Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie
13, Boulevard Vauban - BP 2392 - 98846 Nouméa cedex - Nouvelle-Calédonie
courriel : ctcnc@crtc.ccomptes.fr www.ccomptes.fr
Le présent document, qui a fait l’objet d’une contradiction avec les destinataires concernés,
a été délibéré par la chambre le 5 février 2021.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
SAS Société de Participation Minière du Sud Calédonien
(SPMSC)
Exercices clos 2016 à 2018
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
Table des matières
1.
PRESENTATION DE LA SPMSC: UNE SOCIETE DE PORTAGE DES PARTICIPATIONS PROVINCIALES DANS
L’USINE DU SUD
.............................................................................................................................................
14
1.1.
L
E PORTAGE DES INTERVENTIONS PROVINCIALES PAR LE BIAIS D
’
UNE SAS
..............................................................
14
1.1.1.
La SPMSC : une société holding
...................................................................................................
14
1.1.2.
Présentation de l’usine du Sud
....................................................................................................
16
1.2.
LA PRESENCE IRREGULIERE DE LA PROVINCE
N
ORD ET DE LA PROVINCE DES
I
LES
.....................................................
17
1.2.1.
Les arguments de la province des Iles
.........................................................................................
17
1.2.2.
Les arguments de la province Nord
.............................................................................................
18
1.3.
L’
ABSENCE REPETEE DE L
’
ADMINISTRATEUR ELU DE LA PROVINCE
N
ORD
...............................................................
20
2.
L’ABSENCE DE RETOUR SUR INVESTISSEMENT POUR LA SPMSC DANS SA PARTICIPATION DANS L’USINE
DU SUD
..........................................................................................................................................................
22
2.1.
L
ES ATTENTES DE LA
SPMSC
DANS SA PARTICIPATION AU CAPITAL DE L
’
USINE DU SUD
............................................
22
2.1.1.
Les attentes exprimées dans le rapport DUTHILLEUL
.................................................................
22
2.1.2.
Les attentes issues des projections financières de VALE
.............................................................
25
2.1.3.
Le montage financier et contractuel devait assurer l’absence de prise en charge du risque
industriel par la SPMSC
................................................................................................................................
25
2.2.
D
ES ATTENTES NON REALISEES
.....................................................................................................................
28
2.2.1.
La remise en cause du schéma initial par les dérapages dans les coûts de construction de l’usine
28
2.2.2.
L’alourdissement de l’endettement de la SPMSC avant sa restructuration en avril 2019
..........
31
2.2.3.
L’absence de rentabilité de l’usine
..............................................................................................
33
2.2.4.
Des coûts de production en baisse mais toujours au-dessus du niveau des cours du nickel
.......
36
2.2.5.
L’absence à long terme de distribution de dividendes
................................................................
37
2.3.
L
A CONSEQUENCE
:
UNE SITUATION FINANCIERE DE LA
SPMSC
DEGRADEE
...........................................................
38
2.3.1.
Des comptes déficitaires et des capitaux propres négatifs
.........................................................
40
2.3.2.
La dépréciation des titres de participation de la SPMSC dans VNC
............................................
40
3.
LA SPMSC EN TANT QU’ACTIONNAIRE DE L’USINE DU SUD
...................................................................
43
3.1.
D
ES TENSIONS DANS LA RELATION AVEC LE GROUPE
VALE
DANS LE CONTEXTE DE MISE EN SOMMEIL OU DE REPRISE DU
SITE
43
3.1.1.
Les propos du président du groupe VALE en 2017 et 2018
.........................................................
43
3.1.2.
La demande de clarification de la position du PDG de VALE par la SPMSC
................................
46
3.2.
L
ES SOLLICITATIONS TARDIVES MAIS REPETEES DE LA SPMSC A PARTIR DE LA FIN DE L
’
ANNEE
2017
............................
49
3.2.1.
Des outils à la disposition de la SPMSC non mobilisés jusqu’à 2017/2018
.................................
49
3.2.2.
L’engagement par la SPMSC d’un audit juridique
.......................................................................
50
3.2.3.
L’engagement difficile par la SPMSC d’un audit financier des comptes de VNC
.........................
51
3.2.4.
Les questionnements de la SPMSC sur les relations commerciales de VNC avec les sociétés du
groupe VALE
................................................................................................................................................
52
4.
LES MODIFICATIONS RECENTES DU PARTENARIAT
................................................................................
57
4.1.
LA SIGNATURE D
’
UN NOUVEAU PACTE D
’
ACTIONNAIRES APRES DEUX ANS DE NEGOCIATIONS
....................................
57
4.1.1.
Un niveau de dette réévalué par rapport aux prévisions initiales de 2005
.................................
57
4.1.2.
Le plafonnement de la participation de la SPMSC aux investissements futurs
...........................
58
4.1.3.
La possibilité pour la SPMSC de remonter au capital de VNC de 5 à 10 % pour un prix plus
avantageux
..................................................................................................................................................
58
4.1.4.
De nouvelles règles pour l’utilisation des dividendes revenant à la SPMSC
................................
58
4.1.5.
La garantie d’un versement annuel de Vale à la SPMSC d’un montant de 1,5 M USD
...............
59
SOCIETE DE PARTICIPATION MINIERE DU SUD CALEDONIEN
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4.1.6.
La restructuration de la dette de VNC : la réduction de 26,9 Md F CFP de la dette de VNC à
l’égard du groupe VALE
...............................................................................................................................
59
5.
LES INTERROGATIONS SUR L’INTERET FINANCIER DE LA PARTICIPATION DE LA SOCIETE DANS L’USINE
DU SUD
..........................................................................................................................................................
60
5.1.
LA PERSISTANCE D
’
UN ENDETTEMENT IMPORTANT DE LA SPMSC
.........................................................................
60
5.2.
LA VALEUR QUASIMENT NULLE DE LA PARTICIPATION DE LA SPMSC AU SEIN DE VNC
.................................................
62
5.2.1.
L’étude de 2017
...........................................................................................................................
62
5.2.2.
L’étude de 2019
...........................................................................................................................
63
5.3.
LA RECHERCHE DE NOUVELLES CONDITIONS POUR RELANCER LA RENTABILITE DE L
’
USINE
..........................................
64
5.3.1.
Le changement de modèle économique
.....................................................................................
64
5.3.2.
La reprise du site par de nouveaux repreneurs
...........................................................................
64
REPONSES
......................................................................................................................................................
65
REPONSE
DU
PRESIDENT
DE
LA
SPMSC
.............................................................................................................
66
REPONSE
DU
PRESIDENT
DE
LA
PROVINCE
DES
ÎLES
LOYAUTE
.........................................................................
68
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
4/72
SYNTHÈSE
La SPMSC a été créée en 2005 afin de permettre aux trois provinces de Nouvelle-Calédonie, réunies au
sein d’une même société, de participer à un projet industriel de construction d’une usine de nickel dans
le sud de la Nouvelle-Calédonie. Cette participation s’est traduite par une entrée de la SPMSC dans le
capital de la société GORO NICKEL (devenue VALE NOUVELLE-CALEDONIE, soit VNC) à hauteur de
10 % du capital. Les appels de fonds successifs intervenus au cours de la construction de l’usine du Sud
ont réduit la part de la participation de la SPMSC dans VNC à 5 %.
Questionnées sur la base juridique qui fonde la participation de la province Nord et de la province des
Iles dans l’usine du Sud à travers la SPMSC alors même que l’usine n’est pas en province Nord ni en
province des Iles et qu’elle n’impacte pas le territoire de ces deux collectivités, les provinces ont fait état
de bases juridiques différentes pour motiver leur intervention.
La province des Iles indique que l’usine de Goro n’a aucun impact économique en province des Iles. Elle
fonde son intervention sur la base de l’article 4.4 des accords de Nouméa intitulé « Le contrôle des outils
de développement ». La chambre relève que cet article concerne le transfert des compétences qui devait
intervenir entre l’Etat et la collectivité de Nouvelle-Calédonie dans le domaine des outils de
développement. Cet accord ne concerne pas les collectivités provinciales ni le secteur minier.
La province Nord a indiqué que la base juridique sur laquelle elle fonde son intervention est la
loi organique n°99- 209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie ainsi que la délibération du
11 février 2005 autorisant la province Nord à prendre une participation dans le capital de la SPMSC. En
outre, la province Nord a précisé que sa participation au sein de la SPMSC traduit l’appartenance de la
ressource au pays. La chambre ne partage pas cette analyse. La délibération de la province Nord ne
permet pas d’analyser les fondements et arguments sur lesquels s’est fondée la province Nord pour
valider cette participation. La loi organique n’offre pas la base juridique permettant de justifier la
participation de la province Nord dans une société située hors de son territoire, concernant une usine qui
n’a aucun lien direct ou indirect avec ce dernier. Les provinces sont tenues de respecter le périmètre
géographique de leur ressort, dans l’exercice de leur compétence, sauf à démontrer que l’intervention
hors de leur territoire s’exerce dans le respect de l’intérêt local, ce qui, en l’espèce, n’est pas le cas.
La chambre attire en outre l’attention de la SPMSC sur les risques d’insécurité pesant sur les décisions
et actes juridiques de la société résultant de la composition irrégulière de son actionnariat et l’invite en
conséquence à engager une réflexion avec ses associés afin de mettre fin à cette irrégularité.
Dans l’ensemble des documents réunis lors du contrôle, il est relevé la mention par la SPMSC du rapport
DUTHILLEUL, comme ayant motivé la participation des provinces dans le capital de l’usine du Sud.
Au total, sur la durée du projet (2005 à 2019), le montant total des dividendes à recevoir par la SPMSC
était estimé à 410,4 M EUR. Après paiement des actions achetées et remboursement de l’emprunt
bancaire, il devait rester 193,6 M EUR à la SPMSC.
La société a également fondé ses objectifs sur les projections financières établies par VALE prévoyant
un retour financier dès 2011, puis dès 2013 et ensuite à partir de 2017.
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Il était attendu que la SPMSC n’assume pas le risque financier et industriel. L’usine devait dégager les
cash-flow suffisants pour dégager les dividendes lui permettant de financer son entrée dans le capital.
Sur les deux niveaux de ses attentes, la SPMSC n’a pas rencontré ses objectifs :
-
elle a participé à la prise en charge du risque industriel par sa participation au financement du
coût de l’usine au-delà des montants initialement prévus, au prix d’un endettement financier
croissant qui vidait de tout intérêt financier sa participation dans le projet ;
-
elle n’a retiré aucun retour financier de sa participation, les difficultés de VNC étant telles
qu’aucune distribution de dividendes n’était possible, la production commerciale n’ayant pas
démarré.
Le schéma mis en œuvre en 2005 a été remis en cause, dès le démarrage de l’opération, par le dérapage
dans les coûts de construction de l’usine.
Au final, le coût de construction du projet, estimé à 1,898 Md USD en octobre 2004 atteint 9,5 Md USD
au premier trimestre 2018, ce qui a conduit à une dilution de la participation des provinces réunies dans
la SPMSC jusqu’au seuil des 5 % désormais sécurisé par l’avenant n°1 mais avec un coût financé par
l’augmentation du prêt bancaire d’une part et le recours à l’actionnaire majoritaire d’autre part, abondant
ainsi une situation d’endettement constant de la SPMSC. In fine, la SPMSC se retrouve dans la
dépendance financière de l’actionnaire majoritaire.
Alors qu’était initialement prévu le démarrage des remboursements du prêt bancaire après distribution
des premiers dividendes, sur une période pouvant aller jusqu’en septembre 2026, l’avenant au contrat de
prêt signé le 29 mars 2012 par la SMSP et le groupe bancaire prévoit un remboursement de 10 M EUR
(soit 1,2 Md F CFP) dès la signature de l’avenant, puis six annuités commençant le 8 septembre 2013 et
se terminant le 7 septembre 2018. Le choix de procéder par remboursement d’échéances fixes et non
plus à des paiements liés à des rentrées de dividendes, supposait qu’avant le 8 septembre 2013, la
SPMSC puisse disposer de rentrées financières pour faire face à la prochaine échéance bancaire. La
SPMSC a finalement pu honorer cette échéance grâce à un prêt de 10,2 M EUR par VALE CANADA.
Alors que le remboursement de l’échéance bancaire de 2014 se rapprochait et que la situation financière
de la SPMSC ne s’était pas améliorée, une autre décision de gestion va l’aggraver. Le 30 avril 2014, le
conseil d’administration de la SPMSC a décidé de rembourser en totalité les avances en compte courant
d’associé à ses actionnaires, soit 473,7 MF CFP pour PROMOSUD, 28,8 MF CFP pour la province Nord
et 1,15 MF CFP pour la province des Iles.
Selon les travaux menés par la commission d’enquête mise en place par la province Sud relative aux
conditions dans lesquelles le gisement de Prony et Pernod avait été attribué, l’idée de relier la question
de la restructuration de la dette de la SPMSC avec l’attribution par la province Sud de ces gisements à
ERAMET et VALE se serait fait jour à ce moment-là afin qu’une partie des avantages financiers que la
province retirerait de Prony-Pernod soit utilisée pour financer la SPMSC. Elle a été formalisée dans un
document de VALE CANADA du 8 avril 2013. Le 5 avril 2014, la province Sud signait avec le groupement
ERAMET/VALE le protocole général d’accord Prony-Pernod (PGA) et le même jour, la SPMSC et VALE
CANADA signaient une lettre d’intention pour la restructuration de la dette. Le nouveau président de la
province Sud en 2014 retire le PGA par arrêté du 5 août 2014 ce qui a conduit de fait à l’abandon de la
lettre d’intention par la SPMSC et VALE. Les échéances bancaires que la SPMSC devait régler de
septembre 2014 à septembre 2018 ont été payées par la société par des prêts accordés par
VALE CANADA dans les conditions prévues par le pacte d’actionnaires.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
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Ce prêt est aujourd’hui remboursé. La chambre relève cependant que si ce prêt bancaire a été remboursé,
il l’a été au prix d’un accroissement de l’endettement de la SPMSC à l’égard de VALE CANADA. Les
actionnaires provinciaux réunis dans la SPMSC ont finalement fait financer un prêt bancaire par un autre
prêt, conclu auprès de l’actionnaire majoritaire, pour maintenir une participation ultraminoritaire dans le
capital de l’usine du Sud.
Alors que l’avenant du 26 septembre 2008 au pacte prévoyait trois sources de financement alternatives
au projet (souscription de dettes auprès de tiers, octroi de prêts d’actionnaires, octroi d’avances
capitalisables), le choix systématique a été effectué de procéder à l’octroi d’avances capitalisables, dont
la charge de remboursement devait être supporté par SPMSC sur sa quote-part de dividendes futurs. La
mécanique a conduit à l’alimentation d’une dette qui n’a cessé de croître au fur et à mesure de
l’augmentation du budget d’investissement et de fonctionnement de l’usine.
Cette modalité de financement, retenue depuis 2008, n’a jamais été remise en cause par la SPMSC alors
que celle-ci contribuait à alimenter une dette constante de la société à l’égard de l’actionnaire majoritaire
à un niveau moyen de 25 M EUR par an. Selon les éléments recueillis lors du contrôle, la SPMSC n’aurait
accepté un tel mode de financement que parce qu’elle aurait toujours été assurée par l’actionnaire
majoritaire (VCL) de la rentabilité du projet et que les sommes maximales qu’elle devait supporter ne
seraient pas dépassées et ne la priveraient pas de ses dividendes de manière définitive.
La chambre attire l’attention de la société sur la nécessité de se doter de réelles capacités d’expertise
interne afin d’équilibrer au mieux ses relations contractuelles avec ses associés. L’acceptation par la
société de mobiliser une seule des modalités de financement au prix d’un endettement croissant, sur le
seul fondement de la confiance accordée aux analyses réalisées par l’actionnaire majoritaire ne participe
pas d’une gestion efficace et professionnelle de sa participation au sein de l’usine du Sud.
Avant la restructuration formalisée par l’adoption d’un nouveau pacte d’actionnaires conclu le
29 avril 2019, la dette de la SPMSC au 28 février 2019 s’élève à 45,185 Md F CFP. Ce montant se répartit
entre la dette accumulée auprès de VNC (36,485 Md F CFP) et 8,7 Md F CFP auprès du BRGM.
Dans le pacte d’actionnaires signé en 2005, il était prévu que la construction et l’exploitation de l’usine à
Goro se traduise par une capacité attendue d’environ 60 000 tonnes de nickel contenu et environ
4 300 à 5 000 tonnes de cobalt contenu par an. Les niveaux de production visés dans les budgets de
l’usine n’ont pas été atteints (en 2018, le budget prévoyait une production à 42 000 tonnes mais la
production a été de 32 500 tonnes de nickel contenu).
La capacité nominale de l’usine à 60 000 tonnes va être revue à la baisse en 2012 à 57 000 tonnes. Par
la suite, une hypothèse de production de 48 000 tonnes a finalement été retenue.
Un plan d’économie de coûts de l’usine a été lancé en 2016. Depuis, le coût de production est passé de
18 000 USD/tonne à 9 800 USD/tonne, mais reste en dessous des niveaux du cours du nickel au LME à
l’époque.
La chambre a demandé à la SPMSC s’il existe un échéancier prévisionnel de distribution de dividendes
dans les années à venir. La société a indiqué que toutes les estimations de production et de cours de
nickel n’ont pas été atteintes. A ce jour, le report à nouveau négatif de VNC se monte à - 4 Md EUR. Il
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faudra donc plusieurs années et des résultats durablement positifs pour le résorber ce et envisager donc
des distributions de dividendes.
Les exercices 2016 à 2018 se sont soldés par des résultats déficitaires et des capitaux propres négatifs.
L’exercice 2018 s’est soldé par une perte nette de 2 626,4 MF CFP, portant les capitaux propres négatifs
de la société à 20,7 Md F CFP. Cela a conduit le commissaire aux comptes à déclencher à deux reprises
la procédure d’alerte prévue par le code de commerce.
Les difficultés financières de VNC ont conduit cette société à une situation financière telle que des doutes
ont été émis par les commissaires aux comptes de la SPMSC et de PROMOSUD (cette société
consolidant ses comptes avec ceux de la SPMSC) sur la valeur réelle des titres de participation de la
SPMSC dans VNC. Au vu des études effectuées par des prestataires extérieurs sur la valeur financière
de la participation de la SPMSC dans VNC qui, dans certaines méthodologies retenues, aboutissent à
des niveaux de valeur proche de zéro, et dans le prolongement des réserves émises par le commissaire
aux comptes, la chambre invite la société à revoir ses niveaux de dépréciation.
Les propos publiquement tenus le président du groupe VALE en 2017 et 2018, mettant en avant le risque
de baisse de production, voire de mise en sommeil de l’usine et même de reprise du site industriel, vont
déclencher à la SPMSC une série de réactions : des demandes de clarifications des intentions de
l’actionnaire majoritaire ainsi que le positionnement de la société VNC par rapport aux propos
publiquement tenus par le président du groupe, une revue juridique et financière de la relation
contractuelle entre elle et la société VNC ainsi que des relations commerciales entre la société VNC et
les sociétés du groupe VALE et la demande d’un audit global du projet.
Des échanges entre la SPMSC et la présidente de VNC en novembre 2017, il ressortait que la recherche
d’un nouveau partenaire par le groupe VALE conduisait ce dernier à proposer à la SPMSC de revoir le
dispositif contractuel et que la mise en sommeil de l’usine n’était pas à exclure. Suite à ces échanges, la
SPMSC décide de recourir à un cabinet d’avocats afin d’expertiser les relations contractuelles avec le
groupe VALE.
La chambre relève qu’à compter des déclarations du PDG du groupe VALE, la SPMSC va jouer un rôle
plus actif en tant qu’actionnaire de VNC en mobilisant des outils qui étaient pourtant à sa disposition
depuis la mise en place du projet GORO en 2005 et qu’elle n’avait pas mobilisés jusqu’alors.
Le pacte d’actionnaires modifié par l’avenant de 2008 prévoit la possibilité de demander à l’actionnaire
majoritaire de réaliser un examen complet du projet GORO initial afin de déterminer quelles mesures
pourraient être prises pour que le démarrage de la production puisse intervenir le plus tôt possible. Cette
disposition n’a été mise en œuvre par la SPMSC qu’en 2018 alors que ses conditions de mise en œuvre
étaient réunies depuis 2012. Cette étude réalisée par VNC depuis lors n’a pas été communiquée à la
SPMSC, selon les réponses apportées à la chambre.
Les statuts de VNC prévoient également la possibilité d’engager un audit financier de la société qui sera
demandé par la SPMSC à compter de 2018.
A la connaissance de la chambre, sur l’ensemble des outils prévus par le pacte d’actionnaires et les
statuts de VNC, seule l’assistance de conseils juridiques lors des réunions du conseil d’administration a
été mise en place avant la période sous contrôle.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
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Un audit juridique a également été effectué. L’analyse juridique, datée du 27 mars 2018, a consisté
notamment en l’assistance à la SPMSC pour expertiser les relations contractuelles et financières entre
elle et le groupe VALE sur une période de treize ans (2004 à 2017) et l’assister pour la négociation sur la
restructuration de sa dette et vis-à-vis du groupe VALE ainsi que la négociation pour la conservation d’au
moins 5 % du capital de VNC, sans dilution possible. Au vu des résultats de cette analyse, la SPMSC a
décidé de demander à VCL de procéder à un examen complet du projet GORO initial et la communication
d’éléments juridiques et financiers afin de procéder à un audit financier de VNC. Les difficultés
rencontrées par la SPMSC pour accéder à sa demande la conduisent à utiliser les termes d’opacité et
d’obstruction dans la qualification de l’attitude du groupe VALE.
La SPMSC voulait engager l’audit financier des comptes de VNC en mobilisant un conseil extérieur à
partir du 2 juillet 2018. Ce processus de négociation des conditions d’établissement de l’audit financier
s’est achevé par la signature d’un règlement d’audit. Les résultats de l’audit engagé sur la période 2013
à 2017 ont été présentés au conseil d’administration de la SPMSC. Ils portent pour l’essentiel sur l’analyse
des flux financiers existant entre VNC et le groupe VALE.
Des flux financiers interviennent entre VNC et d’autres sociétés du groupe VALE : d’une part, la
production de l’usine est achetée par l’actionnaire majoritaire, VCL, et d’autre part, des prestations
d’achats et de services sont réalisées par des sociétés du groupe VALE auprès de VNC.
Les interrogations de la SPMSC sur les flux financiers à l’intérieur des entreprises dites liées portent pour
l’essentiel sur les interventions de diverses sociétés dans l’achat et l’exploitation de la production de
l’usine, d’autres sociétés que VCL semblant être parties prenantes des transactions commerciales, la
base juridique exacte au soutien des ventes de la production de l’usine, le prix d’acquisition de la
production vendue par l’usine et la valorisation financière d’un certain nombre de prestations par des
sociétés du groupe à l’encontre de VNC.
A plusieurs reprises à partir de 2017, le président de la SPMSC a adressé des demandes au président
de VNC en vue que lui soient communiqués une copie des conventions intra-groupe et en particulier du
contrat d’achat de la production de l’usine dit « offtake agreement » ainsi que le montant du rabais et des
commissions supportées par VNC en vertu du contrat de commercialisation de sa production au groupe
VALE.
Le document transmis à la SPMSC, dit « offtake agreement », signé le 8 avril 2005 avec un avenant daté
du 29 avril 2010, ne revêtant aucun paraphe et étant issu de ce qui a semblé être « un recollement
d’impressions de fichiers informatiques différents », la SPMSC a émis des réserves sur le contrat. La
SPMSC a demandé à VNC de lui garantir l’authenticité du contrat par l’obtention d’une lettre d’opinion
auprès d’un avocat.
De plus, le pacte d’actionnaires signé par la SPMSC en 2005 avec VCL mentionnait que la production de
l’usine serait vendue à l’actionnaire majoritaire. Le pacte d’actionnaires de 2005 prévoyait que l’intégralité
de la production devait être vendue à l’actionnaire majoritaire INCO (devenue VCL) et que ce dernier
pouvait transférer son droit à « un autre actionnaire industriel de Goro (VCL) ».
La SPMSC ayant relevé que VCL n’étant pas partie au contrat de vente de 2005, amendé en 2010 et en
2015
et
que
par
ailleurs
les
sociétés
parties
contractantes
à
ce contrat
(c’est-à-dire
INCO INTERNATIONAL LIMITED et VALE INCO ASIA LTD), bien qu’appartenant au même groupe VALE
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n’étant pas actionnaires de VCL, les conditions fixées dans le pacte d’actionnaires ne semblent donc pas
respectées.
