
62 950 000
102 950 000
209 954 615
40 000 000
60 000 000
40 000 000
-61 %
Encoursau 31 décembre
297 711 045
187 049 123
484 760 168
559 934 192
566 599 749
673 893 396
669 625 855
38 %
Emprunts refinancés
97 954 615
NP
Source : comptes de gestion
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
72
Annexe n° 3 :
Octroi de mer
Exception en principe transitoire à l
interdiction des droits de douane au sein de l
Union
européenne et abandon de recette de l
Etat sur la TVA au bénéfice des collectivités
ultramarines, l
octroi de mer fait l
objet d
une autorisation expresse
et toujours
provisoire
du Conseil de l
Union européenne régulièrement renouvelée, la décision
actuelle arrivant à expiration le 31 décembre 2020.
L
Union européenne a ainsi autorisé des différences de tarifs douaniers entre produits
locaux et produits importés, sur trois listes limitatives de produits A, B et C, sous plafond
d
une différence tarifaire de 10, 20 et 30 points de pourcentage, respectivement.
Autorisées en 2004, les trois listes de biens, spécifiques à chaque DROM, ont été
réexaminées et resserrées par la décision n° 940/2014/UE du Conseil du 17 décembre
2014, en vigueur.
À l
issue de l
examen à mi-parcours du régime 2014-2020, la décision (UE) n° 2019/664
du Conseil du 15 avril 2019 a modifié les listes A, B et C, réservant une suite favorable à
la demande de la CTM de faire bénéficier un certain nombre de produits locaux de
réductions tarifaires par rapport aux mêmes produits importés.
Ces modifications consistaient à inscrire de nouveaux produits sur les listes et d
en faire
progresser d
autres à la liste de niveau supérieur.
Au total, cependant, plus de 90 % des produits du code douanier ne donnent pas lieu à
production locale et ne sont pas pris en compte par l
autorisation européenne. Ces
produits sont importés et la région est libre d
en fixer le taux d
’octroi de mer
dans la limite
d
un taux légal maximal de 60 % et, pour les produits alcooliques et les tabacs
manufacturés, d
un taux maximal de 90 %.
Parallèlement, il existe un dispositif d
exonération sur les importations, ajouté par la loi
nationale qui transpose les obligations européennes (loi n° 2004-639 du 2 juillet 2004,
modifiée par la loi n° 2015-732 du 29 juin 2015). Ce régime purement national
d
exonération en matière d
importation est applicable :
-
à l
importation de biens qui sont déjà admis en franchise de droits (accises) et
taxes (TVA), ainsi qu
à l
importation de productions locales dans le cadre du
« marché unique antillais » (MUA) ;
-
à l
importation de tout bien sur délibération de la région (de la CTM depuis
2016), par secteur d
activité économique (s
agissant des entreprises) et par
position tarifaire ;
-
aux biens destinés à l
avitaillement des avions et navires et aux carburants
destinés à un usage professionnel, sur délibération de la région puis de la CTM.
L
assiette de l
octroi de mer est constituée de la valeur hors taxes des biens importés ou
livrés par les personnes qui y sont assujetties. Les services ne sont pas taxés, ce qui a
engendré des conflits d
interprétation sur la qualification juridique de certaines activités,
telles que la restauration rapide : plusieurs jurisprudences ont distingué, dans l
activité de
restauration, celle qui réalise des opérations de production (les restaurants, les
boulangeries-pâtisseries) et celle qui se contente de réchauffer (les points chauds) ou
d
ajuster des ingrédients sans les cuisiner (restauration rapide), qui relève des services
non assujettis.
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
73
L
assiette de l
OM à l
importation est la valeur en douane (coût du bien, assurance et fret
- CAF). Pour ce qui est des livraisons de biens produits localement, l
assiette est le prix
hors TVA et hors accises (les accises sont des taxes fondées non sur une valeur monétaire
mais sur une quantité matérielle). À l
inverse, l
OM n
est théoriquement pas compris dans
la base d
imposition de la TVA. Cependant, une fois l
octroi de mer payé par
l
importateur, cette taxe est incorporée au prix de revient et le consommateur final paye
la TVA sur le tout. Toute personne qui importe un bien en provenance de France ou de
l
Union européenne s
acquitte de l
octroi de mer à partir d
une valeur déclarée de 205
(dès le premier euro pour la vente par correspondance).
Sont assujetties à l
OMI les entreprises dont le chiffre d
affaires afférant à une activité de
production atteint le seuil de 300 000
€. Sont considérées comme des activités
de
production les opérations de fabrication, de transformation ou de rénovation de biens
meubles corporels, ainsi que les opérations agricoles et extractives.
L
octroi de mer est exigible au moment de l
importation ou de la livraison du bien. Il est
liquidé :
-
sur la déclaration en douane pour les opérations d’importation
;
-
pour les livraisons, au vu de déclarations trimestrielles souscrites par les
entreprises assujetties.
