LA DIRECTION
GÉNÉRALE
DES DOUANES
ET DROITS
INDIRECTS
Exercices 2013-2019
Un recentrage nécessaire
Rapport public thématique
Septembre 2020
La direction générale des douanes et des droits indirects - septembre 2020
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Sommaire
Procédures et méthodes
................................................................................
7
Délibéré
.........................................................................................................
11
Synthèse
........................................................................................................
13
Récapitulatif des recommandations
...........................................................
21
Introduction
..................................................................................................
23
Chapitre I Une administration polyvalente dotée
d’une organisation et de moyens spécifiques
.............................................
27
I -
Un champ d’interventions de la Douane élargi après l’instauration
du marché unique européen
...........................................................................
27
A - Trois missions principale
s,
héritées d’un équilibre déterminé en 1993
.........
28
B -
Une contribution de la Douane
à d’autres politiques publiques
.....................
33
C - Une administration douanière française singulière par rapport
aux douanes étrangères
.........................................................................................
35
II - Une organisation administrative construite selon plusieurs
logiques successives
.......................................................................................
37
A - Une administration centrale « tête de réseau »
...............................................
38
B - La création récente de nombreuses entités spécialisées
..................................
39
C - Un découpage territorial spécifique à la Douane
............................................
42
III -
D’importants moyens humains et matériels, des pouvoirs
juridiques étendus
..........................................................................................
44
A - Des effectifs et des dépenses de personnels en hausse depuis 2015
...............
44
B -
D’importants moyens matériels
......................................................................
46
C -
Des systèmes d’information en cours de modernisation
.................................
48
D -
Une large palette d’outils juridiques
propre à la Douane
...............................
49
Chapitre II Une adaptation engagée face à un contexte en forte
mutation
........................................................................................................
51
I -
D’importants efforts pour faciliter les opérations de dédouanement
des marchandises
...........................................................................................
51
A -
Les exigences liées à la mise en œuvre des réglementations
européennes
..........................................................................................................
52
B - Une intensification des activités
d’agrément et d’accompagnement
des opérateurs économiques
.................................................................................
52
C - La mise en place du dédouanement centralisé national pour faciliter
les formalités déclaratives
.....................................................................................
54
II - Le renforcement des missions de surveillance
.........................................
55
A - Une intensification des fraudes, des trafics et des menaces
............................
55
B - Un renforcement des moyens de lutte contre les trafics et les menaces
..........
57
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COUR DES COMPTES
4
III -
Des efforts d’amélioration
de la gestion de la fiscalité
..........................
60
A - Un besoin de modernisation de la gestion fiscale
...........................................
60
B - Des actions pour professionnaliser et améliorer la gestion de la fiscalité
.......
61
IV - La préparation des conséquences
attendues du
Brexit
...........................
65
A -
Une période d’incertitudes ouvert
e par le référendum britannique
de 2016
.................................................................................................................
65
B - Un fort engagement dans la préparation du
Brexit
..........................................
65
Chapitre III Une transformation freinée par des rigidités
de gestion et une démarche de performance insuffisante
.........................
71
I - Une gestion stratégique des ressources humaines à construire
..................
71
A - Un pilotage des effectifs en cours de structuration
.........................................
72
B - Des régimes dérogatoires à la fois complexes et coûteux
...............................
73
C - Mieux anticiper les besoins en effectifs et en compétences
............................
77
II -
D’importantes difficultés à piloter l’allocation et la gestion
des moyens
.....................................................................................................
79
A -
Des outils de suivi de l’activité et de pilotage à renforcer
..............................
80
B - Une amélioration de la gestion des matériels aéromaritimes à amplifier
........
83
III - Une insuffisante culture de la performance et du service
à
l’usager
........................................................................................................
86
A -
Des progrès en matière d’indicateurs de performance à conforter
..................
86
B - Une mesure de la satisfaction des usagers à rationaliser pour mieux
prendre en compte leurs attentes
...........................................................................
88
Chapitre IV Une transformation à approfondir par un recentrage
des missions de la Douane
...........................................................................
93
I - Un recentrage des missions à effectuer autour du contrôle des flux
de marchandises et de personnes
....................................................................
93
A - Un réseau à réorganiser selon une logique de flux en tenant compte
de la dématérialisation croissante des procédures
.................................................
94
B - Un redéploiement des moyens à effectuer en recherchant des synergies
avec d’autres administrations
................................................................................
97
C - Une transformation à inscrire dans le cadre du renforcement
des moyens douaniers de l’Union
.......................................................................
101
II - Mener une transformation de grande ampleur des missions fiscales
.....
105
A - Un transfert programmé des missions fiscales à pleinement mettre
en œuvre
.............................................................................................................
105
B - Des conséquences sur les missions fiscales à anticiper au-delà
de la fonction de recouvrement
...........................................................................
111
III -
Une compétence d’accompag
nement des filières économiques
à confier à d’autres acteurs
...........................................................................
113
A - Un transfert de la compétence vitivinicole à programmer
............................
114
B -
Une réflexion à engager sur l’accompagnement des débitants de tabac
.......
115
IV - Des documents stratégiques à élaborer
.................................................
117
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SOMMAIRE
5
Annexes
.......................................................................................................
121
Réponses des administrations et organismes concernés
.........................
141
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Procédures et méthodes
En application de l’article L. 143
-6 du code des juridictions
financières, la Cour des comptes publie chaque année un rapport public
annuel et des rapports publics thématiques.
Ces travaux et leurs suites
sont réalisés par l’une des six chambres
que comprend la Cour ou par une formation associant plusieurs chambres
et/ou plusieurs chambres régionales ou territoriales des comptes.
Trois principes fondamentaux gouvernent l’organisation et l’activité
de la Cour, ainsi que des chambres régionales et territoriales des comptes,
donc aussi bien l’exécution de leurs contrôles et enquêtes que l’élaboration
des rapports publics : l’indépendance, la contradiction et la collégialité.
L’
indépendance
institutionnelle des juridictions financières et
l’indépendance
statutaire de leurs membres garantissent que les contrôles
effectués et les conclusions tirées le sont en toute liberté d’appréciation.
La
contradiction
implique que toutes les constatations et
appréciations ressortant d’un contrôle ou d’une enquête, de même que
toutes les observations et recommandations formulées ensuite, sont
systématiquement soumises aux responsables des administrations ou
organismes concernés ; elles ne peuvent être rendu
es définitives qu’après
prise en compte des réponses reçues et, s’il y a lieu, après audition des
responsables concernés.
Si
l’on
excepte
les
rapports
demandés
par
le
Parlement
ou par le Gouvernement, l
a publication d’un rapport est nécessairement
précédée par la communication du projet de texte que la Cour se propose de
publier aux ministres et aux responsables des organismes concernés, ainsi
qu’aux autres personnes morales ou physiques directement intéressées.
Dans le rapport publié, leurs réponses accompagnent toujours le texte de la
Cour.
La
collégialité
intervient pour conclure les principales étapes des
procédures de contrôle et de publication. Tout contrôle ou enquête est confié
à un ou plusieurs rapporteurs. Leur rapport d’instruction, comme leurs
pr
ojets ultérieurs d’observations et de recommandations, provisoires et
définitives, sont examinés et délibérés de façon collégiale, par une
formation comprenant au moins trois magistrats. L’un des magistrats assure
le rôle de contre-rapporteur et veille à la qualité des contrôles.
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COUR DES COMPTES
8
Le présent contrôle a été conduit par la Première chambre et a porté
sur l’organisation et la gestion de la direction générale des douanes et droits
indirects, ainsi que les modalités d’exercice de ses missions
.
Il clôt un cycle
d’enquêtes
de la Cour portant sur les missions et
la gestion de la direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI),
notamment : les missions fiscales de la douane (2012-2014
1
et 2017-2018
2
), la
lutte contre la fraude et les trafics (2014-2015)
3
, la Masse des douanes (2014-
2016)
4
, la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières
(DNRED) (2014-2016), les dispositifs de soutien aux débitants de tabac (2016-
2017)
5
,
la
gestion
des
ressources
humaines
(2017-2018)
6
,
le service commun des laboratoires (2018-2019), les missions économiques de
la Douane (2018-2019)
, les systèmes d’information de la DGFiP et de la
DGDDI (2018-2019)
7
, la lutte contre la fraude aux prélèvements obligatoires
(2019)
8
, la lutte contre les contrefaçons (2019-2020)
9
.
1
Cour des comptes, « Les missions fiscales de la Douane : un rôle et une organisation
à repenser », in
Rapport public annuel 2014
, Tome I - volume 2, p. 37-64, La
Documentation française, février 2014, 417 p., disponible sur www.ccomptes.fr.
2
Cf. Cour des comptes, « Les missions fiscales de la Douane : des coûts trop élevés,
une modernisation et une simplification à mettre en œuvre
», in
Rapport public annuel
2018
,
tome
II,
février
2018,
La
Documentation
française,
disponible
sur
www.ccomptes.fr.
3
Cour des comptes,
L'action de la Douane dans la lutte contre les fraudes et trafics
,
communication au comité d’évaluation et de conrôle de l’Assemblée nationale,
janvier 2015, disponible sur www.ccomptes.fr.
4
Cf. Cour des comptes,
Le logement des douaniers par la « Masse des douanes »
,
référé, mai 2016, disponible sur www.ccomptes.fr.
5
Cf. Cour des comptes, « Le soutien aux débitants de tabac : supprimer les aides au
revenu, revoir les relations entre l'État et la profession »,
in
Rapport public annuel 2017
,
tome II, février 2017, La Documentation française, disponible sur www.ccomptes.fr.
6
Cf. Cour des comptes, « Disposer des personnels qualifiés pour réussir la
transformation numérique : l’exemple des ministères économiques et financiers
», in
Rapport public annuel 2020
, tome II, février 2020, La Documentation française,
disponible sur www.ccomptes.fr.
7
Cour des comptes,
Les systèmes d’information de la DGFiP et de la DGDDI
: investir
davantage, gérer autrement
, communication à la commission des finances de
l’Assemb
lée nationale, avril 2019, 133 p., disponible sur www.ccomptes.fr.
8
Cour des comptes,
La fraude aux prélèvements obligatoires
, rapport au Premier
ministre, p. 87-136, La Documentation française, novembre 2019, 201 p., disponible
sur www.ccomptes.fr.
9
Cour des comptes,
La lutte contre les contrefaçons : Une organisation et des outils
pour mieux protéger les consommateurs et les droits de propriété industrielle
,
communication au comité d’évaluation et de contrôle de l’
Assemblée nationale,
février 2020, disponible sur www.ccomptes.fr.
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PROCÉDURES ET MÉTHODES
9
De nombreux échanges ont eu lieu avec les principaux acteurs
concernés, tant au sein de la direction générale des douanes et droits
indirects
que des administrations du ministère de l’intérieur, de l’économie
et des finances, de l’action et de
s comptes publics.
Des déplacements ont été organisés dans le réseau territorial
douanier à Nantes, Metz, Blois, Tours, Marseille, Rouen et au Havre.
Dans le cadre de l’instruction et à des fins de parangonnage, il a
également été fait appel au réseau européen des institutions supérieures de
contrôle, à l’organisation mondiale des douanes et à l’agence européenne de
garde-frontières et de garde-côtes (Frontex).
L’enquête s’est
terminée en décembre 2019, soit avant la crise
sanitaire liée à
l’épidémie de
covid-19.
Le projet de rapport soumis pour adoption à la chambre du conseil a
été préparé puis délibéré le 27 mars 2020 par la Première chambre, présidée
par M. Charpy, président de chambre, et composée de MM. Gautier,
Courtois, Dov Zérah, Angermann et Courson, conseillers maîtres, ainsi que,
en tant que rapporteurs, Mme Thibault, conseillère maître, et M. Canivenc,
auditeur, et en tant que contre-rapporteur, M. Laboureix, conseiller maître.
Il a été examiné et approuvé, le 7 avril 2020, par le comité du rapport
public et des programmes de la Cour des comptes, composé de Mme Moati,
doyenne des présidents de chambre, M. Morin, président de chambre,
Mme Pappalardo, rapporteure générale, M. Andréani, M. Terrien,
Mme Podeur, M. Charpy, présidents de chambre, M. Barbé, président de
section, Mme Hirsch de Kersauson, Procureure générale, entendue en ses
avis.
Les rapports publics de la Cour des comptes sont accessibles en ligne
sur le site internet de la Cour et des chambres régionales et territoriales des
comptes : www.ccomptes.fr.
Ils sont diffusés par La Documentation Française.
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Délibéré
La Cour des comptes, délibérant en chambre du conseil en
formation ordinaire, a adopté le rapport intitulé
: La direction générale
des douanes et droits indirects
–
Exercices 2013-2019.
Elle a arrêté ses positions au vu du projet communiqué au
préalable au Premier ministre et de sa réponse adressée en retour à la
Cour. Des exemplaires du projet de rapport ont, par ailleurs, été
adressés, pour information, au ministre de
l’action et des comptes
publics, au
ministre de l’intérieur
ainsi qu’au
ministre de l'agriculture
et de l'alimentation.
La réponse sera publiée à la suite du rapport. Elle engage la seule
responsabilité de son auteur.
Ont participé au délibéré : M. Moscovici, Premier président,
Mme Moati, M. Morin, Mme Pappalardo, MM. Andréani, Terrien,
Mme Podeur, M. Charpy, présidents de chambre, MM. Barbé, Courtois,
Diricq,
Lefebvre,
Guédon,
Antoine,
Guéroult,
Mme Bouygard,
MM. Clément, Glimet, de Nicolay, Miller, Rolland, Chatelain, Fulachier,
Soubeyran, Appia, Mmes Latournarie-Willems, Hamayon, MM. Bouvard,
Bichot, conseillers maîtres, MM. Bouvier, Richier, conseillers maîtres en
service extraordinaire.
Ont été entendus :
-
en sa présentation, M. Charpy, président de la chambre chargée des
travaux sur lesquels les opinions de la Cour sont fondées et de la
préparation du rapport ;
-
en son rapport, Mme Pappalardo, rapporteure générale, rapporteure du
projet devant la chambre du conseil, assistée de Mme Thibault,
conseillère maître, de M. Canivenc, auditeur, rapporteurs, et de
M. Laboureix, conseiller maître, contre-rapporteur devant cette même
chambre ;
-
en
ses
conclusions,
sans
avoir
pris
part
au
délibéré,
Mme Hirsch de Kersauson, Procureure générale, accompagnée de
M. Gabriel Ferriol, avocat général.
M. Lefort secrétaire général, assurait le secrétariat de la chambre du
conseil.
Fait à la Cour, le 22 septembre 2020.
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Synthèse
La Douane, une administration polyvalente, en adaptation
continue pour tenir compte des évolutions du contexte
dans lequel s’inscrit l’exercice de ses missions
10
Rattachée au ministère de
l’économie, des finances et de la relance
,
la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) exerce trois
missions principales : la surveillance et la lutte contre la fraude et les
trafics, le soutien à l’activité économique, la perception de certains droits
et contributions indirectes
11
. Elle participe aussi à l’action de l’État en mer,
au contrôle des passagers aux frontières ext
érieures de l’Union
européenne
et à la gestion des flux migratoires. Elle est en outre compétente en matière
d’accompagnement des filières vitivinicoles
et du commerce de tabac.
Cette diversité de missions est issue d’un équilibre datant de la mise
en place du « marché unique » en 1993 et de la suppression des frontières
intérieures de l’Union, qui ont conduit à la contraction du réseau territorial
de garde-
frontières et, en sens inverse, à l’élargissement des missions
fiscales et à la participation croissante aux missions de sécurité intérieure.
La DGDDI est tenue de s’adapter aux nouvelles priorités d
e l
’action
publique et à l’évolution du contexte national et international. L’ensemble
des métiers douaniers est concerné par cet impératif de modernisation.
Elle a dû ainsi mettre en œuvre le nouveau code des douanes de
l’Union, adopté en mai 2016, qui modifie en profondeur les procédures de
dédouanement et d’accompagnement des opérateurs économiques.
Désormais, les opérations de dédouanement sont très majoritairement
dématérialisées et l
es opérateurs peuvent choisir le point d’entrée de leurs
marchandises (bureau de présentation) sur le territoire de l’Union tout en
ayant effectué leurs formalités déclaratives à un autre point (bureau de
déclaration). Par ailleurs, ces entreprises sont fortement incitées à
demander
le label d’opérateur économique agréé (OEA), qui permet de
réduire les contrôles dont leurs marchandises font l’objet. Cet agrément est
reconnu par toutes les douanes des pays de l’Union.
10
La présente enquête porte sur les exercices 2013-
2019. Elle s’est terminée en
décembre 2019, soit avant la crise sanitaire liée à l’épidémie de covi
d-19.
11
La Douane perçoit chaque année environ 28 % des rec
ettes fiscales nettes de l’État
.
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COUR DES COMPTES
14
Ces
nouvelles
réglementations,
qui
vont
dans
le
sens
de
l’approfondissement du marché intérieur et de la facilitation des échanges au
sein de l’Union, conduisent les services douaniers à adapter leur organisation
pour mieux répondre aux attentes des opérateurs. Cette situation peut créer une
forme de concurrence entre douanes nationales, les entreprises pouvant
réorienter le traitement des flux commerciaux et les chaînes logistiques qui y
sont associées vers d’autres pays de l’Union en cas d’insatisfaction.
Parallèlement, à compter de 2015, la Douane a réorganisé son action
en matière de surveillance pour adapter ses missions « traditionnelles » au
haut niveau de menace et accélérer la montée en puissance de ses activités
de renseignement. Dans le cadre des plans de lutte antiterroriste, elle a
bénéficié d’un abondement de plus de
1 000 emplois, du renouvellement
d’équipements et du renforcement de ses moyens juridiques d’action.
Devant la nécessité de moderniser la gestion fiscale et à la suite des
observations constantes de la Cour depuis de nombreuses années, la DGDDI
s’est attachée à simplifier la fiscalité dont elle a la charge et à rationaliser son
réseau comptable en lien avec celui de la direction générale des finances
publiques (DGFiP). La Douane a ainsi engagé à partir de 2017 un
mouvement de spécialisation et de professionnalisation de la gestion fiscale.
Par ailleurs, 11 taxes « à faible rendement » gérées par la DGDDI ont été
supprimées depuis 2013 et l’autoliquidation de la TVA à l’importation
est
autorisée depuis le 1
er
janvier 2015, pour simplifier les procédures fiscales
des entreprises.
Enfin, depuis que le Royaume-Uni a engagé la procédure de retrait de
l’Union européenne
(Brexit)
, la Douane a cherché à anticiper les
conséquences possibles de la restauration des contrôles migratoires et de
règles à l’importation, à l’exportation et à la circulation des marchandises
tierces sur le territoire douanier de l’Union. Cette préparation lui a permis
d’obtenir un abondement de 700
équivalents temps plein (ETP) sur trois ans,
a donné lieu à des investissements pour construire un système d’information
spécifique et a conduit à renforcer les implantations immobilières, dans les
départements du Nord et du Pas-de-Calais notamment.
Une administrations dotée d’une
organisation
et de moyens spécifiques
Si aucun modèle d’organisation douanière ne se dégage
dans les
pays développés, la situation française, qui se caractérise par le cumul des
missions de dédouanement et des missions économiques, fiscales et de
sécurité intérieure, apparaît singulière. En particulier, la Douane française
se démarque d’autres organisations douanières comparables par l’ampleur
de ses attributions fiscales.
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SYNTHÈSE
15
Pour mener ces missions variées, la Douane mobilise plus de
17 000 agents, princip
alement déployés au sein d’un réseau territorial
composé de 674
implantations. L’administration centrale assure le pilotage
de ce réseau. Dotée d’environ
690 agents en 2019, son organigramme a été
revu au 1
er
octobre 2018 pour s’adapter aux évolutions des
missions en
cours. À cet égard, la Douane a fait le choix de créer un grand nombre
d’entités spécialisées, notamment sous la forme de services à compétence
nationale, qui se démarquent de la ligne hiérarchique traditionnelle et
disposent d’une certaine aut
onomie de gestion.
Le découpage territorial de son réseau lui est spécifique et se
distingue de celui des autres services
de l’État
. Avec, en 2019,
12 directions interrégionales, 42 directions régionales, 150 bureaux de
douane, 244 brigades de surveillance et 51 services de contributions
indirectes, le maillage territorial est dense et résulte de la diversité des
missions exercées.
Les importants moyens matériels que la Douane déploie, notamment
en matière de surveillance aéromaritime, contribuent à cette polyvalence
de métiers. Elle dispose, par ailleurs, de pouvoirs juridiques à la fois
administratifs et judicaires qui en font une administration spécifique.
La Douane a
bénéficié d’arbitrages financiers favorables. Ainsi,
sous le double effet des recrutements accordés dans le cadre des plans de
lutte antiterroriste et de l’anticipation du
Brexit
, les effectifs de la DGDDI
ont augmenté de 4,6 % entre 2015 et 2019. Au sein des ministères
financiers, cette hausse se distingue nettement de la réduction du nombre
d’emplois menée par la DGFiP (
- 7,4
%). L’ampleur des recrutements
ramène les effectifs de la DGDDI à leur niveau de 2013, effaçant les
réductions d’emplois décidées antérieurement.
Une transformation freinée par des rigidités de gestion
et une insuffisante démarche de performance
En matière de ressources humaines, la sédimentation de régimes
dérogatoires complexes et coûteux constitue un obstacle à la mobilité des
agents et au développement des compétences. Les marges de manœuvre
pour faire évoluer les effectifs et assurer une bonne adaptation des profils
aux postes sont fortement contraintes. Il en résulte des taux de vacance
élevés et des décalages persistants entre les organigrammes affichés et les
besoins du service. Ce constat a conduit la DGDDI à adopter fin 2019 un
plan d’action pluriannuel, qui
doit permettre la diminution du nombre
d’indemnités et leur modernisation et à établir, début 2020, des lignes
directrices de gestion relatives à la mobilité, qui visent notamment à tenir
davantage compte des profils des agents dans les recrutements. La Cour
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COUR DES COMPTES
16
préconise de poursuivre cette démarche en simplifiant les régimes
statutaires et indemnitaires dérogatoires et en réduisant leur nombre pour
favoriser la mobilité fonctionnelle des douaniers.
De plus,
les modalités de logement des agents mises en œuvre par
l’établissement public de la « Masse des douanes » demeurent marquées
par une série d’insuffisances, déjà relevées par la Cour en 2016
12
. L’accès
à un parc de logements devrait pourtant permettre de réduire les difficultés
rencontrées par les agents affectés dans certaines directions régionales,
notamment en Île-de-
France, et constituer un levier d’adaptation de son
organisation et de son réseau. La Cour recommande donc de mettre en
place une nouvelle
politique d’aide au logement des douaniers qui facilite
leur mobilité géographique.
Alors que la Douane propose une grande diversité de métiers et de
carrières et que cet éventail est amené à se transformer sous l’effet des
mutations qu’elle connaît, les
agents sont peu mobiles et la démarche de
gestion prévisionnelle des effectifs, des emplois et des compétences
(GPEEC) demeure nettement insuffisante. Plusieurs métiers connaissent
un écart croissant entre les postes ouverts et les profils disponibles, en
particulier dans le domaine des systèmes d’information. Afin de favoriser
une plus grande fluidité des parcours professionnels et d’accompagner la
stratégie de modernisation, la Cour recommande donc de construire une
GPEEC prenant en compte l’évolution att
endue des missions de la Douane.
L’adaptation de la DGDDI à son environnement est aussi ralentie
par la faiblesse des outils lui permettant d’allouer ses ressources de manière
rationnelle. L’absence d’effectifs de référence fiabilisés et son incapacité à
calculer le coût complet de chacune de ses missions l’empêchent de gérer
ses moyens de manière satisfaisante. De plus, le manque de fiabilité de ses
outils de suivi de l’activité et une réticence réelle à s’en donner les moyens
l’empêchent de se comparer avec les autres douanes de l’Union.
Or, dans le cadre de la montée en charge de
l’
Agence européenne de
garde frontières et de gardes-côtes (Frontex), les difficultés que la Douane
rencontre pour documenter le coût de ses trois grandes missions et pour se
comparer aux autres douanes européennes pourraient entraîner une absence de
droit au remboursement de la France pour ses mises à disposition auprès de
l’Agence
. La DGDDI doit profiter des mois qui viennent pour travailler, en
lien avec la direction du budget, à
disposer des éléments d’analyse de son
activité lui permettant de bénéficier de ces remboursements.
12
Cour des comptes,
Le logement des douaniers par la « Masse des douanes »
, référé,
mai 2016, disponible sur www.ccomptes.fr.
La direction générale des douanes et des droits indirects - septembre 2020
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SYNTHÈSE
17
La Cour recommande donc à la Douane de se doter des outils
permettant une allocation rationnelle des moyens par mission et par
service, ainsi que d’élaborer un suivi précis de son activité afin d’en
permettre un pilotage renforcé et une comparaison avec les autres douanes
européennes.
Par ailleurs, les dysfonctionnements relevés ces dernières années
dans la gestion des moyens aéromaritimes de la Douane ne sont que très
lentement corrigés. La disponibilité des moyens aériens, en dépit de
récentes améliorations,
demeure insuffisante pour la flotte d’hélicoptères
et préoccupante pour la flotte d’avions. La Cour attire l’attention sur la
nécessité
d’accroîtr
e
la
disponibilité
des
moyens
aéromaritimes,
notamment en accélérant la mutualisation de la maintenance des flottes
d’aéronefs et de bateaux.
Enfin, la Douane n’a pas mis en place d’outils de mesure de la
performance et, en raison de ses missions de contr
ôle et de sanction, n’a
développé que récemment une démarche de mesure du service rendu à
l’usager. En conséquence, aucun rapprochement n’est fait de manière
systématique entre les résultats obtenus et les moyens qui y sont consacrés
et les motifs d’insati
sfaction des utilisateurs demeurent au fil des ans. La
Cour recommande en conséquence d’améliorer la mesure de la
performance et de mieux tenir compte des motifs d’insatisfaction du public,
notamment pour renforcer la capacité à allouer ses ressources en fonction
des priorités.
Le nécessaire recentrage de la DGDDI sur son expertise
de contrôle des flux de marchandises et de personnes
pour faire face aux mutations à venir
Les évolutions observées ces dernières années dans l’environnement
douanier sont appel
ées à s’accélérer. Ces changements, d’une ampleur
inédite depuis 1993, doivent conduire la DGDDI à réexaminer son champ
d’expertise et
à poursuivre sa transformation.
Avec la massification du commerce international dans une
économie ouverte, la Douane devrait recentrer ses activités autour du
contrôle des flux de marchandises. Cette logique de flux est devenue
centrale avec notamment la montée en puissance des réglementations
communautaires, le développement de nouvelles formes de commerce,
dont
le
commerce
électronique,
qui
modifie
profondément
les
caractéristiques des flux de marchandises, l’intensification des flux de
passagers aux points de passage aux frontières et la pression migratoire aux
frontières de l’espace Schengen.
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COUR DES COMPTES
18
La Douane devrait ainsi se repenser comme une administration de
protection des frontières et de contrôle des flux. Elle devrait prévoir la
réorganisation de son réseau selon cette logique et en prenant en compte la
dématérialisation des procédures. Le redéploiement des moyens devrait,
par ailleurs, s’effectuer en s’inscrivant dans une recherche de synergies
avec d’autres administrations. À cet égard, la Cour recommande de
réexaminer avec la direction centrale de la police aux frontières le partage
des responsabilités sur les points de passage aux frontières.
Cette transformation s’inscrira
dans le cadre du renforcement des
moyens douaniers de l’Union. En particulier
,
la création d’un corps
européen de garde-frontières et de garde-côtes, prévue par un règlement
européen de novembre 2019, doté de moyens renforcés, doit conduire la
DGDDI à anticiper les conséquences de la montée en charge des missions
confiées à Frontex et à identifier sans retard les moyens nécessaires et les
méthodes de travail à mettre en place.
Le mouvement d’unifica
tion de la fonction de recouvrement de la
fiscalité, initié par la loi de finances pour 2019 et prolongé par l’article
184
de la loi de finances pour 2020, impliquera le transfert de fonctions fiscales
de la Douane à la DGFiP. D’ici 2024, tout ou partie de
la gestion de 11 des
14 contributions indirectes actuellement gérées par la Douane sera
transférée. Une fois les transferts de mission prévus par les lois financières
mis en œuvre, la fiscalité recouvrée par la DGDDI à l’horizon 2024 ne
représentera que d
e l’ordre du tiers des sommes collectées en 2019.
Cet important chantier impliquera à la fois de poursuivre
l’adaptation de la gestion fiscale préalablement aux transferts et de préparer
parallèlement les profondes transformations de l’organisation de la
Douane, son réseau comptable douanier étant en premier lieu concerné.
La Cour recommande ainsi de mettre en œuvre le transfert du
recouvrement de nombreuses taxes prévu par la loi de finances pour 2020
dans les délais indiqués
et d’en
tirer les conséquences nécessaires en termes
d’effectifs et d’implantations territoriales. À l’exception des droits de
douane, de la TICPE et de la TVA à l’importation applicable aux personnes
non assujetties, dont la gestion, le recouvrement et le contrôle présentent
des particularités qui justifient pleinement leur maintien à la Douane, la
Cour considère également nécessaire d’examiner, dispositif fiscal par
dispositif fiscal, si le transfert des fonctions de recouvrement doit
s’accompagner du transfert des fonctions d’assie
tte et de contrôle.
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SYNTHÈSE
19
Par ailleurs,
la Cour recommande d’établir une stratégie de
valorisation et d’intégration des données douanières commune avec la
DGFiP. En effet, la mise en commun des données et de leur exploitation
avec cette administration permettrait à la fois de faire émerger des
ensembles de données plus volumineux et de faciliter le recrutement du
personnel compétent pour leur traitement.
Elle serait d’autant plus utile
pour la DGDDI que la contraction du champ de ses missions fiscales, au
fur et à mesure du transfert de taxes à la DGFiP, va limiter ses capacités à
accéder et exploiter un ensemble riche et étendu de données.
Les transformations profondes induites par le transfert progressif
des missions fiscales de la Douane fournissent l’occasi
on de réévaluer le
champ d’intervention de la DGDDI. Elles conduisent à envisager un
recentrage
de
ses
missions
par
le
transfert
des
compétences
d’accompagnement des filières économiques. Dans le prolongement de ses
observations formulées en 2014, la Cour recommande que les attributions
vitivinicoles de la Douane soient confiées pour partie au ministère de
l’agriculture, qui dispose aussi d’un réseau territorial, et pour partie aux
organismes professionnels. Elle invite également à un réexamen des
modalités
d’organisation de la vente au détail du tabac, sans tabou sur le
statut de préposé des Douanes et leur monopole de vente du tabac, et dans
un objectif d’efficience et de plus grande cohérence des politiques
publiques.
Dans
un
contexte
marqué
par
la
forte
dynamique
de
dématérialisation des procédures et de mise en concurrence des différentes
douanes de l’Union, cette démarche de transformation
doit permettre à la
Douane de mieux répondre aux attentes des opérateurs économiques et à
l’évolution des menaces.
En recentrant ses activités douanières sur un cœur
de métier à fort enjeu, la DGDDI serait ainsi en mesure de renouveler ses
modalités d’exercice
et de renforcer sa place dans l’action administrative
nationale et européenne
. Par ces efforts d’adaptation,
elle contribuerait à ce
que les opérateurs continuent à localiser en France le traitement des flux de
marchandises et les chaînes logistiques qui y sont associées.
L’ensemble de ces transformations rend nécessaire l’élaboration
d’un plan stratégique fixant l’évolution et les modalités d’exercice des
missions de la Douane et comprenant un schéma d’adaptation du réseau
territorial. Ce plan devra être prolongé par
l’établissement d’ici la fin 2020
d’un contrat de performance
de la DGDDI en cohérence avec le projet
stratégique.
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Récapitulatif des recommandations
Recommandations relatives à la gestion des ressources humaines
1.
Simplifier les régimes statutaires et indemnitaires dérogatoires et en
réduire le nombre pour favoriser la mobilité fonctionnelle des
douaniers (
DGDDI
).
2.
Mettre en place une nouvelle politique d’aide au logement des
douaniers, qui facilite leur mobilité géographique (
DGDDI
).
3.
Construire une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences
prenant en compte l’évolution attendue des missi
ons de la Douane
(
DGDDI
).
Recommandations relatives à la gestion des moyens et à la performance
4.
Se doter des outils permettant une meilleure adéquation entre les
moyens et les missions des services
, notamment d’un
indicateur
pertinent pour répartir les emplois entre les services territoriaux
(
DGDDI
).
5.
Élaborer un suivi précis de l’activité de la Douane afin d’en permettre
un pilotage renforcé et une comparaison avec les autres douanes
européennes (
DGDDI
).
6.
Accroître la disponibilité des moyens aéromaritimes, notamment en
accélérant la mutualisation de la maintenance des flottes d’aéronefs et
de bateaux (
DGDDI
).