La SPMSC a interrogé à plusieurs reprises VNC sur la dénomination sociale exacte de la société à
laquelle la production de nickel est actuellement vendue. Les informations recueillies par la SPMSC
faisant état d’une fusion entre INCO INTERNATIONAL LTD et VALE INCO ASIA LTD ne permettant pas
d’établir le lien entre cette dernière (VALE INCO ASIA LTD) située à la Barbade et la société VCL
(actionnaire de VNC) située au Canada, la SPMSC a maintenu ses interrogations.
La SPMSC a, à maintes reprises, demandé à VNC la communication des conventions intra-groupe. Elle
a fait état par ailleurs de ses interrogations concernant l’absence de mobilisation du dispositif des
conventions réglementées et de l’existence ou non d’un excédent de charges facturées à VNC par les
sociétés du groupe.
La SPMSC et VCL ont signé le 29 avril 2019 un nouveau pacte d’actionnaires.
Au 29 avril 2019, VCL détenait des créances de 354 496 199 USD (315 390 883 EUR) envers la SPMSC.
Avec le nouvel accord, la dette de la SPMSC à l’égard de VCL a été réduite de 254,4 M USD par la
signature par VCL, PROMOSUD, la province Nord et la province des Iles le 29 avril 2019, d’une
convention de cession de la créance aux trois actionnaires de la SPMSC au prorata de leurs participations
respectives dans le capital de la SPMSC pour 1 euro. Ces fonds ont été bloqués sur un compte courant
et sont destinés à être capitalisés au sein de la SPMSC. Il persiste une dette résiduelle plafonnée à
100 M USD (10,5 Md F CFP), sans intérêt et remboursable grâce aux dividendes futurs.
Les parties sont convenues de plafonner la participation de la SPMSC aux investisseurs futurs à
4,2 Md F CFP (40 M USD) afin de protéger celle-ci en cas de dépassement des coûts nécessitant
d’abonder la trésorerie de VNC.
Les parties sont convenues de l’impossibilité pour VCL de diluer la participation de la SPMSC au sein de
VNC en deçà de 5 % sans coût supplémentaire pour la SPMSC. Il est également acté l’option pour la
SPMSC, pendant une durée de dix ans, d’augmenter sa participation au sein de VNC pour atteindre
10 % du capital. Le coût d’achat de ces 5 % supplémentaires est revu à la baisse : 10 Md F CFP au lieu
de 53 Md F CFP estimés. Une option est également prévue pour que la SPMSC puisse augmenter sa
participation au capital à 20 %.
Afin d’améliorer les capitaux propres et la situation financière de VNC, a été actée la renonciation par
VCL à la créance détenue sur VNC au titre des obligations spéciales de financement d’un montant de
839 M USD (738 M EUR) en décembre 2018.
La chambre relève que la cession en cours du site impactera le contenu du pacte d’actionnaires conclu
en 2019.
La chambre s’interroge sur l’intérêt financier de la participation de la SPMSC dans le capital de VNC
compte-tenu de son poids dans cet actionnariat (une participation ultraminoritaire), de l’absence de retour
financier pour elle, en l’absence de rentabilité de l’usine, des conséquences financières pour la SPMSC,
le maintien dans l’actionnariat se traduisant par un endettement élevé et compte-tenu de la valeur
financière de cette participation estimée à un niveau nul ou quasi nul.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
10/72
Bien que restructurée, la dette de la SPMSC reste à un niveau important. Outre les 100 M EUR de
créances restant dues à VCL, la société continue à être redevable auprès du BRGM de la créance due
au titre de l’acquisition des actions en 2005 pour 8,7 Md F CFP (72,9 M EUR). Au titre de l’accord conclu
par la SPMSC avec le BRGM le 18 février 2005, cette dette devait être remboursée en 11 ans après le
versement du premier dividende (40 % des dividendes futurs sont réservés au remboursement de cette
dette). Le versement des dividendes était conditionné au déclenchement de la phase de démarrage
effectif de la production. Il était prévu que si la production commerciale n’était pas atteinte à fin 2014, le
BRGM puisse faire annuler la vente. Les actions revenant au BRGM ne représentent plus que 1,33 % du
capital de VNC.
Les conditions du démarrage effectif de la production commerciale n’étant pas réunies et aucun dividende
n’ayant été versé par VNC, aucun paiement n’a été versé au BRGM. Le BRGM a demandé en 2016 la
résolution de la vente.
Suite à la signature d’un protocole transactionnel le 1er février 2017 par la SPMSC et le
29 décembre 2016 par le BRGM, ce dernier s’est désisté de l’instance engagée contre la SPMSC devant
le tribunal de commerce de Paris. En contrepartie du nantissement des actions par convention signée le
même jour, le BRGM a accepté de consentir un nouveau délai jusqu’au 31 décembre 2019.
Les négociations entre la SPMSC et le BRGM sont en cours à la conclusion du contrôle; elles portent sur
la valeur financière actualisée des actions cédées. La SPMSC a mandaté un cabinet d’expertise
comptable pour réaliser une étude de valorisation des titres que la SPMSC détient dans VNC. Cette étude
conclut à une valorisation de 800 000 EUR, montant estimé insuffisant par le BRGM.
La SPMSC a fait réaliser trois études en 2016, 2017 et 2019, afin de déterminer la valeur financière de
sa participation dans VNC. Quelle que soit la méthodologie employée, il ressort le constat d’une très forte
perte de valeur de cette participation, certaines méthodes estimant que la participation de la SPMSC dans
VNC avait une valeur de zéro ou proche de zéro.
Au moment où la chambre a clôturé son contrôle, la société VNC a fait des déclarations publiques
annonçant le changement de son modèle économique. Une nouvelle stratégie a été présentée en
décembre 2019. La consultation des comptes rendus de réunion du conseil d’administration de la SPMSC
révèle l’absence d’information concernant ces changements qui semblent avoir été découverts
tardivement par la société pourtant associée dans l’usine du Sud. Deux changements majeurs de
stratégie ont été annoncés. Le premier concerne les produits fabriqués par l’usine : il est prévu la
cessation de la production de l’oxyde de nickel ainsi que du carbonate de cobalt. L’usine devrait se
concentrer sur le produit intermédiaire NHC (Nickel hydroxyde cake). Le second consiste dans le souhait
de la société de se lancer dans l’exportation du minerai saprolitique (d’une teneur en nickel de 1,8 % à
2 %), à hauteur de deux millions de tonnes par an, ce qui posera le problème juridique de la levée de
l’interdiction réglementaire d’exporter du minerai situé en zone de réserve métallurgique, ce qui est le cas
du minerai exploité par l’usine.
Par ailleurs, le groupe VALE a annoncé souhaiter céder ses 95 % de parts dans VNC courant 2020. La
production étant orientée vers le marché des batteries de voitures électriques, des repreneurs intervenant
dans ce secteur étaient en négociation pour la reprise du site. Le processus de cession est toujours en
cours en février 2021.
SOCIETE DE PARTICIPATION MINIERE DU SUD CALEDONIEN
11 / 72
La chambre a interrogé les associés de la SPMSC afin de connaître les impacts que cette reprise pourrait
avoir sur leurs positions concernant le maintien de la participation de la SPMSC dans le capital de VNC,
la question étant de savoir si à la faveur de la reprise du site par de nouveaux investisseurs, les provinces
envisageaient une modification de la part que la SPMSC détient ou souhaiterait à terme détenir au sein
de VNC. L’autre question concernait les attentes des associés au sein de la SPMSC concernant le ou les
repreneurs. Enfin, la chambre a souhaité connaître la position de la province Sud et de la province Nord,
associés au sein de la SPMSC (la province Sud y étant représenté de facto par PROMOSUD) concernant
le changement du modèle économique dans sa partie relative aux exportations de minerais.
La province Nord n’a pas répondu aux interrogations de la chambre. La province Sud a indiqué à la
chambre être favorable à l’autorisation d’exportation et à l’ouverture des exportations de minerais issus
de la réserve à condition de mettre en place une redevance à l’exportation ou à l’extraction qui compense
l’appauvrissement du sol et corresponde à ce qu’aurait rapporté économiquement une transformation
locale. S’agissant de la part de la SPMSC dans VNC, la province Sud a indiqué négocier le maintien de
la SPMSC dans le capital à la même hauteur (10 %) ainsi que l’apurement de la dette de SPMSC à VALE
et au BRGM et la mise en place d’un système de « golden share » pour la province Sud sur des sujets
comme l’environnement ou l’emploi.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
12/72
LISTE DES RECOMMANDATIONS ET DES RAPPELS
D’OBLIGATION JURIDIQUE
R
APPEL D
’
OBLIGATION JURIDIQUE N
°1 :
LA CHAMBRE DEMANDE A LA
SPMSC
QU
’
IL SOIT MIS FIN A L
’
IRREGULARITE DANS LA
COMPOSITION DE SON ACTIONNARIAT AU REGARD DE L
’
INCOMPETENCE DE LA PROVINCE
N
ORD ET DE LA PROVINCE DES
I
LES
L
OYAUTE
. ________________________________________________________________________________ 20
R
ECOMMANDATION N
°
1 :
LA CHAMBRE RECOMMANDE A LA
SPMSC
DE REVOIR SON NIVEAU DE DEPRECIATION DE SES TITRES DE
PARTICIPATION DANS
VNC. ____________________________________________________________________ 42
SOCIETE DE PARTICIPATION MINIERE DU SUD CALEDONIEN
13 / 72
LA PROCEDURE
Le contrôle des comptes et de la gestion de la SAS Société de Participation Minière du Sud Calédonien
(SPMSC), à compter de l’exercice 2016, a été effectué dans le cadre du programme 2019 de la chambre.
Deux dirigeants se sont succédés au cours de la période sous contrôle : M. Philippe DUNOYER, président
en fonctions de la SAS jusqu’au 24 juillet 2017 et M. Michel LASNIER depuis le 24 juillet 2017.
L’ouverture du contrôle a été notifiée à M. Philippe DUNOYER, par courrier en date du 10 janvier 2020,
dont il a accusé réception le 14 janvier 2020 et à M. Michel LASNIER, actuel président de la société, par
courrier en date du 8 août 2019, dont il a accusé réception le 12 août 2019.
L’entretien de début du contrôle a eu lieu le 14 janvier 2020 avec M. Philippe DUNOYER et le
19 août 2019 avec M. Michel LASNIER.
L’entretien de fin de contrôle a eu lieu le 24 janvier 2020 avec le dirigeant en fonctions,
M. Michel LASNIER, et le 29 janvier avec l’ancien dirigeant, M. Philippe DUNOYER.
Lors de la séance du 14 février 2020, la chambre a formulé des observations provisoires qui ont été
adressées dans leur intégralité au seul dirigeant en fonctions sur la période, M. Michel LASNIER, par
courrier du 15 mai 2020. Des extraits ont été adressés aux personnes et sociétés nominativement ou
explicitement mises en cause.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
14/72
1.
PRESENTATION DE LA SPMSC: UNE SOCIETE DE PORTAGE
DES PARTICIPATIONS PROVINCIALES DANS L’USINE DU
SUD
1.1.
L
E PORTAGE DES INTERVENTIONS PROVINCIALES PAR LE BIAIS D
’
UNE SAS
1.1.1.
La SPMSC : une société holding
1.1.1.1.
Composition de l’actionnariat : la province Nord, la province des Iles,
PROMOSUD
La SPMSC est une SAS, dont le siège social est situé à Nouméa. Son capital social s’élève à
3 145 000 000 F CFP, soit 314 500 actions de 10 000 F CFP réparties de la façon suivante :
-
PROMOSUD : 50 % soit 157 250 actions ;
-
province Nord : 25 % soit 78 625 actions ;
-
province des Iles : 25 % soit 78 625 actions.
La SAS est présidée par M. Michel LASNIER depuis le 24 juillet 2017. Elle était préalablement présidée
par M. Philippe DUNOYER. Société de portage, la holding SPMSC ne dispose d’aucun effectif. Elle est
logée dans les locaux de PROMOSUD et s’appuie sur les moyens matériels et humains fournis par cette
dernière.
1.1.1.2.
Un objet social dédié au portage des participations dans l’usine du Sud
(Vale Nouvelle Calédonie)
La SPMSC a été créée en 2005 afin de permettre aux trois provinces de Nouvelle-Calédonie, réunies au
sein d’une même société, de participer à un projet industriel de construction d’une usine de nickel dans
le sud de la Nouvelle-Calédonie. Cette participation s’est traduite par une entrée de SPMSC dans le
capital de la société GORO NICKEL (devenue VALE NOUVELLE CALEDONIE) qui portait le projet d’une
usine métallurgique dans le sud de la Nouvelle-Calédonie
Les statuts de la société stipulent que l’objet de la SPMSC
1
a pour objet « la prise de participation au
capital de la société GORO NICKEL dont l’objet essentiel à l’économie de la Nouvelle-Calédonie et
l’emploi de ses habitants est, directement ou à travers de ses filiales, de faire valoir des titres miniers et
de construire puis exploiter une usine métallurgique » « et généralement toutes opérations industrielles,
commerciales ou financières, mobilières ou immobilières pouvant se rattacher directement ou
indirectement à l’objet social et à tous les objets similaires ou connexes ».
1.1.1.3.
Une
participation
minoritaire
dans
le
capital
de
l’usine
du
Sud
(Vale Nouvelle- Calédonie)
L’usine
du
sud
et
les
mines
qu’elle
exploite
sont
portées
par
la
société
VALE NOUVELLE CALEDONIE (VNC) anciennement GORO NICKEL.
VNC est une société de droit français, filiale du groupe multinational brésilien VALE. Le capital social de
VNC est détenu à 95 % par la société VALE CANADA LIMITED (VCL) qui est une société du groupe
VALE SA
2
. La SAS VNC est une SAS dont le siège social est à Paris et dont les installations (usine, mine,
1
Cf. article 2 des statuts de la SPMSC mis à jour le 29 décembre 2016
2
La société Vale SA a son siège à Rio de Janeiro au Brésil. « En termes de capitalisations boursières, VALE SA est l’une des
premières entreprises métallurgiques et minières mondiales. VALE SA est le premier producteur mondial de minerai de fer,
SOCIETE DE PARTICIPATION MINIERE DU SUD CALEDONIEN
15 / 72
port) sont situées en Nouvelle-Calédonie. Cette participation de VCL à hauteur de 95 % dans le capital
de VNC fait suite au rachat en mars 2016 par celle-ci de la participation de 14,5 % que détenait la société
SUMIC dans VNC.
a)
Une participation initiale à hauteur de 10 % dans le capital de VNC
L’entrée de la société au capital de l’usine du Sud a été réalisée
3
par l’achat par la SPMSC des
participations du BRGM
4
,
le complément restant a été acquis auprès de l’actionnaire ultramajoritaire
(VALE CANADA LIMITED).
Initialement, la prise de participation de la SPMSC au capital de la VNC était de 10 %. En vertu d’un
contrat de cession et d’acquisition d’actions entre SELANI SA (désormais dénommée BRGM SA),
SPMSC et INCO LIMITED (désormais dénommée VCL) en date du 18 février 2005, la SPMSC a acheté
les actions que le BRGM détenait à hauteur de 9,71 % du capital de VNC (à l’époque dénommée GORO).
La SPMSC a acheté à VCL 0,29 % de participation afin de parvenir à un niveau de participation total dans
le capital de l’usine du Sud de 10 %.
b)
Une participation actuelle ramenée à 5 % dans le capital de VNC
Les appels de fonds successifs intervenus au cours de la construction de l’usine du Sud ont réduit la part
de la participation de la SPMSC dans VNC à 5 % au moment où le contrôle de la chambre s’achève.
de pellets de minerai de fer et de nickel. VALE SA produit également du minerai de manganèse, des ferro-alliages, du charbon
métallurgique et thermique, des plainoïdes, de l’or, de l’argent et du cobalt. Le Groupe est actuellement engagé dans la
prospection minière de nouveaux projets dans six pays et exploite des infrastructures logistiques au Brésil et dans d’autres
régions du monde, incluant des réseaux ferroviaires, des terminaux maritimes et des ports, qui sont intégrés à ses activités
minières (…). VALE SA emploie environ 74 000 personnes et possède des bureaux et des sites d’exploitation sur 5 continents.
Son chiffre d’affaires était de 29,4 Md USD en 2016, de 33,9 Md USD en 2017 et s’établit à 26,8 Md USD au
30 septembre 2018. Le Groupe a une capitalisation boursière d’environ 71,5 Md USD au 5 décembre 2018 » (source : dossier
de demande d’agrément Financement du projet d’assèchement et de stockage de résidus miniers pour la société Vale
Nouvelle-Calédonie dans le cadre de l’aide fiscale à l’investissement outre-mer, 11 décembre 2018).
3
Pour le détail des modalités de ces acquisitions, voir infra.
4
Le BRGM est venu en 2007 aux droits et obligations de SELANI qui avait été initialement la partie ayant cédé ses actions à
la SPMSC (voir infra).
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
16/72
Actionnariat de VNC
Source : VNC
1.1.2.
Présentation de l’usine du Sud
Le projet d’installation d’une usine dans le Sud de la Nouvelle-Calédonie à Goro, porté par la société
canadienne INCO, soutenue par les autorités locales a connu une longue période de gestation. En
octobre 2004, le conseil d’administration d’INCO Ltd réuni à Toronto, en présence du président de
l’assemblée de la province Sud de la Nouvelle-Calédonie et des autorités coutumières du Sud de la
Nouvelle-Calédonie, a pris la décision de poursuivre la conduite du projet d’usine métallurgique à Goro.
Les travaux se sont achevés à la fin de l’année 2008.
L’usine du Sud utilise un procédé hydrométallurgique pour exploiter le nickel et le cobalt extraits des
mines qu’elle exploite à proximité immédiate de la raffinerie
5
.
L’hydrométallurgie permet d’extraire les
métaux du minerai par des réactifs chimiques et de les séparer pour produire un concentré ou un produit
intermédiaire. Ce procédé vise à retirer un haut pourcentage du métal contenu dans le minerai en utilisant
moins d’énergie que le traitement pyrométallurgique utilisé par les deux autres usines présentes sur le
territoire (usine de la SLN à Nouméa et usine du Nord détenue par la SMSP et GLENCORE).
Au 31 décembre 2018, l’usine et ses installations minières et portuaires emploient un effectif de
1361 salariés. Compte-tenu des décisions récentes de restructurer l’usine et de la décision de
l’actionnaire principal (VCL) de vendre ses participations dans l’usine, un plan social est en cours de
négociation.
5
Le domaine minier de VNC rassemble 64 concessions en province Sud. Les réserves minières prouvées et probables sont
estimée à environ 112,9 millions de tonnes de minerai au 31 décembre 2017 avec une teneur moyenne de 1,40 % en nickel
et 0,11 % en cobalt. Dans le nord de la Nouvelle-Calédonie, sur le massif de Tiébaghi, VNC détient également deux titres
miniers qui devraient être échangés avec des titres appartenant à la SLN. (Source : annexe aux comptes annuels VNC
exercice clos 31 décembre 2017).
SOCIETE DE PARTICIPATION MINIERE DU SUD CALEDONIEN
17 / 72
1.2.
LA PRESENCE IRREGULIERE DE LA PROVINCE
N
ORD ET DE LA PROVINCE DES
I
LES
Questionnées sur la base juridique qui fonde la participation de la province Nord et de la province des
Iles, dans l’usine du Sud à travers la SPMSC alors même que l’usine n’est pas en province Nord ni en
Province des Iles et qu’elle n’impacte pas le territoire de ces deux collectivités, les provinces ont fait état
de bases juridiques différentes pour motiver leur intervention.
1.2.1.
Les arguments de la province des Iles
Dans sa réponse à la chambre
6
, la province des Iles indique que l’usine de Goro n’a aucun impact
économique en province des Iles. Elle précise que l’usine n’a pas encore atteint ses objectifs
commerciaux lui permettant de dégager du bénéfice mais que « toutefois, la prise de participation de la
province des Iles au capital de la SPMSC permet à la Nouvelle-Calédonie de disposer d’une maitrise
suffisante de ses outils de développement (cf Accord de Nouméa 4.4 » (…) L’un des objectifs de la
province des Iles est de disposer d’une maîtrise suffisante de ses outils de développement de la gestion
du minerai (cf accord de Nouméa art. 4.4). De plus, il est à souligner que la gestion de la ressource du
minerai brut reste une priorité pour l’intérêt du pays. Ainsi les retombées économiques de cette activité
minière financeront d’autres secteurs de développement de la Nouvelle-Calédonie ».
C’est sur la base de l’article 4.4 des accords de Nouméa que la province des Iles fonde la base juridique
de son intervention dans le capital de l’usine du Sud à travers son intervention dans le capital de la
SPMSC.
L’article 4.4 des accords de Nouméa intitulé « Le contrôle des outils de développement » dispose que :
« La Nouvelle-Calédonie sera mise à même, au cours de la nouvelle période qui s'ouvre, de disposer
d'une maîtrise suffisante des principaux outils de son développement. Lorsque l'Etat détient directement
ou indirectement la maîtrise totale ou partielle de ces outils, la Nouvelle-Calédonie le remplacera selon
des modalités et des calendriers à déterminer. Lorsque la Nouvelle-Calédonie le souhaitera, les
établissements publics nationaux intervenant seulement en Nouvelle-Calédonie deviendront des
établissements publics de la Nouvelle-Calédonie.
Sont notamment concernés : Office des postes et télécommunications, Institut de formation des
personnels administratifs, Société néo-calédonienne de l'énergie ENERCAL, Institut calédonien de
participation, Agence de développement rural et d'aménagement foncier, Agence de développement de
la culture kanak...
Lorsque les organismes n'interviennent pas seulement en Nouvelle-Calédonie, celle-ci devra disposer
des moyens de faire valoir ses orientations stratégiques en ce qui concerne la Nouvelle-Calédonie par
une participation dans le capital ou les instances dirigeantes ».
La chambre relève que cet article concerne le transfert des compétences qui devait intervenir entre l’Etat
et la collectivité de Nouvelle-Calédonie dans le domaine des outils de développement, selon un calendrier
et des modalités qui restaient, à l’époque des accords de Nouméa, à déterminer. Cet accord ne concerne
pas les collectivités provinciales ni le secteur minier.
6
Réponses aux questions n°29 et 30 du questionnaire
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
18/72
Dans les accords de Nouméa, les mentions relatives au secteur minier concernent les points suivants
dont aucun ne prévoit la compétence des provinces pour leur intervention dans le capital des sociétés
minières et métallurgiques :
- l’article 3.2.5 « La réglementation minière » prévoit le transfert à la collectivité de
Nouvelle- Calédonie de la responsabilité de l’élaboration des règles concernant le nickel et aux
provinces celle de la mise en œuvre ;
- l’article 4.2.2 « Les mines » renvoie à la nécessité de mettre en œuvre un schéma de mise en
valeur des richesses minières du territoire, dont la mise en œuvre sera contrôlée par la
Nouvelle- Calédonie grâce au transfert progressif de l’élaboration et de l’application du droit
minier.
1.2.2.
Les arguments de la province Nord
La province Nord a indiqué
7
que la base juridique sur laquelle elle fonde son intervention est « la loi
organique n°99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie ainsi que la délibération qui y est
adossée… La délibération n°01-2005/APN du 11 février 2005 autorisant la province Nord à prendre une
participation dans le capital de la SAS société de participation minière du sud calédonien (SPMSC) ».
La chambre constate que cette délibération, qui se contente de mentionner que « la province Nord est
autorisée à prendre une participation à hauteur de 25 % (1 250 000 F CFP) dans le capital
(5 000 000 F CFP) de la SAS Société de Participation Minière du Sud Calédonien (SPMSC) (…) », ne
permet pas d’analyser les fondements et arguments sur lesquels s’est fondée la province Nord pour
valider cette participation. Invitée à plusieurs reprises à transmettre le rapport de présentation qui avait
accompagné les débats sur cette délibération, la province Nord n’a pas répondu. La chambre reste dans
l’attente de la production de ce document.
En outre, la province Nord a ajouté que sa participation au sein de la SPMSC « traduit l’appartenance de
la ressource au Pays. Ce concept a fondé avant cela la création et la structure de la STCPI. Sa
participation dans la SPMSC doit permettre un équilibre politique dans les intérêts industriels publics,
devant précéder la définition d’une stratégie nickel Pays adoptée par tous, permettant de créer un
maximum de retour de la valeur ajoutée à la collectivité pour maximiser son bénéfice de la consommation
de sa ressource non renouvelable et la compensation de la destruction de son capital naturel. »
Au final, il apparaît que la province Nord se fonde sur deux arguments pour fonder sa participation à
l’usine du Sud :
-
les compétences attribuées par la loi organique n°99-209 du 19 mars 1999 relative à la
Nouvelle- Calédonie ;
-
l’appartenance de la ressource au pays.
