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LES MÉDECINS
ET LES PERSONNELS
DE SANTÉ SCOLAIRE
Communication à la commission des finances, de l’économie générale
et du contrôle budgétaire de l’Assemblée nationale
Avril 2020
Les médecins et les personnels de santé scolaire - mai 2020
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
Sommaire
PROCÉDURES ET MÉTHODES
........................................................................................................................
5
SYNTHÈSE
............................................................................................................................................................
7
RECOMMANDATIONS
.....................................................................................................................................
13
INTRODUCTION
................................................................................................................................................
15
CHAPITRE I
LES DIFFICULTÉS PERSISTANTES DE LA SANTÉ SCOLAIRE, UNE
PERFORMANCE TRÈS INFÉRIEURE AUX OBJECTIFS
..........................................................
19
I - UN PARTAGE DES MISSIONS DES PROFESSIONNELS DE SANTÉ SCOLAIRE SOURCE
DE DIFFICULTÉS D’APPLICATION
.............................................................................................................
19
II - UN EFFORT BUDGÉTAIRE SOUTENU, UN DÉFICIT DE MÉDECINS SCOLAIRES
....................
22
A - Une masse salariale en progression sans unité budgétaire
...............................................................................
22
B - Une croissance des effectifs infirmiers plus rapide que la population scolarisée
.............................................
24
C - Des effectifs de médecins en nette diminution, une forte dégradation de l’encadrement
................................
26
III - UNE PERFORMANCE NON SUIVIE, TRÈS EN DEÇÀ DES OBJECTIFS
.......................................
28
A - Une opacité de l’activité due à une grève administrative, une évaluation inexistante
.....................................
29
B - Des taux de réalisation des visites obligatoires très insuffisants
......................................................................
31
C - Une mission d’éducation à la santé reléguée au second rang
...........................................................................
38
CHAPITRE II
UN PILOTAGE DISTENDU À L’ORIGINE D’UNE PERTE
D’EFFICIENCE
...................................................................................................................................
41
I - DES MESURES FAVORABLES À LA SANTÉ SCOLAIRE DE PORTÉE RESTREINTE
..................
41
A - La mobilisation des expertises autour de la santé scolaire
...............................................................................
41
B - Des progrès ponctuels depuis le précédent rapport de la Cour
.........................................................................
42
II - UNE GESTION TRÈS CLOISONNÉE DES PERSONNELS ET DES MÉTIERS
................................
46
A - Des disparités de dotation de personnels peu explicables
................................................................................
46
B - Une gestion des métiers en silos, des personnels peu encadrés
........................................................................
47
C - Des missions à faire évoluer pour mieux répondre aux besoins
.......................................................................
51
D - Des temps de travail trop calqués sur les obligations de service hebdomadaires des enseignants
...................
53
E - Des conditions de travail insatisfaisantes
.........................................................................................................
56
F - Des logiciels professionnels obsolètes et séparés, en attente de refonte
...........................................................
58
G - Une formation continue insuffisante
................................................................................................................
59
III - UNE UNITÉ DE VUE DÉFICIENTE AU PLAN NATIONAL ET EN ACADÉMIES
.........................
59
A - Le cloisonnement des métiers de santé scolaire répliqué au sein de la DGESCO
...........................................
59
B - Une coordination académique préconisée par le ministère, non mise en
œ
uvre ou sans effets probants
.........
60
C - La pluralité confuse des organisations académiques pour les visites obligatoires
...........................................
62
CHAPITRE III
UNE ORGANISATION À REVOIR
.....................................................................
67
I - CRÉER UN SERVICE ACADÉMIQUE DE LA VIE ET DE LA SANTÉ DE L’ÉLÈVE
.......................
67
A - Restaurer une unité d’action et de management
...............................................................................................
67
B - Améliorer les conditions courantes d’exercice des métiers de santé scolaire
..................................................
69
II - REVOIR LE PARTAGE DES TÂCHES ENTRE MÉDECINS ET INFIRMIERS
................................
69
III - DOTER LE MINISTÈRE D’UN CONSEIL DE LA SANTÉ SCOLAIRE, RENDRE COMPTE
DES RÉSULTATS DU SERVICE PUBLIC
......................................................................................................
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COUR DES COMPTES
4
IV - DÉVELOPPER LA COMPLÉMENTARITÉ AVEC LA MÉDECINE LIBÉRALE
............................
71
V - SYSTÉMATISER LA CONTRACTUALISATION AVEC LES PARTENAIRES DE LA
SANTÉ PUBLIQUE
............................................................................................................................................
72
A - Avec les ARS, étendre des contractualisations fructueuses
.............................................................................
72
B - Avec l’assurance maladie, renforcer le partenariat opérationnel
.....................................................................
73
CONCLUSION GÉNÉRALE
.............................................................................................................................
77
LISTE DES ABRÉVIATIONS
...........................................................................................................................
79
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Procédures et méthodes
Les rapports de la Cour des comptes sont réalisés par l’une des six chambres que comprend la
Cour ou par une formation associant plusieurs chambres et/ou plusieurs chambres régionales ou
territoriales des comptes.
Trois principes fondamentaux gouvernent l’organisation et l’activité de la Cour, ainsi que des
chambres régionales et territoriales des comptes, tant dans l’exécution de leurs contrôles et enquêtes
que dans l’élaboration des rapports publics : l’indépendance, la contradiction et la collégialité.
L’indépendance
institutionnelle des juridictions financières et statutaire de leurs membres
garantit que les contrôles effectués et les conclusions tirées le sont en toute liberté d’appréciation.
La contradiction
implique que toutes les constatations et appréciations ressortant d’un
contrôle ou d’une enquête, de même que toutes les observations et recommandations formulées
ensuite, sont systématiquement soumises aux responsables des administrations ou organismes
concernés ; elles ne peuvent être rendues définitives qu’après prise en compte des réponses reçues et,
s’il y a lieu, après audition des responsables concernés.
La collégialité
intervient pour conclure les principales étapes des procédures de contrôle et de
publication.
Tout contrôle ou enquête est confié à un ou plusieurs rapporteurs. Leur rapport d’instruction,
comme leurs projets ultérieurs d’observations et de recommandations, provisoires et définitives, sont
examinés et délibérés de façon collégiale, par une chambre ou une autre formation comprenant au
moins trois magistrats. L’un des magistrats assure le rôle de contre-rapporteur et veille à la qualité
des contrôles. Il en va de même pour les projets de rapports publics.
La Cour des comptes a été
saisie par le président de la commission des finances de
l’Assemblée nationale
, par lettre du
11 juillet 2019
, en application du 2° de l’article 58 de la loi
organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), d’une demande
d’enquête portant sur « les médecins et personnels de santé scolaire ». Dans une lettre du
4 septembre 2019, le Premier président a accepté cette demande et a précisé les modalités
d’organisation des travaux demandés à la Cour, s’engageant à remettre le rapport à partir du mois
d’avril 2020.
À la suite de ces échanges, en accord avec le président de la commission des finances de
l’Assemblée nationale, il a été décidé de retenir comme périmètre de l’enquête les personnels de
l’éducation nationale suivants : les médecins, les infirmiers, les assistants de service social et les
psychologues de l’éducation nationale qui participent au repérage et au suivi des troubles de
l’apprentissage susceptibles d’entraver la scolarité des élèves. Il a été convenu que l’enquête examine
les thèmes suivants : l’organisation des services pour apprécier l’efficacité des collaborations entre
ces quatre métiers complémentaires, la répartition des effectifs sur le plan national et en académies,
leur pilotage et le suivi de leur performance, les questions de rémunération, de recrutement et de
formation, enfin les collaborations existantes ou à développer avec les acteurs de la santé (médecine
de ville, agences régionales de santé -ARS -, collectivités territoriales).
La troisième chambre de la Cour des comptes a conduit ses investigations auprès des services
concernés des ministères de l’éducation et de la santé et de
cinq académies (
Bordeaux, Lille, Nancy-
Metz, Paris, Toulouse), au sein desquelles l’enquête s’est déployée dans les rectorats, les services
départementaux de l’éducation nationale (DSDEN), les écoles et les établissements du second degré.
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6
Trois questionnaires ont été adressés :
-
l’un à toutes les académies (bilan des moyens de la santé scolaire et de l’exécution des principales
missions) ;
-
un deuxième à toutes les ARS (panorama des collaborations interministérielles) ;
-
enfin un dernier aux onze villes
1
délégataires de missions de santé scolaire.
Des entretiens ont été conduits avec deux de ces villes, quatre ARS, la caisse nationale
d’assurance maladie, Santé publique France (SPF) et divers acteurs syndicaux et associatifs.
Après avoir été délibéré le 16 décembre 2019 par la troisième chambre, un relevé
d’observations provisoires a été adressé, le 21 janvier 2020, à la secrétaire générale du ministère de
l’Éducation nationale, au directeur général de l’enseignement scolaire, au directeur général de la
santé, à la directrice générale de l’offre de soins et à la directrice du budget
2
. Toutes les réponses
écrites ont été obtenues des administrations qui, pour celles principalement concernées ont été
auditionnées, ainsi que les syndicats des personnels de santé et les associations de parents d’élèves.
Le rapport définitif a été délibéré le 3 mars 2020, par la troisième chambre présidée par
Mme Moati, présidente de chambre et en formation composée de MM. Lefebvre, Potton, Guillot et
Mme Vergnet, conseillers maîtres, ainsi que, en tant que contre-rapporteur, M. Barbé, conseiller
maître, et, en tant que rapporteurs, Mme Riou-Canals, conseillère maître, Mme Boussarie, rapporteure
extérieure et MM. Pernias et Vannier, vérificateurs.
Il a ensuite été examiné et approuvé le 31 mars 2020 par le comité du rapport public et des
programmes de la Cour des comptes, composé de Mme Moati, doyenne des présidents de chambre,
première présidente par interim, M. Morin, Mme Pappalardo, rapporteure générale du comité,
MM. Andréani, Terrien, Charpy, Mme Podeur, présidents de chambre, M André Barbé, président de
section à la 3
e
chambre, et Mme Hirsch de Kersauson, procureure générale, entendue en ses avis.
Ce rapport est accompagné
d’un cahier de 26 annexes
qui retracent notamment, pour chaque
département, les moyens en personnels disponibles et les taux de réalisation des examens de santé
obligatoires. Elles détaillent également l’organisation et les actions mises en
œ
uvre par les services
municipaux de santé scolaire dans les villes délégataires ainsi que la collaboration entre les ARS et
l’éducation nationale.
1
Antibes, Bordeaux, Clermont-Ferrand, Grenoble, Lyon, Nantes, Paris, Rennes, Strasbourg, Vénissieux,
Villeurbanne.
2
Par ailleurs, ont été destinataires d’un extrait du relevé d’observations provisoires : la secrétaire générale des
ministères des affaires sociales, le directeur général de l’administration et de la fonction publique, le directeur
général de la caisse nationale de l’assurance maladie, la directrice générale de Santé publique France et les maires
des onze villes délégataires de diverses missions de santé scolaire relevant de l’État.
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Synthèse
Les médecins et les personnels de santé scolaire exercent des missions dont l’importance
est reconnue au sein de l’éducation nationale mais qui apparaissent comme une priorité de
second rang au regard du c
œ
ur de métier du ministère : la mission d’instruction.
Le bon exercice des missions de ces personnels est pourtant une des conditions
essentielles de la réussite de la politique éducative ; il constitue aussi une contribution
importante à la politique de santé publique.
Ces enjeux sont identifiés par la loi du 8 juillet 2013 de refondation de l’école de la
République qui a assigné à la santé scolaire deux objectifs : réussite scolaire et réduction des
inégalités en matière de santé. Le projet d’une école inclusive, capable d’accueillir tous les
enfants, quelles que soient leurs difficultés de santé, n’est en outre réalisable qu’adossé à un
dispositif de santé scolaire performant. Pour la politique de santé publique dont la prévention
est une priorité, la santé scolaire est, comme la protection maternelle et infantile (PMI), un
dispositif crucial en raison des objectifs de dépistage obligatoires qui concernent toute une
génération, notamment à la 6
e
année des enfants scolarisés.
Or le dispositif de santé scolaire, qui s’appuie non seulement sur les médecins et les
personnels infirmiers et de service social, mais aussi sur les psychologues de l’éducation
nationale, fort au total de plus de 20 000 équivalents temps plein, connaît des difficultés
endémiques sur lesquelles l’attention des pouvoirs publics est régulièrement appelée.
Une pénurie de médecins scolaires
Pour les élèves, les familles et les équipes éducatives, la santé scolaire est surtout incarnée
par les personnels infirmiers : ce sont les professionnels de santé les plus nombreux (près de
8 000 équivalents temps plein), les plus disponibles tant pour l’accueil des élèves, avec des
compétences très larges au titre des consultations infirmières, que pour l’éducation à la santé
en lien avec les enseignants. Ils sont particulièrement présents dans les établissements du second
degré qui sont leur lieu d’affectation. Le taux d’encadrement infirmier des élèves s’est redressé
depuis plusieurs années pour s’élever à 1 300 élèves par personnel infirmier fin 2018.
L’activité des médecins, beaucoup moins nombreux (moins d’un millier d’équivalents
temps plein), est largement absorbée par les bilans de santé individuels obligatoires et
l’adaptation de la scolarité des élèves à besoins éducatifs particuliers, en situation de handicap
ou atteints de pathologies chroniques.
Bien que des crédits soient ouverts, un tiers des postes de médecins de l’éducation
nationale (contractuels compris) sont vacants et le nombre de médecins scolaires a chuté de
15 % depuis 2013. Ainsi le taux d’encadrement des élèves s’est dégradé de 20 % en cinq ans
pour atteindre en moyenne nationale un médecin pour 12 572 élèves en 2018. Le taux
d’encadrement a chuté dans 75 départements et dans 31 d’entre eux au-delà de 40 %.
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Le ministère bute sur des difficultés pour renouveler des effectifs vieillissants pour
lesquels les prévisions de départs en retraite excèdent largement le rythme annuel de
recrutement par voie de concours qui ne permettent de pourvoir que moins de la moitié des
postes offerts. Ce problème, qui tient d’abord à la démographie médicale d’ensemble, dépasse
l’éducation nationale, même si elle a tenté d’améliorer l’attractivité du métier par une
revalorisation des rémunérations, sans effet décisif jusqu’ici.
Pour autant, ce seul facteur ne saurait expliquer la performance très médiocre de la santé
scolaire.
Une performance très en deçà des objectifs de dépistages obligatoires
due à une organisation défaillante
En dehors des dépistages obligatoires, médecins et infirmiers s’investissent dans le suivi
des problèmes de santé des élèves, qu’il s’agisse, en lien avec les familles, de leur accès aux
soins et de l’aménagement de leurs conditions de scolarité ou de procéder à des consultations
médicales ou infirmières à la demande de l’équipe éducative, de l’élève ou de sa famille. En
cas de maladie transmissible survenant dans le cadre scolaire, ils organisent la réponse sanitaire.
Dans cet ensemble de missions, les dépistages obligatoires demeurent néanmoins des
moments-clés du parcours de santé de l’élève. Or, entre les années scolaires 2013 et 2018, le
taux de réalisation de la visite de la 6
e
année de l’enfant par les médecins scolaires, déterminante
au début des apprentissages scolaires, a chuté de 26 %, taux déjà historiquement bas, à 18 %.
Moins d’un enfant sur cinq en bénéficie alors qu’elle est en principe universelle. Ce taux moyen
recouvre de fortes disparités : sur les 99 départements pour lesquels un taux a pu être calculé,
34 sont en dessous de 10 % de réalisation tandis que 20 ont un taux supérieur à 30 %.
Le bilan infirmier de la 12
e
année a progressé mais n’est réalisé que pour 62 % de
l’ensemble des élèves et, pour ceux des établissements publics, qu’à hauteur de 78 %. La charge
moyenne annuelle par personnel infirmier est estimée à 83 bilans (106 avec l’enseignement
privé) ce qui constitue un niveau de performance à atteindre dix fois inférieur à la charge des
médecins pour la visite de la 6
e
année (803). La charge par département va de un à trois,
illustrant une allocation des ressources infirmières loin d’être optimale. Les départements
ruraux sont plutôt relativement bien dotés en raison du nombre plus élevé de collèges de petite
taille.
En l’état actuel de la législation, les visites médicales d’aptitude, préalables à l’affectation
à des travaux réglementés pour les élèves mineurs de l’enseignement professionnel, doivent
être toutes réalisées, quitte à mettre en place des solutions complémentaires ou palliatives par
des consultations médicales externes, ce que seuls quelques établissements ont fait. Elles ne
sont effectives que pour 80 % des lycéens concernés pour les seuls élèves du public et ne sont
systématiquement faites que dans 60 départements. Cette situation expose les élèves à de
potentiels accidents de formation et met en jeu la responsabilité des chefs d’établissement
d’enseignement professionnel. On compte du reste parmi les élèves des filières correspondantes
de l’enseignement professionnel beaucoup de jeunes en situation de fragilité sociale et familiale
pour lesquels l’accès aux soins est réduit, voire inexistant, la santé scolaire représentant alors
leur seule chance d’être examinés par un médecin.
Les difficultés persistantes de la santé scolaire, dotée de 1 260 M
en 2019, ne tiennent
pas à un manque de moyens budgétaires : sa masse salariale a cru de 12 % depuis 2013.
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SYNTHÈSE
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Un effort important a été consenti pour mettre à niveau les dotations en personnels
infirmiers : leurs effectifs ont augmenté de 40 % en 20 ans, alors que les effectifs scolaires sont
restés stables, et depuis 2013 de 4 %. Sur cette dernière période, la croissance des effectifs
d’assistants sociaux et de psychologues a été respectivement de 9 % et de 5,2 %, avec un effort
particulier pour les psychologues affectés au premier degré d’enseignement, soit 9 %.
Par ailleurs, le ministère dispose des emplois nécessaires pour recruter 30 %
supplémentaires de médecins de l’éducation nationale. Certes, pour rendre attractifs les emplois
de médecin, une revalorisation salariale significative est indispensable, et justifiée dès lors que
la médecine scolaire s’inscrirait dans un cadre de travail plus propice à l’organisation et au suivi
au suivi de l’activité. La Cour recommande de faire cet effort. Cette revalorisation pourrait être
facilitée à terme par un rapprochement du corps des médecins de l’éducation nationale avec
celui des médecins de santé publique.
