Rapport d’observations définitives
MAISON DEPARTEMENTALE
DES PERSONNES HANDICAPEES DE L’EURE
(
Département de l’Eure
)
Exercices
2012 à 2017
Observations délibérées le 27 septembre 2019
SOMMAIRE
Synthèse
..........................................................................................................................
1
Principales recommandations
.......................................................................................
1
Obligations de faire
........................................................................................................
2
Rappel de la procédure
...........................................................................................
2
L’administration et l’organisation de la MDPH de l’Eure
.......................................
3
A -
L’organisation institutionnelle de la MDPH
............................................................................
3
1 -
La création de la MDPH
..............................................................................................................
3
2 -
Les organes de la MDPH
............................................................................................................
5
B -
Les ressources humaines de la MDPH
................................................................................
10
1 -
Une MDPH très intégrée aux services du département de l’Eure
.............................................
10
2 -
Une organisation en pôles
........................................................................................................
10
3 -
Les effectifs de la MDPH
...........................................................................................................
12
4 -
Les contrats de travail
...............................................................................................................
13
5 -
Le régime indemnitaire
..............................................................................................................
13
6 -
Le temps de travail et les congés
..............................................................................................
14
7 -
La formation
..............................................................................................................................
14
8 -
Le dialogue social
.....................................................................................................................
15
L’activité de la MDPH de l’Eure
.............................................................................
15
A -
L’accueil des usagers
...........................................................................................................
17
1.
L’accessibilité de la MDPH
........................................................................................................
17
2.
La diversité de l’accueil
.............................................................................................................
17
B -
L’instruction des dossiers et l’évaluation des situations
......................................................
20
1.
La phase d’instruction
...............................................................................................................
20
2.
Le délai de traitement
................................................................................................................
21
C -
La décision
...........................................................................................................................
23
1.
La prise de décision
..................................................................................................................
24
2.
La notification des décisions
.....................................................................................................
24
3.
Les recours contre les décisions
...............................................................................................
26
D -
La modernisation : un enjeu pour l’activité de la MDPH
......................................................
27
E -
La satisfaction des usagers
..................................................................................................
27
La situation financière de la MDPH de l’Eure
.......................................................
28
A -
La section d’investissement
.................................................................................................
28
B -
La section de fonctionnement
..............................................................................................
29
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes Normandie sur la gestion de la MDPH de l’Eure
1
SYNTHÈSE
La maison départementale des personnes handicapées (MDPH) de l’Eure est un
groupement d’intérêt public qui constitue un « guichet unique » auprès duquel toute personne
handicapée ou sa famille peut trouver l’accueil, l’information, les conseils nécessaires et la
possibilité de formaliser ses demandes en matière d’orientation et de prestations.
Les textes qui régissent sa constitution en 2006, comme l’évolution de son activité
depuis cette date, ne respectent pas toujours formellement le cadre législatif et réglementaire.
Il en va de même de la composition et du fonctionnement des deux principaux
organes de décision de la MDPH (commission exécutive et commission des droits et de
l’autonomie). Cette situation fragilise les décisions prises par ces deux instances.
Sur la période de contrôle, la gestion du fonds de compensation du handicap s’est
révélée défaillante sur deux années successives.
Durant cette même période, la MDPH a connu une instabilité de sa direction,
susceptible d’expliquer en partie ces dysfonctionnements tout comme ceux rencontrés en
matière de gestion des ressources humaines, plus particulièrement en matière de régime
indemnitaire, de durée du travail, de formation et de dialogue social.
Dans les relations qu’elle entretient avec ses usagers, la MDPH omet de leur
indiquer la date à laquelle leur demande sera examinée en commission et ne motive pas ses
décisions. Cette pratique, non conforme à la loi, ne met pas les personnes handicapées en
situation de faire aisément valoir leurs droits.
Malgré ces constats, la chambre souligne l’avis positif émis sur le fonctionnement
de la MDPH, par les représentants des associations de personnes handicapées qu’elle a
rencontrés et par les usagers à travers une récente enquête de satisfaction.
PRINCIPALES RECOMMANDATIONS
1. Viser exclusivement dans les actes et décisions la convention constitutive du 26 décembre
2005 qu’il convient de mettre à jour par voie d’avenants et de compléter par ses annexes
réglementaires ;
2. offrir la possibilité à la personne handicapée de participer à la réunion de la commission
des droits et de l’autonomie des personnes handicapées qui examine sa demande ;
3. veiller au bon fonctionnement du comité de gestion du fonds départemental de
compensation du handicap ;
4. fiabiliser l’ensemble des données chiffrées relatives à l’activité de la MDPH ;
5. mettre à jour le site internet de la MDPH et créer un observatoire du handicap ;
6. rédiger les courriers adressés aux usagers pour qu’ils soient aisément compris et veiller au
suivi des décisions qu’ils matérialisent
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes Normandie sur la gestion de la MDPH de l’Eure
2
OBLIGATIONS DE FAIRE
7. Modifier la convention constitutive en ce qui concerne la représentation du président de la
commission exécutive ;
8. mettre à jour la composition de la commission exécutive ;
9. revoir la composition de la commission des droits et de l’autonomie des personnes
handicapées ;
10. respecter les règles relatives au temps de travail et mettre à jour le règlement intérieur de
la MDPH ;
11. instituer les organes permettant le dialogue social au sein de la MDPH ;
12. motiver les décisions de la commission des droits et de l’autonomie des personnes
handicapées.
RAPPEL DE LA PROCÉDURE
La chambre régionale des comptes a inscrit à son programme l’examen de la
gestion de la maison départementale des personnes handicapées de l’Eure (MDPH) pour les
années 2012 à 2017. Par lettre en date du 15 octobre 2018, le président de la chambre en a
informé M. Pascal Lehongre président de la MDPH, ainsi que ses prédécesseurs M. Sébastien
Lecornu, d’avril 2015 à juin 2017 et M. Jean-Louis Destans de janvier 2012 à mars 2015.
L’entretien de fin de contrôle entre le rapporteur et M. Lehongre a eu lieu le 5 mars 2019, celui
avec M. Lecornu le 11 mars 2019 et celui avec M. Destans le 12 mars 2019.
L’examen de la gestion a été principalement conduit selon les axes suivants :
-
l’organisation et le fonctionnement ;
-
les ressources humaines ;
-
l’activité ;
-
les finances.
Lors de sa séance du 17 avril 2019, la chambre a arrêté ses observations
provisoires. Celles-ci ont été transmises, le 13 juin 2019, à M. Lehongre ainsi qu’à
MM. Destans et Lecornu.
M. Lehongre a répondu par courrier du 29 juillet 2019, enregistré au greffe de la
juridiction le 5 août 2019. M. Lecornu a répondu par courrier du 30 juillet 2019, enregistré au
greffe de la juridiction le 5 août 2019. M. Destans n’a pas répondu.
Après avoir entendu le rapporteur, la chambre a arrêté, le 27 septembre 2019, le
présent rapport d’observations définitives.
Le rapport a été communiqué au président en fonction et à ses prédécesseurs en
fonction au cours de la période examinée. Ce rapport pourra être communiqué par
M. Lehongre à son assemblée délibérante lors de sa plus proche réunion suivant sa réception.
Ce rapport sera communicable dans les conditions prévues au livre III du code des
relations entre le public et l’administration.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes Normandie sur la gestion de la MDPH de l’Eure
3
L’ADMINISTRATION ET L’ORGANISATION DE LA MDPH DE L’EURE
Une maison départementale des personnes handicapées (MDPH)
1
est un
« guichet unique »
2
auprès duquel toute personne handicapée ou sa famille doit pouvoir
trouver l’accueil, l’information, les conseils nécessaires et formaliser ses demandes en matière
d’orientation (scolaire et professionnelle ou vers des établissements) et de prestations.
Subsidiairement, aux termes de l’article L.146-3 du code de l’action sociale et des
familles (CASF), la MDPH a aussi pour mission de sensibiliser tous les citoyens au handicap.
La MDPH accompagne la personne handicapée et sa famille et assure à leur égard
l’aide nécessaire à la formulation d’un projet de vie. A ce titre, et à travers les décisions de la
commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH), elle met en
œuvre le droit à la compensation des conséquences du handicap.
Statutairement, la MDPH est un groupement d’intérêt public (GIP) établi pour une
durée indéterminée. Les membres du groupement participent au fonctionnement de la MDPH
en mettant à sa disposition des moyens sous forme de contributions en nature, en personnel
ou financière.
La MDPH est administrée par une commission exécutive (COMEX). Sa tutelle
administrative et financière est confiée au département
3
.
La MDPH de l’Eure est née de la signature d’une convention qui prévoit les
modalités de son fonctionnement à travers la création d’organes spécifiques.
1 -
La création de la MDPH
a -
La convention constitutive et ses avenants
La MDPH de l’Eure a été créée par convention le 26 décembre 2005. Cette
convention constitutive du groupement d’intérêt public MDPH 27 est signée par le conseil
général de l’Eure, l’État (préfet de l’Eure, recteur de l’académie de Rouen), la caisse primaire
d’assurance maladie et la caisse d’allocations familiales.
La MDPH de l’Eure a ainsi commencé ses activités le 2 janvier 2006 dans les
locaux du département (boulevard Georges Chauvin à Evreux), conformément à la loi, qui
prévoyait la création des MDPH pour le 1
er
janvier 2006
4
.
1
Les MDPH ont été créées par l’article 64 de la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et
la citoyenneté des personnes handicapées.
2
Les MDPH remplacent les anciens dispositifs constitués par les commissions techniques d’orientation et de reclassement
professionnel (Cotorep) et les commissions départementales d’éducation spéciale (CDES).
3
Article L. 146-4 du code de l’action sociale et des familles.
4
Loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes
handicapées.
Le décret n°2006-130 du 8 février 2006 relatif à la convention de base constitutive de la maison départementale des personnes
handicapées, est venu préciser le contenu des conventions constitutives.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes Normandie sur la gestion de la MDPH de l’Eure
4
Depuis avril 2011, le siège de la MDPH a été transféré au 11 rue Jean de La
Bruyère, au sein de la Maison départementale des solidarité d’Evreux - La Madeleine.