La chambre ne partage pas cette analyse.
La loi organique n’offre pas la base juridique permettant de justifier la participation de la province Nord
dans une société située hors de son territoire, concernant une usine qui n’a aucun lien direct ou indirect
avec ce dernier, les employés et les entreprises sous-traitantes de l’usine n’étant pas situées sur son
ressort.
7
Réponse par courriel daté du 16 juillet 2019
SOCIETE DE PARTICIPATION MINIERE DU SUD CALEDONIEN
19 / 72
La loi organique confère aux provinces deux types de compétence qui justifient l’intervention de ces
dernières dans le secteur du nickel.
En premier lieu, la loi organique confère aux provinces des compétences concernant spécifiquement le
secteur du nickel, mais ces dernières concernent la régulation du secteur par la participation des
provinces à l’édiction de la norme, avec la collectivité de Nouvelle-Calédonie. La loi organique partage
les compétences minières entre les provinces et la collectivité de la façon suivante: l’article 40 de la loi
dispose que si la réglementation relative au nickel est fixée par le congrès, « les décisions d'application
de cette réglementation sont prises par délibération de l'assemblée de province. La police des mines est
exercée par le président de l'assemblée de province. ». La participation au capital d’une société
métallurgique ne ressort pas de cette base juridique.
En second lieu, la loi organique confère aux provinces une compétence de droit commun (article 20), les
provinces étant compétentes dans les matières qui ne sont pas dévolues à l’Etat, la Nouvelle-Calédonie
et les communes. Le secteur du développement économique ne relevant pas de l’Etat, ni de la
Nouvelle- Calédonie et ni des communes, il entre dans le champ des compétences des provinces. C’est
sur cette base, que les provinces interviennent dans le secteur économique, y compris par la participation
au capital de sociétés privés, comme l’autorise la loi organique à l’article 53 qui dispose au paragraphe II
que « La Nouvelle-Calédonie, les provinces et leurs établissements publics peuvent participer au capital
de sociétés privées gérant un service public ou d'intérêt général. ». Par cette disposition, le législateur
organique a ouvert aux provinces une modalité particulière – la participation au capital de société privée
– leur permettant d’exercer leurs compétences, parmi lesquelles figure le développement économique.
Ce faisant, les provinces sont tenues, à l’instar de toute collectivité locale, de respecter le périmètre
géographique de leur ressort, dans l’exercice de leur compétence, sauf à démontrer que l’intervention
hors de leur territoire s’exerce dans le respect de l’intérêt local. Lorsqu’il apprécie si les limites territoriales
des collectivités locales respectent leur intérêt local, le juge administratif recherche :
-
si l’intervention se justifie par l’exigence d’un intérêt public soit par nature (par opposition à la
satisfaction d’un intérêt privé), soit par carence de l’initiative privée ;
-
si l’intervention revêt un intérêt direct pour la population concernée.
La province Nord comme la province des Iles ont confirmé l’absence d’un intérêt direct pour la population
concernée.
Sous réserve de l’appréciation souveraine des tribunaux, la participation de la province Nord et de la
province des Iles au capital d’une usine située loin de leur territoire géographique, sans lien avec leur
population et leurs entreprises, ne présente pas d’intérêt local pour ces dernières et leurs habitants.
La province nord indique
8
que les retombées économiques de l’usine du sud consistent essentiellement
en sa contribution fiscale dans la quote-part de dotation du Territoire pour la province nord, ainsi que les
parts salariales dépensées dans le Nord. Le fait que l’usine paie des impôts que la collectivité de
Nouvelle- Calédonie redistribue notamment vers les provinces ne saurait justifier l’existence d’un impact
économique direct de l’usine du Sud vers la province Nord. Par ailleurs, le fait que cette intervention soit
effectuée à un niveau ultraminoritaire (5 %) confirme qu’il ne s’agit pas d’intervenir en vue de réaliser un
intérêt public ou pour couvrir la carence de l’initiative privée.
Par ailleurs, s’agissant de l’argument relatif à l’appartenance de la ressource nickel au pays, la chambre
relève qu’en toute logique, si la province considère que la ressource appartient à l’ensemble du territoire,
8
Réponses aux questions n°45 et 45 du questionnaire
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
20/72
c’est du niveau de la collectivité de Nouvelle-Calédonie que devrait se structurer les interventions dans
le secteur.
La chambre attire l’attention de la SPMSC sur les risques d’insécurité majeure pesant sur les décisions
et actes juridiques de la société résultant de la composition irrégulière de son actionnariat et l’invite en
conséquence à engager une réflexion avec ses associés afin de mettre fin à cette irrégularité.
Rappel d’obligation juridique n°1 : la chambre demande à la SPMSC qu’il soit mis fin
à l’irrégularité dans la composition de son actionnariat au regard de l’incompétence de
la province Nord et de la province des Iles Loyauté.
1.3.
L’
ABSENCE REPETEE DE L
’
ADMINISTRATEUR ELU DE LA PROVINCE
N
ORD
Si le nombre de réunions du conseil d’administration et de l’assemblée générale des associés n’appelle
pas d’observation (deux à trois réunions par an pour chacun, à l’exception de l’année 2017), la chambre
relève néanmoins que les réunions du conseil d’administration se tiennent, dans une très grande majorité
des cas, avec la seule présence de trois des quatre administrateurs composant le conseil
d’administration. Les statuts prévoient un nombre restreint d’administrateurs (quatre).
Le conseil d’administration de la SPMSC est composé de quatre administrateurs. Jusqu’au 24 juillet 2017
(date à laquelle, M. Michel LASNIER a été désigné à la présidence de la société en remplacement de
M. Philippe DUNOYER), le conseil d’administration se composait des administrateurs suivants :
-
M. Philippe DUNOYER, administrateur et président,
-
M. Neko HNEPEUNE, administrateur (par ailleurs, à l’époque, président de la province des Iles),
-
M. Victor TUTUGORO, administrateur (par ailleurs élu à la province Nord) ;
-
M. Michel LASNIER en tant que représentant permanent de PROMOSUD.
Suite à la nomination de M. LASNIER à la présidence de la société, le conseil d’administration de la
société se compose de la façon suivante :
-
M. Michel LASNIER, administrateur et président,
-
M. Neko HNEPEUNE, administrateur,
-
M. Victor TUTUGORO, administrateur,
-
M. Eric BENASSA en tant que représentant permanent de PROMOSUD.
Sur la période 2016 à 2018, le conseil d’administration de la société s’est réuni huit fois. La chambre
relève que M. TUTUGORO, administrateur nommé par la province Nord, a fait preuve d’une absence
quasi constante durant cette période, cet administrateur n’ayant participé en présentiel qu’à deux réunions
du conseil d’administration, soit 25 % des réunions. Pour 75 % des autres réunions, M. TUTUGORO était
absent (deux réunions) ou représenté par un autre administrateur (quatre réunions).
SOCIETE DE PARTICIPATION MINIERE DU SUD CALEDONIEN
21 / 72
Tableau : présence de M. TUTUGORO aux réunions du conseil d’administration
de la SPMSC entre 2016 et 2018
Date de réunion du CA
Participation de M. TUTUGORO
CA du 3 juin 2016
M. TUTUGORO, présent
CA du 13 juillet 2016
M. TUTOGORO, absent
CA du 7 décembre 2016
M. TUTOGORO, représenté par M. HNEPEUNE en vertu d’un pouvoir
CA du 24 juillet 2017
M. TUTUGORO, présent
CA du 26 décembre 2017
M. TUTUGORO, représenté par M. LASNIER
CA 18 janvier 2018
M. TUTOGORO, représenté par M. HNEPEUNE en vertu d’un pouvoir
CA 7 mars 2018
M. TUTOGORO, absent
CA 28 novembre 2018
M. TUTUGORO, représenté par M. HNEPEUNE en vertu d’un pouvoir
Source : PV du CA de la SPMSC
Sans constituer une irrégularité, dans la mesure où les statuts de la SPMSC reconnaissent la possibilité
pour un administrateur d’être représenté par un autre et dans la mesure où le quorum a été respecté, la
chambre attire cependant l’attention de la société sur la nécessité que le conseil d’administration composé
in fine d’un nombre restreint d’administrateurs, se réunisse en présence des administrateurs au complet
au moins lorsque l’ordre du jour comporte des sujets d’importance comme ce fut le cas notamment pour
les débats du conseil ayant donné lieu à la délibération du conseil d’administration sur :
-
la procédure d’alerte engagée par le commission aux comptes (CA du 13 juillet 2016, du
26 décembre 2017, du 18 janvier 2018) ;
-
l’approbation du protocole transactionnel entre la SPMSC et le BRGM (CA du 7 décembre 2017) ;
-
la validation d’un audit juridique sur les relations entre la SPMSC et le groupe VALE (CA du
26 décembre 2017) ;
-
le point complet des relations entre la société et le groupe VALE avec la présentation des audits
juridiques et financiers engagés par la SPMSC (CA du 28 novembre 2018).
Par ailleurs, la chambre relève que s’agissant des réunions des associés au sein de l’assemblée
générale, une réunion de l’assemblée générale s’est tenue en la présence physique d’un seul associé,
en l’espèce M. Michel LASNIER, qui à lui seul représentait la société PROMOSUD, la province des Iles
et la province Nord lors de l’assemblée générale tenue le 22 mars 2018.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
22/72
2.
L’ABSENCE DE RETOUR SUR INVESTISSEMENT POUR LA
SPMSC DANS SA PARTICIPATION DANS L’USINE DU SUD
2.1.
L
ES ATTENTES DE LA
SPMSC
DANS SA PARTICIPATION AU CAPITAL DE L
’
USINE DU
SUD
2.1.1.
Les attentes exprimées dans le rapport DUTHILLEUL
2.1.1.1.
La revendication par la SPMSC du rapport DUTHILLEUL comme fondement à
l’intervention de la société dans l’usine du Sud
Dans l’ensemble des documents réunis lors du contrôle, il est relevé la mention par la SPMSC du
rapport DUTHILLEUL, comme ayant motivé la participation des provinces dans le capital de l’usine du
Sud à travers le rachat par la SPMSC des actions détenues par le BRGM.
Ce rapport daté du 17 août 2004, intitulé « Etude de la participation d’un partenariat néo- calédonien au
capital de Goro Nickel simultanément à la sortie du BRGM », a été réalisé par la Mission pour les Grandes
Projets
de
Nickel
en
Nouvelle-Calédonie,
conduite
par
un
haut- fonctionnaire
de
l’Etat,
Anne DUTHILLEUL.
Dans des fiches synthétiques rappelant les origines du projet, présentées devant le conseil
d’administration de la SPMSC et celui de l’actionnaire majoritaire de cette dernière, PROMOSUD, il est
ainsi rappelé que « La participation des institutions provinciales réalisée sur la base du
rapport DUTHILLEUL, s’est traduite par le rachat des actions détenues par la société SELANI (devenue
depuis BRGM SA) filiale du BRGM au capital de la société canadienne INCO rachetée depuis par la
société brésilienne VALE » (..) « L’entrée de la SAS SPMSC au capital de VALE NC s’est fondée en toute
confiance sur la base des études et simulations financières réalisées par la « Mission des grands projets
de Nickel en Nouvelle-Calédonie » qui, au terme d’un rapport en date du 17 août 2004 concluait « il est
possible de proposer le rachat de la participation du BRGM par un partenaire néo-calédonien et son
financement par emprunt, sans aucune mise de fonds propres, remboursable sur les cash-flows futurs
du projet ».
Sur le fondement de ce rapport, la SPMSC est intervenue dans l’actionnariat de l’usine du Sud au travers
de la SPMSC, se fondant sur les objectifs attendus et les modalités proposées.
2.1.1.2.
Les objectifs attendus : un retour financier sous forme de dividendes
a)
Les hypothèses retenues
Le rapport DUTHILLEUL (neuf pages), fixait des prévisions positives en termes de rentabilité financière
du projet pour les collectivités provinciales. L’un des objectifs de la mission était de déterminer comment
les dividendes futurs du projet pouvaient permettre au partenaire néo-calédonien d’emprunter pour faire
face aux engagements financiers du projet dans le cadre d’une participation entre 5 et 10 % du capital de
Goro Nickel (la société Goro Nickel est depuis devenue Vale Nouvelle-Calédonie).
Les prévisions positives se fondaient sur les chiffres clés suivants du projet
9
qui ont tous connu, par la
suite, des dépassements importants (cf. infra) :
9
Chiffres dont la Mission indiquait que la source était la société INCO.
SOCIETE DE PARTICIPATION MINIERE DU SUD CALEDONIEN
23 / 72
-
l’investissement total du projet GORO était estimé à 1 850 M USD, avec une marge d’incertitude
de -5 % à +20 %. L’investissement total du projet était donc estimé être compris entre
1 775 M USD et 2 150 M USD ;
-
il était prévu que la construction de l’usine dure jusqu’en 2007 et que le démarrage de
l’exploitation ait lieu à la fin de l’année 2007, la pleine capacité étant estimée devoir être atteinte
en 2008.
b)
Un montant de dividendes à recevoir par la SPMSC de plus de 400 M EUR
Le montant des cash-flows générés par l’usine (société Goro Nickel à l’origine) a été établi, selon les
simulations émanant de la société INCO. Il était prévu que les cash-flows de la société Goro Nickel
s’établiraient
10
,
durant les années 2004 à 2007, aux montants suivants :
-
en 2004 : 122,2 M USD (102,7 M EUR) ;
-
en 2005 : -331
M USD (-278 M EUR) ;
-
2006 : -518,8 M USD (-432,3 M EUR)
-
2007 : -469,9 M USD (-388,4 M EUR)
Sur la base de ces cash-flow et dans l’hypothèse où la SPMSC maintiendrait sa participation à 10 % et
que l’usine distribue 95 % du cash disponible, il était prévu que le montant des dividendes serait le suivant
(cf. tableau ci-dessous): à l’exception de l’année 2013
11
,
après l’année de démarrage, la mission prévoyait
que les distributions seraient légèrement supérieures à 15 M EUR. La mission prévoyait un montant de
dividendes reçus par le partenaire néo-calédonien d’un montant de 7,9 M EUR entre 2005 et 2009, de
66,9 M EUR entre 2010 et 2014, de 111,6 M EUR entre 2015 et 2019, de 119,9 M EUR entre 2020 et
2024 et de 104,1 M EUR entre 2025 et 2029, soit un montant total de dividendes de 410,4 M EUR que
percevrait ainsi la SPMSC entre 2005 et 2029.
10
Sur le fondement d’hypothèses concernant les cours du nickel à 3,25 USD/lb et du cobalt à 8 USD/lb.
11
La mission DUTHILLEUL prévoyait une distribution faible au titre de l’année 2013 en raison du rachat du matériel détenu
par les GIE liés à la partie défiscalisée du financement du projet.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
24/72
Montant des dividendes estimé dans le rapport
DUTHILLEUL
Source : rapport DUTHILLEUL (2004)
2.1.1.3.
Les modalités : le financement par l’emprunt remboursable sur les dividendes du
projet
La mission considérait que le niveau des retours financiers attendus du projet pourrait permettre à la
SPMSC de financer sa participation au sein de l’usine (acquisition des actions du BRGM et paiement de
la quote-part de la SPMSC dans les appels de fonds pour le financement de l’usine via la souscription
d’un emprunt bancaire). Ces montants de dividendes devaient en effet permettre à la SPMSC de
rembourser sa prise de participation dans l’usine ainsi que le prêt bancaire qu’elle devrait souscrire pour
financer une partie de sa quote-part dans le financement des investissements, les montants estimés étant
les suivants (cf tableau ci-dessous) :
-
paiement au BRGM de la valeur des actions achetées pour un montant de 61 M EUR ;
-
remboursement d’un emprunt bancaire pour un montant de 110,4 M EUR ainsi que les intérêts
de 45,3 M EUR.
Montant des dividendes à recevoir
Source : rapport DUTHILLEUL (2004)
Au total, sur la durée du projet (2005 à 2019), le montant total des dividendes à recevoir par la SPMSC
était estimé à 410,4 M EUR. Après paiement au BRGM des actions achetées (61 M EUR) et
SOCIETE DE PARTICIPATION MINIERE DU SUD CALEDONIEN
25 / 72
remboursement de l’emprunt bancaire (45,3 M EUR d’intérêts et 110,4 M EUR en capital), il devait donc
rester 193,6 M EUR à la SPMSC.
Ainsi, dès 2005, la SPMSC devait percevoir un solde net de dividendes de 2,1 M EUR jusqu’en 2009, et
un montant de 12,7 M EUR entre 2015 et 2019, le montant allant jusqu’à 76,8 M EUR entre 2020 et 2024
et 104,1 M EUR entre 2025 et 2029.
2.1.1.4.
La conclusion générale du rapport DUTHILLEUL
Au vu du montant de dividendes devant rester dans les caisses de la société, une fois remboursés ses
créanciers, il apparaissait donc à la mission que le projet était rentable. La mission concluait que « sur la
base des éléments disponibles et des hypothèses explicitées ci-dessus, il est possible de proposer le
rachat de la participation du BRGM par un partenaire néo-calédonien et son financement par emprunt,
sans aucune mise de fonds propres, remboursable sur les cash-flows futurs du projet ».
2.1.2.
Les attentes issues des projections financières de VALE
Selon les éléments recueillis lors du contrôle, les projections financières établies par VALE ont conduit la
SPMSC à attendre un retour financier dès 2011, puis dès 2013 et ensuite à partir de 2017.
Ainsi, les projections financières de 2007 présentées par VCL ont conduit la SPMSC à considérer qu'elle
recevrait les premiers dividendes dès 2011, que sa trésorerie deviendrait positive en 2020 et que sa dette
bancaire serait remboursée en 2020 et sa dette auprès du BRGM en 2024.
Les projections financières de 2008 présentées par VCL ont conduit la SPMSC à considérer qu'elle
recevrait des dividendes dès 2013, qu'elle rembourserait la dette auprès du BRGM en 2031, sa dette
bancaire en 2020, et le prêt de VALE (de 70 M EUR) en 2031 et que sa trésorerie deviendrait positive en
2031.
Dans les projections établies en 2015, la production pour 2017 devait atteindre 52 000 tonnes et la
SPMSC devait percevoir des dividendes à compter de 2017 (jusqu'en 2053), alors que la production
atteignait en 2017 37 400 tonnes, aucun dividende n'étant par ailleurs perçu.
2.1.3.
Le montage financier et contractuel devait assurer l’absence de prise en charge du
risque industriel par la SPMSC
2.1.3.1.
La volonté de la SPMSC de se prémunir du risque industriel
Tel qu’était prévu initialement le partenariat, le fait que les provinces ne voulaient pas assumer le risque
financier et industriel assorti au projet, devait se traduire par le fait que l’usine devait dégager les
cash- flow suffisants pour pouvoir dégager les dividendes permettant à la SPMSC de financer son entrée
dans le capital. La capacité de l’usine à distribuer des dividendes se fondait sur les hypothèses chiffrées
retenues dans le rapport DUTHILLEUL (cf. supra). Ainsi, l’usine devait être mise en production en 2007,
pour un montant d’investissement de 1,878 Md USD pouvant éventuellement être augmenté à
2,150 Md UDS ; elle devait avoir une capacité annuelle de production de 60 000 tonnes de produits nickel
et 4500 à 5000 tonnes de produits à base de cobalt.
La SPMSC et son actionnaire majoritaire, PROMOSUD, ont, à maintes reprises, rappelé que le
partenariat avec VALE s’était fondé sur le fait que les collectivités publiques calédoniennes acceptaient
d’assumer, au travers de la SPMSC, le risque commercial (celui-ci devant débuter lors de l’atteinte du
déclenchement de la production commerciale, niveau non atteint encore à ce jour) mais pas le risque
industriel.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
26/72
Ainsi, lors du conseil d’administration de PROMOSUD du 30 novembre 2016, le directeur général de la
SEM rappelait que « les accords avec le BRGM et VALE étaient fondés sur des bases simples et claires
dans la répartition des rôles de chacun. Les collectivités publiques calédoniennes assuraient au travers
de la SAS SPMSC une présence de la Nouvelle-Calédonie au sein du capital, sans assumer les risques
financiers et industriels inhérents à ce type de projet. Ce faisant, elles permettaient aux Calédoniens de
s’approprier un projet industriel novateur dans un environnement géographique particulièrement sensible
notamment du fait de sa richesse écologique. De son côté l’industriel détenteur du savoir-faire technique
et des capitaux nécessaires à la bonne réalisation d’un investissement d’envergure internationale assurait
quant à lui la bonne fin de la conception, de la construction et de la mise en exploitation de l’outil industriel.
C’est sur ces bases maintes fois répétées que ce partenariat fut établi ».
Dans une note présentée au conseil d’administration de PROMOSUD le 13 mars 2018, il est indiqué qu’
« il est particulièrement important de noter que dès le début des premières négociations pour l’entrée de
la SPMSC dans le projet, tant le président de la province Sud que les mandataires menant ces
négociations n’ont cessé de souligner qu’il était hors de question que la SPMSC (ou les provinces
composant son capital) supporte le risque industriel du projet. La SPMSC acceptait de participer au risque
commercial, celui-ci devant débuter dès l’atteinte du niveau de démarrage de la production commerciale
de l’usine, niveau toujours non atteint au 31 décembre 2017 ni à ce jour. De 2004 à ce jour, toutes les
interventions de la SPMSC ont rappelé à leurs interlocuteurs successifs d’INCO ou de VALE ce
fondement même de la relation qui avait présidé aux discussions entre l’industriel et la SPMSC ».
Dans un courrier du 16 juin 2011, signé par Mme Jennifer MAKI, alors en charge de la branche Base
Métals du groupe VALE (VALE Base Metals) et adressé à la Financière Oceor et à la BRED, figure ce
rappel de la position de la SPMSC ainsi mentionné par VALE : « We should state at this juncture that,
when the shareholders agreements were negociated, SPMSC made it clear that, while they agreed to
assume the commercial risk, there could be no question of their assuming any kind of technical risk. »
(« nous devons indiquer, à ce stade, que lorsque le pacte d’actionnaires fut négocié, SPMSC a insisté
sur le fait qu’alors qu’elle avait accepté le risque commercial, il était hors de question pour elle de
supporter un quelconque risque industriel »).
La répartition des rôles entre l’industriel VALE et la SPMSC devait se traduire de la façon suivante :
-
l’industriel apportait le savoir-faire technique et les capitaux nécessaires à la bonne réalisation
de l’installation métallurgique et devait assurer la bonne fin de conception, de la construction et
de la mise en exploitation de l’outil industriel ;
-
les collectivités publiques calédoniennes, présentes (province Nord et province des Iles) ou
représentées (province Sud) au sein de la SPMSC, participaient à ce projet sans assumer les
risques financiers et industriels du projet tout en retirant des bénéfices de l’exploitation du
sous- sol calédonien.
2.1.3.2.
Le montage initial du projet (2005-2006) formalisé par la création de la SPMSC,
l’achat des actions du BRGM et INCO, la conclusion du pacte d’actionnaires et
la souscription d’un emprunt
Dans le cadre du montage du projet, dont le principe avait été validé dans le rapport DUTHILLEUL, les
provinces (la province Nord et la province des Iles directement et la province Sud par l’intermédiaire de
PROMOSUD) ont créé le 14 février 2005 une société de portage de leur participation au sein de la société
Goro Nickel (qui deviendra ensuite Vale Nouvelle-Calédonie) : la SPMSC.