L
octroi de mer (ODM) désigne en réalité deux taxes réparties en trois parts : l
octroi de
mer régional (OMR) qui est une ressource de la région, l
octroi de mer (ODMC) qui est
une ressource des communes subdivisé en deux parts : une dotation globale garantie
(DGG) et un solde qui constitue le fonds régional pour le développement et l
emploi
(FRDE) lui-même réparti entre les communes (qui en perçoivent 80 %) et la région - la
CTM depuis 2016 - (qui en perçoit 20 %).
Répartition des recettes de l’octroi de mer
Nota :
l
octroi de mer prélevé comprend un prélèvement pour frais d
assiette et de recouvrement qui
était de 2,5 % jusqu
à 2016 et qui est de 1,5 % depuis la loi n° 2017-256 du 28 février 2017.
Source :
chambre régionale des comptes
C
est la région (
aujourd’hui,
la CTM) qui, par ses délibérations, décide à la fois du tarif
douanier des biens locaux et importés et des exonérations accordées aux entreprises :
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
74
-
les opérations soumises à l
OM sont les importations de biens mis à la
consommation (octroi de mer externe - OME) et les livraisons à titre onéreux
de biens produits sur place (octroi de mer interne - OMI) ; la CTM vote ainsi
quatre taux pour chaque produit : octroi de mer (communal) interne (OMI),
octroi de mer régional interne (OMRI), octroi de mer (communal) externe
(OME), octroi de mer régional externe (OMRE) ;
-
les exonérations donnent lieu à trois types de délibérations : l
une sur les
exonérations d
octroi de mer par secteur d
activité, la seconde sur les
exonérations destinées à l
avitaillement des navires et avions, la troisième sur
les carburants destinés à un usage professionnel souvent couplée à des
exonérations de taxe sur les carburants.
L
octroi de mer régional a la même assiette et les mêmes exonérations légales que l
octroi
de mer des communes. Le taux de l
OMR ne peut excéder 2,5 %.
En comparaison des autres régions ultramarines, c
est en Guadeloupe et en Martinique
que l
octroi de mer est le plus élevé par habitant et qu
il progresse le plus.
Comparaison des recettes fiscales d
octroi de mer
des régions et collectivités territoriales uniques d
outre-mer (montants
)
2014
2015
2016
2017
2018
Variation
2018/2014
Par habitant
2018
Guadeloupe
72 919 247
72 313 100
74 460 883
76 124 461
82 738 318
+ 13,47 %
212
Guyane
35 756 317
32 713 667
60 231 800
49 445 780
NC
176 (2017)
Martinique
67 059 529
63 116 500
75 190 361
71 976 387
75 129 474
+ 12,03 %
202
La Réunion
93 823 716
94 766 739
95 060 274
97 994 317
101 605 983
+ 8,29 %
118
Source : comptes de gestion 2014 à 2018 des quatre régions et collectivités uniques
L
analyse des taux d
octroi de mer confirme la stabilité de la taxation depuis 2014, ainsi
que celle du différentiel entre octroi de mer interne sur la production locale et octroi de
mer externe sur les importations.
Évolution du taux moyen pondéré de l
octroi de mer interne et externe (2014-2017)
2014
2016
2017
Evol. 2017/2014
Octroi de mer interne
2,20 %
2,25 %
2,30 %
0,1 point
dont produits de liste
2,23 %
2,25 %
NP
Octroi de mer externe
11,2 %
11,3 %
11,2 %
0,0 point
dont produits de liste
16,67 %
16,61 %
NP
NB :
lorsque les rapports annuels fournissent des données contradictoires, la plus récente a été
retenue
Source :
rapports annuels de la CTM sur l
octroi de mer
Considérant l
ancienneté des données du dernier rapport de la CTM, l
’analyse du tarif
de 2020 a permis d
actualiser les données, non pondérées, de l
octroi de mer en
Martinique :
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
75
Taux moyens d
octroi de mer en 2020 (en %)
OME
OMER
OMI
OMIR
Différentiel
Liste A
7,58
2,49
0,46
1,87
7,74 points
Liste B
14,41
2,50
0,00
1,81
15,10 points
Liste C
24,21
2,50
0,28
2,43
23,99 points
Hors listes
8,48
2,48
8,48
2,48
0,00 point
Taux moyen
9,84
2,48
6,50
2,35
3,48 points
Source : tarif 2020 de l
octroi de mer, CTM
Le taux moyen de l
octroi de mer régional est de 2,42 % (taux plafond autorisé de
2,50 %). Le différentiel autorisé sur produits de liste s
élève à 7,74 points de pourcentage
s
agissant des 661 références de la liste A (à l
échelle douanière NC8) plafonnée à 10 %,
de 15,1 points pour les 1 201 de la liste B plafonnés à 20 % et de 23,99 % pour les 409
de la liste C plafonnés à 30 %.