Le 27 juillet 2006, une seconde convention a été signée par les mêmes signataires
et par quatre présidents d’associations en lien avec le handicap. Cette nouvelle convention
est appelée «
convention constitutive, groupement d’intérêt public maison départementale des
personnes handicapées de l’Eure
»
5
. Elle a donc exactement le même objet que la première,
mais n’y fait jamais référence.
Or il ne peut exister deux conventions constitutives : seule la première, qui n’a
jamais été formellement abrogée, peut donc être qualifiée de constitutive du GIP. La seconde
convention doit donc être considérée comme le premier avenant à la convention du
26 décembre 2005, qui intègre dans les signataires, en plus des membres de droit, les
associations représentatives des personnes handicapées (dites «
autres membres
»).
Cette situation entraîne des erreurs et des confusions dans la rédaction de certains
documents relatifs au fonctionnement de la MDPH (cf.
infra
). Les délégations de signature au
profit du directeur ou de la directrice de la MDPH font indifféremment référence à la convention
de 2005 ou de 2006, voire aux deux conventions.
La chambre invite la MDPH à se référer dans ses actes et décisions à la seule
convention constitutive du 26 décembre 2005.
Trois avenants ont été recensés. Le premier d’entre eux n’est pas daté. Sa date
de signature apparaît seulement dans l’arrêté d’approbation et est visée dans l’avenant
numéro 2.
Si ces trois avenants sont signés par l’ensemble des membres figurant à la
convention constitutive, il est constaté que le nombre de signataires varie en fonction des
avenants
6
.
Cette situation s’explique par le fait que des nouveaux membres ont rejoint la
MDPH sans que leur adhésion fasse l’objet d’un avenant à la convention constitutive
(conformément à son article 6). Dès lors, il est difficile de déterminer quels sont les membres
actuels du GIP MDPH.
En ce qui concerne les personnes siégeant au sein de la COMEX, aucun avenant
ne prend en compte la nouvelle appellation des services résultant de la réorganisation de
l’administration territoriale de l’État (RéATE)
7
, ou la présence obligatoire d’un représentant de
l’agence régionale de santé (ARS).
La chambre invite la MDPH à mettre à jour sa convention constitutive par un
avenant établissant les membres actuels du GIP.
En réponse aux observations de la chambre, la MDPH précise qu’elle veillera à
l’avenir à ne faire référence dans ses différents actes juridiques qu’à la seule convention
constitutive du 26 décembre 2005, à laquelle sera annexée la liste des membres du GIP.
5
Elle a été approuvée par arrêté du président du conseil général en date du 31 juillet 2006.
6
9 signataires pour la « convention constitutive » du 27 juillet 2006, 11 pour l’avenant n° 1, 12 pour l’avenant numéro 2 et 14 pour
l’avenant numéro 3.
7
Direction départementale de la cohésion sociale (DDCS), direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la
consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE).
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes Normandie sur la gestion de la MDPH de l’Eure
5
b -
Des annexes incomplètes
Le code de l’action sociale et des familles, dans son article L. 146-4-2
8
, prévoit
d’annexer à la convention constitutive une «
convention pluriannuelle d’objectifs et de moyens
signée entre la maison départementale des personnes handicapées et les membres du
groupement […]. Un avenant financier précise chaque année […] les modalités et le montant
de la participation des membres du groupement. Elle mentionne le montant du concours versé
par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie au conseil départemental et destiné à
contribuer au fonctionnement de la maison départementale
. »
Cette convention pluriannuelle (CPOM), dont le contenu n’a pas été fixé en raison
de l’absence de publication de l’arrêté prévu au même article, est destinée à sécuriser la
situation financière de la MDPH et détermine – pour trois ans – les missions et objectifs
assignés au GIP. Elle précise également le montant du concours versé au département par la
caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) et destiné à contribuer au
fonctionnement de la maison départementale.
De même, un avenant financier – qui semble ne jamais avoir été signé – doit
préciser chaque année les modalités et le montant de la participation des membres de la
MDPH.
La chambre invite donc la MDPH à annexer, à la convention constitutive du GIP,
la convention pluriannuelle d’objectifs et de moyens prévue par le CASF et à actualiser les
annexes financières par un avenant annuel.
En réponse, la MDPH précise qu’elle établira, chaque année, un avenant financier
retraçant les contributions des membres du GIP.
2 -
Les organes de la MDPH
a -
La commission exécutive (COMEX)
La COMEX constitue l’organe délibérant de la MDPH, chargé de définir sa politique
générale et d’en assurer la gestion.
Aux termes de la convention constitutive, la COMEX, chargée d’administrer la
MDPH, délibère sur l’organisation générale de la maison départementale, ses documents
budgétaires, ses conventions, son rapport annuel, ses acquisitions, dons et legs et les
modifications de sa convention collective.
Elle est également consultée sur toutes les admissions ou exclusions des
membres du groupement et les modalités du retrait d’un membre.
L’examen des procès-verbaux de la COMEX, entre 2012 et 2017, démontre que
la COMEX se conforme au rôle qui lui a été confié par la législation. Toutefois, son
fonctionnement est marqué par plusieurs anomalies.
1 )
Une composition non conforme au principe de proportionnalité
L’article L. 146-4 du CASF fixe la composition de la commission exécutive sans
toutefois préciser le nombre des représentants y siégeant. La loi s’attache à répartir
proportionnellement les différents partenaires en fixant la représentation du département à
8
Rédaction issue de la loi n° 2011-901 du 28 juillet 2011 tendant à améliorer le fonctionnement des maisons départementales
des personnes handicapées et portant diverses dispositions relatives à la politique du handicap.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes Normandie sur la gestion de la MDPH de l’Eure
6
50 % des sièges, les associations de personnes handicapées à 25 %, le quart restant étant
réparti entre les représentants de l’État, des organismes locaux d’assurance maladie et
d’allocations familiales du régime général, celui de l’agence régionale de santé (ARS) et, le
cas échéant, les représentants des autres membres du groupement prévus par la convention
constitutive.
Sur les onze arrêtés de désignation des représentants du département régissant
la période 2012-2017, seul le premier d’entre eux respecte la proportion de 50 % pour le
département de l’Eure.
Par ailleurs, la composition n’est plus conforme à la loi puisque la convention, qui
n’a pas été modifiée, ne mentionne pas l’ARS parmi les membres, alors même que les procès-
verbaux de la COMEX démontrent que le représentant de l’ARS est présent à ces réunions.
Le règlement intérieur de la COMEX, qui n’a jamais été mis à jour depuis son
adoption en février 2006, n’est plus conforme à la convention constitutive.
La chambre rappelle à la MDPH l’obligation de mettre à jour la composition de la
COMEX et son règlement intérieur, ce qu’elle s’est engagée à faire.
2 )
Un président irrégulièrement représenté
La COMEX est présidée de droit par le président du conseil départemental.
Cependant, au cours de la période contrôlée, le président du conseil départemental a, le plus
souvent, désigné un élu pour le représenter, comme le permet la convention constitutive.
Cependant, lors de sa séance du 22 juin 2017, la COMEX n’était pas présidée par
un conseiller départemental, mais par le directeur général des services (DGS) du département.
Or ce dernier, n’étant pas un élu du département, ne pouvait présider ladite séance.
Si des
circonstances
particulières (nomination
du président du
conseil
départemental au gouvernement) peuvent expliquer cette situation, elles auraient dû
néanmoins conduire au report de la COMEX dans l’attente de l’élection d’un nouveau
président.
3 )
Un fonctionnement non conforme à l’esprit des textes
Le vote ayant lieu à la majorité des voix des membres présents ou représentés, le
département est devenu, dans la pratique, l’acteur principal de la commission en raison à la
fois de sa surreprésentation et de l’absence fréquente des autres membres aux séances de la
commission.
A titre d’exemple, le procès-verbal de la COMEX du 13 décembre 2017 fait état
d’un quorum établi à 16 personnes, dont 11 représentaient le département. Il faut souligner
qu’aucun représentant de l’État, de l’assurance maladie et de la caisse d’allocations familiales
n’était présent ce jour.
*
Afin de sécuriser les décisions prises par la COMEX et celles prises par délégation
de la présidente de la COMEX, la chambre recommande à la MDPH de modifier sa convention
constitutive en ne limitant pas la représentation de son président aux situations
d’empêchement de ce dernier.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes Normandie sur la gestion de la MDPH de l’Eure
7
En réponse, la MDPH indique qu’elle révisera la rédaction de la convention
constitutive de manière à ce que la présidence de la COMEX puisse être assurée en toutes
circonstances par un conseiller départemental.
La chambre invite, en outre, la MDPH à rappeler aux membres composant la
COMEX la nécessité de participer régulièrement aux réunions ou de se faire représenter afin
d’éviter la surreprésentation d’un partenaire.
b -
La commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées
(CDAPH)
La CDAPH constitue le cœur même du dispositif des MDPH puisque c’est cette
commission qui est compétente pour arrêter l’ensemble des décisions individuelles d’allocation
(allocation aux adultes handicapés – AAH, allocation d’éducation de l’enfant handicapé –
AEEH) et de prestation (prestation de compensation du handicap – PCH), de reconnaissance
de la qualité de travailleur handicapé, d’orientation scolaire, médico-sociale, professionnelle
et d’attribution de cartes mobilité inclusion (CMI invalidité, CMI priorité, CMI stationnement).
La CDAPH exerce ces missions dans le cadre de réunions à la périodicité au moins
mensuelle.
Le code de l’action sociale et des familles fixe la composition de la CDAPH en son
article R. 241-24. Cette commission comprend 23 membres, dont quatre représentent le
département, trois l’État, un l’ARS, deux les organismes d’assurance maladie et de prestations
familiales, deux les organisations syndicales représentatives, un les associations de parents
d’élèves, sept les associations de personnes handicapées et leurs familles, un le conseil
départemental de la citoyenneté et de l’autonomie, deux les organismes gestionnaires
d’établissements ou de services pour personnes handicapées.
La composition de la CDAPH entre 2012 et 2017 est régie par cinq arrêtés
conjoints du président du conseil départemental et du préfet de département. Sur ces cinq
arrêtés, seuls trois sont conformes au CASF.
Les deux arrêtés de composition, pris en 2018, fixent à 24 le nombre de membres
au sein de la commission, au lieu des 23 prévus par le code.