SOCIETE DE PARTICIPATION MINIERE DU SUD CALEDONIEN
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Le schéma retenu par les associés de la SPMSC a été approuvé le 14 janvier 2005 par un vote unanime
de l’assemblée de la province Sud :
-
la SPMSC achète au BRGM la totalité de ses parts dans Goro Nickel (9,71 %) pour un montant
de 62,4 M EUR (7,4 Md F CFP). Le paiement est différé après que la SPMSC aura perçu ses
premiers dividendes de Goro Nickel (40 % du montant des dividendes est fléché pour le
remboursement des parts du BRGM acquis par la SPMSC) ; une clause du contrat de cession
prévoit la saisine possible des tribunaux en cas de défaut de paiement d’ici 2015 ;
-
afin de disposer de 10 % des parts de Goro Nickel
12
, la SPMSC achète à INCO le complément
de 0,29 % des parts à l’actionnaire majoritaire (INCO) ;
-
au fur et à mesure des appels de fonds nécessaires à la construction de l’usine, la SPMSC
laissera diluer sa participation jusqu’à atteindre 5 % du capital de Goro Nickel. A ce stade de 5 %,
la SPMSC devra participer aux appels de fonds, cette participation étant financée par un emprunt
bancaire estimé à un maximum de 45 M EUR puisque le projet est estimé à 1,898 Md USD avec
une tolérance maximale jusqu’à 2,150 Md USD ; INCO accepte d’assumer les surcoûts mais
seulement dans la limite de 3 Md USD ;
-
il est également prévu que la SPMSC doive acquérir 5 % supplémentaire du capital dans les
douze mois suivant l’entrée en production commerciale ;
-
INCO garantit intégralement la SPMSC contre un dépassement du coût du projet au-delà de
2,150 Md USD, dans la limite de 3 Md USD ;
-
en cas d’échec du projet, INCO garantit le prêt bancaire souscrit par la SPMSC, par une lettre de
garantie irrévocable
de 35 M EUR ;
-
in fine, le coût supporté par la SPMSC pour détenir 5 % du capital de Goro Nickel devait s’élever
à 107,4 M EUR (soit près de 13 Md F CFP), à condition que le coût du projet, prévu à
1,8 Md
USD, reste en deçà de 2,450 Md USD. Selon les prévisions effectuées à l’époque, les
dividendes versés devaient permettre en 15 ans environ après la mise en service, à la fois de
rembourser toutes les dettes et de porter la participation de la SPMSC au capital de Goro Nickel
à 10 %.
Sur la base de ce schéma ainsi validé, la SPMSC signe le 18 février 2005, le contrat d’achat des actions
avec le BRGM et, avec INCO, le pacte d’actionnaires, ce dernier formalisant contractuellement l’ensemble
de ce dispositif.
Suite aux appels de fonds découlant de la construction de l’usine, la SPMSC, comme prévu, a laissé
diluer sa participation jusqu’à 5 % du capital, puis elle a contracté, le 8 septembre 2006, un prêt bancaire
de 45 M EUR avec le groupement BRED-OCEOR d’une durée maximale de 20 ans (jusqu’à 2026). Le
contrat de prêt avec la banque prévoyait que la durée réelle du remboursement serait fonction des
rentrées des dividendes : la SPMSC doit affecter tous les ans au remboursement de ce prêt les 60 % des
dividendes qu’elle recevra de GORO, le reste étant réservé au remboursement des actions achetées au
BRGM.
12
Le seuil de 10 % ouvre droit à certaines dispositions du code de commerce en matière de contrôle de gestion.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
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2.2.
D
ES ATTENTES NON REALISEES
Sur les deux niveaux de ses attentes, la SPMSC n’a pas rencontré ses objectifs :
-
elle a participé à la prise en charge du risque industriel par sa participation au financement du
coût de l’usine au-delà des montants initialement prévus et ce au prix d’un endettement financier
croissant qui vidait de tout intérêt financier sa participation dans le projet ;
-
elle n’a retiré aucun retour financier de sa participation, les difficultés de VNC étant telles
qu’aucune distribution de dividendes n’était possible, la production commerciale n’ayant pas
démarré.
2.2.1.
La remise en cause du schéma initial par les dérapages dans les coûts de
construction de l’usine
2.2.1.1.
La modification des conditions du partenariat en 2008 par un avenant au pacte
d’actionnaires
Le schéma mis en œuvre en 2005 a été remis en cause, dès le démarrage de l’opération, par le dérapage
dans les coûts de construction de l’usine.
Deux mois après la signature du contrat du prêt dont le montant reposait sur une estimation du coût de
l’usine de GORO plafonnée à 2,450 Md USD, il est apparu que le budget risquait d’être porté à plus de
3,1 Md USD. En mai 2007, VALE (qui avait entretemps racheté INCO), établit le budget à 3,121 Md USD.
La SPMSC a alors refusé de suivre les augmentations de capital ; elle a stoppé ses versements et a
demandé à l’actionnaire majoritaire (VALE) d’ouvrir des négociations en vue d’une modification du pacte
d’actionnaires pour sécuriser le niveau de participations de la SPMSC à 5 % quels que soient les
nouveaux appels de fonds dans l’avenir.
Ces négociations ont abouti à la conclusion en septembre 2008 d’un avenant n°1 au pacte d’actionnaires
signé en 2005. Entre temps, INCO Ltd est devenu VALE INCO Ltd puis VALE CANADA Ltd (VCL). Le
schéma retenu a reçu l’avis favorable de l’assemblée de la province Sud le 25 septembre 2008 :
-
la SPMSC contracte un prêt complémentaire de 25 M EUR ;
-
la lettre de garantie irrévocable
est portée de 35 M EUR à 75 M EUR ;
-
la SPMSC s’engage à obtenir de PROMOSUD un financement de 16 M EUR, issu des dividendes
reçus de la STCPI ;
-
même en cas de nouveau dérapage des coûts, la SPMSC est maintenue à 5 % du capital, grâce
à un prêt de VALE ne portant pas intérêts ;
-
afin de permettre à la SPMSC de rembourser ses échéances bancaires, VALE lui ouvre une ligne
de crédit d’un montant maximum de 70 M EUR, à EURIBOR +0 %, sur laquelle la SPMSC pourra
tirer pour compléter ses dividendes, le cas échéant, jusqu’à 14,5 M USD par an. Le
remboursement des sommes ainsi empruntées par la SPMSC à Vale n’interviendra qu’après
celui des dettes envers le BRGM et les banques ;
-
l’obligation de remonter à 10 % du capital de VNC après l’entrée en production commerciale est
maintenue mais sécurisée : le montant nécessaire sera prêté par Vale à SPMSC au taux 0 % et
les actions ainsi acquises doivent être placées sur un compte-séquestre et n’être libérées que
lorsque leurs dividendes auront permis de rembourser cette dette ;
SOCIETE DE PARTICIPATION MINIERE DU SUD CALEDONIEN
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-
la SPMSC dispose d’une option lui permettant de porter sa participation à 20 % dans les quatre
ans suivant le démarrage de la production commerciale et avec les mêmes conditions financières
que celles définies pour remonter de 5 à 10 %.
Comme prévu par cet avenant au pacte d’actionnaires, la SPMSC a contracté avec le groupement
BRED – OCEOR, le 30 octobre 2008, un prêt complémentaire de 25 M EUR, au taux EURIBOR + 1,7 %.
Au final, le coût de construction du projet, estimé à 1,898 Md USD en octobre 2004, puis à 2,150 Md USD
en avril 2006, à 3,212 Md USD en mai 2007 et à 3,7 Md USD en avril 2008
13
,
pour atteindre finalement
9,7 Md USD au premier trimestre 2018, dont, selon VNC, 5,2 Md USD de charges opérationnelles pour
la montée en puissance, a donc conduit à une dilution de la participation des provinces réunies dans la
SPMSC jusqu’au seuil des 5 % désormais sécurisée par l’avenant n°1 mais avec un coût financé par
l’augmentation du prêt bancaire d’une part et le recours financier à l’actionnaire majoritaire, abondant
ainsi une situation d’endettement constant de la SPMSC.
In fine, la SPMSC se retrouve dans la dépendance financière de l’actionnaire majoritaire.
2.2.1.2.
L’accélération des remboursements bancaires (2012) et des avances en compte
courant (2014) : l’aggravation de la situation financière de la SMPSC et la
tentative de la province Sud de restructurer la dette de la société en marge de
l’attribution de Prony-Pernod
Suite à une incohérence relevée par le groupement bancaire entre le contrat de prêt et le pacte
d’actionnaires, le contrat de prêt conclu par la SPMSC et le groupe BRED-OCEOR va faire l’objet d’un
avenant n°2. Cet avenant, pour des raisons inexpliquées – selon les travaux engagés dans le cadre de
la commission d’enquête mise en place par la province Sud en 2014 – modifie les conditions de
remboursement des prêts par la SPMSC. Alors qu’il était initialement prévu le démarrage des
remboursements après distribution des premiers dividendes, sur une période pouvant aller jusqu’en
septembre 2026, l’avenant signé le 29 mars 2012 par la SPMSC et le groupe bancaire prévoit un
remboursement de 10 M EUR (soit 1,2 Md F CFP) dès la signature de l’avenant, puis six annuités
commençant le 8 septembre 2013 et se terminant le 7 septembre 2018. Le remboursement de la première
annuité de 10 M EUR concomitant à la signature de l’avenant a été financé par PROMOSUD, la province
du Nord et la province des Iles, ce qui bat en brèche le principe fondateur du schéma validé par
l’assemblée de province en 2005 et en 2008 c’est-à-dire le principe selon lequel les dettes de la SPMSC
seraient remboursées uniquement par les dividendes de l’usine de Goro.
Le choix de procéder par remboursement d’échéances fixes et non plus à des paiements liés à des
rentrées de dividendes, supposait qu’avant le 8 septembre 2013, la SPMSC puisse disposer de rentrées
financières pour faire face à la prochaine échéance bancaire. En l’absence de distribution de dividendes,
la SPMSC a alors demandé à VALE CANADA la possibilité de tirer sur la ligne de crédit de 70 M EUR
prévu par l’avenant n°1 au pacte d’actionnaires. La société VALE CANADA a refusé cette possibilité,
faisant valoir que selon la clause 6.1 de l’avenant n°1 au pacte d’actionnaires, cette ligne de crédit ne
pouvait être activée qu’après le démarrage de la production commerciale.
En septembre 2013, la SPMSC informe alors le groupement bancaire qu’elle ne pourrait pas honorer
l’échéance bancaire due et précise qu’une négociation était engagée par la SPMSC avec VALE CANADA
pour restructurer sa dette, ce qui conduit le groupement bancaire à reporter l’échéance bancaire jusqu’à
la fin de l’année 2013. A la fin de l’année 2013, la SPMSC a finalement pu honorer cette échéance grâce
à un prêt de 10,2 M EUR octroyé par VALE CANADA. Le contrat de prêt conclu par la SPMSC et
VALE CANADA prévoit que la société doit rembourser ce prêt « à partir des redevances du pipeline
13
Source : projet de rapport de la commission d’enquête Prony Pernod, annexé à la délibération de la province Sud du
12 avril 2019.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
30/72
marin » (c’est-à-dire la redevance dont la société VALE Nouvelle-Calédonie est débitrice auprès de la
province Sud au titre de l’occupation du domaine public maritime de celle-ci). Il est ainsi inscrit dans le
contrat de prêt bancaire que la SPMSC « demande à la province Sud de lui attribuer 100 % de la
redevance fixe annuelle que Vale Nouvelle-Calédonie est tenue de payer à la province Sud au titre de
l’occupation du domaine public maritime ». L’assemblée de province n’ayant pas été informée d’une telle
transaction, ces modalités de remboursement ne pouvaient dès lors pas engager la province.
Alors que le remboursement de la prochaine échéance bancaire se rapprochait – celle qui était due au
titre de l’année 2014 – et que la situation financière de la SPMSC ne s’était pas améliorée, une autre
décision de gestion va aggraver celle-ci. Le 30 avril 2014, le conseil d’administration de la SPMSC a
décidé de rembourser en totalité les avances en compte courant d’associé à ses actionnaires, soit
473,7 MF CFP pour PROMOSUD, 28,8 MF CFP pour la province Nord et 1,15 MF CFP pour la province
des Iles. Ce remboursement a été opéré alors que le 8 septembre 2014, la SPMSC devait rembourser
1,2 Md F CFP aux banques.
Selon les travaux menés par la commission d’enquête mise en place par délibération du
11 septembre 2014 par la province Sud relative aux conditions dans lesquelles le gisement de Prony et
Pernod avaient été attribuées, l’idée de relier la question de la restructuration de la dette de la SPMSC
avec l’attribution par la province Sud de ces gisements à ERAMET et VALE se serait faite jour à ce
moment-là « afin qu’une partie des avantages financiers que la province retirerait de Prony-Pernod soit
utilisée pour financer la SPMSC. Elle a été formalisée dans un document émanant de Vale Canada daté
du 8 avril 2013 »
14
.
Le 5 avril 2014, la province Sud signait avec le groupement ERAMET/VALE le protocole général d’accord
Prony-Pernod (PGA) et le même jour, la SPMSC et VALE CANADA signaient une lettre d’intention pour
la restructuration de la dette. Les stipulations de cette lettre d’intention prévoyaient :
-
la substitution de VALE CANADA à la SPMSC pour le remboursement du prêt bancaire
(50 M EUR, plus les intérêts) ;
-
l’abandon par VALE CANADA de toutes ses créances sur la SPMSP ;
-
la montée automatique de la SPMSC à 20 % du capital de VALE Nouvelle-Calédonie, en fonction
de quatre grandes étapes dont le démarrage des travaux sur le futur barrage KO4 (projet
reconfiguré et devenu depuis le futur projet LUCY) ;
-
en contrepartie de cet abandon de créance et de cette montée à 20 % du capital de VALE
Nouvelle-Calédonie, la SPMSC perd, sur une certaine durée, la quasi-totalité de ses droits à
dividendes ;
-
le paiement à VALE CANADA par la SPMSC de 50 M USD si le projet d’usine dédiée à
PRONY- PERNOD était engagé ;
-
l’indemnisation intégrale de VALE par la SPMSC si la province Sud prenait une décision
dégradant la rentabilité du projet Prony-Pernod ou si la collectivité de Nouvelle-Calédonie ou la
province
Sud
adoptaient
une
disposition
réglementaire
ou
fiscale
défavorable
à
VALE
Nouvelle- Calédonie ou au projet Prony-Pernod.
Le nouveau président de la province Sud en 2014, prenant ses fonctions suite aux élections provinciales,
retire le PGA par arrêté du 5 août 2014 ce qui a conduit de fait à l’abandon de la lettre d’intention par la
SPMSC et VALE. Les échéances bancaires que la SPMSC devait régler de septembre 2014 à septembre
14
Source : projet de rapport de la commission d’enquête Prony-Pernod, présenté en annexe à la délibération de la province
Sud du 12 avril 2019.
SOCIETE DE PARTICIPATION MINIERE DU SUD CALEDONIEN
31 / 72
2018 ont été payées par la société par des prêts accordés par VALE CANADA dans les conditions
prévues par le pacte d’actionnaires.
Ce prêt est aujourd’hui remboursé. La chambre relève cependant que si ce prêt bancaire a été remboursé,
il l’a été au prix d’un accroissement de l’endettement de la SPMSC à l’égard de VALE CANADA. Les
actionnaires provinciaux réunis dans la SPMSC ont finalement fait financer un prêt bancaire par un autre
prêt, celui conclu auprès de l’actionnaire majoritaire dans le capital de l’usine et ce pour maintenir une
participation ultraminoritaire dans le capital de l’usine du Sud.
2.2.2.
L’alourdissement de l’endettement de la SPMSC avant sa restructuration en
avril 2019
2.2.2.1.
Des modalités de financement retenues qui ont alimenté la dette de façon
constante
Alors que l’avenant du 26 septembre 2008 au pacte prévoyait trois sources de financement alternatives
au projet, une seule des trois modalités va être retenue par la SPMSC et le groupe VALE. L’article 4.4 c (ii)
prévoyait trois sources de financement alternatives :
-
la souscription de dettes auprès de tiers ;
-
l’octroi de prêts d’actionnaires à court terme ;
-
l’octroi d’avances capitalisables.
Le choix systématique a été effectué de procéder à l’octroi d’avances capitalisables, dont la charge de
remboursement devait être supporté par SPMSC sur sa quote-part de dividendes futurs. La stratégie de
financement ainsi retenue a écarté le financement externe ou le prêt d’actionnaire à VNC. La mécanique
mise en place avec l’utilisation systématique des avance capitalisables a conduit à l’alimentation d’une
dette qui n’a cessé de croître au fur et à mesure de l’augmentation du budget d’investissement et de
fonctionnement de l’usine.
Avant la restructuration de la dette de la SPMSC intervenue en avril 2019, la quote-part de la SPMSC
dans toute future distribution de dividendes de VNC était affectée en totalité soit au paiement de la dette
BRGM, soit au remboursement de la dette envers le groupe VALE. L’importance des dépassements
budgétaires successifs et le choix de retenir des avances capitalisables ont conduit à priver la SPMSC
de tout espoir de retour sur investissement.
Dans une analyse juridique réalisée au début de l’année 2018, à la demande de la SPMSC sur les
relations contractuelles de la société avec VALE, le cabinet conclut que « malgré la logique de répartition
des risques, SPMSC se voit donc désormais contrainte de financer, sur sa quote-part de dividendes
futurs, une partie du risque industriel dont les proportions complètement hors normes étaient totalement
imprévisibles pour SPMSC lors de la renégociation du pacte en 2008 ».
La chambre relève que cette modalité de financement, retenue depuis 2008, n’a jamais été remise en
cause par la SPMSC alors que celle-ci contribuait à alimenter une dette constante de la société à l’égard
de l’actionnaire majoritaire à un niveau moyen de 25 M EUR par an. Selon les éléments recueillis lors du
contrôle, la SPMSC n’aurait accepté les termes d’un tel mode de financement que parce qu’elle aurait
toujours été assurée par l’actionnaire majoritaire (VCL) de la rentabilité du projet et que les sommes
maximales qu’elle devait supporter ne seraient pas dépassées et ne la priveraient pas de ses dividendes
de manière définitive.
La chambre attire l’attention de la société sur la nécessité de se doter de réelles capacités d’expertise
interne afin d’équilibrer au mieux ses relations contractuelles avec ses associés. L’acceptation par la
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
32/72
société de mobiliser une seule des modalités de financement au prix d’un endettement croissant, sur le
seul fondement de la confiance accordée aux analyses réalisées par l’actionnaire majoritaire ne participe
pas d’une gestion efficace et professionnelle de sa participation au sein de l’usine du Sud.
2.2.2.2.
La conséquence de cette stratégie financière : l’alourdissement du montant de la
dette de la SPMSC
Avant la restructuration formalisée par l’adoption d’un nouveau pacte d’actionnaires conclu le
29 avril 2019, la dette de la SPMSC au 28 février 2019 s’élève à 45,185 Md F CFP.
Ce montant de 44,191 Md F CFP se répartit entre la dette accumulée auprès de VNC (36,485 Md F CFP)
et 8,7 Md F CFP auprès du BRGM.
La dette accumulée auprès de VNC est composée de :
-
la prise en charge par VCL des remboursements du prêt bancaire souscrit par la SPMSC le
8 septembre 2006 (45 M EUR en principal) modifié par avenant le 30 octobre 2008 (ajout de
25 M EUR supplémentaires) et dont les modalités de remboursement ont été revues par l’avenant
du 29 mars 2012 (paiement par tranches annuelles à partir du 8 septembre 2013 jusqu’au
7 septembre 2018
15
). Ces échéances ont été payées par VCL dans le cadre d’un crédit relais
attribué chaque année
16
;
-
la prise en charge par VCL de la quote-part de la SPMSC sur les appels de fonds de la société
VCL accumulée depuis le démarrage du projet, dont le montant s’élevait à 36,4 Md F CFP au
28 février 2019, avant la restructuration de la dette de la SPMSC qui en a annulé une grande
partie (cf infra).
Evolution de la dette de la SPMSC en M F CFP
Source : SPMSC
17
La dernière échéance du prêt bancaire (BPCE/OCEOR) a été assurée le 17 avril 2018 par un
remboursement anticipé du groupe VALE pour 1,5 Md F CFP. Il n’y a plus de prêt bancaire désormais.
La dette que SPMSC a envers VALE CANADA s’élève à 36,4 Md F CFP fin février 2019.
15
8 septembre 2013 : 8,7 M EUR ; 8 septembre 2014 : 9,1 M EUR ; 8 septembre 2015 : 9,4 M EUR ; 8 septembre 2016 :
9,8 M EUR ; 8 septembre 2017 : 10,2 M EUR ; 7 septembre 2018 : 12,5 M EUR.
16
Crédit relais du 11 février 2014 attribuant à la SPMSC un montant de 10,2 M EUR ; crédit relais du 8 septembre 2015
accordant à la SPMSC un prêt de 0,9 M EUR au titre des intérêts sur l’échéance du 8 septembre 2015 ; crédit relais du
24 février 2016 pour un montant de 9,6 M EUR ; crédit relais du 8 septembre 2016 pour un montant de 10,4 M EUR ; crédit
relais du 29 août 2017 pour un montant de 10,6 M EUR et crédit relais du 17 avril 2018 pour un montant de 12,7 M EUR.
17
Réponse à la question n°35
31/12/2015
31/12/2016
31/12/2017
31/12/2018
28/02/2019
Dette bancaire
5 064
2 739
1 509
0
-
Dette Vale Canada Lt
27 640
33 721
32 376
36 434
36 485
Dette BRGM
8 702
8 702
8 702
8 702
8 702
Fournisseurs
1
1
10
2
4
Total des dettes
41 407
45 163
42 596
45 138
45 191
SOCIETE DE PARTICIPATION MINIERE DU SUD CALEDONIEN
33 / 72
2.2.3.
L’absence de rentabilité de l’usine
Alors que les attentes de la SPMSC fondées sur les estimations du rapport DUTHILLEUL et des
projections financières prévoyaient une distribution de dividendes à compter de la mise en production
commerciale de l’usine, à une date finalement proche de son achèvement – selon des dates qui ont
évolué en fonction des projections financières de VNC -, au final, tous les scenarii se sont révélés inexacts
tant en ce qui concerne les coûts du projet que les niveaux de production de l’usine.
2.2.3.1.
Le dérapage dans les coûts de l’usine
a)
Un niveau de coûts cinq fois plus élevé que prévu
L’achèvement substantiel de l’usine a été prononcé fin 2012. Initialement estimé à 1,850 Md USD, le
projet atteint un coût d’environ 9 Md USD
18
,
voire 9,7 Md USD
19
.
Dans une note relative à la dépréciation des titres VALE NC détenus par la société SPMSC présentée au
conseil d’administration de PROMOSUD le 13 mars 2018, il est précisé que « dès la fin de l’année 2006,
soit trois mois après la mise en place du prêt bancaire, INCO a commencé d’annoncer des dépassements
budgétaires importants et qui excéderaient largement les 2 450 000 000 d’USD qui étaient la limite
supérieure mentionnée dans le pacte d’actionnaires de 2005. A compter de cette date, les dépassements
budgétaires de l’investissement n’ont cessé de croître et SPMSC a décidé de ne plus prendre part aux
appels de fonds (ce qui a entraîné sa dilution de 10 à 5 %) tant que le pacte d’actionnaires n’était pas
actualisé ».
Dans sa requête d’un huissier de justice au fin de constat portée par la SPMSC devant le tribunal de
commerce de Paris, le 7 août 2018, la société fait état d’un coût de construction de 9,7 Md USD : « Lors
de l’élaboration du projet, le coût de construction de l’usine était évalué à 1,85 Md USD avec une
incertitude de -5 % à +20 % quant au montant final de l’investissement. (…) Estimé initialement à un
montant de 1,850 Md USD, le projet est évalué aujourd’hui à la somme pharaonique de 9,7 Md USD, soit
cinq fois le montant du budget initial étant précisé que le système de stockage actuel des rejets de boues
étant défaillant, la société va devoir initier un nouveau projet baptisé « LUCY », dont le coût est évalué à
500 M EUR supplémentaires ».
b)
Un investissement à venir : le projet LUCY
Comme l’indique la SPMSC dans sa requête auprès du tribunal de commerce susvisée, il convient
d’ajouter au coût du projet (9,7 Md USD selon elle), le montant d’un investissement nécessaire à la prise
en charge de la saturation du stockage des résidus actuels.
Le fonctionnement de l’usine induit le rejet de boues à évacuer dans un espace de stockage. Jusqu’ici
l’usine stocke ses résidus dans une installation dont la saturation est prévue à compter de 2021. Sans
alternative, l’usine ne pourra plus continuer sa production. En réponse aux observations de la chambre,
la société VNC indique que « les résidus de l’usine sont stockés dans une installation dont la saturation
est désormais estimée à 2023, et non plus en 2021 ».
18
Source de ce chiffre de 9 Md USD : procès-verbal du conseil d’administration de PROMOSUD du 24 mars 2017
19
Selon les informations chiffrées figurant dans la requête en désignation d’un huissier de justice au fin de constat portée par
la SPMSC auprès du président du tribunal de commerce de Paris.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
34/72
Le projet Lucy consiste à transformer l’actuelle installation de stockage humide de résidus en une
installation de stockage à sec de résidus. Le coût prévisionnel du projet est estimé à 642 M USD
20
.
La
société VNC indique que le coût prévisionnel de Lucy est estimé à 568 M USD dont 411 M à venir ».
2.2.3.2.