En fait, la santé scolaire souffre des failles de son organisation et de son défaut de pilotage.
Preuve en est que la corrélation entre taux de réalisation des visites et taux d’encadrement
sanitaire est loin d’être systématique : les taux de réalisation de la visite de 6
e
année peuvent
être équivalents pour des départements dont la charge de dépistage par médecin va du simple
au double, voire au triple ; les taux de réalisation des bilans de la 12
e
année ne sont pas corrélés
aux ressources en personnels infirmiers.
Cette situation s’explique par l’opacité de l’exercice des activités et le cloisonnement des
personnels et des services, deux facteurs qui limitent fortement la conduite de l’action publique.
L’opacité d’un dispositif qui ne rend pas compte
et échappe à toute évaluation organisée
Les taux de réalisation des dépistages obligatoires proviennent d’une enquête directe de
la Cour auprès des services des rectorats et des DSDEN car le ministère ne dispose pas de cette
information, en raison d’un boycott des statistiques par certains personnels depuis plusieurs
années. Tout en la déplorant, l’administration laisse perdurer cette situation inadmissible. Les
responsables académiques et nationaux n’ont ainsi qu’une vision très vague de l’activité et de
la performance des services de santé scolaire.
Faute d’une information statistique fiable et continue, l’évaluation de l’activité, de
l’efficacité et de l’efficience de l’action des personnels de santé scolaire est impossible. Le
pilotage du dispositif est alors aveugle.
C’est pourquoi la Cour recommande la publication d’un rapport annuel sur la santé
scolaire et la mise en place d’un Conseil de la santé scolaire qui pourrait entre autres missions
prendre l’initiative de faire réaliser des évaluations externes.
Le cloisonnement des personnels consacré par le ministère en 2015
alors que leur collaboration est indispensable
L’approche sanitaire d’une population exige la collaboration articulée des acteurs de santé
concernés, il n’existe aucune raison qu’il en soit autrement pour la santé scolaire. Or ce n’est
pas ce principe généralement admis qui a prévalu dans le dispositif scolaire : les quatre métiers
qui y contribuent interviennent de façon segmentée et sont gérés en tuyaux d’orgue dans des
services séparés.
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COUR DES COMPTES
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Ce cloisonnement a été consacré comme un principe d’organisation de la politique de
dépistage : alors que la loi de 2013
3
avait pour objectif de faire progresser le service public de
santé scolaire, les modalités d’application retenues par l’arrêté du 3 novembre 2015
4
ont donné
un coup d’arrêt à la collaboration qui s’était instaurée
de facto
entre médecins scolaires et
personnels infirmiers. Depuis cet arrêté, la visite médicale de la 6
e
année relève du seul médecin
(sans mention du bilan infirmier, associé jusque-là à cette visite, qui permettait au médecin de
voir beaucoup plus d’élèves) tandis que les infirmiers sont chargés du bilan de la 12
e
année.
Ce choix, à contrecourant de l’évolution retenue pour tout le reste des dispositifs et
professions de santé, a contribué à la forte dégradation du service public. Ce cloisonnement
dommageable est l’aboutissement insatisfaisant d’une histoire administrative compliquée,
marquée par des rattachements alternés entre les ministères de l’éducation et de la santé qui ont
peiné à articuler leurs priorités. Il est surtout la conséquence d’une réponse excessive à des
pressions catégorielles faisant prévaloir des approches par métier, qui prises isolément peuvent
avoir leur justification, au détriment d’une vision globale des besoins de la santé scolaire.
Il est temps de dépasser ces obstacles pour respecter les objectifs donnés par la loi au
système éducatif.
Créer des services de santé scolaire pour unifier l’intervention des personnels
La Cour recommande de revenir à une vision globale de la gestion de la santé scolaire et
de ses personnels.
Il s’agirait de créer un service de santé scolaire dans chaque rectorat et chaque DSDEN,
en en confiant la direction à un inspecteur d’académie pour animer la collaboration des
différents métiers. De tels services doivent être l’occasion de mettre en place un management
global aujourd’hui absent mais aussi d’apporter aux professionnels de santé des conditions de
travail sensiblement améliorées : systèmes d’information performants permettant le travail
coordonné et sources de véritables gains de productivité, centres médico-scolaires à rénover en
renouant les liens distendus avec les collectivités territoriales, dotation de personnels de
secrétariat indispensables, équipement médical et bureautique facilitant le travail en itinérance.
La vocation de tels services est de revoir le partage et l’organisation des tâches entre
médecins de l’éducation nationale et personnels infirmiers, principalement afin de créer les
modalités de coopération pour la visite médicale de la 6
e
année et pour la visite médicale
préalable à l’affectation des élèves mineurs à des travaux réglementés.
Le travail en équipes pluri-professionnelles serait aussi l’occasion d’allouer plus de
moyens au premier degré, mal couvert par les services infirmiers et sociaux. Si ces personnels
peuvent être déjà présents dans les écoles, parfois à hauteur de 50 % de leur temps, cette
répartition reste sur le plan national très contrastée et aléatoire et n’est pas organisée selon un
plan de service à l’échelle départementale.
3
Loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013 d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la
République.
4
Arrêté du 3 novembre 2015 relatif à la périodicité et au contenu des visites médicales et de dépistage obligatoires
prévues à l'article L. 541-1 du code de l'éducation.
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SYNTHÈSE
11
Collaborer avec les agences régionales de santé et l’assurance maladie
pour utiliser des informations et moyens disponibles
Pour réaliser leurs objectifs, les services de santé scolaire doivent développer une
contractualisation systématique avec leurs partenaires : agences régionales de santé (ARS) et
leurs délégations départementales, assurance maladie, collectivités territoriales, associations de
prévention. En l’état actuel de la démographie médicale, il est illusoire de penser que les
objectifs nationaux de dépistages peuvent être atteints sans la construction de tels liens.
Ainsi une articulation accrue des dépistages obligatoires de la 6
e
année de l’enfant avec
les dépistages déjà réalisés par la médecine de ville ou hospitalière, pris en charge par
l’assurance maladie et retracés dans le carnet de santé de l’enfant, est indispensable. Cette
articulation permettrait de mieux utiliser le résultat des suivis médicaux déjà réalisés hors
l’école.
Les cadres nationaux propices à de telles collaborations existent d’ores et déjà.
Les ARS ont décliné, par des conventions académiques, la convention cadre de
partenariat en santé publique de 2016 ; il reste à traduire de manière systématique cette
collaboration dans des partenariats opérationnels entre les délégations départementales des
agences et les DSDEN, qui pourraient porter non seulement sur les actions collectives
d’éducation à la santé mais, selon les besoins locaux, sur le soutien aux dépistages et l’accès
aux soins dans les territoires où cet accès est restreint. La participation des services de
l'éducation nationale aux contrats locaux de santé devrait devenir systématique.
Une convention nationale entre l’éducation nationale et l’assurance maladie a été
récemment conclue : elle apporte un cadre d’une grande richesse d’actions de prévention pour
les écoles et les établissements scolaires. Les services de santé scolaire devraient avoir mission
d’explorer avec les caisses primaires (CPAM) toutes les possibilités de partenariats locaux qu’il
s’agisse de l’accès des élèves, avec la prise en charge par l’assurance maladie, à des examens
de dépistage ou à un parcours de soins.
Pour mener cette profonde révision de l’organisation de la santé scolaire, le ministère
comme ses services devront s’adosser à un Conseil de la santé scolaire qui apportera son appui
éthique, déontologique et scientifique pour assoir sur des bases solides la collaboration des
personnels et la coopération avec la médecine de ville.
Au terme de son enquête, les observations de la Cour la conduisent à formuler un
ensemble de recommandations solidaires, l’unification et l’identification du service de santé
scolaire dans des conditions propices à l’exercice les missions propres qui lui sont dévolues
constituant le prérequis d’une mobilisation effective et efficiente des partenariats de
l’écosystème plus large de la santé publique, qui s’impose.
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Recommandations
Unifier le service de médecine scolaire et revoir les méthodes de travail
1.
Dans les directions départementales des services de l’éducation nationale (DSDEN),
regrouper au sein d’un service de santé scolaire les médecins, les personnels infirmiers et
d’assistance sociale et les psychologues de l’éducation nationale. Créer un service de
pilotage dans les rectorats, sous la direction d’un inspecteur d’académie (MENJ).
2.
Créer des comités d’éducation à la santé et la citoyenneté (CESC) de bassin et supprimer le
caractère obligatoire des CESC d'établissement (MENJ).
3.
Dans le cadre de la réorganisation souhaitée par la Cour, revaloriser la rémunération des
médecins de l’éducation nationale (MENJ, MACP/Fonction publique).
4.
Transférer la charge budgétaire des psychologues de l’éducation nationale, inscrite aux
programmes 140 et 141 vers le programme 230, Vie de l’élève (MENJ).
5.
Développer et déployer dans les meilleurs délais les applications métier de la santé scolaire
et de DIAPASON (MENJ).
6.
Revoir le partage des tâches entre médecins de l’éducation nationale et personnels
infirmiers, notamment pour les visites médicales de la 6e année de l’enfant et des élèves
mineurs des filières de l’enseignement professionnel (MENJ, MSS).
7.
Doter le ministère d’un Conseil de la santé scolaire, publier un rapport annuel sur la santé
scolaire (MENJ).
Mobiliser les partenariats
8.
Articuler les dépistages obligatoires de la 6
e
année de l’enfant avec les dépistages réalisés
par la médecine de ville ou hospitalière retracés dans le carnet de santé de l’enfant et à
l’avenir dans son dossier médical partagé (DMP) (MENJ, MSS).
9.
Engager une concertation avec les collectivités territoriales pour la rénovation des centres
médico-scolaires, et les doter d’un socle de moyens en personnels de secrétariat (MENJ).
10. Contractualiser au niveau académique avec les institutions partenaires (collectivités
territoriales, ARS, assurance maladie) les modes de collaboration avec les services de santé
scolaire
(MENJ)
.
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Les médecins et les personnels de santé scolaire - mai 2020
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Introduction
Les médecins et les personnels de santé scolaire sont l’objet d’une attention soutenue des
pouvoirs publics, en raison des difficultés chroniques de la médecine scolaire, analysées dans
de nombreux rapports publics. La Cour des comptes a traité la situation de ces personnels en
2011 dans une contribution à l’évaluation de la médecine scolaire demandée par le Président de
l’Assemblée nationale pour le Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques.
Récemment, une circulaire du Premier ministre
5
mentionne la santé scolaire au nombre
des sujets potentiels de décentralisation, sur lesquels les préfets doivent consulter les
collectivités territoriales.
Les missions de l’éducation nationale en matière de santé des douze millions d’élèves
sont axées sur la prévention et le repérage des troubles susceptibles d’entraver les
apprentissages et des actions collectives d’éducation à la santé et de promotion de la santé. Ces
missions, exercées à titre principal par les médecins et les personnels infirmiers de l’éducation
nationale, ne pourraient être menées à bien sans l’intervention des personnels d’assistance
sociale, indispensable pour assurer, en liaison avec les familles, le traitement des difficultés
repérées à l’école, ni sans celle des psychologues de l’éducation nationale, qui, surtout dans le
premier degré, participent au diagnostic des besoins éducatifs particuliers des enfants atteints
de maladies chroniques, porteurs de handicap ou confrontés à des troubles des apprentissages.
Le ministère de l’éducation a consacré à la santé scolaire des moyens en progression
durant les exercices étudiés (2013-2018). L’ensemble considéré représente aujourd’hui plus de
20 300 équivalents temps plein (ETP), avec une évolution positive sur la période (+4 %),
sensible pour les infirmiers (+4 %, près de 8 000 ETP), mais surtout pour les assistants de
service social (+9 %, près de 3 000 ETP) et les psychologues du 1
er
degré (+9 %, environ
3 900 ETP), tandis que, pour ceux du second degré, l’évolution positive a été plus modérée
(plus de 4 600 ETP, +2 %). En revanche, la décrue a été forte (-15 %) pour les médecins, qui
ne représentent plus que 966 ETP, malgré les postes ouverts, faute de parvenir à les pourvoir
par le concours annuel. La dépense de l’État pour la santé scolaire en 2018 a été de 1 253 M
.
La configuration actuelle de la santé scolaire résulte d’une histoire compliquée
6
. Mise en
place progressivement au cours du XIX
e
siècle, structurée à la Libération avec la création d’un
service national d’hygiène scolaire et universitaire sous la responsabilité du ministère de
l’éducation nationale, elle est ensuite rattachée au ministère de la santé (1964-1984), puis à
nouveau au ministère de l’éducation mais avec une scission des personnels : les médecins
scolaires restent rattachés au ministère de la santé tandis que les infirmières finissent par relever
de l’éducation nationale en 1985. Aussi les pratiques infirmières se sont-elles autonomisées par
5
Circulaire du Premier ministre du 15 janvier 2020
Organisation de la concertation sur la répartition et l’exercice
des compétences des collectivités territoriales
, qui demande aux préfets d’explorer avec les collectivités des pistes
de décentralisation concernant diverses politiques publiques. La médecine scolaire, objet d’une fiche spécifique,
constitue, selon cette circulaire, une demande de l’Assemblée des départements de France (ADF), qui revendique
un « bloc de compétence en matière de santé infantile ».
6
Cf. Rappel historique en annexe n° 2.
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16
rapport au corps médical alimentant encore aujourd’hui le refus d’une partie des personnels
infirmiers d’une collaboration organisée avec les médecins dans un service unifié de santé
scolaire. Un « service de promotion de la santé en faveur des élèves » (SPSFE) a pourtant existé
pendant dix ans, de 1991 (date de la création du corps des médecins de l’éducation nationale,
que l’on a alors séparés du corps des médecins de santé publique) à 2001, date à laquelle, sous
la pression des organisations syndicales, il sera supprimé.
Depuis, au cours des vingt dernières années, les missions des personnels de santé scolaire
ont été fréquemment redéfinies par le législateur, et beaucoup alourdies
7
. Elles ont notamment
été modifiées par la loi du 8 juillet 2013 de refondation de l’école de la République et, plus
récemment, par la loi du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance, qui charge les
professionnels de santé de l’éducation nationale des visites médicales de la 4
e
année de l’enfant
lorsque les services de PMI n’ont pas pu les réaliser. La question de l’articulation entre PMI et
santé scolaire se pose sous un jour nouveau en raison de l’abaissement à 3 ans de l’âge de la
scolarité obligatoire
8
.
Confiées à l’État, les missions de santé scolaire sont cependant dans quelques cas
exercées, par délégation, par un service municipal de santé scolaire, héritier des services
municipaux d’hygiène créés sous la III
ème
République, 11 villes
9
ayant souhaité maintenir leur
action en faveur de la santé des enfants et des adolescents.
Comme la Cour l’a déjà relevé en 2011, la médecine scolaire occupe dans notre pays une
place singulière au sein de l’école
: « le choix qui a été fait en France d’une médecine relevant
de l’État et intégrée au ministère de l’éducation nationale ne se retrouve pas dans d’autres
pays »
même si, au Royaume-Uni, où la santé scolaire relève de l’autorité locale, le ministère
de la santé recommande d’avoir au moins une infirmière scolaire pour chaque établissement
secondaire et les écoles qui en dépendent. Le choix français repose sur l’idée que cette totale
intégration au sein de l’école garantit que l’institution et les communautés éducatives prennent
en compte les problèmes de santé des élèves.
7
L’article L. 541-1 du code de l’éducation, principal fondement juridique de la santé scolaire (qui prescrit
notamment la visite médicale obligatoire de la 6
e
année, à l’entrée dans les apprentissages), a connu depuis
juin 2000 six versions, de plus en plus étoffées, dont on trouvera en annexe l’historique détaillé, et qui résultent
tantôt de lois de santé ou sociales (2002, 2016), ou de protection de l’enfance (2007), ou de lois scolaires
(2013, 2019).
8
L’article 13 de cette loi adapte les missions de la santé scolaire à l’abaissement à trois ans de l’âge de la scolarité
obligatoire : la visite médicale de PMI entre 3 et 4 ans reste confiée aux services de PMI, bien qu’organisée à
l’école, mais «
lorsque le service départemental de protection maternelle et infantile n’est pas en mesure de la
réaliser, la visite est effectuée par les professionnels de santé de l’éducation nationale
».
9
Antibes, Bordeaux, Clermont-Ferrand, Grenoble, Lyon, Nantes, Paris, Rennes, Strasbourg, Vénissieux,
Villeurbanne.
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INTRODUCTION
17
La place de la médecine scolaire au sein de l’école : la singularité de la France
L’intégration des médecins et des infirmiers dans les structures scolaires n’est pas systématique
en Europe, les services de santé en direction des jeunes leur étant extérieurs en Irlande, en Italie ou
au Portugal. La tutelle de la médecine scolaire est généralement exercée par le ministère de la santé,
comme en Allemagne, en Espagne, au Portugal, au Royaume-Uni ou en Irlande. En outre, la médecine
scolaire est de la compétence des municipalités au Danemark et en Pologne, et des cantons en Suisse.
De même, des responsabilités importantes sont exercées par les Länder allemands.
Ce dispositif doit répondre à des attentes croissantes de la société. La politique de santé
publique s’est engagée résolument vers la prévention, domaine dans lequel notre pays est en
retard. L’école a aujourd’hui une ambition nouvelle quant à l’accueil en classe ou école
« ordinaire » des enfants à besoins éducatifs particuliers porteurs d’un handicap, d’une maladie
chronique, ou confrontés à un trouble spécifique des apprentissages ; cette école inclusive doit
pouvoir s’appuyer sur la performance de ses services de santé scolaire, afin d’assurer le
dépistage et le suivi de ces enfants, de les accompagner dans leur scolarité, et d’apporter
également appui, conseil et accompagnement aux autres personnels, notamment enseignants et
chefs d’établissement. Les préoccupations accrues quant à la santé des enfants et des jeunes
(surpoids, obésité, addictions, notamment aux écrans, mal-être à l’école, troubles du
comportement, conduites suicidaires) et au climat scolaire (harcèlement, violences,
incivilités…) accroissent les sollicitations des services de santé.