La chambre rappelle à la MDPH l’obligation de se conformer au code de l’action
sociale et des familles quant à la composition de la commission des droits et de l’autonomie.
Celle-ci indique en réponse qu’elle se rapprochera du département et du préfet afin de mettre
en conformité avec la loi l’arrêté conjoint de composition de la commission.
La réglementation permet également une réunion de la CDAPH en formation
restreinte statuant selon une procédure simplifiée. Cette dernière est compétente pour des
dossiers spécifiques, comme la demande de renouvellement d’un droit, la reconnaissance de
la qualité de travailleur handicapé ou encore les demandes urgentes (article R. 241-28 du
CASF). Dans cette procédure simplifiée, la personne handicapée n’est pas entendue.
Le règlement intérieur de la CDAPH a instauré cette commission simplifiée (article
3-2) uniquement pour les «
situations nécessitant qu’une décision soit prise en urgence
».
Interrogées sur ce point, les associations représentant les usagers ont indiqué que cette
commission ne s’était jamais réunie.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes Normandie sur la gestion de la MDPH de l’Eure
8
A l’inverse, lorsque la CDAPH se réunit en formation plénière pour examiner une
demande, elle doit informer la personne handicapée concernée (ou, le cas échéant, son
représentant légal) de la date et du lieu de la séance ainsi que de la possibilité d’y être
entendue ou de se faire représenter par la personne de son choix (article L. 241-7 du CASF).
Or, si la MDPH de l’Eure informe bien le demandeur du passage de son dossier
en CDAPH, elle ne lui précise pas systématiquement la date de réunion de la commission.
L’usager est donc souvent privé de la possibilité d’exercer son droit à être entendu.
En 2017, la CDAPH s’est réunie 23 fois et a rendu 49 605 décisions mais n’a
rencontré que 18 usagers (8 adultes et 10 enfants)
9
. Rapporté aux nombres des décisions et
avis rendus annuellement, ce chiffre semble très réduit.
Tout en reconnaissant le bien-fondé de l’observation de la chambre, la MDPH
indique qu’il «
n’est
[…]
matériellement possible que de recevoir un nombre restreint d’usagers
à chaque commission
».
La chambre l’invite néanmoins au respect des dispositions de l’article L. 241-7 du
CASF, en permettant la présence en CDAPH de la personne handicapée (ou de son
représentant légal), si elle le souhaite, ou en instituant une procédure simplifiée.
c -
Le comité de gestion du fonds départemental de compensation du
handicap
Le comité de gestion du fonds départemental de compensation du handicap
(FDCH) a pour mission d’accorder des aides financières destinées à permettre aux personnes
handicapées de faire face aux frais restant à leur charge, après déduction de la prestation de
compensation du handicap (PCH)
10
.
Il étudie la faisabilité du projet, son plan de financement et décide du montant qu’il
peut attribuer.
Si la composition du comité de gestion du FDCH, prévue par une «
convention
relative aux
modalités d’organisation et de fonctionnement
» datée du 22 novembre 2006, est
conforme aux textes, son fonctionnement appelle des observations.
Ainsi, alors que le règlement intérieur du comité prévoit une réunion mensuelle, le
comité s’est réuni seulement cinq fois en 2016 et dix fois en 2017.
Il s’est arrêté de fonctionner entre septembre 2015 et août 2016 du fait du départ
en retraite de l’agent assurant la coordination du fonds, ce qui a interdit la prise en charge de
demandes faites par les personnes handicapées au cours de cette période.
La chambre invite la MDPH à assurer un fonctionnement continu du comité de
gestion du fonds de compensation, dès lors que les différents contributeurs ont décidé la mise
en œuvre de cette prestation facultative au sein du GIP.
9
31 personnes avaient été reçues en 2016, 27 en 2015, 42 en 2013 et 69 en 2012.
10
Avant de solliciter le FDC, l’usager doit faire valoir l’ensemble de ses droits et démontrer que toutes les aides ont été sollicitées
auprès des organismes et institutions.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes Normandie sur la gestion de la MDPH de l’Eure
9
d -
Les équipes pluridisciplinaires
L’évaluation
des situations
de handicap est
réalisée par des
équipes
pluridisciplinaires animées par des personnels de la MDPH et réparties entre « équipes
adultes » et « équipes enfants ».
La MDPH s’est organisée de façon à ce que la composition des équipes
pluridisciplinaires varie en fonction de la nature du ou des handicaps évalués et des besoins
exprimés (articles L. 146-8 et R. 146-27 du CASF).
La MDPH garantit la présence d’un professionnel médical ou paramédical au sein
de chaque équipe ainsi que celle d’un enseignant lorsque la demande concerne la scolarité.
Le fonctionnement de ces équipes n’appelle pas d’observation.
e -
La direction de la MDPH
La direction administrative et opérationnelle de la MDPH est assurée par un
directeur ou une directrice nommé(e) par le président du conseil départemental (article L. 146-
4 du CASF, article 13 de la convention constitutive du GIP MDPH), qui lui assigne des
missions.
Ces dernières, définies par la convention constitutive, sont de deux types :
-
diriger et organiser la MDPH ;
-
exécuter les décisions de la COMEX et du comité de gestion du FDCH en rendant
compte aux membres de la COMEX et aux contributeurs du fonds de l’utilisation des
moyens.
Responsable des ressources humaines de la MDPH, la directrice dispose d’une
autorité hiérarchique et fonctionnelle sur le personnel.
Afin d’exercer toutes les missions liées à la gestion courante d’un GIP, la directrice
dispose de nombreux pouvoirs qui lui sont confiés par le président du groupement dans le
cadre d’une délégation de pouvoir.
La direction de la MDPH 27 est caractérisée sur ce point – entre 2012 et 2017 –
par une double fragilité, liée à la rotation des directeurs (trois se sont succédés au cours de la
période), d’une part, et aux conditions juridiques dans lesquelles elle s’exerce, d’autre part.
Selon le département, cette instabilité de la direction peut s’expliquer, notamment,
par le montant de la rémunération proposé qui ne semblait pas correspondre au niveau des
responsabilités liées au poste
11
. Elle pourrait également être liée aux conditions d’exercice de
la fonction, très dépendantes dans l’Eure des décisions et du fonctionnement du conseil
départemental.
Il apparaît également qu’en dehors d’une délégation accordée en 2013 concernant
un intérim, aucune des délégations transmises par la MDPH ne prévoit les modalités de leur
publication. Or, pour être opposable aux tiers, une délégation doit être publiée.
11
La précédente directrice bénéficiait d’un indice majoré 496 qui, en 2017, ne correspondait même pas au 1
er
échelon d’attaché
principal.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes Normandie sur la gestion de la MDPH de l’Eure
10
La MDPH précise qu’à l’avenir elle notifiera aux intéressés leurs délégations de
signature et en prévoira les modalités de publication.
Enfin, le contrat de travail d’un des directeurs a été signé par le délégué des
ressources et des finances sur délégation du président du département. En tant qu’agent du
département, le signataire n’avait donc pas compétence pour conclure le contrat de travail du
directeur de la MDPH, structure juridique indépendante de cette collectivité.
1 -
Une MDPH très intégrée aux services du département de l’Eure
Le CASF dispose que les personnels de la MDPH «
sont placés sous l’autorité du
directeur de la MDPH dont ils dépendent et sont soumis à ses règles d’organisation et de
fonctionnement
» (article L. 146-4-1).
La MDPH apparaît, dans l’organigramme du département de l’Eure
12
, comme un
service rattaché à la délégation sociale, au même titre par exemple que la direction de
l’enfance et des familles.
Dans la version du 31 octobre 2018 de son organigramme, la MDPH est placée
directement sous la responsabilité de la vice-présidente du département chargée de
l’autonomie, des personnes handicapées, de l’accès à la santé, de l’insertion, de l’enfance et
de l’égalité des chances.
Elle est considérée comme un service à part entière du département de l’Eure.
D’ailleurs, elle s’appuie sur les services du département (ressources humaines, finances,
affaires juridiques, systèmes d’information) dans le cadre de son fonctionnement quotidien
13
,
comme le prévoit l’annexe financière de la convention constitutive en matière de gestion des
ressources humaines.
Ce constat est renforcé par d’autres éléments comme l’application aux agents du
GIP des régimes applicables aux agents du département (régime indemnitaire, congés,
formation), par l’implication du conseil départemental dans le plan de modernisation de la
MDPH ou la dépendance de la MDPH au service informatique du département (s
upra
).
Le rattachement de la MDPH de l’Eure à l’organigramme du département de l’Eure
et la gestion de certains des sujets la concernant par les services départementaux attestent
d’une forte intégration à l’institution départementale, laquelle ne doit toutefois pas remettre en
cause son autonomie juridique, qu’il appartient aux deux parties de préserver.
2 -
Une organisation en pôles
Plusieurs typologies d’organisation sont possibles pour les MDPH :
-
basée sur les métiers, comme c’est le cas en l’espèce, ce qui correspond au modèle
majoritaire parmi les MDPH ;
-
basée sur les thématiques (scolarisation, insertion professionnelle, etc.) ou encore
les publics (adultes, enfants).
12
Version du site Internet mise à jour au 17 octobre 2018.
13
Page 20 du rapport d’activité de la MDPH 2017.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes Normandie sur la gestion de la MDPH de l’Eure
11
La MDPH de l’Eure est actuellement construite autour d’un pôle « direction » et de
deux pôles métiers : « accueil et droits » et « évaluation ». Ce dernier a été placé sous
l’autorité de la directrice adjointe.
Cette organisation est en place depuis juin 2015. Elle est le fruit d’une réflexion
visant à améliorer le fonctionnement de la MDPH, confrontée à une augmentation de la
demande des usagers et à des évolutions réglementaires fréquentes. Elle a pour objectif de
garantir le respect de trois principes fondamentaux :
-
la continuité du service ;
-
la qualité du service rendu ;
-
l’articulation entre les services et les acteurs externes
14
.
En 2013, la COMEX avait opté pour une organisation en trois pôles (« accueil et
information », « instruction et suivi administratif », « évaluation ») qui succédait à une
organisation en deux pôles (pôle « instruction » avec un secteur « adultes » et un secteur
« enfants » et pôle « évaluation »).
a -
Le pôle « direction »
Plusieurs
missions
relèvent
du
pôle
« direction ».