Des niveaux de production en deçà des attentes et l’interrogation sur la capacité
de production de l’usine
a)
Le niveau de production prévu dans le pacte d’actionnaires de 2005
Dans le pacte d’actionnaires signé en 2005, il était prévu que la construction et l’exploitation de l’usine à
Goro se traduise par « une capacité attendue d’environ 60 000 tonnes de nickel contenu et environ
4 300 à 5 000 tonnes de cobalt contenu par an » (cette capacité est désigné par l’expression « Projet
Goro Initial » dans le pacte d’actionnaires).
b)
Des niveaux de production en deçà des attentes
Les niveaux de production visés dans les budgets de l’usine n’ont pas été atteints.
En 2016, le budget prévoyait une production à 43 500 tonnes. L’année 2016 s’est achevée avec une
production totale de 35 734 tonnes de nickel contenu
21
,
dont 80 % sous forme d’oxyde de nickel (NiO) et
20 % sous forme de produit intermédiaire (Intermediary Product of Nickel Metallurgy – IPNM).
En 2017, alors que le budget prévoyait une production à 43 500 tonnes de nickel, la production effective
a été de 37 400 tonnes
22
de nickel contenu dont 83 % sous forme de NiO et 17 % sous forme d’IPNM soit
une progression de 5 %, par rapport à l’année précédente. La production de cobalt a quant à elle atteint
2 780 tonnes soit 13 % de moins que l’exercice précédent. Le rapport de gestion de VNC pour l’année
2017 précise que l’écart entre l’objectif et la production réalisée est principalement dû à des difficultés
techniques et des événements non prévisibles tels que des coupures d’alimentation électriques et des
intempéries.
En 2018, le budget prévoyait une production à 42 000 tonnes. Selon les chiffres figurant dans le rapport
du commissaire aux comptes pour l’exercice 2018 des comptes de VNC, ainsi que dans le rapport de
gestion de la SPMSC pour l’exercice 2018, la production effective de l’usine a été de 32 500 tonnes de
nickel contenu, dont 79 % sous forme d’oxyde de nickel (NiO) et 21 % sous forme de produit intermédiaire
(Intermediary Product of Nickel Metallurgy – IPNM), soit une diminution de 13 % par rapport à l’année
précédente. Dans les états financiers de l’exercice 2018, il est précisé que cet écart est principalement
dû, sur la première moitié de l’année, à l’état des routes de mine impactant la disponibilité des
équipements et limitant les capacités d’extraction minière, ainsi qu’à une pluviométrie bien plus abondante
qu’à l’accoutumée, sur la seconde partie de l’année, à des instabilités industrielles dans plusieurs
secteurs. La production de cobalt a quant à elle atteint 2 100 tonnes, soit 24 % de moins que l’exercice
précédent.
Pour 2019 : selon les éléments figurant dans le rapport du président de la SPMSC au conseil
d’administration pour l’exercice 2018, « la production estimée de 2019 est selon la direction de VNC fixée
à environ 25 000 tonnes ».
20
Cf. document de la société VNC, du 11 décembre 2018, transmis à la chambre par la société VNC : « Dossier de demande
d’agreement Financement d’un projet d’assèchement et de stockage de résidus miniers pour la société VNC »
21
Source : états financiers SPMSC exercice 2016
22
Source : états financiers SPMSC exercice 2017
SOCIETE DE PARTICIPATION MINIERE DU SUD CALEDONIEN
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c)
Des niveaux de production qui ne permettent pas l’entrée en production
commerciale de l’usine
La notion de mise en production commerciale a été défini dans le pacte d’actionnaires comme
correspondant à la production, au cours d’une période de soixante jours consécutifs, d’au moins
8 000 tonnes de produits au nickel et 500 tonnes de produits au cobalt.
Cette date conditionnait – jusqu’au changement de pacte d’actionnaires en 2019 (cf. infra) – le
déclenchement de la distribution de dividendes, le paiement de la dette au BRGM par la SPMSC ainsi
que l’augmentation de la participation de cette dernière dans VNC par un passage de 5 % à 10 % puis
de 10 % à 20 %.
Aucune date prévisionnelle d’entrée en production commerciale n’a été établie, la SPMSC précisant à la
chambre que « compte-tenu des aléas de production, il n’y a pas de date prévisionnelle communiquée »
23
.
Selon les informations figurant dans le compte-rendu de la réunion du CA de PROMOSUD du
24 mars 2017, VALE a fait savoir à la SPMSC que « l’usine n’entrerait jamais en production commerciale
selon les critères d’origine ».
Le pacte d’actionnaires prévoit qu’en cas d’absence de démarrage de la phase commerciale, une étude
doit être engagée permettant d’identifier les difficultés. La chambre observe qu’alors que cette clause
figure dans les documents contractuels depuis 2005 et que l’usine connaît des écarts substantiels de
production entre ses prévisions et les réalisations, la SPMSC n’a commencé à solliciter l’actionnaire
majoritaire qu’à compter de 2018.
Par courrier daté du 8 juin 2018, le président de la SPMSC indique au président de VCL qu’ « en sus des
recommandations que devra présenter votre société après avoir exploré toutes les solutions pour que le
projet tel qu’il a été conçu à l’origine parvienne au stade du démarrage de la production commerciale, il
nous apparaît important, en notre qualité d’actionnaire et d’administrateur de la société VALE NC, que
vous nous fournissiez les raisons pour lesquelles l’usine de Goro n’a toujours pas atteint les seuils
qualitatif et quantitatif (8 000 tonnes pendant une période de 60 jours de nickel contenu sous forme
d’oxyde et 500 tonnes de cobalt contenu sous forme de carbonate de cobalt durant la même période)
prévus au projet sur la base duquel nous nous sommes engagés. »
d)
Les interrogations sur la capacité de production de l’usine
La capacité de production nominale a été ramenée de 60 000 tonnes à 57 000 tonnes, puis à
48 000 tonnes.
Alors que le pacte d’actionnaires de 2005 fixait la capacité nominale de l’usine à 60 000 tonnes, ce niveau
va finalement être revu à la baisse en 2012 pour être ramené à 57 000 tonnes. Par la suite, une hypothèse
de production de 48 000 tonnes a finalement été retenue.
23
Cf. réponse par courriel du 14 août 2019
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
36/72
La SPMSC a interrogé la société sur le sens donné à ce chiffre :
-
s’agissait-il d’un nouvel objectif de production qui revoyait à la baisse l’objectif de production
nominale fixée contractuellement à 57 000 tonnes ?
-
s’agissait-il de définir le montant des investissements nécessaires à l’usine pour parvenir à ce
niveau de production de 48 000 tonnes ?
La SPMSC a également formulé des interrogations sur la capacité de l’usine à atteindre le niveau de
production de 48 000 tonnes, souhaitant des précisions sur le niveau d’investissement nécessaire à
l’atteinte de ce niveau de 48 000 tonnes et s’interrogeant sur l’adoption par la direction de Vale
d’hypothèses de production jamais réalisées jusqu’ici.
VNC a répondu à ces interrogations en renvoyant aux résultats à venir d’une étude confiée à la société
HATCH. Cette étude devait permettre d’identifier les goulets d’étranglement empêchant de parvenir au
niveau de production visé. Cette étude devait également permettre d’identifier le niveau réel de production
de l’usine.
L’étude HATCH devant permettre de clarifier la capacité de production de l’usine, la chambre a demandé
à la SPMSC la communication de ce document. Cette dernière a indiqué ne pas l’avoir reçu. Lors de
l’entretien de fin de contrôle, le président de la SPMSC a indiqué ne pas en avoir eu communication.
Dans un document de VNC transmis à la chambre, intitulé « Rapport sur l’état d’avancement de la montée
en puissance et des opérations, semestre 2 2018 », il est précisé que l’étude de la société HATCH, visant
à déterminer la capacité nominale de l’usine de VNC et mettre en évidence les limitations actuelles
(goulets d’étranglement), a été finalisée dans le courant du second semestre 2018 : « elle a permis de
définir un programme robuste d’investissement de maintenance et de capacité, à commencer dès 2019,
en vue de conforter les prévisions de production ».
La fixation d’un nouvel objectif de production : 50 000 tonnes et le maintien d’un niveau
de production nominal à 57 000 tonnes.
Le directeur exécutif de la branche des métaux de base de Vale a lancé en juin 2018 le projet « 0- 50 ».
Il s’agit d’une stratégie de développement de VNC visant une production annuelle de 50 000 tonnes de
nickel d’ici deux à trois ans.
Dans le nouveau plan d’actionnaires signé le 29 avril 2019, la capacité attendue est chiffrée à « environ
57 000 tonnes de nickel contenu par an ».
2.2.4.
Des coûts de production en baisse mais toujours au-dessus du niveau des cours
du nickel
Un plan d’économie de coûts de l’usine a été lancé en 2016.
La SPMSC a cherché à savoir si le groupe VALE s’est appliqué à lui-même un effort de réduction des
coûts pratiqués par les sociétés du groupe intervenant auprès de VNC, posant ainsi la question de la
répercussion de la baisse des coûts dans les contrats conclus par VNC avec les parties dites liées. Selon
les éléments recueillis lors du contrôle, il n’a pas été apporté de réponse à cette question.
SOCIETE DE PARTICIPATION MINIERE DU SUD CALEDONIEN
37 / 72
Depuis 2016, la société est passé d’un coût de production de 18 000 USD/tonne à 9 800 USD/tonne, soit
une réduction de près de la moitié du coût de production, mais qui reste en dessous des niveaux du cours
du nickel au LME (cf tableau ci-dessous) :
-
en 2016, le coût unitaire de production est ainsi passé d’une moyenne à 18 000 USD/tonne à
11 000 USD/tonne ;
-
en 2017, le coût unitaire de production de nickel s’est établi à 9 800 USD/tonne selon les chiffres
figurant dans les états financiers établis par VNC pour l’exercice 2017 ;
-
en 2018, le coût unitaire moyen de production a augmenté ; il s’est établi à 11 640 USD/tonne.
L’augmentation serait liée à la baisse du volume de production et le prix élevé du souffre (une
des matières premières principales dans le procédé de production) selon les informations figurant
dans les annexes aux comptes annuels de VNC pour l’exercice 2018.
Cours du nickel au LME
Année
Price
/ Lb
2008
9,59
2009
6,66
2010
9,89
2011
10,39
2012
7,95
2013
6,81
Source : chiffres LME
2.2.5.
L’absence à long terme de distribution de dividendes
La production commerciale n’ayant, à ce stade, pas encore été déclenchée et compte-tenu des coûts
d’investissement et de fonctionnement de l’usine, la société VNC n’a pas distribué de dividendes. Jusqu’à
la restructuration de ses dettes en avril 2019, ses capitaux propres étaient négatifs.
La chambre a demandé à la SPMSC s’il existe un échéancier prévisionnel de distribution de dividendes
par VALE dans les années à venir. La SPMSC a indiqué que le rapport de la mission DUTHILLEUL
prévoyait des distributions de dividendes pour l’année 2008. La société précise que « depuis, toutes les
estimations de production et de cours de nickel se sont avérées non atteintes. A ce jour, le report à
nouveau négatif de Vale Nouvelle-Calédonie se monte à -4,4 milliards d’euros. Il faudra donc un certain
nombre d’années et des résultats plus que positifs pour résorber ce report à nouveau négatif et envisager
donc des distributions de dividendes ».
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
38/72
2.3.
L
A CONSEQUENCE
:
UNE SITUATION FINANCIERE DE LA
SPMSC
DEGRADEE
Compte de résultat consolidé SPMSC (2016 à 2018)
En FCFP
2016
2017
2018
PRODUITS D'EXPLOITATION
reprises sur amortissements et provisions, transfert de charges
2 760 152
Autres produits
41
TOTAL PRODUITS D'EXPLOITATION (1)
CHARGES D'EXPLOITATION
charges externes
32 810 644
28 827 857
83 080 725
Salaires et traitements
charges sociales
impôts, taxes et versements assimilés
1 707
23 585
4 345
TOTAL CHARGES D'EXPLOITATION
32 812 351
28 851 444
83 085 070
RESULTAT D'EXPLOITATION
32 812 351
-
28 851 444
-
80 324 877
-
PRODUITS FINANCIERS
Reprises sur provisions et transferts de charges
3 495 541 022
Différences positives de change
1
TOTAL PRODUITS FINANCIERS
CHARGES FINANCIERES
Dotations aux amortissements et aux provisions
13 711 875 851
3 213 809 091
2 543 027 602
Intérêts et charges assimilés
68 990 782
35 063 575
6 289 961
RESULTAT FINANCIER
13 780 866 633
-
246 668 356
2 549 317 652
-
RESULTAT COURANT AVANT IMPOTS
13 813 678 984
-
217 816 912
2 629 642 439
-
PRODUITS EXCEPTIONNELS
Sur opérations de gestion
3 230 308
CHARGES EXCEPTIONNELLES
RESULTAT EXCEPTIONNEL
3 230 308
TOTAL DES PRODUITS
3 495 541 022
5 990 502
TOTAL DES CHARGES
13 813 678 984
3 277 724 110
2 632 402 633
BENEFICE OU PERTE
13 813 678 984
-
217 816 912
2 626 412 131
-
SOCIETE DE PARTICIPATION MINIERE DU SUD CALEDONIEN
39 / 72
Bilan consolidé SPMSC 2016 à 2018
Source : chiffres SPMSC
Les comptes de la SPMSC (consolidés à 100 % dans les comptes de son actionnaire majoritaire,
PROMOSUD) présentent les caractéristiques suivantes.
Bilan (en F CFP)
2016
2017
2018
COMPTE DE BILAN ACTIF
IMMOBILISATION INCORPORELLES
IMMOBILISATIONS CORPORELLES
IMMOBILISATIONS FINANCIERES
participations
26 018 268 160
24 336 502 409
24 336 502 409
créances rattachées à des participations
646 947 005
titres immobilisés activité portefeuille
autres
TOTAL
26 665 215 165
24 336 502 409
24 336 502 409
ACTIF IMMOBILISE
26 665 215 165
24 336 502 409
24 336 502 409
AVANCES, ACOMPTES VERSES SUR COMMANDES
CREANCES
créances clients et comptes rattachés
DISPONIBILITES
disponibilités
222 745 086
202 642 558
111 111 109
CHARGES CONSTATEES D'AVANCE
545 390
TOTAL GENERAL
31 880 401 254
26 036 044 948
27 196 940 999
2016
2017
2018
COMPTE DE BILAN PASSIF
CAPITAUX PROPRES
Capital social
3 145 000 000
3 145 000 000
3 145 000 000
Réserves
autres réserves
Report à nouveau
7 646 328 455
-
7 646 328 455
-
21 242 190 527
-
Résultat de l'exercice
13 813 678 984
-
217 816 912
2 626 412 131
-
TOTAL situation nette
18 315 007 439
-
18 097 190 527
-
20 723 602 658
-
CAPITAUX PROPRES
18 315 007 439
-
18 097 190 527
-
20 723 602 658
-
PROVISIONS POUR RISQUES ET CHARGES
provisions pour risques
5 032 441 003
1 536 899 981
2 782 791 631
provisions pour charges
DETTES
emprunts et dettes auprès des étab de crédit
emprunts et dettes financières divers
2 739 052 483
1 508 652 089
dettes fournisseurs et comptes rattachés
1 233 200
9 683 785
2 081 123
dettes fiscales et sociales
298 329
dettes sur immobilisations et cptes rattachés
8 702 031 319
8 702 031 319
8 702 031 319
autres dettes
33 720 650 688
32 375 669 972
36 433 639 584
TOTAL (III)
45 162 967 690
42 596 335 494
45 137 752 026
TOTAL GENERAL
31 880 401 254
26 036 044 948
27 196 940 999
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
40/72
2.3.1.
Des comptes déficitaires et des capitaux propres négatifs
Les exercices 2016 à 2018 se sont soldés par des résultats déficitaires et des capitaux propres négatifs,
conduisant le commissaire aux comptes à émettre des doutes sur la continuité de l’exploitation de la
société :
-
l’exercice 2016 s’est soldé par un déficit net de 13,81 Md F CFP contre un déficit net de
2,37
Md
F CFP en 2015, portant les capitaux propres négatifs de la société à 18,8 Md F CFP
(contre 4,5 Md F CFP au 31 décembre 2015) ;
-
l’exercice 2017 s’est soldé par un résultat bénéficiaire de 217,8 M F CFP
24
mais un déficit de
21,2 Md F CFP après intégration du report à nouveau, portant les capitaux propres négatifs de
la société à 18,3 Md F CFP au 31 décembre 2017 ;
-
l’exercice 2018 s’est soldé par une perte nette de 2 626,4 M F CFP, portant les capitaux propres
négatifs de la société à 20,7 Md F CFP.
La situation financière très dégradée de la société a conduit le commissaire aux comptes à déclencher à
deux reprises la procédure d’alerte prévue à l’article L234-2 alinéa 1 du code de commerce, aux motifs
que la société ne semblait pas disposer des fonds pour honorer ses engagements pour le remboursement
des échéances bancaires du prêt bancaire de 2016 (1,2 Md F CFP) et 2018 (1,5 Md F CFP). La prise en
charge par VCL de ces échéances a conduit le commissaire aux comptes à lever la procédure.
Le caractère déficitaire des comptes de la société s’explique par l’absence de perception de dividendes,
les provisions pour perte de change
25
(sauf en 2017 où la hausse de l’euro s’est traduite par une reprise
sur provision pour perte de change) mais surtout par la dépréciation des titres de participation de la
SPMSC dans VNC.
2.3.2.
La dépréciation des titres de participation de la SPMSC dans VNC
2.3.2.1.
L’évolution du montant de la participation de la SPMSC dans VNC
Les appels de fonds (financés par un crédit relais attribué par VCL à la SPMSC) au cours de la période
ont conduit à un niveau de participation de la SPMSC dans VNC qui a évolué de la façon suivante, hors
dépréciation des titres :
-
le montant de la participation de la SPMSC dans VNC a été porté durant l’année 2016 de
36,7 Md F CFP à 39,4 Md F CFP ;
-
durant l’année 2017, cette participation a été portée de 39,4 Md F CFP à 40,3 Md F CFP ;
-
durant l’année 2018, elle s’est élevée à 41,6 Md F CFP.
Les difficultés financières de VNC ont conduit cette société à une situation financière telle que des doutes
ont été émis par les commissaires aux comptes de la SPMSC et de PROMOSUD (cette société
consolidant ses comptes avec ceux de la SPMSC) sur la valeur réelle des titres de participation de la
SPMSC dans VNC.
24
La hausse de l’euro explique ce résultat bénéficiaire. Une provision pour perte de change a été reprise pour un montant de
3 495,5 MF CFP contre une dotation de 941,9 MF CFP au 31 décembre 2016.
25
Pour l’exercice 2018, la dotation pour provision pour perte de change en lien avec la baisse du cours de l’euro contre l’USD
a été effectuée pour un montant de 1 245,9 MF CFP.
SOCIETE DE PARTICIPATION MINIERE DU SUD CALEDONIEN
41 / 72
2.3.2.2.
Les dépréciations effectuées par la SPMSC
Ses capitaux propres étant inférieurs à la moitié du capital, VNC a procédé à une restructuration de
ceux- ci au cours de l’exercice 2016. La SPMSC a souscrit à l’augmentation de capital de VNC de
décembre 2016 par compensation de créances pour un montant de 12 769 958 350 F CFP. Les titres de
VNC détenus par la SPMSC ont été dépréciés du montant de la souscription à cette augmentation de
capital suite à la réduction de capital opérée par VNC
26
.
Les titres de participation de VNC, figurant à l’actif
de la SPMSC pour un montant brut de 38,7 Md F CFP ont fait l’objet d’une dépréciation à hauteur de
12,7 Md F CFP sur l’exercice. Cette écriture a ainsi ramené la valeur nette comptable des titres à hauteur
de 26 Md F CFP.
En dehors de la dépréciation technique de 12,7 Md F CFP sur les titres de participation de la société
VNC, SPMSC n’a pas comptabilisé d’autre dépréciation sur ces titres VNC compte-tenu de la sensibilité
de la valeur recouvrable des actifs de la filiale (cours du nickel notamment). Pourtant, les tests de
dépréciation effectués par VNC entre 2008 et 2016 ont conduit VNC à comptabiliser une dépréciation de
ses immobilisations de 1 877 M EUR dont 451 M EUR sur l’exercice 2016. La SPMSC n’est pas allée au-
delà de la dépréciation en lien avec l’opération comptable de dépréciation liée à la restructuration des
capitaux propres de VNC.
Dans son rapport sur les comptes annuels de la SPMSC pour l’exercice clos au 31 décembre 2016, le
CAC émet une réserve sur cette valeur nette comptable des titres de 26 Md F CFP : « la comparaison
entre cette valeur nette comptable et la quote-part de capitaux propres détenue dans VNC SAS fait état
d’un écart de 25 574 M F CFP. Cet écart aurait nécessité la réalisation d’un test de dépréciation d’un
montant égal à la différence entre la valeur d’utilité et la valeur comptable ».
Pour l’exercice 2017, la société procède à une dépréciation de sa participation dans VNC, pour laquelle
le commissaire aux comptes émet à nouveau des réserves. Les titres de participation et les créances
rattachées de VNC, figurant à l’actif de la SPMSC pour un montant brut de 40 320 MF CFP, ont fait l’objet
d’une dépréciation à hauteur de 3 214 MF CFP
27
sur l’exercice 2017. Cette écriture a ainsi ramené la
valeur nette comptable des titres et créances rattachées à hauteur de 24 337 MF CFP.
Le commissaire aux comptes relève que la comparaison entre cette valeur nette comptable et la
quote- part de capitaux propres détenue dans VNC SAS fait état d’un écart de 24 337 MF CFP et indique
que cet écart aurait nécessité la réalisation d’un test de dépréciation et la comptabilisation d’une
dépréciation d’un montant égal à la différence entre la valeur d’utilité et la valeur comptable.
La SPMSC a procédé au titre de l’exercice 2018 à la dépréciation de la totalité de l’avance en compte
courant effectuée au cours de l’exercice pour 1 297,1 MF CFP.
26
VCL et la SPMSC ont accordé des avances financières et des prêts au cours de la période allant du 1
er
août 2012 au
31 août 2016, pour un montant de 2 033 027 212 EUR (VCL) et 107 012 251 EUR (SPMSC) respectivement, soit un montant
total de 2 140 028 EUR au 31 août 2016. La restructuration a été réalisée de la façon suivante : VCL et SPMSC ont capitalisé
les avances d’actionnaires au capital social (étape 1) et immédiatement après la capitalisation des avances d’actionnaires au
capital social, le montant intégral de l’augmentation du capital social (2,1 Md EUR) a fait l’objet d’une réduction (étape 2). Cette
opération a permis d’absorber une partie des pertes accumulées en report à nouveau. Conformément aux normes comptables
les annulations d’actions par réduction de capital sans changement de pourcentage de détention entrainent une dépréciation
des actions annulées. Par conséquent, la SPMSC a procédé à la dépréciation des titres annulés pour une valeur de
12,769 Md F CFP.
27
Ce montant correspond à une dépréciation des titres de participation à hauteur de 1 681,8 MF CFP (soit 5 % du déficit
réalisé par VNC lors de l’exercice clos en 2017) et une dépréciation de la totalité de l’avance en compte courant pour
1 532 MF CFP.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
42/72
Au vu des études effectuées par des prestataires extérieurs sur la valeur financière de la participation de
la SPMSC dans VNC (cf. infra) qui, dans certaines méthodologies retenues, aboutissent à des niveaux
de valeur proche de zéro, et dans le prolongement des réserves émises par le commissaire aux comptes,
la chambre invite la société à revoir ses niveaux de dépréciation.
Recommandation n°
1 : la chambre recommande à la SPMSC de revoir son niveau de
dépréciation de ses titres de participation dans VNC.
SOCIETE DE PARTICIPATION MINIERE DU SUD CALEDONIEN
43 / 72
3.
LA SPMSC EN TANT QU’ACTIONNAIRE DE L’USINE DU SUD
3.1.
D
ES TENSIONS DANS LA RELATION AVEC LE GROUPE
VALE
DANS LE CONTEXTE DE
MISE EN SOMMEIL OU DE REPRISE DU SITE
Les propos publiquement tenus par le nouveau président du groupe VALE (VALE SA),
M. Fabio SCHVARTSMAN au cours des années 2017 et 2018, mettant en avant le risque de baisse de
production, voire de mise en sommeil de l’usine et même de reprise du site industriel, vont déclencher
chez la SPMSC une série de réactions :
-
des demandes de clarifications des intentions de l’actionnaire majoritaire ;
-
des demandes de positionnement de la société VNC par rapport aux propos publiquement tenus
par le président du groupe ;
-
une revue juridique et financière de la relation contractuelle entre elle et la société VNC ainsi que
des relations commerciales entre la société VNC et les sociétés du groupe VALE ;
-
le refus d’approuver les comptes
-
et la demande d’un audit global du projet Goro.