Le présent rapport dresse d’abord le panorama des difficultés persistantes de la santé
scolaire : le premier chapitre examine les missions des personnels ; il analyse la pénurie de
médecins scolaires contrastant avec l’amélioration du recrutement des personnels infirmiers ; il
présente en contrepoint la performance médiocre des services soulignant la grande diversité des
situations et les inégalités qui en résultent ainsi que l’opacité d’un dispositif non évalué.
Le deuxième chapitre s’attache aux causes de ces difficultés. Si le ministère a pris, à la
suite du précédent rapport de la Cour, des dispositions pour tenter de remédier aux problèmes
soulevés, elles ont été inopérantes en raison d’un pilotage déficient : la gestion des personnels
se fait en tuyaux d’orgue, ce qui freine toute optimisation de l’emploi des moyens et le pilotage
par le ministère est distendu au niveau central ou en académies.
Dans son troisième chapitre, le rapport invite à revoir en profondeur l’organisation des
services et des tâches et à développer les collaborations en faveur de la santé des élèves avec
d’autres acteurs pour assurer l’effectivité des missions de santé scolaire.
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Chapitre I
Les difficultés persistantes de la santé scolaire,
une performance très inférieure aux objectifs
Pour éclairer la situation de la santé scolaire durant les années étudiées (2013-2018), la
première partie analysera ses missions qui ont sensiblement évolué en cours de période,
notamment le partage des tâches entre médecins et personnels infirmiers.
La deuxième partie rendra compte des moyens engagés par l’État pour la santé scolaire :
évolution budgétaire et tableau des effectifs des personnels disponibles au niveau académiques
et départemental.
Enfin la troisième partie appréciera la performance de la santé scolaire sous l’angle des
deux grandes missions : dépistages et visites médicales obligatoires d’une part, promotion et
éducation à la santé d’autre part.
I - Un partage des missions des professionnels de santé scolaire
source de difficultés d’application
La loi du 8 juillet 2013 de refondation de l’école de la République marque une étape
importante car elle recentre les objectifs et les missions des personnels de santé scolaire après
que la loi du 5 mars 2007 de protection de l’enfance avait rajouté, à celle de la 6
e
année, des
visites médicales obligatoires au cours des 9
e
, 12
e
et 15
e
années. Ces visites devaient s’appliquer
à « tous les enfants » et comporter « un bilan de leur état de santé physique et psychologique ».
Cette loi avait introduit pour les parents la faculté de fournir un certificat médical attestant que
ce bilan « a été assuré par un professionnel de santé de leur choix », ce qui leur permettait de
recourir à un médecin libéral ou hospitalier.
Ce texte ambitieux et exigeant prévoyait une montée en charge progressive : dans un délai
de trois ans après sa publication, les visites obligatoires devaient être assurées pour la moitié au
moins des classes d’âge concernées et pour la totalité dans un délai de six ans. Tel n’a pas été
le cas.
La loi du 8 juillet 2013 reformule les objectifs de la santé scolaire : réussite scolaire et
réduction des inégalités en matière de santé. Elle ne mentionne plus les visites médicales de la
9
e
, 12
e
et 15
e
années mais seulement celle de la 6
e
année, renvoyant comme tous les textes
antérieurs (y compris la loi de 2007) à « des examens médicaux périodiques effectués pendant
tout le cours de la scolarité ». La mission du service social n’est désormais mentionnée que pour
le second degré. Les modalités d’application seront arrêtées, conjointement, par les ministres
de l’éducation et de la santé, seulement deux ans plus tard, en novembre 2015.
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20
À défaut de textes d’application, les missions de santé scolaire restent définies par un
ensemble de circulaires qui s’échelonnent de 2001 à 2014. Si les missions des médecins et des
personnels infirmiers sont très précisément définies, leurs intersections sont aussi explicitement
mentionnées pour l’organisation des dépistages obligatoires. Il en est ainsi de la contribution
des personnels infirmiers à la visite médicale obligatoire entre 5 et 6 ans par « un dépistage
infirmier » mais également de l’intervention des médecins aux collèges pour le bilan de santé
de la 12
e
année.
Les missions des médecins avant 2015
Pour l'ensemble des élèves, organiser la détection précoce des difficultés lors de la visite
médicale obligatoire entre 5 et 6 ans ; réaliser un bilan de santé des élèves du cycle 3 en zone
d'éducation prioritaire, réaliser un bilan de santé des élèves en classe de 3ème au collège ;
développer
une dynamique d'éducation à la santé : mettre en place des actions permettant d'améliorer la qualité
de vie des élèves en matière d'hygiène, de sécurité et d'ergonomie ; des actions spécifiques visent à
suivre les élèves signalés par les membres de l'équipe éducative, les infirmiers, les assistants de
service social, les parents ou les élèves eux-mêmes ; suivre les élèves des établissements de certaines
zones rurales, des zones d'éducation prioritaire ou en établissements sensibles et des établissements
du plan de prévention de la violence ; mettre en place des dispositifs adaptés en cas d'événement grave
survenant dans la communauté scolaire ; agir en cas de maladies transmissibles survenues en milieu
scolaire ; intervenir en urgence auprès d'enfants ou d'adolescents en danger, victimes de maltraitance
ou de violences sexuelles ; contribuer à l'intégration scolaire des enfants et adolescents atteints de
handicap ; aider à la scolarisation des enfants et adolescents atteints de troubles de la santé évoluant
sur une longue période ; suivre les élèves des établissements d'enseignement technique et
professionnel.
Les missions des infirmi
er
s avant 2015
Actions en direction de l'ensemble des élèves : accueillir et accompagner les élèves ; organiser
les urgences et les soins ; contribuer, par un dépistage infirmier, à la visite médicale obligatoire entre
5 et 6 ans ; organiser un suivi infirmier ; développer une dynamique d’éducation à la santé : mettre
en place des actions permettant d'améliorer la qualité de vie des élèves en matière d’hygiène, de
sécurité et d'ergonomie ; actions spécifiques : organiser et réaliser le suivi de l'état de santé des
élèves ; suivre les élèves signalés par les membres de l’équipe éducative ; suivre les élèves des
établissements de certaines zones rurales, des zones d'éducation prioritaires, des établissements
sensibles et des établissements relevant du plan de lutte contre la violence en milieu scolaire ; mettre
en place des dispositifs adaptés en cas d'événements graves survenant dans la communauté scolaire ;
agir en cas de maladies transmissibles survenues en milieu scolaire ; intervenir en urgence auprès
d'enfants ou d'adolescents en danger (victimes de maltraitance ou de violences sexuelles) ; contribuer
à l'intégration scolaire des enfants et adolescents atteints de handicap ; aider à la scolarisation des
enfants et adolescents atteints de troubles de la santé évoluant sur une longue période.
L’arrêté interministériel du 3 novembre 2015 pris en application de la loi de 2013 introduit
une révision qui va s’avérer lourde de conséquences.
Relatif à la périodicité et au contenu des visites médicales et de dépistage obligatoires, il
bouleverse l’organisation des visites de dépistage : la visite obligatoire de la 6
e
année est faite
par le seul médecin, la collaboration de l’infirmier qui réalisait jusqu’alors un dépistage
infirmier, n’est plus prévue ; Le dépistage de la 12
e
année est réalisé par le seul personnel
infirmier. Les circulaires relatives aux missions des médecins et infirmiers sont alors revues en
novembre 2015.
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LES DIFFICULTÉS PERSISTANTES DE LA SANTÉ SCOLAIRE, UNE PERFORMANCE TRÈS INFÉRIEURE AUX
OBJECTIFS
21
Dans le cadre du suivi individuel des élèves, le
médecin
réalise le bilan de la 6
e
année,
ainsi que la visite médicale préalable à l’affectation de l’élève mineur aux travaux réglementés
(enseignement professionnel), il examine également les cas des élèves à besoins éducatifs
particuliers, des enfants et des adolescents atteints de troubles de la santé, des élèves en situation
de handicap, et des élèves présentant des troubles des apprentissages. Il réalise d’autres
examens individuels à la demande (de l’équipe éducative, des parents, ou de l’élève lui-même)
et participe à la protection de l’enfance. Le médecin contribue à la formation des personnels,
notamment en école supérieure du professorat et de l’éducation (ESPE) et participe au recueil
de données de santé. Il intervient en cas de maladies transmissibles ou d’événements graves
dans la communauté scolaire.
Les missions des
personnels infirmiers
sont reformulées : la notion de consultation
infirmière spécifique apparaît, il s’agit de l’accueil à l’infirmerie de tout élève qui le demande,
y compris pour des problèmes relationnels ou psychologiques, les personnels devant être formés
pour jouer « un rôle d’observation, de dépistage et de relais dans le domaine de la santé
mentale ».
Les personnels infirmiers mettent ainsi en place des consultations individuelles en
éducation à la santé (éducation à la sexualité, contraception, conduites addictives, conduites à
risque, éducation nutritionnelle, sommeil, hygiène de vie), fournissant à l’élève « des éléments
de réflexion et d’information afin de renforcer ses capacités à prendre des décisions concernant
sa santé » et de favoriser son autonomie. Les personnels infirmiers de l’éducation nationale sont
habilités à délivrer la contraception d’urgence, à renouveler les prescriptions datant de moins
d’un an de contraceptifs oraux, et peuvent prescrire des substituts nicotiniques.
Les mêmes réalisent les dépistages obligatoires, c’est-à-dire celui de la 12
e
année. Ils
assurent également le suivi des dépistages, dans le cadre d’une collaboration avec les médecins,
les enseignants, conseillers principaux d'éducation (CPE,) assistants sociaux, conseillers
d’orientation-psychologues, avec les familles et les autres professionnels de santé. Il leur est
demandé une mobilisation particulière pour le suivi des élèves des établissements en zone rurale
et en éducation prioritaire, tout comme pour le suivi des problèmes de santé complexes ou
chroniques et des élèves à besoins particuliers.
En matière de promotion de la santé, la définition des missions des médecins et personnels
infirmiers est proche : éducation à la santé, formation des autres professionnels, observation et
surveillance épidémiologique.
L’inflexion très nette donnée en 2015 est due à des causes multiples : la priorité croissante
donnée à la prévention et à la promotion de la santé ; la difficulté de mettre en
œ
uvre les
dépistages systématiques par les médecins scolaires aux quatre âges prescrits par la loi de
protection de l’enfance de 2007 dans un contexte démographique très tendu ; la pression des
personnels infirmiers de l’éducation nationale pour faire reconnaître les apports spécifiques de
leur exercice professionnel.
Ainsi la revendication persistante, issue d’un rattachement ancien à l’éducation nationale
et ancré dans les établissements scolaires, de l’autonomie des personnels infirmiers par rapport
au médecin, a conduit à mettre fin à la collaboration, jusque-là en vigueur, entre médecin et
infirmier pour la visite de la 6
e
année et à instaurer un bilan infirmier autonome à la 12
e
année
de l’élève. La crainte d’une dépendance des personnels infirmiers envers les médecins a été
renforcée par celle de supporter une charge de travail comportant des responsabilités auxquelles
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22
ces personnels n’étaient pas préparés en raison d’un nombre de plus en plus insuffisant de
médecins.
L’analyse de la performance des services de santé scolaire présentée ci-dessous montre
que le service public a souffert de ces évolutions. Le choix opéré quant au partage des tâches
entre personnels infirmiers et médecins place l’éducation nationale à contre-courant des
évolutions récentes du système de santé : ainsi, en particulier, la loi du 21 juillet 2009 portant
réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (dite HPST) permet de
réarticuler les compétences des professionnels de santé pour optimiser la prise en charge des
patients
10
.
Loin de travailler dans le même esprit, l’éducation nationale s’est privée d’une démarche
innovante qui aurait pu l’aider à relever le défi de la prise en charge de 12 millions d’élèves
11
avec 966 ETP de médecins et 7 889 ETP d’infirmiers
12
.
II - Un effort budgétaire soutenu,
un déficit de médecins scolaires
A - Une masse salariale en progression sans unité budgétaire
1 - Une augmentation des effectifs et des crédits
L’essentiel de la dépense de santé scolaire concerne la masse salariale des personnels.
Leurs effectifs ont évolué favorablement depuis 2013, sauf pour les médecins, pour atteindre
plus de 20 300 ETP, avec une évolution positive pour les infirmiers de 4 % et pour les assistants
de service social et les psychologues du 1
er
degré de 9 %. Si la décrue des effectifs de médecins
a été forte (15 %), elle ne résulte pas d’une dotation insuffisante de postes mais de la difficulté
à les pourvoir.
10
L’article 51 de la loi HPST du 21 juillet 2009 permet la mise en place, à titre dérogatoire et à l’initiative des
professionnels sur le terrain (inscrits à l’art. L. 4011-1 du Code de la santé publique), de transferts d’actes ou
d’activités de soins et de réorganisation des modes d’intervention auprès des patients.
Ces initiatives locales prennent la forme d’un protocole de coopération transmis à l’ARS. Celle-ci vérifie la
cohérence du projet avec le besoin de santé, avant de le soumettre pour validation à la HAS. Le protocole de
coopération est un document décrivant :
● les activités ou les actes de soins transférés d’un professionnel de santé à un autre, de titre et de formation
différents ;
● et la façon dont les professionnels de santé vont réorganiser leur mode d’intervention auprès du patient dans le
but d’optimiser sa prise en charge. Source : HAS.
Tous les professionnels de santé, quels que soient le secteur et le cadre d'exercice (salarié public ou privé, libéral,
établissements de santé, centres de santé, cabinet libéral, maison de santé pluri professionnelle…), peuvent
s'engager, à leur initiative, dans une démarche de coopération si celle-ci est de nature à améliorer l'organisation ou
la prise en charge des soins dans un territoire de santé.
11
12 395 266 élèves dans le 1
er
et 2
nd
degrés public et privé sous contrat à la rentrée 2018 (source RERS 2019).
12
Effectifs au 30 novembre 2018. Source DEPP.
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LES DIFFICULTÉS PERSISTANTES DE LA SANTÉ SCOLAIRE, UNE PERFORMANCE TRÈS INFÉRIEURE AUX
OBJECTIFS
23
Tableau n° 1 : évolution des postes occupés (en ETP)
13
Catégorie de personnels
30/11/2013
30/11/2018
Variation
Personnels service social Programme 230
2 695
2 941
9 %
Infirmiers Programme 230
7 550
7 889
4 %
Médecins Programme 230
1 143
966
-15 %
Psychologues éducation nationale 1erD Programme 140
3 573
3 893
9 %
Psychologues éducation nationale 2ndD Programme 141
4 542
4 646
2 %
Total général
19 502
20 336
4 %
Source : Calcul Cour des comptes d’après données transmises par la direction de l’évaluation, de la prospective et de
la performance (DEPP)
Ces vingt dernières années, le nombre de médecins a diminué de 7 %. Cette évolution
globale couvre deux périodes distinctes : après une augmentation des effectifs de 13 % entre
1999 et 2011 (période au cours de laquelle les effectifs d’élèves diminuaient), le nombre de
médecins chute de 18 % entre 2011 et 2018 (alors que les effectifs d’élèves augmentent). Aussi
le nombre moyen d’élèves à la charge de chaque médecin s’est nettement accru ces dernières
années.
Au total la masse salariale a cru de plus de 12% depuis 2013, elle s’élève en 2019 à
1 250 M
. Aux dépenses de personnel doivent être ajoutés des frais de déplacement et des
transferts de crédits à huit villes auxquelles sont déléguées des missions de santé scolaire,
portant le coût total à environ 1 260 M
en 2019
14
.
2 - Un cadre budgétaire à simplifier
Les crédits des personnels de santé scolaire sont répartis entre plusieurs programmes
budgétaires de la mission interministérielle enseignement scolaire : ceux qui concernent les
médecins, personnels infirmiers et assistants de service social relèvent du programme
budgétaire 230 (Vie de l’élève) alors que ceux des psychologues de l’éducation nationale sont
inscrits dans des programmes finançant les deux degrés d’enseignement : programmes
budgétaires 140 (Enseignement scolaire public du premier degré) et 141 (Enseignement scolaire
public du second degré).
Il n’est pas logique que la maquette budgétaire de la MIES sépare les psychologues de
l’éducation nationale des trois autres métiers de la santé scolaire. Cette présentation est liée à
l’histoire de ces personnels qui par le passé et pour le 1
e
degré ont été beaucoup recrutés au sein
13
Au 30 novembre 2019, le total des postes occupés s’établit à 20 163 ETP (+3 % par rapport aux effectifs
constatés au 30 novembre 2013), lesquels se déclinent de la manière suivante par catégorie de personnels : 2 917
ETP pour les personnels de service social (+8 %), 7 867 ETP pour les infirmiers (+4 %), 932 ETP pour les
médecins (- 18 %), 3 925 ETP pour les psychologues du 1
er
degré (+10 %), 4 522 ETP pour les psychologues du
2
nd
degré (-0,4 %) (source : DEPP).
14
La consommation 2018 des actions 2 et 4 est de 757 M
(+11 % par rapport à 2013), soit les 750 M
de T2
évoqués plus haut auxquels s’ajoutent 6,5 M
de hors T2 (frais de déplacement et subvention villes délégataires).
En intégrant les PsyEN, la consommation 2018 des crédits budgétaires s’élève à 1 253 M
, soit 1 245 M
de T2
auxquels s’ajoutent 8,3 M
de hors T2.
Cette estimation 2018 n’intègre pas les frais de déplacement des psychologues du 1
er
degré (le ministère n’ayant
pas été en mesure de les identifier).
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24
des corps enseignants et formés à la psychologie lors de reconversion professionnelle.
Aujourd’hui, les psychologues du 1
er
et du 2
nd
degrés sont regroupés dans le même corps
(PsyEN), ils sont recrutés parmi les titulaires d’un master de psychologie, leur métier est
essentiel pour repérer et caractériser les troubles des apprentissages, mettre en place un suivi
adapté selon les besoins de l’élève. Aussi il convient de réunir les crédits les concernant avec
ceux qui concourent à supporter les autres personnels de santé scolaire au sein du programme
Vie de l’élève
.
B - Une croissance des effectifs infirmiers plus rapide
que la population scolarisée
L’évolution des effectifs de personnels de santé scolaire est à mettre en perspective sur
une longue période montrant qu’au cours des vingt dernières années, un effort considérable de
recrutement de personnels infirmiers a été accompli.