Outre
des
fonctions
traditionnelles au bénéfice de la directrice mais aussi de la COMEX, le secrétariat est chargé
des fonctions transversales :
-
la coordination administrative et financière, qui correspond à l’ensemble des fonctions
d’administration générale du GIP ;
-
la réponse accompagnée pour tous
15
.
Sont rattachées à la direction :
-
la directrice adjointe (poste créé en juin 2012) ;
-
le responsable du pôle « évaluation » ;
-
la responsable du pôle « accueil et droits ».
Au fur et à mesure des évolutions, le poste de chargée de mission observatoire du
handicap a disparu.
b -
Le pôle « accueil et droits »
Le pôle « accueil et droits » est articulé autour de deux missions distinctes :
-
l’accueil, le courrier et la numérisation ;
-
la gestion des droits.
La première mission concerne l’accueil sous toutes ses formes, qu’il soit physique,
téléphonique ou épistolaire. A cette mission d’accueil est associée la gestion électronique des
documents (GED), c’est-à-dire la numérisation des demandes qui enclenche l’ouverture d’une
procédure (attribution à un instructeur).
Pour sa part, la gestion des droits recouvre l’ensemble des tâches concourant à la
notification de la décision de la CDAPH (préparation et déroulement des séances).
14
Rapport d’activité de la MDPH 2017, page 22.
15
Il s’agit du dispositif d’accompagnement des personnes handicapées destiné à éviter toute rupture dans leurs parcours de vie.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes Normandie sur la gestion de la MDPH de l’Eure
12
c -
Le pôle « évaluation »
Ce pôle est chargé de l’évaluation globale – par les équipes pluridisciplinaires –
des besoins formulés par la personne.
3 -
Les effectifs de la MDPH
L’effectif demeure stable entre 2012 (51 agents) et 2017 (50 agents), avec une
diminution des ETPT (36,75 en 2017 contre 39,27 en 2012).
A la fin de l’année 2018, la MDPH a fait le choix de recruter quatre personnes
supplémentaires, dans le cadre du renforcement des équipes d’accueil du public.
Si les données du GIP en ce domaine sont peu fiables
16
, les équivalents temps
plein travaillés (ETPT) ont baissé sur la période de référence, de 2,52 ETPT.
Cette baisse n’a pas eu d’impact sur l’activité de la MDPH puisque le nombre de
décisions rendues n’a cessé d’augmenter. Il est passé – par agent – de 756 en 2012 à 1 158
en 2017, soit une hausse de plus de 53 %.
Tableau n° 1 :
Evolution du nombre de décisions rapporté aux ETPT
2012
2013
2014
2015
2016
2017
Evolution
Nombre
d’agents
en
ETPT au 31/12
39,27
35,70
33,95
33,25
38,03
36,75
- 6,4 %
Nombre de décisions
CDAPH
29 760
32 914
43 144
35 432
39 062
42 549
+ 43 %
Nombre de décisions
par agent
756
922
1 271
1 066
1 027
1 158
+ 53,2 %
Source : données CNSA, rapports COMEX, traitement CRC
Il faut distinguer les effectifs employés par la MDPH de ceux rémunérés par la
MDPH. En effet, le GIP fonctionne avec des agents directement rémunérés par ses soins et
d’autres agents mis à disposition par leur administration d’origine qui continue à les rémunérer
(5 agents du département, 4 de la DDCSPP, et 3 de l’éducation nationale).
Parmi les personnes rémunérées directement par le GIP (39 en 2017), il faut
distinguer les contractuels de droit public et les contractuels de droit privé (contrats aidés CUI-
CAE et contrats d’avenir) ainsi que les fonctionnaires détachés de leur administration (3 en
2017).
a -
La répartition des effectifs
Le rapport d’activité 2017 précise la quotité de temps de travail allouée par mission.
En moyenne nationale, les ETP consacrés à l’accueil représentaient 16 % des
ETP
,
ceux consacrés à l’instruction 40,4 % et ceux consacrés à l’évaluation 38,5 %
.
16
La comparaison des données relatives aux effectifs a été compliquée par l’imprécision de celles-ci, qui varient en fonction des
documents utilisés (rapports d’activité, données CNSA, documents budgétaires). Le tableau transmis par la directrice reproduit
dans le rapport fait apparaître un nombre d’agents (effectifs physiques) de 45 pour 2014, 44 pour 2015, 50 pour 2016 alors que
le rapport d’activité 2016 contient un tableau page 38 qui indique 42 pour 2014, 53 pour 2015 et 52 pour 2016. Le tableau de ce
rapport 2016 mentionne 44,18 ETP en 2016 alors que la maquette budgétaire CNSA 2016 en mentionne 41,9.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes Normandie sur la gestion de la MDPH de l’Eure
13
La MDPH 27 reprend ce schéma classique : la mission d’instruction (28 % du total)
est la plus représentée devant celles d’évaluation (19 %) et d’accueil (16 %). L’instruction et
l’accueil sont deux secteurs dominés par la présence d’agents de catégorie C, qui sont au total
24 (soit 45,3 % des effectifs).
Les agents de catégorie A (direction, médecins, psychologues et infirmières) sont
au nombre de 20 (soit 37,7 % des effectifs) et les agents de catégorie B sont au nombre de 9,
soit seulement 17 %.
b -
L’emploi des personnes handicapées
En tant que GIP employant au moins 20 agents, la MDPH est tenue d’employer à
temps plein ou à temps partiel des personnes handicapées dans la proportion de 6 % de
l’effectif total des agents rémunérés (articles L. 323-2 et L. 5212-2 du code du travail).
La MDPH a transmis les déclarations faites au fonds pour l’insertion des personnes
handicapées dans la fonction publique (FIPHFP) en 2016 et 2017. Ces dernières montrent
que cette obligation est remplie, avec un taux d’emploi de personnes handicapées de 22,22 %.
Ce taux élevé traduit la volonté de la MDPH d’être exemplaire, en matière d’emploi
des personnes handicapées.
4 -
Les contrats de travail
Les contrats de travail de la MDPH examinés par la chambre présentent plusieurs
anomalies, tant en ce qui concerne la qualité de leur signataire que leur contenu.
En effet, les contrats de travail ne sont pas signés directement par la directrice de
la MDPH, ni par le président du GIP, mais par la représentante du président de la COMEX ou
par la directrice, sur délégation de cette dernière.
Or, au regard de la répartition des missions fixée par la convention constitutive,
c’est le directeur qui, sur délégation du président de la MDPH, «
procède au recrutement et
licenciement des agents contractuels de droit public et de droit privé
». C’est donc à lui que
revient la signature des contrats de travail.
De plus, les contrats de travail des agents du GIP contiennent des erreurs,
notamment en ce qui concerne la mention du nombre de jours de congés.
Ainsi est-il indiqué dans l’article 7 de ces contrats que les agents bénéficient de
15 jours de congés par an, ce qui entre en contradiction avec le règlement relatif au temps de
travail des agents du GIP (cf.
infra
) et – plus largement – avec la législation, puisque tout agent
a droit à un congé annuel rémunéré d’une durée égale à cinq fois le nombre de jours travaillés
par semaine, qu’il soit fonctionnaire ou contractuel (soit 25 jours = 5 x 5 jours de travail par
semaine).
La chambre invite la MDPH à sécuriser les contrats de travail de ses agents en
veillant à la précision de leurs clauses et à ce qu’ils soient signés par l’autorité compétente.
5 -
Le régime indemnitaire
Les contrats de travail font référence au régime indemnitaire fixé par une
délibération de la COMEX en date du 2 juillet 2008. Ce régime s’applique aux seuls agents
recrutés par le GIP et est calqué sur celui applicable aux agents non titulaires du département.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes Normandie sur la gestion de la MDPH de l’Eure
14
Il n’a jamais été mis à jour depuis l’évolution réglementaire intervenue en ce
domaine dans la fonction publique territoriale.
De plus, il faut noter que le régime indemnitaire n’est pas respecté dans son
application. Les bulletins de salaire 2017 des ergothérapeutes montrent, par exemple, le
versement d’une prime de service alors que la délibération de 2008 ne le prévoit pas dans la
liste des primes concernant ces agents.
Au regard de ce qui précède, la chambre invite la MDPH à s’interroger sur
l’adaptation et la mise en œuvre du régime indemnitaire applicable aux agents du GIP. En
réponse, la MDPH précise qu’elle entreprendra cette réflexion.
6 -
Le temps de travail et les congés
Les agents de la MDPH bénéficient, en matière de temps de travail et de réduction
du temps de travail, du régime applicable au personnel départemental.
Les contrats de travail des agents précisent que le temps de travail hebdomadaire
est de 39 heures. Aucun système d’enregistrement et de contrôle du temps de travail des
personnels du GIP n’a été mis en place.
Il en allait de même en matière d’absentéisme. Toutefois, la MDPH dispose, depuis
juin 2019, d’un tableau permettant un suivi mensuel de cette donnée de gestion du personnel.
Les agents bénéficient pour un temps plein de 32 jours de congés. Le règlement
intérieur de la MDPH, qui aborde la question du temps de travail et les congés, n’est plus à
jour en ce domaine puisqu’il évoque 35 jours de congés.
En outre, le régime des congés du personnel apparaît illégal.
En effet, le nombre réglementaire de jours de congés pour un service accompli du
1
er
janvier au 31 décembre est de 25 jours
17
et, sous certaines conditions
18
, les agents peuvent
bénéficier de deux jours supplémentaires. Or les agents de la MDPH se voient octroyer cinq
jours de congés supplémentaires par an. Par conséquent, ils ne travaillent que 1 572 heures
par an, soit trente-cinq heures en deçà des 1 607 heures légales.
Enfin, il convient de mentionner que les agents de la MDPH peuvent bénéficier
d’un compte épargne temps (CET) pour leurs congés non pris au 31 décembre de l’année N.
La chambre rappelle à la MDPH ses obligations en matière de respect du temps
de travail et lui demande, à cet égard, de mettre à jour son règlement intérieur.