3.1.1.
Les propos du président du groupe VALE en 2017 et 2018
Selon la restitution qui en est faite par la SPMSC dans les documents recueillis lors du contrôle et les
déclarations disponibles sur les sites de différents organes de presse, le PDG du groupe VALE SA a pris
plusieurs fois positions pour annoncer une diminution de la production ou une mise sous cloche de la
société voire une fermeture du site.
3.1.1.1.
Déclaration à la presse le 29 juillet 2017.
La SPMSC fait état des propos que le PDG de VALE aurait tenu devant la presse : « VALE will not put
more money into the New Caledonia Nickel Project » (traduction : Vale ne mettra pas plus d'argent dans
le projet de nickel en Nouvelle-Calédonie)
28
.
Sur son site internet, Nouvelle-Calédonie 1ère
29
fait état de la position exprimée par M. SCHVARTSMAN,
de la façon suivante :
28
Cf. procès-verbal du conseil d’administration du 10 septembre 2018.
29
caledonienne-496993.html
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
44/72
« Le patron de Vale récidive. Ce jeudi, il a de nouveau menacé de fermeture l'usine calédonienne de VNC-Nickel. Le 30 juin,
le site d'information spécialisé Fastmarkets/Metal Bulletin publiait en exclusivité des propos similaires de
Fabio SCHVARTSMAN.
Alain Jeannin (F.T.) • Publié le 29 juillet 2017 à 15h12
Le Metal Bulletin rapporte dans ses éditions du jeudi 27 juillet que
« Vale continue d'essayer de trouver un modèle durable
pour son complexe industriel en Nouvelle-Calédonie mais que, si une solution n'est pas trouvée, Vale arrêtera les frais »
. Des
propos tenus par Fabio SCHVARTSMAN lors d’une interview accordée au site de référence de l’industrie minière mondiale.
Message
Le PDG de la multinationale brésilienne déclare notamment que
« Vale a assez investi d’argent dans l’usine du sud »
. L’objectif
est de
« gagner de l'argent dans la situation actuelle au lieu d'investir plus d'argent dans un avenir incertain »
, poursuit
Fabio SCHVARTSMAN.
Sauf que le PDG de Vale sait parfaitement que les cours du métal évoluent autour de 10.240 dollars la tonne et que l’usine
calédonienne a des coûts de production encore supérieurs.
Ambigu
Pour le nouveau patron du premier producteur mondial de nickel, il s’agit donc
« d’examiner clairement, en profondeur,
comment ce projet peut se transformer en opération durable, mais, si l’usine n’y parvient pas, il faudra arrêter. Même si, pour
le moment, cette solution apparaît comme le dernier recours »
. Vale Nouvelle-Calédonie aurait enregistré 1,291 milliard de
dollars de pertes au cours des trois dernières années, selon Fabio SCHVARTSMAN.
Analyse
Cette nouvelle déclaration se situe dans la suite logique de l'intervention précédente. Le nouveau PDG de Vale met la
pression : VNC perd de l'argent et il va falloir trouver une solution pour rentabiliser. La fermeture n'est pas envisagée pour le
moment compte tenu des investissements déjà réalisés. Mais...
Le message est clair. Soit on trouve une solution pour arrêter l'hémorragie, soit Vale se séparera de ses activités.
Sur son site public
30
,
Fastmarket metallbulletin fait état des propos retenus de cet interview que lui a
accordée le PDG de Vale : « Vale will not put more money into New Caledonia nickel project, ceo says
Vale is continuing to try to find a sustainable model for its New Caledonia nickel project [VNC], but if a
solution is not found, the miner will have to shut down the loss-making operation, ceo Fabio Schvartsman
said. We are clearly looking in depth into how and if we can transform it into a sustainable operation,”
Schvartsman said on Thursday July 27. “Our main goal is to find the sustainable model [for VNC]. If we
can’t find it, then we will have to shut it down,” the executive added. (…). »
(traduction: « Vale ne mettra pas plus d'argent dans le projet de nickel en Nouvelle-Calédonie, dit le PDG.
Vale continue d'essayer de trouver un modèle durable pour son projet de nickel en Nouvelle-Calédonie
[VNC], mais si aucune solution n'est trouvée, le mineur devra arrêter l'opération déficitaire, a déclaré le
PDG Fabio Schvartsman. Nous examinons clairement en profondeur comment et si nous pouvons le
transformer en une opération durable », a déclaré Schvartsman jeudi 27 juillet. « Notre objectif principal
est de trouver le modèle durable [pour VNC]. Si nous ne pouvons pas le trouver, alors nous devrons le
fermer », a ajouté l'exécutif. (…) »)
3.1.1.2.
Déclaration à la presse le 8 décembre 2017
Selon la restitution effectuée par Nouvelle-Calédonie 1ère sur son site public
31
,
de l’interview donnée par
le PDG de VALE SA au Financial times le 8 décembre 2017, M. SCHVARTSMAN a fait état d’une mise
en sommeil de l’usine du sud pour juin 2018.
30
ttps://www.metalbulletin.com/Article/3736933/Search-results/Vale-will-not-put-more-money-into-New-Caledonia-nickel-
project-ceo-says.html
31
SOCIETE DE PARTICIPATION MINIERE DU SUD CALEDONIEN
45 / 72
« Vale menace de la mise en sommeil de l'usine du Sud pour juin 2018
6 mois pour convaincre et éviter l’arrêt forcé. Les 3 000 personnes qui travaillent pour Vale NC
sont prévenues. Le patron de Vale, Fabio Schvartsman, avait déjà alerté depuis plusieurs mois
déjà : Vale ne perdrait pas indéfiniment son argent en Nouvelle-Calédonie. La menace se
précise.
Fabio Schvartsman a fixé en fin de semaine le terme de sa patience, à savoir juin 2018. Le PDG
de Vale l’a annoncé devant la presse à Londres. Des propos rapportés notamment par le
Financial Times.
A la recherche d'un nouvel actionnaire
Fabio Schvartsman est très clair : si la recherche d’un nouvel actionnaire ne se concrétise pas
d’ici là, l’usine du Sud sera mise sous cloche.
Vale entend trouver un nouveau partenaire qui prenne entre 20 et 40 % de participation.
Objectif : ne plus porter seule les pertes de l’usine du sud mais surtout trouver du cash pour
financer le projet Lucy, l’usine de traitement des résidus à sec récemment autorisée par la
province Sud, dont les vertus écologiques et économiques ne sont plus à démontrer, mais dont
la facture s’élève à quelques 50 milliards de francs CFP.
(…) »
De cette interview, la SPMSC a mis en avant la phrase suivante : « si la recherche d’un nouvel actionnaire
ne se concrétise pas en juin 2018, l’usine du Sud sera mise sous cloche »
32
.
3.1.1.3.
Déclaration à la presse le 21 mai 2018
De la position exprimée par le PDG du groupe VALE le 21 mai 2018, la SPMSC a mis en avant la phrase
suivante : « nous envisageons de suspendre nos investissements au Canada et en Nouvelle-Calédonie
et nous allons sans doute réduire nos livraisons de nickel durant les trois prochaines années afin de
préserver nos réserves », avec le commentaire suivant de la SPMSC : « ce qui fait dire à la presse que
la stratégie du groupe Vale consisterait à limiter son offre afin d’anticiper une forte hausse des cours du
métal »
33
.
Sur son site internet
34
, NC 1ère restitue ainsi l’interview donnée par le PDG du groupe VALE le
21 mai 2018 :
« Le Brésilien Vale adapte sa stratégie nickel au Canada et en Nouvelle-Calédonie.
(…)
32
Procès-verbal du conseil d’administration du 10 septembre 2018
33
Source : procès-verbal du conseil d’administration de VNC du 10 septembre 2018
34
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
46/72
Vale adapte sa stratégie mondiale.
Dans ce contexte positif caractérisé par une insuffisance de l’offre et une hausse de la demande
mondiale, le PDG de Vale qui est l'un des grands producteurs mondiaux de nickel a exprimé
son opinion dans une interview à l'agence Bloomberg. Fabio Schvartsman semble attendre la
révolution des véhicules électriques : "
Nous sommes l'un des plus grands producteurs de nickel
au monde [...] mais nous envisageons de suspendre nos investissements au Canada et en
Nouvelle-Calédonie, et nous allons sans doute réduire d’environ 150.000 tonnes nos livraisons
de nickel pour les trois prochaines années, afin de préserver nos réserves"
.
La stratégie du groupe Brésilien consisterait à "
limiter son offre afin d’anticiper une forte
hausse des cours du métal, voire de l’encourager"
croit savoir Marex Spectron, l’un des
négociants du nickel à la City de Londres. En effet, la demande de nickel pour les véhicules
électriques est revue à la hausse. Elle devrait passer de 350.000 à 500.000 tonnes d'ici 2025,
pour une demande de 36.000 tonnes en 2018, selon les estimations de Vale.
(…) »
3.1.2.
La demande de clarification de la position du PDG de VALE par la SPMSC
Il ressort des compte rendu de réunion du conseil d’administration de la SPMSC que les déclarations de
M. SCHVARTSMAN n’ont pas été précédées d’une information préalable de la principale intéressée, la
société VNC ni la SPMSC: « M. CHVARTSMAN a de nouveau depuis cette date (juillet 2017), à plusieurs
reprises déclaré publiquement que l’usine de VNC pourrait être soit fermée soit mise en sommeil. A aucun
moment, nous n’avons été informés officiellement de cette décision en conseil d’administration de la
société VNC ».
Suite aux premiers propos tenus par le PDG de VALE en juillet 2017, la SPMSC a échangé avec la
présidente de la société VNC à l’époque (Mme Jennifer MAKI) qui a confirmé à la société
« qu’effectivement M. Fabio SCHVARTSMAN avait demandé à ce qu’un audit complet de VNC soit
réalisé au cours du 2ème semestre 2017. Précisant que ce dernier avait posé trois conditions à la
poursuite de l’activité de VNC :
-
que l’on retrouve des cours satisfaisants du nickel ;
-
réduire les coûts de production ;
-
trouver un nouvel associé au sein de VNC susceptible de contribuer au financement du projet
LUCY qui est estimé à ce jour à la somme de 500 M USD »
35
.
Des échanges entre la SPMSC et la présidente de VNC en novembre 2017, il ressortait que la recherche
d’un nouveau partenaire par le groupe VALE conduisait ce dernier à proposer à la SPMSC de revoir le
dispositif contractuel et que la mise en sommeil de l’usine n’était pas à exclure. Ces échanges étaient
ainsi restitués au conseil d’administration de la SPMSC le 26 décembre 2017 : « Début novembre 2017,
nous avons rencontré Mme MAKI à Paris. (..) Au cours de cette réunion, les représentants de VALE nous
ont indiqué :
35
Source : procès-verbal du conseil d’administration de la SPMSC du 26 décembre 2017
SOCIETE DE PARTICIPATION MINIERE DU SUD CALEDONIEN
47 / 72
-
que le processus de recherche d’un partenaire qui était initié depuis plusieurs mois avait peu de
chances de trouver une issue favorable à court terme et qu’en conséquence la mise en sommeil
de l’usine exploitée par VNC n’était pas à exclure ;
-
qu’il convenait toutefois notamment dans l’optique de l’entrée d’un nouveau partenaire au capital
de VNC que certains aspects de nos relations contractuelles devaient être clarifiés et
notamment : la définition de la production commerciale ; la possibilité de distribuer des
dividendes ; les options d’achat de titres ; les conditions et modalités des prêts ; les principes de
recapitalisation de VNC.
Suite à ces échanges, la SPMSC décide de recourir à un cabinet d’avocats afin d’expertiser les relations
contractuelles (cf. infra) entre le groupe VALE et elle, « compte tenu des difficultés que nous rencontrons
depuis de nombreuses années dans nos relations contractuelles avec la société VALE »
36
.
Ces déclarations, non précédées d’une consultation préalable des organes sociaux de la société VNC
ont conduit la SPMSC à solliciter la tenue d’une réunion du conseil d’administration de VNC ainsi qu’un
positionnement de celle-ci vis-à-vis des propos tenus par le PDG du groupe. Cette demande a fait l’objet
de multiples demandes de la part de la SPMSC.
Dans une déclaration au conseil d’administration de VNC en date du 12 mars 2018, présentée au conseil
d’administration de la SPMSC le 28 novembre 2018, le président de la SPMSC relevait l’absence
d’information et de consultation des organes sociaux de la société VNC et demandait la tenue d’une
réunion de VNC sur ce point : « Il se trouve que depuis plusieurs mois, la presse mondiale relaie les
déclarations successives de M. SCHVARTSMAN, président de Vale SA, portant sur la possible mise en
sommeil, à brève échéance, de la société VALE NC. Ces déclarations ont été effectuées alors que les
organes sociaux de VNC n’ont jamais été consultés, au cours de cette période, ni informés. Ceci mérite
des éclaircissements, et ce d’autant plus que, en dépit des récentes déclarations de M. SCHVARTSMAN,
l’ordre du jour de ce conseil d’administration passe totalement sous silence cette éventualité. Pourtant,
une mise en sommeil de la société serait susceptible d’entrainer des conséquences irrémédiables pour
l’entreprise, ses salariés et l’ensemble de ses partenaires commerciaux. Et ce, sans même évoquer les
retentissements importants sur l’économie calédonienne dont VNC est un acteur essentiel. Vous n’êtes
pas sans savoir que l’actionnariat de SPMSC est composé des trois provinces de la NC, lesquelles sont
fortement préoccupées par ces déclarations. C’est la raison pour laquelle SPMSC souhaite qu’un CA de
VNC se réunisse rapidement à ce sujet, sur un ordre du jour que SPMSC communiquera très
prochainement au nouveau président de VNC ».
Trois mois plus tard, en l’absence de réunion du conseil d’administration inscrivant ce sujet à son ordre
du jour, le président de la SPMSC réitère sa demande. Par courrier du 8 juin 2018 adressé au président
de VNC, il indique que « La situation financière de la société VNC ainsi que les déclarations de
M. SCHVARTSMAN, président du groupe VALE, engendrent une grande inquiétude quant à l’avenir du
site et de la société à laquelle il convient impérativement de remédier. Je vous demande en conséquence
de bien vouloir réunir ce conseil à Paris dans un délai n’excédant pas 45 jours soit entre le 1er et le
15 juillet prochain et de joindre le cas échéant à cet ordre du jour celui concernant l’arrêté des comptes
de la société dont rien ne s’oppose à ce qu’il se fasse rapidement et à la même date. Au regard de la
gravité des éléments mentionnés ci- dessus, il va de soi que si vous refusiez de déférer à cette demande,
SPMSC tirera toute conséquence de droit de cette situation ». Il demande en particulier que l’ordre du
jour permette au conseil d’administration de VNC d’arrêter « les actions à entreprendre dans l’intérêt de
la société » et de façon à ce que « les administrateurs puissent décider de toutes mesures à prendre pour
la sauvegarde des intérêts de la société. ».
36
Source : procès-verbal du conseil d’administration de la SPMSC du 26 décembre 2017.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
48/72
En réponse, dans un courrier en date du 18 juin 2018, le président de VNC indique à la SPMSC que
« VNC n’est pas en mesure de commenter les déclarations concernant VNC qui ont pu être faites par
M. Fabio SCHVARTSMAN ». Il précise avoir transmis la lettre de la SPMSC à VCL qui « pourra vous
répondre directement sur ce point ».
Deux jours après la réception de ce courrier, le président de la SPMSC répond au président de VNC que
son « absence de réaction (l’) oblige à considérer que les mesures visant à une réduction de la production,
à la cessation des investissements ou à la mise en sommeil de VNC émanent de directives données par
M. SCHVARTSMAN qui, agissant comme un véritable dirigeant de fait, semble considérer les organes
de gouvernance de VNC comme une simple chambre d’enregistrement (…) ». Il ajoute qu’il lui « est
difficile d’accepter qu’en l’état, (VNC) puiss(e) demeurer passif et acquiescer sans réagir à de telles
déclarations fortement préoccupantes ». La SPMSC insiste à nouveau sur sa demande que le sujet soit
inscrit à l’ordre du jour du conseil d’administration de VNC.
La tension dans les relations entre la SPMSC et les sociétés du groupe VALE (VNC, VCL et VALE SA)
conduit la SPMSC à introduire auprès du tribunal de commerce de Paris, le 7 août 2018, une requête
d’un huissier de justice au fin de constat afin que ce dernier assiste au conseil d’administration de VNC
qui se tient le 14 août 2018. Une des motivations mise en avant par la SPMSC pour demander que le
président du tribunal de commerce commette un huissier en qualité de mandataire de justice pour assister
au conseil d’administration et réunir tout élément permettant de déterminer les conditions dans lesquelles
le conseil d’administration se tiendra et dresser tout rapport de ses constatations, figure le refus du
président de VNC « d’inscrire à l’ordre du jour du conseil d’administration les questions relatives à l’avenir
de la société face aux difficultés rencontrées et au regard des déclarations très inquiétantes du dirigeant
du groupe, reportant cette discussion pour l’instant au 10 septembre »
37
. Les tensions générées par les
propos du président-directeur général et les échanges entre la SPMSC et VNC sont également mises en
avant par la société qui précise que « compte-tenu des tensions actuelles, la désignation d’un huissier se
justifie également pour maintenir la sérénité des débats qui se tiendront en anglais avec traduction
simultanée en français ». Par ordonnance du 9 août 2018, le président du tribunal de commerce accède
à la demande de la SPMSC ; un huissier de justice assistera aux réunions du conseil d’administration de
VNC le 9 août 2018 ainsi que le 10 septembre 2018.
Finalement, la question de l’avenir de la société, jamais inscrite formellement à l’ordre du jour du conseil
d’administration de VNC, sera abordée en point divers, à la demande de la SPMSC.
37
Cf. Requête d’un huissier de justice au fin de constat adressée à Monsieur le Président du Tribunal de Commerce de paris
datée du 7 août 2018, déposée par la SPMSC.
SOCIETE DE PARTICIPATION MINIERE DU SUD CALEDONIEN
49 / 72
3.2.
L
ES SOLLICITATIONS TARDIVES MAIS REPETEES DE LA SPMSC A PARTIR DE LA FIN
DE L
’
ANNEE
2017
3.2.1.
Des outils à la disposition de la SPMSC non mobilisés jusqu’à 2017/2018
La chambre relève qu’à compter des déclarations du PDG du groupe VALE
38
,
la SPMSC va jouer un rôle
plus actif en tant qu’actionnaire de VNC en mobilisant des outils qui étaient pourtant à sa disposition
depuis la mise en place du projet Goro en 2005 et qu’elle n’avait pas mobilisés jusqu’alors bien que sa
relation avec le groupe VALE ait été tendue depuis longtemps selon les éléments recueillis durant le
contrôle.
Le pacte d’actionnaires ainsi que les statuts de VNC autorisent les administrateurs à se faire
accompagner au conseil d’administration d’un ou plusieurs conseils, « sous réserve que celui-ci ait conclu
avec Goro un accord de confidentialité en des termes appropriés, (…) »
39
.
La SPMSC étant une société
de portage des participations provinciales sans effectif, il lui est nécessaire de s’adjoindre des
compétences financières et juridiques indispensables afin d’équilibrer les relations avec un partenaire qui
est une multinationale. Les éléments recueillis lors du contrôle révèlent l’accompagnement de la SPMSC
durant plusieurs années, par un conseil juridique, pour une régularité et un périmètre qui n’est pas connu
de la chambre. L’expertise financière et l’approfondissement du conseil juridique n’ont été relevés qu’à
compter du deuxième semestre de l’année 2017 à partir du moment où le PDG du groupe VALE a effectué
ses déclarations et que l’actionnaire majoritaire dans VNC (VCL) a indiqué à la SPMSC son souhait de
renégocier les dispositions contractuelles qui lient les associés au sein de VNC.
A compter de la réunion du conseil d’administration de VNC du 9 août 2018, le président de la SPMSC
s’est fait assister par ses conseils (avocats et experts comptables).
Le pacte d’actionnaires modifié par l’avenant de 2008
40
prévoit également la possibilité de demander à
l’actionnaire majoritaire de réaliser un examen complet du projet GORO initial afin de déterminer quelles
mesures pourraient être prises pour que le démarrage de la production puisse intervenir le plus tôt
possible. Cette disposition prévue de longue date dans le dispositif contractuel n’a été mise en œuvre par
la SPMSC qu’en 2018 alors que les conditions de mise en œuvre de cette clause étaient réunies depuis
2012
41
.
Par courrier du président de la SPMSC adressé au président de Vale Canada Limited, en date du
29 mars 2018, la société informe l’actionnaire majoritaire qu’elle envisage de demander à VCL de
procéder à un examen complet du projet Goro initial afin de déterminer quelles mesures correctrices
pourraient être prises pour que le démarrage de la production commerciale puisse intervenir le plus tôt
possible. L’étude HATCH alors en cours a été présentée comme pouvant permettre de couvrir la
demande de la SPMSC. En effet, en réponse à la lettre de la SPMSC, le vice-président de VCL répond
le 30 mars 2018 que
42
« (…) VNC a proposé d’engager une étude à mener par un tiers indépendant afin
d’évaluer les paramètres de traitement et la capacité de l’usine. Nous croyons que cette étude que VNC
commandera bientôt, une fois terminée, répondra aux demandes formulées par SPMSC (…). Nous
38
M. Fabio SCHVARTSMAN n’est plus le PDG du groupe. Il a démissionné le 3 mars 2019 suite à la rupture du barrage minier
Brumadinho, au Brésil, qui a cédé en janvier 2019 en faisant 186 morts et 122 disparus
.
39
Article 3.12 du pacte d’actionnaires de 2005 (ce point n’a pas été modifié par le nouveau pacte d’actionnaires signé en avril
2019).
40
Article 5 de l’avenant au pacte d’actionnaires de 2005
41
Le pacte d’actionnaires modifié prévoit la réalisation d’un examen complet à partir du moment où le démarrage de la
production commerciale telle que prévue initialement n’est pas intervenu dans les délais requis après l’achèvement substantiel
de l’usine déclaré le 31 décembre 2012 par VNC.
42
Traduction non officielle.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
50/72
fournirons bien sûr à la SPMSC, les résultats de cette étude une fois celle-ci terminée »
43
.
Or, celle-ci n’a
pas eu communication de cette étude, selon les réponses apportées à la chambre (cf. supra).
Les statuts de VNC prévoient également la possibilité de mobiliser les moyens suivants, qui seront utilisés
par la SPMSC au soutien de ses demandes d’audit à compter de 2018 :
-
l’article 15.1 prévoit que « chaque administrateur reçoit toutes les informations nécessaires à
l’accomplissement de sa mission et peut se faire communiquer tous les documents qu’il estime
utiles » ;
-
l’article 20 prévoit le droit d’obtenir la communication des documents de la société énumérés à
l’article L225- 15 du code de commerce, c’est-à-dire, notamment, les comptes annuels, les
rapports du conseil d’administration et des commissaires aux comptes et le montant des
rémunérations versées aux personnes les mieux rémunérées ;
-
l’article 23 des statuts de VNC stipule que « les actionnaires et leurs représentants au conseil
d’administration pourront procéder à l’audit des comptes, livres et systèmes comptables de la
société se rapportant aux cinq derniers exercices précédents sous réserve d’en informer la
société à l’avance et ne pas interférer dans l’établissement des comptes annuels de la société.
Les actionnaires feront tous leurs efforts raisonnables pour que lesdits audits soient réalisés
conjointement ou simultanément de manière en limiter les inconvénients pour la société ».
A la connaissance de la chambre, sur l’ensemble des outils prévus par le pacte d’actionnaires et les
statuts de VNC, seule la première faculté a été mise en œuvre par la société (l’assistance de conseils
juridiques lors des réunions du conseil d’administration) avant la période sous contrôle. C’est à partir de
la fin de l’année 2017 que la SPMSC a mobilisé des conseils afin d’engager un audit juridique et financier
de ses relations avec le groupe VALE et des relations entre VNC et le groupe VALE. Les premières
démarches engagées par le président de la société ont été ratifiés par les administrateurs de la SPMSC
réuni en conseil d’administration le 28 novembre 2018. Lors de cette réunion du conseil d’administration,
ont été ratifiées les conditions d’intervention avec les conseils de la société :
-
un audit financier confié à un cabinet d’expertise comptable ;
-
un audit juridique complémentaire à celui engagé précédemment, confié à un autre cabinet
d’avocats.
3.2.2.