Recommandations relatives
à l’évolution et au recentrage des missions
7.
Réexaminer avec la direction centrale de la police aux frontières le
partage des responsabilités sur les points de passage aux frontières
(
DGDDI, DCPAF
).
8.
Dans le cadre de la montée en charge des missions confiées à Frontex,
identifier les moyens nécessaires et les méthodes de travail à mettre en
place (
DGDDI, SG Mer
).
9.
Mettre en œuvre
le transfert du recouvrement dans les délais fixés et
en déduire les conséquences nécessaires en termes d’effectifs et
d’implantations territoriales
(
DGDDI
).
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COUR DES COMPTES
22
10.
Préciser, dispositif fiscal par dispositif fiscal, si le transfert des
fonctions de recouvrement v
ers la DGFiP doit s’accompagner du
transfert des fonctions d’assiette et de contrôle
(
DGDDI, DGFiP
).
11.
Mettre en place une valorisation des données mutualisée entre la
DGFiP et la DGDDI (
DGDDI, DGFiP
).
12.
Organiser le transfert au ministère de l’agriculture et
aux organismes
professionnels concernés du suivi économique de la filière vitivinicole
(
DGDDI, DGAL
).
13.
Élaborer un plan stratégique fondé sur une revue des missions de la
Douane et le traduire d’ici fin 2020 dans un contrat de performance
fixant les object
ifs, les moyens et un schéma d’adaptation du réseau
territorial de la DGDDI (
DGDDI
).
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Introduction
Depuis que l’expression «
douanes nationales » est entrée dans le
vocabulaire administratif français en 1790, l’action de la Douane n’a cessé
d’évoluer auto
ur du contrôle des marchandises et des personnes, de la lutte
contre la fraude et de la collecte des taxes. Avec constance, elle a été
chargée de s’adapter à des évolutions qui lui
étaient extérieures (guerres et
crises, évolution de la conjoncture économi
que, etc.), l’autorité politique
lui assignant des priorités variables au cours du temps.
Cette polyvalence distingue la Douane par rapport à d’autres
administrations. Elle est aussi à l’origine du statut singulier de ses agents
qui s’est unifié au cours d
u temps tout en conservant une
summa divisio
historique, héritée de la Ferme Générale, entre les douaniers armés et en
uniforme (la branche surveillance) et ceux qui ne le sont pas (la branche
« opérations commerciales et administration générale »).
Au cours du XIX
e
siècle et de la majeure partie du XX
e
siècle,
l’activité de la Douane était caractérisée par la lutte contre les fraudeurs et
la contrebande (notamment du tabac et de l’alcool), ce que les agents des
douanes appellent la « vieille douane », dans un contexte de moindre
ouverture des marchés jusqu’à l’entrée de la France dans le marché
commun européen.
Les différentes étapes de
la construction européenne ont
profondément bouleversé l'activité des services douaniers des pays de
l’Union européenne. A
vec la mise en place du « marché unique » en 1993
et la suppression des frontières intérieures de l’Union, la mise en œuvre du
libre-échange a nécessité une profonde refonte de cette administration.
Deux ans après le bicentenaire de la direction générale des douanes
françaises, l'activité structurante de dédouanement et de surveillance aux
frontières a été très substantiellement modifiée.
En effet, depuis le 1
er
janvier 1993, le principe de la libre circulation
des marchandises, des capitaux et des services prévaut à l'intérieur de
l
’Union
européenne. Même si cela ne signifie pas pour autant que les flux
de marchandises soient affranchis de tout contrôle, la Douane a dû
profondément changer ses pratiques professionnelles. La libre circulation
des personnes
n’implique pas non plus une absence de contrôles
,
notamment dans le cadre des missions de sûreté du territoire et de lutte
contre les fraudes et trafics, et elle a pour corollaire une vigilance renforcée
aux frontières de l’Union pour gérer les flux migrat
oires.
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COUR DES COMPTES
24
La mise en place du marché intérieur en 1993 s’est traduite pour la
Douane à la fois par un net resserrement de son réseau territorial et par la
recherche de missions nouvelles, impliquant notamment une nouvelle
répartition des compétences entre les administrations des finances. La
gestion
de
l’ensemble
des
contributions
indirectes,
qui
relevait
précédemment de la direction générale des impôts, a ainsi été confiée à la
Douane qui assurait déjà notamment le recouvrement et le contrôle de la
fiscalité assise sur les produits pétroliers.
Parallèlement, la direction générale des douanes et droits indirects
(DGDDI) est intervenue de manière croissante dans les missions de
sécurité
intérieure,
en
s’associant
notamment
aux
dispositifs
départementaux de coordination interministérielle dans le domaine de la
sécurité tels que les groupements d’intervention régionaux. À compter de
1995, la Douane s’est vu également confier de nouvelles attributions en
matière de contrôle de l’immigration aux frontières extérieur
es.
Malgré une période de doute sur son identité et son devenir, la
Douane française s’est ainsi adaptée aux évolutions de son environnement
en transformant son organisation, ses missions et les modalités de leur
exercice.
La singularité de la DGDDI résulte de cette évolution historique.
Elle présente la particularité d’être administrativement rattachée au
ministère chargé du budget, y compris pour des missions dont la nature
pourrait être rapprochée de celles exercées par des services relevant
d
’autres
ministères (intérieur pour la surveillance, agriculture pour le suivi
de certaines filières économiques, économie pour certains contrôles de
marchandises).
A
ujourd’hui dotée de
plus de 17 000 agents, elle participe
activement à l’exercice de trois types de
missions : la régulation des flux
de marchandises et la perception des droits de douane, qui la conduisent à
accompagner les entreprises dans leurs opérations commerciales ; la
surveillance, avec une contribution croissante à la lutte contre la fraude et
les trafics ; la perception de certains droits et impôts indirects, dont le
champ a été élargi en 1993. Elle contribue aussi à l’exercice d’autres
missions en partenariat avec d’autres administrations
, notamment la
politique migratoire, la lutte contre le
terrorisme, l’action de l’État en mer
ou encore l’accompagnement de la filière économique vitivinicole et les
débitants de tabac.
Dans un contexte fortement évolutif, l'administration douanière est
confrontée à une ancienne mais difficile recherche d'un équilibre entre
facilitation des échanges et garantie de la sécurité publique.
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INTRODUCTION
25
Les modalités de gestion des flux de marchandises dans une
économie mondialisée et dans un cadre communautaire de plus en plus
intégré la conduisent à être dans une logique const
ante d’adaptation et de
réforme.
En effet, le commerce mondial s’est fortement développé au cours
des trois dernières décennies. La valeur des exportations mondiales de
marchandises est ainsi passée de 2 000 Md$ en 1980 à 19 640 Md$ en
2018, connaissant une croissance de 7,1 % par an
13
. Les volumes échangés
ont été multipliés par quatre au cours de cette période. De plus, la montée
en puissance du commerce électronique a fortement modifié les modalités
de contrôle des flux de marchandises. En effet, le commerce électronique
mondial a représenté au total 27 700 Md$ en 2016, contre 19 300 Md$ en
2012. En 2019, il représentait 8,7 % du total des ventes de détail dans le
monde,
contre
7,4 %
un
an
auparavant.
Enfin,
les
modes
d’accompagnement des entreprises, nota
mment lors de leurs opérations de
dédouanement, ont substantiellement évolué depuis 2016 avec l’adoption
du code douanier de l’Union.
De même, l’exercice de la mission de surveillance a été
profondément modifié, notamment depuis 2015, pour tenir compte de
l’évolution des menaces.
Dans le même temps, elle doit tirer les conséquences de réformes
nationales en cours en matière de transfert de fiscalité et se préparer à la
sortie de l’Union du
Royaume-Uni, qui aura pour effet de recréer en
Manche-Mer du Nord une frontière douanière extérieure.
Dans ce cadre complexe et en forte mutation
14
, la Douane a mis en
place une organisation spécifique autour de trois métiers principaux (I).
Elle a engagé son adaptation pour répondre à des enjeux multiples et
renouvelés (II). Les changements en cours se heurtent toutefois à des freins
persistants (III). Elle doit approfondir sa transformation pour un exercice
renouvelé de ses missions (IV).
13
Il est ici question des flux de marchandises. Pour mémoire, les États-Unis, le
Royaume-
Uni, l’Allemagne et la France ont été les quatre principaux exportateurs de
services dans le monde.
14
La présente enquête porte sur les exercices 2013-
2019. Elle s’e
st terminée en
décembre 2019
(dépôt du rapport d’instruction)
, soit avant la crise sanitaire liée à
l’épidémie de covid
-19.
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Chapitre I
Une administration polyvalente dotée
d’une
organisation
et de moyens spécifiques
L'originalité de l’activité de la Douane réside dans sa polyvalence et
tient également aux particularités des réglementations qu'elle applique et
des pouvoirs qu'elle met en œuvre. Les actions menées par la Douane
française portent sur un champ d’interven
tions
élargi depuis l’instauration
du marché unique européen (I). Son organisation
administrative s’est
construite selon plusieurs logiques successives (II). Pour exercer ses
missions, elle
est dotée d’importants moyens humains, matériels et
juridiques spécifiques (III).
I -
Un champ d
’interventions de la Douane
élargi après l’instauration du marché
unique européen
Le rôle de la Douane s’organise autour de trois grands métiers et
d’un équilibre des missions déterminé en 1993 (
A). Au-delà de ces
principaux métiers, la Douane française contribue à de nombreuses
politiques publiques (B). Elle occupe ainsi une place singulière par rapport
aux autres doua
nes de l’Union européenne (C
).
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COUR DES COMPTES
28
A -
Trois missions principales,
héritées d’un équilibre déterminé en 1993
1 -
Une compétence ancienne de régulation des flux
de marchandises et de perception des droits de douane
Sur la base des règles fixées pour le commerce international, la
Douane contrôle les flux commerciaux avec trois objectifs : la fluidité, la
sécurité et la qualité.
En 2020,
3 280 ETP
15
sont affectés à la « promotion des échanges
et la qualité du dédouanement »
. Toutefois, cette donnée reste indicative.
Tous les douaniers, quel que soit leur statut, sont amenés à participer à la
régulation des flux commerciaux car cette activité induit des perceptions
de droits et taxes et peut être à l’origine d’une fraude qui sera traitée par le
personnel dit de « surveillance » de la Douane.
La déclaration en douane
16
est au cœur de la procédure.
Les données
de cette déclaration sont exploitées pour la liquidation des droits et taxes,
l’établissement des statistiques du commerce international et la réalisation
de contrôles ciblés. Sur le fondement de cette déclaration, la Douane
accorde,
ou
pas,
la
mainlevée
17
des
marchandises,
c’est
-à-dire
l’autorisation pour le déclarant d’en disposer librement.
Le nombre de déclarations en douane traitées en 2019
s’
est élevé à
34,2 millions, en hausse de 52 % depuis 2012, essentiellement en raison de
l’augmentation des importations (fret traditionnel
et fret express). Cette
augmentation est en lien avec celle des flux du commerce international, en
forte croissance et en mutation. La digitalisation croissante des flux, qui se
concentre sur quelques plateformes multimodales
18
, est une autre évolution
majeure des dernières années. Le commerce électronique mondial a
représenté au total 27 700 Md$ en 2016, contre 19 300 Md$ en 2012
19
. Il
représente 8,7 % du total des ventes de détail dans le monde, contre 7,4 %
un an auparavant.
15
Source : projet annuel de performance 2020 du programme 302.
16
Acte juridique par lequel une personne manifeste son intention d’at
tribuer un régime
douanier à une marchandise qu’elle importe ou exporte.
17
Acte par lequel les autorités douanières mettent à disposition une marchandise aux
fins prévues par le régime douanier sous lequel elle est placée.
18
Ainsi 57 % du transit mondial aérien passe par moins de 30 plateformes de
correspondance (« hubs »).
19
Source : Commission du commerce international des États-Unis.
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UNE ADMINISTRATION POLYV
ALENTE DOTÉE D’UNE
ORGANISATION
ET DE MOYENS SPÉCIFIQUES
29
Cette augmentation continue des échanges commerciaux observée
depuis une décennie a été très nettement interrompue début 2020, sous
l’effet
de la crise sanitaire et économique qui a touché la France et
l’ensemble de ses
partenaires commerciaux.
L
’action de l
a Douane face à la crise sanitaire
au premier semestre 2020
Dans le contexte des mesures de restriction de déplacement et
d’activité, la Douane a diffusé
dès le mois de mars 2020 des informations à
destination des particuliers et des entreprises pour les orienter dans les
démarches douanières. En particulier, des fiches détaillées ont été élaborées
afin de présenter les
modalités d’importation en franchise de droits et taxes
de matériel sanitaire,
ainsi que les procédures d’importation d’équipements
de protection individuelle. Parallèlement, la Douane a été particulièrement
sollicitée pour s’assurer
du respect des normes applicables aux produits de
santé et de protection importés des pays tiers, notamment en provenance de
Chine.
Les mesures de restriction des déplacements ont par ailleurs conduit
la Douane à adapter ses méthodes de travail, notamment en privilégiant,
dans la mesure du possible, le télétravail. Au terme du premier semestre
2020, la Douane a ouvert des travaux visant à tirer de cette expérience des
enseignements
sur l’ad
aptation des procédures et la poursuite de leur
dématérialisation.
Ces travaux doivent aboutir à l’automne 2020.
Quelles que soient les perspectives, encore incertaines, de reprise du
commerce international, le choix par les opérateurs des pays par lesquels
ils font entrer leurs marchandises sur le territoire de l’Union a
d’importantes conséquences économiques
, notamment en matière de
chaînes logistiques. Cette situation crée une forme de concurrence entre
services douaniers au sein de l’Union. La France a
affiché sa volonté,
notamment dans son plan « dédouanez en France » présenté en 2015, de
placer ces échanges commerciaux au cœur de ses priorités afin d’inciter les
opérateurs à dédouaner en France.
Dans un cadre juridique européen, notamment a
vec l’adopti
on du
code douanier de l’Union en 2016, succédant au code des douanes
communautaire (cf. annexe n° 1), la Douane délivre aux entreprises le label
« opérateur économique agréé » (OEA) créé en 2008.
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COUR DES COMPTES
30
Les principaux avantages liés au statut
d’opérateur écono
mique agréé (OEA)
Fin 2019, 1 763 entreprises avaient été labellisées OEA par la
Douane. Ce statut permet à toute entreprise exerçant une activité liée au
commerce international d’acquérir une certification de qualité sur les
processus douaniers et de sûre
té qu’elle met en œuvre. Délivré par chaque
douane nationale, il est reconnu dans l’Union et dans les pays signataires
d’accords de reconnaissance mutuelle
. I
l permet à l’entreprise qui le détient
de bénéficier d’avantages particuliers tels que le traiteme
nt prioritaire des
déclarations et l’allègement de la charge de contrôles sur les flux.
Les
entreprises
labellisés
OEA
bénéficient
d’un
ensemble
d’avantages en amont, en cours et en aval des contrôles douaniers.
L’opérateur reçoit une notification préalablement à la réalisation d’un
contrôle. Les contrôles physiques et documentaires sont allégés de 65 % à
95 % et l’opérateur peut choisir le lieu du contrôle. En cas d’analyse des
échantillons, le traitement est conduit de manière prioritaire.
En complément de la labellisation OEA, la Douane a développé une
activité de conseil personnalisé aux entreprises qui en font la demande. À
ce titre, 2 513 entreprises avaient bénéficié de ces conseils fin 2019.
2 -
Une implication croissante dans la lutte contre
les fraudes et les trafics
La Douane est mobilisée dans la lutte contre plusieurs types de
menaces : les trafics ; le terrorisme et le financement des activités
criminelles ; les menaces environnementales et sanitaires. Elle contribue
ainsi à la protection du consommateur, des patrimoines culturels et
naturels.
En 2020, 7 450 ETP
20
sont affectés à la surveillance douanière
des flux de personnes et de marchandises et à la lutte contre les trafics
.
Comme elle est informée de tous les flux de marchandises déclarées
qui entrent et sortent du territoire national, son rôle en matière de fraudes
ne se limite pas aux seuls trafics de matières illicites. En effet, la fraude
peut être notamment constituée par la souscription d'une fausse déclaration
portant sur l’origine, l’e
spèce ou la valeur. La fraude peut encore consister
à faire entrer sur le territoire européen des marchandises licites mais non
conformes aux normes.
20
Projet annuel de performance pour 2020.
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UNE ADMINISTRATION POLYV
ALENTE DOTÉE D’UNE
ORGANISATION
ET DE MOYENS SPÉCIFIQUES
31
Cet ensemble d’actions a conduit la Douane à saisir
, en 2019, 87,6
M€
d’avoirs criminels,
360,3 tonnes de tabac de contrebande, 1 021 armes à feu,
4,5
millions d’articles contrefaits,
123,1 tonnes de drogues. Elle a également
notifié des redressements dont les montants ont oscillé entre 268,5
M€ et
415,1
M€
depuis 2014,
pour s’établir à 280,9
M€ en 2019
.
La Douane participe aussi à la préservation de la sécurité et de
la sûreté de l’espace national et européen, 1
775 ETP étant affectés à
cette action
qui est montée en puissance à la suite des attentats de 2015.
En raiso
n de la nature même des fraudes et trafics qu’elle combat,
la Douane
doit entretenir des liens avec les autres services de l’État
concourant à cette lutte.
La coopération fonctionnelle de la Douane avec les autres services
des ministères économiques et fin
anciers (MEF), bien qu’
a priori
naturelle
en raison de la convergence des missions et de l
’
appartenance à un même
ministère, ne s’est en réalité développée que depuis quelques années
21
.
La Douane partage la police de la marchandise avec la direction
générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des
fraudes (DGCCRF)
22
et doit veiller avec elle,
ainsi qu’avec la direction
générale des entreprises (DGE), au respect de normes. La montée en
puissance de la contrefaçon les incite à travailler davantage ensemble
23
.
Enfin
, ses interventions en la matière s’effectue
nt en coopération
avec d’autres ministères (intérieur, agriculture), avec l’autorité judiciaire
,
les instances européennes et la communauté du renseignement.
L’intégration de la Douane
aux actions interministérielles et européennes
n’est pas toujours aisée mais des progrès ont été relevés (
cf.
infra
).
21
Par exemple, la Douane est intégrée dans la cellule de lutte contre la fraude à la TVA
pilotée par la direction générale des finances publiques (DGFiP).
22
Ces deux directions disposent d’un laboratoire commun depuis 2007.
23
Cf. Cour des comptes,
La lutte contre les contrefaçons : Une organisation et des
outils pour mieux protéger les consommateurs et les droits de propriété industrielle
,
communication au comité d’évaluation et de contrôle de l’Assemblée nationale,
février 2020, disponible sur www.ccomptes.fr.
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32
3 -
Un élargissement des missions fiscales en 1993
Au 1
er
janvier 1993, la Douane s
’est vu confier l’assiette, le contrôle,
le contentieux et le recouvrement des contributions indirectes et des
impositions sur les alcools, les tabacs et la viticulture, jusque-là assurés par
la direction générale des impôts (DGI). Dans le même temps, la DGI
devenait compétente pour collecter la TVA intracommunautaire.
En matière fiscale, la Douane perçoit chaque année environ 28 %
des recettes fiscales nettes de l’État et contribue, comme ses homologues
européens, au financement du budget
de l’Union
par la collecte des droits
de douane à l’importation
, pour un mon
tant annuel d’environ
2
Md€
24
.
D’après la loi de finances pour 2020,
1 708 ETP relèvent des missions
liées à la fiscalité douanière, énergétique et environnementale
.
À l’importation, la Douane affecte aux marchandises un
« régime
douanier », statut juridique acquis à l'issue de leur dédouanement qui prend
en compte leur destination (utilisation). Dans la plupart des cas, ce régime
douanier conduit à acquitter des droits de douane et de la TVA. À
l
’
exportation, les opérations de dédouanement permettent, dans la majorité
des cas, d
’ouvrir le droit à exonération de la TVA
.
La
DGDDI
gère
également
une
partie
de
la
fiscalité
environnementale, à titre principal la taxe intérieure de consommation sur
les produits énergétiques (TICPE), ainsi qu’un ensemble de contributions
indirectes, telles que les accises portant sur les tabacs et les alcools, et
divers droits notamment liés aux activités maritimes. Ces taxes ont
représenté un montant de 85,1
Md€ en 201
9 (voir annexe n° 2).
La Douane participe à la lutte contre la fraude relative à l’e
nsemble
de la fiscalité qu’elle gère et recouvre. Cette mission évolue, notamment
sous l’effet
du développement du commerce électronique.
24
Les droits de douane sont l'élément principal des ressources propres traditionnelles
de l’Union européenne : ils se sont élevés à 2
1,5
Md€
(14 % du budget de l'UE) en
2019.
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33
B -
Une contribution de la Douane
à d’autres politiques publiques
1 -
La participation au contrôle de passagers aux frontières
Le contrôle des points de passage frontaliers (PPF) est confié aux
deux corps de garde-frontières déclarés par la France à la Commission
européenne : la police aux frontières (PAF), relevant du ministère de
l’intérieur, et la DGDDI.
Une complémentarité a été instaurée entre ces deux
services pour le contrôle des personnes aux frontières extérieures
25
. Pour
exercer cette mission, la Douane a notamment accès au fichier dit PNR.
Le fichier «
Passenger name record
» (PNR)
Les données des dossiers passagers (PNR) sont des informations à
caractère personnel communiquées par les passagers, recueillies et
conservées par les transporteurs aériens, telles que le nom du passager, les
dates du voyage, l'itinéraire, le numéro du siège, etc.
En France, la loi du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le
terrorisme a contraint les compagnies ferroviaires, aériennes, maritimes à
transmettre les données PNR à la police et à la gendarmerie. Ces données
peuvent être comparées avec celles du fichier des personnes recherchées
(FPR) ainsi qu
’
avec le système d'information Schengen (SIS).
Depuis, une directive PNR du Conseil Européen en date du
21 avril 2016 a autorisé et réglementé le transfert de ces données aux
autorités répressives des États membres et leur traitement aux fins de la
prévention et de la détection d'infractions terroristes ou de formes graves de
criminalité ainsi que des enquêtes et des poursuites en la matière.
La Douane assure
aujourd’hui
, sur 75 points de passage frontaliers
(PPF) et neuf points de passage contrôlés outre-mer (PCO), le contrôle des
entrées et sorties des personnes aux frontières extérieures en plus de
l’application des réglementations dont
elle a la charge.
L’effectif
qui
participe
à cette mission n’est pas chiffré car aucun agent ne se co
nsacre
exclusivement à ces contrôles. Dans la réalité quotidienne, les contrôles ne
sont pas systématiques
26
car les services douaniers procèdent à des
arbitrages entre leur mission douanière et leur mission garde-frontières.
25
En application d
’une
circulaire interministérielle du 6 novembre 1995.
26
Cf. IGA, CGEDD, CGEFI ,
L’organisation du contrôle aux frontières et la révision
de la carte des points de passage frontaliers aériens
, décembre 2014.
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34
La carte des PPF, élaborée en 1995 sur la base du périmètre initial
de l’Espace Schengen et de l’implantation des services de la PAF et de la
Douane, a peu évolué jusqu’en 2011. En décembre 2011, 22
aérodromes,
placés sous le contrôle de la Douane, ont perdu leur qualification de PPF.
D
epuis 2012, la carte des PPF n’a évolué qu’à la marge
(cf. annexe n° 11).
2 -
L
’implication dans l’action de l’État en mer
La Douane, au même titre que d'autres administrations, participe à
l'action de l'État en mer (AEM). Ses actions concernent notamment la
police de la navigation, le contrôle des pêches, les missions de sauvetage,
la lutte contre la pollution. Cette mission de surveillance aéromaritime
s’inscrit dans le cad
re de coopérations européennes.
À
titre d’exemple, plus de 19 tonnes de cannabis et 11
tonnes de
cocaïne ont été saisies en 2018 à l’occasion d’opérations communes
menées par les douanes françaises et espagnoles (« Pascal Atlantique »).
De même, la Douane
intervient dans le cadre d’actions coordonnées par
l’Agence européenne
de garde-frontières et de garde-côtes (Frontex)
27
.
Sur 1 285 agents spécialisés de la branche surveillance, environ 760
exerçaient en 2019 leur activité dans le dispositif aéromaritime de la
Douane, dont 557 marins et 165 personnels aériens.
3 -
L’accompagnement des filières économiques
vitivinicoles et des tabacs
La Douane assure deux ensembles de missions dans le domaine
vitivinicole et cidricole : une mission fiscale, de gestion des impôts
indirects, portant notamment sur les boissons alcooliques, et une mission
économique, de suivi du potentiel de production et des quantités mises sur
le marché (gestion des parcelles, suivi des récoltes et des stocks).
Lors du transfert de ces missions en 1993 de la DGI vers la DGDDI,
les fonctionnaires chargés des contributions indirectes et des impositions
sur les alcools, les tabacs et la viticulture ont tous accepté de suivre la
mission et sont devenus douaniers. Ils ont été affectés à la branche
« administration générale/opérations commerciales » (AG/Opco) et aucun
27
Créée par le règlement du conseil n° 2007/2004 du 26 octobre 2004, sous la
désignation d’
Agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux
frontières extérieures (déjà abrégé en « Frontex »).
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35
d'entre eux n
’
est astreint au port de l'uniforme. En 2019,
129 équivalents
temps plein travaillé sont chargés du soutien aux débitants de tabac et
294 sont responsables du suivi de la filière vitivinicole
.
La vente au détail du tabac en France repose pour
l’essentiel sur un
réseau de 23 709 débits de tabac (fin 2019), dont les tenanciers sont des
préposés d
e l’administration de la Douane
. Le débitant de tabac, en
situation de monopole de vente au détail
28
, signe un contrat de gérance de
trois ans renouvelable
. L’État décide de
la part du produit de la vente du
tabac qui revient aux buralistes et prend à sa charge
une multitude d’aides
de soutien au revenu, d’accompagnement à la sécurisation d
es débits et
d’appui à la diversification de l’activité. Depuis 2004, l’ensemble des aides
sont retracées dans des «
contrats d’avenir »
ou des «
protocoles d’accord
»
signés par l’État et la Confédération des buralistes
.
C -
Une administration douanière française singulière
par rapport aux douanes étrangères
Dans le cadre de l’union douanière, les 2
7 États membres mettent en
œuvre une réglementation harmonisée en matière de dédouanement.
Toutefois, en application du principe de subsidiarité, les modalités
d’o
rganisation et les attributions des services douaniers varient sensiblement.
1 -
Une organisation française qui se distingue
par des attributions variées et étendues,
notamment en matière fiscale
L’organisation française de la Douane, qui assure tant des mis
sions
de dédouanement que des missions économiques, fiscales et de sécurité
intérieure, apparaît minoritaire
au sein de l’Union européenne
.
Une partie des missions assurées par la DGDDI est exercée par des
administrations distinctes de celles des douanes d
ans d’autres États
membres. En Italie, la compétence de police des marchandises est ainsi
scindée entre deux administrations du même ministère (la
Guardia di
Finanza
et l’
Agenzia delle dogane e dei monopoli
). Elle peut également
être disjointe des missions fiscales, comme au Royaume-Uni où
l’administration des
recettes et des douanes (
Her Majesty’s Revenue and
Customs
)
assure la fonction fiscale tandis qu’une agence (
Border Force
)
exerce les contrôles et les missions de surveillance.
28
Décret du 28 juillet 2010 relat
if à l’exercice du monopole de la vente au détail des
tabacs manufacturés.
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36
Par ailleurs, la Douan
e française se démarque par l’ampleur de ses
attributions fiscales par rapport aux autres organisations douanières
comparables (agence ou direction générale). La DGDDI perçoit ainsi 28 %
des recettes fiscales françaises, au deuxième rang après la Bulgarie (45 %),
loin devant l’Allemagne (18 %) et très loin devant l’Italie (4 %).
Les pouvoirs juridiques étendus distinguent également la DGDDI.
La
majorité
des
douanes
européennes
disposent
d’attributions
exclusivement administratives, les procédures judiciaires étant confiée à
des services de police spécialisés et non à un service douanier.
Néanmoins,
aucun modèle d’organisation ne se dégage parmi les
183 membres de l’Organisation mondiale des douanes
. Des missions
complémentaires incombent à certaines administrations douanières, telle
que la compétence de lutte contre le travail dissimulé en Allemagne
(
Bundeszollverwaltung
), ou la régulation du secteur des jeux publics en
Italie, confiée à
l’
agence en charge des douanes et des monopoles.
Au total, l’hétérogéné
ité des missions confiées aux douanes
nationales est reflétée par la structure administrative assurant les missions
de dédouanement. Seuls huit des 27 États membres
de l’Union européenne
,
dont la France, disposent d’une administration des douanes sous la f
orme
d’une agence ou d’une direction générale, d’autres États ayant notamment
opté pour un service de dimension restreinte au sein d’un ministère.
2 -
Des moyens importants en comparaison
des autres douanes européennes
Les différences dans le champ des missions des administrations
douanières expliquent la diversité des moyens matériels qui leur sont
accordés. La plupart des organisations douanières sont ainsi dépourvues de
moyens aériens et maritimes équivalents à ceux de la DGDDI.
Cette hétérogénéité
d’exer
cice des missions et des organisations se
traduit par des écarts importants entre les effectifs des douanes nationales.
Ces écarts d’effectifs significatifs sont en partie dus au différentiel
d’activité des administrations douanières.
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37
Graphique n° 1 :
effectifs des douanes de huit États européens
Source : Organisation mondiale des douanes (2019), traitement Cour des comptes
L
’hétérogénéité de
s procédures douanières explique aussi ces
différences. Pourtant, la Cour des comptes européenne
29
a rappelé que
celles-ci devaient ê
tre mises en œuvre de manière uniforme
, notamment
dans les ports
de l’Union.
La situation effective en Europe se caractérise
par des écarts importants même dans les domaines régis par des règles
communautaires
30
. Les stratégies et méthodes de l’Union en mat
ière
douanière ont pourtant fait l’objet de plusieurs communications de la
Commission
européenne.
Un
programme
d’action
des
douanes
européennes pour la période 2014-
2020 a servi de cadre à l’action de la
DGDDI au cours de la période sous revue.
II -
Une organisation administrative construite
selon plusieurs logiques successives
L’organisation administrative de la DGDDI en 2019 est le résultat
de plusieurs logiques. La première, historique et traditionnelle, est celle du
pilotage d’un
réseau d’environ
13 300 ag
ents répartis sur l’ensemble du
territoire
par
une administration centrale, dotée d
’environ
690 agents
.
Une autre logique, qui a prévalu ces dernières années, a conduit à la
création de
19 entités
,
disposant d’une certaine autonomie de gestion et
regroupant
plus de 3 000 agents
. Elles
s’intercalent dans la ligne
hiérarchique traditionnelle entre les services centraux et déconcentrés.
29
Cour des comptes européenne, rapport spécial n° 23/2016,
Le transport maritime
dans l’UE
, 2016.
30
En mai 2018, la Commission européenne a élaboré un cadre commun de gestion des
risques. Il devait être mis en œuvre
par des États membres début 2019.
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38
A -
Une administration centrale « tête de réseau »
Installée à Montreuil
, l’administration centrale de la DGDDI
pilote
l’action d
es services déconcentrés. Elle a été réorganisée en 2018, pour en
améliorer le fonctionnement au bénéfice du réseau mais aussi pour préparer
et accompagner la transformation numérique des métiers.
La nouvelle organisation de la direction générale (cf. organigramme
complet en annexe n° 3) a institué une sous-direction chargée des missions,
de
l’organisation
et du pilotage du réseau afin
d’améliorer l
a conduite
globale des services et la déclinaison des orientations stratégiques dans le
réseau. La sous-direction des ressources humaines et des relations sociales
a été réorganisée pour développer une gestion prévisionnelle des emplois,
des effectifs et des compétences.
Organigramme n° 1 :
organisation simplifiée de la DGDDI
Source : DGDDI, présentation Cour des comptes
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39
Les trois sous-directions métiers existant avant octobre 2018 ont été
maintenues : celle des affaires juridiques et de la lutte contre la fraude, celle
du commerce international et celle de la fiscalité douanière, de même que
la délégation aux relations internationales, directement rattachée au
directeur général, qui anime un réseau de 18 attachés et officiers de liaison
douaniers, relais de la D
ouane à l’étranger
. Les sous-directions « métiers »
travaillent en lien étroit avec les sous-directions « soutien ».
En ce
qui concerne le commerce international, pour mettre en œuvre
les nouvelles dispositions
du code douanier de l’Union (CDU)
, la Douane
s’est réorganisée en mettant en place un
service grands comptes (SGC),
point d’entrée unique pour les
principaux opérateurs du commerce
extérieur,
et des centres d’expertise spécialisés correspondant aux grands
secteurs économiques, afin de faciliter les opérations de dédouanement.