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
76
Annexe n° 4 :
Coût pour la CTM du dispositif d
aides aux entreprises dans le
cadre de la crise de la COVID-19 (
)
Aides aux entrepr
ises (M€)
Délibération
Dispositif
Budget voté
Nombre
d
entreprises
bénéficiaires
Subvention
complémentaire au
fonds national de
solidarité de l
État
20-77-1
Plafond d
aide de 5 000
Instruction par la CTM
Versement par la DRFIP
2 021 000
NC
Prêt rebond
20-78-1
Prêts de 10 000 à 300 000
à
taux zéro sans garantie
PME et TPE (hors EI)
Remboursement sur 7 ans avec
différé de 24 mois
Convention avec Bpifrance
2 000 000
À abonder selon
consommation
Chapitre 906
NC
Prêt Territorial
COVID-19 à taux zéro
sans garantie
20-77-3
De 1 500 à 60 000
Gestion par une associaition
5 000 000
Chapitre 906
125 entreprises
visées
33 entreprises
au 6 août
Aide aux entreprises
affectées par
l
épidémie
Arrêt total d
activité : de 1 000
à 10 000
Ralentissement d
activité : De
1 000 à 5 000
20 000 000
Chapitre 906
NC
Appel à projet COVID-
19
20-77-4
Innovation numérique (4
projets)
900 000
Chapitre 935
NC
Agriculteurs
20-108-2
Aide forfaitaire 2 000
NC
5 552
(INSEE 2016)
Pêcheurs
20-108-2
Aide forfaitaire
2 000
NC
Source : délibération n° 20-77-2 du 9 avril 2020
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
77
Annexe n° 5 :
Glossaire des sigles
-
AE :
autorisation d’engagement
-
AFD :
Agence française de développement
-
AP :
autorisation de programme
-
APA :
aide personnalisée pour l’autonomie
-
BFR :
besoin en fonds de roulement
-
CAF :
capacité d’autofinancement
-
CET :
compte épargne-temps
-
CGCT :
code général des collectivités territoriales
-
CP :
crédits de paiement
-
CRD :
capital restant dû
-
CTM :
collectivité territoriale de Martinique
-
CVAE :
cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises
-
DGA :
directeur général adjoint
-
DGD :
décompte général et définitif
-
DGDDI :
direction générale des douanes et droits indirects
-
DGFiP :
direction générale des finances publiques
-
DGG :
dotation globale garantie
-
DGF :
dotation globale de fonctionnement
-
DGS :
directeur général des services
-
DM :
décision (budgétaire) modificative
-
DRF :
dépenses réelles de fonctionnement
-
DRFiP :
direction régionale des finances publiques
-
DROM :
départements-régions d
outre-mer
-
DTA :
diagnostic technique amiante
-
EPCI :
établissement public de coopération intercommunale
-
FCTVA :
fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée
-
FDR :
fonds de roulement
-
FEDER :
fonds européen de développement régional
-
FRDE :
fonds régional pour le développement et l
emploi
-
HATVP :
haute autorité de transparence de la vie publique
-
IFER :
impositions forfaitaires sur les entreprises de réseaux
-
IMA :
association Initiative Martinique Active
-
IRA :
indemnité de rachat anticipé
-
LDA :
laboratoire départemental d’analyse
-
ODM :
octroi de mer (communal)
Région, département et collectivité territoriale de Martinique (2015-2020)
R
apport d’observations définitives
78
-
ODRM :
octroi de mer régional
-
PIB :
produit intérieur brut
-
RBF :
règlement budgétaire et financier
-
RGEC :
règlement général d
exemptions par catégorie
-
ROB :
rapport d’orientations budgétaires
-
RRF :
recettes réelles de fonctionnement
-
RSA
revenu de solidarité active
-
SDIS
service départemental d
incendie et de secours
-
SEM :
société d’économie mixte
-
SH4 :
système harmonisé européen
-
SIRENE :
système national d
identification et du répertoire des entreprises et de
leurs établissements,
-
SMTCSP :
syndicat mixte du TCSP
-
SRDEII :
schéma régional de développement économique d
innovation et
d
internationalisation
-
TCSP :
transport en commun en site propre
-
TICPE :
taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques
-
TFUE :
traité sur le fonctionnement de l
Union européenne
-
TPN :
taux (effectif moyen) de protection nominale
-
TVA :
taxe sur la valeur ajoutée
-
TSC :
taxe de consommation sur les carburants
Chambre régionale des comptes de la Martinique
Parc d
activités La Providence
Kann
Opé
Bât. D - CS 18111
97181 LES ABYMES CEDEX
adresse mél. :
antillesguyane@crtc.ccomptes.fr
www.ccomptes.fr/fr/antilles-guyane