L’engagement par la SPMSC d’un audit juridique
Lors du conseil d’administration du 26 décembre 2017 de la SPMSC, le président de la société indique
aux administrateurs que « compte-tenu des difficultés rencontrées depuis de nombreuses années dans
nos rapports contractuels avec le groupe VALE nous avions chargé le cabinet d’avocat (…) d’effectuer
un audit juridique de ce dossier (…).
L’analyse juridique effectuée par le cabinet, datée du 27 mars 2018, a consisté notamment en l’assistance
à la SPMSC pour expertiser les relations contractuelles et financières entre elle et le groupe VALE sur
une période de treize ans (2004 à 2017) et l’assister pour la négociation sur la restructuration de sa dette
et vis-à-vis du groupe VALE ainsi que la négociation pour la conservation d’au moins 5 % du capital de
la VNC, sans dilution possible.
43
Version originale du courrier en anglais : « (…) VNC brought foward its intention to commence a study to be conducted by
an independant third party to assess the processing parameters and capacity of the plant. We believe this study that BNC will
soon commission will, when complete, satisfy the request made by SPMSC in its statement to the board. We will of course
provide SPMSC with the results of such study once it has concluded.”
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Au vu des résultats de cette analyse juridique, la SPMSC a décidé de demander à VCL de procéder à un
examen complet du projet GORO initial (cf. supra) et la communication d’un certain nombre d’éléments
juridiques et financiers afin de procéder à un audit financier de VNC (cf. infra).
3.2.3.
L’engagement difficile par la SPMSC d’un audit financier des comptes de VNC
Par courrier daté du 8 juin 2018, le président de la SPMSC informe le président de la SAS VNC que
« conformément à la possibilité qui est offerte aux actionnaires en vertu de l’article 23 des statuts, la
société SPMSC va mettre en œuvre dans les prochaines semaines un audit des comptes, livres et
systèmes comptables de la société à l’aide de ses propres conseils experts comptables et avocats. La
période auditée concernera les 5 derniers exercices. Sachant que les comptes annuels 2017 que nous
avons reçus sont désormais audités, nous considérons que rien ne s’oppose à ce que ces travaux
puissent débuter à compter du 2 juillet prochain. Je vous remercie dans ces conditions de bien vouloir
mettre à la disposition de nos conseils, soit sur place à Nouméa soit au siège social à Paris l’ensemble
de la comptabilité et des pièces comptables concernant les 5 exercices visés ci-avant. »
Cette demande va être prise en compte à l’issue d’un long processus durant lequel, le périmètre et les
conditions de mise en œuvre de l’audit vont faire l’objet d’une négociation entre la SPMSC et VNC. Les
difficultés rencontrées par la SPMSC pour accéder à sa demande la conduisent à utiliser les termes
d’opacité et d’obstruction dans la qualification de l’attitude du groupe VALE.
Ainsi, dans sa requête datée du 7 août 2018 à fin de requérir auprès du président du tribunal de commerce
de Paris la présence d’un huissier de justice pour une réunion du conseil d’administration de VNC, la
SPMSC n’hésite pas à utiliser le terme d’opacité : « Par ailleurs, au regard de l’ampleur des couts
occasionnés par ce projet et de l’opacité dont fait preuve le groupe VALE, la SPMSC a décidé de mettre
en œuvre un audit complet des comptes de VNC sur les cinq derniers exercices, comme l’y autorise
l’article 23 des statuts ».
Le terme d’obstruction est également employé en soutien à la requête : « L’audit sollicité par SPMSC, qui
devait initialement débuter le 23 juillet 2018, n’a toujours pas commencé et les modalités de sa mise en
œuvre font encore l’objet de discussions, en raison principalement de l’obstruction du président de VNC
qui tente de limiter au maximum l’accès de la SPMSC aux informations financières et comptables de la
société. (…) Le caractère non contradictoire de la demande se justifie par le fait que le président de VNC
s’est refusé à tenir rapidement un Conseil sur un ordre du jour fixé par SPMSC et qu’il fait obstruction à
l’audit des comptes réclamé par SPMSC ».
Dans sa lettre au président de VNC du 25 septembre 2018, le président de la SPMSC utilise également
le terme d’opacité : « : Nous rappelons quand même que Maitre (X) a affirmé en conseil que nous ne
pouvions avoir accès aux factures de la société et à tous les documents comptables donnant lieu aux
opérations comptables. Comment est-il possible de réaliser un audit comptable dans de telles
conditions ? Enfin, nous avions demandé à ce que les registres de conseil et d’assemblée soient mis à
la disposition des administrateurs. Le même Maitre (X) a écrit à notre avocat pour lui indiquer que les
registres ne pouvaient être présentés en conseil au motif qu’ils étaient conservés à Nouméa. Interrogeant
M. (un administrateur de VNC) devant l’huissier, notre avocat a appris que les registres étaient bel et bien
à Paris, M. (administrateur de VNC) ayant précisé qu’il avait vérifié auprès du secrétariat de VNC leur
présence. (…), l’accumulation des difficultés rencontrés nous amène à penser que vous entretenez une
forte opacité dans les rapports existant entre le groupe VALE et VNC ».
La SPMSC voulait engager l’audit financier des comptes de VNC en mobilisant un conseil extérieur à
partir du 2 juillet 2018. La société VNC ayant souhaité fixer des règles et procédures d’accès et de
confidentialité à cet audit, conformément à sa position exprimée par courrier daté du 18 juin 2018 que le
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
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président de VNC a adressé à la SPMSC, s’en est suivi un long processus de négociation des conditions
du déroulement de l’audit. L’audit que la SPMSC souhait démarrer le 2 juillet 2018, puis le 16 juillet 2018
44
,
ensuite le 23 juillet 2018
45
,
puis le 7 août 2018
46
a finalement été mené en octobre 2018.
Ce processus s’est achevé par la signature d’un règlement d’audit, après plusieurs versions - dont les
premières prévoyaient l’interdiction de pouvoir faire une copie des documents consultés selon ce qui
ressort de la consultation des courriers de la SPMSC adressés à VNC
47
- ainsi qu’un engagement de
confidentialité également signé par les conseils de la SPMSC.
L’audit a consisté, selon les termes de la mission ratifiée par le conseil d’administration de la SPMSC le
28 novembre 2018, en la conduite « des travaux d’investigations sur la situation financière de VNC et la
rédaction d’une note de synthèse présentant les points de questionnements relevés ».
Les résultats de l’audit engagé sur la période 2013 à 2017, ont été présentés au conseil d’administration
de la SPMSC. Ils portent pour l’essentiel sur l’analyse des flux financiers existant entre VNC et le groupe
VALE (cf. infra).
En réponse à ces observations, la société VNC indique contester la « prétendue obstruction du Président
de VNC qui aurait tenté de limiter l’accès de la SPMSC aux informations financières et comptables de la
société ». Elle indique que « cette allégation est en effet totalement infondée. La mise en place du
protocole d’audit a certes pris du temps, lié aux procédures intragroupes, mais dès lors que celui-ci a été
opérationnel, la communication a été totale et entièrement transparente
».
3.2.4.
Les questionnements de la SPMSC sur les relations commerciales de VNC avec les
sociétés du groupe VALE
3.2.4.1.
Les sociétés du groupe VALE : prestataires et clientes de l’usine
Des flux financiers interviennent entre VNC et d’autres sociétés du groupe VALE :
44
Cf. courrier du 20 juin 2018 du président de la SPMSC adressé au président de VNC :
« Nous vous remercions cependant
de bien vouloir faire tous les efforts nécessaires pour que cet audit puisse débuter dans les plus brefs délais et en tout état de
cause avant la date du 16 juillet que vous proposez (…) nous entendons demander (…) que nos auditeurs puissent rapidement
obtenir à distance l’accès aux balances et grands livres des cinq derniers exercices de façon à pouvoir limiter leurs
déplacements sur place et partant la gêne que vous semblez craindre ».
45
Par courrier en date du 21 juillet 2018 adressé au président de VNC, le président de la SPMSC indique sa ferme intention
que l’audit financier démarre au plus tard la semaine débutant le 23 juillet 2018. Il précise que la SPMSC est prête de débuter
les travaux le 23 juillet 2018. Le président de la SPMSC précise qu’ « à défaut de déférer à nos demandes en nous donnant
libre accès à l’information comptable, conformément aux stipulations statutaires, à compter du début de la semaine 30 débutant
le 23 juillet, nous agirons par voie judiciaire. ».
46
Cf. courrier de la SPMSC à VNC daté du 3 août 2018 : « De façon à mettre un terme à vos manœuvres dilatoires, nous nous
précisons que nous entendons désormais débuter nos travaux et que, nous nous transporterons ce mardi 7 août prochain
dans les lieux de la Data Room avec notre équipe. Nous ferons le cas échéant constater par huissier toute entrave à l’exercice
de nos droits ».
47
Voir par exemple, un extrait du courrier du président de la SPMSC adressé au président de VNC, daté du 3 août 2018 :
« (…) il est proprement scandaleux que sous prétexte du respect de cet intérêt social, vous ayez cru bon devoir nous adresser
un règlement d’audit inacceptable nous traitant comme de simples tiers cantonnés dans une salle par un salarié de VNC dans
le cadre d’un audit d’acquisition. Dans la version d’origine de votre document figurait par exemple l’interdiction de pouvoir faire
la moindre copie des documents que nous étions amenés à consulter ce qui aurait rendu cet audit impossible à réaliser. Nous
avons dû rectifier ce point que vous avez finalement accepté ce qui prouve qu’il s’agissait d’une vaine tentative d’obstruction
de votre part, celle-là même que nous dénonçons et à l’encontre de laquelle nous luttons. Mais la question se pose, avez-vous
quelque chose à cacher ou à craindre de la réalisation de cet audit ? ».
SOCIETE DE PARTICIPATION MINIERE DU SUD CALEDONIEN
53 / 72
-
dans le cadre des ventes des produits de l’usine dont la production est achetée par l’actionnaire
majoritaire, VCL ;
-
dans le cadre des prestations d’achats et de services réalisées par un certain nombre de sociétés
du groupe VALE auprès de VNC.
Les interrogations de la SPMSC sur les flux financiers à l’intérieur des entreprises dites liées portent pour
l’essentiel sur :
-
les interventions de diverses sociétés dans l’achat et l’exploitation de la production de l’usine,
d’autres sociétés que VCL semblant être parties prenantes des transactions commerciales ;
-
la base juridique exacte au soutien des ventes de la production de l’usine ;
-
le prix d’acquisition de la production vendue par l’usine ;
-
la valorisation financière d’un certain nombre de prestations par des sociétés du groupe à
l’encontre de VNC.
3.2.4.2.
Les interrogations sur les ventes de la production de l’usine aux sociétés du
groupe
a)
Les demandes de la SPMSC adressées à VNC
A plusieurs reprises, le président de la SPMSC a adressé des demandes au président de VNC en vue
que lui soient communiqués les informations et documents suivants :
-
une copie des conventions intra-groupe et en particulier du contrat d’achat de la production de
l’usine dit « offtake agreement » (cf. courriers adressés par le président de la SPMSC au
président de VNC datés du 29 mars 2018, du 24 août 2018) ;
-
le montant du rabais et des commissions supportés par Vale NC en vertu du contrat de
commercialisation de sa production au groupe VALE (courrier de la SPMSC à VNC daté du
29 mars 2018) ;
-
le calcul du prix de revient de la production de Vale NC par rapport à son prix de vente au groupe
VALE.
b)
Sur le contrat d’achat de la production de nickel et de cobalt de l’usine dit
« Offtake Agreement »
Les difficultés de la SPMSC à obtenir communication d’un document pourtant mentionné dans le
pacte d’actionnaires signé en 2005
La SPMSC est actionnaire de VNC depuis 2005. La production de l’usine a démarré depuis 2010. Il faudra
attendre huit ans pour que la SPMSC demande la communication du cadre juridique dans lequel s’exerce
la vente de l’ensemble de la production de l’usine. Pourtant, dans le pacte d’actionnaires que la SPMSC
a signé en 2005, figurait en annexe le modèle de contrat cadre concernant la vente de la production de
l’usine. A la connaissance de la chambre, la société n’avait jamais, jusqu’en 2018, demandé que lui soit
transmis la version finalement signée.
Le 17 avril 2018, VNC a adressé à la SPMSC un document daté du 17 février 2005 intitulé « Inco Product
Offtake Agreement » ayant pour parties d’une part GORO NICKEL SA et d’autre part INCO
INTERNATIONAL LIMITED. Au vu du document transmis, le président de la SPMSC a adressé un
courrier au président de VNC daté du 20 juin 2018, lui demandant de lui communiquer une version
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
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définitive et signée du contrat d’achat de la production du site car le document transmis n’étant ni daté,
ni paraphé, ni signé par les parties, il lui semble relever d’un projet de contrat.
En l’absence de réponse, le président de la SPMSC réitère sa demande, par courrier en date du
3 août 2018, que lui soit communiqué le contrat d’achat de nickel liant VNC à VCL « dûment signé par
les parties puisque vous nous avez transmis un projet de contrat non signé », puis ensuite par courrier
en date du 24 août 2018 avant finalement d’en obtenir une copie en septembre 2018.
Le contrat lui a été transmis en septembre 2018, après plusieurs relances ayant suivi sa demande initiale
en mars 2018. La version transmise comporte le contrat initial, signé en 2005, ainsi que l’avenant à ce
dernier, conclu en 2010.
En octobre 2018, la SPMSC, découvre à travers un document qui en mentionne l’existence, qu’un autre
avenant au contrat de vente de 2005 amendé en 2010, existe et aurait été conclu en 2015. Par courrier
en date du 19 octobre 2018 adressé au président de VNC, le président de la SPMSC interpelle ainsi la
société : « A ce stade, nous observons que le cabinet (X) évoque un avenant à l’ « offtake agreement »
en date du 1er juillet 2015, avenant qui constitue une nouvelle péripétie dans cette affaire puisqu’à aucun
cas moment il n’a été fait mention de cet avenant, que ce soit au cours de la présentation lors du conseil
du 10 septembre ou dans le cadre de la communication de la documentation relative à l’ « offtake
agreement », supposée avoir été opérée de façon exhaustive par le cabinet (X). Là encore nous nous
interrogeons sur la méthode, étant précisé qu’après avoir effectué nos premières recherches dans les
procès-verbaux de conseil d’administration en notre possession, nous n’avons pas pu trouver de
quelconques informations à propos de cet avenant ».
Les doutes de la SPMSC au vu de la forme du contrat
Le document transmis à la SPMSC, dit « offtake agreement », signé le 8 avril 2005 avec un avenant daté
du 29 avril 2010, ne revêtant aucun paragraphe et étant issu de ce qui a semblé être « un recollement
d’impressions de fichiers informatiques différents », la SPMSC a émis un certain nombre de réserves sur
le contrat quant à sa véracité.
La SPMSC a demandé à VNC de lui garantir l’authenticité du contrat par l’obtention d’une lettre d’opinion
auprès d’un avocat.
c)
Les doutes de la SPMSC sur les parties au contrat
Par ailleurs, la SPMSC a relevé que les parties signataires de cette convention de 2005 sont d’une part
GORO
NICKEL SAS (devenue VNC) et d’autre part INCO INTERNATIONAL LTD, puis par avenant daté
de 2010, une autre société est signataire du contrat ainsi amendé : la société VALE INCO ASIA LTD. Les
deux sociétés (INCO INTERNATIONAL LTD et VALE INCO ASIA LTD) ont toutes deux leur siège social
situé à la Barbade.
De plus, le pacte d’actionnaires signé par la SPMSC en 2005 avec VCL mentionnait que la production de
l’usine serait vendue à l’actionnaire majoritaire. En effet, le pacte signé par la SPMSC et VCL en 2005
prévoyait, à l’article 2.02 (b) que « SPMSC prend acte et accepte que seule INCO aura le droit et
l’obligation d’acquérir la production de nickel, de cobalt ou d’autres produits issus du projet Goro Initial
dans les conditions définies au contrat en langue anglaise figurant en annexe Sept avec un résumé en
français des principaux termes, ni SPMSC, ni l’un des actionnaires de SPMSC, ni l’un des actionnaires
de SPMSC n’ayant de droit ou d’obligation à cet égard. Il est entendu qu’INCO pourra transférer ou céder
une partie de ses droits et obligations au titre dudit contrat à un autre actionnaire industriel de Goro (VNC)
et que SPMSC s’engage à voter en faveur de l’approbation dudit contrat lors de la réunion du conseil
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convoquée à cet effet ». En annexe 7 figurait un modèle d’accord qui devait être formalisé
ultérieurement ».
48
Le pacte d’actionnaires de 2005 prévoyait donc que l’intégralité de la production devait être vendue :
-
à l’actionnaire majoritaire INCO (devenue VCL) ;
-
que l’acquisition de la production se faisant dans les conditions définies au contrat en langue
anglais figurant en annexe 7 du Pacte, lequel prévoit que le contrat devant être conclu avec INCO
concerne 79 % de la production, le contrat avec les entreprises japonaises concerne 21 % de la
production ;
-
et que ce dernier pouvait transférer son droit à « un autre actionnaire industriel de Goro (VCL) ».
La SPMSC ayant relevé que VCL n’étant pas partie au contrat de vente de 2005, amendé en 2010 et en
2015
et
que
par
ailleurs
les
sociétés
parties
contractantes
à
ce contrat
(c’est-à-dire
INCO INTERNATIONAL LIMITED et VALE INCO ASIA LTD), bien qu’appartenant au même groupe VALE
n’étant pas actionnaires de VCL, les conditions fixées dans le pacte d’actionnaires ne semblent donc pas
respectées.
La SPMSC a interrogé à plusieurs reprises VNC sur la dénomination sociale exacte de la société à
laquelle la production de nickel est actuellement vendue.
Les informations recueillies par la SPMSC faisant état d’une fusion entre INCO INTERNATIONAL LTD et
VALE INCO ASIA LTD ne permettant pas d’établir le lien entre cette dernière (VALE INCO ASIA LTD)
située à la Barbade et la société VCL (actionnaire de VNC) située au Canada, la SPMSC a maintenu ses
interrogations. Ainsi, par courrier daté du 25 septembre 2018 adressé au président de VNC, le président
de la SPMSC récapitule ainsi ses interrogations sur ce point : « si nous prenons pour exemple le offtake
agreement, le cocontractant serait devenu VCL alors que dans la documentation transmise il y a encore
quelques jours, figurent les sociétés INCO INTERNATIONAL LIMITED puis VALE INCO ASIA LIMITED.
En réponse à notre questionnement (…) il nous a été proposé de nous transmettre rapidement un
memento explicatif permettant de comprendre le changement de cocontractant depuis 2011. Nous
n’avons toujours rien reçu. Vous comprendrez notre agacement face à cette incapacité à fournir en
conseil les explications concernant un point mis à l’ordre du jour sur demande de SPMSC, s’agissant de
surcroît d’un point capital puisqu’il concerne l’acquisition dans des conditions qui nous semblent relever
des conventions réglementées, de l’intégralité de la production de la société VNC par une société liée.
Quoi qu’il en soit, nous constatons au vu des documents que vous nous avez transmis qu’il n’existe
aucune convention signée entre VNC et VCL pour l’acquisition de cette production. (...) Nous constatons
enfin que les conventions qui nous ont été transmises il y a quelques jours comportent d’autres
cocontractantes que VCL domiciliées dans un paradis fiscal ».
48
Dans le nouveau pacte d’actionnaires signé le 29 avril 2019, l’exclusivité de la vente de la production de l’usine à VCL a été
maintenue : La SPMSC et VCL conviennent, à l’article 2.02 (b) que « SPMSC prend acte et accepte que seule VCL aura le
droit et l’obligation d’acquérir la production de nickel, de cobalt ou d’autres produits issus du projet Goro dans les conditions
définies dans l’Offtake Agreement en date du 8 avril 2005 (tel que modifié le 12 avril 2010 et le 1er juillet 2015), tel que ce
dernier aura été modifié conformément à l’article 17 du Contrat Cadre, ni SPMSC, ni l’un des actionnaires de SPMSC, ni l’un
des actionnaires de SPMSC n’ayant de droit ou d’obligation à cet égard. Il est entendu que VCL pourra transférer ou céder
une partie de ses droits et obligations au titre dudit contrat à un autre actionnaire industriel de VNC ou un Affilié de cet
Actionnaire Industriel, à la condition que ce transfert ou cette cession soit soumis à l’approbation préalable du Conseil (étant
entendu que tous les administrateurs du conseil pourront voter sur cette approbation) ».
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
56/72
Par courrier en date du 10 octobre 2018 adressé au président de la SPMSC, le président de VNC a
proposé de communiquer à la SPMSC un memorandum sur les opérations juridiques ayant conduit VCL
à succéder à Inco International Limited et expliquant que VCL est aujourd’hui partie à l’Offtake Agreement.
3.2.4.3.
Les interrogations sur les prestations réalisées auprès de VNC par les sociétés du
groupe
A plusieurs reprises, le président de la SPMSC a adressé des demandes au président de VNC en vue
que lui soient communiqués les informations et documents suivants :
-
une copie des conventions intra-groupe (cf. courriers adressés par le président de la SPMSC au
président de VNC datés du 29 mars 2018) ;
-
le détail (nature, conditions et montant) des charges facturées par des entités du groupe Vale à
Vale NC, (cf. courrier de la SPMSC à VNC daté du 29 mars 2018).
La SPMSC a, à maintes reprises, demandé à VNC la communication des conventions intra-groupe. Elle
a fait état, par ailleurs, de ses interrogations concernant l’absence de mobilisation du dispositif des
conventions réglementées et de l’existence ou non d’un excédent de charges facturées à VNC par les
sociétés du groupe.
SOCIETE DE PARTICIPATION MINIERE DU SUD CALEDONIEN
57 / 72
4.
LES MODIFICATIONS RECENTES DU PARTENARIAT
4.1.
LA SIGNATURE D
’
UN NOUVEAU PACTE D
’
ACTIONNAIRES APRES DEUX ANS DE
NEGOCIATIONS
Suite aux déclarations du président du groupe VALE menaçant de mettre en sommeil ou de fermer le
site, la SPMSC se décide à jouer un rôle plus actif et à mobiliser les outils qui étaient à sa disposition
depuis le début de ses relations contractuelles avec le groupe VALE.
Outillée par les résultats des différentes expertises juridiques et financières qu’elle a lancées, la SPMSC
a pu faire avancer ses revendications dans la négociation engagée avec VCL pour la refonte du pacte
d’actionnaires.
Les négociations ont duré deux années. Elles visaient, selon la présentation effectuée par la SPMSC
dans de nombreux documents, deux objectifs :
-
faire de Vale Nouvelle-Calédonie une entreprise profitable et pérenne à la veille de la réalisation
d’investissements majeurs et essentiels à la survie de l’usine ;
-
préserver les intérêts de la SPMSC et rétablir la confiance et l’affectio societatis entre les
actionnaires en renégociant les termes du Pacte d’actionnaires de 2005 modifié en 2008.
La SPMSC et VCL ont signé le 29 avril 2019 un nouveau pacte d’actionnaires en remplacement de celui
de 2005 et de son avenant de 2008. La signature du nouveau pacte, approuvée par le conseil
d’administration de la SPMSC le 11 avril 2019, a été précédée d’une présentation devant l’assemblée de
la province Sud avec un avis favorable des élus le 12 avril 2019. Le nouvel accord intègre les principaux
points suivants.
4.1.1.
Un niveau de dette réévalué par rapport aux prévisions initiales de 2005
Au cours des négociations engagées entre la SPMSC et VCL, les deux sociétés avaient considéré que
la valeur des créances de VCL à l’égard de la SPMSC avait essentiellement été constituée suite aux
dépassements du coût de construction de l’usine de Goro (cf. supra).
Au 29 avril 2019 (date de signature du nouveau pacte d’actionnaires entre VCL et la SPMSC et de la
convention de cession de créances entre VCL et les associés dans la SPMSC), VCL détenait des
créances de 354 496 199 USD (315 390 883 EUR) envers la SPMSC. Ces créances étaient constituées
de :
-
281 M USD
49
relatifs aux appels de fonds pris en charge par VCL pour le compte de la SPMSC
depuis le début du projet ;
-
73,7 M USD
50
au titre des remboursements de l’emprunt BPCE effectués par VCL pour le compte
de la SPMSC.
Avec le nouvel accord, la dette de la SPMSC à l’égard de VCL a été réduite d’un montant de
254,4 M USD
51
.