Tableau n° 2 : évolution comparée des effectifs d’élèves, de médecins et d’infirmiers
(en personnes physiques)
15
1998-1999
2010-2011
2018-2019
Évolution
1998-2018
Nombre de médecins
1 307
1 478
1 214
-7 %
dont médecins conseillers techniques
111
112
111
0 %
Nombre d'infirmiers
6 250
8 429
8 712
39,4 %
dont infirmiers conseillers techniques
ND
ND
121
Effectifs d'élèves à la rentrée
12 295 596
12 017 495
12 295 641
0 %
dont 1
er
degré public
5 709 947
5 770 941
5 755 682
1 %
dont 1
er
degré privé
896 806
893 338
939 574
5 %
dont 2
nd
degré public
4 549 977
4 213 928
4 402 162
-3 %
dont 2
nd
degré privé
1 138 866
1 139 288
1 198 223
5 %
Champ : France métropolitaine + DOM (hors Mayotte)
Source : d’après données transmises par la DEPP pour l’année 2018-2019, sauf effectifs des conseillers techniques (réponses
des académies)
Rapport de la Cour des comptes de 2011 (données DEPP) pour les années 1998-1999 et 2010-2011
Alors qu’en 2018, l’effectif global d’élèves est quasi-identique à celui de 1998, le nombre
d’infirmiers a augmenté de presque 40 % au cours de ces 20 dernières années (la progression
est particulièrement sensible dans les années 2000). La croissance des effectifs d’infirmiers se
conjugue avec un recours accru aux personnels contractuels (10 % du total des effectifs en 2018
contre 8,4 % en 2013). Dès lors, le nombre d’élèves moyen par ETP d’infirmier a diminué : il
s’établit à 1 300 en 2018 contre 1 348 en 2013.
15
Pour les effectifs de médecins et de d’infirmiers, les dates d’observation sont les suivantes : janvier 1999
(année 1998-1999), janvier 2011 (année 2010-2011), et novembre 2018 (année 2018-2019).
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LES DIFFICULTÉS PERSISTANTES DE LA SANTÉ SCOLAIRE, UNE PERFORMANCE TRÈS INFÉRIEURE AUX
OBJECTIFS
25
Le taux d’encadrement s’est amélioré dans les trois quarts des départements
16
mais avec
de fortes disparités territoriales
.
Les moyennes académiques varient de moins d’un millier
d’élèves par infirmier dans les académies de Limoges (849), de Martinique (874) et de
Clermont-Ferrand (917) à plus de 1 500 dans les académies de Créteil (1 522), de Nice (1 582)
et de Versailles (1 666), le maximum étant à Mayotte avec une moyenne de 2 095 élèves par
ETP d’infirmier. Les variations peuvent être significatives au sein d’une même académie.
Les départements ruraux sont dans l’ensemble mieux dotés en personnels infirmiers. Sur
les 20 départements qui comptent moins de 1 000 élèves par infirmier, 13 figurent parmi les
20 départements dont la population scolaire est la plus faible
17
. En effet, les barèmes
d’affectation des académies tendent à pourvoir chaque EPLE d’un poste infirmier, ce qui
avantage les départements ruraux disposant souvent de collèges de petite taille.
A contrario
, le
ratio est moins favorable pour les départements à forte densité de population. Sur les
20 départements pour lesquels le ratio élèves par infirmier est le moins favorable, 13 figurent
parmi les départements dont la population scolarisée est la plus élevée.
Graphique n° 1 : nombre d’élèves par ETP d’infirmier : les 5 taux les plus favorables
et les 5 taux les plus dégradés au 30 novembre 2018
Source : Calcul Cour des comptes d’après données de la DEPP
Enfin la charge moyenne des dépistage de la 12
e
année (enseignement public) par
infirmier est de 83 fin 2018 (106 en intégrant les élèves du privé)
18
, très inférieure à celle des
médecins pour la visite de la 6
e
année (803 en moyenne par médecin).
16
Le détail des taux d’encadrement par département est retracé en annexe n° 9.
17
Selon les données du RERS 2019 (effectifs à la rentrée 2018).
18
Si l’on ne retient que les personnels affectés dans les collèges, cette charge passe à 134 élèves du public par
infirmier (170 en intégrant les élèves du privé).
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26
C - Des effectifs de médecins en nette diminution,
une forte dégradation de l’encadrement
1 - Une dégradation du taux d’encadrement de 20 % en cinq ans
Le nombre de postes occupés représentait 966 ETP fin 2018, soit 15,5 % de moins qu’en
2013 (1 143 ETP). Entre ces deux dates, le nombre d’élèves à la charge des médecins de
l’éducation nationale a légèrement augmenté (+ 1,4 %). Aussi le nombre d’élèves (1
er
et
2
nd
degrés du public et du privé) par ETP de médecin de l’éducation nationale en poste
(hors vacataires)
19
était de 12 572, soit 20 % de plus qu’en 2013 (10 480 élèves)
20
. Le taux
d’encadrement s’est dégradé dans 75 départements
,
21
au-delà de 40 % dans 31 départements
22
.
À l’inverse, il s’améliore dans 26 départements.
Face au nombre très important d’élèves à prendre en charge, les médecins de l’éducation
nationale exercent principalement au bénéfice des élèves de l’enseignement public. Cependant,
même en ne prenant en compte que l’enseignement public, le nombre d’élèves par ETP de
médecins demeure supérieur à 10 000.
La charge moyenne de visites (enseignement public et privé) par médecin serait
théoriquement de 803 au 30 novembre 2018 (688 en 2013, soit une progression de 17 % en
l’espace de cinq ans). Comme pour les infirmiers, le taux moyen d’encadrement national
recouvre de très fortes disparités entre les départements
.
La maille académique ne permet pas
d’appréhender la diversité des situations territoriales, très variables d’un département à l’autre.
Sur les 99 départements pour lesquels un taux a pu être calculé
23
, 6 ont un nombre d’élèves par
ETP de médecin inférieur à 8 000 tandis que 19 ont un taux supérieur à 20 000
24
.
19
Il s’agit du taux d’encadrement en médecins de secteur relevant du programme budgétaire 230.
20
Si l’on tient compte des médecins vacataires, le taux d’encadrement est, bien entendu, légèrement plus favorable,
mais la dégradation est également de 20 % (11 865 élèves par ETP en 2018, contre 9 913 élèves par ETP en 2013).
21
Le détail des taux d’encadrement (hors médecins vacataires) est retracé en annexe n
10.
22
Compte non tenu des départements de Mayotte et de l’Indre. Le calcul d’un taux d’encadrement au
30 novembre 2018 est, en effet, impossible pour ces deux départements, puisqu’ils ne comptaient aucun médecin
de secteur à cette date.
23
Calcul impossible pour Mayotte et l’Indre, voir note précédente.
24
Cf. tableau n° 11 de l’annexe n° 10.
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LES DIFFICULTÉS PERSISTANTES DE LA SANTÉ SCOLAIRE, UNE PERFORMANCE TRÈS INFÉRIEURE AUX
OBJECTIFS
27
Graphique n° 2 : nombre d’élèves par ETP de médecins de l’éducation nationale :
les 5 taux les plus favorables et les 5 taux les plus dégradés
Source : Calcul Cour des comptes d’après données de la DEPP
2 - Des postes de médecins titulaires occupés à 57%, en recul de 14 points
Le taux d’occupation des postes de médecins de l’éducation nationale recule
25
.
Hors Mayotte
26
, le taux d’occupation des postes de médecins était en moyenne de 69 % soit
14 points de moins par rapport à 2013 (83 %).
Le pourcentage de postes occupés diminue dans 28 académies sur 30. Il progresse
uniquement dans deux académies : Paris (+ 7 points avec 100 % des postes occupés en 2018)
et surtout la Guadeloupe (+ 20 %). À l’inverse, la chute est particulièrement nette dans
l’académie de Limoges (- 43 points) et, à un degré moindre, dans les académies de Lyon
(- 28 points), Nice (- 27 points), Besançon, Corse et Créteil (- 26 points pour ces trois dernières
académies).
Les médecins contractuels (hors vacataires) représentent 17,4 % du total des effectifs, soit
6,3 points de plus qu’en 2013 (11 %). La part des contractuels est particulièrement élevée en
Guyane (80 % au 30 novembre 2018), à Paris (43 %), en Corse (38 %), et dans les académies
de Créteil (31 %) et de Rouen (30 %).
Pour les seuls titulaires, le taux d’occupation des postes s’élève seulement à 57 %.
25
Rapport entre le nombre de postes (exprimés en ETP) occupés au 30 novembre de l’année n (données transmises
par la DEPP) et le nombre de postes de médecins délégués à l’académie pour l’année n (source : réponse de
l’académie au questionnaire de la Cour). Le taux d’occupation des postes de médecins par académie est retracé en
annexe n° 7.
26
Mayotte n’a pas répondu au questionnaire de la Cour.
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28
3 - Des difficultés à renouveler une population vieillissante
L’âge moyen des titulaires est de 55 ans et 82 % des effectifs sont âgés de plus de 50 ans
(76,8 % en 2013). Selon les données du ministère, 294 médecins sont partis à la retraite entre
2013 et 2018 et les projections évaluent les départs à 128 entre 2019 et 2021.
Les difficultés de recrutement de la médecine scolaire tiennent pour une part à la
démographie médicale en général.
Tableau n° 3 : recrutements des médecins par concours depuis 2013
(hors recrutements réservés)
Année
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
Nb postes offerts
47
47
47
56
150
56
56
Nb postes pourvus
21
18
21
31
18
30
24
% couverture
45 %
38 %
45 %
55 %
12 %
54 %
43 %
Source : MENJ (DGRH) pour les années 2013 à 2018 ; rapport de jury de concours de médecin de l’éducation nationale pour
2019
Les médecins scolaires se recrutent principalement dans le vivier des médecins
généralistes ou de santé publique, et, dans une moindre mesure, parmi les pédiatres. Selon le
ministère des solidarités et de la santé, le nombre global de médecins évolue positivement
(10 000 médecins de plus depuis 2012) mais avec d’importantes perspectives de départs en
retraite car les générations actuellement proches de la retraite sont issues des formations des
années 1970,
à numerus clausus
élevé
27
. Le recrutement des médecins scolaires est affecté par
cette tension sur le métier de généraliste.
Cependant les nouveaux médecins adoptent pour 63 % un statut salarié, ce qui pourrait
faciliter le recrutement de médecins de prévention, et donc de médecins scolaires, à condition
que des dispositions soient prises pour valoriser ce métier peu connu (dans le 3
e
cycle du cursus
de formation des médecins, le diplôme d’études spécialisées (DES) santé publique attire moins
d’étudiants) et peu attractif financièrement.
L’éducation nationale a entrepris d’améliorer l’attractivité des postes de médecin scolaire
en revalorisant leur rémunération et en suscitant la création d’une formation de spécialité
transversale (FST) médecine scolaire, dont la mise en place, prévue pour novembre 2019, n’a
pas pu se concrétiser (cf. II.I.B.2 et II.I.B.3 ci-après).
III - Une performance non suivie, très en deçà des objectifs
L’évaluation de la performance est une entreprise complexe. Tout d’abord, les missions
des personnels ne sont pas clairement priorisées, comme la Cour l’avait relevé dans son rapport
de 2011. Elles ne sont pas non plus organisées. Elles se traduisent par une description
pléthorique de tâches (cf. I.I.B ci-avant) et de multiples injonctions émanant de différents
27
Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES),
Études et résultats
, N° 1061,
mai 2018,
10 000 médecins de plus depuis 2012
.
Ministère chargé de la santé,
Les chiffres clés de l’offre de soins
, édition 2018.
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LES DIFFICULTÉS PERSISTANTES DE LA SANTÉ SCOLAIRE, UNE PERFORMANCE TRÈS INFÉRIEURE AUX
OBJECTIFS
29
niveaux hiérarchiques parmi lesquelles chaque personnel opère ses choix. En second lieu, les
missions de santé scolaire se déploient dans un contexte de chaos statistique alimenté par une
grève des remontées de données d’activités.
Néanmoins, deux grandes catégories de missions se dégagent : d’une part les actions
individuelles de dépistage et la prise en charge des élèves atteints de troubles des
apprentissages, malades ou porteurs de handicaps ; d’autre part la promotion de la santé, qui
repose principalement sur des actions collectives. Une priorité de fait est donnée aux actions
individuelles mais de façon différenciée : le service des médecins est concentré sur des visites
obligatoires ; celui des personnels infirmiers sur l’accueil des élèves à l’infirmerie.
A - Une opacité de l’activité due à une grève administrative,
une évaluation inexistante
1 - La méconnaissance tolérée de l’activité des services de santé scolaire
L’activité des services de santé scolaire est normalement suivie par l’administration
centrale via l’enquête
santé-social
de la direction générale de l’enseignement scolaire
(DGESCO). Cette enquête statistique est envoyée chaque année aux académies, sous le format
d’un document Excel. Or, les personnels de santé, médecins et infirmiers, reçoivent des
consignes syndicales de « grève administrative », c’est-à-dire de refus de transmission des
statistiques. Sans être générale, cette consigne est assez largement suivie, si bien que le
ministère ne dispose que d’une information lacunaire et peu fiable
28
.
Confrontée depuis plusieurs années à ce « boycott », la DGESCO a continué à produire,
quoique de manière irrégulière et avec beaucoup de retard, des synthèses statistiques de qualité
dégradée
29
et n’a pas donné d’instructions pour que les personnels considérés se voient rappeler
leurs obligations statutaires. Les recteurs n’ont pas davantage pris de dispositions en ce sens.
Les raisons invoquées par les personnels tiennent aux conditions de travail difficiles et à
l’inadéquation des supports de renseignement mis à disposition par l’administration.
La hiérarchie qui cherche à éviter le conflit, confrontée à la difficulté de pourvoir les
emplois vacants de médecins, se satisfait d’une situation dans laquelle les responsables
académiques n’ont qu’une vision très vague de l’activité des services de santé scolaire. Non
seulement les enquêtes de la DGESCO sont peu et mal renseignées mais les services
académiques ne tiennent pas de tableaux de bord de l’activité des personnels. Les outils
managériaux les plus élémentaires ne sont généralement pas en place, privant tant l’autorité
académique que l’administration centrale des moyens de piloter ces services.
La Cour n’a donc pas pu s’appuyer sur les données de la DGESCO, trop partielles et trop
peu fiables, et a réalisé sa propre enquête dans les académies, centrée sur la réalisation des
visites obligatoires. L’exploitation des réponses a mis en évidence une méconnaissance par les
services déconcentrés de l’éducation nationale de l’activité de leurs personnels.
28
En académies, les personnels concernés se plaignent au demeurant de l’envoi tardif de l’enquête par la
DGESCO : celle-ci leur parviendrait peu avant la fin de l’année scolaire, ce qui n’est pas optimal pour recueillir
exactement les données demandées ; la DGESCO réplique que les modifications de l’enquête d’une année sur
l’autre sont minimes, et ne peuvent compromettre les réponses.
29
Faible nombre des départements répondants, informations partielles, indicateurs affichés sans qu’on puisse les
rapporter à une population d’élèves concernés.
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COUR DES COMPTES
30
Parmi les psychologues de l’éducation nationale (PsyEN), seuls ceux du second degré
sont concernés par une évaluation interne. La DGESCO n’a pas été en mesure d’en
communiquer les résultats pour 2017-2018 et 2018-2019 et a indiqué que
« compte-tenu de
l’inquiétude des personnels, la remontée d’information par enquête n’a pas été opérante. Les
informations ne sont donc pas disponibles ».
L’activité des psychologues du 1
er
degré ne fait
l’objet d’aucune enquête ou évaluation interne.
S’agissant de la protection de l’enfance, les statistiques des signalements au procureur ou
transmises aux départements ne sont pas communiquées au niveau national : elles n’ont été
communiquées à l’administration centrale que par 63 % des académies en 2017 et 80 % en
2018. Ainsi, l’éducation nationale, première émettrice d’informations préoccupantes, comme
le précise le rapport de l’Assemblée nationale sur l’aide sociale à l’enfance paru en 2019
30
, ne
connaît pas le nombre d’informations transmises chaque année.
Quant à l’évaluation de l’évolution de la santé des élèves, la dernière synthèse disponible
est celle de 2013-2016 fondée sur l’année scolaire 2013-2014 ; la synthèse pour l’année scolaire
2017-2018 n’est pas encore disponible. Il est clair que les outils d’évaluation interne font défaut.
C’est principalement à travers d’autres enquêtes que la santé des élèves peut être approchée.
Depuis l’année scolaire 1999-2000, le ministère chargé de la santé (direction de la recherche,
des études, de l’évaluation et des statistiques/DREES et direction générale de la santé/DGS)
organise en partenariat avec le MENJ des enquêtes sur la santé des élèves à trois moments-clés
de leur scolarité : grande section de maternelle (5-6 ans), CM2 (9-10 ans), et 3
e
(14-15 ans).
2 - Des indicateurs budgétaires peu pertinents, restreints en raison
de la grève statistique
L’objectif «
Promouvoir la santé des élèves et contribuer à améliorer leur qualité de vie
»
est le second objectif du programme 230 dans les projets annuels de performance (PAP)
présentés au Parlement. Au sein de cet objectif, deux indicateurs de performance retracent les
réalisations du ministère de façon partielle et peu utilisable.
Le premier concerne le bilan de santé de la 6
e
année des élèves de l’enseignement public
ou privé. L’évolution récente de cet indicateur ne permet plus de rendre compte de la
performance de la santé scolaire car il n’est depuis 2018 plus calculé que pour les seuls élèves
en éducation prioritaire (REP+ et REP). Auparavant, il rendait compte de la situation de
l’ensemble des élèves. Ne disposant pas de cette information sur l’ensemble du territoire, le
ministère a réduit le périmètre de calcul de l’indicateur aux seuls REP+ et REP. La DGESCO
justifie ce choix par le souci de réduction des inégalités de santé dès le plus jeune âge et par la
faible robustesse d’un indicateur trop général en raison de remontées statistiques incomplètes.