B -
La création récente de nombreuses entités
spécialisées
Les 19 entités,
disposant d’une certai
ne autonomie de gestion, qui
«
s’intercalent
»
entre
l’administration
centrale
et
les
services
déconcentrés,
recouvrent
des
situations
juridiques
diverses :
un
établissement public, dix services à compétence nationale et huit services
spécialisés (cf. annexe n° 5). Depuis 2013, cinq services à compétence
nationale ou spécialisés ont été institués au sein de la DGDDI, soit près
d’une création par an, le dernier en date étant la direction nationale
garde-côtes des douanes (DNGCD) depuis le 1
er
juillet 2019.
Leur développement est susceptible d’affecter la lisibilité des
responsabilités et la gestion, dans la mesure où
la Douane n’a pas élaboré
de stratégie ou de grille de lecture
précisant les critères d’opportunité de
créer des structures administratives supplémentaires
disposant d’une
certaine autonomie par rapport aux services centraux ou déconcentrés. Elle
n’a pas non plus établi de lignes directrices p
ermettant le suivi de ces
structures. Dès lors, les modes de pilotage ne sont pas harmonisés entre les
sous-directions chargées
d’en
assurer le suivi.
Les créations de service répondent pour la plupart à des contraintes
tenant à la nature des missions exercées, telles que le traitement
d’informations couvertes par le secret
,
ou à des exigences d’efficacité
,
comme la centralisation des procédures. Les attributions de ces entités sont
diverses, certains exerçant des missions opérationnelles,
d’autres se
rapprochant d’un bureau d’administration centrale.
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40
1 -
La direction nationale du renseignement douanier :
une action prépondérante dans la lutte contre les trafics
Parmi ces services, la direction nationale du renseignement
douanier (DNRED) a pour mission la lutte contre les grands trafics et joue,
au sein des services de la Douane, un rôle prépondérant mais non exclusif.
Au cours des dernières années, elle a été réorganisée pour adapter sa
stratégie et ses moyens aux modalités de fraude les plus récentes en
instituant des cellules davantage spécialisées par thème.
Elle est depuis 2008 l’un des services de la communa
uté française
du renseignement.
Elle est avec Tracfin l’un des deux services de
renseignement du ministère des finances et des comptes publics et compte
parmi les six services spécialisés de renseignement
31
. Elle recourt à ce titre
à des moyens techniques et tactiques spécialisés. Elle exerce son activité
sur l’ensemble du territoire d
o
uanier national et dispose d’un réseau de
21 implantations territoriales.
Ses méthodes de travail spécifiques reposent notamment sur
l’utilisation d’aviseurs, c’est
-à-dire des personnes étrangères à la DGDDI
qui fournissent des renseignements amenant à la découverte de la fraude,
ainsi que sur la collaboration nationale et internationale, avec les douanes
étrangères ou les institutions spécialisées comme Europol.
2 -
La direction nationale garde-côtes des douanes (DNGCD) :
la
recherche d’un meilleur pilotage opérationnel
La DNGCD a été créée à compter du 1
er
juillet 2019
32
. Implantée au
Havre, elle est chargée d’harmoniser le pilotage opérationnel du dispositif
garde-côtes et tend à
renforcer la lisibilité de l’action de la
D
ouane à l’égard
des autres services engagés dans l’action de l’État en mer (AEM). Elle
assure désormais un commandement opérationnel unifié du dispositif
aéromaritime de la Douane. Les services garde-côtes des douanes
dépendent désormais hiérarchiquement de la DNGCD. Ils sont au nombre
de trois correspondant à trois façades maritimes (Antilles-Guyane,
Atlantique-Manche-Mer du Nord, Méditerranée). La DNGCD compte
894 ETP au 1
er
janvier 2020.
31
Article R. 811-1 du code de la sécurité intérieure.
32
Décrets
du 12 février 2019 portant création d’un
service à compétence nationale
dénommé « direction nationale garde-côtes des douanes ».
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41
3 -
La transformation du service spécialisé dans la lutte contre
les fraudes financières pour renforcer la coordination ministérielle
Spécialisé dans la lutte contre les fraudes financières, comptant
267 officiers de douane judiciaire, le
service national unique d’enquête
judiciaire (SNDJ), placé sous la double tutelle du DGDDI et du DGFiP, a
connu une profonde réorganisation dans le cadre de la loi relative à la lutte
contre la fraude du 23 octobre 2018.
Afin de renforcer la coordination ministérielle de la lutte contre la
grande délinquance douanière, financière et fiscale, il a été remplacé par le
service d’enquêtes judiciaires des finances
(SEJF) en 2019. Dirigé par un
magistrat,
le SEJF réunit les officiers de douane judiciaire de l’ancien
SNDJ ainsi que 25 officiers fiscaux judiciaires.
4 -
Le
service d’analyse de risque et de ciblage (Sarc)
: une analyse
automatisée des risques de fraude pour mieux cibler les contrôles
S’inspirant de l’exemple de
la DGFiP, qui a constitué en 2013 une
mission requêtes et valorisation chargée de cibler la fraude par la
valorisation des données, la Douane
a créé en 2016 le Sarc afin d’
unifier
les travaux d’analyse
du risque menés jusque-là conjointement par la
direction générale, les directions régionales et la DNRED.
Ce service à compétence nationale
a pour mission d’
orienter et
d’
animer la politique de contrôles par une analyse de risque dans le champ
de la fiscalité douanière, mais aussi dans celui des autres missions de la
douane. Le Sarc
s’appuie sur l’exploitation statistique d’un ensemble de
données quantitatives (
datamining
).
Il est composé d’une trentaine
d’agents dont deux
scientifiques de la donnée (
data scientists
).
5 -
Le service statistique du commerce extérieur : une production
fiabilisée des chiffres du commerce extérieur
La Douane assure la production des chiffres du commerce extérieur
dans le cadre du réseau piloté par l’Insee. Elle dispose en effet de toutes les
informations nécessaires avec les déclarations d’échange de biens (DEB)
recueillies par ses services. Cette mission est conduite par le département
des statistiques et des études du commerce extérieur
33
, qui établit les
chiffres du commerce extérieur et procède à des études et analyses.
33
Ce département assure une tutelle fonctionnelle du pôle statistique de la direction
nationale des statistiques du commerce extérieur, service à compétence nationale créé
par l’arrêté du 29 octobre 2007.
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42
C -
Un découpage territorial spécifique à la Douane
La DGDDI compte 674 implantations territoriales, regroupant
13 337 ETP. Depuis 2013, 119 sites ont été fermés
34
, notamment sous
l’effet du resserrement du réseau comptable. Les services déconcentrés de
la DGDDI sont organisés en directions interrégionales (12), à compétence
interdépartementale et regroupant des directions régionales (42).
Les nouvelles régions administratives créées en 2016 correspondent en
grande partie aux inter-régions douanières. Parmi ces dernières, trois restent
plus larges que les nouvelles régions
35
tandis que la région d’Île
-de-France est
couverte par deux directions interrégionales (Île-de-France et Paris-aéroports).
Les directions régionales ne coïncident pas avec le découpage
administratif de droit commun. Une direction régionale est généralement
composée, en plus des services de gestion, d
’
encadrement et de logistique,
de bureaux de douane, chargés des opérations commerciales, de brigades
de douane, chargées des missions de surveillance et de services de
contribution indirectes (cf. annexe n° 6).
34
Nombre brut, non retraité des créations d’implantations territoriales.
35
Bretagne-Pays-de-la-Loire, Provence-Alpes-Côte-
d’Azur
-Corse et Bourgogne-Franche-
Comté-Centre-Val-de-Loire.
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43
Carte n° 1 :
organisation territoriale en métropole
Source : DGDDI
Elles
sont compétentes en matière d’a
ssiette, de contrôle et de
recouvrement des droits, de législation des contributions indirectes, de
protection en matière de santé humaine, animale et végétale, de mesures de
protection de l’env
ironnement, de réglementation pour laquelle la DGDDI
a reçu une habilitation spécifique, de lutte contre la fraude et de contentieux
dans les domaines de sa compétence. Elles exercent, par ailleurs, une
mission d’orientation des services opérationnels en m
atière de contrôles et
de lutte contre la fraude
et en matière d’action économique et de fiscalité.
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44
Depuis
2013,
les
centres
opérationnels
de
la
douane
terrestre (CODT) ont en particulier vocation à assurer une coordination en
temps réel des brigades. Au nombre de six en métropole, les CODT
couvrent le périmètre de plusieurs directions interrégionales. Ils exercent
ponctuellement une fonction de commandement et permettent un appui
logistique opérationnel.
Enfin, la Douane dispose d’
implantations spécifiques dans le cadre
de son dispositif aéromaritime. Piloté par la DNGCD, ce réseau repose sur
un ensemble de 28 bases maritimes et de 5 bases aériennes, regroupées au
sein de trois unités garde-côtes (Antilles-Guyane, Manche-Mer du
Nord-Atlantique et Méditerranée).
III -
D
’importants moyens humains et matériels,
des pouvoirs juridiques étendus
D’un point de vue budgétaire, l’exercice d
es missions de la DGDDI
est porté par le programme 302 « facilitation et sécurisation des
échanges ». Les effectifs et les dépenses de personnels sont en hausse
depuis 2015. Par ailleurs, la Douane
est dotée d’une large palette de
moyens matériels et légaux.
A -
Des effectifs et des dépenses de personnels
en hausse depuis 2015
La Douane disposait de 17 108 ETP fin 2018. Ces effectifs ont
connu deux mouvements contraires au cours de la décennie 2010, l’année
2015 représentant un exercice charnière.
Graphique n° 2 :
effectifs de la DGDDI et de la DGFiP en ETPT
Source : Documentation budgétaire, traitement Cour des comptes
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ORGANISATION
ET DE MOYENS SPÉCIFIQUES
45
De 2011 à
2015, le schéma d’empl
ois a sensiblement diminué
(-5,5 %) avant de connaître une progression inverse à compter de 2016.
Sous le double effet des recrutements accordés dans le cadre des plans de
lutte antiterrori
ste (Plat) et de l’anticipation
du
Brexit
, les effectifs de la
DGDDI ont augmenté de 4,6 % entre 2015 et 2019, les ramenant à leur
niveau de 2013. Cette évolution se distingue très nettement de la réduction
du nombre d’emplois mené
e par la DGFiP (- 7,4 %, soit - 7 945 ETPT
entre 2015 et 2019).
Ces effectifs sont répartis
entre l’administration centrale (
4,1 % en
2019), les services à compétence nationale (18,0 %) et le réseau territorial
(78,0 %). Ils sont en majorité affectés aux opérations de surveillance et de
préservation de la sécurité,
ainsi qu’
aux échanges internationaux.
Tableau n° 1 :
répartition des effectifs par action (ETP)
Source : projet annuel de performance 2020 du programme 302
Cependant, les effectifs sont usuellement comptabilisés en deux
grandes branches, selon que les douaniers sont en uniforme ou non. La
branche « administration générale/opérations commerciales » (AG-Opco)
regroupe tous les effectifs qui ne relèvent pas des opérations de
surveillance et de la préservation de la sécurité de l’espace national et
européen. Les effectifs assurant ces dernières missions sont quant à eux en
uniforme et regroupés au sein de la branche « surveillance ».
Avec 9 059 agents affectés à ces missions, la branche AG/Opco
représente désormais 52,1 % des effectifs de la Douane alors que la
branche surveillance, bien qu’ayant des
effectifs en hausse, ne représente
plus que 47,9 % des effectifs totaux.
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COUR DES COMPTES
46
Graphique n° 3 :
r
épartition des agents par branche d’activité
entre 2013 et 2019
Source : DGDDI, présentation Cour
Conséquence de l’augmentation des effectifs depuis 2015, l
es
dépenses de personnel ont fortement progressé ces dernières années
(+ 45,3
M€ en 2017 soit + 3,8 %
,
+ 24 M€ en 2018 soit + 2 %, + 17,2 M€
en 2019 soit + 2,1 %)
, pour atteindre 1,2 Md€ en 2019
.
B -
D
’importants moyens matériels
En loi de finances initiale pour 2020, 170
M€ ont ét
é ouverts pour
le fonctionnement, 50,1
M€ pour l’investissement et 120,5
M€ pour des
dépenses d’intervention.
Les crédits de fonctionnement sont en particulier destinés à
l’entretien de matériels et d’équipements dévolus à la surveillance
terrestre
36
, au maintien en condition opérationnelle du parc aéromaritime,
à la maintenance de la flotte et à la location d’hélicoptères, ainsi qu’à des
dépenses d’informatique courantes.
Les dépenses d’intervention concernent essentiellement le soutien et
la transformation du réseau des débitants de tabac. Elles sont destinées à
compenser la perte d’activité, à aider à la transformation de l’activité des
buralistes et à financer des travaux de sécurisation des débits de tabac.
36
Tenues vestimentaires, armements individuels, munitions, gilets pare-balles,
maintenance des moyens de détection.
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ALENTE DOTÉE D’UNE
ORGANISATION
ET DE MOYENS SPÉCIFIQUES
47
Tableau n° 2 :
crédits du programme 302 (LFI pour 2020)
En crédits de paiement
En M€
Fonction-
nement
Investis-
sement
Inter-
vention
Total
Surveillance douanière des flux de
personnes et de marchandises et lutte
contre la grande fraude douanière
16,4
10,7
27,1
Préservation de la sécurité et la sûreté
de l'espace national et européen
30,5
20,8
51,3
Promotion des échanges internationaux
et qualité du dédouanement
13,0
4,6
17,6
Fiscalité douanière énergétique
et environnementale
8,5
2,0
8,3
18,8
Soutien des services opérationnels
101,6
12,0
1,1
114,7
Soutien au réseau des débitants de tabac
111,1
111,1
Total
170,1
50,1
120,5
340,7
Source : Cour des comptes à partir du projet annuel de performance pour 2020, crédits de paiement pour 2019
Les crédits d’investissement sont
notamment consacrés aux
développements informatiques visant à terme à une refonte du système
d’information «
lutte contre la fraude », à la poursuite de projets majeurs
(«
Passenger name record
», sys
tèmes d’information aéromaritime
et
guichet unique national (GUN)) et à l’adaptation des applica
tions de
dédouanement aux exigences de dématérialisation. Ils permettent le
renouvellement du parc automobile et
l’acquisition de gros matériel de
surveillance (camion scanner par exemple). Ils financent également les
moyens aéromaritimes, uniques parmi le
s administrations civiles de l’État.
Un dispositif aéromaritime unique
parmi les administrations civiles de l
’État
La mise en œuvre du dispositif aérien et naval requiert des moyens
significatifs et a récemment bénéficié de programmes de renouvellement.
Sur la période 2013 à 2019, les matériels aéromaritimes ont coûté 39,7
M€
par an en moyenne.
La Douane compte actuellement neuf hélicoptères, pour la plupart
de type EC 135, entrés en service en 2007, et sept avions multi-missions de
marque Beechcraft, en cours de déploiement depuis 2013. Elle possède
aussi 36 bâtiments maritimes de différents tonnages, en particulier trois
patrouilleurs garde-côtes (entre 43 et 53 mètres) acquis à partir de 2007.
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COUR DES COMPTES
48
C -
Des systèmes d’information en cours
de modernisation
Le système d’information de la DGDDI revêt un caractère
stratégique pour la bonne exécution des missions douanières
. L’acquisition
et l’élaboration progressives et par sédimentation d’un ensemble de
198 applications et produits depuis les années 1970 ont conduit au
caractère sous-
optimal du système d’information de la Douane. Cett
e
situation, qui se traduit par la notion de « dette technique »
37
, peut
impliquer des dysfonctionnements, renchérir l
’entretien et
freiner la
modernisation de l’action de la Douane
.
La Douane a engagé à compter de 2013 la modernisation de son
système d’information, notamment pour remédier à l’obsolescence de son
architecture applicative. Cette stratégie de transformation a été formalisée
dans le cadre de la trajectoire d’évolution des systèmes d’information,
couvrant la période 2013-2017, puis de la stratégie e-Douane, traçant les
perspectives de modernisation des systèmes d’information jusqu’à 2022.
À l’appui de cette transformation, les budgets informatiques de la
Douane ont crû de 50,5 % depuis 2013, passant
de 74,4 M€ à
112
M€ 2019
.
Parallèlement aux travaux de modernisation, plusieurs projets à vocation
interministérielle ont été menés en matière de dédouanement (création du
GUN, élaboration
du système d’information spécifique au
Brexit
) ainsi que
de sécurité intérieure (contribution au projet sur les données des dossiers
passagers, PNR).
Cet effort devrait se poursuivre d’ici 2022, conformément à la
trajectoire tracée par la stratégie e-Douane. Pendant cette période,
15 chantiers de modernisation ont été arrêtés et cadencés en fonction de
l’évaluation de
leur degré de criticité. Les principaux projets visent tant la
rénovation des anciennes applications de dédouanement que la refonte du
système d’information de lutte contre la fraude et l’urbanisation
38
des outils
consacrés aux missions fiscales. Dans son rapport sur les systèmes
d’informa
tion de la DGFiP et de la DGDDI, la Cour a ainsi conclu au
«
pilotage actif par la Douane de sa « dette technique »
»
39
.
37
C’est
-à-dire
l’accumulation de produits obsolètes au plan matériel et au plan logiciel.
38
La démarche d’urbanisation vise notamment à organiser le fonctionnement des
différentes applications entre elles.
39
Cour des comptes,
Les systèmes d’information de la DGFiP et de la DGDDI
: investir
davantage, gérer autrement
, communication à la commission des finances de
l’Assemblée nationale,
avril 2019, 133 p., disponible sur www.ccomptes.fr.
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UNE ADMINISTRATION POLYV
ALENTE DOTÉE D’UNE
ORGANISATION
ET DE MOYENS SPÉCIFIQUES
49
D -
Une large palette d’outils juridiques
propre à la Douane
Les règles que la Douane doit faire respecter sont complexes et la
typologie des infractions correspondantes est très étendue, tant les fraudes
et trafics sont multiples et diversifiés. Pour lutter contre ces phénomènes,
la Douane est bien armée par le droit national qui a progressivement
renforcé
ses moyens de détection, d’intervention et de sanction. Ainsi,
le
code des douanes confie des pouvoirs étendus aux services de la Douane
40
.
Parallèlement, depuis 1999, des agents des douanes peuvent être
habilités à mener des enquêtes judiciaires exclusivement sur réquisition du
procureur de la République ou sur commission rogatoire du juge
d'instruction. Ils disposent alors des prérogatives et obligations attribuées
aux officiers de police judiciaire. Ces agents habilités sont désormais
regroupés au sein du
service d’enquêtes judiciaires des finances
.
Régulièrement, de nouveaux outils juridiques viennent renforcer les
pouvoirs de la Douane pour permettre à ses agents de s’adapter à
l’évolution des menaces et de renforcer leurs capacités d’investigation, to
ut
particulièrement en matière de renseignement et de lutte contre le trafic
d’armes dans le cadre du commerce illicite sur internet.
Ainsi, des
évolutions importantes en ce sens ont eu lieu depuis 2013 (annexe n° 4).
Par ailleurs, la Douane assure la police de la marchandise sur le
territoire douanier français dans le cadre de l’union douanière européenne,
en application du code des douanes de l’Union
41
. Elle est ainsi chargée de
veiller au respect des règles européennes et nationales s’appliquant aux
impor
tations et exportations et des dispositions fiscales afférentes. C’est
donc en application de ce corpus, ou « référentiel douanier », que se
définissent les infractions
qu’elle doit empêcher ou réprimer.
Enfin, la Douane est chargée de vérifier le respect des règles
concernant la propriété intellectuelle
42
afin notamment de lutter contre la
contrefaçon
43
. Elle dispose également d’une compétence de surveillance
des mouvements transfrontaliers d’espèces monétaires et actifs assimilés.
Ces mouvements sont soumis à une obligation déclarative dont la Douane
surveille le respect et sanctionne la négligence.
40
Droit de visite des marchandises et des moyens de transport, de retenue, de saisie et
de confiscation des marchandises, droit de communication, etc.
41
Règlement (UE) n° 952/2013 du Parlement européen et du Conseil du 9 octobre 2013.
42
Code de la propriété intellectuelle (CPI), règlement du Parlement et du Conseil
n° 608/2013 du 12 juin 2013.
43
Cf. Cour des comptes,
La lutte contre les contrefaçons : Une organisation et des
outils pour mieux protéger les consommateurs et les droits de propriété industrielle
,
communication au comité d’évaluation et de contrôle de l’Assemblée nationale,
février 2020, disponible sur www.ccomptes.fr.
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COUR DES COMPTES
50
______________________ CONCLUSION ______________________
L’action de la Douane française s’inscrit dans un contexte
communautarisé depuis la création du marché unique en 1993 et la
disparition des contrôle
s aux frontières intérieures de l’Union.
Concomitamment à la perte de cette mission de contrôle des personnes et
des marchandises sur le marché intérieur, la Douane a vu son champ
d’intervention élargi en matière fiscale.
Aujourd’hui, forte de
plus de 17 000
agents, s’appuyant sur un
réseau territorial de 674 implantations, elle exerce trois grands types de
missions : la protection des entreprises et des consommateurs à travers la
régulation des flux de marchandises, la lutte contre la fraude et les trafics,
la perception d’un certain nombre de taxes et droits indirects. Elle
participe par ailleurs à des politiques publiques variées telles que le
contrôle des flux de passagers aux frontières de l’espace Schengen,
l’action de l’État en mer ou encore le soutie
n aux filières économiques
vitivinicole et des débitants de tabac. P
ar l’étendue de ses missions et son
organisation, elle occupe une place singulière par rapport aux douanes
des autres pays de l’Union européenne.
Elle est caractérisée par la polyvalence de ses agents qui exercent
leurs missions dans deux branches distinctes : la surveillance ;
l’administration générale
-opérations commerciales. Les douaniers de la
branche surveillance sont en uniforme et armés.
Dotée de moyens humains en hausse depuis 2015
et d’importants
moyens matériels, notamment en matière de surveillance aéromaritime,
elle dispose, par ailleurs, de pouvoirs juridiques à la fois administratifs et
judicaires qui en font une administration spécifique au sein des ministères
économiques et financiers auxquels elle est administrativement rattachée.
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Chapitre II
Une adaptation engagée face
à un contexte en forte mutation
Le contexte national et international dans lequel s’inscrit l’exercice
des missions de la Douane a connu une série de profondes évolutions. Pour
y répondre, d
’importantes
mesures d’adaptation ont été prises
par la
DGDDI. Ces transformations visent principalement à faciliter les
opérations de dédouanement dans un cadre juridique communautarisé (I),
à renforcer les missions de surveillance (II), à rationaliser la fiscalité (III)
et à anticiper les conséquences de la sortie annoncée du Royaume-Uni de
l’Union européenne (
IV).
I -
D’importants efforts pour faciliter
les opérations de dédouanement
des marchandises
L’exercice de ses missions écono
miques par la Douane, qui est
soumise à la législation douanière européenne (cf. annexe n° 1), a connu
ces dernières années un bouleversement sous le double effet de l’entrée en
vigueur du code des douanes de l’Union et des mutations du commerce
international. Dans ce contexte, la DGDDI a concentré ses efforts sur
l’adaptation de ses outils informatiques et de son dispositif fonctionnel et
territorial pour accompagner ces transformations.
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COUR DES COMPTES
52
A -
Les exigences liées à la mise en œuvre
des réglementations européennes
Les réglementations communautaires prévoient d’ici 2025 des
« douanes sans papier »,
c’est
-à-dire une dématérialisation totale des
formalités déclaratives sur l’ensemble du territoire de l’Union. Cette
dématérialisation s'accompagne d'une nouvelle politique des contrôles
douaniers. Elle se traduit par l'importance prise par le contrôle
ex post
des
documents comptables et commerciaux des entreprises, par rapport aux
contrôles sur les marchandises au moment de leur entrée sur le territoire.
Le cadre normatif européen, qui poursuit notamment l
’objectif
de
facilitation des échanges commerciaux, est fondé sur le code douanier de
l’Union (CDU)
adopté en 2016 et entré en vigueur le 1
er
mai 2019
44
.
Certaines de ses dispositions, liées à la mise en place ou à la rénovation de
systèmes informatiques,
ne seront pleinement applicables qu’à l’issue
d’une période transitoire jusqu’en 2025.
9,5 millions de déclarations sur un total de 34,2 millions traitées par
les services douaniers français en 2019
l’ont été dans le ca
dre du dispositif
Import Control System
(ICS). Ce dispositif, qui se distingue de la procédure
de droit commun, a été instauré dès 1992 pour permettre d’appréhender les
flux de marchandises avant même qu’elles ne pénètrent sur le territoire
européen. Les opérateurs peuvent ainsi transmettre une déclaration
simplifiée contenant des données liées à la sûreté et à la sécurité au bureau
de douane du pays d’entrée avant l’arrivée des marchandises.
Par ailleurs, le CDU
s’appuie sur deux dispositifs principaux,
l
’intensification de l’activité de labellisation «
opérateur économique agréé »
(OEA) et la montée en puissance du dédouanement centralisé national (DCN).
B -
Une intensification des activités
d’agrément
et d’accompagnement
des opérateurs économiques
La place d
u statut d’OEA
, créé en 2008, a été renforcée par le CDU,
qui prévoit
deux types d’agréments : l’OEA «
simplifications douanières »
(OEA-C) ;
l’OEA « sûreté
-sécurité » (OEA-
S) permettant à l’opérateur de
bénéficier de simplification en matière de sûreté-sécurité. Lorsque les deux
agréments sont obtenus, l’opérateur est détenteur d’un OEA «
full
»
(OEA-F).
Lors de la procédure d’agrément, sont
notamment évalués les
systèmes d’information
, la logistique et la solvabilité financière.
44
Les États membres d
isposaient d’un
délai de trois ans après
l’adoption
du CDU pour
réexaminer les autorisations accordées aux opérateurs selon les nouveaux critères.
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UNE ADAPTATION ENGAGÉE FACE À UN CONTEXTE EN FORTE MUTATION
53
Au sein de l’Union europée
nne, la France se place en deuxième
position après l’Allemagne pour le nombre d’opérateurs agréés OEA, mais
l’écart entre les deux pays va du simple au quadruple
.
Tableau n° 3 :
n
ombre d’agréments délivrés en France
et en Allemagne au 30/01/2019
OEA-C
OEA-F
OEA-S
Total
Part
dans
l'UE
France
420
909
226
1 555
10 %
Allemagne
3 476
2 591
53
6 120
40 %
UE
6 810
7 990
631
15 431
Source : Commission européenne, traitement Cour des comptes
Cet écart ne
s’explique
pas par une différence notable de procédures
entre les deux pays, mais sans doute
par le nombre d’entreprises
exportatrices allemandes (plus de 300 000 en 2019), plus du double de
celui des entreprises françaises (environ 128 000 en 2019).
L’écart
peut
aussi
s’expl
iquer, mais de façon marginale, par le fait que la douane
française incite les opérateurs, plus que ne le fait la douane allemande, à
acquérir
l’agrément
OEA
Full
,
difficile
à
obtenir,
alors
que
l’agrément
« OEA-C simplifications douanières » semble être privilégié en
Allemagne.
Le changement dans la l
égislation de l’Union européenne a
nécessité le réexamen de l’ensemble des autorisations OEA délivrées avant
le 1
er
mai 2016. La Douane a fait le choix de faire traiter par ses services
les demandes d’agrément alors que le CDU n’interdit pas que cette
procédure soit, en tout ou partie, externalisée. Les délais de délivrance des
agréments OEA se sont améliorés entre 2015 et 2019 et la Douane française
s’efforce de rendre le statut d’OEA plus attractif
.
Pour accompagner les entreprises, chaque direction régionale
dispose d’un pôle d’action économique (PAE)
, qui est notamment en
charge des audits permettant d’obtenir ou de renouveler l’agrément OEA.
En 2019, 2 513 entreprises ont été conseillées par ces pôles, au sein
desquels ont été mises en place des cellules de conseil aux entreprises, qui
s’adressent
plus
spécifiquement
aux
petites
et
moyennes
entreprises (PME). Depuis 2009, près de 20 000 entretiens individualisés
et gratuits avec des PME ont été effectués.
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COUR DES COMPTES
54
C -
La mise en place du dédouanement centralisé
national pour faciliter les formalités déclaratives
Avec le dédouanement centralisé, les déclarations doivent être
transmises à un bureau de déclaration qui centralise, pour un même
opérateur, l'ensemble des déclarations d
’
importation ou d
’
exportation
relatives à des opérations réalisées auparavant auprès de plusieurs bureaux
de douane situés soit dans un seul État membre (dédouanement centralisé
national), soit situés dans plusieurs États membres (dédouanement
centralisé communautaire). Les contrôles sur les marchandises peuvent être
prescrits, depuis ces bureaux dits « de déclaration », aux bureaux dits
« de présentation » où les marchandises seront physiquement contrôlées.
Le dédouanement centralisé national (DCN) est ouvert aux
opérateurs qui le souhaitent depuis 2016. Il vise à simplifier les procédures
de dédouanement, en proposant un interlocuteur unique pour l’ensemble
des formalités douanières. La dissociation des bureaux de déclaration et de
présentation des marchandises permet également une meilleure prise en
compte des contraintes logistiques des opérateurs.
Le recours au DCN monte en puissance puisqu’en mai 2019,
787 opérateurs avaient opté pour cette nouvelle procédure, représentant
34,8 % des déclarations en douane pour le fret traditionnel. En France, les
agréments DCN sont délivrés par le service grands comptes pour les
opérateurs qui en relèvent et par une direction régionale pour les autres.
Cette nouvelle organisation des formalités déclaratives a eu un fort
impact sur l’activité de dédouanemen
t des bureaux. De 2014 à 2019, la
variation du nombre de déclarations a été supérieure à 25 % dans les deux
tiers des bureaux de douane, à la baisse dans 65 bureaux et à la hausse dans
34. Même rapportée
à l’échelle de la direction régionale, la variation
du
nombre de déclarations reste très importante. Dans 19 directions régionales
sur 39, la variation dépasse 20 % (à la hausse ou à la baisse), et elle atteint
+ 68 % en Pays de la Loire.
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UNE ADAPTATION ENGAGÉE FACE À UN CONTEXTE EN FORTE MUTATION
55
Graphique n° 4 :
évolution en % du nombre de déclarations
par direction régionale en France métropolitaine de 2014 à 2018
Source
: Cour des comptes d’après DGDDI
II -
Le renforcement des missions de surveillance
A -
Une intensification des fraudes, des trafics et des menaces
Alors que la libre circulation des personnes et des marchandises
dans l’e
space européen avait conduit en France à effacer les frontières,
l’accentuation de la menace, notamment après les attentats terroristes qui
ont touché le territoire national à compter de 2015, a rendu nécessaire le
renforcement des contrôles des flux pour assurer la sécurité nationale. Le
contrôle aux frontières intérieures a été rétabli le 13 novembre 2015
45
. De
nature temporaire, les mesures de rétablissement des frontières ont été
régulièrement renouvelées. Par ailleurs, le code Schengen a été révisé en
2017 pour que les voyageurs européens fassent
l’objet d’un contrôle
systématique en entrée et en sortie de l’espace Schengen.
45
S
ur le fondement de l’article 25 du code frontières Schengen
, qui
prévoit qu’en cas
«
de menace grave pour l’ordre public ou la sécurité intérieure d’un État membre d
ans
l’espace
sans
contrôle
aux
frontières
intérieures,
cet
État
membre
peut
exceptionnellement réintroduire le contrôle aux frontières
».
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COUR DES COMPTES
56
Pour la Douane, la suspension de la libre circulation aux frontières
intérieures et le haut niveau de menace se sont traduits par un double
impératif de présence physique à la frontière et d’interception des
marchandises, des financements et des personnes susceptibles de constituer
une menace pour la sécurité du territoire national.
Par ailleurs, l
e contexte d’intervention de la
DGDDI a connu une
série d’
autres évolutions emportant des implications sur les modalités de
lutte contre la fraude et la contrefaçon.
Les spécificités du commerce électronique
ont appelé l’
adaptation
de
l’action
douanière. En effet, le morcellement des envois rend impossible
la vérification de l’ensemble des colis. La faiblesse des obligations
déclaratives relatives limite aussi les capacités de ciblage des contrôles.
Enfin, l’anonymat des vendeurs sur internet et la multiplicité des
plateformes numériques affectent le recouvrement des taxes et des droits.
Les enjeux de la montée en puissance du commerce électronique
En 2020, près de la moitié de la population mondiale qui utilise
internet achèterait en ligne tandis que le commerce mobile représenterait
45 % de toutes les activités e-commerce. Selon
une étude de l’Organisation
mondiale des douanes (OMD), les caractéristiques du e-commerce placent
la Douane face à des enjeux multiples :
• réglementaire
s : les flux de e-commerce remettent en cause les principes
essentiels sur lesquels est fondée la taxation des marchandises ;
• organisationnel
s
: la Douane doit s’adapter pour faire face à la forte
augmentation de volumétrie des flux internationaux, qui sont plus
fréquents, qui portent sur des colis plus petits et moins coûteux et qui
exigent une plus grande rapidité du traitement douanier ;
• sécuritaires
: avec de nouvelles modalités de lutte contre la fraude et de
sécurisation de la collecte fiscale et des enjeux de sûreté, de sécurité et de
protection du consommateur.