Cette réduction a été effectuée par la signature par VCL, PROMOSUD, la province Nord
et la province des Iles le 29 avril 2019, d’une convention de cession de la créance aux trois actionnaires
de la SPMSC au prorata de leurs participations respectives dans le capital de la SPMSC pour 1 euro. La
49
281 747 363 USD (250 668 144 EUR)
50
72 748 835 USD (64 723 739 EUR)
51
254 496 199 USD
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
58/72
cession de créances de 254,4 M USD a été formalisée par un acte de cession de créance par lequel VCL
cédait :
-
à PROMOSUD pour 0,5 EUR sa créance dont la valeur nominale chez la SPMSC était de
127,2 M USD,
-
à la province des Iles pour 0,25 EUR sa créance dont la valeur nominale chez la SPMSC était
de 63,6 M USD,
-
à la province Nord pour 0,25 EUR sa créance dont la valeur nominale chez la SPMSC était de
63,6 M USD,
Ces fonds ont été bloqués sur un compte courant et sont destinés à être capitalisés au sein de la SPMSC.
Il persiste une dette résiduelle plafonnée à 100 M USD (10,5 Md F CFP), sans intérêt et remboursable
grâce aux dividendes futurs.
4.1.2.
Le plafonnement de la participation de la SPMSC aux investissements futurs
Par ailleurs, les parties sont convenues de plafonner la participation de la SPMSC aux investissements
futurs à 4,2 Md F CFP (40 M USD) afin de protéger celle-ci en cas de dépassement des coûts nécessitant
d’abonder la trésorerie de VNC. Cette participation aux besoins futurs s’effectuera grâce à des prêts sans
intérêt consentis par VCL à la SPMSC qui seront affectés en avances capitalisables au sein de VNC. Ces
prêts seront exclusivement remboursés au moyen des dividendes perçus de VNC.
4.1.3.
La possibilité pour la SPMSC de remonter au capital de VNC de 5 à 10 % pour un
prix plus avantageux
Les parties sont convenues des points suivants :
-
l’impossibilité pour VCL de diluer la participation de SPMSC au sein de VNC en deçà de 5 %
sans coût supplémentaire pour la SPMSC. Cette impossibilité de dilution en dessous de 5 % du
capital est prévue à l’exception notamment de l’exercice par un tiers de nantissement de comptes
titres dont ce tiers bénéficierait sur tout ou partie des actions détenues par SPMSC ;
-
l’option pour la SPMSC, pendant une durée de dix ans, d’augmenter sa participation au sein de
VNC pour atteindre 10 % du capital. Le coût d’achat de ces 5 % supplémentaires est revenu à la
baisse : 10 Md F CFP au lieu de 53 Md F CFP estimés. Ce prix d’achat est fixe pendant les cinq
premières années puis indexé sur le taux de l’indice américain des prix à la consommation durant
les cinq années suivantes ;
-
l’option pour la SPMSC d’augmenter sa participation au capital à 20 %.
4.1.4.
De nouvelles règles pour l’utilisation des dividendes revenant à la SPMSC
Le nouveau pacte d’actionnaires maintient l’enveloppe des 40 % réservés au BRGM afin de permettre le
remboursement de la dette de la SPMSC due au BRGM.
Sur les 60 % restants, 210 MF CFP/an (2 M USD) reviennent à la SPMSC en cash, le solde étant affecté
au remboursement de la dette VCL.
Lorsque la dette BRGM aura été remboursée, il est prévu que 40 % des dividendes iront en cash à la
SPMSC (avec un minimum de 210 MF CFP, soit 2 M USD), le solde étant affecté au remboursement de
VCL.
SOCIETE DE PARTICIPATION MINIERE DU SUD CALEDONIEN
59 / 72
4.1.5.
La garantie d’un versement annuel de Vale à la SPMSC d’un montant de
1,5 M USD
Le nouvel accord prévoit un prêt de soutien sans intérêt, à compter de la signature des accords et jusqu’en
2022. Il est prévu que VCL prête sans intérêt annuellement à la SPMSC :
-
les années sans distribution de dividende, une somme de 1,5 M USD ;
-
les années où VNC distribue à la SPMSC un dividende lui permettant de recevoir en cash, après
paiement du BRGM, une somme inférieure à 1,5 M USD, un complément, de façon à ce que la
SPMSC perçoive sur l’exercice une somme totale de 1,5 M USD.
Tant qu’il existera une dette au titre du prêt de soutien, y compris après 2022, il est prévu que tout ce que
devrait recevoir la SPMSC en cash à titre de dividendes, après paiement du BRGM, est plafonné à
150 MF CFP.
4.1.6.
La restructuration de la dette de VNC : la réduction de 26,9 Md F CFP de la dette
de VNC à l’égard du groupe VALE
Il s’agissait de faire de VNC une « entreprise profitable et pérenne à la veille de la réalisation
d’investissements majeurs et essentiels à la survie de l’usine », à savoir le projet Lucy. Les associés sont
donc convenus de reconstituer les capitaux propres de VNC qui étaient inférieurs à 50 % du capital de la
société et devaient être reconstitués avant le 31 décembre 2019.
Afin d’améliorer les capitaux propres et la situation financière de VNC, les mesures suivantes ont été
prises :
-
la renonciation par VCL à la créance détenue au titre des obligations spéciales de financement
(principal et intérêt) d’un montant de 839 M USD (738 M EUR) en décembre 2018, soit un profit
exceptionnel pour VNC de 88 Md F CFP (839 M USD) ;
-
l’abandon de l’intégralité de la créance que VCL détiendra sur VNC en 2021 en sortie du dispositif
GIRARDIN 1, ce qui représente un profit exceptionnel pour VNC de 76 Md F CFP ;
-
la diminution du loyer du par VNC au véhicule GIRARDIN du fait de la diminution du taux de
rémunération de 7,5 % à 5,5 % du prêt consenti par VCL au-dit véhicule, ce qui génèrera une
économie annuelle pour VNC de 1,9 Md F CFP par an ;
-
l’abandon de la rémunération de VCL au titre de la garantie apportée aux investisseurs (économie
annuelle pour VNC de 1,8 Md F CFP) ;
-
la suppression des frais de commercialisation consentis à VCL sur les ventes de NiO, ce qui
génèrera un gain annuel pour VNC de 1,27 Md F CFP ;
-
la révision favorable pour VNC des prix de transfert consentis au groupe VALE ayant pour effet
d’augmenter le prix de vente du NiO et par conséquent la marge de VNC.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
60/72
5.
LES INTERROGATIONS SUR L’INTERET FINANCIER DE LA
PARTICIPATION DE LA SOCIETE DANS L’USINE DU SUD
La chambre s’interroge sur l’intérêt financier de la participation de la SPMSC dans le capital de VNC
compte-tenu de son poids dans cet actionnariat (une participation ultraminoritaire), de l’absence de retour
financier pour elle, en l’absence de rentabilité de l’usine, des conséquences financières pour la SPMSC,
le maintien dans l’actionnariat se traduisant par un endettement élevé et compte-tenu de la valeur
financière de cette participation estimée à un niveau nul ou quasiment nul.
5.1.
LA PERSISTANCE D
’
UN ENDETTEMENT IMPORTANT DE LA SPMSC
Bien qu’ainsi restructurée dans le cadre du nouveau pacte d’actionnaires, la dette de la SPMSC reste à
un niveau important. Outre les 100 M EUR de créances restant dues à VCL, la société continue à être
redevable auprès du BRGM de la créance due au titre de l’acquisition des actions en 2005.
La dette de la SPMSC à l’égard du BRGM s’élève à 8,7 Md F CFP (72,9 M EUR).
Au titre de l’accord conclu par la SPMSC avec le BRGM le 18 février 2005, cette dette devait être
remboursée en 11 ans après le versement du premier dividende (40 % des dividendes futurs sont
réservés au remboursement de cette dette). Le versement des dividendes était conditionné au
déclenchement de la phase de démarrage effectif de la production. Il était prévu que si la production
commerciale n’était pas atteinte à fin 2014, le BRGM puisse faire annuler la vente. Les actions revenant
au BRGM ne représentent plus que 1,33 % du capital de VNC.
Les conditions du démarrage effectif de la production commerciale n’étant pas réunies et aucun dividende
n’ayant été versé par VNC, il en a résulté qu’aucun paiement du prix des actions n’a été versé au BRGM.
Des échanges ont alors eu lieu entre la SPMSC et le BRGM en 2014 et 2015 sur le sort de cette créance.
En l’absence d’accord entre les parties et en application du contrat de cession, le BRGM a demandé la
résolution de la vente. Une assignation en résolution de la vente de 2005 devant le tribunal de commerce
de Paris a été délivrée par le BRGM à l’encontre de la SPMSC le 6 juin 2016.
Suite à la signature d’un protocole transactionnel signé le 1er février 2017 par la SPMSC et le
29 décembre 2016 par le BRGM, ce dernier s’est désisté de l’instance engagée contre la SPMSC devant
le tribunal de commerce de Paris. Au titre de ce protocole, en contrepartie du nantissement des actions
par convention signée le même jour (1
er
février 2017 par la SPMSC et 29 décembre 2016 par le BRGM),
le BRGM a accepté de consentir un nouveau délai pour la constatation du démarrage effectif de la
production commerciale prévu au contrat de cession de 2005 ou de toute définition qui s’y substituerait
par accord des parties jusqu’au 31 décembre 2019, et par conséquent, de reporter dans le temps le délai
de la renégociation des modalités de paiement du prix des actions BRGM jusqu’au 31 décembre 2020
en cas de non démarrage effectif de la production commerciale. L’échéance de remboursement au BRGM
ayant été reportée jusqu’à la fin de l’année 2019, les négociations sont en cours.
Les négociations entre la SPMSC et le BRGM portent sur la valeur financière actualisée des actions
cédées.
Lors du conseil d’administration de la SPMSC en date du 3 juin 2016, il est indiqué que le BRGM a
proposé un prix très faible d’acquisition à la SPMSC. Selon les informations figurant dans le procès-verbal
du conseil d’administration du 3 juin 2016, le BRGM a proposé que « la SPMSC s’acquitte du prix
d’acquisition pour un prix très faible, calculé sur le prix de sortie des japonais auquel a été appliqué un
ratio de dégradation ». Il est précisé que « la société ne dispose pas, à ce jour, de la somme demandée
par le BRGM ». La référence à la sortie des japonais concerne l’acquisition par VCL de la part que
possédait la société SUMIC (14,5 %) dans VNC.
SOCIETE DE PARTICIPATION MINIERE DU SUD CALEDONIEN
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En l’absence de mention chiffrée indiquée, la chambre a interrogé la société sur le prix proposé. Dans sa
réponse datée du 14 août 2019, la SPMSC a indiqué que « lors d’une conversation entre le BRGM et
SPMSC, le prix proposé verbalement était de 15 millions d’euros. SPMSC n’ayant pas alors la trésorerie
disponible, il n’a pas été donné suite à cette conversation qui n’a d’ailleurs jamais été confirmé
officiellement ».
La SPMSC a mandaté le cabinet d’expertise comptable RSM afin qu’il réalise une étude de la valorisation
des titres que la SPMSC détient dans VNC. En juillet 2019, selon les informations figurant dans ce rapport
de gestion portant sur l’exercice 2018, une réunion s’est tenue entre les conseils du BRGM et ceux de
SPMSC qui avait notamment pour but de présenter l’étude réalisée par le cabinet d’expertise RSM qui
concluait à une valorisation médiane de 800 000 EUR pour les titres que le BRGM a cédé en 2005.
Une autre réunion s’est tenue en septembre 2019 durant laquelle il est apparu que pour le président du
BRGM, la valorisation médiane effectuée par le cabinet RSM de 800 000 EUR « lui semblait faible au
regard de ce que ses différentes instances étaient en mesure d’entendre et d’accepter »
52
. Selon les
informations figurant dans ce rapport de gestion, dans un esprit de négociation, la SPMSC a proposé
d’assortir le paiement de ce prix d’un complément de prix payé sur les résultats futurs de VNC (clause
dite de « earn out ») selon une base restant à définir. La SPMSC souhaite que le paiement de ce
complément de prix éventuel ne soit pas limité dans le temps, « les perspectives de distribution de
dividendes au sein de VNC semblant pour le moment très hypothétiques dans un futur proche ».
Le BRGM souhaiterait percevoir un montant cash bien plus élevé pour clôturer le dossier. Le président
du BRGM estimait ce montant aux alentours de 25 M EUR puis, après discussions, le ramenait à
15 M EUR
53
. La SPMSC a indiqué qu’elle ne disposait pas de cette somme et qu’aucun crédit ne peut lui
être accordé.
La SPMSC n’exclut pas le recours au juge sur le fondement de la théorie juridique de l’imprévision. Les
nouvelles dispositions du code civil permettraient - selon les analyses juridiques réalisées par un cabinet
d’avocats sollicité par la société - lorsque les conditions économiques d’un contrat ont évolué de façon
imprévue, de saisir le juge afin soit qu’il prononce la résiliation du contrat, soit qu’il en rétablisse l’équilibre
économique en l’espèce en modifiant par exemple le prix de cession des titres à dire d’expert. La
restitution de cette réunion entre le BRGM et la SPMSC dans le compte rendu de gestion de l’exercice
2018 mentionne que cette possibilité aurait été évoqué « à demi- mots », selon les analyses de la
SPMSC. En cas de résiliation du contrat par le juge, le BRGM pourrait être contraint de devoir rembourser
à la SPMSC les sommes engagées par cette dernière pour conserver la quotité de titres cédés, somme
dont le montant équivaut à l’endettement de 350 M USD que la SPMSC a contracté auprès de VCL pour
suivre les différentes augmentations de capital imposées par l’actionnaire de VNC.
52
Source : rapport de gestion SPMSC, exercice 2018
53
Source : rapport de gestion SPMSC, exercice 2018
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
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5.2.
LA VALEUR QUASIMENT NULLE DE LA PARTICIPATION DE LA SPMSC AU SEIN DE VNC
La SPMSC a fait réaliser trois études afin de déterminer la valeur financière de sa participation dans VNC.
Deux études, l’une réalisée en 2016 et l’autre en 2017 (correspondant à une actualisation de celle de
2016) ont été effectuées par le cabinet DPR.COM. La troisième a été confiée au cabinet RSM.
Ces études ont utilisé diverses méthodologies pour estimer cette valeur financière. La chambre relève
que quelle que soit la méthodologie employée, il ressort de ces études le constat d’une très forte perte
de valeur de cette participation, certaines méthodes parvenant même à la conclusion que la participation
de la SPMSC dans VNC a une valeur de zéro ou proche de zéro.
5.2.1.
L’étude de 2017
Le cabinet, sollicité par la société, a retenu plusieurs méthodes pour évaluer la participation de la SPMSC
dans VNC, dont trois principales, qui concluent toutes que, quelle que soit la méthode d’évaluation
retenue, la SPMSC perd de l’argent dans la valorisation financière de sa participation.
5.2.1.1.
Première méthode : la valorisation de la participation dans le cadre de la méthode
de l’actif net (méthode utilisée lors de l’acquisition des actions).
La méthode de la situation nette avait été retenue pour la détermination du prix d’acquisition de la
participation en 2005, dans le cadre du rapport DUTHILLEUL.
Dans le cadre de cette méthode, il s’agissait de déterminer la valeur patrimoniale à partir de l’actif net
réel, fondé sur les états financiers au 31 décembre 2014 et en tenant compte des évolutions intervenues.
La valeur patrimoniale est déterminée à partir de l’actif net réel, fondé sur les états financiers au
31 décembre 2016 et tenant compte des évolutions intervenues en 2017.
La quote-part de la SPMSC (10 %) dans la valeur nette au 30 septembre 2004 était de 59,4 M EUR
(7 Md F CFP).
La quote-part de la SPMSC (5 %) dans la situation nette de VNC en 2016 était estimée à 50,9 M EUR,
soit 6 Md F CFP, c’est à dire 1 Md F CFP en moins par rapport à l’acquisition en 2005 (7 Md F CFP).
L’actualisation de l’étude par le cabinet en intégrant les chiffres de l’exercice 2017 a conduit à une
réévaluation de cette quote-part estimée désormais à une valeur négative (-1,7 Md F CFP), soit une perte
de valeur totale de 7 Md F CFP par rapport à l’acquisition (7 Md F CFP).
A cette perte de valeur, il faut également ajouter une perte des fonds apportés. Le montant total des
apports réalisés par la SPMSC au 31 décembre 2016 était de 325,6 M EUR (38,8 Md F CFP), il en résulte
une perte de valeur de ce montant (-325 M EUR soit -38,8 Md F CFP).
Outre la valeur des titres, il convient d’anticiper la participation au besoin de financement complémentaire
jusqu’en 2023. Sur la base des chiffres prévisionnels de la société, il faut donc tenir compte des éléments
suivants :
-
les cash-flow négatifs de 2018 à 2023 totalisent 1 500 M USD (1 370 M EUR ou 164 Md F CFP) ;
-
le
montant
d’investissement
nécessaire
pour
achever
le
projet
est
estimé
à
1 350 M USD (1 250 M EUR ou 149 Md F CFP).
Sur cette dernière base, les fonds complémentaires à apporter, pour rester à 5 % seraient de 61,5 M EUR
(7,3 Md F CFP).
SOCIETE DE PARTICIPATION MINIERE DU SUD CALEDONIEN
63 / 72
Pour un repreneur à fin décembre 2017, l’investissement total, en considérant une valeur des titres nulle,
s’élèverait ainsi, dans le cadre d’une reprise de la participation de la SPMSC à 5 % : 61,5 M EUR
(7,3 Md F CFP) correspondant au montant des fonds à apporter.
Les distributions prévisionnelles (dans le cadre d’une participation à 5 % dans VNC) actualisées au taux
de 8 % jusqu’en 2051, selon les chiffres des budgets prévisionnels de VNC seraient d’un montant de
25,7 M EUR (2,8 Md F CFP).
Le retour sur investissement représenterait ainsi 42 % de l’investissement, soit une perte de fonds de
58 %. Le cabinet en conclut que « l’hypothèse de cession à un repreneur sur ces bases est donc
difficilement réalisable ».
5.2.1.2.
Deuxième méthode : l’actualisation des cash-flow ou des dividendes
L’actualisation des cash-flow représente la valeur actuelle des disponibilités prévisionnelles que l’activité
est estimée pouvoir dégager.
La valeur de la participation en 2004, de 10 % au regard du cash flow ainsi déterminé était de 37,7 à
113,3 M EUR (soit 4,5 à 13,5 Md F CFP).
Selon cette méthode, la participation n’aurait eu aucune valeur en 2017.
Le cabinet en tire la conclusion que l’hypothèse de cession à un repreneur sur ces bases est donc très
peu probable.
5.2.1.3.
Troisième méthode : valeur actuelle des dividendes à recevoir
Dans la continuité de la deuxième méthode qui permet d’actualiser la valeur des cash-flows, cette
méthode permet d’évaluer la valeur actuelle des dividendes
54
à recevoir.
La comparaison des distributions de dividendes à recevoir telles qu’elles étaient prévues en 2004 et pour
2017 montre que les dividendes à percevoir par la SPMSC pour sa participation à 5 % sont inférieurs à
sa mise de fonds (339 M EUR, 40 Md F CFP) au 30 septembre 2017
55
.
Mises en regard du montant total de l’investissement total à réaliser (incluant les mises de fonds à venir),
les distributions de dividendes à recevoir ne permettraient de couvrir qu’un peu plus de 20 % de
l’investissement sur la base 2017.
5.2.2.
L’étude de 2019
Dans une étude, dont les résultats ont été restitués à la SPMSC par document daté du 23 juillet 2019
56
,
d’autres évaluations conduisent à une valorisation de la participation de la SPMSC dans le capital de
VNC à un montant estimé à 0,8 M EUR au 31 décembre 2018 (dont 0,2 M EUR pour les titres acquis en
2005 par la SPMSC au BRGM).
Pour valoriser les fonds propres de VNC, le cabinet a retenu l’approche par actualisation des dividendes
et appels de fonds futurs. La valeur de la participation de la SPMSC dans VNC est ensuite obtenue par
la méthode de l’actif net réévalué, constant à ajouter à la valeur des capitaux propres comptables de
SPMSC, la plus-value estimée sur les titres VNC détenus. La méthode d’actualisation a été mise en
œuvre sur la base du plan d’affaires préparé par VNC.
54
Ici la notion de dividendes se définit telle que le prévoient les contrats: toute distribution dont le remboursement du capital
social.
55
Date retenue par le cabinet
56
Document intitulé « Rapport d’évaluation provisoire des titres VNC détenus par SPMSC ».
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
64/72
Ensuite, le cabinet a travaillé à partir d’une simulation intégrant 20 000 scenarii (dite simulation de
Monte- Carlo). Pour chaque scenario, le cabinet a actualisé les flux de dividendes et d’appels de fonds
futurs. La valeur des fonds propres correspond à la somme de ces deux composantes. Sur ces bases, la
valeur des fonds propres centrale ressort à 18 M USD au 31 décembre 2018, soit la moyenne des valeurs
des fonds propres obtenues selon les 20 000 scénarii simulés.
L’application du taux de participation de 5 % à la valeur des fonds propres ainsi estimée (18 M USD)
donne un montant de 900 000 USD, soit un peu plus de 800 000 EUR, ce qui correspond au montant que
la SPMSC a mis en avant dans ses négociations avec le BRGM.
5.3.
LA RECHERCHE DE NOUVELLES CONDITIONS POUR RELANCER LA RENTABILITE DE
L
’
USINE
5.3.1.
Le changement de modèle économique
Au moment où la chambre a clôturé son contrôle, la société VNC a fait des déclarations publiques
annonçant le changement de son modèle économique. Une nouvelle stratégie a été présentée en
décembre 2019.
Deux changements majeurs de stratégie ont été annoncés.
Le premier changement concerne les produits fabriqués par l’usine. Il est prévu la cessation de la
production de l’oxyde de nickel ainsi que du carbonate de cobalt, entrainant la fermeture de la raffinerie
et des licenciements dont le chiffre n’est pas encore connu. L’usine devrait se concentrer sur le produit
intermédiaire NHC (Nickel hydroxyde cake).
Le second changement consiste dans le souhait de la société de se lancer dans l’exportation du minerai
saprolitique (d’une teneur en nickel de 1,8 % à 2 %), à hauteur de deux millions de tonnes par an, ce qui
posera le problème juridique de la levée de l’interdiction réglementaire d’exporter du minerai situé en
zone de réserve métallurgique, ce qui est le cas du minerai exploité par l’usine
57
.
5.3.2.
La reprise du site par de nouveaux repreneurs
Par ailleurs, le groupe VALE a annoncé souhaiter céder ses 95 % de parts dans VNC courant 2020. La
production étant orientée vers le marché des batteries de voitures électriques, des repreneurs intervenant
dans ce secteur seraient en négociation pour la reprise du site.
La chambre a interrogé les associés de la SPMSC afin de connaître les impacts que cette reprise pourrait
avoir sur leurs positions concernant le maintien de la participation de la SPMSC dans le capital de VNC,
la question étant de savoir si à la faveur de la reprise du site par de nouveaux investisseurs, les provinces
envisageaient une modification de la part que la SPMSC détient ou souhaiterait à terme détenir au sein
de VNC.
L’autre question concernait les attentes des associés au sein de la SPMSC concernant le ou les
repreneurs.
57
Le minerai des réserves métallurgiques est interdit à l’exportation (article R. 132-5). Trois réserves géographiques ont été
créées par arrêté du gouvernement le 23 février 2010 : le sud latéritique (Goro et Prony Pernod), le gisement de Tiebaghi, le
massif du Koniambo.
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Enfin, la chambre a souhaité connaître la position de la province Sud et de la province Nord, associées
au sein de la SPMSC (la province Sud y étant représenté de facto par PROMOSUD) concernant le
changement du modèle économique dans sa partie relative aux exportations de minerais.
Interrogée, la province Nord n’a pas répondu aux interrogations de la chambre.
La province Sud a indiqué à la chambre être favorable à l’autorisation d’exportation et à l’ouverture des
exportations de minerais issus de la réserve à condition de mettre en place une redevance à l’exportation
ou à l’extraction qui compense l’appauvrissement du sol et corresponde à ce qu’aurait rapporté
économiquement une transformation locale. S’agissant de la part de la SPMSC dans VNC, la province
Sud a apporté la réponse suivante : « nous négocions le maintien de la SPMSC dans le capital à la même
hauteur (10 %), l’apurement de la dette de SPMSC à VALE, l’apurement de la dette de SPMSC au BRGM,
la mise en place d’un système de « golden share » pour la province Sud sur des sujets comme
l’environnement ou l’emploi ».
REPONSES
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
66/72
REPONSE
DU
PRESIDENT
DE
LA
SPMSC
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RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
68/72
REPONSE
DU
PRESIDENT
DE
LA
PROVINCE
DES
ÎLES
LOYAUTE
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RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
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RAPPORT À FIN D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
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