Ces arguments ne sont pas recevables : si la connaissance des résultats en éducation prioritaire
est importante, il est aussi nécessaire de présenter au Parlement le niveau de respect des
objectifs nationaux de visites médicales. La Cour a formulé dans sa note d’analyse de
l’exécution budgétaire 2018 la recommandation suivante :
«
Remplacer l’intitulé de l’indicateur
30
Rapport déposé le 3 juillet 2019 par la mission d’information sur l’aide sociale à l’enfance, présenté par M. Alain
RAMADIER, Président et Mme Perrine GOULET, Rapporteure, Députés. Ce rapport mentionne en outre que
« la
transmission des IP
?
est le produit d’une interaction fructueuse, quoique parfois insuffisante faute notamment de
moyens humains, s’agissant notamment des assistants sociaux, tout particulièrement dans le premier degré »
.
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LES DIFFICULTÉS PERSISTANTES DE LA SANTÉ SCOLAIRE, UNE PERFORMANCE TRÈS INFÉRIEURE AUX
OBJECTIFS
31
2.1 du programme 230 par « proportion d’élèves ayant bénéficié du bilan de santé dans leur
sixième année
».
L’indicateur
«
Qualité de vie perçue des élèves de troisième
»
est le deuxième indicateur
choisi par la DGESCO pour suivre la promotion de la santé et de la citoyenneté. Cet indicateur
introduit depuis le PAP 2012 est fondé sur une enquête auprès des élèves de 3
e
relative à leur
niveau de satisfaction globale de vie. La notion de bien être des élèves, incorporant la promotion
de la santé, est ainsi partiellement mesurée.
B - Des taux de réalisation des visites obligatoires très insuffisants
1 - La visite médicale obligatoire par le médecin scolaire dans la 6
e
année de l’enfant
a) Une charge moyenne de travail par médecin en progression
La charge moyenne de visites de la 6
e
année (enseignement public et privé) par médecin
a augmenté de 17 % en cinq ans : elle passe de 688 en 2013 à 803 en 2018. Elle croît dans plus
des deux tiers des départements (elle est multipliée par 8 en Dordogne et environ par 3 dans le
Cher, le Gers et l’Yonne) et diminue dans une trentaine d’entre eux. En dehors des cas
particuliers de l’Indre, Mayotte et Paris
31
, la charge moyenne varie de 392 (Lot) à 6 133
(Dordogne), dans huit départements la charge moyenne est inférieure à 500, supérieure à 2 000
dans six départements.
Les situations peuvent être très hétérogènes entre les départements d’une même académie.
C’est, par exemple, le cas dans l’académie de Clermont-Ferrand (charge moyenne de 1 341
dans le Cantal, 695 dans le Puy-de-Dôme), de Limoges (2 175 en Corrèze, 902 dans la Creuse),
de Lyon (2 228 dans l’Ain, 662 dans le Rhône), de Montpellier (1 394 en Lozère, 535 dans les
Pyrénées-Orientales) ou de Nancy-Metz (1 235 en Moselle, 700 en Meurthe-et-Moselle).
31
En ce qui concerne, l’Indre et Mayotte, en raison de l’absence de médecin de secteur, il n’est pas possible de calculer une
charge moyenne par médecin. Dans l’académie de Paris, la visite médicale des élèves du public est assurée par les médecins
de la ville de Paris. La charge moyenne de visites médicales par médecin de l’éducation nationale est donc calculée uniquement
sur les élèves scolarisés dans le privé. Cette charge s’établit seulement à 164 en raison de la faiblesse des effectifs d’élèves
concernés. Il convient de souligner que l’académie de Paris n’a pas déclaré de visites médicales pour les élèves du privé.
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32
Graphique n° 3 : charge moyenne de visites médicales de la 6
e
année par ETP
de médecin : les 5 taux les plus favorables et les 5 taux les plus dégradés
au 30 novembre 2018 hors Indre, Mayotte et Paris
Source : Calcul Cour des comptes d’après données de la DEPP
b) Une nette dégradation du taux de réalisation des visites médicales
Depuis 2013 le taux de réalisation de la visite passe de 26 % à 18 %, soit une chute de
8 points
32
. Sur les 80 départements pour lesquels les données ont permis de calculer un taux de
de visite en 2013, 51 départements voient leur performance se dégrader en 2018-2019, elle est
particulièrement marquée pour le secteur privé avec une baisse de plus de 13 points.
Tableau n° 4 : visite médicale de la 6
e
année : évolution par secteur d’enseignement
Public
Privé
Secteur
non
différentié
Public+Privé
Taux de réalisation
2013-2014
25,8 %
17,4 %
29,5 %
26,0 %
2018-2019
19,7 %
4,0 %
18,6 %
18,0 %
Évolution en point
-6,2
-13,4
-10,8
-8,0
Part dans le total
des visites réalisées
2013-2014
67,1 %
5,9 %
27,0 %
100 %
2018-2019
83,6 %
2,2 %
14,2 %
100 %
Source : Calcul Cour des comptes d’après données des académies et de la DEPP
32
Résultats de l’enquête menée par la Cour auprès de l’ensemble des académies (cf. Note méthodologique en
annexe n° 13).
-
1 000
2 000
3 000
4 000
5 000
6 000
7 000
392
440
449
458
474
803
2 084
2 175 2 228
3 157
6 133
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OBJECTIFS
33
De fortes disparités entre les départements
Le taux moyen de réalisation des visites médicales recouvre de très fortes disparités entre
les départements
33
.
Graphique n° 4 : taux de réalisation de la visite de la 6
e
année en 2018-2019 :
les 5 taux les plus faibles et les 5 taux les plus élevés
Source : Calcul Cour des comptes d’après données des académies et de la DEPP
L’absence de corrélation entre taux d’encadrement des élèves par les médecins et taux
de réalisation des visites médicales
Cette corrélation n’existe que pour les départements qui se situent aux deux extrêmes des
résultats. S’agissant des autres départements, la corrélation taux d’encadrement/taux de
réalisation des visites est moins évidente :
33
Le détail des taux de réalisation de la visite médicale par département est retracé en annexe n° 14.
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34
Tableau n° 5 : taux d’encadrement au 30 novembre 2018
et taux de visite 2018/2019
Département
Taux de visite 2018-2019
Nbre d'élèves par ETP de
médecin (y/c vacataires)
Rhône
38,9 %
12 233
Lot
38,8 %
6 464
Eure-et-Loir
37,7 %
20 685
La Réunion
35,1 %
7 774
Meuse
33,8 %
12 176
Vosges
31,8 %
10 839
Côte-d'Or
31,2 %
9 706
Source : Calcul Cour des comptes d’après données des académies et de la DEPP
c) Un nombre d’enfants non examinés en nette augmentation
La part des enfants dans leur 6
e
année qui ne bénéficient d’aucun examen physique de
santé par un professionnel de santé de l’éducation nationale, médecin ou infirmier, augmente
considérablement en cinq ans. Cette part fait plus que doubler entre 2013-2014 (26 % d’enfants
non vus) et 2018-2019 (58 % d’enfants non vus)
34
. Il s’agit d’une tendance massive qui
concerne la quasi-totalité des départements : seuls 5 départements (Marne, Haute-Marne,
Bas-Rhin, Haut-Rhin et Martinique) échappent à ce constat (sur les 80 départements pour
lesquels il a été possible de calculer ce ratio en 2013-2014). Dans 27 départements, le ratio des
enfants non vus est supérieur à 80 % (100 % en Lozère, plus de 98 % dans l’Aude et en Corrèze)
alors qu’il est inférieur à 20 % dans seulement 8 départements (3 % dans le Haut-Rhin et 7 %
en Ariège, les deux départements qui présentent un taux inférieur à 10 %).
Le phénomène est beaucoup plus prononcé dans l’enseignement privé : plus de 93 %
d’enfants non vus en 2018-2019 (contre 52 % dans l’enseignement public)
35
.
d) Des villes délégataires efficaces mais aux moyens importants
Huit villes délégataires des dépistages ont la responsabilité de 200 000 élèves
(Antibes, Bordeaux, Grenoble, Lyon, Nantes, Paris, Strasbourg, Villeurbanne
36
). Le taux de
réalisation de la visite de la 6
e
année est beaucoup plus élevé dans ces villes : en 2018 il s’établit
à 73 %, soit 4 fois plus que le taux de l’éducation nationale (18 %). Le taux d’enfants non
examinés physiquement par un professionnel de santé est 6 fois moindre dans ces villes (9,6 %).
Cependant, comme à l’éducation nationale, le taux de réalisation de la visite médicale se
dégrade entre 2013 (83,5 %) et 2018 (72,8 %). Le recul est très net dans les villes de Bordeaux,
Grenoble et Villeurbanne.
34
Cf. Détail par département en annexe n° 15.
35
Il convient de souligner que certains établissements d’enseignement privés emploient des personnels de santé.
Les services de l’éducation nationale déclarent n’avoir aucune visibilité sur l’activité de ces personnels.
36
Cf. annexe n° 16.
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LES DIFFICULTÉS PERSISTANTES DE LA SANTÉ SCOLAIRE, UNE PERFORMANCE TRÈS INFÉRIEURE AUX
OBJECTIFS
35
Si les villes délégataires sont plus efficaces que l’éducation nationale, elles ont des
moyens humains plus importants : le taux d’encadrement en médecins est quatre fois plus
favorable. Cette situation s’explique en partie par une différence de périmètre d’intervention :
les médecins de l’éducation nationale interviennent en principe auprès des élèves du public et
du privé, les médecins des villes délégataires exercent auprès des élèves du 1
er
degré
uniquement et parfois seulement auprès de ceux scolarisés dans l’enseignement public, comme
cela est le cas à Lyon, Paris et Strasbourg. Cependant, même en ne considérant que les élèves
du 1
er
degré public, le taux d’encadrement en médecins de l’éducation nationale demeure deux
fois plus défavorable.
2 - Le bilan infirmier obligatoire de la 12
e
année
Le taux de réalisation du bilan infirmier de la 12
e
année a augmenté de 6,2 points passant
de 55,7 % en 2013 à 62 % en 2018
37
. Les taux sont supérieurs pour le seul enseignement public,
respectivement 71 % et 78 %. Cette évolution est à interpréter avec précaution car la législation
a évolué au cours de cette période : le dépistage de la 12
e
année n’est obligatoire que depuis
2015
38
. Avant cette date, les textes laissaient l’initiative aux personnels infirmiers d’organiser
un dépistage en fonction des besoins
39
. De fait, les pratiques étaient très variables d’une
académie à l’autre.
37
Élèves dans leur 12
e
année (données DEPP
).
38
Arrêté du 3
novembre 2015 relatif à la périodicité et au contenu des visites médicales et de dépistage obligatoires
prévues à l’article L. 541-1 du
code de l’éducation
.
39
Circulaire n° 2001-014 du 12 janvier 2001 relative aux missions des infirmier(ère)s de l'éducation nationale.
L'infirmier(ère) organise, si besoin est, le suivi de l'état de santé des élèves en complément des visites médicales
obligatoires, en vue de repérer les difficultés éventuelles de santé ou les élèves fragilisés. […] Il peut s'agir, soit
des élèves signalés lors du bilan de la 6
ème
année, soit des élèves signalés au cours de leur scolarité comme étant
en situation de fragilité, soit des élèves d'un niveau donné de classe, par exemple CE 2 et 5
ème
.
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36
Graphique n° 5 : taux de réalisation des bilans infirmiers de la 12
e
année en 2018-2019 :
les 5 départements dans lesquels le taux est le plus faible et les 5 dans lesquels le taux
est le plus élevé
Source : Calcul Cour des comptes d’après données des académies et de la DEPP
Les réalisations sont à rapporter aux effectifs d’élèves concernés. En 2018, chaque
personnel infirmier a en charge, en moyenne, 83 élèves dans leur douzième année scolarisés
dans le secteur public
40
(ce ratio passe à 134 élèves si l’on ne considère que les personnels
affectés dans les collèges). La moyenne de 83 élèves par infirmier cache de très fortes disparités
entre départements et une corrélation avec les taux de réalisation encore moins probante que
pour les médecins scolaires.
Tableau n° 6 : taux de réalisation du bilan infirmier de la 12
e
année en 2018-2019
en fonction de la charge par infirmier
Départements
Nb moyen d’élèves dans leur
12
e
année par infirmier
Taux de réalisation de la visite de
la 12
e
année
Cantal
46,5
72,6 %
Haute-Marne
48,8
91,9 %
Gard
102,4
100 %
Yvelines
102,5
69,9 %
Bouches-du-Rhône
102,5
51,4 %
Gironde
102,6
62,6 %
Tarn-et-Garonne
107,5
7,4 %
Hauts-de-Seine
107,8
56,7 %
Haute-Savoie
114,2
98,4 %
Source : Calcul Cour des comptes d’après données des académies et de la DEPP
40
Ici, les comparaisons sont présentées pour le périmètre de l’enseignement public, car dans la plupart des
départements, les bilans ne concernent que marginalement les élèves de l’enseignement privé.
0%
10%
20%
30%
40%
50%
60%
70%
80%
90%
100%
6,0%
9,7%
19,8%
20,1%
31,0%
61,9%
89,9%
90,0%
94,8%
95,1%
98,2%
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LES DIFFICULTÉS PERSISTANTES DE LA SANTÉ SCOLAIRE, UNE PERFORMANCE TRÈS INFÉRIEURE AUX
OBJECTIFS
37
Les visites de dépistage dans les établissements privés sous contrat par les personnels
infirmiers de l’éducation nationale sont très marginales
41
: certaines académies n’ont pas trouvé
trace de ces visites dans leurs statistiques (Amiens, Besançon), d’autres ont explicitement
déclaré ne pas intervenir dans les établissements privés sous contrat (Clermont-Ferrand,
La Réunion, Nantes, Rennes, Toulouse).
3 - La visite médicale obligatoire pour travaux réglementés
Les visites médicales obligatoires des élèves mineurs de plus de 15 ans préalablement à
leur affectation à des travaux réglementés
42
ont été réalisées à 81 % en 2018 (ce taux a été
calculé à partir du nombre de visites déclaré par chaque académie, rapporté aux effectifs
concernés également communiqués par elles). Les académies de Besançon, de Bordeaux et de
la Réunion n’ont pas été en mesure de communiquer le nombre d’élèves concernés par cette
visite.
Les visites pour travaux réglementés concernent très majoritairement le secteur public.
Seules 4 779 visites dans des établissements privés sous contrat ont été déclarées sur un total
de 184 653 (soit 2,6 %)
43
(Cf. annexe n° 18).
La visite médicale n’est pas toujours systématique. Dans l’académie de Besançon, tous
les élèves concernés bénéficient d’une visite médicale lors de leur première année de second
cycle. Les années suivantes, ils ne sont pas tous examinés : certains sont vus pour un entretien
non accompagné d’un examen médical ou bien le médecin n’examine, sur la base d’un
questionnaire envoyé aux parents, que les élèves ayant eu un problème de santé au cours de
l’année ou ceux qui ont été victimes d’un accident du travail. Dans l’académie de Nice, le
renouvellement du certificat d’aptitude des élèves de 1
ère
et terminale s’effectue sur dossier. En
Martinique, seuls les élèves de 1
ère
année de CAP et de 2nde Bac pro ont été vus en 2018.
Chaque médecin scolaire a réalisé en moyenne 180 visites pour travaux réglementés
durant l’année 2018-2019
44
. Cette moyenne nationale recouvre là aussi de fortes disparités :
41
Voir en annexe n° 17 les 7 départements qui ont déclaré réaliser ces bilans pour les élèves du privé.
42
Conformément à l’art. R. 234-22 du code du travail.
43
Sont concernés l’Allier (académie de Clermont-Ferrand) ; la Seine-et-Marne (académie de Créteil) ; la Corrèze
(académie de Limoges) ; la Savoie (académie de Grenoble) ; le Maine-et-Loire, la Sarthe et la Vendée (académie
de Nantes) ; les Ardennes et la Marne (académie de Reims) ; l’Aveyron, la Haute-Garonne et le Tarn (académie
de Toulouse) ; l’ensemble des départements des académies de Dijon, de Lille et de Rennes.
44
Moyenne calculée sur la base du nombre de visites réalisées communiquées par les académies en réponse à
l’enquête de la Cour rapporté aux effectifs exprimés en ETP vacataires compris (source DEPP pour les effectifs
titulaires et contractuels, les données relatives aux vacataires ont été communiquées par les académies).
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38
Graphique n° 6 : nombre de visites pour travaux réglementés réalisées par médecin
scolaire (vacataires compris) en 2018-2019 : les 5 taux départementaux les plus faibles
et les 5 taux départementaux les plus élevés
Source : Calcul Cour des comptes d’après données des académies et de la DEPP
C - Une mission d’éducation à la santé reléguée au second rang
Dans les missions de promotion de la santé énumérées par la loi de 2016 sur la
modernisation du système de santé
45
, le volet éducation à la santé est défini comme
« l’élaboration, la mise en
œ
uvre et l’évaluation de programmes d’éducation à la santé destinés
à développer les connaissances des élèves à l’égard de leur santé et de celle des autres et à
l’égard des services de santé ». Si la loi de 2016 dispose que « la promotion de la santé à l’école
[…] relève en priorité des médecins et infirmiers de l’éducation nationale », l’éducation à la
santé est une mission qui impose la collaboration non seulement des acteurs de la vie scolaire,
conseillers principaux d’éducation et assistants d’éducation, qui ne sont présents que dans le
second degré, mais aussi des enseignants. À cet effet, le parcours éducatif comporte des
«
compétences psychosociales » (CPS) à apporter aux élèves présentées dans un document
ministériel de « mise en perspective des compétences psychosociales et des domaines du socle »
pour les programmes des cycles 2, 3 et 4 du socle commun de compétences et connaissances.
S’agissant de la part que les professionnels de santé scolaire prennent dans l’éducation à la
santé, l’engagement varie beaucoup selon que l’on considère l’activité des médecins ou des
personnels infirmiers : ces derniers sont beaucoup plus engagés dans les actions au sein des
établissements pour lesquelles les médecins peinent à se rendre disponibles.
45
Loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé.
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LES DIFFICULTÉS PERSISTANTES DE LA SANTÉ SCOLAIRE, UNE PERFORMANCE TRÈS INFÉRIEURE AUX
OBJECTIFS
39
La DGESCO a conduit pour l’année scolaire 2017-2018 une enquête auprès de ses
services déconcentrés et des établissements pour retracer l’activité des comités d’éducation à la
santé et à la citoyenneté (CESC), dont chaque EPLE doit être doté, et des comités
correspondants au niveau départemental (CDESC) et académique (CAESC). 26 académies sur
30 ont mis en place leur comité académique, et au moins 75 directions départementales ont fait
de même à leur niveau
46
. Au niveau des établissements, la synthèse de la DGESCO ne permet
pas d’identifier précisément le nombre de CESC, mais on peut déduire des éléments qu’elle
présente que près de 60 % au moins des établissements (probablement des EPLE, car peu
d’établissements privés ont répondu à l’enquête) se sont dotés d’un CESC
47
.