En France, la livraison de colis liés au e-commerce augmente de plus
de 10 % par an
depuis trois ans, d’après la
fédération e-commerce et vente
à distance (Fevad). À titre d’exemple, le
nombre de colis postaux de moins
de 2 kg traités par le centre de dédouanement postal de Roissy fret est passé
de 125 millions en 2016 à plus de 200 millions en 2018
46
. La grande quantité
de colis expédiés représente un défi pour les autorités douanières, les
systèmes de dédouanement étant conçus pour traiter des envois en
conteneurs et non des petits colis.
46
Source : Cour des comptes,
La lutte contre les contrefaçons : Une organisation et
des outils pour mieux protéger les consommateurs et les droits de propriété industrielle
,
communication au comité d’évaluation et de contrôle de l’Assemblée nationale,
février 2020, disponible sur www.ccomptes.fr.
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UNE ADAPTATION ENGAGÉE FACE À UN CONTEXTE EN FORTE MUTATION
57
Les stratégies de contournement du cadre normatif fiscal et douanier
sont, par ailleurs, en constante évolution, les montages juridiques tendant
à se complexifier. Elles
se transforment également sous l’effet des
évolutions réglementaires et législatives. La hausse des prix du tabac
pourrait par exemple conduire à un accroissement du trafic de cigarettes.
B -
Un renforcement des moyens de lutte
contre les trafics et les menaces
1 -
Une adaptation
de l’exercice
des missions « traditionnelles »
de la Douane
La transformation amorcée par la Douane
a reposé sur l’adaptation
des moyens d’exercice de la mission douanière traditionnelle de lutte
contre la fraude et les trafics
47
. Dans le cadre du « plan de renforcement de
l’action
de la Douane en matière de lutte contre le terrorisme et de contrôle
aux frontières » (2016), un triple objectif a été assigné à la Douane :
accroissement des contrôles de personnes aux frontières ; modernisation
des capacités de ciblage des contrôles de flux de marchandises ; adaptation
des moyens d’action opérationnelle aux menaces.
Le
rétablissement des contrôles aux frontières au sein de l’espace
Schengen s’est
traduit par un redéploiement de moyens vers le contrôle des
biens et des personnes aux frontières extérieures. À partir de 2015, dans le
cadre des deux plans de lutte antiterroriste (Plat 1 et 2), 374 douaniers ont
été affectés dans les directions territoriales, principalement au sein des
brigades de surveillance aux frontières.
Parallèlement, la Douane a pris des mesures visant à améliorer
l’efficacité et l’efficience des contrôles. Les capacités d’analyse précédant
le dédouanement ont été renforcées, les moyens de contrôle non intrusif
utilisés lors du dédouanement ont été étoffés et le Sarc a été créé. Les
premières réalisations de ce service, bien que
limitées, confirment l’intérêt
du recours aux données massives pour améliorer le ciblage des contrôles.
Les moyens de coordination et d’action opérationnelles ont
également été renouvelés. Au niveau central, la Douane a institué dès 2016
une cellule de crise afin d’organiser, en cas d’événements graves, la
centralisation des informations et le processus de décision. Au niveau
47
Elle participe pour partie de la lu
tte antiterroriste en ce qu’elle conduit à la détection
et à la saisine de biens ou de capitaux pouvant participer à l’organisation ainsi qu’à la
réalisation d’actes à caractère terroriste.
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COUR DES COMPTES
58
territorial, les CODT ont été déployés, afin d’
assurer une coordination en
temps réel des brigades. Parallèlement, les dotations en équipements de
protection (gilets pare-
balles), d’interception (herses) et de riposte (armes
longues) ont été modernisées, impliquant un effort accru de formation des
agents et d’adaptation des m
odalités de contrôles.
Dans ce contexte, le cadre juridique d’intervention des douaniers a
été rapproché de celui des autres forces de sécurité agissant sur le territoire
national
48
, tant en matière d’usage des armes et des matériels
d’immobilisation que d’anonymisation des procédures judiciaires.
2 -
Une montée en puissance de la mission de renseignement
Au-
delà de son cœur de métier historique, les activités de
renseignement de la Douane sont progressivement montées en charge. La
DNRED a vu son rôle renforcé
dans la collecte et l’enrichissement du
renseignement. Elle déploie les moyens électroniques de recueil de
données de connexion et de captation de données informatiques et s’appuie
sur des effectifs augmentés (45 agents supplémentaires, soit une
augmentati
on des effectifs de l’ordre de
5 %).
En son sein, la cellule de veille sur internet (Cyberdouane), créée dès
2009 afin de recueillir en ligne des informations relatives à la fraude, a
intensifié ses investigations. Plusieurs succès marquants témoignent de
l’efficacité de ce service. Des opérations d’ampleur de démantèlement de
plateformes d’échanges illégaux ont été conduites, comme celle du
French Deep Web-Market
en 2019, sur laquelle se commercialisait
notamment des armes, des stupéfiants et des faux papiers. Parallèlement, le
groupe opérationnel de lutte contre le terrorisme de la DNRED a renforcé
son action de répression des délits douaniers afin de prévenir le financement
du terrorisme, en lien avec les brigades territoriales de surveillance.
Ce renforcement progressif de la mission de renseignement pourrait
se poursuivre. En matière de lutte contre les contrefaçons, par exemple, la
Cour a recommandé
, dans un récent rapport pour le comité d’évaluation et
de contrôle de l’Assemblée nationale
49
, de regrouper sous
l’égide
de la
DGDDI des agents des différentes administrations concernées dans une
unité chargée de centraliser et de partager le renseignement.
48
Exposé des motifs de la loi du 28 février 2017 relative à la sécurité publique.
49
Cour des comptes,
La lutte contre les contrefaçons : une organisation et des outils
pour mieux protéger les consommateurs et les droits de propriété industrielle
,
communication au comité d’évaluation et de contrôle de l’Assemblée national
e, février
2020, disponible sur www.ccomptes.fr.
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UNE ADAPTATION ENGAGÉE FACE À UN CONTEXTE EN FORTE MUTATION
59
3 -
D
es renforts d’effectifs accordés dans le cadre des plans
de lutte antiterroriste affectés pour partie
à d’autres missions
La DGDDI a bénéficié d’un abondement de 1
070 ETPT. Ces
effectifs correspondent à la fois à des créations nettes d’emplois (605) et à
une moindre suppression d’emplois par rapport à la trajectoire prévue
(465). Comme l’a souligné à pl
usieurs reprises la Cour, la répartition des
renforts d’effectifs n’était pas documentée
50
.
Les missions exercées par près de la moitié des effectifs
supplémentaires accordés au titre des Plat sont d’ailleurs entourées de
fortes incertitudes. En effet, la
Douane n’est pas en mesure de présenter les
missions confiées aux effectifs correspondant à une moindre suppression
d’emplois par rapport à la trajectoire prévue. Elles pourraient en
conséquence être éloignées d’actions contribuant, même indirectement, à
l
a prévention d’actes de nature terroriste sur le territoire national.
Tableau n° 4 :
répartition des emplois supplémentaires accordés
dans le cadre des Plat
Nature de la mission
Affectations
Effectifs (ETP)
Mission principale
de prévention d’actes
de nature terroriste
DNRED
45
Sous-total
45 (4 %)
Missions traditionnelles
de la DGDDI
(surveillance,
opérations
commerciales)
Unité d’information passagers
(UIP PNR)
20
Coordination opérationnelle,
contrôle du fret express et
postal, sûreté ferroviaire
166
Directions territoriales
(brigades de surveillance)
374
Sous-total
560 (52 %)
Toutes missions
de la DGDDI
Affectations diverses
et non documentées
465
Sous-total
465 (43 %)
Total général
1 070 (100 %)
Le total des pourcentages est différent de 100 en raison de
s règles d’arrondis.
Source : Cour des comptes à partir de données de la DGDDI
50
Cf. notamment Cour des comptes,
Rapport sur le budget de l’État en 2018
, Note
d’exécution budgétaire
« Gestion des finances publiques et des ressources humaines
2018 », mai 2019, disponible sur www.ccomptes.fr.
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60
Comme décrit dans le tableau ci-dessus, une partie des renforts et
des effectifs correspondant à de
moindres suppressions d’emplois exerce
nt
des fonctions éloignées de la lutte antiterroriste, mission qui motivait
l’abondement d’emplois. Dès lors, en l’absence de démarche de
performance, même rudimentaire (cf.
infra
), la portée réelle du
renforcement des effectifs douaniers dans le cadre des plans de lutte
antiterroriste est incertaine.
III -
Des efforts d
’amélioration
de la gestion de la fiscalité
A -
Un besoin de modernisation de la gestion fiscale
Les exigences d’efficience de l’action publique, d’amélioration de
la qualité du service numérique, de rationalisation de la fiscalité et de lutte
contre la fraude se sont renforcées et nécessitent, comme la Cour
l’a
recommandé
51
, des efforts importants de modernisation et de simplification
des conditions d
’exercice des missions fiscales de la Douane
.
Compte tenu des enjeux financiers (de l’ordre de 320 M€) et de la
lourdeur de gestion de plusieurs dispositifs fiscaux soulignée par la Cour,
une attention renouvelée est portée par la DGDDI au coût complet de sa
gestion des impositions qu’elle recouvre. La Douane poursuit en
conséquence l’objectif de baisse du taux d’intervention, c’est
-à-dire du
rapport entre le coût complet de gestion et le rendement des impositions,
qui s’établissait à 0,40 % en 2017, dernière année de calcul par la Douane.
Enfin,
comme l’a récemment souligné la Cour
52
, la fraude aux
prélèvements obligatoires connaît une évolution constante et nécessite que
de nouveaux outils soient mis en œuvre pour prévenir et lutter contre ce
phénomène «
qui sape le pacte républicain en affaiblissant le principe
d’égalité devant les prélèvement
s obligatoires
».
51
Cour des comptes, « Les missions fiscales de la Douane : des coûts trop élevés, une
modernisation et une simplification à mettre en œuvre
», in
Rapport public annuel
2018
,
Tome
II,
p.
307-335.
La
Documentation
française,
février
2018,
417 p. Disponible sur www.ccomptes.fr.
52
Cour des comptes,
La fraude aux prélèvements obligatoires
, communication au
Premier ministre, novembre 2019, 201 p., disponible sur www.ccomptes.fr.
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UNE ADAPTATION ENGAGÉE FACE À UN CONTEXTE EN FORTE MUTATION
61
B -
Des actions pour professionnaliser
et améliorer la gestion de la fiscalité
1 -
Des ajustements apportés à l’organisation de la
Douane
La Douane a engagé à compter de 2017 un mouvement de
spécialisation et de professionnalisation de la gestion de la fiscalité. Elle a
regroupé la gestion de certaines taxes en créant des services spécialisés et
chargés de la gestion centralisée de tout ou partie d’un dispositif fiscal,
comme la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP, 722
M€ en
2019
53
) ou la taxe spéciale sur certains véhicules routiers (TSVR), dite
«
taxe à l’essieu
» (181
M€
54
).
Par ailleurs, après avoir procédé à la fermeture de recettes
territoriales en 2008, la Douane a poursuivi en 2017 et 2018 la contraction
de son réseau comptable. Fin 2019, le réseau métropolitain de la DGDDI
comportait ainsi 12 implantations territoriales, contre 31 en 2013 et 220 en
2008. Au regard des faibles gains de productivité constatés en 2018
55
, les
économies attendues de cette réforme restent à réaliser. Enfin,
l’organisation des opérations de contrôle et la lutte contre la fraude
ont été
révisées dans une double perspective de professionnalisation des
1 217 agents affectés à cette mission et de spécialisation du ciblage des
contrôles.
Le se
rvice d’analyse des risques et de ciblage :
une démarche ambitieuse, une montée en charge lente
Trois ans après leur lancement, les travaux reposant sur l’exploration
de
données
demeurent
limités
à
quelques
dossiers.
Plusieurs
expérimentations encourageantes ont été menées en matière de fraude au
dédouanement (2017), à la TVA (2017) et à la fiscalité énergétique (2018).
La montée en charge du service, confronté notamment à des
difficultés de recrutement des profils spécialisés, est lente. Le Sarc ne
compta
nt que deux scientifiques de la donnée, la Douane a l’ambition de
procéder au recrutement complémentaire de 13 scientifiques de la donnée
d’ici 2022. Cette trajectoire
pourrait ne pas être atteinte au vu des difficultés
rencontrées jusqu’à présent par la D
GDDI.
53
Avant son transfert échelonné à la DGFiP au 1
er
janvier 2020 et au 1
er
janvier 2021.
54
De rendement faible (177
M€ en 2018) et de coûts de gestion élevés (14,8 M€).
55
Les effectifs exprimés en équivalent temps plein travaillé ont reculé de 8 %.
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COUR DES COMPTES
62
Les résultats de ce mouvement de réorganisation tardent à se
matérialiser par une amélioration des résultats du contrôle fiscal. Le
montant de droits et taxes redressés a même enregistré une diminution au
cours de la période 2013 à 2019 (- 13,0 %).
Graphique n° 5 :
montants des droits et taxes redressés
par la Douane (en M€)
Source : Douane, traitement Cour des comptes
2 -
Un chantier de dématérialisation en cours
Dans son rapport public annuel de 2014
56
, la Cour avait relevé que
la Douane avait pris un retard significatif en matière de dématérialisation
de la gestion fiscale, en particulier dans le secteur des vins et des alcools.
Elle soulignait également que la gestion de la taxe spéciale sur les véhicules
routiers (TSVR) était insuffisamment informatisée.
Depuis, la Douane a déployé un programme de dématérialisation de
la gestion fiscale visant à permettre puis à rendre obligatoire la
télédéclaration et le télépaiement de l’ensemble des taxes et contributions.
Ce mouvement a d’abord concerné la taxe générale sur les
activités
polluantes (TGAP), dont la téléprocédure ouverte en 2015 est devenue
obligatoire en 2017. Depuis, l’effort s’est porté sur la gestion
de la fiscalité
de la filière des vins et des alcools ainsi que de celle des tabacs, dans le cadre
56
Cour des comptes, « Les missions fiscales de la Douane : un rôle et une organisation
à repenser », in
Rapport public annuel 2014
, février 2014, la Documentation française,
disponible sur www.ccomptes.fr.
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UNE ADAPTATION ENGAGÉE FACE À UN CONTEXTE EN FORTE MUTATION
63
du programme de contributions indirectes en ligne (Ciel). Les différentes
taxes applicables aux boissons alcooliques et aux produits manufacturés du
tabac sont obligatoirement télédéclarées et télépayées depuis 2019.
Dans le prolongement des recommandations de la Cour, la DGDDI
a aussi ouvert un chantier de modernisation du traitement des données de
l’octroi de mer, principale fiscalité ultramarine. Une nouvelle application,
ouverte depuis janvier 2019, permet en particulier la télédéclaration et le
calcul automatique du montant de la taxe à recouvrer.
La trajectoire de modernisation de la gestion fiscale doit être
poursuivie pour atteindre l’objectif de
dématérialisation de l'ensemble des
démarches administratives d'ici à 2022
57
. Si la part des formalités
déclaratives
dématérialisées effectuées par les assujettis s’élève désormais
à 97,9 %, la Douane demeure en retrait par rapport à la DGFiP en matière
d’obligations de télédéclaration et de télépaiement
. Par exemple, les
déclarations électroniques relatives aux taxes intérieures de consommation
sur l’électricité et le gaz naturel
(9,9 Md€)
ne sont pas obligatoires.
La progression de la dématérialisation de la gestion fiscale doit
permettre de réaliser des gains d’efficience. Les économies qui seront
dégagées par le progrès de la dématérialisation des procédures devront être
docume
ntées et assorties d’un calendrier précis, afin d’anticiper la
réaffectation des agents et la réorganisation des services.
3 -
Des efforts de simplification de la fiscalité
Depuis 2013, les réformes de la fiscalité gérée par la Douane ont
d’abord concerné le
régime de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) à
l’importation, pour tenir compte des attentes en matière d’adaptation du
régime
fiscal
au
développement
des
échanges
commerciaux.
Conformément aux recommandations de la Cour
58
, l
’autoliquidation de la
TVA à l’im
portation a été autorisée en 2015. En 2019, 55,3 % de la TVA
à l’importation a été autoliquidée (
13,5
Md€ sur
un total de 24,6 Md
€
).
57
Stratégie annexée à la loi n° 2018-727 du 10 août 2018 pour un État au service d'une
société de confiance.
58
Cour des comptes, « Les missions fiscales de la Douane : un rôle et une organisation
à repenser », in
Rapport public annuel 2014
, Tome I - volume 2, p. 37-64.
La Documentation française, février 2014, 417 p., disponible sur www.ccomptes.fr.
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64
Un mouvement de suppression de taxes à faible rendement,
c’est
-à-dire dont le rendement annuel ne dépasse pas 150
M€, a été
engagé,
allant dans le sens des recommandations de la Cour
59
. Depuis 2014,
11 taxes obsolètes et aux coûts de gestion disproportionnés ont été
abrogées.
Tableau n° 5 :
taxes à faible rendement supprimées depuis 2013
Dénomination de la taxe
Rendement
(en M€)
Année de la
suppression
Taxe sur les appareils automatiques
0,4
2015
Taxe sur les manifestations sportives
22,5
2015
Contribution au poinçon
6,3
2019
Taxe sur les farines
63,8
2019
Taxe sur les céréales
15,6
2019
Contribution de sécurité de la propriété maritime
1,0
2019
Taxe sur la chaptalisation
1,4
2019
Taxe sur l’édition des ouvrages de librairie
0,0
2019
Taxe sur les appareils de reproduction
4,3
2019
Taxe sur les huiles alimentaires
4,5
2020
Taxe sur les produits de la mer et de l’aquaculture
3,0
2020
TOTAL
122,8 M€
2015-2020
Source : Douane, traitement Cour des comptes
Ces mesures récentes de suppression de taxes ne se sont pas encore
traduites par des
gains d’efficience. Des
économies chiffrées doivent
désormais être programmées par la DGDDI pour réaliser les gains de
productivité
attendus d’une telle réforme
.
59
Voir récemment : Cour des comptes,
Les taxes à faible rendement
, référé,
décembre 2018, 7 p., disponible sur www.ccomptes.fr.
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UNE ADAPTATION ENGAGÉE FACE À UN CONTEXTE EN FORTE MUTATION
65
IV -
La préparation des conséquences
attendues du
Brexit
A -
Une période d’
incertitudes ouverte
par le référendum britannique de 2016
À la suite du référendum du 23 juin 2016, le Royaume-Uni a engagé
la procédure de retrait de l’Union européenne. L
a sortie de cet État membre
devrait marquer la fin de la libre circulation des personnes et des
marchandises et impliquer le rétablissement d
’une frontière extérieure
entre ces deux zones.
L’ensemble
des missions de la DGDDI est concerné par la
restauration de contrôles migratoires et de règles à l’importation, à
l’exportation et à la circulation des marchandises tierces sur le territoire
douanier de l’Union. L’accroissement des procédures douanières
serait
important, puisque ce sont près de cinq millions de poids lourds qui
traversent chaque année la Manche et la Mer du Nord à partir ou à
destination des côtes françaises. Sous l’effet du
Brexit
, la part des pays tiers
passerait de 42,5 % à 46,4 % dans le total des importations françaises et de
40,9 % à 48,1 % dans celui des exportations françaises
60
.
À compter de 2017, la Douane a initié la préparation du
rétablissement de formalités et de contrôles envisagé pour le 29 mars 2019,
repoussé une première fois au 31 octobre 2019, puis au 31 janvier 2020 et
enfin au 31 décembre 2020.
B -
Un fort engagement dans la préparation du
Brexit
En premier lieu, la Douane a organisé une campagne de
communication et d’information à destination des particuliers et des
entreprises. Un guide douanier de préparation au
Brexit
a été établi afin de
présenter les futures démarches douanières et souligner la nécessité
d’anticiper le rétablissement des contrôles
. Des vecteurs ciblés de
communication ont par ailleurs été mobilisés à destination des acteurs
économiques commerçant avec le Royaume-Uni mais
qui n’entretenaient
pas jusqu’alors de relations commerciales avec
des pays tiers.
60
Évaluation établie par la DGDDI en août 2017 sur la base des données de 2014.
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66
En deuxième lieu, la Douane a engagé l’adaptation de ses
procédures afin de favoriser la fluidité de la circulation des marchandises
aux points de passage avec le Royaume-Uni, tout en assurant le niveau de
contrôle requis par la réglementation. En lien avec les autres
administrations et certains acteurs économiques
61
, les infrastructures
d’accueil et la signalétique ont été modifiées et le système d’information
« SI
Brexit
» a été élaboré afin d’automatiser le passage de la frontière par
les poids lourds.
Ce dispositif, appelé « frontière intelligente », doit être appliqué à
l’ensemble des points d'entrée et de s
ortie de la façade de la Manche-Mer
du Nord et permettre de limiter les arrêts des véhicules au point frontière.
Il repose sur les trois principes d’anticipation des déclarations avant
l’arrivée au poste frontière, d’identification des poids lourds par
l’association des plaques d’immatriculation aux déclarations douanières et
d’automatisation du traitement des flux de données.
Enfin, la DGDDI a procédé à la révision de la carte des
implantations douanières et de la répartition des effectifs pour répondre à
la gestion des nouveaux flux de personnes et de marchandises. Les besoins
en emplois induits par le
Brexit
ont été estimés par la Douane à 700 agents,
répartis sur la période de 2018 à 2020
62
et entre les opérations
commerciales (44 %) et de surveillance (56 %
). L’ampleur du renfort en
effectifs sollicité par la DGDDI pour anticiper le
Brexit
est similaire à celui
annoncé dans les principaux États membres (cf. annexe n° 9).
Fin 2019, les effectifs des services territoriaux et à compétence
nationale ont été abondés de 396 emplois. Tenant compte des zones
frontalières avec le Royaume-Uni, les renforts de la DGDDI ont été
concentrés dans les Hauts-de-France (+ 190), en Île-de-France (+ 57) et en
Normandie (+ 38). Ces effectifs sont complétés en 2020 par la prise de
fonction de 237 agents, nouvellement recrutés et actuellement en
formation, portant le total à 633 agents sur les 700 fléchés dans le cadre des
recrutements en préparation au
Brexit
.
61
Trois compagnies maritimes, huit ports, le gestionnaire du tunnel sous la Manche.
62
Les emplois supplémentaires inscrits en lois de finances initiale se sont élevés à 250
pour 2018, à 350 pour 2019 et à 100 pour 2020.
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67
Carte n° 2 :
répartition géographique des renforts douaniers
en France métropolitaine (fin 2019)
Source : DGDDI, traitement Cour
En particulier, dans la région des Hauts-de-France, deux bureaux de
contrôles douaniers ouverts en continu ont été créés à Calais et à
Dunkerque pour couvrir les zones portuaires du tunnel. Quatre brigades de
surveillance extérieure ont été ouvertes à Calais
63
, Lille et Dunkerque.
63
Les deux brigades de surveillance intérieure de Calais ont été transformées en
brigades de surveillance extérieure.
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68
Au cours de l’année 2020, la DGDDI a poursuivi sa préparation, en
maintenant notamment l’organisation de projet mise en place pour assurer la
coordination des travaux en interne et en interaction avec les autres
administrations concernées. Les reports successifs du
Brexit
ont permis à la
Douane de renforcer sa préparation opérationnelle, notamment en matière de
système d’information
. À
l’inverse
, ils ont rendu plus complexe sa gestion
des ressources humaines et sa relation avec les acteurs économiques
concernés par la sortie du Royaume-
Uni de l’Union. En particulier, une
partie du personnel affecté dans les bureaux nouvellement créés dans les
Hauts-de-
France ont dû faire l’objet d’affectations succesives pour tenir
compte de l’insuffisante activité d’ici la réalisation du
Brexit
.
En l’absence de données financières précises et exhaustives, le coût
total de la préparation au
Brexit
pour la Douane ne peut être établi.
Plusieurs centres de dépenses peuvent néanmoins être identifiés. En 2019,
la DGDDI a consacré 6,2
M€ à l’élaboration du système d’information et
à la mise à jour des applications, ainsi que 1,4
M€ à l’achat de véhicules.
Les renforts d’effectifs, qui
devraient représenter une dépense de 17,4
M€
en 2020, ont tenu compte de l’hypothèse d’un
Brexit
sans accord.
______________________ CONCLUSION ______________________
La Douane a constamment adapté son organisation et ses méthodes
de travail pour tenir compte des évolutions profondes des conditions dans
lesquelles elle exerce ses missions. Elle a dû faire face aux modifications
des réglementations c
ommunautaires qu’elle met en œuvre
et aux
transformations rapides du commerce mondial. Celui-ci
s’est massifié
ces
dernières années, notamment à travers le transport maritime par
conteneurs,
et a changé de nature avec l’explosion du e
-commerce. La
DGDDI a été confrontée à de nouvelles menaces en matière de sécurité et
de lutte contre la fraude ainsi qu’à des attentes renforcées s’agissant de sa
gestion de la fiscalité.
Depuis 2016, elle a dû mettre
en œuvre le nouveau code des douanes
de l’Union
, qui modifie en profondeur les procédures en matière de
dédouanement et d’accompagnement des opérateurs économiques. Elle
s’est également attachée à simplifier la
gestion de la fiscalité dont elle a la
charge et à engager une rationalisation de son réseau comptable. Elle a
bénéficié d’effectifs supplémentaires au titre des plans de lu
tte
antiterroriste
qui ont permis, pour une partie seulement d’entre eux, de
renforcer son action en matière de renseignement.
Enfin, elle s’est efforcée
d’anticiper les conséquences poss
ibles de la sortie du Royaume-Uni de
l’
union douanière (
Brexit
), dont la date a été reportée à plusieurs reprises.
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69
Ces importants efforts de modernisation et ces multiples
transformations,
touchant tant à l’organisation administrative qu’aux
modalités d’ex
ercice des missions, étaient particulièrement nécessaires au
regard des mutations de l’environnement. Ils s’imposent à l’ensemble des
services douaniers des pays de l’Union
. D
e leur capacité d’adaptation
peuvent dépendre des décisions des opérateurs économiques de localiser
leurs opérations de dédouanement et les chaînes logistiques dans un pays
plutôt qu’un autre.
Néanmoins, en France,
l’impact de
ces efforts est limité par la
persistance d
’importantes
rigidités internes qui entravent le processus de
transformation.
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Chapitre III
Une transformation freinée
par des rigidités de gestion
et une démarche de performance
insuffisante
Les chantiers de transformation engagés ces dernières années ont
permis à la Douane
d’adapter son organisation et l’exercice de ses missions
aux nouveaux enjeux. Cet effort de modernisation demeure freiné par les
modalités de gestion de la DGDDI. Ces obstacles concernent le pilotage
des ressources humaines, qui tend à privilégier l’horizon de court terme à
la vision stratégique (I). Ils proviennent aussi des difficultés d
’allocation et
de gestion de certains moyens (II). Ils résultent enfin de la faiblesse des
outils nécessaires au développement d’une culture de la performance et du
service à l’usager (
III).
I -
Une gestion stratégique
des ressources humaines à construire
L’
augmentation des moyens humains de la Douane au cours de ces
dernières années
s’est accompagnée d’une meilleure gestion des effectifs,
une démarche qui devrait être poursuivie (A). En revanche, le nécessaire
effort de rationalisat
ion des régimes statutaires et indemnitaires n’a pas
encore été amorcé (B
). Cet important chantier devrait s’accompagner de
l’élaboration d’une
gestion dynamique des talents et des compétences (C).
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COUR DES COMPTES
72
A -
Un pilotage des effectifs en cours de structuration
1 -
Une maîtrise de la masse salariale à confirmer
Deux phases peuvent être distinguées dans la gestion des effectifs
au cours des années 2010. Durant la période de 2011 à 2015, des
dépassements significatifs des dépenses de personnel ont été enregistrés
simultanéme
nt à la contraction des effectifs (même si l’écotaxe poids
lourds a conduit à la création d’emplois). Ces dépassements atteignaient un
montant moyen de 7,5
M€ par an, soit 1
% des crédits totaux.
À l’inverse, la période de 2016 à 2019 se caractérise par l
e respect
des dépenses prévisionnelles de personnel mais ce respect a été facilité par
des créations nettes d’emplois. Une attention renforcée devra donc être
portée au respect des crédits votés par le Parlement au cours des prochains
exercices et à un renouvellement des instruments de gestion des effectifs
64
.
L’écotaxe poids lourds : des créations d’emplois
pour une taxe abandonnée
La création de l’écotaxe poids lourds
devait être mise en œuvre au
sein de la Douane par le redéploiement d’effectifs ainsi que
le recrutement
complémentaire d’agents. Compte tenu de sa temporalité, la décision
politique de suspension puis d’abandon de cette taxe en 2014 ne s’est pas
traduite par la diminution des effectifs à due concurrence de ceux recrutés.
En effet, la DGDDI a substitué au service de la taxe poids lourds de
Metz un service national douanier chargé de la fiscalité routière, une
compétence auparavant décentralisée dans les directions interrégionales.
L’ouverture au 1
er
juillet 2017 de ce nouveau service s’est trad
uite par la
création nette de 83 emplois. Il centralise la gestion et le recouvrement de
la TSVR et le traitement des demandes de remboursement de la TICPE.
Des efforts de rationalisation de la gestion des deux procédures ont
par la suite été entrepris afin de diminuer les délais et les coûts, notamment
par le déploiement des téléprocédures. Si les effectifs ont en conséquence
reflué (- 61
emplois en deux ans), ils s’établissent toujours à un niveau
supérieur à celui de 2017.
64
Durant la période de croissance des effectifs, le contrôleur budgétaire-comptable
ministériel a systématiquement émis un avis défavorable au document prévisionnel de
gestion des emplois et de crédits de personnel.
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UNE TRANSFORMATION FREINÉE PAR DES RIGIDITÉS DE GESTION
ET UNE DÉMARCHE DE PERFORMANCE INSUFFISANTE
73
2 -
Des réformes à amplifier dans la gestion
des ressources humaines
La Douane a entrepris deux réformes visant à accroître l’efficacité
et l’efficience de la gestion des ressources humaines. La première, initiée
en 2013, poursuit l’objectif de dématérialisation des procédures par la mise
en place progressive d’un centre de service ressources humaines
65
(CSRH).
La seconde, mise en œuvre en 2018, tend à clarifier le rôle des différents
acteurs afin de séparer le pilotage des actes de gestion.
En matière d’efficience, les résultats de ce mou
vement de réforme
tardent à se concrétiser. La montée en puissance progressive du CSRH ainsi
que le choix retenu de revoir la chaîne de la paye et la production des actes
administratifs n’ont pas conduit à une réduction des effectifs affectés à la
gestion des ressources humaines. Ceux-ci ont même légèrement progressé.
Il revient
désormais à la Douane d’établir une trajectoire d’économies et
de réaliser les gains de productivité découlant de ces réformes.
B -
Des régimes dérogatoires à la fois complexes
et coûteux
1 -
Des régimes statutaires dérogatoires
avantageux et parfois injustifiés
Le régime statutaire des douaniers présente de nombreuses
spécificités tenant pour partie aux conditions particulières d’exercice des
missions douanières qui engendrent diverses sujétions, notamment pour les
agents de la branche surveillance qui occupent un emploi classé dans la
catégorie active
66
(activité de nuit, les dimanches et jours fériés, travaux
pénibles ou dangereux, exercices physiques, etc.).
Des dispositions dérogatoires ont été mises en place. La durée
annuelle du travail est réduite de 1 607 heures à 1 563 heures
67
pour les
agents de la branche surveillance, des compensations financières sont
accordées et un droit à repos compensateur est ouvert. Sous certaines
conditions, les douaniers peuvent faire liquider leur pension par
65
Service chargé de la préliquidation d
e la paye et d’actes administratifs individuels.
66
La notion correspond aux emplois présentant un risque particulier ou des fatigues
exceptionnelles (art. L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite).
67
Décret n° 2000-815 du 25 août 2000 relatif à l'aménagement et à la réduction du
temps de travail dans la fonction publique de l'État.
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COUR DES COMPTES
74
anticipation à partir de l’âge de 57
ans. Ce dispositif, dont bénéficient
d’autres fonctionnaires en raison du risque que présente leur emploi ou de
la bonne forme physique qu’il requiert, permet à s
es bénéficiaires de partir
en retraite presque trois ans et demi en moyenne avant les autres douaniers.