7 -
La formation
En matière de formation, la MDPH s’en remet aux plans de formation établis par
le département de l’Eure, même si ces derniers ne mentionnent pas qu’ils s’appliquent aux
agents de la MDPH 27.
17
Article 5 du décret du 15 février 1988 pris pour l’application de l’article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant
dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents contractuels de la fonction publique
territoriale et article 1
er
du décret du 26 novembre 1985 relatif aux congés annuels des fonctionnaires territoriaux.
18
Prendre 8 jours de congés en dehors de la période du 1
er
mai au 31 octobre.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes Normandie sur la gestion de la MDPH de l’Eure
15
Ce recours au plan de formation du département n’est pas conforme aux règles
définies par le CASF qui prévoit, en son article L. 146-4-3, que «
le Centre national de la
fonction publique territoriale
[CNFPT]
est compétent pour définir et assurer, en partenariat
avec la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, la formation professionnelle des
personnels des maisons départementales des personnes handicapées, quel que soit leur
statut
».
Le seul organisme de formation pour les MDPH est ainsi le CNFPT.
La chambre invite la MDPH à clarifier le lien avec le département de l’Eure en
matière de formation de son personnel et à utiliser, conformément à la loi, les services du
CNFPT en ce domaine.
8 -
Le dialogue social
Les agents publics participent, en principe, par l’intermédiaire de leurs
représentants siégeant au sein d’instances consultatives
19
, à l’examen de décisions relatives
à leurs carrières ou au fonctionnement des services. La MDPH ne bénéficie d’aucune de ces
instances, puisqu’il n’existe pas de représentant du personnel.
Dans sa réponse aux observations provisoires, la MDPH indique qu’elle avait mis
en place une commission de concertation locale en 2008 et que cette instance s’était réunie
régulièrement entre 2009 et 2014. Toutefois, en l’absence de candidatures pour y siéger, elle
ne s’est plus réunie depuis lors. La MDPH précise, par ailleurs, que depuis le début de
l’année 2019, les agents du GIP (à l’exception de ceux mis à disposition par l’État) sont
intégrés dans les instances de représentation du personnel du département.
La réglementation sur le dialogue social relève du décret n° 2013-292 du 5 avril
2013 relatif au régime de droit public applicable aux personnels des GIP. Ce texte prévoit
l’élection de représentants du personnel, la création d’un comité technique (article 10) et d’une
commission paritaire (article 18) placés auprès du directeur du GIP. Le décret rend obligatoire
ces instances, quels que soient les effectifs du GIP.
Dans la mesure où l’article 10 du décret précité prévoit la possibilité de créer un
comité technique unique pour plusieurs GIP poursuivant le même objet, la MDPH de l’Eure
pourrait utilement se rapprocher des autres MDPH de la région à cet effet.
La chambre rappelle à la MDPH son obligation réglementaire relative au dialogue
social au sein du GIP et l’invite à créer les instances relatives à ce dialogue.
L’ACTIVITE DE LA MDPH DE L’EURE
L’activité de la MDPH n’a cessé de croître depuis sa création. Globalement, le
nombre de demandes formulées par des personnes handicapées a été multiplié par cinq,
passant de 9 978 en 2006 à 48 457 en 2017. Il faut cependant noter une diminution de ces
demandes depuis 2015. L’accueil physique et téléphonique connaît une croissance rapide. Le
tableau ci-dessous illustre l’activité de la MDPH pendant la période sous revue :
19
Commission administrative paritaire (CAP), commission consultative paritaire (CCP), comité technique (CT), comité d’hygiène,
de sécurité et des conditions de travail (CHSCT)
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes Normandie sur la gestion de la MDPH de l’Eure
16
Tableau n° 2 :
Panorama de l’activité de la MDPH entre 2012 et 2017
2012
2013
2014
2015
2016
2017
Nombres de demandes
39 503
39 640
48 725
54 578
50 931
48 547
Nombre de décisions et avis
30 811
40 823
43144
46 729
46 642
49 605
Nombre de personnes reçues à l’accueil
7 216
9 474
9 054
9 399
10 679
15 234
Nombre d’appels téléphoniques
48 314
59 488
67 956
92 012
117 278
135 829
Nombre de courriers reçus
33 569
36 712
33 585
40 360
-
20 560
Nombre de courriers électroniques reçus
-
1 373
1 776
1 792
695
-
Source : indicateurs CNSA 2012 à 2017(maquettes d’activité) complétés par le rapport d’activité de la MDPH 2014
pour le chiffre concernant le nombre d’appels téléphoniques (chiffre déduit de la moyenne mensuelle de 5 663
appels), traitement CRC. Les chiffres concernant les demandes et les décisions et avis sont issus de la rubrique
activité globale et ceux pour l’accueil (physique, téléphone, courriers, courriels) de la rubrique accueil.
Ces données chiffrées n’apparaissent pas totalement fiables. En effet, la chambre
a constaté qu’elles variaient en fonction du document source. Ainsi, le chiffre correspondant
au nombre de décisions est différent selon que l’on se réfère au rapport d’activité de la MDPH
ou aux indicateurs CNSA adressés par la MDPH.
Le tableau ci-dessous illustre les différences de chiffres en ce qui concerne le
nombre d’avis et de décisions. Dans cette extraction, seuls les chiffres de l’année 2014 sont
cohérents.
Tableau n° 3 :
Comparaison des chiffres relatifs aux décisions et avis en fonction du
document de référence
2014
2015
2016
2017
Rapport d’activité 2017
43 144
45 345
51 686
49 425
Maquette d’activité CNSA de chaque année
rubrique activité globale
43 144
46 729
46 642
49 605
Maquette d’activité CNSA de chaque année
rubrique autres activités
43 144
35 432
39 062
42 549
Source : rapport d’activité 2017 et indicateurs CNSA (maquettes annuelles d’activité) 2014,2015,2016,2017
La chambre invite la MDPH à fiabiliser ses indicateurs chiffrés afin de permettre,
notamment, une comparaison de son activité avec celle des autres MDPH.
Sous ces réserves, les documents de la CNSA pour l’année 2016 montrent que la
MDPH de l’Eure se situe en première position au plan national, si l’on considère le nombre de
demandes par ETP.
Si l’on retient, en revanche, le nombre de demandes par habitant, elle se situe en
troisième position. Ainsi, ce sont 84 demandes pour 1 000 habitants qui ont été présentées en
2016 (contre 66 au niveau national
20
).
20
Conseil départemental, réunion du 19 mars 2018 : Rapport d’information : Plan de modernisation de la maison départementale
des personnes handicapées, page 1.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes Normandie sur la gestion de la MDPH de l’Eure
17
Cette situation, perçue par la MDPH et le département comme traduisant la
saturation du système d’instruction des demandes, est à l’origine de la mise en place d’un plan
de modernisation de la MDPH pour les années 2018-2021
21
, dans lequel le département est
impliqué.
1. L’accessibilité de la MDPH
Les établissements recevant du public (ERP) doivent être accessibles aux
personnes handicapées, quel que soit leur handicap. Aux termes de l’article R. 111-19-1 du
code de la construction et de l’habitation, «
l’obligation d’accessibilité porte sur les parties
extérieures et intérieures des établissements et installations et concerne les circulations, une
partie des places de stationnement automobile, les ascenseurs, les locaux et leurs
équipements
».
Au regard de cette réglementation, il apparaît que la MDPH est un bâtiment
accessible aux personnes handicapées, quel que soit leur handicap. Il est néanmoins difficile
d’en localiser l’emplacement en raison de l’absence de signalétique directionnelle sur la voie
publique.
2. La diversité de l’accueil
L’accueil des personnes handicapées, mission centrale de la MDPH, a connu de
nombreux dysfonctionnements, ces dernières années, en raison de sollicitations toujours plus
importantes. Ces difficultés ont nécessité la mise en place, en 2018, d’un plan d’actions, qui
concerne l’accueil sous toutes ses formes.
a -
L’accueil physique
Le nombre de personnes reçues a plus que doublé entre 2012 (7 216) et 2017
(15 234). Il a même plus que triplé depuis 2006, date de création de la MDPH
(4 556 personnes reçues).
Entre 2012 et 2017, l’accueil du public fonctionnait en continu entre 8h30 et 17h30,
du lundi au vendredi, soit une amplitude d’ouverture de 45 heures par semaine.
Depuis le 1
er
septembre 2018, une réduction des créneaux horaires a été décidée.
La MDPH est, depuis lors, ouverte du lundi au vendredi de 9h à 12h30 et de 13h30 à 17h00,
soit une amplitude de 35 heures par semaine.
Au regard de la hausse continue des personnes accueillies, ce choix de baisser
l’amplitude d’ouverture à un moment de forte affluence
22
apparaît contradictoire avec l’objectif
d’amélioration de l’accueil. Selon la MDPH, «
cette mesure a eu des effets positifs, permettant
en effet une meilleure articulation entre l’accueil physique et téléphonique de la MDPH,
participant ainsi à une amélioration du taux de décroché téléphonique
».
21
Ce plan de performance a été présenté en Comex le 21 février 2018 et en session plénière du conseil départemental le
19 mars 2018.
22
Le rapport 2013 mentionnait un triplement, par rapport à 2012, du nombre de personnes accueillies entre 12 h et 14 h.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes Normandie sur la gestion de la MDPH de l’Eure
18
L’accueil physique de l’usager est organisé en deux niveaux. Le point d’entrée est
constitué par l’accueil de premier niveau, réalisé depuis 2015 par l’accueil commun à la MDPH
et à l’unité territoriale d’action sociale (UTAS) du département. Cet accueil est donc assuré
par du personnel extérieur à la MDPH.
L’accueil de premier niveau est un accueil généraliste destiné à renseigner les
personnes sur les droits des personnes handicapées et dans beaucoup de cas il consiste à
distribuer ou collecter des dossiers de demandes de prestations. Les documents en matière
d’information sur le handicap disponibles dans le hall d’accueil de la MDPH et de l’UTAS sont
peu nombreux
23
.
L’accueil de second niveau, assuré par des agents de la MDPH, permet
l’accompagnement des usagers dans l’analyse de leur demande et la rédaction de leur projet
de vie.
b -
L’accueil téléphonique
Le nombre d’appels téléphoniques a presque triplé sur la période de contrôle,
passant d’environ 48 000 en 2012 à 135 000 en 2017, soit, pour cette dernière année, un
nombre moyen d’appels par jour de 546
24
. Cette hausse du nombre d’appels a généré une
saturation de la plateforme téléphonique et, par voie de conséquence, un nombre d’appels
non décrochés très important.