L’éducation nationale s’en remet beaucoup aux programmes d’action des ARS pour les
interventions externes en écoles et établissements, et pour l’appui à leurs projets spécifiques de
prévention ou de promotion de la santé (cf. III.VI ci-après).
Deux problèmes se posent quant à cette mission d’éducation à la santé.
D’une part un problème de qualité des actions, signalé tant par les ARS que par Santé
publique France : cette qualité est rarement évaluée, en tout cas rarement par une évaluation
externe. Les chefs d’établissement peuvent se trouver confrontés à la pression du milieu
associatif local, qui cherche à intervenir à l’école, et n’est pas toujours qualifié pour le faire de
manière fiable et appropriée à l’âge des enfants. Certaines interventions de prévention des
addictions, évaluées par Santé publique France, se sont ainsi révélées avoir produit l’effet
inverse du but recherché, notamment dans le domaine de la lutte contre les addictions. Les ARS
cherchent à promouvoir des actions considérées comme « probantes » au terme d’une
évaluation, ou mises en place par des opérateurs conventionnés : sur ces fondements il serait
utile que le ministère exerce davantage un encadrement des choix des écoles et des
établissements en matière d’intervenants externes pour des projets d’éducation à la santé.
D’autre part, le soutien des ARS à l’éducation à la santé passe par des procédures
sélectives, comme des appels à projets, dont ne bénéficie, par construction, qu’ un nombre
restreint d’établissements ou d’écoles. Il n’existe pas ainsi d’échelle nationale de cet apport.
46
89 directions départementales ont répondu à l’enquête ; parmi elles, 75 ont installé leur CDESC ; pour celles qui
n’ont pas répondu, on ne sait pas.
47
4 773 établissements sont mentionnés comme « ayant intégré les actions de leur CESC au projet
d’établissement », ce qui permet de déduire qu’ils ont un CESC, le RERS 2019 décompte 7 799 établissements
publics du second degré.
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COUR DES COMPTES
40
_______________________________ CONCLUSION ______________________________
La santé scolaire a été soutenue par un effort budgétaire sur la longue période, les
effectifs de personnels infirmiers et d’assistance sociale mais aussi de psychologues ont cru,
des postes de médecins ont été ouverts même s’ils ne sont pas pourvus pour un tiers. Or les
résultats en termes de visites et dépistages obligatoires, prévus par la loi, sont très médiocres
et dans certains cas alarmants. Ils ne sont pas connus par le ministère qui s’est facilement
accommodé d’une grève administrative, perdant alors toute capacité de pilotage des services
médicaux et infirmiers.
En effet, si la pénurie de médecins scolaires pèse, elle ne peut à elle seule justifier des
résultats très loin d’être corrélés aux taux d’encadrement des élèves par les médecins et les
personnels infirmiers, qui attestent d’une défaillance dans la conduite des services. Ainsi les
bilans infirmiers de la 12
e
année devraient être réalisés partout à près de 100 % au vu des
charges de travail. En fait, le rapport entre le nombre d’élèves dans leur 6
e
année et de
médecins de l’éducation nationale pose le problème du ciblage des élèves prioritaires pour
cette visite médicale, en principe universelle. Le déséquilibre entre les objectifs et les moyens
en personnels médicaux n’a pas été pris en compte pour définir de nouveaux axes de travail
alors que l’arrêté interministériel du 3 novembre 2015 contribuait à une régression des visites
médicales obligatoires par le désengagement des services infirmiers qui jusque-là
collaboraient avec les médecins.
L’éducation à la santé n’est pas un dispositif robuste et concernant tous les élèves, sa
teneur, aléatoire, est peu contrôlée. De façon générale, les activités des personnels de santé
sont mal mesurées ce qui ne veut pas dire que la présence des personnels de santé, notamment
des personnels infirmiers, dans les établissements ne soit pas active et réelle, appréciée et
attendue par la communauté éducative, les élèves et leurs parents. Seulement, les conditions de
leurs services ne peuvent être optimisées par défaut d’une connaissance objectivée et partagée.
Enfin un effort d’unification de la présentation budgétaire doit être conduit pour mieux
rendre compte au Parlement de la totalité des moyens mis en
œ
uvre.
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Chapitre II
Un pilotage distendu à l’origine
d’une perte d’efficience
Face aux difficultés persistantes de la santé scolaire, le ministère de l’éducation a consenti
un effort budgétaire important et pris diverses dispositions en faveur de l’attractivité de la
médecine scolaire et des autres professions de la santé scolaire. Elles sont retracées dans la
première partie de ce chapitre.
Toutefois cet effort réel a vu ses effets compromis par le cloisonnement des services de
la santé scolaire (service médical, service infirmier, service social, psychologues du premier et
du second degré) décrit dans la deuxième partie.
Enfin le dispositif d’ensemble de la santé scolaire souffre d’un défaut de gouvernance au
sein du ministère, tant en administration centrale qu’en académies, ouvrant la voie à une
diversité d’approches qui, sans justification objective, contrevient à l’égalité de traitement des
élèves. C’est l’objet de la 3
e
partie de ce chapitre.
I - Des mesures favorables à la santé scolaire
de portée restreinte
A - La mobilisation des expertises autour de la santé scolaire
La Cour s’était intéressée aux métiers de la santé scolaire en 2011 dans le cadre d’un
rapport demandé par le Président de l’Assemblée nationale pour le comité d’évaluation et de
contrôle des politiques publiques « Contribution à l’évaluation de la médecine scolaire » qui
constitue une base de référence utile pour analyser les évolutions depuis cette date. Elle relevait
que, dans un contexte de grandes difficultés de recrutement de médecins, la GRH, faute de
priorités claires et d’une prise en compte des besoins des élèves, ne permettait pas de réduire
les fortes disparités territoriales en matière d’accès à la médecine scolaire. Elle recommandait
d’inciter les ARS à mettre en place des échanges d’informations entre l’ensemble des
professionnels de santé, en vue d’un suivi plus efficace des élèves. La Cour déplorait le défaut
d’évaluation des activités des services médicaux et de leur impact, notant déjà une dégradation
du taux de réalisation des visites médicales obligatoires à 6 ans
48
.
Une évaluation de la médecine scolaire a ensuite été demandée par le Premier ministre
(M. Valls) en juin 2015, dans le cadre de la modernisation de l’action publique, à une mission
d’inspection interministérielle (IGEN-IGAENR-IGAS). Son rapport, rendu en avril 2016,
48
Voir le résumé du rapport et les orientations de la Cour, en annexe n° 19.
Les médecins et les personnels de santé scolaire - mai 2020
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COUR DES COMPTES
42
relevait la tension entre les missions et les moyens, l’insuffisance des actions de promotion de
la santé, un pilotage beaucoup trop lâche et un travail interministériel trop aléatoire. La mission
a exploré des scénarios d’évolution variés mais qu’elle a elle-même jugés fragiles, plaidant
finalement pour conforter le binôme médecin-infirmier, pour revaloriser la rémunération des
médecins scolaires afin d’améliorer l’attractivité du métier, pour définir des priorités parmi les
missions de la santé scolaire, pour renforcer le pilotage par le ministère et l’articulation avec le
ministère de la santé, les ARS et les acteurs de santé. Ce rapport est resté confidentiel.
Le rapport de la mission
«
Bien-être et santé des jeunes
»
par le Pr Marie-Rose Moro et
M. Jean-Louis Brison, de novembre 2016, a plaidé pour une meilleure prise en compte de la
santé mentale des jeunes. L’académie de médecine a rendu le 24 octobre 2017 un avis sur la
médecine scolaire en France, recommandant « de remédier d’urgence à la pénurie des MEN
49
,
de recadrer leur activité dans un statut de médecin de prévention, d’assurer l’examen de santé
pour tous les enfants de 6 ans, de réviser la gouvernance par la création d’un comité exécutif
entre les ministères de l’éducation nationale et de la santé, d’instaurer un enseignement
universitaire de la médecine scolaire sous la forme d’une formation spécialisée transversale ».
Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a rendu le 14 mars 2018 un
avis « Pour des élèves en meilleure santé ».
Un rapport relatif au parcours de coordination renforcée santé-accueil-éducation des
enfants de 0 à 6 ans, a été demandé le 24 septembre 2018 par le Premier ministre à
Mme Stéphanie Rist, députée, et au Dr Marie-Sophie Barthet-Derrien, directrice adjointe de la
PMI de Lyon Métropole. Leur rapport, remis en mars 2019, relève les lacunes en matière de
bilans de santé des enfants de 3 à 4 ans (par les services départementaux de PMI) et de la
6
e
année (par la médecine scolaire),
«
sans corrélation avec le niveau de couverture par les
visites pédiatriques / médecine générale
»,
ainsi que la faiblesse des données disponibles. Il
propose de
«
mobiliser les projets territoriaux de santé et les contrats locaux de santé pour
réaliser un diagnostic des besoins et des ressources et se doter d’objectifs partagés
»,
de faire
de l’exercice coordonné entre PMI, santé scolaire et professionnels libéraux, la référence en
matière de santé de l’enfant, avec un objectif de réalisation de 100 % des bilans des 3-4 ans en
maternelle et un ciblage des bilans de la 6
e
année, à réaliser par la médecine scolaire et des
partenaires, la médecine scolaire n’y suffisant pas. Il recommande une évolution dans le partage
des tâches entre médecins et infirmiers de l’éducation nationale, à l’image de l’intervention des
infirmières puéricultrices en articulation avec les médecins de PMI. Il met également l’accent
sur le besoin d’une coordination pluri-professionnelle renforcée et sur l’utilisation du nouveau
carnet de santé ainsi que le nécessaire progrès dans les travaux relatifs au dossier médical
partagé (qui permettrait de mettre en
œ
uvre un carnet de santé dématérialisé contenant les
informations essentielles pour le suivi de la santé de l’enfant).
B - Des progrès ponctuels depuis le précédent rapport de la Cour
1 - La relance de l’action interministérielle avec le ministère de la santé
Les deux ministères ont conclu le 29 novembre 2016 une convention cadre de partenariat
en santé publique qui vise à promouvoir la santé des enfants, des adolescents et des jeunes ;
49
Médecins de l’éducation nationale.
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UN PILOTAGE DISTENDU A L’ORIGINE D’UNE PERTE D’EFFICIENCE
43
parmi les objectifs généraux, on note l’idée de renforcer la fluidité du parcours entre l’école et
la ville. La convention devait établir des modalités de travail pérennes au niveau national,
apportant une base qui sera déclinée en régions par des conventions ARS-rectorats.
Les champs de la coopération éducation nationale/santé
-
la promotion du bien-être psychique et de la santé mentale, ainsi que la prévention et la détection
précoces de la souffrance et des troubles psychiques ;
-
la prévention et la détection précoce des troubles notamment sensoriels, du langage et des
apprentissages ;
-
la promotion d’un environnement favorable à la santé, aux apprentissages et à la formation, qu’il
s’agisse des aspects matériels (hygiène, sécurité, nuisances sonores, etc.), relationnels (climat
scolaire) ou sociaux (lutte contre les discriminations, etc.) ; la lutte contre les phénomènes d’emprise
psychique ;
-
la promotion d’habitudes de vie favorables à la santé : alimentation (notamment la prévention des
risques d’obésité), activité physique, rythmes de vie, sommeil, santé bucco-dentaire, etc. et
d’attitudes responsables vis-à-vis de sa santé et de celle des autres : vaccination, usage des
antibiotiques, etc. ;
-
l’éducation à la sexualité, à la santé sexuelle et aux relations entre les personnes, et notamment entre
les filles et les garçons ;
-
la prévention des conduites à risque dont les conduites addictives en application du plan
gouvernemental de lutte contre les drogues et les conduites addictives ;
-
la mise en
œ
uvre de politiques publiques inclusives pour les jeunes porteurs de maladies chroniques
ou en situation de handicap ;
-
la prévention et la détection des maltraitances et des violences ;
-
la prévention des risques auditifs ;
-
la veille et la sécurité sanitaire, notamment par la promotion des mesures de prévention et de
protection individuelle face à des risques sanitaires émergents (ex : maladies vectorielles,
épidémies , etc.) et la préparation aux situations sanitaires exceptionnelles (risques infectieux,
environnementaux ou d’attentats, etc.) […].
Le comité de pilotage prévu par cette convention a fait place à un comité pour la santé
des enfants et des jeunes (COSEJ), le ministère de la santé ayant souhaité mettre en place un
pilotage unique des politiques de santé de l’enfant et des jeunes jusqu’à 25 ans conduites en
partenariat avec l’éducation nationale, l’enseignement supérieur, l’agriculture et la justice. La
déclinaison de la convention en région s’est mise en place progressivement (Voir III.VI
ci-après), l’enquête de la Cour atteste de la mobilisation des ARS, au moins dans le champ de
l’éducation à la santé.
2 - La revalorisation des statuts et des rémunérations
S’agissant des médecins scolaires, la Cour pointait dans son rapport de 2011 le déficit
d’attractivité du métier, dû notamment à la faiblesse des rémunérations proposées :
«
les médecins de l’éducation nationale sont les médecins publics les moins rémunérés
»
.
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COUR DES COMPTES
44
Depuis, les mesures statutaires et indemnitaires intervenues ont permis de revaloriser la
rémunération des médecins de l’éducation nationale (MEN).
En premier lieu, le corps des MEN a été restructuré et des revalorisations indiciaires ont
été opérées en 2012 (les premières, selon le ministère, depuis la création du corps en 1991)
permettant un alignement du traitement des médecins de l’éducation nationale sur celui des
corps comparables de médecins de la fonction publique
50
. Cette revalorisation progressive a
culminé avec la création au 1
er
septembre 2017 d’un 3
e
grade (hors classe) à la hors échelle B
51
.
La grille indiciaire des MEN est désormais comparable en grande partie à celle des
médecins territoriaux, soit une rémunération indiciaire mensuelle brute de 2 160
en début de
carrière et de 5 000
en fin de carrière. La grille indiciaire des médecins inspecteurs de santé
publique MISP reste plus favorable en fin de carrière puisqu’elle culmine à la hors échelle C
(5 496
par mois) pour un médecin général.
Le régime indemnitaire des médecins de l’éducation a également fait l’objet d’une
revalorisation lors du passage au RIFSEEP
52
en 2015 (cf. annexe n° 20).
En définitive, selon les données communiquées par le ministère de l’éducation nationale,
la rémunération mensuelle moyenne par ETP de médecin de l’éducation nationale, tous grades
confondus, s’est élevée à 4 117
nets en 2018
53
(cf. annexe n° 20).
Les autres professions de la santé scolaire ont également bénéficié de revalorisations
statutaires très significatives. Les assistants de service social de l’éducation nationale font partie
d’un corps interministériel créé en 2012, de catégorie A depuis le 1
er
février 2019. Ils relevaient
auparavant de la catégorie B. Les infirmiers de l’éducation nationale, appartiennent à un corps
revalorisé en 2012, passant alors de la catégorie B à la catégorie A. Le corps des psychologues
de l’Éducation nationale (PsyEN) a été créé en 2017
54
. Les indemnités de fonction des PsyEN
des 1
er
et 2
nd
degrés n’ont toutefois pas été uniformisées.
Une nouvelle étape de revalorisation de la rémunération des médecins de l’éducation
nationale paraît aujourd’hui indispensable pour accroître l’attractivité du métier. Par le passé,
ces médecins appartenaient au même corps que les médecins de santé publique. Ils en ont été
séparés en 1991, lors de la création du corps spécifique des médecins de l’éducation nationale.
Une revalorisation indemnitaire par exemple de 30 %, d’un coût estimé à 3 M
, serait une
première étape pour rapprocher les niveaux indemnitaires moyens des médecins de l’éducation
nationale de celui des médecins inspecteurs de santé publique, facilitant une possible évolution
ultérieure vers leur réunion dans un corps interministériel.
Celle-ci entrainerait des collaborations naturelles en offrant aux médecins scolaires
comme à leurs collègues du ministère de la santé des parcours de carrière plus ouverts et plus
diversifiés. Ce serait un moyen de rompre l’isolement de la médecine scolaire, qui, outre
l’inscription plus marquée de son activité dans un cadre qui reste à organiser (cf.
ci- après), a
besoin de travailler en lien étroit avec tous les autres acteurs de santé.
50
Décrets n° 2012-899 et n° 2012-900 du 20 juillet 2012.
51
Décret n° 2017-1538 du 3 novembre 2017
.
52
Le Régime indemnitaire tenant des fonctions, des sujétions, de l’expertise et de l’engagement professionnel
(RIFSEEP) est applicable depuis le 1er décembre 2015 aux médecins de l’éducation nationale.
53
Moyenne pondérée par ETP. Cf. annexe n° 20.
54
Cf. annexe n° 21.
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45
L’appartenance des médecins à un corps interministériel n’affecterait pas le maintien du
rattachement de la santé scolaire au ministère de l’éducation ; d’autres corps ont connu des
fusions pour constituer un corps interministériel sans modification des périmètres de
responsabilité ministériels. Le corps interministériel des assistants de service social (ASS) des
administrations de l’État ne soustrait d’ailleurs pas les ASS des services de santé scolaire à
l’autorité du ministre de l’éducation.
3 - La facilitation de la formation des médecins scolaires
La formation des médecins de l’éducation nationale se fait postérieurement à leur
recrutement par concours ; elle est confiée à l’école des hautes études en santé publique
(EHESP). Dans le cadre de la réforme des études médicales, une formation spécialisée
transversale « médecine scolaire » a été créée ; le ministère en attend une amélioration de
l’attractivité de la médecine scolaire, qui doit ainsi gagner en visibilité pour les étudiants, et une
amélioration de la préparation au métier.
Les médecins de l’éducation nationale sont recrutés sur titre par voie de concours ; les
titres requis sont ceux qui sont exigibles pour l’exercice de la profession de médecin ; la plupart
des nouveaux médecins sont d’abord recrutés comme contractuels, et passent ensuite le
concours pour être titularisés, au terme d’une année de stage durant laquelle ils suivent plusieurs
sessions de formation, en présentiel, à l’EHESP
55
à Rennes et à l’Institut des hautes études de
l'éducation et de la formation (IH2EF)
56
à Poitiers, et à distance.