En revanche, ces avantages dérogatoires sont injustifiés lorsque les
emplois ne présentent pas de risque particulier ou
n’engendrent pas de
fatigues exceptionnelles. Près de cent agents bénéficient des avantages
tenant au rattachement à la branche surveillance alors qu’ils occupent des
fonctions qui, sans méconnaître leur importance, présentent un lien très
ténu avec les missions de surveillance (secrétariat, agents de maintenance,
chauffeurs, etc.). De la même façon, les agents des bureaux de garantie
bénéficient d’un temps de travail réduit à 1
572 heures alors que les
considérations de pénibilité se sont effacées avec la modernisation des
méthodes de travail.
Cette diversité de régimes dérogatoires, qui résulte pour partie d’un
dialogue social parfois conflictuel, constitue un frein à la mobilité des
agents. L
es marges de manœuvre pour faire évoluer les effectifs et assurer
une bonne adaptation des profils aux postes sont fortement contraintes. Il
résulte de cette situation, marquée par d’excessives rigidités, des taux de
vacance parfois élevés au sein de la DGDDI et des décalages persistants
entre les organigrammes et les besoins.
2 -
Un régime indemnitaire foisonnant, particulièrement favorable
et partiellement obsolète
La rémunération des douaniers se caractérise par un volet
indemnitaire à la fois plus complexe et plus élevé que dans le reste de la
fonction publique. Peu lisible, le régime indemnitaire de la DGDDI
comporte 94 dispositifs qui représentent 37,4 % de la rémunération, contre
22,2 % en moyenne pour les fonctionnaires et 29,8 % pour les
fonctionnaires d’Etat hors enseignants
68
.
68
DGAFP,
Rapport annuel sur l’état
de la fonction publique
–
édition 2019
, 680 p.
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UNE TRANSFORMATION FREINÉE PAR DES RIGIDITÉS DE GESTION
ET UNE DÉMARCHE DE PERFORMANCE INSUFFISANTE
75
Trois exemples
d’
indemnités obsolètes
L’indemnité de petit équip
ement, instituée
en 1970 et d’un montant
moyen de 108
€ par an, bénéficie aux agents des bureaux de la garantie des
métaux précieux «
pour usure ou perte accidentelle de vêtements
». Si le
dispositif pouvait être justifié par le risque de projection sur les vêtements
des agents lors de la manipulation des pro
duits chimiques, l’évolution des
technologies l’a rendu cadu
c.
L’indemnité de garde des chapiteaux d’alambics est versée à
quelques agents. Elle s’établit annuellement à 3,84
€ par chapiteau, pour un
montant annuel allant de 16
€ à 324
€ par agent.
Une indemnité de langue étrangère, établie en 1975, est accordée
pour un montant moyen de 165
€ à certains agents dont l’utilisation d’une
langue étrangère facilite l’exercice des missions. En pratique, l’attribution
de l’indemnité n’apparaît pas corrélée à l’usage d’une langue étrangère.
Le foisonnement indemnitaire aboutit à des rémunérations en
moyenne supérieures à celles des autres services du ministère des finances.
À indice égal, les écarts de rémunération dépassent 20 % entre les
douaniers de la branche surveillance et les autres agents du ministère.
Ces écarts ne sont pas en voie de résorption. Au contraire, le
protocole d’accord conclu le 17 mai 2019 à la suite d’un mouvement social
par le ministre
de l’action et des comptes publics et les organisation
s
syndicales prévoit l’augmentation de plusieurs indemnités. Les douaniers
de l’ensemble
des branches bénéficient ainsi de revalorisations
indemnitaires croissantes. L’accord devrait se traduire par une dépense
indemnitaire supplémentaire de 2,6
M€ dès 2019, 14,7
M€ en 2020,
16,2
M€ en 2021 et 17,0 M€ par an à partir de 2022.
Enfin, la rémunération des agents est presque indépendante de la
manière de servir
. Les trois quarts du régime indemnitaire relèvent d’un
tronc commun, alloué à chacun des douaniers. Seules trois indemnités sont
modulées selon la qualité du travail, les qualités relationnelles et
l’implication personnelle de l’agent. Ce système indemnitaire se cumule
avec les modalités d’affectation des douaniers, largement déterminées par
l’ancienneté individuelle.
Outre la charge financière et administrative qu’il induit, le régime
indem
nitaire foisonnant et les modalités d’affectation représentent une
source d’insatisfaction pour les agents de la Douane, freinent les mobilités
fonctionnelles et géographiques et créent des écarts entre les besoins du
service et les moyens qui lui sont alloués.
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76
Ce constat a conduit la DGDDI à adopter fin 2019 un plan d’action
pluriannuel, qui devrait permettre la diminution du nombre d’indemnités et
leur modernisation, à établir début 2020 des lignes directrices de gestion
relatives à la mobilité, qui visent notamment à tenir davantage compte des
profils des agents dans les recrutements, ainsi qu’à conduire
durant
l’année
2020 des réflexions en matière de rémunération au mérite. Cette démarche
devrait être poursuivie, tant en matière indemnitaire que statutaire.
3 -
Des dysfonctionnements persistants
dans la politique de logement
La « Masse des douanes » est un établissement public placé sous la
tutelle du ministre chargé des douanes. Elle a pour mission de pourvoir au
logement des agents de la DGDDI
69
. À cette
fin, l’établissement assure la
gestion d’un parc
domanial de logements (2 073 logements en 2019) et
offre des places en logement locatif (960 logements). L
’activité locative
bénéficie principalement aux douaniers en activité. Elle profite aussi à des
douan
iers à la retraite ainsi qu’
à des agents publics non douaniers.
Dans un référé
70
adressé au ministre des finances et des comptes
publics et au secrétaire d’État chargé du budget, la Cour avait relevé en
2016 une série de dysfonctionnements dans la gestion d
e l’établissement
et
recommandait de «
concevoir puis mettre en œuvre, dans un délai de trois
ans, une politique de logement en faveur des douaniers impliquant la
disparition de la « Masse des douanes »
».
Au terme de cette période de trois ans, la Cour relève que sa
recommandation n’a pas été mise en œuvre et qu’il n’a pas été remédié aux
principales défaillances de gestion de
l’établissement
. L
e coût net de l’aide
au logement s’élève à 6,6
M€, soit environ 400
€ par mois et par agent
public logé dans le parc domanial. La « Masse des douanes » conserve un
stock élevé de loyers impayés, dont 70 % environ sont imputables à des
agents de la Douane. Le taux de vacance des logements du parc domanial
se maintient à un niveau bien plus élevé (29 % en 2019) que dans le parc
immobilier social national (3 %
71
) et excède 75 % à certains endroits.
69
Décret n° 2015-462 du 23 avril 2015 portant statut de la « Masse des douanes ».
70
Cf. Cour des comptes,
Le logement des douaniers par la « Masse des douanes »
,
référé, mai 2016, disponible sur www.ccomptes.fr.
71
Insee,
Tableaux de l'économie française. Édition 2019.
Mars 2019. 278 p.
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UNE TRANSFORMATION FREINÉE PAR DES RIGIDITÉS DE GESTION
ET UNE DÉMARCHE DE PERFORMANCE INSUFFISANTE
77
Cette faible occupation
s’explique notamment
par la vétusté
d’une
partie du parc immobilier de la « Masse des douanes » mais aussi par une
implantation des logements proposés
par l’établissement
qui ne correspond
plus suffisamment aux besoins des agents de la Douane.
Pourtant, l
’accès à un parc de logements devrai
t permettre de réduire
les difficultés locatives rencontrées par les agents affectés dans certaines
directions régionales, notamment en Île-de-France. Dans un contexte de
reconfiguration de ses missions et de son maillage territorial, la DGDDI
devrait renouveler sa politique de logement pour favoriser la mobilité des
douaniers. Les réflexions ouvertes par la Douane début 2020 sur la stratégie
patrimoniale de la « Masse des douanes » et son articulation avec la
politique plus large de logement des agents pub
lics s’inscrivent dans cette
logique.
C -
Mieux anticiper les besoins en effectifs
et en compétences
1 -
Une mobilité des agents à favoriser
Les mobilités entre les branches douanières sont très peu
nombreuses. En 2019, seuls 214 agents ont changé de branche (soit 1,2 %
des effectifs de la DGDDI). Le régime indemnitaire et les modalités de
déroulement des carrières constituent un frein à la mobilité. La
rémunération est plus favorable au sein de la branche surveillance, puisqu’à
indice égal un agent de cette branche
perçoit environ 10 % de plus qu’un
agent de la branche de l’
Ag-Opco.
De surcroît, l’ambition de détecter les «
hauts potentiels » par un
examen professionnel en début de carrière fige les parcours de carrière et
rend difficiles
les réorientations. L’ac
cès à la filière dite « courte » conduit
à identifier dès le début de carrière et de manière quasiment irréversible les
agents qui auront vocation à occuper les postes à plus forte responsabilité.
La faiblesse de la mobilité interne s’ajoute à l’ouverture
limitée de
la Douane aux
agents issus d’autres administrations
(186 agents, soit 1,1 %
des effectifs). Inversement, une faible part des personnels douaniers
(1,8
%) est affectée dans d’autres administrations. Si cette faible mobilité
s’explique en partie par l’attachement des douaniers à leur métier et à leur
administration, elle est aussi une conséquence du régime indemnitaire.
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COUR DES COMPTES
78
Enfin,
l’effectif de contractuels demeure très limité. À titre
d’illustration, seuls 9,4
% des agents de la Douane chargés des systèmes
d’information
en 2018
sont des contractuels, une part bien plus faible qu’à
la DGFiP (73 %). La diversité des modalités de recrutement favorise
pourtant le décloisonnement des structures et le partage de bonnes
pratiques. À cet égard, la Cour a recommandé dans son rapport public
annuel de 2020 d’augmenter le recours aux contractuels
72
.
2 -
Une gestion prévisionnelle des compétences à construire
La Douane propose une grande diversité de métiers et de carrières.
Dans la seule branche de la surveillance, 120 métiers sont répertoriés et
certains d’entre eux se trouvent en tension. C’est notamment le cas pour
les compétences spécialisées en matière aéromaritime, au sein desquelles
les postes d’officiers aériens et navals, de mécaniciens de marine et de
chef
s de quart sont structurellement déficitaires. L’accumulation d’heures
d’avance, qui n’est pas propre aux seules activités aéromaritimes
et
concerne plus largement la branche surveillance, aggrave ce constat et
pourrait mettre en cause l’exercice des
missions douanières.
L’accumulation d’heures d’avance
dans la surveillance en mer
La nature des missions de la Douane aéromaritime conduit les agents à
effectuer des heures supplémentaires non programmées par nécessité de service
(contrôles approfondis, procédures contentieuses, etc.). Pour la plupart, ces
heures ne font pas l’objet d’une indemnisation mais d’une récupération horaire.
Compte tenu du besoin de présence maritime tout au long de l’année et
des sous-
effectifs, le stock d’heures d’avance augmente a
u fil des ans. Cette
évolution est particulièrement nette pour les fonctions dites bloquantes,
exercées par les agents dont la présence à bord est indispensable au
fonctionnement des bâtiments. Par exemple, à la date du 1
er
novembre 2019,
cinq commandants
de bord présentent plus de 181 jours d’avance, un volume
qui atteint 450 jours pour l’un d’entre eux.
Déjà, dans une note de 2014, la DGDDI évoquait un «
arrêt désormais
inévitable, à court terme, des moyens navals faute d’agents pour assurer les
missions à la mer
». Pourtant, depuis lors, aucun programme d’ampleur n’a été
mis en œuvre pour remédier à cette situation. Dans son projet de budget
opérationnel de programme pour 2020, qui liste des actions pour enrayer le
phénomène, la DNGCD indique qu’à l’hori
zon de deux ans, près de 25 % du
personnel est susceptible de partir à la retraite.
72
Cour des comptes, « Disposer des personnels qualifiés pour réussir la transformation
numérique », in
Rapport public annuel
2020, Tome II, La Documentation française,
février 2020, 284 p., disponible sur www.ccomptes.fr.
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UNE TRANSFORMATION FREINÉE PAR DES RIGIDITÉS DE GESTION
ET UNE DÉMARCHE DE PERFORMANCE INSUFFISANTE
79
Par ailleurs, le large éventail de métiers est amené à se transformer
sous l’effet du recours accru aux outils numériques, de l’évolution d
es
compétences ou des changements
de l’environnement juridique.
Cette situation rend indispensable le déploiement d’une
gestion
prévisionnelle des effectifs, des emplois et des compétences (GPEEC
73
).
Plusieurs actions conduites par la Douane depuis fin 2018 témoignent de
la volonté d’anti
ciper les besoins. La sous-direction des ressources
humaines et des relations sociales a été restructurée en 2018 pour
rapprocher la politique du recrutement et de la formation de la GPEEC.
Depuis, des mesures ponctuelles ont été prises, notamment à destination
des métiers du numérique, et une réflexion sur l’évolution des métiers des
cadres douaniers a été menée.
Cette démarche récente demeure nettement insuffisante au regard
des besoins. Plusieurs métiers douaniers connaissent un écart croissant
entre les profils disponibles et les postes ouverts. En particulier, le nombre
de postes à profil informatique vacants reste très élevé : 80 % des postes
d’informaticiens de catégories A et B ouverts par la DGDDI en 2018 n’ont
pas été pourvus, contre 44 % au sein de la DGFiP. En 2019, les deux tiers
de ces postes n’ont pas été pourvus.
La GPEEC douanière demeure donc à élaborer, afin de favoriser une
plus grande fluidité des parcours professionnels, de réduire les difficultés
de recrutement et d’accompagner la strat
égie de modernisation de la
DGDDI. À cet égard, les dispositions de la loi de transformation de la
fonction publique du 6 août 2019
74
constituent un contexte favorable. Des
actions résolues devraient donc être entreprises pour tenir compte de
l’évolution at
tendue des missions de la Douane.
II -
D
’importantes
difficultés à piloter
l’allocation et la gestion des moyens
Différentes enquêtes de la Cour ont mis en évidence la faiblesse des
outils méthodologiques de la Douane lui permettant
de mesurer l’activité
des services.
Faute d’en disposer, elle n’assure que très imparfaitement
l’allocation de ses ressources (
A) et connaît des difficultés de gestion de
ses moyens, notamment aéromaritimes (B).
73
Voir notamment : Cour des comptes,
L’affectation et la mobilité des fonctionnaires
de l’État : pour une gestion plus active afin de mieux répondre aux besoins des usagers
,
rapport public thématique, La Documentation française, juillet 2019, 140 p., disponible
sur www.ccomptes.fr.
74
Le comité social est désormais compétent pour traiter des orientations stratégiques
des ressources humaines et le rapport social unique porte notamment sur la GPEEC.
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COUR DES COMPTES
80
A -
D
es outils de suivi de l’activité
et de pilotage à renforcer
La Douan
e ne s’est pas dotée
d
’un
outil fiable pour affecter les
moyens humains à chacune des structures. De plus, elle rencontre des
difficultés pour mesurer la pertinence de sa politique de contrôle. Enfin,
elle
n’est pas en mesure de documenter correctement le
coût de chacune
des
trois grandes missions qu’elle exerce. De manière plus général
e, elle
ne dispose pas d’éléments d’appréciation lui permettant de se comparer aux
autres douanes européennes.
1 -
Un « effectif de référence » adapté
à la correcte répartition des moyens à construire en priorité
La Douane utilise un « effectif de référence » pour allouer des
emplois aux services territoriaux. Cet effectif de référence décline le
plafond autorisé d’emplois
et constitue un objectif de moyen terme vers
lequel les effectifs réels doivent tendre. Les sous-effectifs établis par
comparaison entre l’effectif réel et l’effectif de référence permettent
d’établir les besoins en vue du tableau de mutation.
À la différence d’autres administrations, cet effectif de référence
n
’est pas calculé à partir d’indicateurs d’activité du service considéré et de
ratios moyens de productivité pour l’ensemble des services.
Il est
davantage une base historique qui évolue à la marge à chaque dialogue de
gestion en fonction des réorganisations des missions ou des services.
L’absence de lien direct avec les statistiques d’activité est
regrettable, notamment pour les services des opérations commerciales ou
des contributions indirectes. En effet, ces derniers fonctionnent à partir
d’indicateurs d’activité (les demandes des entreprises), qui devraient
permettre de fixer objectivement des niveaux adéquats
d’effectifs « de
référence » et de les faire varier finement et avec davantage de réactivité.
Ce défaut méthodologique est préoccupant car il ne permet pas
d’objectiver les besoins, ni de réallouer
les moyens
en fonction de l’activité
réelle. Il devra être rapidement corrigé par la DGDDI.
2 -
Des coûts liés à l’exercice des missions
à mieux documenter
Jusqu’en 2011, la D
G
DDI disposait d’une comptabili
té analytique
reposant sur plusieurs outils informatiques. Le déploiement de Chorus et la
disparition concomitante de l’application qui permettait un suivi des
dépenses par service
ne permettent plus l’accès à
cette fonctionnalité
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UNE TRANSFORMATION FREINÉE PAR DES RIGIDITÉS DE GESTION
ET UNE DÉMARCHE DE PERFORMANCE INSUFFISANTE
81
analytique. Cette faibles
se, imparfaitement compensée par l’activité
de la
sous-direction réseau, avait déjà été relevée par la Cour en 2015
75
.
Depuis, l
es outils méthodologiques n’ont pas été améliorés
puisqu’en 2019 la Douane n’a pas été en mesure de fournir à la Cour un
coût co
mplet de l’exercice de
ses missions. En particulier, la Douane ne
calcule plus le coût complet de la gestion fiscale depuis 2017, information
pourtant indispensable pour l’élaboration d’un des indicateurs de
performance transmis au Parlement.
La Douane devrait élaborer des outils lui permettant de calculer le
coût complet de chacune de ses trois grandes missions et de procéder à une
analyse fine des coûts. Cette mission est, depuis octobre 2018, confiée à la
sous-direction réseau, qui devra concevoir et utiliser ces indispensables
outils de pilotage
de l’activité
.
3 -
Une mesure de la qualité des contrôles douaniers à améliorer
La Douane est en recherche permanente d’un équilibre entre le
contrôle et la facilitation des échanges. La qualité et la pertinence du
ciblage des contrôles devraient permettre de trouver un équilibre entre ces
deux logiques.
L’orientation
des contrôles repose sur l
’analyse de risque
,
portant
à la fois sur l’ensemble des renseignements collectés et exploités
par la DGDDI et sur les flux de marchandises dédouanés. Elle est
désormais partiellement automatisée au niveau national au sein du Sarc.
La France participe aux
travaux d’harmonisation des contrôles au
sein de l’Union.
L’harmonisation des pratiques est indispensable en
matière de contrôle des flux de marchandises pour atteindre dans
l’Union
un équilibre semblable entre contrôle et facilitation des échanges.
Dans cette logique, un rapport spécial de la Cour des comptes
européenne de 2017
76
dénonce les pratiques illicites des opérateurs qui
recherchent «
le point d’entrée le plus favorable
» sur le territoire de
l’Union, c’est
-à-
dire celui ou les contrôles à l’importation sont les moins
rigoureux afin de payer le moins possible de droits de douane. Les
différences de niveau d’exigences e
ntre les politiques de contrôles menées
par les différents États membres peuvent conduire au détournement de flux
logistiques vers des destinations plus « accommodantes ».
75
Cour des comptes,
L'action de la Douane dans la lutte contre les fraudes et trafics
,
communication au comité d’évaluation et de conrôle de l’Assemblée nationale,
janvier 2015, disponible sur www.ccomptes.fr.
76
Cour des comptes européenne,
Procédures d’importation
: les intérêts financiers de
l’UE pâtissent d’insuffisances au niveau du cadre juridique et d’une mise en œuvre
inefficace
, rapport spécial n° 19/2017, 2017.
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COUR DES COMPTES
82
En fonction des risques et des enjeux déterminés par l’analyse de
risques et par le ciblage et la programmation des contrôles, le moment le
plus opportun de contrôles des flux est déterminé soit immédiatement, lors
du dédouanement (contrôles
ex ante
), soit après le dédouanement
(contrôles
ex post
, cf. annexe n° 10). En la matière, la France, comme les
autres pays de l’union douanière,
allège les contrôles
ex ante
, notamment
pour les opérateurs bénéficiant d’un agrément OEA, et cible les contrôles
ex post
grâce à une analyse des risques effectuée soit au niveau national par
le Sarc, soit au niveau local par les pôles régionaux
d’orientations des
contrôles.
En ce qui concerne les allègements ou modulations des taux de
contrôle devant bénéficier aux opérateurs détenteurs du label OEA, la
Douane vérifie la réalité des allègements pratiqués sur les contrôles à
travers des compteurs implantés dans le système de dédouanement Delta.
Or, les « compteurs de contrôle
» implantés dans l’applicatif de
dédouanement Delta devant permettre aux agents de la douane de respecter
les engagements d’allègements
ne concernent ni les contrôles que la
Douane exerce pour le compte d’autres administrations, ni les contrôles
douaniers
ex post
. Malgré leur existence, les opérateurs agréés estiment ne
pas percevoir la réalité des allègements de contrôle.
Toutefois, il n
’existe pas de démarche de contrôle interne normé
e au
niveau national qui porterait sur le respect de ces modulations, en fonction
notamment du risque présenté par les opérateurs. Ce respect
n’est donc pas
mesuré de manière indiscutable. La Douane doit être en mesure de
démontrer aux opérateurs agréés la réalité de l’
allègement des contrôles
douaniers auxquels ils sont soumis ainsi que la priorité donnée à leurs
marchandises lors de ces contrôles.
La réalité des contrôles
ex post
est encore plus mal connue des
services douaniers, rendant impossible toute vision comparée (cf.
infra
).
Cette situation empêche la Douane de mesurer précisément son activité,
mais aussi de justifier les moyens dont elle dispose au regard de l’activité.
La Douane doit désormais se doter sans délai des outils de mesure de ces
contrôles en mettant en place un dispositif de contrôle interne permettant
d’indiquer le nombre, la nature, les cibles et l’intensité de
ses contrôles.
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UNE TRANSFORMATION FREINÉE PAR DES RIGIDITÉS DE GESTION
ET UNE DÉMARCHE DE PERFORMANCE INSUFFISANTE
83
4 -
Des outils permettant de se comparer aux autres douanes
européennes à élaborer
L’incapacité de la Douane à produire un chiffre fiable des contrôles
ex post
l’empêche de se comparer
à
ses homologues de l’Union
européenne. Ainsi, la DGDDI n’a pas répondu à l’enquête
77
lancée par la
Commission européenne en 2017 sur les contrôles
ex post
. La Douane a
indiqué à la Cour que cette situation devrait s’améliorer dans le courant de
l’année 20
20 avec
l’évolution en cours d’une de ses applications
informatiques (Banaco). Dès lors que ces évolutions informatiques auront
eu li
eu, la Douane précise que la doctrine d’emploi des contrôles
ex post
sera revue
et qu’elle sera en mesure de répondre aux demandes
d’information de l’Union européenne.
De la même manière, les comparaisons avec les autres pays de
l’Union sont difficiles en
matière de productivité des différentes douanes
nationales. Ainsi, dans son enquête de 2019 sur les missions économiques,
la Cour a relevé que la productivité par agent
n’est pas
réellement analysée.
La DGDDI doit impérativement disposer de données fiabilisées lui
permettant de comparer sa performance avec celle d’autres pays de l’Union
appliquant la même réglementation. Une fois cette mesure de la
performance effectuée
pour chacun des métiers qu’elle exerce
, elle devrait
procéder à une analyse des écarts de productivité éventuellement constatés
et
mettre en place un plan d’action pour
les réduire significativement.
B -
Une amélioration de la gestion des matériels
aéromaritimes à amplifier
Le déploiement des moyens aéronavals de la DGDDI répond à un
triple impératif douanier, interministériel et européen. En dépit de
l’importance que revêtent ces moyens, la Cour avait relevé de graves
défaillances dans leur gestion. Si la Douane a mis en œuvre quelques
actions correctrices, la faiblesse de la disponibilité des moyens
aéromaritimes appelle une accélération de la modernisation de leur gestion.
77
Le Luxembourg, les Pays-
Bas et Malte n’ont pas répond
u non plus à cette enquête.
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COUR DES COMPTES
84
1 -
Des mesures prises pour remédier
aux défaillances constatées par la Cour
La Cour
78
avait relevé, dans son rapport public annuel 2017, de
multiples et graves défaillances dans la gestion des moyens aériens et
navals. Faute d’avoir suffisamment anticipé les besoins de remplacement
et collaboré avec les administrations disposant d’une expertise en matière
aérienne ou maritime (ministères des armées et de l’intérieur), la DGDDI
avait acquis à compter de 2008 «
des avions qui ne peuvent pas voler avec
leurs équipements [et] des bateaux inutilisables
» et même payé un navire
non livré
. En conséquence, la Cour recommandait à la Douane d’explorer
toutes les possibilités de mutualisatio
n avec les autres services de l’État.
La Douane a entrepris de remédier à ces profondes anomalies dans
la procédure d’acquisition. S’agissant de la flotte aérienne, aucun achat
d’avion n’est programmé à moyen terme tandis que la location de trois
hélicopt
ères sera privilégiée à l’acquisition d’appareils neufs pour
renforcer les capacités opérationnelles douanières à compter de 2020.
S’agissant de la flotte navale, le renouvellement appelé à se poursuivre est
élaboré en collaboration avec le secrétariat général de la mer (SGMer), qui
veille à la complémentarité des moyens des services participant à l’action
de l’État en mer.
Une première démarche de mutualisation de la maintenance a
également été initiée dans le cas de la flotte aérienne. Les pièces détachées
d’hélicoptères font l’objet d’un marché commun à la Douane,
à la
gendarmerie nationale et à la sécurité civile, piloté par le ministère des
armées (la direction de la maintenance aéronautique, DMAé). Les visites
périodiques d
es flottes d’hélicoptères
ont été mutualisées avec la
gendarmerie nationale.
Parallèlement, la Douane a engagé en 2018 un mouvement de
professionnalisation de la fonction achats. La réorganisation des services a
permis de distinguer celui compétent pour la passation des marchés (le
bureau des achats au sein de la direction générale) de celui responsable de
l’expression des besoins fonctionnels et du pilotage de la maintenance
opérationnelle (la DNGCD).
78
Cour des comptes, « Le renouvellement des moyens aériens et navals de la Douane :
des échecs répétés et coûteux, une mutualisation à imposer », in
Rapport public
annuel 2017
, Tome I., p. 563-586. La Documentation française, février 2017, 760 p.,
disponible sur www.ccomptes.fr.
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UNE TRANSFORMATION FREINÉE PAR DES RIGIDITÉS DE GESTION
ET UNE DÉMARCHE DE PERFORMANCE INSUFFISANTE
85
2 -
Une transformation de la gestion des moyens aéromaritimes
à poursuivre sans délai
L
es évolutions présentées ne répondent toutefois pas à l’impératif,
souligné par la Cour, d’une «
profonde transformation des modes
d’acquisition, de maintenance et de mise en œuvre
» des moyens
aéromaritimes «
en les faisant reposer à l’avenir sur une très
large
mutualisation entre les services de l’État
».
Parmi la soixantaine de marchés utilisés pour assurer la maintenance
en condition opérationnelle des flottes aéromaritimes, une très large
majorité demeurent gérés par la seule DGDDI. Elle continue d’as
surer en
régie le maintien en condition opérationnelle de sa flotte d’avions, dans le
cadre de sa brigade centralisée de maintenance aérienne (BCMA), pourtant
implantée dans les mêmes bases que les structures du ministère des armées.
Le taux de disponibilité opérationnelle des moyens aériens demeure
en moyenne trop faible. En 2019, il
s’est
ainsi établi à seulement 69 % en
moyenne pour les hélicoptères EC 135 (contre plus de 80 % pour ceux de
la gendarmerie nationale) et 55 % pour les avions Beechcraft. Parmi les
sept avions Beechcraft acquis, trois d’entre eux, propriétés de la Douane
depuis février 2014 et mars 2015, ne volaient toujours pas en 2018. En
2019, un avion de la Douane n’avait toujours pas volé dans le cadre d’une
activité opérationnelle
79
.
La disponibilité des moyens aériens, en dépit de récentes
améliorations,
demeure insuffisante pour la flotte d’hélicoptères et
préoccupante pour la flotte d’avions.
Cette situation affecte la conduite des
opérations aéronavales, qui se trouvent souvent réduites à leur composante
navale,
celle-ci
ne
souffrant
pas
des
mêmes
indisponibilités
opérationnelles. Elle a également des incidences sur les agents des
Douanes, qui se trouvent régulièrement dans l’incapacité de mener à bien
leurs missions de lutte contre les fraudes et trafics
80
.
Trois ans après la formulation des recommandations par la Cour et
près de sept ans après la mise en service du premier avion Beechcraft au
sein de la Douane, la
transformation des modes d’acquisition
et de
maintenance des moyens aéromaritimes doit donc être poursuivie. En
particulier, la réforme de la gestion
de la flotte d’avions est à accélérer sans
délai. La clarification de la gouvernance et l’unification du pilotage
opérationnel, porté par la DNGCD, constitueront un utile appui.
79
L’avion Beechcraft concerné a effectué 23 heures de vol de maintenance.
80
Deux pilotes ont ainsi quitté l’unité de la Manche
-Mer du Nord-Atlantique en 2018.
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COUR DES COMPTES
86
III -
Une insuffisante culture de la performance
et du service à l’usager
Longtemps, la Douane s’est montré réticente à recourir à des outils
de mesure de la performance. De plus, elle ne développe que depuis peu de
temps une démarche de service à l’usager. El
le a néanmoins fait récemment
des progrès en matière d’indicateurs de performance
,
qu’il conviendra de
conforter (A). Elle a également mis en place des mesures de la satisfaction
des usagers,
qu’elle doit désormais rationaliser pour mieux prendre en
compte
les motifs d’insatisfaction des usagers
(B).
A -
Des progrès en matière d’indicateurs
de performance à conforter
La Douane recourt davantage à des
indicateurs d’activité que de
performance. En effet, aucun lien n’est fait de manière systématique, dans
la documentation budgétaire, entre les résultats obtenus et les moyens qui
y sont consacrés. Néanmoins, la DGDDI a récemment apporté quelques
modifications aux
indicateurs pour leur permettre d’avoir une plus grande
portée en termes de mesure de la performance.
1 -
D
es indicateurs qui ne donnent qu’une vision partielle
de la lutte contre la fraude
L
es
éléments
d’information
contenus
dans
les
documents
budgétaires
ne donnent qu’une vision partielle des résultats de la lutte
contre la fraude et les trafics.
Déjà dans son rapport de 2015, la Cour préconisait de «
publier dans
le RAP du programme 302, le volume et la valeur des biens faisant l’objet
de destruction et le coût de ces opérations
»
81
.
Il est regrettable qu’il n’ait
pas été donné suite à cette proposition, et c
e d’autant plus qu’aucune
analyse
d’efficience par type de marchandise ou par type de trafic n’est
produite par la sous-direction réseau.
81
L’action de l
a Douane dans la lutte contre la fraude et les trafics
–
janvier 2015 précité.
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UNE TRANSFORMATION FREINÉE PAR DES RIGIDITÉS DE GESTION
ET UNE DÉMARCHE DE PERFORMANCE INSUFFISANTE
87
2 -
Une réflexion récente sur certains indicateurs
liés au «
développement des entreprises à l’international
»
à poursuivre
Jusqu’au
projet annuel de performance pour 2020, le premier
indicateur suivi pour
mesurer l’atteinte de l’
objectif « développement des
entreprises à l’international
» portait sur la « part des opérations du
commerce extérieur bénéficiant de la certification douanière européenne
d’opérateur économique agréé
». Cette part ayant atteint 85 % en 2019, la
Douane a remplacé cet indicateur par le « taux de réponse aux demandes
de rescrit dans les délais réglementaires ».
En
2019,
l’indicateur
«
taux
de
dématérialisation
du
dédouanement », qui plafonnait à 87 %, a été remplacé par la mesure du
« taux de dématérialisation des formalités déclaratives », qui ne prend en
compte que les documents pour lesquels la dématérialisation est de la
responsabilité de la seule administration française.
Le taux de satisfaction des opérateurs du commerce international est
issu d’une enquête annuelle réalisée au moyen d’un formulaire en ligne
dont une partie est consacrée aux dix engagements de service de
la démarche. Les modalités de mesure de la satisfaction des usagers
peuvent prêter à discussion (cf.
infra
), tout comme l’intérêt qui s’attache à
ce qu’elle soit un indicateur «
de performance
» dès lors qu’elle se situe
depuis quelques années aux alentours de 85 %.
3 -
Une mesure de
l’e
fficacité de la collecte et des contrôles
en matière fiscale et douanière à harmoniser
avec celle de la DGFiP
Dans le projet annuel de performance pour 2020, les indicateurs ont
été légèrement modifiés,
avec notamment la disparition de l’indice de
civisme fiscal qui y figurait
jusqu’alors. Cet indice étant de 99,4
% en 2017
et comportant une cible 2020 de niveau «
supérieur à 99 %
», il
n’était pas
d’une grande pertinence et de plus nécessitait une harmonisation avec des
indicateurs approchants mis en place par la DGFiP.