Le taux d’appel décroché ou traité est passé – entre 2012 et 2017 – de 75,7 % à
23,4 %. Il est toutefois permis de penser qu’un appel non décroché génère un autre appel (ou
un déplacement physique).
Tableau n° 4 :
Taux d’appels traités entre 2012 et 2017
2012
2013
2014
2015
2016
2017
Taux d’appels traités
75,7 %
67,1 %
non
disponible
52,8 %
36 %
23,4 %
Source : traitement CRC
Les plaintes des usagers sur les difficultés à joindre la MDPH ont entraîné une
réaction du département de l’Eure, qui a fait de l’accueil téléphonique de la MDPH une de ses
priorités d’action.
La mise en place d’un plan de performance – avec la création de quatre postes de
renfort de l’accueil et la transformation d’un des postes en poste de superviseur de la
plateforme – a permis d’améliorer la situation dès 2018. En novembre 2018, le taux d’appels
décrochés avoisine, selon les déclarations de la MDPH, les 80 %.
La hausse importante des appels téléphoniques, essentiellement entre 2015 et
2017, est à corréler avec celle du nombre de personnes accueillies sur cette même période.
On peut supposer qu’une personne non renseignée par téléphone va se déplacer pour obtenir
l’information recherchée. L’amélioration de l’accueil téléphonique devrait donc avoir un impact
sur le nombre de personnes accueillies physiquement.
23
Un seul document est disponible : « Je suis ou l’un de mes proches est en situation de handicap ».
24
Le nombre d’appels est calculé par l’autocom. La moyenne 2017 est calculée par rapport aux jours ouvrés, soit 249 jours
(365 – 105 jours WE – 11 jours fériés).
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes Normandie sur la gestion de la MDPH de l’Eure
19
La chambre note enfin que, conformément aux dispositions de l’article L. 146-7 du
CASF, la MDPH a mis en place un numéro vert gratuit destiné aux appels d’urgence
(0 800 881 605).
c -
Le courrier
La gestion du courrier est essentielle au bon fonctionnement du GIP puisque la
MDPH traite chaque année entre 20 500 et 40 300 courriers. Ce nombre considérable a
également généré un retard dans le traitement des dossiers.
Actuellement, les agents chargés de la gestion du courrier procèdent à leur
numérisation systématique (gestion électronique des documents – GED). Ce processus est
cependant imparfait, puisqu’il n’existe pas d’interface entre les documents numérisés et les
applications métiers utilisées par la MDPH dans la suite de l’instruction des demandes.
La gestion du courrier comprend également celle des courriers électroniques, qui
s’est développée depuis 2013.
d -
Le site internet
Le site internet a été créé en juin 2013, soit plus de sept ans après celle de la
MDPH. Son objectif est « de donner des informations simples et claires aux bénéficiaires sur
leurs droits et de devenir une source d’informations de référence »
25
. En 2015, année de pic
de la fréquentation du site, 75 500 visites ont été enregistrées.
Cependant, le site internet de la MDPH n’est pas à jour.
Certaines informations sur les prestations indiquent des montants qui étaient
applicables en 2012 (exemple AAH) mais qui ont évolué depuis. De même, certains
documents continuent à mentionner les anciens horaires d’ouverture
26
.
En mars 2018, un portail de suivi des demandes en ligne a été créé. Ce « portail
citoyen » permet aux usagers de suivre l’état d’avancement de leur dossier. Ce système doit
contribuer à faire baisser le nombre d’appels téléphoniques destinés à connaître l’état
d’avancement d’un dossier. Dans un avenir proche, la MDPH doit développer ce portail afin
de permettre le dépôt des dossiers en ligne.
Cette mise en place demande une veille constante et un haut degré en matière de
sécurité informatique. Le rapport d’activité 2015 révèle, en effet, un piratage informatique qui
a rendu le site inaccessible pendant quatre mois.
L’existence de ce site internet permet de contribuer à l’obligation faite aux MDPH
de sensibiliser tous les citoyens au handicap (article L. 146-3 du CASF). A cet égard, la MDPH
a mis en ligne, en juin 2013, le magazine IDEM qui pouvait également contribuer à cet objectif.
Cependant, ce magazine n’a connu qu’un seul numéro.
Le CASF prévoit, en son article L. 146-7, que «
la maison départementale des
personnes handicapées réalise périodiquement et diffuse un livret d'information sur les droits
des personnes handicapées et sur la lutte contre la maltraitance.
». Le site internet pourrait
être le vecteur de ce document qui, aujourd’hui, n’existe toujours pas.
25
Rapport d’activité 2012.
26
Le document « Notice explicative du formulaire de demande(s) auprès de la MDPH » contient la mention d’une ouverture sans
interruption de 8h30 à 17h30.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes Normandie sur la gestion de la MDPH de l’Eure
20
L’alimentation du site internet de la MDPH constitue également un moyen de
contribuer à la mission « d’observatoire du handicap » dévolue aux MDPH, mission qui
aujourd’hui n’est pas remplie.
La chambre invite la MDPH à mettre à jour son site internet et à mettre en place
l’observatoire du handicap. En réponse, la MDPH indique être consciente des améliorations à
apporter dans le domaine de l’information des usagers.
1. La phase d’instruction
La phase d’instruction, qui débute avec l’enregistrement de la demande et
l’attribution à un agent instructeur, se poursuit par l’évaluation de la demande.
Cette dernière constitue la phase cruciale de l’instruction. Elle est réalisée par les
équipes pluridisciplinaires (EP) réparties entre équipes spécialisées adultes et équipes
spécialisées enfants. La composition de l’EP peut varier en fonction de la nature du ou des
handicaps de la personne dont elle évalue les besoins de compensation.
Pour les demandes concernant les enfants, une équipe de première évaluation a
été mise en place, ce qui peut, dans certains cas, éviter la réunion d’une équipe spécialisée.
En matière de dossier de PCH aide humaine, l’évaluation est déléguée au
personnel des centres locaux d’information et de coordination (CLIC) du département. La
directrice de la MDPH a précisé que certains de ces évaluateurs ne souhaitaient plus travailler
sur ce type de dossier.
Dans le cadre de l’évaluation, les professionnels sont amenés à rencontrer la
personne. Cependant, dans les cas les plus simples, les évaluations sont faites sur dossier.
Les professionnels vont élaborer un plan personnalisé de compensation (PPC) qui
s’appuie sur une approche globale des attentes et des besoins de la personne et permet la
mise en œuvre du droit à compensation.
Le PPC peut proposer des prestations, des orientations en établissements ou
services, des préconisations ou des conseils. Il peut comporter un volet consacré à l’emploi et
à la formation professionnelle et, pour les enfants, intègre le projet personnalisé de
scolarisation (PPS).
Le PPC est transmis pour avis à la personne (ou son représentant légal), qui
dispose d’un délai de quinze jours pour formuler des observations sur les propositions du plan
qui sera ensuite soumis pour décision à la CDAPH.
Le principe posé par la loi est qu’un PPC doit être établi pour l’ensemble de l’offre
de service d’une MDPH. Le rapport d’activité de la MDPH de 2015 et de 2016 mentionne que
le PPC est formalisé uniquement dans le cadre de la demande de PCH.
Il est difficile d’analyser l’évolution du nombre d’évaluations et de PPC réalisés sur
la période de contrôle, d’une part, parce que sur quatre exercices les données sont
inexistantes et d’autre part, parce que les chiffres retraçant ces activités n’apparaissent pas
cohérents.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes Normandie sur la gestion de la MDPH de l’Eure
21
La chambre a examiné une quarantaine de dossiers gérés par la MDPH.
La consultation de ces dossiers montre qu’ils ne sont pas constitués de façon
homogène. De nombreux renseignements y figurent de manière manuscrite, ce qui complique
leur lecture, leur compréhension et leur appropriation par l’ensemble des équipes de travail.
Dans un dossier récapitulant la synthèse des décisions prises pour une seule et
même personne, un
post-it
qui apportait des précisions était collé sur une copie d’écran sans
que l’on comprenne pourquoi ces modifications n’avaient pas été intégrées à la synthèse
informatique.
2. Le délai de traitement
Le délai réglementaire de traitement d’un dossier déposé auprès d’une MDPH est
fixé à quatre mois par l’article R. 241-33 du CASF, à compter du moment où le dossier est
complet.
La consultation des dossiers, notamment ceux de PCH, a montré que cette date
n’était pas toujours disponible puisque certains courriers de notification de décision font
référence à la date de complétude du dossier sans que celle-ci apparaisse.
Cette anomalie permet de conclure que les chiffres concernant les délais de
traitement des dossiers ne sont pas nécessairement fiables.
De même, dans plusieurs dossiers, il a été constaté que l’usager avait reçu deux
courriers datés du même jour, l’un l’informant que son dossier était complet, l’autre qu’il devait
transmettre des documents complémentaires pour l’étude de sa demande.
Sous ces réserves, sur la période de contrôle, le délai de traitement des dossiers
est toujours resté inférieur au délai de quatre mois.
Tableau n° 5 :
Evolution du délai de traitement entre 2012 et 2017
2012
2013
2014
2015
2016
2017
Activité globale
NR
NR
3
4
3,3
3
Activité enfant
2
NR
3
4
3
3
Activité adulte
2
NR
3
4
3,5
3
Source : données CNSA 2012 à 2017, traitement CRC
De plus, la compilation des délais exclut une partie des dossiers puisque ceux
concernant la PCH ne sont pas intégrés dans son calcul.