Un effort d’adaptation a été fait par le ministère, compte tenu de la difficulté de
recrutement, pour titulariser sur place les médecins stagiaires, qui auparavant étaient soumis à
mobilité. La titularisation se fait sur la base d’une part de la vérification de l’assiduité aux
modules de formation du parcours contractualisé, d’autre part, sur la production d’un travail
écrit collectif de promotion de la santé, encadré par les enseignants.
Une formation spécialisée transversale (FST) médecine scolaire créée dans le cadre de la
réforme des études médicales
devait être mise en place à la rentrée 2019
57
. La FST médecine
scolaire est accessible aux étudiants de troisième cycle des études de médecine en spécialité de
pédiatrie, de médecine générale et de santé publique. Selon le ministre de l’éducation
nationale, « cet enseignement universitaire est une mesure de moyen long terme, qui va donner
de la visibilité aux spécificités de la médecine scolaire et élargir le vivier de recrutements
adaptés
58
».
Néanmoins, si l’arrêté du 12 juillet 2019 a bien ouvert 35 places d’internat en médecine
scolaire, il semble que faute d’un nombre suffisant de candidats, l’ouverture de la FST soit
reportée à 2020. Cette mesure n’est donc pas, pour le moment, opérationnelle, et, si elle se met
en place, sa portée ne pourra être évaluée qu’après quelques années.
55
Thématiques
Santé, activité et environnement de travail de l’élève, promotion de la santé, santé publique,
troubles des apprentissages, populations vulnérables.
56
Thématiques
Positionnement professionnel dans le système scolaire, communication et pratiques
professionnelles, promotion de la santé
.
57
Une FST est une « surspécialité » qui peut être commune à plusieurs diplômes d’études spécialisées ; elle rajoute
2 semestres à la durée de l’internat.
58
Réponse Question écrite n° 03634 de M. Jean-Pierre Decool (Nord) – JO Sénat 23 août 2018.
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46
En complément de cette mesure, afin de mieux faire connaître la médecine scolaire aux
étudiants en médecine, le ministère incite les académies à accueillir davantage d’internes en
stage. Cet accueil d’internes peut faciliter les recrutements : l’académie de Nancy-Metz
indiquait, dans le cadre du dialogue de gestion pour 2017, qu’elle accueillait depuis 5 ans déjà
des internes en médecine générale en fin d’internat et que deux anciennes internes avaient été
recrutées en Meurthe-et-Moselle.
4 - Le service sanitaire des étudiants en santé
Un service sanitaire obligatoire a été introduit dans les cursus des étudiants en santé dans
le cadre de la stratégie nationale de santé. Il a concerné, dès sa mise en place à la rentrée 2018,
les étudiants en médecine, pharmacie, odontologie, maïeutique, kinésithérapie, et infirmiers
(47 000 étudiants). Conçu pour initier ces étudiants aux enjeux de la prévention, leur confier
des actions de prévention auprès de publics prioritaires, et lutter contre les inégalités sociales et
territoriales de santé, il a concerné 4 thématiques prioritaires en 2018-2019 : alimentation,
activité physique, addictions, santé sexuelle. Leur accueil s’est fait pour 73 % en établissements
scolaires. Le stage dure six semaines, comportant une formation et une intervention dans le
cadre d’un projet, pour l’essentiel dans le domaine de l’éducation à la santé.
Il est évidemment trop tôt pour apprécier à tous points de vue l’impact de ces stages, qui
pourraient notamment familiariser les étudiants avec les services de santé scolaire et peut-être
susciter des vocations.
Au total, si toutes ces dispositions témoignent du souci du ministère d’améliorer son
dispositif de santé en faveur des élèves, leur impact est demeuré trop limité pour porter remède
aux difficultés persistantes des services considérés.
II - Une gestion très cloisonnée des personnels et des métiers
A - Des disparités de dotation de personnels peu explicables
Pour la DGESCO,
«
le principal critère d’allocation des emplois est basé sur la répartition
des effectifs d’élèves par académie ainsi que sur d’éventuels besoins spécifiques qui justifient,
pour un même nombre d’élèves, un encadrement plus élevé. Un complément est ainsi accordé
en éducation prioritaire
».
Concernant les médecins, l’ensemble des effectifs d’élèves du public et du privé est pris
en compte dans la répartition des moyens du programme, bien que les médecins de l’éducation
nationale interviennent plus rarement au profit des élèves de l’enseignement privé. Pour les
assistants de service social et les psychologues, les dotations sont fondées sur les effectifs
d’élèves du second degré public et privé, alors que les élèves du privé ne bénéficient
pratiquement jamais de leurs services. Pour les infirmiers, la DGESCO indique que
« seuls les
effectifs d’élèves du public sont pris en compte dans la mesure où les établissements privés sous
contrat disposent d’agents exerçant ces fonctions, rémunérés sur les crédits budgétaires
consacrés à l’enseignement privé »
, ce qui est en contradiction avec la position de la direction
des affaires financières du MEN qui procède de son coté à une réfaction de ces crédits au motif
que les personnels infirmiers traitent les élèves scolarisés dans le privé.
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UN PILOTAGE DISTENDU A L’ORIGINE D’UNE PERTE D’EFFICIENCE
47
Cette logique d’attribution des moyens, qui à l’exception de la question de la prise en
compte de l’enseignement privé, peut paraître assez robuste à défaut d’être adaptée aux métiers
considérés, induit pourtant des variations dans les taux d’encadrement des élèves par les
différents professionnels de la santé scolaire que l’on ne parvient pas à rapporter à des
caractéristiques objectives de telle académie ou tel département.
Au niveau des académies, les dotations conduisent en 2018 à une moyenne de
8 880 élèves à prendre en charge par médecin (de 6 797 en Corse à 11 747 à Orléans-Tours),
1 332 par infirmier (de 893 pour Limoges à 1 666 pour Versailles), 1 962 par ASS (de
1 334 pour Créteil à 2 857 pour Rennes), 1 501 par PsyEN du 1
er
degré (de 1 052 pour Paris à
1 900 en Corse) et 1 038 par PsyEN du 2
nd
degré (de 742 pour Paris à 1 278 pour Montpellier)
59
.
Ces disparités dans les dotations entre académies sont difficilement explicables par leur
seule situation sociale, le poids de l’éducation prioritaire ou de la ruralité, et distinctes selon les
professions considérées
60
. Certes pour les infirmiers, ces dotations visent à ajuster le nombre
d’agents à celui des EPLE : ceci conduit à moins doter l’académie de Créteil, académie urbaine
dans laquelle le poids de l’éducation prioritaire est pourtant élevé. De facto le nombre d’élèves
par établissement n’est pas un critère pris en compte.
B - Une gestion des métiers en silos, des personnels peu encadrés
1 - Des chaînes hiérarchiques et fonctionnelles confuses et distinctes
La gestion locale des assistants de service social (ASS), PsyEN, infirmiers et médecins
scolaires relève de différentes chaînes hiérarchiques et fonctionnelles
61
.
Les ASS et les médecins sont affectés dans les DSDEN sous la responsabilité du directeur
départemental et de conseillers techniques (CT) relayant eux même les politiques nationale et
rectorale. Les infirmiers, affectés dans les EPLE, y exercent sous la responsabilité des chefs
d’établissement ; un CT placé auprès du directeur relaie le pilotage national et rectoral mais
sans responsabilité hiérarchique. Dans les rectorats, des conseillers techniques (CT médecins,
infirmiers et de service social) conseillent les recteurs.
Les PsyEN du 1
er
degré sont affectés dans des écoles et travaillent dans le cadre des
réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté (Rased) avec les enseignants spécialisés,
sous la responsabilité des inspecteurs de circonscription qui sont leurs supérieurs hiérarchiques.
Les PsyEN du 2
nd
degré sont affectés dans les centres d’information et d’orientation (CIO) et
réalisent des permanences dans plusieurs établissements. Leurs supérieurs hiérarchiques sont
les directeurs de CIO. Au niveau des DSDEN, un Inspecteur de l’éducation nationale
information et orientation (IEN-IO) travaille auprès de l'IA-Dasen. Dans les rectorats, le chef
59
Cf. annexe n° 6.
60
La situation de la région Île-de-France, par exemple, apparait déséquilibrée : alors que la ville de Paris couvre
les besoins de santé scolaire des élèves du 1er degré pour les médecins, l’académie de Paris bénéficie de dotations
de médecins (8 920 élèves par médecin) et d’infirmiers (1 216 élèves par infirmier) relativement élevées. Les taux
d’encadrement par les PsyEN du 1
er
et du 2
nd
degrés sont en outre les plus favorables de France métropolitaine
(respectivement 1 052 et 742) sans que cela ne soit justifié par la situation sociale de cette académie. Les dotations
pourraient être rééquilibrées au profit des académies voisines.
61
Cf. annexe n° 21.
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48
du service académique de l’information et de l’orientation (CSAIO) conseille le recteur sur le
pilotage des PsyEN du second degré.
Cette organisation complexe et éclatée a des conséquences négatives pour l’unité d’action
et de gestion.
En premier lieu, relevant d’une chaîne hiérarchique (recteur, IA-DASEN, chef
d’établissement) et d’une chaîne fonctionnelle (conseiller technique auprès du recteur,
conseiller technique auprès du DASEN) distinctes, les personnels se trouvent souvent en
position d’arbitrer eux-mêmes entre les priorités de service. En second lieu, les rattachements
administratifs divers de ces personnels ont pour effet d’entraver les synergies, malgré des
circulaires prônant leur collaboration. Dans les établissements du second degré, des instances
comme les « cellules de veille » pour les élèves en difficulté, les « groupes de prévention du
décrochage scolaire » ou les CESC peuvent les réunir, même si la présence des médecins
scolaires y est rare. Rien de tel n’existe dans le premier degré, où la présence des infirmiers,
assistants de service social et médecins n’est pas prévue systématiquement dans les réunions
des « pôles ressources » incluant notamment les personnels des Rased, les IEN et les conseillers
pédagogiques
62
. Les liens entre les PsyEN du 1
er
et du 2
nd
degrés sont également ténus du fait
de leurs hiérarchies distinctes
63
.
2 - Des organisations de travail fractionnées, soumises à des logiques diverses
selon les catégories de personnels et les académies
Chaque académie définit ses priorités et répartit en conséquence les moyens en personnel.
- Les assistants de service social (ASS) interviennent sur un secteur comprenant un ou
plusieurs établissements du second degré public, selon un emploi du temps déterminé à chaque
rentrée. La couverture exhaustive des établissements n'est pas recherchée, ceux qui ne
bénéficient pas de la présence régulière d'un ASS, le plus souvent des lycées généraux et
technologiques, s’adressent en cas de besoin au conseiller technique de service social (CTSS)
départemental.
Les académies ou départements développent diverses stratégies d’allocation des moyens :
dans un département, chaque ASS ne couvre pas plus de deux établissements et le nombre
d’établissements découverts est important ; dans un autre département, les ASS sont répartis
sur l’ensemble des établissements, pouvant aller jusqu’à cinq EPLE par ASS, ce qui conduit à
augmenter les frais de déplacement et ne permet pas toujours d’assurer une permanence dans
tous. Si le secteur privé sous contrat n’est pas couvert par les ASS, les conseillers
départementaux
répondent
aux
sollicitations
ponctuelles
des
établissements
privés,
essentiellement dans le cadre de la protection de l’enfance.
Dans ce contexte de moyens tendus, il est regrettable que certaines DSDEN fassent encore
le choix de mettre à la disposition des MDPH des ASS qui sont comptabilisés dans les moyens
62
Circulaire n° 2014-107 du 18 août 2014. Fonctionnement des réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté
(Rased) et missions des personnels qui y exercent
. « Le pôle ressource
(
)
les personnels sociaux et de santé de
l'éducation nationale peuvent être associés autant que de besoin à son action ».
63
Certaines académies, toutefois, ont commencé à proposer des formations communes aux psychologues des deux
spécialités afin de favoriser les échanges et l’appropriation d’une culture professionnelle commune.
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49
d’assistance sociale aux élèves, alors qu’ils y réalisent plutôt des tâches administratives pouvant
être effectuées par d’autres personnels.
- Les ETP de médecins scolaires sont répartis entre les départements par le recteur, qui
s’appuie sur son conseiller technique médecin, puis affectés à des secteurs géographiques ou
des missions ponctuelles
64
par les directeur départementaux qui eux-mêmes s’appuient sur leur
conseiller technique médecin.
La couverture des zones rurales isolées est difficile. On observe de fortes disparités dans
les dotations des départements (cf. I.II.B ci-avant), parfois à l’intérieur d’une même académie,
certains rectorats ne parvenant manifestement pas à répartir au mieux les personnels. Bien que
la définition de leurs missions couvre le privé sous contrat, les interventions des médecins dans
ce secteur sont réduites du fait de consignes rectorales ou de décisions individuelles, le secteur
privé étant souvent considéré comme plus favorisé et donc moins prioritaire que le secteur
public. Ils sont de plus en plus et diversement sollicités par les MDPH.
- Les infirmiers sont affectés en EPLE ou sur un poste inter-degrés (un collège et ses
écoles de secteur). L’augmentation récente du nombre d’infirmiers a permis aux académies de
mieux pourvoir les établissements du second degré
65
.
Les pratiques de pilotage académique sont très diverses : des circulaires peuvent
préconiser un temps de présence des infirmiers en poste inter-degrés dans le 1
er
degré allant
d’un jour par semaine à 50 % du service, à ce stade en contradiction avec les attentes des chefs
d’établissements qui sont leur supérieur hiérarchique.
- Pour les PsyEN du 1
er
degré, les dotations en personnel sont stables et visent en général
à répartir les PsyEN entre écoles dans chaque circonscription. L’organisation du travail des
PsyEN du 2
nd
degré, entre les CIO et les EPLE, n’est pas stabilisée. Leur temps de présence en
établissement est fractionné : chaque PsyEN à temps plein couvre plusieurs établissements où
il assure un travail d’une demi-journée ou d’une journée par semaine. Le suivi des emplois du
temps n’est pas aisé.
3 - Des personnels très autonomes et peu évalués
En pratique l’ensemble des personnels considérés jouissent d’une grande autonomie
quant à l’organisation de leur service, réparti sur plusieurs écoles ou établissements.
L’évaluation de leur travail est distendue et ne permet ni d’apprécier les réalisations
individuelles ni de disposer d’une vision globale de la mise en
œ
uvre de la politique de
promotion de la santé.
Les ASS, médecins et infirmiers doivent être évalués dans le cadre d’entretiens
professionnels annuels. Les PsyEN, comme les enseignants, sont évalués uniquement dans le
cadre de trois rendez-vous de carrière. La rédaction d’un rapport d’activité ne leur est pas
demandée et aucun entretien n’est obligatoire en dehors de ces rendez-vous.
64
Dans certaines académies ou départements, des médecins sont regroupés et se déplacent conjointement sur tout
le territoire pour certaines missions, comme par exemple les visites pour travaux règlementés en lycée
professionnel.
65
Les établissements possédant un internat, une section d’enseignement professionnel ou technologique, une
SEGPA, une ULIS, l’éducation prioritaire et certaines zones rurales sont prioritaires.
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50
Le suivi de l’activité des ASS est distant et mobilise peu d’indicateurs de l’enquête
« santé-social » de la DGESCO.
L'entretien professionnel des médecins de l'éducation nationale est conduit par le médecin
conseiller technique départemental
66
, qui demande aux médecins scolaires un simple retour
annuel de leurs statistiques d’activité, plus rarement un rapport annuel rédigé. Le médecin
scolaire a en effet l’obligation de « réaliser le recueil des données chiffrées relatives aux
indicateurs de santé de la population scolaire de son secteur d'intervention
»
et de « participer
aux études épidémiologiques réalisées en lien avec les autorités de santé afin d'améliorer de
façon régulière les connaissances relatives à l'état de santé des jeunes en milieu scolaire ».
Les infirmiers doivent bénéficier également d’un entretien annuel avec leur supérieur
hiérarchique, chef d’établissement, qui n’a en général pas de compétence sur les questions de
santé. Le pilotage exercé depuis la DSDEN ou le rectorat par les conseillers techniques
infirmiers est de ce fait amoindri
67
. Les chefs d’établissement sont en outre manifestement peu
informés des missions et des obligations des infirmiers. Un bilan annuel doit être adressé par
l’infirmier au chef d’établissement, précisant les statistiques d’activité saisies durant l’année
68
.
Les conseillers techniques rectoraux de service social, médecins et infirmiers doivent
rédiger un rapport annuel d’activité adressé au recteur. Cette évaluation est toutefois distendue.
S’agissant des rapports d’activité 2018-2019, n’ont pu être communiqués à la Cour dans le
cadre de cette enquête que 13 rapports de CTSS, 12 de médecins CT, et 12 d’infirmiers CT
(sur 30 académies hors Mayotte). Dans plus de la moitié des cas, voire près de deux tiers des
cas, les recteurs ne disposent pas de cette synthèse annuelle.
Les PsyEN du 1
er
degré sont évalués par les inspecteurs de l’éducation nationale IEN de
circonscription. Ces évaluateurs ne sont pas, en général, des psychologues et cet aspect du
travail de ces PsyEN ne fait l’objet d’aucune observation par un évaluateur qualifié. Certains
IEN demandent aux PsyEN du 1
er
degré la rédaction d’un rapport d’activité annuel mais ce
n’est pas systématique. Ils ne sont pas sollicités pour remplir l’enquête « santé-social » de la
DGESCO et ne font pas l’objet d’une enquête spécifique. L’enquête de la Cour conclut à un
processus d’évaluation très relâché.
Quant aux PsyEN du 2
nd
degré, leur évaluation est double, par le directeur du CIO et par
l’inspecteur de l’éducation nationale chargé de l’orientation. Depuis 2017, aucune synthèse de
ces évaluations n’est plus remontée au niveau national.
66
Sauf dans le cas où l’IA-Dasen souhaite le conduire lui-même. Décret n° 2010-888 du 28 juillet 2010 relatif aux
conditions générales de l'appréciation de la valeur professionnelle des fonctionnaires de l'État. Circulaire MEN
DGRH n° 2013-080 du 26 avril 2013.