Par ailleurs, les évolutions légales et réglementaires récentes,
notamment la loi pour un État au service d’une société de confiance
(Essoc), ont conduit la DGDDI à lancer un chantier de refonte de ces deux
documents afin de les adapter au nouveau contexte des contrôles. La
réflexion s’oriente ainsi vers un document unique, élaboré en concertation
avec les opérateurs, qui reprendrait en partie commune les grands principes
et déclinerait ensuite pour chaque famille de contrôles les droits et
obligations des opérateurs, les garanties qui leur sont offertes et les voies
de recours ouvertes.
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COUR DES COMPTES
88
La m
ise en œuvre de la loi du 10 août 2018
pour un État au service d’une société de confiance (Essoc)
La loi du 19 août 2018 prévoit une approche renouvelée des
pratiques de contrôle de l’administration et vise à renforcer la sécurité
juridique des acteurs économiques. À cette fin, elle tend à décliner la
relation de confiance douane-opérateurs selon trois grands principes :
-
le droit à l’erreur : pas de sa
nction pour un redevable de bonne foi qui
commet pour la première fois une erreur dans sa déclaration en douane ;
priorité donnée à la médiation ;
-
le droit au contrôle : outil au service de l’usager qui peut s’appuyer sur les
prises de position de l’admini
stration à son encontre, par le biais du rescrit
et du rescrit contrôle ;
-
le rescrit contrôle : la prise de position du service sur l’ensemble des points
examinés dans le cadre d’un contrôle d’initiative est opposable à
l’administration et vaut rescrit.
Indépendamment
des
indicateurs
des
projets
annuels
de
performance et des rapports annuels de performance, la sous-direction
réseau indique avoir mis en place des groupes de réflexion sur la maîtrise
des risques et les indicateurs de performance, chargés
d’ad
apter les outils
de suivi de l’activité
. Cette démarche de révision en profondeur des
indicateurs afin de mieux mesurer la performance des actions conduites par
la Douane est indispensable pour piloter l’activité et attribuer les moyens
aux différentes entités.
B -
Une mesure de la satisfaction des usagers
à rationaliser pour mieux prendre en compte
leurs attentes
1 -
Une multiplicité des mesures de satisfaction à simplifier
pour une
cohérence d’ensemble
La mesure de la satisfaction est éclatée entre plusieurs bureaux de la
direction générale : une enquête de satisfaction dans le cadre de la
démarche « service simplicité, sécurité » (3S) est réalisée par le bureau de
la communication ; le bureau de la « satisfaction des utilisateurs » au sein
de la sous-direction de
s systèmes d’information
effectue des sondages
semestriels portant sur la disponibilité et la qualité des systèmes
d’information auprès des agents de la DGDDI
et des acteurs économiques.
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UNE TRANSFORMATION FREINÉE PAR DES RIGIDITÉS DE GESTION
ET UNE DÉMARCHE DE PERFORMANCE INSUFFISANTE
89
Outre les engagements pris dans le cadre de la démarche 3S, la
Douan
e doit régulièrement mesurer l’effectivité de la mise en œuvre du
référentiel Marianne
82
. Elle mène aussi des travaux en lien avec la direction
interministérielle du numérique (Dinum), à la fois pour procéder à la
certification des démarches en ligne et pou
r s’inscrire dans la mise en place
d’outils de mesure interministériels de satisfaction des utilisateurs.
2 -
D
es motifs persistants d’insatisfaction
à mieux prendre en compte
La Douane ne semble pas être en mesure de tirer tous les
enseignements de cette mult
iplicité d’enquêtes, ni de s’appuyer sur elles
pour prendre des mesures correctrices.
Graphique n° 6 :
notation des principaux téléservices (sur dix points)
Source : DGDDI, traitement Cour des comptes
L
es motifs d’insatisfaction des utilisateurs demeurent au fil des ans
.
Ils témoignent des difficultés que peuvent rencontrer les usagers de la
Douane.
Les
opérateurs
pointent
ainsi
régulièrement
les
«
dysfonctionnements trop fréquents : des pannes, des bugs, des lenteurs,
des déconnexions, des problèmes d’accès […], des ser
vices trop souvent
indisponibles
et
dont
les
temps
d’indisponibilité
annoncés
ne
correspondent pas toujours à la réalité
»
83
.
82
Le référentiel Marianne définit depuis 2008 le standard de la qualité de l’accueil dans
les services publics de l’État.
Un nouveau référentiel est déployé à partir de 2016.
83
DGDDI, 2017, Enquête de satisfaction des opérateurs du commerce extérieur.
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COUR DES COMPTES
90
Les téléservices douaniers n’atteignent pas, en pratique
84
, la cible
interministérielle du taux de disponibilité des téléprocédures de 99,9 %
fixée par la Dinum. Le plan e-Douane élaboré en 2017 définit néanmoins
l’objectif d’un renforcement
de
la disponibilité de l’architecture
applicative. Le projet développé dans la perspective du
Brexit
marque à cet
égard une étape dans le rehaussement des exigences de disponibilité du
système d’information
85
.
La Douane a mis en place en 2019 un « comité national des
utilisateurs » permanent spécifique aux opérateurs du dédouanement. Les
délais pris par la Douane pour accepter le principe d
’un tel
comité tout
comme le faible nombre de réunions organisées à ce titre montrent que
cette administration n’est pas aguerrie à un mode de fonctionnement
partenarial pourtant indispensable.
__________ CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS __________
Les transformations engagées par la Douane sont ralenties par des
modalités de gestion trop rigides et une démarche de performance et de
service à l’usager encore insuffisante.
En matière de ressources humaines, la sédimentation de régimes
dérogatoires complexes et coûteux peut constituer un obstacle à la mobilité
fonctionnelle des agents. La Douane ne s’est pas dotée des outils lui
permettant d’allouer ses ressources en fonction des besoins et de l’activité
ni de gérer certains de ses moyens de manière satisfaisante. Par ailleurs,
les dysfonctionnements constatés ces dernières années dans la gestion des
matériels aéromaritimes, qui ont affecté la capacité de la DGDDI à lutter
contre les trafics et la fraude avec des moyens performants et modernes,
ne sont que très lentement corrigés.
De plus,
la faiblesse du pilotage de l’activité par la performance,
l’incapacité à calculer des coûts complets de ses activités, l’absence de
tout contrôle interne sur les conditions de mise en œuvre de sa politique de
contrôle sont autant de points faibles qui ne
permettent pas d’avoir une
vision objectivée des progrès restant à accomplir. Cette défaillance des
outils méthodologiques à disposition de la Douane française explique en
partie ses réticences à se prêter à des comparaisons avec les autres
douanes de l’U
nion.
84
Le taux de disponibilité de plus de 98 % correspond à une donnée technique liée au
fonctionnement d’une application.
Il peut masquer
l’incapacité d’un agent économique
à réaliser
une opération de dédouanement reposant sur une succession d’applications.
85
L
e système d’information
Brexit
est bâti sur une architecture dite « haute
disponibilité », articulant une installation matérielle intentionnellement redondante et
un mécanisme de supervision renforcé.
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UNE TRANSFORMATION FREINÉE PAR DES RIGIDITÉS DE GESTION
ET UNE DÉMARCHE DE PERFORMANCE INSUFFISANTE
91
Or, ces données comparatives sont indispensables pour piloter au
mieux l’activité de la Douane dans un contexte
où existe entre les
différentes douanes européennes une certaine forme de concurrence. Elles
sont par ailleurs indispensables pour que la France puisse bénéficier de
remboursements de la part de l’Union européenne au titre de sa
participation à certaines opérations
de l’Union
.
La poursuite et l’accélération de la transformation de la DGDDI
supposent
de lever l’ensemble de ces freins, dans u
n contexte où la capacité
d’adaptation des services douaniers, en France comme dans les autres
pays de l’Union européenne, peut influer sur les décisions des opérateurs
de localisation des flux de marchandises et des chaînes logistiques.
La Cour formule en conséquence les recommandations suivantes :
1.
simplifier les régimes statutaires et indemnitaires dérogatoires et en
réduire le nombre pour favoriser la mobilité fonctionnelle des
douaniers ;
2.
m
ettre en place une nouvelle politique d’aide au logement des
douaniers, qui facilite leur mobilité géographique ;
3.
construire une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences
prenant en compte l’évolution attendue des missions de la Douane
;
4.
se doter des outils permettant une meilleure adéquation entre les
moy
ens et les missions des services, notamment d’un indicateur
pertinent pour répartir les emplois entre les services territoriaux ;
5.
é
laborer un suivi précis de l’activité de la Douane afin d’en permettre
un pilotage renforcé et une comparaison avec les autres douanes
européennes ;
6.
accroître la disponibilité des moyens aéromaritimes, notamment en
accélérant la mutualisation de la maintenance des flottes d’aéronefs
et de bateaux.
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Chapitre IV
Une transformation à approfondir
par un recentrage des missions
de la Douane
Les évolutions de
l’environnement douanier sont appelées à
s’accélérer. Les effets conjugués de l’évolution
du commerce international,
du rétablissement des contrôles aux frontières, du développement
programmé d’un corps européen de
garde-frontières et de garde-côtes et de
la rénovation du paysage administratif du recouvrement fiscal induisent
une mutation profonde du cadre
d’action de la DGDDI
.
Face à ces changements d’ampleur inédite
depuis 1993, la Douane
devrait poursuivre sa transformation, pour recentrer ses missions autour du
contrôle des flux de marchandises (I). Ce recentrage
s’accompagnerait
d’une
évolution de grande ampleur des missions fiscales (II) et
d’une revue
des missions économiques (III
). L’ensemble de ces transformations devrait
trouver sa traduction dans des documents stratégiques pluriannuels (IV).
I -
Un recentrage des missions
à effectuer autour du contrôle des flux de
marchandises et de personnes
Avec la croissance du commerce international, la Douane devrait
recentrer ses activités sur le contrôle des flux de marchandises. La Douane
devrait ainsi se repenser comme une administration de protection des
frontières et de contrôle des flux. Elle devrait anticiper la réorganisation de
son réseau selon cette logique de flux et tenant compte de la
dématérialisation des procédures (A). Le redéploiement des moyens
devrait s’effectuer en s’inscrivant dans une recherche de synergies avec
d’autres administrations (
B
). Cette transformation devrait s’inscrire dans le
cadre du renforcement des moyens doua
niers de l’Union (
C).
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COUR DES COMPTES
94
A -
Un réseau à réorganiser selon une logique de flux
en tenant compte de la dématérialisation croissante
des procédures
La
Douane
devrait
tirer
les
conséquences
des
profondes
modifications intervenues dans le traitement des flux de marchandises pour
poursuivre la réorganisation de son réseau. Elle devrait notamment prendre
en compte la tendance à la centralisation sur un nombre limité de bureaux
des déclarations en douane, tendance qui va s’amplifier
, et les effets de la
dématérialisatio
n croissante des procédures sur l’activité des bureaux.
1 -
Une amplification de la centralisation des déclarations
en Douane à anticiper
Depuis 2016, le dédouanement centralisé national (DCN) permet
d’avoir un point de contact unique pour les opérations de
dédouanement et
de centraliser ainsi auprès d’un seul bureau de
douane toutes les formalités
douanières, quel que soit le lieu de présentation des marchandises. Fin
2018, 65 bureaux de déclaration effectuaient les formalités douanières et
prescrivaient les contrôles à 148 bureaux de présentation sur le territoire
national.
En mai 2019, la majorité des opérateurs relevant du service des
grands comptes avait adopté le dédouanement centralisé national. Cette
procédure couplée à la dématérialisation des formalités concentre les
déclarations de Douane sur un nombre réduit de burea
ux, qu’il s’agisse de
bureaux de déclaration ou de bureaux de présentation (voir annexe n° 7).
Au sein même des directions régionales, les flux se sont concentrés
sur les bureaux les plus importants (+25
% pour certains d’entre eux) aux
dépens de l’activité d’autres bureaux. Or, d
epuis 2015, le nombre des
bureaux n’
a été réduit que de 13 %. Un réexamen des conséquences sur
l’implantation des bureaux
de ce mouvement de centralisation, qui va
s’amplifier, notamment avec le passage au dédouanement centralisé
communautaire, devrait être engagé. Ces fermetures ont toutefois permis
de faire baisser la proportion de très petits bureaux (moins de 10 agents
86
),
qui reste néanmoins élevée (34 %). De plus, la proportion de petits bureaux
(entre 10 et 20 agents) augmente, passant de 31 % à 38 %.
86
La moyenne est de 30 agents.
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UNE TRANSFORMATION À APPROFONDIR PAR UN RECENTRAGE DES MISSIONS
DE LA DOUANE
95
Graphique n° 7 :
évolution de la taille des bureaux de douane
de 2014 à 2019
Source
: Cour des comptes d’après DGDDI
Seuls 23 bureaux de moins de 20 agents sur 83 en 2014 ont été
fermés (14) ou renforcés (9). En 2019, il restait encore 49 bureaux de moins
de 10 agents n’ayant pas la taille critique pour fonctionner efficacement.
La fermeture de ces bureaux et le redéploiement de leurs effectifs doivent
être engagés.
Jusqu’à pr
ésent, pour les bureaux ayant connu une très forte
diminution d’activité, soit leur effectif est ajusté en proportion, ce qui
pourrait dans certains cas amener à les fermer, soit des flux de déclaration
ou de contrôle leur sont réattribués afin de maintenir un minimum de
productivité, voire d’activité pour les agents.
Ce mode de gestion doit être revu pour l’avenir. En effet, la
dynamique de concentration des flux déclaratifs va s’accentuer et la
Douane doit se mettre en situation d’en tirer les conséquen
ces en adaptant
les effectifs et la carte des bureaux de douane à l’évolution de leur activité
.
En matière de surveillance, une réorganisation selon une logique de
flux doit conduire à regrouper des brigades positionnées sur des axes
relativement mineurs. Ainsi, il conviendrait de réexaminer le maintien des
brigades qui ne sont pas positionnées sur des axes majeurs ou qui ne
disposent pas de l’effectif minimum pour mener des contrôles efficaces.
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COUR DES COMPTES
96
L’éloignement des axes importants limite l’intérêt de la pr
ésence
douanière. Par exemple, la brigade de Périgueux n’est à proximité d’aucun
des axes significatifs recensés dans la carte des centres opérationnels de la
douane terrestre et
n’assure pas
la tenue exclusive d’un point de passage
frontalier aérien (PPF).
En outre, les petites brigades de surveillance (moins de 20 agents)
rencontrent des difficultés d’organisation importantes. Elles sont d’une
efficacité réelle très limitée dans la lutte contre les fraudes et trafics. Il était,
jusqu’à présent, envisagé
de conserver
certaines d’entre elles
afin de
maintenir un maillage suffisant, notamment à la frontière suisse, à la
condition que leur activité soit davantage coordonnée avec celles d’autres
brigades proches. Toutefois la question de leur maintien devra être reposée
en fonction des décisions prises à la suite de la réflexion devant être
engagée sur les missions de la Douane.
2 -
Des moyens à réaffecter sous l’effet
de la dématérialisation des procédures
Avec la dématérialisation des formalités et la mise en place du DCN,
la proximité géographique est un paramètre de moins en moins important
pour les opérateurs économiques. En revanche, ils accordent une place de
plus en plus grande à la continuité du service.
Les moyens devraient être redéployés en conséquence pour
répondre à
une demande d’extension des horaires auxquels peuvent être
enregistrées les déclarations en douane.
Le principe d’un service qui
pourrait être assuré 24h/24 et 7j/7 est expérimenté dans le cadre de la
préparation du
Brexit
. Il serait utile d
’en tirer des enseignements pour les
modalités de fonctionnement du reste du réseau.
Par ailleurs, le taux de dématérialisation des procédures douanières
plafonne à 87
% depuis 2016 alors qu’il a progressé au cours de cette
période dans le domaine fiscal ou dans le réseau des Urssaf. Une extension
des obligations de dématérialisation devrait être envisagée
87
, en fixant une
cible de 100
%, dès lors qu’il s’agit d’un public de professionnels, déjà
assujetti à des obligations de ce type en matière fiscale ou sociale. Afin de
faciliter cette nouvelle étape de dématérialisation, la Douane devrait alléger
nettement les modalités de souscription aux téléprocédures.
87
Cour des comptes,
Les systèmes d’information de la DGFiP et de la DGDDI
: investir
davantage, gérer autrement
, communication à la commission des finances de
l’Assemblée nationale,
avril 2019, 133 p., disponible sur www.ccomptes.fr.
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UNE TRANSFORMATION À APPROFONDIR PAR UN RECENTRAGE DES MISSIONS
DE LA DOUANE
97
Les effets de la dématérialisation sur les besoins en effectifs se
feront sentir dans l’exercice des
trois grandes missions de la Douane.
Ainsi, la mise en service du nouveau système de gestion des
contributions indirectes fin 2019, qui regroupe 40 applications existantes,
devra conduire à réviser en profondeur les nombreuses implantations
douanières chargées de la viticulture en lien avec les transferts de missions
vus plus haut.
L
’achèvemen
t
de
la
trajectoire
de
dématérialisation
et
d’automatisation
n’est prévu qu’en 2021. De 2019 à 2021,
seront achevées
les liaisons informatiques
via
l’interface du
guichet unique national (GUN)
entre
les systèmes d’information
douaniers et des autres administrations.
Toutes ces évolutions techniques permettront d’ac
croître la
productivité des agents de la Douane et rendront moins indispensable le
maintien d’un maillage
de bureaux de Douane sur l’ensemble du territoire.
De même, l’automatisation du ciblage des contrôles avec la montée en
puissance du Sarc conduira à terme à une recentralisation de l’analyse des
risques. Dans une telle hypothèse, les actuelles cellules régionales
d’orientation des contrôles perdront une partie de leur utilité et la question
des moyens qui y sont affectés devra être posée.
B -
Un redéploiement des moyens à effectuer
en recherchant des synergies
avec d’autres administrations
Une plus grande intégration de la Douane dans des actions
interministérielles est apparue particulièrement nécessaire lors de la
préparation du
Brexit
. En effet, à cette occasion, l
a faible culture de l’
action
interministérielle et de la déconcentration de la Douane a été mise en
lumière, même si ces difficultés ont été surmontées sous la contrainte de
l’urgence.
1 -
Une
fluidité de l’information entre les services intervenant
dans le contrôle de flux de marchandises à améliorer
Les contrôles de flux de marchandises font intervenir plusieurs
administrations dont l’action doit être coordonnée, notamment la DGCCRF
et la DGAL. Les réglementations appliquées sont complexes et la Douane
est chargée d’effectuer, dans ses bureaux de présentation, les premiers
contrôles pour le compte d’
autre administrations.
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COUR DES COMPTES
98
La DGDDI a conçu et conduit un projet interministériel, le dispositif
du guichet unique national, qui a pour objet de faciliter la réalisation des
formalités
douanières
pour
des
marchandises
soumises
à
des
réglementations particulières
88
et qui nécessitent
la présentation d’un
document d’ordre public lors du dédouanement.
Sans attendre l’entrée en service de ce guichet unique, la Douane
devrait travailler de manière plus étroite
qu’aujourd’hui avec la DGCCRF
pour mutualiser des actions de contrôle,
en s’inspirant par exemple de la
coopération mise en place entre ces deux administrations dans le cadre du
service commun des laboratoires, et
en s’appuyant sur les coopérations
renforcées mises en place pour les contrôles aux frontières dans le cadre du
Brexit
.
2 -
Une meilleure intégration à rechercher au sein du réseau
national et local des partenaires de l’export
Des
schémas
régionaux
de
développement
économique,
d'innovation et d'internationalisation (SRDEII) définissent les orientations
en
matière d’aides aux entreprises, de soutien à l’internationalisation et
d’aides à l’investissement immobilier et à l’innovation des entreprises,
ainsi que les orientations relatives à l’attractivité du territoire régional
89
.
Les directions interrégionales de la Douane sont absentes de ces outils, tant
dans leur élaboration que dans la mise en œuvre des actions définies par
acteur.
Cette insuffisante intégration résulte pour partie de ce que, à la
différence des directions régionales des entreprises, de la concurrence, de
la consommation, du travail et de l'emploi, les directions régionales et
interrégionales de la DGDDI n’ont pas été concernées par la réforme de
l’administration territoriale de l’État (RéATE)
,
qui attribue à l’échelon
préfectoral régional le
pilotage de l’action administrative d
e l
’État en
matière économique.
88
Espèces animales protégées, semences, produits agricoles, biens à double usage,
matériels de guerre.
89
Conformément à la loi « NOTRE » du 7 août 2015.
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UNE TRANSFORMATION À APPROFONDIR PAR UN RECENTRAGE DES MISSIONS
DE LA DOUANE
99
Il apparaî
t nécessaire de renforcer l’association des pôles d’action
économique (PAE) aux équipes
Team export
mises en place au niveau
régional en lien avec Business France. Par ailleu
rs, comme la Cour l’a déjà
relevé
90
, les modalités d’intervention de la Douane en matière économique
devraient être repensées
, pour tenir compte de la réorganisation de l’action
économique entre l’État et les régions qui sont désormais en charge du
développement économique à titre principal.
3 -
Une lutte contre la fraude et les trafics à mener
dans une logique résolument interministérielle
Historiquement, les relations avec les services des autres ministères
impliqués dans la lutte contre les fraudes et trafics aboutissaient à des
chevauchements, voire des rivalités, notamment en matière de stupéfiants.
Depuis 2015, la logique de coopération s’est peu à peu imposée dans
tous les secteurs de la lutte contre les trafics. Dans le cas des stupéfiants,
elle a trouvé
une concrétisation en 2019 avec la création de l’Ofast.
La c
réation de l’office antistupéfiants (Ofast)
Créé le 1
er
janvier 2020 pour coordonner la lutte contre les trafics de
drogues, l
’Ofast
succède
à l’office central pour la répression du trafic illicit
e
de stupéfiants (OCRITS). Il est dirigé par un contrôleur général de la police
nationale et comprend trois pôles : un pôle « stratégie » dirigé par un agent
de la DGDDI, un pôle « renseignement » dirigé par un gendarme et un pôle
« opérationnel » dirigé par un policier. Il doit permettre la transparence
totale de l’information entre les différents services. Il s’appuie sur des
antennes régionales et des détachements territoriaux de l’Ofast, mais aussi
sur les cellules de renseignements opérationnels sur les stupéfiants (Cross).
La création de cet office doit aussi permettre de résoudre les
questions sensibles des rapports
avec l’autorité judiciaire en ce qui
concerne la lutte contre le trafic de stupéfiants, la tendance de long terme
étant à la judiciarisation de
l’action de la Douane.
Sans renoncer à ses
méthodes classiques, elle recourt davantage à des procédures d’enquête et
doit, dès lors, se poser la question de l’information en amont, voire de la
saisine de l’autorité judiciaire.
90
Cour des comptes,
Les services déconcentrés de l’
Etat
, rapport public thématique,
décembre 2017, La Documentation française, disponible sur www.ccomptes.fr.
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COUR DES COMPTES
100
4 -
La répartition des points de passage frontière entre la Douane
et la police aux frontières à optimiser
Par courrier du 6 février 2013, les ministres des finances et du
budget ont fait part au m
inistre de l’
intérieur de leur souhait de voir la
Douane se désengager de son rôle de contrôle frontalier pour se recentrer
sur le contrôle de marchandises, en récupérant également la partie sûreté
du fret dévolue à la gendarmerie des transports aériens.
En décembre 2014, un rapport d’inspection
91
concernant la révision
de la carte des points de passage frontaliers (PPF) a évoqué la perspective
d’un retrait total et à brève échéance de la Douane dans le domaine du
contrôle frontalier. Il était précisé qu’un nombre «
significatif
» de PPF
relevant de la douane devaien
t passer sous l’autorité
de la PAF, sous
réserve de
l’utilité du PPF considéré,
de son accessibilité par les services
et de la quantification des transferts de charge à mener pour rendre la
complémentarité entre les services plus équilibrée.
L’audit indiquait que les PPF armés p
ar un service de la Douane
dont le siège était éloigné de la plateforme aéroportuaire procédaient à un
contrôle non systématique. Cette situation perdure, occasionnant parfois
des déplacements très importants des douaniers entre leur brigade et les
PPF aériens, situés pour certains en dehors du département de la brigade
de la Douane. Or, le trafic aérien de passagers hors Schengen dans certains
aéroports attribués à la Douane a fortement augmenté depuis 1995. Quatre
de ces aéroports
92
dépassent le seuil de 194 000 passagers hors Schengen
défini en 2013 par la DCPAF pour étudier la reprise de PPF. Le transfert
de ces points de passage devrait être engagé, l’implantation des PPF étant
devenue, dans certains cas, l’unique raison du maintien de brigades de
proximité positionnées hors des axes significatifs pour la Douane.
Dans le même esprit, la Douane pourrait développer le transfert de
ces missions de contrôle sur les PPF à d’autres services (sécurité publique
ou gendarmerie aérienne). Cette pratique existe d’or
es et déjà, sur le
fondement d’accords locaux, pour certains points de passage éloignés des
brigades des douanes et ne présentant que de très faibles enjeux migratoires
et douaniers. Une telle réforme présenterait un fort intérêt pour les 11 PPF
aériens les plus éloignés de leur brigade de douane
93
et permettrait de
rationaliser les périmètres d’intervention des différents services de l’État.
91
IGA, CGEDD, Cegefi,
L’organisation du contrôle aux frontières et la révision de la
carte des points de passage frontaliers aériens
.
92
Montpellier, Limoges, Carcassonne, Bergerac.
93
Laval, Orléans, Châteauroux, Angoulême, Bergerac, Brive, Rodez, Epinal, Dole,
Béziers, La Roche-sur-Yon.
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UNE TRANSFORMATION À APPROFONDIR PAR UN RECENTRAGE DES MISSIONS
DE LA DOUANE
101
Dans cette perspective, u
n groupe de travail a été créé à l’initiative
de la direction générale des étrangers en France (DGEF) associant la
DGDDI, la DCPAF et la direction générale de l’aviation civile pour définir
une stratégie de répartition des PPF et des modalités de traitement des
demandes de qualification de nouveaux PPF. La DGDDI précise que les
propositions issues de ces travaux seront soumises au ministre sans
toutefois indiquer dans quel calendrier ces travaux pourraient aboutir.
C -
Une transformation à inscrire dans le cadre
du renforcement des moyens douaniers de l’Union
Le double contexte sécuritaire et du
Brexit
a,
d’ores et déjà
, conduit
la Douane à redéployer une partie de ses effectifs vers la frontière. Elle a,
par ailleurs, créé de nouvelles implantations territoriales dans les
départements bordant la Manche.
Ce type de redéploiement constitue un changement de paradigme
pour la DGDDI,
qu’il convient de conforter en tenant compte de l’évolution
prévisible des flux et en anticipant les conséquences des futures évolutions
de la réglementation communautaire.
De plus, la montée en puissance de l’activité «
sécurité » des
douanes européennes conduit à faire s’estomper progressivement la
dichotomie traditionnelle entre flux de personnes et de marchandises dans
l’espace Schengen. L’action de la Douane
doit donc s’inscrire dans une
organisation
opérationnelle
aux
frontières
de
plus
en
plus
communautarisée.
1 -
Les conséquences de la réglementation européenne à anticiper
En matière de dédouanement,
la Douane doit se préparer à l’étape
suivante de la mise en œuvre du CDU
, à savoir le dédouanement centralisé
communautaire (DCC).
En effet, le CDU prévoit que dès lors que les systèmes informatiques
des différents États membres seront remis à niveau et susceptibles
d’être
interconnectés, le découplage entre le bureau de déclaration des
marchandises et celui de présentation pourra avoir lieu entre des bureaux
de douane de deux pays de l’Union. Ce dispositif de
vait initialement être
pleinement opérationnel pour les opérateurs en 2021. Pour des raisons
techniques et de coût, la date de mise en
œuvre
a été reportée à 2025. Pour
préparer cette étape, la DGDDI participe au groupe projet « dédouanement
centralisé » constitué au niveau européen.
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COUR DES COMPTES
102
Les enjeux en ter
mes de réallocation des moyens liés à l’entrée en
vigueur de cette future procédure sont majeurs. Le DCC pourrait être à
l’origine de flux de déclaration d’un pays vers un autre pour des raisons de
facilité pour les opérateurs.
Dans cette dynamique de simplification des formalités de
dédouanement, la Douane doit impérativement améliorer la qualité du
service offert aux opérateurs et la rapidité du traitement de leurs demandes,
comparativement aux autres douanes européennes, sous peine de ne plus
être aussi souvent sollicitée qu’aujourd’hui pour effectuer ces opérations.
En tout état de cause, la charge de travail des différents bureaux sera
modifiée (à la hausse ou à la baisse) à cette occasion et les moyens affectés
à chacun d
’entre eux
devront être revus en conséquence.
2 -
L’action de la
Douane garde-frontière et garde-côte
à organiser en relation étroite avec les instances
et partenaires européens
Si la Douane veut être en mesure de relever les nouveaux défis
soulevés par la création de l’espace Schengen, elle doit résolument
s’inscrire dans une logique communautaire forte et anticiper les
conséquences de la montée en puissance d’
une force Frontex.
Aujourd’hui, Frontex doit gérer
, en lien avec les États membres,
entre 600 et
700 millions d’entrées et de sorties légales par an sur le
territoire de l’Union et lutter contre l’immigration illégale. Le règlement
« Frontex » actuellement en vigueur a créé une base juridique claire et
contraignante prévoyant la mise en œuvre d’une gestion intégrée des
frontières au niveau européen (IBM :
Integrated Border Management
).
L'Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes
Devenue opérationnelle en 2005, l
’
Agence européenne pour la
gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures
(Frontex), dont le siège est à Varsovie, est devenue le 6 octobre 2016
94
l’agence européenne de garde
-frontières et de garde-côtes. Elle a pour
mission d’assister les États membres de l'Union européenne et de l'espace
Schengen qui ont des frontières avec des pays tiers, dans l’exercice de leurs
responsabilités de contrôle des frontières. Désormais elle coordonne un
certain nombre d’opérations.
94
Le règlement (UE) 2016/1624, remplace et abroge le règlement (CE) n° 2007/2004
instituant
l’Agence Frontex.
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UNE TRANSFORMATION À APPROFONDIR PAR UN RECENTRAGE DES MISSIONS
DE LA DOUANE
103
Elle aide notamment les États membres confrontés à une forte
pression migratoire en coordonnant le déploiement de moyens techniques
et humains. Certaines opérations maritimes, aériennes et terrestres (en
Méditerranée et dans les pays de l'Est notamment) sont menées par des
garde-frontières mis à la disposition de Frontex par les États.
En matière de lutte contre l'immigration illégale, Frontex coordonne
des opérations de retour de migrants irréguliers vers leurs pays d'origine.
L'Agence européenne assure par ailleurs une veille permanente de la
situation aux frontières extérieures de l'Union et de l'espace Schengen. Elle
transmet les informations
qu’elle collecte
sur les personnes liées aux filières
d’immigration clandestine ou aux activités criminelles tra
nsfrontalières aux
États membres et à l'office européen de police (Europol).
En 2019, près de 900 personnes travaillaient à Varsovie, au siège de
Frontex. L’agence est dotée d’un budget de 3
3
0 M€ qui lui permet
d’acquérir son propre matériel, même si
, dans la réalité, ce sont toujours les
États membres qui, jusqu’à aujourd’hui
, ont mis à disposition leurs navires,
hélicoptères et avions patrouilleurs, moyennant le remboursement des coûts
de déploiement. Ces agents du siège sont chargés entre autres de l
’
analyse
des risques, de l
’
élaboration de standards communs d
’
entraînement, de la
coopération internationale ainsi que des affaires juridiques et des droits
fondamentaux. Les effectifs devraient passer à 1 250 personnes d'ici à 2021.
Le modèle intégré europée
n repose encore aujourd’hui sur la
diversité des corps et des organisations,
dès lors qu’il y a des échanges
fluides d’information et de renseignement.
Les douanes nationales mettent
à disposition de Frontex des agents et des moyens.
Ainsi, en matière d’a
ction en mer, les patrouilleurs de la Douane,
qui complètent bien les gros moyens de la Marine nationale, sont très utiles
en mer Egée, en mer Baltique et en mer Noire, compte tenu des faibles
distances à parcourir. À cet égard, la création de la DNGCD va dans le sens
souhaité par Frontex de l’alignement des capacités opérationnelles des
différents pays.
Début 2019, Frontex a proposé aux instances
de l’Union
une
nouvelle stratégie technique et opérationnelle, qui a été traduite dans le
règlement relatif au corps européen de garde-frontières et de garde-côtes
du 13 novembre 2019, qui confie à Frontex un plus grand nombre de
missions et de personnels et élargit son champ d’action.