Le tableau ci-dessous constitue un aperçu des délais de traitement des dossiers à
la MDPH en 2016, en distinguant les dossiers adultes et enfants et les dossiers PCH.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes Normandie sur la gestion de la MDPH de l’Eure
22
Tableau n° 6 : Les délais de traitement des dossiers en 2016
Type de dossier
Délai de
traitement (en
mois)
Délai moyen de
traitement (en
mois)
PCH adulte aide humaine
6
PCH adulte aide technique
4
PCH adulte charges exceptionnelles
4
PCH adulte surcoût de transport
4
PCH adulte aménagement de véhicule
4
PCH adulte aménagement de logement
20
Allocation adulte handicapé - AAH
3
Complément de ressources AAH
3
Reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé
4
Allocation tierce personne
4
Orientation en établissements spécialisés
3
Orientation professionnelle et formation
5
Amendement Creton
2
Carte de priorité ou d’invalidité
3
Carte européenne de stationnement
3
Ensemble demandes adulte
4,8
Demandes adulte hors PCH
3,4
PCH enfant
6
Allocation d’éducation pour l’enfant handicapé - AEEH
3
Complément AEEH
3
Orientation scolaire ou en établissement
3
Carte de priorité ou d’invalidité
3
Carte européenne de stationnement
3
Transport scolaire
3
Ensemble demandes enfant
3,5
Demandes enfant hors PCH
3
Ensemble des demandes adulte/enfant
4,3
Source : rapport d’activité de la MDPH 27 2016, traitement CRC
Dans ses remontées destinées à la CNSA pour 2016, le GIP indique un délai global
de traitement de 3,3 mois (3 mois pour les enfants et 3,5 mois pour les adultes). Le rapport
d’activité 2016 mentionne également un délai de 3,3 mois, toutes demandes confondues hors
PCH.
Ces chiffres ne correspondent pas à la réalité, qui doit inclure les délais de
traitement des dossiers de PCH. Le délai global en 2016 s’établit alors à 4,3 mois (4,8 mois
pour les adultes et 3,5 pour les enfants).
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes Normandie sur la gestion de la MDPH de l’Eure
23
La MDPH a transmis un tableau récapitulant les délais d’instruction pour chacun
des 85 types de dossier gérés en 2017. Selon elle, 62 dossiers sur 85 respectent le délai de
quatre mois, avec un délai moyen de 3 mois.
Après vérification, la chambre relève que ce délai est en réalité de 3,4 mois.
Les 23 types de dossier ne respectant pas le délai de traitement de quatre mois
correspondent essentiellement à des dossiers de PCH, dans ses différentes composantes.
Ainsi le délai moyen de traitement d’un dossier de PCH est de 5,4 mois, le délai moyen le plus
important s’élevant à 12,7 mois pour les dossiers de PCH logement.
La chambre invite donc la MDPH à inclure l’ensemble des dossiers traités dans le
calcul des délais de traitement.
Le nombre de décisions et avis rendus par la CDAPH a augmenté de 61 % entre
2012 et 2017. L’essentiel de cette hausse se situe entre 2012 et 2015.
Graphique n° 1 :
Décisions et avis rendus par la CDAPH entre 2012 et 2017
Source : indicateurs d’activité CNSA de 2012 à 2017, traitement CRC
Parallèlement le nombre de demandes n’augmentait que de 22,9 %.
Afin de disposer d’une vision globale de l’activité décisionnelle de la MDPH, il
convient de rappeler le nombre de dossiers examinés par le comité de gestion du fonds de
compensation du handicap.
Tableau n° 7 :
Evolution du nombre de dossiers traités par le comité de gestion du FCH
entre 2012 et 2017
CGFDC
2012
2013
2014
2016
2017
Nombre de dossiers étudiés
199
229
188
103
171
Source : rapport d’activité MDPH 2012 à 2017, traitement CRC
30 811
40 823
43 144
46 729
46 642
49 605
25 000
30 000
35 000
40 000
45 000
50 000
55 000
2012
2013
2014
2015
2016
2017
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes Normandie sur la gestion de la MDPH de l’Eure
24
1. La prise de décision
La CDAPH se réunit deux demi-journées par mois pour statuer sur les propositions
faites par les équipes d’évaluation. Une CDAPH peut statuer sur 3 000 à 4 000 dossiers par
séance. Les dossiers sont présentés de manière anonyme.
La MDPH fonctionne selon une procédure que l’on peut qualifier de simplifiée
(même si elle ne correspond pas à la procédure simplifiée instituée par les textes).
La CDAPH valide un bordereau qui comprend l’essentiel des dossiers ne posant
pas de problème particulier. Elle examine de manière approfondie les seuls dossiers ayant
posé des difficultés aux agents pluridisciplinaires.
Cette manière de procéder revient dans les faits à attribuer aux équipes
pluridisciplinaires un pouvoir de décision sur la majorité des dossiers.
Sur les dossiers jugés difficiles, au regard de la situation particulière vécue par la
personne handicapée, il n’y a pas d’invitation systématique du demandeur (cf.
supra
). Cette
question peut se révéler d’autant plus préjudiciable à la personne handicapée que la
commission n’a pas la certitude de disposer d’un dossier à jour, notamment sur le plan
médical.
La difficulté a d’ailleurs été soulignée par les associations membres de la CDAPH
rencontrées par la chambre
27
.
L’obligation faite à la MDPH de permettre à la personne handicapée de participer
à la commission qui examinera sa demande, devient particulièrement d’actualité avec la mise
en service, à compter du 1
er
mai 2019, d’un nouveau formulaire de demande qui indique
explicitement au demandeur : «
La loi vous donne le droit d’être reçu par la CDAPH
».
2. La notification des décisions
La notification de la décision de la CDAPH est la formalité par laquelle la MDPH
porte officiellement à la connaissance du demandeur et des organismes intéressés la décision
arrêtée par la CDAPH.
Le courrier de notification à l’intéressé doit expliquer les circonstances de droit et
de fait qui constituent le fondement de la décision puisque, conformément au CASF, «
les
décisions de la commission sont, dans tous les cas motivées
» (articles L. 241-6 et
R. 241-31).
Toutes les décisions doivent être motivées – défavorables comme favorables –
dans la mesure où ces dernières s’imposent également à des tiers.
La reproduction d’une formule stéréotypée, sans précisions d’éléments de fait, ou
la motivation par référence à des dispositions réglementaires sans préciser leur application au
cas examiné, n’est pas une motivation suffisante.
27
Cet état de fait est à relier à la désertification médicale du département de l’Eure : 68,1 médecins généralistes pour 100 000
habitants contre 89,7 pour la France métropolitaine et, pour l’ensemble des professions médicales libérales, 289,1 pour 100 000
habitants contre 509,3 pour la France métropolitaine, ce qui place l’Eure comme le dernier département en France.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes Normandie sur la gestion de la MDPH de l’Eure
25
Or les courriers de notification de la MDPH reproduisent ces schémas. Cette
situation est préjudiciable à l’usager, notamment lorsqu’il s’agit d’une décision de rejet. Ce
dernier n’est alors pas en mesure de comprendre pourquoi la CDAPH a rejeté sa demande.
Les associations représentant les personnes handicapées ont souligné cette absence de
motivation lors de leur rencontre avec la chambre.
Les mêmes courriers font référence au texte applicable sans expliciter au
demandeur pourquoi il ne remplit pas les conditions d’octroi de la prestation demandée.
Cette absence de motivation fragilise juridiquement les décisions de la CDAPH,
qui pourraient être annulées par un juge en cas de recours.
La directrice actuelle de la MDPH indique néanmoins participer à un groupe de
travail national sur cette thématique.
Outre l’absence de motivation, la consultation des dossiers montre que nombre de
courriers de notification sont incompréhensibles pour l’usager en raison :
-
soit de l’utilisation d’un modèle de courrier à la place d’un autre ;
-
soit de l’utilisation de deux modèles de courrier en parallèle ;
-
soit de l’utilisation de modèles ou de formules techniques qui viennent remettre en
cause le sens même de la décision.
Un soin particulier doit être apporté à la formulation des courriers de manière à
s’assurer que l’usager comprenne le sens de la décision qui lui est notifiée.
Il est également souhaitable que soit distingué le droit formel reconnu par la
CDAPH de l’effectivité de sa mise en œuvre. En effet, une décision d’orientation vers un
établissement spécialisé peut ne pas être mise en œuvre faute de place dans la structure. De
même, l’accord pour que l’enfant soit accompagné dans un établissement scolaire peut ne pas
se concrétiser en raison de l’absence d’un assistant de vie scolaire (AVS).
La MDPH doit donc informer l’usager que la mise en œuvre de sa décision ne
relève pas de son autorité et qu’elle n’est pas nécessairement instantanée.
La MDPH devrait pouvoir être informée du nombre de places disponibles et des
délais de prise en charge de la personne handicapée, afin de redonner une réalité à la
notification d’orientation. Or la CDAPH, le jour où elle rend sa décision, peut ne pas disposer
d’information sur le nombre de places disponibles en établissement.
Un outil spécifique – « Via trajectoire » – existe pourtant à cet effet, qui doit
permettre le suivi des orientations à travers la remontée en temps réel des informations à la
MDPH. La vice-présidente du département chargée des affaires sociales a informé la chambre
que cet outil serait mis en place à compter du 5 mars 2019.
Ce constat s’intègre à la question plus générale du suivi des décisions de la MDPH.
En effet, le CASF prévoit, en son article R. 146-31, que la MDPH «
apporte aux
personnes handicapées et à leur famille l’aide nécessaire à la mise en œuvre des décisions
prises par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées, notamment
dans leurs démarches auprès des établissements, services et organismes qui accueillent des
personnes handicapées
».
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes Normandie sur la gestion de la MDPH de l’Eure
26
La mise en œuvre d’une décision nécessite parfois une nouvelle démarche à
entreprendre pour l’usager, comme prendre contact avec certains organismes ou
établissements. La MDPH n’est pas en mesure de réaliser actuellement ce suivi dans sa
globalité.
La MDPH ne réalise que le suivi spécifique de certaines situations, celles des
usagers relevant :
-
de la commission des situations critiques ;
-
de la cellule de veille du dispositif réponse adaptée pour tous (RAPT) ;
-
de situations complexes en établissement et service d’aide par le travail (ESAT) ;
-
de l’amendement CRETON (jeunes adultes).
*
La chambre rappelle au GIP son obligation de motiver les décisions de la CDAPH
et invite la MDPH à préciser les droits reconnus à la personne handicapée et à lui présenter
les conditions de leur mise en œuvre. En réponse, l’ordonnateur s’est engagé à revoir la
rédaction des notifications adressées aux personnes handicapées.
3.