La direction générale des douanes et des droits indirects - septembre 2020
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COUR DES COMPTES
104
Le point principal
de ce règlement porte sur la création d’un corps
permanent de garde-frontières et garde-
côtes qui porteront l’uniforme
Frontex. À
l’horizon 2027, ce corps
doit être doté de 10 000 agents, répartis
entre 3 000
personnels de l’
agence, 3 000 détachés pour une longue durée
(deux ans prolongeables 12 ou 24 mois) et 4 000 agents pour des
détachements de courte durée (jusqu’
à quatre mois). Il doit pouvoir être
déployé dès janvier 2021, sur une base initiale de 5 000 agents.
La DGDDI doit tirer les conséquences sur son organisation et son
activité de cette montée en puissance de Frontex, qui sera étalée dans le
temps entre 2021 et 2027. Ce calendrier permet à la Douane de préparer sa
stratégie dans les deux ans qui viennent, en accord avec ses partenaires
institutionnels. À cet égard, le SG Mer est
en train d’élaborer «
une
stratégie nationale de gestion intégrée des frontières
», en coordination
avec le secrétariat général aux affaires européennes (SGAE) et le ministère
de l’intérieur. Dans ce cadre, il a organisé des réunions de travail
,
notamment avec la DGDDI, pour conduire une réflexion sur les volets
capacitaires, juridiques et en termes de ressources humaines.
De plus,
l’acte d’exécution du règlement relatif à la montée en
charge de Frontex prévoit un mécanisme de remboursement des États
membres
participant
aux
missions
de
Frontex
en
fonction
de
l’augmentation de l’effectif total d’agents garde
-frontières et garde-côtes
des États membres. Les difficultés que la Douane rencontre pour
documenter le coût de ses trois grandes missions et pour se comparer aux
autres douanes européennes
risquent d’entraîner une absence de droit au
remboursement de la France pour ses mises à disposition. La DGDDI doit
profiter des mois qui viennent pour travailler en lien avec la direction du
budget, interlocutrice privilégiée de Frontex pour la mise en place des
remboursements et des effectifs mis à disposition, pour disposer des
éléments d’analyse de son activité lui permettant de bénéficier des
remboursements.
L’avenir des services de
la
Douane est de s’insérer dans ce cadre
européen. Elle en a les moyens et la légitimité, la qualité de son action étant
appréciée par ses partenaires opérationnels. Elle doit donc mettre à profit
les deux années qui viennent pour anticiper au mieux les conséquences de
ces nouvelles conditions d’action
européenne
en s’inscrivant dans une
logique nationale interministérielle.
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UNE TRANSFORMATION À APPROFONDIR PAR UN RECENTRAGE DES MISSIONS
DE LA DOUANE
105
II -
Mener une transformation de grande
ampleur des missions fiscales
Certains États européens ont entrepris, depuis le début des années
2000, de simplifier le paysage des administrations fiscales en confiant à un
acteur principal l’activité de gestion de la fiscalité. Dans le prolongement
de ces initiatives, la France a initié au 1
er
janvier 2019 un mouvement
d’unification de la fonction de recouvrement de la fiscalité qui va
s’accélérer à compt
er de 2021. L
a mise en œuvre de cette transformation
de grande ampleur, qui appelle notamment un travail de préparation des
transferts et d’adaptation du réseau (
A
), s’accompagne d’une anticipation
des conséquences sur les missions fiscales de la Douane au-delà de la
fonction de recouvrement (B).
A -
Un transfert programmé des missions fiscales
à pleinement mettre en œuvre
1 -
Un mouvement de transfert de missions fiscales
vers la DGFiP à accélérer
Avec deux administrations du ministère des finances compétentes
pour la collecte fiscale, le paysage institutionnel du recouvrement demeure
éclaté
95
, affectant la lisibilité du système fiscal, l’efficience de la gestion
des prélèvements et l’efficacité de la lutte contre la fraude fiscale.
La fusion des réseaux de recouvrement constitue un gisement
important d’économies d’échelle et un levier de modernisation des
procédures. Elle est à ce titre identifiée comme une « bonne pratique » par
l’Union européenne et le Fonds monétaire international
96
. Bien que
l’organisation dou
anière ou fiscale demeure très hétérogène, plusieurs
95
Cet éclatement concerne aussi le champ social, qui est appelé aussi à évoluer.
Voir Cour des comptes,
Simplifier la collecte des prélèvements versés par les
entreprises
, rapport public thématique,
juillet 2016, 273 p., disponible sur
www.ccomptes.fr.
96
Commission européenne,
Fiscal Blueprints: A path to a robust, modern and efficient
tax administration
, 2007 ; et FMI,
Revenue Administration: A Toolkit for Implementing
a Revenue Authority
, 2010.
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COUR DES COMPTES
106
États européens ont procédé ces dernières années au transfert de la collecte
des prélèvements de l’administration douanière à l’administration fiscale
(Pays-Bas en 1996, Espagne au début des années 2000, Royaume-Uni entre
2005 et 2007
97
, Portugal en 2012). Au Portugal, par exemple, la gestion
douanière
relève
désormais
d’une
sous
-direction
au
sein
de
l’administration fiscale du ministère des finances (
Autoridade tributária e
aduaneira
). Au total, 36 % des
administrations fiscales de l’OCDE
collectent également les droits de douane
98
.
Dans la continuité du mouvement d’unification constaté dans
plusieurs pays, le comité action publique 2022
99
a recommandé à la
mi-2018 de «
simplifier drastiquement le système de recouvrement, en
réduisant le nombre de dispositifs et de structures qui en ont la charge
».
Cette proposition a trouvé une première concrétisation en loi de
finances pour 2019, qui a confié à la DGFiP la gestion de trois
prélèvements obligatoires, auparavant assurée par la Douane.
Tableau n° 6 :
taxes dont la gestion est transférée à la DGFiP
Dénomination
de la taxe
Rendement
avant tr
ansfert (en Md€)
Date
du transfert
Taxes sur les boissons non alcoolisées
0,5
1
er
janvier 2019
Taxe générale sur les activités
polluantes (TGAP)
0,7
1
er
janvier 2020
et 1
er
janvier 2021
100
TVA sur les produits pétroliers
11,4
1
er
janvier 2021
TOTAL
12,6
Md€
2019-2021
Source : Douane, traitement Cour des comptes
Cette première étape d’unification, échelonnée sur une période de
trois ans, implique le transfert de prélèvements pour un rendement de
12,6
Md€ au total, la TVA sur les produits pétroliers repré
sentant environ
97
Les missions douanières ont néanmoins été exclues du champ du transfert à
l’occasion de cette réforme.
98
Voir Cour des comptes,
La DGFiP, dix ans après la fusion : une transformation à
accélérer
,
rapport
public
thématique,
juin
2018,
143 p.,
disponible
sur
www.ccomptes.fr.
99
Comité action publique 2022,
Service public : se réinventer pour mieux servir. Nos
22 propositions pour changer de modèle
, juin 2018.
100
Le transfert de la gestion de la composante déchets de la TGAP est prévu pour 2021.
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UNE TRANSFORMATION À APPROFONDIR PAR UN RECENTRAGE DES MISSIONS
DE LA DOUANE
107
90 % de ces recettes. Pour poursuivre cette rationalisation, une mission de
«
réforme du recouvrement fiscal et social
» a été conduite en 2019 afin de
«
polariser le recouvrement autour de la DGFiP dans la sphère fiscale et
de l’ACOSS dans
la sphère sociale
»
101
(rapport
d’A
lexandre Gardette
102
).
Sur la base des travaux de cette mission, un second mouvement de
transfert est prévu
par l’article
184 de la loi de finances pour 2020
(voir
l’annexe n° 1
2). De plus grande ampleur, la réforme inclut le transfert
à la DGFiP de tout ou partie de la gestion de 11 des 14 contributions
indirectes actuellement gérées par la Douane d’ici 2024
103
. Les droits de
douane
(2,2
Md€
en
201
9),
la
TICPE
(33,3
Md€),
l’octroi
de
mer (1,4
Md€
104
) et la TVA à l’importation applicable aux personnes non
assujetties sont en revanche exclus du champ de transfert des missions
fiscales à la DGFiP.
Les contours précis de ce transfert échelonné
n’ont pas encore été
déterminés par le législateur. Les différentes étapes de gestion de la
fiscalité (établissement de l’assiette, recouvrement et contrôle) pourraient
faire l’objet d’un traitement différent.
Schéma n° 1 :
les trois étapes de gestion de la fiscalité
Source : Cour des comptes
101
Lettre de mission des ministres des solidarités et de la santé et de l’action et des
comptes publics à M. Gardette du 29 avril 2019, faisant suite à une première lettre de
mission du 2 octobre 2018.
102
Alexandre Gardette,
Réforme du recouvrement fiscal et social
, rapport à la ministre
des solidarités et de la santé et au ministre de l’action et des comptes publics,
31 juillet 2019.
103
Le périmètre inclut la taxe sur les véhicules routiers (2021), la TVA à l'importation
des assujettis (2022), la taxe intérieure sur la consommation finale d
’
électricit
é́
(2022),
la taxe intérieure de consommation sur le gaz naturel (2022), la taxe intérieure de
consommation sur le charbon (2022), le droit annuel de francisation et de navigation
(2022), les amendes (2023) et la fiscalité sur les tabacs et les alcools (2024).
104
Le mission d’Alexandre Gardette a «
envisagé la possibilité de transférer le
recouvrement de l’octroi de mer
à la DGFiP
». Dans
l’attente des conclusions d’un
rapport d’inspection, le législateur n’a pour le moment pas prévu un tel transfert.
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COUR DES COMPTES
108
Si les opérations de recouvrement ressortiront exclusivement à la
compétence de la DGFiP, la loi de finances pour 2020 ne précise pas si le
traitement de l’assiette et le contrôle de ces
11 contributions seront
également transférés
105
. En tout état de cause, la réforme conduira à une
nette diminution des recettes perçues par la Douane. Une fois les transferts
de mission prévus par les lois de finances pour 2019 et pour 2020 mis en
œuvre, la fiscalité recouvrée par la DGDDI à l’horizo
n 2024 ne
représenterait que de l’ordre du
tiers des sommes collectées en 2019.
Graphique n° 8 :
ordre de grandeur de la prévision
des recettes perçues par la DGDDI (en Md€)
Source : Douane, présentation Cour des comptes. Les chiffres sont des ordres de grandeur.
Cet important chantier impliquera à la fois de poursuivre
l’adaptation de la gestion fiscale préalablement aux transfert
s et de préparer
parallèlement les profondes transformations de l’organisation de la
Douane, son réseau comptable douanier étant en premier lieu concerné.
2 -
Des travaux de préparation et d’accompagnement
des transferts à conduire
Le transfert des missions fiscales pourrait être préparé et
accompagné
par
la
Douane
en
mobilisant
trois
leviers
principaux
: l’établissement de liaisons informatiques avec la DGFiP, la
poursuite de la modernisation de la gestion fiscale et l’abrogation ou la
rénovation des dispositifs fiscaux obsolètes.
105
Le rapport d’Alexandre Gardette fait le départ entre les prélèvements dont la gestion serait
transférée en totalité à la DGFiP (assiette, recouvrement, le cas échéant contrôle) et les
prélèvements pour lesquels seul le recouvrement serait transféré. Cette distinction vise à tenir
compte des éventuelles liens entre la gestion fiscale et les «
actes métiers douaniers
».
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UNE TRANSFORMATION À APPROFONDIR PAR UN RECENTRAGE DES MISSIONS
DE LA DOUANE
109
En premier lieu, l’anticipation du transfert de missions impose une
adaptation significative
des systèmes d’information pour établir une liaison
étroite et automatisée entre les services d’assiette et ceux chargés du
recouvrement de
s droits. En conséquence, l’
organisation du transfert de la
fonction de recouvrement à la DGFiP
devra reposer sur l’adaptation de
la
chaîne de traitement et ainsi
garantir la liaison automatisée au moyen d’un
système d’information prenant en compte les gar
anties de paiement.
En second lieu, il convient de poursuivre la modernisation des
opérations fiscales. La généralisation des obligations de télédéclaration et
de télépaiement constituera à cet égard un appui efficace au transfert de
missions. Cet effort p
ourrait aussi porter sur l’automatisation de la gestion
de l’octroi de mer
, dont les procédures demeurent lourdes et en partie
manuelles. C
es évolutions devront s’accompagner d’investissements
significatifs dans les systèmes d’information, tant pour permet
tre la
résorption de la dette technique que pour procéder à l’interconnexion
avec
les applications de la DGFiP.
Enfin, la démarche de suppression et de simplification des taxes à
faible rendement devrait être poursuivie, comme la Cour l’a recommandé
dans un référé de 2018
106
. La pertinence des impôts et taxes dont les
objectifs peuvent être atteints
par d’autres moyens pourrait également être
réexaminée, en particulier dans le cas des taxes destinées aux centres
techniques et aux comités de développement industriels, dont la Douane
collecte environ 10
M€ et pour lesquel
les le Gouvernement a lancé une
mission à l’automne 2018. À défaut d’être supprimée
107
, la taxe spéciale
sur les véhicules routiers (TSVR) pourrait également être profondément
réformée, pour mett
re fin à la lourde procédure de remboursement qu’elle
fait porter sur les entreprises et l’administration
108
.
Ce nécessaire chantier de simplification concernerait également les
dispositifs fiscaux dont le recouvrement relèvera toujours de la compétence
douanière. Il porterait ainsi notamment sur le dispositif de remboursement
106
Cour des comptes,
Les taxes à faible rendement
, référé, décembre 2018, 7 p.,
disponible sur www.ccomptes.fr.
107
La Cour avait recommandé
Rapport public annuel 2018, de réexaminer cet impôt
dans le cadre de la réflexion plus globale sur la fiscalité applicable aux transports
routiers
».
108
Elle pourrait ainsi devenir un imp
ô
t annuel, autoliquid
é
et
à
terme échu, au lieu d'un
impôt semestriel, sur rôle et
à
terme
à
échoir.
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COUR DES COMPTES
110
de la taxe intérieure de consommation des produits énergétiques (TICPE)
aux transporteurs routiers de marchandises et de passagers, ainsi qu’aux
taxis, qui demeure excessivement lourd en gestion. Au total, les missions
d’assiette et de gestion de la TICPE mobilisent 151 équivalents temps plein
travaillés en 2019. Le régime de TICPE pour les transporteurs routiers
génère ainsi 65 000 demandes annuelles de remboursements. Le conseil
des prélèvements obligatoires
109
a proposé la suppression de cette dépense
fiscale en faveur du transport routier de marchandises (1,6
Md€ en 201
9),
qui affecte l’efficacité de la fiscalité carbone. À défaut, la Cour a
recommandé de mettre fin à ce système coûteux en lui substituant un autre
mécanisme, tels qu’un crédit d’impôt ou une carte de paiement utilisable
exclusivement pour l’ach
at de grandes quantités de carburant
110
.
3 -
Une révision en profondeur du réseau fiscal
et comptable à organiser
Le resserrement échelonné des missions fiscales, qui mobilisent
1 763 équivalents temps plein travaillés en 2019
111
, nécessitera d’adapter
progressi
vement les moyens accordés aux nouvelles modalités d’exercice
des attributions fiscales. Ces adaptations concerneront à titre principal le
dimensionnement du réseau fiscal et comptable de la DGDDI.
En particulier, le transfert du recouvrement devrait se traduire au
minimum par une contraction du réseau comptable de la DGDDI. Pour
autant, resserré depuis la fermeture de 17 recettes régionales en 2017 et
2018, ce dernier ne dispose déjà plus, avec environ 200 agents à temps
plein, de la taille critique pour constituer une filière professionnelle
suffisamment attractive au sein de la Douane
. La réduction d’effectifs
correspondant à cette évolution du réseau n’a toutefois pas encore eu
pleinement lieu, une partie importante des agents des recettes régionales
res
tant dans l’
attente d
’un
reclassement.
La Cour, dans la continuité de ses recommandations
112
, considère
donc que les transferts programmés par la loi de finances pour 2020
devraient ouvrir
la voie à l’unification
complète du réseau de recouvrement
109
Conseil des prélèvements obligatoires,
La fiscalité environnementale au défi de
l’urgence climatique
, septembre 2019, 225 p., disponible sur www.ccomptes.fr.
110
Les poids lourds disposent de réservoirs de grande contenance.
111
Rapport annuel de performance pour 2019.
112
Cour des comptes, « Les missions fiscales de la Douane : des coûts trop élevés, une
modernisation et une simplification à mettre en œuvre
», in
Rapport public
annuel
2018, Tome II, p. 307-335. La Documentation française, février 2018, 417 p.,
disponible sur www.ccomptes.fr.
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UNE TRANSFORMATION À APPROFONDIR PAR UN RECENTRAGE DES MISSIONS
DE LA DOUANE
111
de la fiscalité de la DGDDI avec celui de la DGFiP. La Douane pourrait
donc préparer l’intégration du réseau de recouvrement en prévoyant la
fermeture progressive de l’activité
des 12 implantations territoriales du
réseau comptable en métropole et en révisant en conséquence la trajectoire
d’effectifs des recettes interrégionales.
Plus largement, la préparation du transfert des missions suppose que
les effectifs aujourd’hui chargés des activités fiscales et comptables soient
clairement identifiés et que des discussio
ns s’engagent avec la DGFiP sur
le quantum de postes budgétaires à transférer. Actuellement, le nombre
d’emplois concernés n’est pas connu à l’unité près.
En tout état de cause, la Douane devrait préparer la nette diminution
des effectifs consacrés à ces missions en organisant, pour les agents
concernés, un accompagnement personnalisé, pour leur proposer des
postes correspondant à leurs compétences et à leurs préférences. À cette
fin, la DGDDI a constitué une équipe d’accompagnement du personnel
,
chargée notamment de fournir les informations relatives aux décisions de
restructurations et d’examiner les demandes des agents. Une telle
transformation supposera également de mettre en place une méthode de
discussion avec les partenaires sociaux, un plan d’accomp
agnement des
agents
et d’élaborer
un calendrier séquencé du transfert.
B -
Des conséquences sur les missions fiscales
à anticiper au-delà de la fonction de recouvrement
1 -
Mener u
ne revue des missions douanières d’assiette
et de contrôle
Le transfert progressif
de l’opération de recouvrement de la Douane
vers la DGFiP pourrait se traduire, en l’état actuel de la réforme, par la
dissociation de la gestion de l
’assiette
de celle du recouvrement. Le rapport
précité
d’
Alexandre Gardette, remis en juillet 2019 à la ministre des
solidarités et de la santé et au ministre de l’action et des comptes publics
,
propose un découpage de ces fonctions entre la Douane et la DGFiP au cas
par cas selon les impositions.
Compte tenu de l’imbrication verticale des missions fiscales
(d
e l’assiette au contrôle), la définition d’une ligne de
partage des actions
est toutefois difficile. À titre d’exemple, au sein de la DGDDI, la séparation
entre les opérations d’assiette et de contrôle induite par la spécialisation de
services, tels que le service national douanier de la fiscalité routière
(SNDFR)
de Metz pour la taxe à l’essieu, tend à induire une perte
progressive de compétence des contrôleurs et, en conséquence, à affecter
l’efficacité de la lutte contre la fraude.
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COUR DES COMPTES
112
Les conséquences d’un
tel partage entre les missions fiscales, qui
segmente la chaîne de gestion des recettes, méritent d’être examinées au
regard tant
de l’efficacité de l’action administrative (en particulier en
matière de lutte contre la fraude fiscale) que de son efficience. À cet égard,
plusieurs réformes menées au cours de ces quinze dernières années se sont
inscrites dans le sens d’une intégration verticale des opérations fiscales.
Cet objectif a notamment présidé à la création de la direction générale des
finances publiques par la fusion, en 2008, de la DGI, chargée de la gestion
de l’assiette, et de la DGCP, chargée du recouvrement.
Dès lors, l’opportunité d’une réduction du champ d’intervention fiscale
de la Douane doit être examinée au-delà de la seule fonction de recouvrement.
Un transfert de missions fiscales à la DGFiP pourrait ainsi être envisagé dans
cette logique verticale. Pour la gestion de certains prélèvements, tels que le
droit annuel de francisation des navires (DAFN
113
), le transfert vers d’autres
administrations pourrait être envisagé pour tenir compte des périmètres
respectifs d’expertise ou pour simplifier le système fiscal.
À l’exception des droits de douane, de la TICPE et de la
TVA à
l’importation applicable aux personnes non assujetties
, dont la gestion, le
recouvrement et le contrôle présentent des particularités douanières, la
Cour considère donc nécessaire de mener une revue des missions
douanières d’assiette et de contrô
le.
2 -
Une exploitation des données à mutualiser avec la DGFiP
La Douane s’est en
gagée, à compter de 2016, dans
l’accélération de
l’exploration des données dont elle dispose. La dématérialisation croissante
des processus fiscaux et l’accélération de la numérisation des techniques
de contrôle permettent effectivement un accès à un ensemble plus riche et
plus étendu de données. C’est dans cet esprit que la Douane a lancé le projet
3D (développement de la donnée en Douane), avec pour objectif de mettre
l’exploitation des données au cœur de ses trois grandes missions.
113
La gestion du DAFN est lourde à la fois pour la Douane, qui mobilise 85,8 équivalents
temps plein travaillé pour 50 M€ de rendement, et pour les propriétaires de navires de
plaisance, qui effectuent une double procédure d’immatriculation auprès du services d
es
affaires maritimes et de francisation auprès de la Douane.
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UNE TRANSFORMATION À APPROFONDIR PAR UN RECENTRAGE DES MISSIONS
DE LA DOUANE
113
Toutefois, cet effort
de montée en puissance de l’exploration de
données se trouve confronté à deux obstacles déterminants. D’une part, la
Douane ne parvient pas à recruter le personnel spécialisé que suppose cette
ambition. D’autre part, la contraction du champ des missions f
iscales de la
Douane devrait conduire à un affaiblissement progressif des données
fiscales détenues par la DGDDI. L’efficacité des techniques d’analyse des
données repose pourtant en grande partie sur la richesse de celles-ci.
Ces mêmes enjeux avaient en particulier conduit la Cour à formuler
le constat suivant en matière de lutte contre la fraude
114
: «
Alors
qu’existent désormais des outils permettant d’avoir un accès à de nouvelles
sources d’informations de façon automatique […], l’organisation des
service
s et des pratiques de contrôle ne permet pas encore d’en exploiter
tout le potentiel
». En conséquence, elle recommandait de rationnaliser la
programmation et l’exploitation des données de masse.
Dès lors, la Douane devrait s’engager dans la mutualisation
de
l’analyse des données avec la DGFiP. La mise en commun des données et
de leur exploitation permettrait à la fois de faire émerger des ensembles de
données plus volumineux et de faciliter le recrutement du personnel
compétent pour leur traitement. Dans un contexte de pénurie de personnels
qualifiés et aptes à exploiter les données, une mutualisation de ces
personnels entre les deux directions paraît être la solution la plus pertinente.
III -
Une compétence d’accompagnement
des filières économiques à confier
à d
’autres acteurs
Les transformations profondes induites par le transfert progressif de
ses missions fiscales fournissent à la DGDDI
l’occasion de réévaluer
son
champ d’intervention. Elles conduisent à envisager un recentrage des
missions douanières par le
transfert des compétences d’accompagnement
des filières économiques vitivinicoles et un réexamen des modalités
d’organisation de la vente au détail du tabac.
114
Cour des comptes,
La fraude aux prélèvements obligatoires
, rapport au Premier
ministre, p. 87-136, La Documentation française, novembre 2019, 201 p., disponible
sur www.ccomptes.fr.
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COUR DES COMPTES
114
A -
Un transfert de la compétence vitivinicole
à programmer
Les attributions vitivinicoles, fiscales ou économiques, continuent de
mobiliser 294 équivalents temps plein travaillé en 2019 et le maillage
territorial de la Douane a conservé en grande partie son origine historique, liée
à la localisation des bassins de production. Par exemple, dans le ressort de la
direction régionale de Bordeaux, sont implantés six centres
115
de viticulture.
La structuration du réseau résulte également de relations particulières avec le
monde viticole et de la forte demande de proximité des usagers.
La baisse significative de l
’activité des bureaux vitivinicoles
constatée
depuis
2014
ne
s’est
pas
encore
traduite
par
un
redimensionnement du réseau. Alors que les déclarations ont reculé de
34 % et que les contrôles ont chuté de 43 % de 2014 à 2018, les effectifs
n’ont baissé que d
e 6
%. L’absence d’ajustement des moyens humains à
l’activité s’explique pour partie par la faible taille des bureaux,
49
d’entre
eux présentant moins de dix agents en 2019.
L’aboutissement
de
la
démarche
de
dématérialisation
des
procédures, qui doit conduire à des gains de productivité
d’environ 30 %
,
amplifiera ce décalage
entre l’activité administrative et le format du réseau
.
Sauf à maintenir le réseau en sous-
activité, l’accélération des gains de
productivité conduirait notamment à faire passer, dès 2020, le nombre de
services de moins de cinq agents de 12 à 19
. La viabilité d’un maillage
territorial, qui serait composé de bureaux en sous-activité ou de très faible
dimension, n’est pas assurée.
De surcroît, les missions vitivinicoles de la DGDDI connaîtront à
moyen terme une forte contraction en raison du transfert, prévu par la loi
de finances pour 2020, du recouvrement de la fiscalité sur les alcools à la
DGFiP à l’horizon 2024.
Déjà en 2014 , la Cour a recommandé le transfert
de ces missions économi
ques à d’autres autorités
116
. En effet, l
’importance
du secteur vitivinicole pour la France ne justifie pas le foisonnement des
administrations compétentes. Les missions économiques pourraient être
confiée pour partie au ministère de l’agriculture, qui dispose d’un réseau
territorial, et pour partie aux interprofessions
117
.
115
Bergerac, Blaye, Libourne, Bordeaux, Langon et Pauillac.
116
Cour des comptes, « Les missions fiscales de la Douane : un rôle et une organisation à
repenser », in
Rapport public annuel 2014
, Tome I - volume 2, p. 37-64. La Documentation
française, février 2014, 417 p., disponible sur www.ccomptes.fr.
117
Dans son rapport public annuel de 2014, la Cour soulignait que le ministère de
l’agriculture
pourrait être compétent pour la gestion des informations cadastrales, tandis
que les interprofessions pourraient être chargées du traitement des statistiques
commerciales contenues dans les déclarations récapitulatives mensuelles.
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UNE TRANSFORMATION À APPROFONDIR PAR UN RECENTRAGE DES MISSIONS
DE LA DOUANE
115
La multiplicité des administrations compétentes en matière viticole
La filière viticole est suivie à la fois par la Douane (potentiel de
production et fiscalité indirecte), les chambres d’a
griculture (formation), les
directions départementales des territoires (installation et environnement),
les directions départementales de la protection des populations (loyauté des
produits), les directions régionales des finances publiques (fiscalité directe),
les services territoriaux de FranceAgriMer (aides nationales et fonds
européens), l’Agence de services et de paiement (aides directes) et l’Institut
national de l’origine et de la qualité (contrôle des appellations d’origine
contrôlée et des indications géographiques protégées).
La Cour invite la Douane à
préparer le transfert de l’ensemble des
missions viticoles et cidricole
s, qu’elles soient de nature économique
(au
ministère de l’agriculture et aux interprofessions)
ou fiscale (à la DGFiP).
Ce schéma de transformation, qui permettrait la rationalisation de
l’action des services de l’État vis
-à-vis de la filière, impliquerait la
fermeture des bureaux vitivinicoles de la Douane et l’affectation d’une
partie des agents concernés aux services déconcen
trés de l’État
nouvellement compétents. Il ouvrirait également la possibilité d’une
réallocation d’une partie de ces moyens (budget de fonctionnement
notamment) vers l’exercice des missions au cœur du métier douanier.
B -
Une réflexion à engager
sur l’accompag
nement
des débitants de tabac
La mission de soutien aux débitants de tabac mobilise 129 agents à
temps plein de la Douane, qui exercent en pratique une compétence de
gestion de filière économique. Reposant sur le statut particulier de préposé
des Douanes,
cette compétence ne se rapproche d’aucune des trois missions
exercées à titre principal par la douane. Elle induit une relation particulière
entre l’État et une profession commerciale et se traduit par l’octroi de
diverses aides budgétaires ou fiscales, au
détriment des recettes de l’État.
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COUR DES COMPTES
116
La Cour constate qu’en dépit de ses observations, cette mission confiée
à la DGDDI a peu évolué. Dans son rapport public annuel de 2013
118
, la Cour
notait que «
la collectivité avait consenti un effort budgétaire sans aucun
rapport avec ce qu’aurait exigé le traitement individualisé de la situation des
seuls débitants effectivement et significativement affectés par la baisse des
volumes du tabac
». Quatre ans plus tard
119
, la Cour relevait que le protocole
d’accord «
pour la période 2017-2021 tout en comportant quelques
améliorations ne pos[ait] pas les bases de l’indispensable refondation de la
politique de soutien à la profession
».
Depuis, un nouveau protocole d’accord couvrant la période
2018-2021 a été conclu pour tenir
notamment compte de la mise en œuvre du
« paquet à 10 euros ». Ce dernier protocole se traduirait par la diminution de la
dépense budgétaire de l’État et la poursuite de l’augmentation de la remise
nette
bénéficiant
aux
débitants
de
tabac
120
.
En
conséquence,
l’accompagnement budgétaire et fiscal de la profession a atteint 1
5
81 M€ en
2018 et continuerait de progresser (voir
l’
annexe n° 8). Les débitants
poursuivent par ailleurs la diversification de leurs activités commerciales (café,
presse, jeux, retrait et dépôt de colis, transfert d’argent, etc.).
L’efficacité de l’organi
sation actuelle, peu répandue en Europe,
n’est pas démontrée.
Dans un objectif d’efficience et de plus grande
cohérence des politiques publiques, la Cour invite donc à un réexamen des
modalités d’organisation de la vente au détail du tabac,
sans tabou sur le
statut de préposé des Douanes et le monopole de vente du tabac qui leur est
reconnu, tout en maintenant les obligations de santé publique qui
s’imposent à la vente du tabac, comme c’est le cas pour d’autres
commerces, tel celui des médicaments
121
.
118
Cour des comptes, «
Le soutien de l’État aux débitants de tabac : des aides
injustifiées »,
in
Rapport public annuel 2013
, Tome 1., p. 583-620. La Documentation
française, février 2013, 657 p., disponible sur www.ccomptes.fr.
119
Cour des comptes, « Le soutien aux débitants de tabac : supprimer les aides au
revenu, revoir les relations entre l’État et la profession
»,
in
Rapport public
annuel 2017
, Tome II, p. 375-414. La Documentation française, février 2017, 525 p.,
disponible sur www.ccomptes.fr.
120
L’augmentation du taux de remise prévue par l’accord signé en 2016 a été reprise
par l’accord pour 2018
-2021, le taux passant de 7,7 % en 2018 à 8,0 % en 2021.
121
Les commerçants sont en particulier
tenus de s’approvisionner auprès des
fournisseurs agréés par l’administration.
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UNE TRANSFORMATION À APPROFONDIR PAR UN RECENTRAGE DES MISSIONS
DE LA DOUANE
117
IV -
Des documents stratégiques à élaborer
Le dernier projet stratégique formalisé de la DGDDI, dénommé
« Douane 2018 », a été arrêté fin 2012. Les lignes directrices de la feuille
de route étaient alors la simplification et la dématérialisation des
procédures, le soutien à la compétitivité des entreprises, le renforcement
du dispositif de lutte contre la fraude et la modernisation de la fiscalité.
Depuis cette date, la direction générale n’a pas élaboré de nouveau
document stratégique d’ensemble
122
. Elle a conduit les profondes
transformations de son organisation et de ses méthodes de travail sans
donner de la visibilité à moyen terme ni à ses partenaires, ni à ses agents.
Cette situation peut paraître paradoxale dans la mesure où sur la période
2014 à 2019, la DGDDI a connu des évolutions majeures tant pour la mise
en œuvre du CDU que pour l’adaptation aux nouveaux enjeux en terme
s
de lutte contre les trafics et le terrorisme ou encore pour préparer le
Brexit
.
Toutefois, la Douane s’est inscrite dans le programme Actio
n
Publique 2022. Dans ce cadre, le ministère de l’économie et des finances a
formalisé son plan de transformation
123
qui prévoit quatre indicateurs
124
pour le chantier de réorganisation du réseau territorial de la DGDDI.
Compte tenu des défis que la Douane va devoir relever dans les
années qui viennent, il est indispensable qu’elle élabore, en concertation
avec les organisations syndicales, un plan stratégique qui décrive les
réformes envisagées à partir de 2020 et leurs conséquences dans tous ses
secteurs d’i
ntervention.