Les recours contre les décisions
Les décisions de la MDPH ne sont pas notifiées avec accusé de réception.
Cette formalité, qui n’est pas obligatoire, revêt néanmoins une importance dans la
mesure où la preuve de la notification incombe à l’administration et que la réception de la
notification fait courir le délai de recours.
C’est ainsi que certaines décisions du tribunal du contentieux de l’incapacité (TCI)
soulignent l’impossibilité de déterminer le point de départ du délai de recours : «
le tribunal
ignorant si la décision a été notifiée à une date certaine faisant partir le délai de 2 mois, son
recours est par conséquent recevable
»
28
ou «
le tribunal ignorant s’il existe une date certaine
de notification faisant courir le délai de 2 mois pour exercer ledit recours, il est donc
recevable.
»
29
.
Peu nombreux au regard du nombre de décisions, les recours gracieux ne sont
plus comptabilisés depuis 2015. Ils représentaient un taux de 1,16 % en 2014.
Il est regrettable que cette donnée ne soit pas suivie, celle-ci étant facilement
disponible puisque tout recours gracieux implique une réponse de la MDPH.
Les recours contentieux sont encore plus négligeables, au regard du nombre de
décisions rendues par an. Sur la période de contrôle, ils représentent un taux variant de 0,13 %
à 0,16 % (43 recours en 2012 à 68 en 2017
30
).
Il convient également de rappeler qu’à côté des voies de recours habituelles, il
existe une procédure de conciliation (article L. 146-10 du CASF), qui fait intervenir une
personne qualifiée chargée de proposer des mesures de conciliation.
28
Jugement TCI Rouen du 3 avril 2017 n° recours 232016000002HM et 232016001160HM
29
Jugement TCI Rouen du 7 avril 2017 n° recours 232016001243HM
30
Le rapport de synthèse de l’activité des MDPH en 2017 mentionne qu’en moyenne les recours gracieux et contentieux
représentent 2,4 % des décisions et avis pris en 2017 (sur un échantillon de 86 MDPH).
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes Normandie sur la gestion de la MDPH de l’Eure
27
Si une liste des personnes qualifiées a été établie, la procédure de conciliation
n’est pas utilisée, ce que regrettent les associations rencontrées. Elle constitue pourtant un
moyen d’éviter un recours contentieux et permet donc un gain de temps pour la MDPH, qui ne
dispose pas de juriste affecté au traitement de ces instances.
La MDPH et le conseil départemental de l’Eure sont conscients de la nécessité
d’améliorer le fonctionnement du GIP, dont la modernisation de l’outil informatique est l’axe
principal.
La MDPH 27 a d’ailleurs été identifiée par la CNSA (à l’instar de 22 autres MDPH)
comme présentant un retard important en termes d’infrastructure informatique. Elle doit mettre
à niveau cette infrastructure préalablement à la mise en place du système d’information
commun des MDPH (SI tronc commun), destiné à améliorer la qualité du service rendu aux
usagers et à harmoniser les pratiques des MDPH.
Ce travail nécessite la forte mobilisation du service informatique du département
gestionnaire du système informatique de la MDPH.
Au-delà de l’infrastructure informatique, la modernisation implique également la
dématérialisation des procédures dans leur intégralité et, par conséquent, l’informatisation des
processus métiers.
Elle impose à la MDPH de s’investir dans l’interfaçage :
-
de la gestion électronique du courrier et l’instruction du dossier ;
-
des téléservices (dépôt en ligne du dossier) ;
-
du logiciel métier avec les systèmes informatiques des organismes payeurs des
prestations (conseil départemental, caisse d’allocations familiales, caisse primaire
d’assurance maladie, mutualité sociale agricole) ;
-
vers les partenaires de la MDPH (éducation nationale, établissements médico-
sociaux, etc.).
La
modernisation
de
l’outil
informatique
répondra,
enfin,
aux
priorités
gouvernementales qui sont d’atteindre, d’ici 2022, un taux de 100 % des services publics
dématérialisés (action publique 2022).
La MDPH est considérée, par les usagers rencontrés par la chambre, comme une
organisation qui fonctionne de manière plus satisfaisante que les anciennes institutions
responsables de la mise en œuvre de la politique liée au handicap.
Une enquête de satisfaction, réalisée du 12 septembre au 15 décembre 2018
auprès des usagers de la MDPH de l’Eure dans le cadre d’une opération nationale, confirme
cette opinion.
Sur 1 116 personnes ayant répondu au questionnaire, 61,2 % des personnes se
déclarent satisfaites, 26,6 % moyennement satisfaites et 12,1 % insatisfaites. Globalement,
les usagers sont donc plutôt satisfaits de la MDPH, qui obtient un taux de satisfaction de 0,75
31
.
31
0 = insatisfait ; 0,5 = moyennement satisfait ; 1 = satisfait.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes Normandie sur la gestion de la MDPH de l’Eure
28
Le rapport d’activité 2012 mentionnait la volonté de la MDPH de mettre en place
un comité des usagers qui pourrait permettre d’améliorer la participation et l’expression des
usagers en dehors des organes internes à la MDPH. A ce jour, ce comité n’existe pas.
Malgré les dysfonctionnements constatés (qui ne sont d’ailleurs contestés, ni par
la MDPH, ni par le département), il apparaît que les usagers perçoivent de façon positive
l’action de la MDPH.
Cette situation
a priori
paradoxale pourrait s’expliquer en partie par le fait que la
pratique de la MDPH de l’Eure est beaucoup plus favorable aux usagers que dans les autres
MDPH.
En effet, comme l’illustre le tableau ci-après, sur les principales prestations
versées par la MDPH aux adultes (PCH et AAH), le taux d’accord est d’environ 10 points
supérieur à la moyenne nationale. Cet écart est encore plus important s’agissant de la PCH
enfant, puisqu’il atteint 53 points.
Tableau n° 8 :
Comparaison taux d’accord MDPH 27 avec le taux d’accord national en 2017
MDPH 27
France entière
PCH adulte
56,8 %
47,6 %
Carte stationnement adulte
69,7 %
62,9 %
AAH
77,4 %
66,1 %
PCH enfant
89,2 %
36 ,1 %
Carte stationnement enfant
88 %
65,1 %
Source : document de restitution 2017 des données d’activité et de fonctionnement des MDPH et mise en
perspective avec les données nationales
LA SITUATION FINANCIERE DE LA MDPH DE L’EURE
La MDPH dispose d’un budget qui comprend, d’une part, les moyens nécessaires
à l’activité de la structure et, d’autre part, les crédits relatifs au fonds de compensation du
handicap.
Les dépenses et les recettes totales de l’exercice 2017 s’élèvent respectivement
à 1 715 084 euros et 1 633 684 euros.
Les dépenses d’investissement demeurent très réduites sur l’ensemble de la
période contrôlée (moins de 26 000 euros par an).
Pour l’essentiel, ces dépenses sont constituées d’achats de matériels de bureau
et de matériels informatiques.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes Normandie sur la gestion de la MDPH de l’Eure
29
Les dépenses permettant le fonctionnement de la structure sont composées à
hauteur de 78 % de la masse salariale (environ 1,2 M€) à laquelle s’ajoutent notamment des
dépenses de location (103 501 euros), des frais d’affranchissement (59 194 euros) et différents
contrats et prestations de services (75 908 euros). Ces dépenses apparaissent relativement
stables sur la période examinée et évoluent principalement en relation avec les dépenses de
personnel.
Les dépenses correspondant aux aides versées en 2017 au titre du fonds de
compensation du handicap s’élèvent à 121 171 euros. Elles sont en forte progression par
rapport aux deux exercices précédents du fait que la MDPH n’a pas instruit en 2015 et 2016
une grande partie des demandes des personnes handicapées qui lui sont parvenues (voir
supra
).
Les recettes perçues par la MDPH au titre du fonctionnement s’élèvent en 2017 à
1 617 725 euros. Elles proviennent pour l’essentiel, comme chaque année, des contributions
de la CNSA (786 979 euros), de différentes dotations de l’État (625 261 euros) et, plus
marginalement, de la participation du département de l’Eure (19 000 euros) auxquelles
s’ajoutent les recettes issues du fonds de compensation du handicap (128 344 euros).
Les
résultats des différents
exercices
budgétaires annuels sous revue
apparaissent contrastés, alternant des résultats positifs et négatifs. Ils demeurent toutefois
sans incidence réelle sur la situation financière de la MDPH, qui dispose depuis 2006 d’un
excédent financier considérable, reporté d’année en année et équivalant environ à une année
de financement.
L’État et la CNSA ont pourtant maintenu voire augmenté le niveau de leurs
financements, entre 2012 et 2017, sans tenir compte de la situation exceptionnellement
favorable que connaissait la MDPH de l’Eure.
Tableau n° 9 :
L’évolution des recettes de fonctionnement entre 2012 et 2017
Source : synthèse transmise par la MDPH 27
Cette tendance semble se poursuivre en 2018. En effet, la CNSA a versé une
dotation complémentaire de 50 000 euros pour la mise en place du nouveau système
d’information « Tronc commun ». Or le résultat cumulé de 2018 s’élève encore à
1 419 977 euros, malgré un déficit de fonctionnement supérieur aux années précédentes
(- 334 412 euros).
La MDPH considère qu’elle devrait avoir résorbé cet excédent d’ici deux ou trois
ans, sans avoir néanmoins transmis à la chambre les éléments permettant de confirmer cette
affirmation.
La chambre estime donc que la situation de la MDPH reste confortable et devrait
lui permettre de faire face à ses besoins de financement à moyen terme, en maîtrisant ses
dépenses de fonctionnement.
FONCTIONNEMENT
CA 2012
CA 2013
CA 2014
CA 2015
CA 2016
CA 2017
Education nationale
17 911 €
16 586 €
17 911 €
19 236 €
19 236 €
17 911 €
Dotation Etat
937 828 €
498 262 €
622 828 €
621 328 €
619 828 €
607 350 €
Participation CNSA
569 536 €
694 059 €
603 005 €
649 460 €
661 347 €
786 979 €
Participation département
19 000 €
19 000 €
19 000 €
19 000 €
19 000 €
TOTAL
1 525 275 €
1 227 907 €
1 262 744 €
1 309 024 €
1 319 411 €
1 431 240 €