Avec la dématérialisation des procédures, les opérateurs doivent
avoir notamment la capacité d’anticiper la mise à niveau de leurs propres
systèmes d’information afin d’être en mesure de répondre aux exigences
de la Douane pour continuer à télédéclarer. De la même façon, une
visibilité pluriannuelle est indispensable pour élaborer une gestion
prévisionnelle des effectifs et définir les mesures d’accompagnement des
personnels (mobilité, formation…) dans le cadre des réformes à conduire
.
122
Seuls des plans « sectoriels » ont pu être élaborés tels que le plan stratégique
informatique e-Douane.
123
Dont le déploiement a été lancé à la suite du deuxième comité interministériel de la
transformation publique du 29 octobre 2018.
124
Finalisation
des
opérations
commencées ;
évolution
de
la
carte
des implantations / directions ; nombre de participation à des maisons de service
public ; nombre de télétravailleurs.
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COUR DES COMPTES
118
Ce plan stratégique devrait comporter des orientations sur les
mesures à prendre pour améliorer la qualité des opérations de
dédouanement afin de maintenir l’attractivité de la France en tant que point
d’entrée des marchandises sur le territoire de l’Union
; il devrait détailler
les conséquences des transferts de fiscalité engagés et à venir et contenir
une véritable revue des missions conduisant la Douane à recentrer ses
activités autour du contrôle des flux de marchandises en étroite coopération
avec les autres administrations concernées, notamment la DGCCRF.
Il devra, par ailleurs, prévoir un plan d’adaptation du réseau
territorial prenant en compte les nouvelles modalités d’exercice des
missions et les attentes des utilisateurs de la Douane. Ce plan devra
con
tenir un calendrier de réalisation des restructurations ainsi qu’une
méthode de travail concertée pour sa mise en œuvre.
La direction du budget a fait part à la Cour de son souhait que la
Douane s’engage rapidement dans l’élaboration de ce plan stratégiqu
e
pluriannuel. La Douane, de son côté, indique
avoir d’ores et déjà lancé cette
démarche et
la création d’une
nouvelle structure dénommée «
mission
prospective et accompagnement à la transformation
» au sein de la
direction générale pour accompagner le lancement de nouveaux projets.
Par ailleurs, l
e ministre de l’action et des comptes publics a souhaité
que chaque direction à réseau de Bercy négocie avec la direction du budget
un contrat stratégique, document resserré fixant les objectifs et les moyens
de la direction à un horizon de trois à quatre ans. Si le contrat avec la DGFiP
a été signé le 16 mars 2020, les discussions avec la DGDDI n
’étaient
pas
encore engagées à cette date.
Après négociation sur la base de chiffres partagés entre les deux
directions, ce qui suppose que la Douane fasse un effort de transparence
vis-à-vis de la direction du budget, notamment en ce qui concerne les
e
ffectifs consacrés à l’exercice de chacune des missions, c
e contrat devra
contenir des éléments sur les effectifs et les crédits mais aussi sur
l’évolution du réseau à court
terme dans la logique de « nouveau réseau de
proximité » définie par le ministre.
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UNE TRANSFORMATION À APPROFONDIR PAR UN RECENTRAGE DES MISSIONS
DE LA DOUANE
119
En cohérence avec le projet stratégique, ce contrat, dont
l’élaboration est
indispensable , devra prendre acte des conséquences à tirer
des transferts d’impôts vers la
DGFiP déjà effectués et de ceux prévus par
la loi de finances pour 2020. Il devra tenir compte des gains de productivité
déjà réalisés.
La discussion devrait permettre d’aborder la question des
conséquences du
Brexit
et du format de la flotte aéromaritime et de
travailler sur une trajectoire d’économie
s portant sur les fonctions supports,
notamment la gestion des ressources humaines
. Outre l’ajustement des
moyens aux besoins, il devra aussi contenir des engagements de la part de
la DGDDI
en matière d’amélioration de
ses outils méthodologiques pour
mieux mesurer son activité et sa performance.
Il convient que ce contrat de performance
soit établi d’ici la fin 2020
.
__________ CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS __________
La Douane doit poursuivre sa transformation et recentrer
progressivement ses activités autour du contrôle des flux de marchandises
et de personnes. Ce recentrage, déjà engagé
sous l’effet de la massification
du commerce international, a été accentué par la préparation du
Brexit
et
le transfert progressif de certaines de ses missions fiscales vers la DGFiP.
Il devrait être prolongé par l’étude approfondie des possibilités, pour
certains impôts, d’aller plus loin que le transfert du recouvrement et par
une réflexion n’exc
luant pas le transfert de ses activités de soutien aux
filières économiques à d’autres administrations.
En se projetant à moyen terme comme une administration de
protection des frontières et de contrôle des flux, et en veillant à inscrire
son action dans un cadre de coopération européen, la DGDDI serait ainsi
en mesure de renouveler sa mission et de renforcer sa place dans l’action
administrative nationale et européenne, au service des usagers et des
opérateurs économiques.
La Douane devra élaborer rapidement un plan stratégique
pluriannuel pour afficher clairement ses objectifs et commencer à anticiper
les conséquences qu’elle devra tirer des évolutions qui se dessinent à
moyen terme pour l’exercice de ses missions. Ce plan permettra aux
partenaires et aux
agents de la Douane d’avoir la visibilité nécessaire pour
s’adapter aux nouvelles modalités d’exercice des activités douanières. Ce
document devra contenir des éléments sur la mise en adéquation de son
organisation territoriale.
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COUR DES COMPTES
120
En
cohérence
avec
le
plan
stratégique
pluriannuel,
les
transformations
envisagées
devraient
trouver
une
traduction
opérationnelle et matérielle dans le contrat de performance que la Douane
doit négocier avec la direction du budget et conclure avant la fin 2020.
La Cour formule les recommandations suivantes :
7.
réexaminer avec la direction centrale de la police aux frontières le
partage des responsabilités sur les points de passage aux frontières ;
8.
dans le cadre de la montée en charge des missions confiées à Frontex,
identifier les moyens nécessaires et les méthodes de travail à mettre en
place ;
9.
m
ettre en œuvre le transfert du recouvrement dans les délais
fixés et
en déduire les conséquences nécessaires en termes d’effectifs et
d’implantations territoriales
;
10.
préciser, dispositif fiscal par dispositif fiscal, si le transfert des
fonctions de recouvrement à la DGFiP doit s’accompagner du
transfert des fonctions d’assiette et de contrôle
;
11.
mettre en place une valorisation des données mutualisée entre la
DGFiP et la DGDDI ;
12.
organise
r le transfert au ministère de l’agriculture et aux organismes
professionnels concernés du suivi
économique de la filière
vitivinicole ;
13.
élaborer un plan stratégique fondé sur une revue des missions de la
Douane et le traduire
d’ici fin 2020
dans un contrat de performance
fixant les objectifs,
les moyens et un schéma d’adaptation du réseau
territorial de la DGDDI.
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Annexes
Annexe n° 1 :
les principales étapes de la législation douanière
de l’
Union
...........................................................................
123
Annexe n° 2 :
recettes douanières en 2019
................................................
127
Annexe n° 3 :
organigramme de la DGDDI (24 avril 2020)
......................
128
Annexe n° 4 :
moyens juridiques complémentaires dont dispose
la Douane depuis 2013 pour lutter contre la fraude
............
129
Annexe n° 5 :
liste des services qui se démarquent de la ligne
hiérarchique traditionnelle
..................................................
131
Annexe n° 6 :
organigramme type des directions régionales
.....................
133
Annexe n° 7 :
évolution des déclarations par direction régionale
..............
134
Annexe n° 8 :
aides de l’État aux débitants de tabac
.................................
135
Annexe n° 9 :
recrutements douaniers annoncés par les États
européens en amont du
Brexit
.............................................
136
Annexe n° 10 :
les différents types de contrôles à l’importation
.................
137
Annexe n° 11 : points de passage frontaliers attribués à la Douane
............
138
Annexe n° 12 :
dispositions de l’article 184 de la loi de finances
pour 2020
............................................................................
139
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Annexe n° 1 :
les principales étapes
de la législation douanière de l’Union
1- Le dédouanement
s’exerce dans le cadre de l’
union douanière
mise en place depuis le 1
er
juillet 1968 et du marché intérieur
établi en 1993
Dès 1992, le code des douanes communautaire
125
amendé
126
a
engagé la mise en place des dispositifs principaux suivants :
-
l’obligation faite aux opérateurs de fournir aux autorités douanières
des informations sur les marchandises préalablement à leur
importation dans l’Union européenne ou à leur exportation au dépa
rt
de celle-ci : ECS (
export control system
) et ICS (
Import Control
System
), premières étapes pour la mise en place des systèmes AES
(
Automated Export System
) et AIS (
Automated Import System
). Ces
deux systèmes doivent permettre l’échange des données entre
tous les
acteurs (opérateurs, transporteurs, Douanes, et autres administrations
concernées par une opération d’export ou d’import)
;
-
la création du statut d’opérateur économique agréé (OEA) accordé en
fonction de critères communs aux pays de l’Union et faisant l’objet
d’une reconnaissance mutuelle entre les États. Ces opérateurs
considérés comme fiables bénéficient de mesures de simplification
des échanges ;
-
un cadre commun de gestion des risques en matière de sûreté et de
sécurité. Cette analyse des risques repose sur des procédés
informatiques et vise à instaurer un niveau équivalent de contrôles
douaniers par tous les États membres.
Ces modifications sont structurantes notamment pour les opérations
commerciales de la Douane, car elles consacrent le caractère prioritaire des
préoccupations de sûreté et elles imposent aux services douaniers une
priorité à la sécurisation des chaînes logistiques et des méthodes d’analyse
des risques standardisés et informatisées.
125
Règlement (CEE) n°2913/92 du Conseil.
126
Les dispositions d’application du code des douanes communautaire ont fait l’objet
de 27 modifications par voie de règlement entre 1994 et 2007.
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COUR DES COMPTES
124
Une nouvelle étape dans la réglementation douanière est intervenue
avec le code des douanes modernisé et adopté le 23 avril 2008
127
. Elle vise à
rationaliser les procédures douanières, tant dans le domaine de la facilitation
du commerce que dans celui de la prévention des menaces. Il harmonise les
droits et obligations des personnes
128
, rapproche les règles en matière de
dette douanière
129
et améliore les procédures et régimes douaniers.
La simplification des procédures de déclaration en douane engagée
par ce nouveau code conduit à créer une possibilité de dédouanement
centralisé au moyen de la procédure de dédouanement avec domiciliation
unique communautaire (PDUC). Elle permet à un opérateur économique
européen de d’effectuer ses déclarations douanières sous forme
électronique à partir de son lieu d’établ
issement, pour toutes les opérations
qu’il réalise à partir ou à destination du territoire communautaire,
indépendamment des points d’entrée et de sortie des marchandises.
Cette nouvelle version du code des douanes
communautaire n’est
pas entrée en vigueur mais ses principales dispositions ont toutefois été
reprises dans le CDU, lui-même entré en vigueur en 2013, avec une mise
en application différée au 1
er
mai 2016. Le terrain d’action des
douanes de
chaque État membre est désormais étendu à l’échelle de l’Union tout
entière et la concurrence est intensifiée. Avec le PDUC notamment, un
opérateur peut centraliser auprès de la douane
d’un seul état membre
l’ensemble de son
dédouanement, cette disposition vient accroître les
possibilités de « délocalisation du dédouanement ».
2-
La procédure de dédouanement aujourd’hui
Le CDU franchit une étape supplémentaire dans cette mise en
concurrence puisqu’après avoir ouvert la possibilité d’une centralisation
des formalités auprès d’un seul bureau de
douane avec le procédure PDUC,
la mise en place d’un
dédouanement centralisé va permettre la dissociation
entre les flux physiques et les flux déclaratifs. À terme, cette dissociation,
aujourd’hui au niveau d’un État membre, pourra s’effectuer à l’échelon
communautaire (DCC) (cf.
infra
).
127
Code des douanes modernisé adopté le 23 avril 2008.
128
Institution de règles communes pour tous les types de décisions prises par les
autorités douanières
; droit d’être entendu et de disposer de recours, principe communs
en matière de sanction douanières ; règles de gratuité des formalités et contrôles
douaniers.
129
Exigence et gestion des garanties, remboursement et remise des droits, prescription.
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ANNEXES
125
La déclaration peut être établie selon les modalités de droit commun
(procédure normale) ou selon des modalités simplifiées (déclaration
simplifiée avec un jeu de données réduit, suivie d’une déclaration
complémentaire
a posteriori
). Le dépôt
de la déclaration s’effectue
désormais presque exclusivement en ligne. La législation européenne
prévoit la dématérialisation complète des déclarations en douane
130
. Le
taux de dématérialisation des formalités douanières était de 87 % en 2017.
Les formalité
s douanières obligatoires pour l’importation dans
l’Union européenne sont décrites dans le schéma simplifié ci
-dessous.
Schéma n° 2 :
formalités
douanières obligatoires pour l’importation
sur le territoire de l’Union
européenne
Source : DRDDI de Poitiers, présentation du CDU
DSDT : Déclaration sommaire de dépôt temporaire
MDT : Magasin de dépôt temporaire
130
À l’issue de la période de transition informatique fixée par le CDU
(le 1
er
janvier 2021), la déclaration
papier (l’actuel
document administratif unique ou
DAU) sera supprimée.
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126
Le dispositif ICS (
Import Control System
)
permet d’appréhender les
flux de marchandises sur le plan de la sûreté avant même qu’elles ne
pénètrent sur le territoire national et européen.
Le dispositif ICS (
Import Control System
)
Dans le cadre des normes SAFE préconisées par l
’
Organisation
mondiale des d
ouanes (OMD), l’Union européenne a mis en place un
nouveau système de contrôle des importations, l
’
Import Control System
(ICS), qui vise à sécuriser les flux de marchandises au moment de leur
entrée dans le territoire douanier de l’UE. Ce système de contrôle, qui
s’inscrit dans le programme communautaire eCUSTOMS
, est en vigueur
depuis le 1
er
janvier 2011.
Les opérateurs concernés (tous les importateurs de produits ou de
marchandises en France, ainsi que les transporteurs et les prestataires de
services de transport) ont l
’
obligation de transmettre aux services douaniers
les données exigibles à des fins de sûreté et de sécurité préalablement à
l'entrée dans le territoire de l
’Union européenne
.
Une
déclaration
sommaire
d'entrée
(ENS,
Entry
Summary
Declaration
) doit être transmise au bureau de d
ouane du pays d’entrée,
préalablement à l'introduction des marchandises dans le territoire douanier
de l
’
Union européenne. La déclaration sommaire peut être rédigée sur un
formulaire fourni par les autorités douanières. Toutefois, les autorités
douanières peuvent également autoriser l
’
utilisation de tout document
commercial ou officiel contenant les informations spécifiques requises pour
identifier les marchandises.
Ce dispositif est complété par un recours généralisé à l’analyse de
risque par les services douaniers, par la réalisation de contrôles de sûreté
sécurité au pays d’exportatio
n et la mise en place d
’
un partenariat avec le
commerce « légitime », qui bénéficie de contreparties en matière de
formalités et de contrôles.
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ANNEXES
127
Annexe n° 2 :
recettes douanières en 2019
En M€
2019
Dédouanement
Droits de douane
2 248
TVA à l’importation
6 292
Autres
28
Énergie et environnement
Taxe intérieure de consommation sur les produits
énergétiques (TICPE)
33 321
Autres taxes intérieures de consommation
énergétique
10 263
Taxe spéciale de consommation (outre-mer)
554
TVA pétrole
11 407
Taxe générale sur les activités polluantes (TGAP)
722
Taxes et rémunérations pour le compte de
professionnels du pétrole
9
Contributions indirectes
Alcools et boissons
4 125
Tabacs
13 485
Autres contributions indirectes
28
Octroi de mer et activités maritimes
Octroi de mer
1 372
Droits de port
556
Droit annuel de francisation et de navigation
(DAFN)
45
Autres taxes
Taxe sur certains véhicules routiers (TSVR)
181
Autres taxes
466
Total
85 101
Source
: DGDDI rapport d’activité 2018
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COUR DES COMPTES
128
Annexe n° 3 :
organigramme de la DGDDI
(24 avril 2020)
Organigramme n° 2 :
organigramme de la DGDDI
(24 avril 2020)
Source : DGDDI
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ANNEXES
129
Annexe n° 4 :
moyens juridiques complémentaires
dont dispose la Douane depuis 2013 pour lutter
contre la fraude
Entre 2013 et 2015, les moyens juridiques de lutte contre la fraude
de la Douane ont été renforcés par une série de dispositions législatives,
parmi lesquelles :
la loi n° 2013-1117 du 6 décembre 2013 relative à la lutte contre la fraude
fiscale et la grande délinquance économique et financière (réquisition
d'experts, modification de l'article 63
ter
, etc.) ;
la loi n° 2014-315 du 11 mars 2014 renforçant la lutte contre la
contrefaçon
a complété l’article 67
bis
du code des douanes (opérations
de surveillance,
de livraison surveillée et d’infiltration) par un article 67
bis
-
1 qui élargit la faculté d’action de la Douane en matière de
stupéfiants, de tabac et de contrefaçons. Ces procédures confèrent aux
agents de la Douane la possibilité d’acquérir, de transport
er ou de livrer
des marchandises prohibées ainsi que de se faire passer pour un coauteur
ou complice sans que leur responsabilité pénale soit engagée ;
la même loi a introduit le nouvel article 67
sexies
du code des douanes,
instituant au profit de la Douane un droit de communication par les
entreprises de fret express et les prestataires de services postaux des
données dont ils disposent relatives à l'identification des marchandises
et objets acheminés ainsi que de leurs moyens de transport.
Depuis 2015, notamment en raison du haut niveau de menace
terroriste, le cadre juridique d’exercice des missions douanières a été
modifié à plusieurs reprises par le législateur. Cinq principaux textes
peuvent être mentionnés :
la loi n° 2015-912 du 24 juillet 2015 relative au renseignement. Cette loi
a instauré un nouveau cadre juridique organisant le code de la sécurité
intérieure, qui prévoit notamment que la direction nationale du
renseignement et des enquêtes douanières (DNRED) fait partie du
premier cercle des services spécialisés du renseignement ;
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COUR DES COMPTES
130
la loi n° 2016-731 du 3 juin 2016 renforçant la lutte contre le crime
organisé, le terrorisme et leur financement et améliorant l’efficacité et
les garanties et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure
pénale (« loi Urvoas »). Cette loi a, notamment, étendu le champ
d’application des opérations d’infiltration et de «
coup d’achat
» aux
armes et à leurs éléments ainsi qu’aux munitions explosifs (art.
67
bis
et
67
bis
-1 du code des douanes), et complété le code des douanes
d’un
article 415-
1 qui prévoit un allègement de la preuve de l’origine illicite
des fonds ;
la loi n° 2017-258 du 28 février 2017 relative à la sécurité publique, dont
certaines mesures concernent la Douane dans ses missions de sécurité ;
la loi n° 2017-1510 du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure
et la lutte contre le terrorisme, qui crée un nouveau régime légal de
surveillance des communications hertziennes, pérennise le régime
permettant la consultation des données du fichier des passagers du
transport aérien (
Passenger Name Record
/ PNR) et crée un système
national de centralisation des données des dossiers passagers du
transport maritime à destination et/ou départ de la France ;
la loi de 2018 relative à la lutte contre la fraude, qui contient des
dispositions permettant de renforcer la lutte contre les marchés illicites
de vente de tabac
; d’améliorer les capacités de contrôles des logiciels de
gestion ou de comptabilité ; de moderniser le cadre juridique de recueil
de données de connexion
; d’élargir les possibilités d’échanges
d’informations entre administrations chargées de la lutte contre la
fraude ; de durcir les sanctions applicables en cas de non coopération de
personnes à l’occasion de contrôles douaniers.
Enfin, la loi de finances pour 2020 rénove le cadre juridique de lutte
contre fraude à la TVA en rendant les plateformes électroniques
responsables de la tenue d’un registre conservé 10 ans et redevables de cet
impôt pour les transactions qu’elles facilitent à comp
ter de 2021.
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ANNEXES
131
Annexe n° 5 :
liste des services qui se démarquent
de la ligne hiérarchique traditionnelle
Organigramme n° 3 :
services à compétence nationale
rattachés à la direction générale au 31 décembre 2018
Source
: DGDDI rapport d’activité 2018
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COUR DES COMPTES
132
Un établissement public : la « Masse des douanes ».
Dix services à compétence nationale : l
’
unité information passagers
(UIP), le service d’enquêtes judiciaires des finances (SEJF), le service
commun des laboratoires (SCL), la direction nationale du recrutement et
de la formation professionnelle (DNRFP), la direction nationale du
renseignement et des enquêtes douanières (DNRED), le centre
informatique douanier (CID), la direction nationale des statistiques du
commerce extérieur (DNSCE), le service d'analyse de risque et de
ciblage (Sarc), la direction nationale garde-côtes des douanes (DNGCD)
et le musée national des douanes.
Huit services spécialisés : le centre de services des ressources humaines
(CSRH), les deux centres interrégionaux de saisie de données (Lille,
Sarcelles), Infos Douane Service, le centre de services partagés (CSP)
CHORUS, le service facturier (SFACT), le service national douanier de
la fiscalité routière (SNDFR), le service des grands comptes (SGC).
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ANNEXES
133
Annexe n° 6 :
organigramme type des directions
régionales
Organigramme n° 4 :
o
rganisation type d’une direct
ion régionale
des douanes et des droits indirects
Source :
Cour des comptes, d’après la
DGDDI
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COUR DES COMPTES
134
Annexe n° 7 :
évolution des déclarations
par direction régionale
Graphique n° 9 :
comparaison du nombre de déclarations
par direction régionale entre 2014 et 2019
(hors centres d’expertise
et Roissy-fret)
Source : Cour des comptes
La DR de Roissy-
fret n’a pu être intégrée au graphique en raison de son volume sans commune mesure avec celui
des autres DR, mais cette DR confirme la tendance : première DR en nombre de déclarations, elle enregistre une
hausse significative des déclarations.
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ANNEXES
135
Annexe n° 8 :
a
ides de l’État
aux débitants
de tabac
La profession de débitant de tabac-jeux-journaux serait, selon une
analyse de la Fédération des centres de gestion agréé, la quatrième la plus
rémunératrice parmi les 77 professions de très petites entreprises du
commerce et de l’artisanat en France
131
.
Graphique n° 10 :
a
ides de l’État aux débitants de tabac
et rémunérations tirées de l’activité de tabac
Source
: Cour des comptes d’après DGDDI
Note* : Pour la période 2018-2021, le montant de la remise annuelle nette moyenne est celle de 2018.
131
Le classement porte sur les revenus nets d’activité, après déduction des charges
sociales de l’entreprise et avant impôt. Fédération des centres de gestion agréé,
Chiffres
et commentaires. Cahier n° 24
, octobre 2018.
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COUR DES COMPTES
136
Annexe n° 9 :
recrutements douaniers annoncés
par les États européens en amont du
Brexit
Graphique n° 11 :
recrutements douaniers annoncés
par les États européens en amont du
Brexit
Source : Douane, traitement Cour des comptes
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ANNEXES
137
Annexe n° 10 :
les différents types de contrôles
à l’importation
Les contrôles
ex ante
Physiques ou seulement documentaires, ils sont réalisés par les
bureaux de douane au moment du dépôt de de la déclaration en douane.
Les opérateurs économiques agréés (OEA) sont soumis aux mêmes
réglementations que les autres opérateurs mais bénéficient d’un traitement
différencié au moment de la prise de décision de mettre la déclaration sous
contrôle. Considérés comme opérateurs de confiance, ils bénéficient
d’avantages douani
ers spécifiques (cf.
infra
).
Les contrôles
ex post
de premier niveau
–
ex post 1
Ils peuvent être réalisés jusqu’à
quatre mois après le dépôt de la
déclaration. Ils sont destinés à s’assurer de la régularité des opérations
douanières réalisées et du respect de la législation en vigueur. Ils peuvent
être réalisés au bureau ou dans les locaux de l’opérateur. De manière
générale, les contrôles
ex post
de premier niveau sont de nature
documentaire. Ce type de contrôle est effectué dans le cadre d’une
programma
tion périodique, définie sur la base d’une analyse de risque.
Initiés suite à la délivrance du « bon à enlever » (BAE), ils sont
diligentés dans un délai maximum de quatre mois à compter de la
délivrance du BAE. Ils portent donc sur des opérations récentes.
Les contrôles
ex post
de second niveau
–
ex post 2
Axés sur la lutte contre la fraude, ils prennent la forme de contrôles
approfondis de l’activité de commerce extérieur des entreprises ou
d’enquêtes de toute nature portant sur des réglementations que l
a douane
est chargée de faire appliquer (droits de douane, DAD, etc.). Le contrôle
est diligenté au-delà du délai de quatre mois à compter de la délivrance du
BAE et jusqu’à la limite de la prescription. Le contrôle
ex
post 2
relève de
la compétence unique de la direction des enquêtes douanières (DED) et des
services régionaux d’enquêtes (SRE).
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COUR DES COMPTES
138
Annexe n° 11 :
points de passage frontaliers
attribués à la Douane
Source ; DDGI
–
Réseau 1
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ANNEXES
139
Annexe n° 12 :
dispositions de l’article 184
de la loi de finances pour 2020
« I. - Sont recouvrées par le service des impôts dont dépend le
redevable les créances relatives aux impositions et amendes suivantes :
1° A compter du 1
er
janvier 2021, les taxes prévues aux articles
284
bis
et 284
sexies
bis
du code des douanes ;
2° A compter du 1
er
janvier 2022 :
a) Les droits prévus aux articles 223 et 238 du code des douanes ;
b) Les taxes intérieures de consommation prévues aux articles 266
quinquies
, 266
quinquies
B et 266
quinquies
C du même code ;
c) Les taxes prévues au chapitre V du titre Ier du livre Ier du code
du cinéma et de l'image animée ;
d) La taxe mentionnée à l'article L. 253-8-2 du code rural et de la
pêche maritime ;
3° A compter du 1
er
janvier 2023, les amendes autres que de nature
fiscale prévues par le code des douanes ou le code général des impôts et
prononcées par les services douaniers ou résultant d'infractions constatées
par ces derniers ;
4° A compter du 1
er
janvier 2024, les accises mentionnées à l'article
302 B du code général des impôts.
Les taxes mentionnées aux 1°, 2° et 4° sont également déclarées
auprès du service des impôts mentionné au premier alinéa du présent I.
II. - Le I s'applique :
1° Pour les impositions mentionnées au 1° et au a du 2° du même I,
à celles pour lesquelles le fait générateur intervient à compter
respectivement du 1
er
janvier 2021 et du 1
er
janvier 2022 ;
2° Pour les impositions mentionnées au b du 2°, à celles pour
lesquelles le fait générateur et l'exigibilité interviennent à compter du
1
er
janvier 2022 ;
3° Pour les impositions mentionnées au 4°, à celles pour lesquelles
l'exigibilité intervient à compter du 1
er
janvier 2024.
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140
III. - Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, le
Gouvernement est autorisé à prendre par voie d'ordonnance toutes mesures
relevant du domaine de la loi nécessaires à la refonte des impositions et
amendes mentionnées au I, de toute autre imposition frappant, directement
ou indirectement, certains produits, services ou transactions ainsi que des
autres régimes légaux ou administratifs relatifs ou se rapportant à ces
impositions et amendes, produits ou services, pour :
1° Mettre en œuvre les dispositions du I ;
2° Harmoniser les conditions dans lesquelles ces impositions et
amendes sont liquidées, recouvrées, remboursées et contrôlées, y compris
en adaptant le fait générateur et l'exigibilité de l'impôt ainsi que les régimes
mentionnés au premier alinéa du présent III ;
3° Améliorer la lisibilité des dispositions concernées et des autres
dispositions dont la modification est rendue nécessaire, notamment en
remédiant aux éventuelles erreurs ou insuffisances de codification, en
regroupant des dispositions de nature législative qui n'auraient pas été
codifiées ou l'auraient été dans des codes différents, en réorganisant le plan
et la rédaction de ces dispositions et en abrogeant les dispositions obsolètes,
inadaptées ou devenues sans objet ;
4° Assurer le respect de la hiérarchie des normes, harmoniser et
simplifier la rédaction des textes, adapter les dispositions de droit interne
au droit de l'Union européenne ainsi qu'aux accords internationaux ratifiés
et adapter les renvois au pouvoir réglementaire à la nature et à l'objet des
mesures d'application concernées.
L'ordonnance prévue au présent III est prise dans un délai de
dix-huit mois à compter de la promulgation de la présente loi. Un projet de
loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois
à compter de la publication de cette ordonnance. »
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Réponses des
administrations
et organismes concernés
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Sommaire
Réponse du Premier ministre
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RÉPONSE DU PREMIER MINISTRE
Vous m’avez transmis le rapport intitulé « La direction générale des
douanes et droits indirects, un recentrage nécessaire » et je vous en
remercie. Dans celui-ci, la Cour, à juste titre, souligne plusieurs évolutions
positives de la DGDDI et ses qualités de polyvalence, d’adaptabilité à un
contexte marqué par de fortes turbulences. Je ne citerai que les évolutions
communautaires do
nt le code des douanes de l’Union est une des
illustrations, l’accroissement de la menace, notamment terroriste, plus
récemment la crise sanitaire ou, à venir, l’échéance du Brexit qui mobilise
fortement cette administration. Pour l’ensemble de ces évoluti
ons ou
dossiers, la DGGDI a joué et continuera à jouer un rôle majeur, souvent
moteur, fort utile. Les responsabilités nouvelles confiées à la DGDDI en
matière de point de contact unique à la frontière ou dans le dossier France
Sésame, qui sont cohérentes avec certaines de vos préconisations sur la
gestion de la frontière et des flux, en sont une illustration éclairante.
La Cour souligne également, et je ne peux que m’y rallier, les efforts
importants de modernisation et de simplification diverses que la DGDDI a
entrepris, en matière de fiscalité, de rationalisation du réseau comptable,
de gestion RH ou de simplification des régimes indemnitaires.
Je suis conscient que l’ensemble de ces évolutions doit être
poursuivi : une réflexion sur le système de rémunération est en cours, la
démarche de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences
(GPEEC) avec la création d’un service dédié au sein de la direction
générale en octobre 2018 doit être approfondie, l’amélioration du
fonctionnement de la Masse accélérée ou encore, la disponibilité des
moyens aéromaritimes accrue même si les progrès enregistrés en la
matière depuis un an sont réels avec la création d’une direction nationale
dédiée.
Les recommandations relatives à la gestion des moyens et à la
performance figurent également parmi les préoccupations de la DGDDI.
Les outils dont elle dispose pour mettre en adéquation ses moyens et ses
missions et pour élaborer un suivi précis de son activité doivent
effectivement être modernisés. Ces outils permettront de disposer
d’éléments de comparaison avec les autres douanes européennes. À cet
égard, je souligne l’action déterminante de la DGDDI au sein de l’Union
douanière pour que cette dernière se dote d’une véritable gouvernance et
des outils de pilotage adéquats.
Les recommandations de la Cour pour une évolution et un
recentrage des missions autour de son cœur de métier, la gestion de la
frontière et des flux, appellent de ma part les observations suivantes.
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L’organisation de l’activité de garde
-frontières, partagée avec la
DCPAF, doit effectivement prendre en compte les évolutions de l’agence
Frontex et les évolutions de flux. Des travaux réguliers sont menés avec le
ministère de l’Intérieur afin d’adapter la répartition des points de passage
frontaliers et la réponse aux sollicitations de Frontex, en liaison dans ce
dernier cas avec le SGMer. Ils seront poursuivis.
S’agissant du transfert du recouvrement, les décisions politiques
sont déjà transcrites dans la loi de finances et concernant notamment le
transfert de la gestion de certaines taxes à la DGFiP sont concrètement
engagées et déjà réalisées pour certaines d’entre elles (boissons non
alcooliques, taxe générale sur les activités polluantes). Les autres relèvent
d’un travail commun structuré entre les administr
ations concernées, sous
l’égide de la mission France Recouvrement.
La
Cour
préconise
également
le
transfert
des
missions
d’accompagnement des filières économiques (viticulture, buralistes). Un
tel transfert ne me semble pas pertinent en raison, d’une part
, des liens
tissés avec les interprofessions viticoles en termes d’outils, de gestion et de
contrôle, la douane étant par ailleurs le seul réseau de proximité avec les
viticulteurs et, d’autre part, d’une perte de vision globale sur la gestion
des buralistes.
Enfin, comme le souligne justement la Cour, l’effort d’adaptation et
de transformation que poursuit la DGDDI et l’évolution rapide de son
environnement justifient que cette administration se dote d’une feuille de
route stratégique débouchant sur un contrat qui sera conclu en 2020. Cet
exercice peut aboutir à des réductions comme à des accroissements de son
périmètre d’intervention. Ce travail inclura nécessairement une réflexion
sur le maillage de la douane, qui permettra de répondre à une attente forte
de la Cour.
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