67
Plusieurs conseillers techniques départementaux auditionnés ont déclaré ne pas être destinataires des bilans
annuels rédigés par les infirmiers, regrettant de ce fait leur méconnaissance de l’activité des infirmiers.
68
Certains bilans d’infirmiers affectés en postes inter-degrés transmis pendant cette enquête ne font état que des
statistiques d’activité portant sur le collège, ne mentionnant pas les activités réalisées dans le 1
er
degré, sans que
le chef d’établissement n’y ait porté attention. Il conviendrait que la formation initiale des personnels de direction
précise mieux ces questions tout comme, plus généralement, la politique de promotion de la santé.
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UN PILOTAGE DISTENDU A L’ORIGINE D’UNE PERTE D’EFFICIENCE
51
C - Des missions à faire évoluer pour mieux répondre aux besoins
1 - La répartition des missions des personnels entre les 1
er
et 2
nd
degrés
ne garantit pas une continuité du parcours de santé des élèves
Malgré la priorité affichée en faveur du 1
er
degré, les ASS y interviennent peu et la
présence des infirmiers y est réduite depuis 2015.
Le premier degré, hormis les écoles de REP+, n’est pas couvert par les ASS même si les
situations locales évoluent. Depuis 2017, les ASS doivent intervenir dans les écoles de REP+,
prioritairement en cycle 3. Dans certaines académies, des services départementaux sont parfois
allés au-delà de cette demande, organisant par exemple une permanence téléphonique des CTSS
pour le 1
er
degré ou consacrant un ETP d’ASS au 1
er
degré public d’un département, parfois
d’une ville. La nécessité d’intervenir plus tôt dans le parcours scolaire des élèves est ressentie
par les acteurs rencontrés qui ont toutefois indiqué que ces choix ont été effectués à moyens
constants, les contraignant à découvrir davantage d’établissements du second degré ou à
augmenter la charge d’établissements par ASS. La problématique du harcèlement fait l’objet
d’une priorité croissante, portée dans certaines académies par les CTSS. L’absence de
couverture du service social scolaire sur le 1
er
degré ne permet toutefois pas aux ASS
d’intervenir de façon éclairée et adaptée.
Malgré une hausse des effectifs infirmiers, l’attention portée aux élèves du premier degré
s’est amoindrie depuis 2015. Si les représentants de ces personnels ont pu faire valoir que dans
certains endroits, 50 % de leur temps était consacré au premier degré, aucune donnée ne vient
en attester.
Les personnels infirmiers étant affectés dans les établissements du second degré,
n’intervenant plus lors des visites médicales de la 6
e
année et étant mobilisés pour la promotion
de la santé et la politique d’éducation à la santé, il est naturel que leur présence dans les écoles
soit en retrait. Dans les EPLE, les infirmiers réalisent quand ils sont présents l’accueil des élèves
malades ou blessés
69
, ce service est attendu des chefs d’établissement et des parents.
D’autres modalités de réponse à cette attente sont possibles à condition d’être organisées,
libérant ainsi du temps infirmier. Par exemple les assistants d’éducation (AED) des services de
vie scolaire pourraient participer davantage à cet accueil à condition d’être formés. Les rectorats
interrogés au cours de l’enquête ont reconnu qu’ils ne se préoccupaient pas de systématiser la
formation aux premiers secours – coûteuse certes pour le système scolaire, mais d’utilité
commune – des AED, personnels peu stables, qui bénéficient de contrats de 6 ans au
maximum
70
. En conséquence, les chefs d’établissements, responsables de la sécurité des
69
Protocole relatif à l’organisation des soins et des urgences du 6 janvier 2000. En présence d’un personnel
infirmier affecté dans un établissement scolaire, ce dernier de propose au chef d’établissement une organisation
qui respecte l’article R. 4312-7 de l’exercice de la profession d’infirmier qui précise :
« L’infirmier en présence
d’un malade ou d’un blessé en péril, ou informé qu’un malade ou un blessé est en péril, lui porte assistance, ou
s’assure qu’il reçoit les soins nécessaires ».
Ainsi, la DGESCO indique que lorsque le personnel infirmier est
présent, il intervient en première intention sur la situation d’urgence et va assurer la gestion de l’évaluation jusqu’à
l’éventuelle évacuation de l’élève. En l’absence de personnel de santé sur place, les soins et les urgences doivent
être assurés en priorité par les personnels titulaires, soit de l’unité d’enseignement Prévention et Secours Civiques
(PSC1), soit du certificat de Sauvetage Secourisme du Travail (SST).
70
Des AED auditionnés ont également précisé n’avoir pas reçu de formation de ce type.
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COUR DES COMPTES
52
personnes et des biens, n’étant pas certains du bon accueil des élèves en dehors de leur
présence
71
,
peuvent se montrer réticents à laisser partir l’infirmier. Par ailleurs une part
croissante du temps de travail est de plus en plus consacré à l’écoute des élèves en situation de
mal être dans les établissements du 2
nd
degré, il est donc regrettable que les conseillers
principaux d’éducation CPE et surtout les PsyEN ne soient pas davantage sollicités.
2 - Le suivi de la santé psychologique des élèves peu réalisé malgré l’unification
du corps des psychologues, encore centrés sur l’orientation
La création du corps des PsyEN en 2017, réunissant les « psychologues scolaires » du
premier degré issus du corps des professeurs des écoles et les « conseillers d’orientation-
psychologues » du second degré – qui étaient avant 1991 des « conseillers d’orientation » n’a
pas encore permis d’harmoniser leurs missions, répondant pourtant à un besoin croissant
72
.
La promotion du bien-être psychique et de la santé mentale, ainsi que la prévention et la
détection précoce de la souffrance et des troubles psychiques figurent au premier rang de la
convention cadre de partenariat signée en 2016 par les ministères chargés de l’éducation et de
la santé. Pour autant le MENJ fait porter essentiellement par les personnels infirmiers la
prévention en matière de santé mentale des jeunes. Il a laissé de façon surprenante les PsyEN
en marge de cette action, alors même que leur recrutement garantit désormais qu’ils ont une
formation initiale appropriée (licence et master de psychologie) et que l’affectation des
psychologues au sein des écoles et des établissements favorise le repérage des élèves en
situation de difficulté et le suivi de leur prise en charge.
L’extension des missions des enseignants et des professeurs principaux consacrées à
l’orientation, à travers l’accompagnement personnalisé des élèves, et la part croissante du
numérique dans la recherche d’informations sur l’orientation, ont entrainé d’un autre côté une
moindre implication des PsyEN du 2
nd
degré dans les CIO. Par ailleurs le nombre de CIO a été
resserré, passant de 536 en 2013 à 427 en 2019.
L’application de la loi du 5 septembre 2018 « pour la liberté de choisir son avenir
professionnel » chargeant les régions d’une mission d’information des élèves sur les métiers et
les parcours de formation doit conduire à une redéfinition des missions des PsyEN du
2
nd
degré
73
. Le ministère, depuis plus d’un an, tarde à définir leur nouveau cadre d’intervention :
la définition en 2019, pour les classes de 4
e
, 3
e
et de lycée d’un temps dédié à l’accompagnement
71
La DGESCO a indiqué dans sa réponse que «
ce protocole, ainsi que la circulaire concernant les plans d’accueil
individualisé pour raison de santé (…) faisaient actuellement l’objet de travaux de réactualisation afin de
répondre au mieux aux enjeux liés à l’évolution des besoins des élèves et des pratiques des professionnels de santé,
des orientations ministérielles en matière de bien-être des élèves, de leur réussite scolaire et de réduction des
inégalités. Ils prendront plus qu’avant en compte la santé mentale des élèves
».
72
En particulier pour la réalisation de bilans psychologiques pour la MDPH, notamment pour l’orientation d’élèves
en SEGPA.
73
Le décret n° 2019-375 du 26 avril 2019 prévoit, en application de la loi, les conditions d’une expérimentation
consistant à mettre à disposition des régions des fonctionnaires et agents exerçant dans les services et
établissements relevant du ministre chargé de l’éducation nationale, sur la base du volontariat, des missions
d’information des élèves et des étudiants sur les formations et les métiers. Cette expérimentation ne concerne pour
le moment que quelques régions, et uniquement des directeurs de CIO, par exemple dans la région Nouvelle
Aquitaine.
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53
à l’orientation
74
, en lien avec les régions, ne précise pas les responsabilités respectives des
enseignants et des PsyEN.
Ce contexte mouvant pourrait être l’opportunité d’une meilleure prise en compte des
besoins des élèves en matière de soutien et de suivi psychologique
75
, mettant fin à l’association
systématique et réductrice, fruit de l’histoire, de l’orientation et de la psychologie dans le second
degré.
D - Des temps de travail trop calqués sur les obligations
de service hebdomadaires des enseignants
Les services de tous les personnels de santé scolaire sont nécessairement concentrés sur
le temps de présence des élèves (les 36 semaines de l’année scolaire). Par effet d’imitation du
service des enseignants, les obligations de service de tous les personnels considérés distinguent
un temps de présence et un temps de travail en autonomie. Pour autant, l’idée implicite que la
présence de ces agents pendant les congés scolaires serait sans objet n’est pas tout à fait fondée
et se révèle en fin de compte un obstacle pour la réalisation de leurs missions.
Le temps de travail des personnels sociaux, médecins et infirmiers, défini par un arrêté
76
,
a été précisé par la circulaire du 21 janvier 2002. Le ministère, tenant compte du calendrier
scolaire, a jusqu’à présent limité les obligations règlementaires de service (ORS) de ces
personnels sur 36 semaines pour les infirmiers
77
et 38 semaines pour les médecins et assistants
de service social (ASS).
Le calcul des services, décliné sur la base de 1 593 heures
78
, aboutit à une fourchette de
temps de travail hebdomadaire allant de 41,9 h (pour les médecins et ASS) à 44,25 h (pour les
infirmiers). 10 % de ce temps, soit environ 4,19 heures par semaine de travail sur 38 semaines
pour les médecins et ASS et 4,4 heures sur 36 semaines pour les infirmiers, sont réservés à des
activités non liées à la présence des élèves, n’impliquant pas la présence des intéressés sur leur
74
12 heures annuelles en 4
e
, 36 en 3
e
, 54 par niveau de classe en lycée général et technologique « à titre indicatif »
et 265 h sur les trois années de Bac pro consacrées à la consolidation, l’accompagnement personnalisé et la
préparation à l’orientation.
75
Le rapport de la mission « Bien-être et santé des jeunes », novembre 2016, (Marie-Rose MORO et Jean-Louis
BRISON) préconisait la création du corps des PsyEN, le renforcement de la médecine scolaire dans les collèges
et les lycées et la création d’un service médico-psycho-social au service du bien-être et de la santé des jeunes. Il
signalait en outre :
« Une proportion significative de jeunes connaît un épisode dépressif caractérisé entre 16 et
25 ans (entre 15 et 17 % selon les études avec une prédominance féminine). D’une manière générale, plus de 50 %
des pathologies psychiques débutent avant 14 ans. Leur devenir dépend du repérage et de la prise en charge
précoce selon l’OMS. Trop tardive, elle hypothèque leur avenir. Le suicide constitue la seconde cause de décès
dans cette population après les accidents, bien souvent liés eux-mêmes à des prises de risque ».
76
Arrêté du 15 janvier 2002 portant application du décret n° 2000-815 du 25 août 2000 relatif à l'aménagement et
à la réduction du temps de travail dans les services déconcentrés et établissements relevant du ministère de
l'éducation nationale.
77
Pour les infirmiers, il est précisé : «
En raison des conditions d'accomplissement de leur service, les congés des
personnels infirmiers correspondent au calendrier des vacances scolaires. À l'issue des grandes vacances, ils
reprennent leur service en même temps que les enseignants et, en tout état de cause, deux jours avant la date de
la rentrée scolaire
».
78
1 607 heures annuelles desquelles sont décomptés deux jours de fractionnement, forfaitairement déduits à raison
de 7 heures par jour. La journée de solidarité doit être récupérée à raison de 7 heures pour un temps plein.
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54
lieu de travail. Le temps de travail doit en outre inclure les déplacements professionnels,
nombreux pour ces personnels souvent affectés sur plusieurs écoles ou établissements
79
. Le
temps de présence hebdomadaire est en conséquence de 37 h 43 mn sur 38 semaines pour les
médecins et ASS et de 39 h 49 mn sur 36 semaines pour les infirmiers.
Cette organisation des services rend impossible un travail collectif de tous les personnels
sociaux et de santé au-delà des 36 semaines de présence des infirmiers.
Le cadre du temps de travail des PsyEN n’a pas été harmonisé. Pendant les 36 semaines
de l’année scolaire, les PsyEN du 1
er
degré doivent effectuer 24 heures de travail hebdomadaire
inscrites dans l’emploi du temps, leur service étant aligné sur les heures de présence en classe
des professeurs des écoles, corps dont ils étaient auparavant issus, tandis que les PsyEN du
2
nd
degré doivent 27 heures de présence
80
. Ils peuvent en outre assurer un service
supplémentaire pendant les vacances scolaires, fixé par le recteur d’académie en fonction des
besoins du service, d’une semaine pouvant être fractionnée pour les PsyEN du 1
er
degré et de
trois semaines au maximum pour les PsyEN du 2
nd
degré
.
Le temps de travail hebdomadaire
restant, comprenant notamment quatre heures hebdomadaires consacrées à « l’organisation de
leur activité », est laissé sous la responsabilité des agents et n’est pas inscrit dans leur emploi
du temps. Il est consacré à l’exercice de l’ensemble des missions, travail de préparation, de
rédaction, d’études et de recherches, comprenant également pour les PsyEN du 1
er
degré le
secrétariat administratif, dont l’organisation est laissée sous la responsabilité des agents.
Comme pour les autres catégories de personnel étudiées, le temps de travail inclut le temps des
déplacements professionnels.
Aucune réponse du ministère ne justifie l’écart du temps de présence hebdomadaire
(24 h et 27 h) entre les PsyEN du 1
er
et du 2
nd
degré. Le total des heures de présence ainsi
définies atteint en outre au maximum 888 heures annuelles pour les PsyEN du 1
er
degré et 1 053
pour les PsyEN du 2
nd
degré
81
, en deçà des heures de présence demandées aux médecins, ASS
et infirmiers. La définition des « quatre heures hebdomadaires consacrées à l’organisation de
leur activité » se justifie difficilement compte tenu du peu d’heures de présence demandées à
ces personnels. En revanche, des personnels très investis ne voient pas leur temps de travail
comptabilisé ou valorisé.
Si les personnels de santé et sociaux rencontrés à l’occasion de l’enquête de la Cour ont
déclaré être très engagés dans leurs missions au service des élèves, nombre d’entre eux ont
déploré de ne pas disposer d’assez de temps pour réaliser toutes les missions qui leur sont
assignées. Il est par ailleurs complexe pour les responsables hiérarchiques, chefs
79
« Les temps de déplacement nécessités par le service, qu'ils soient accomplis dans les heures normales de travail
ou en-dehors des heures normales de travail, sont assimilés à des obligations de service liées au travail et donc
inclus dans le temps de travail effectif pour leur durée réelle »
. Sont notamment concernés les temps de
déplacement occasionnels entre la résidence administrative ou le lieu habituel de travail et un autre lieu de travail
désigné par l'employeur, les déplacements effectués, dans une même journée, entre les établissements d'exercice
par les personnels assurant un service partagé et les déplacements accomplis dans le cadre de missions
occasionnelles en France ou à l'étranger.
80
Arrêté du 9 mai 2017 portant application du décret n° 2000-815 du 25 août 2000 relatif à l’aménagement et à la
réduction du temps de travail dans la fonction publique de l’État aux psychologues de l’éducation nationale.
81
À titre d’exemple, les psychologues des hôpitaux publics bénéficient d’un temps de formation, information et
recherche dans la limite d’un tiers de leur temps de travail, ce qui porte leur temps de présence annuel à 1071 h au
minimum.
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55
d’établissements ou conseillers techniques départementaux, de vérifier le temps de travail de
ces personnels itinérants. Ils font en général confiance à leurs agents et n’exercent pas de
surveillance étroite. Plusieurs rectorats ont toutefois dû rédiger une note de cadrage pour
rappeler les obligations de service des personnels, constatant certains abus dans l’application
du temps de travail (décompte des ORS et précisions sur les temps de pause par exemple).
Sans préjuger de la réalisation effective des heures de travail à l’initiative des agents, qui
peut être diverse selon les personnels
82
, la définition de leurs obligations de service met en
lumière une conception réductrice de leur travail, particulièrement pour les infirmiers et les
PsyEN du 1
er
degré, dont les missions seraient limitées à la seule présence des élèves.
Elle ne prend pas suffisamment en considération certaines tâches qui peuvent être au
moins partiellement réalisées pendant les vacances scolaires : la préparation et la
programmation des actions de promotion de la santé et d’éducation à la santé ; l’accueil de
certaines familles ou certains élèves, actuellement impossible pour les infirmiers scolaires ; le
travail croissant sur les dossiers des enfants en situation de handicap pour les médecins ; la
formation initiale et continue qui, proposées actuellement sur le temps scolaire, réduisent de
fait les possibilités d’accueil des élèves ; les regroupements départementaux avec les conseillers
techniques des médecins, infirmiers ou ASS, le travail de rédaction des bilans annuels en fin
d’année scolaire, de préparation de la rentrée.
Même s’il peut s’avérer utile de conserver pour certains agents un temps de travail en
autonomie, il convient de revenir sur les choix actuels d’organisation du travail en redéployant
une partie de ce temps en faveur d’un temps de présence pendant les vacances scolaires. Pendant
les congés scolaires, ces personnels peuvent être accueillis dans les EPLE à l’occasion des
permanences
83
ou dans les centre médico-scolaire (CMS) lorsque les locaux le permettent.
Enfin la Cour a rappelé, dans son référé
84
adressé le 19 septembre 2019 à la Ministre de
l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, la nécessité pour les personnels
non-enseignants de l’enseignement supérieur
de rétablir une durée annuelle du temps de travail
de 1 607 heures et d’en contrôler l’effectivité
85
. Les mêmes observations s’imposent au MENJ.
82
Les différents bilans d’activité individuels ou de services étudiés à l’occasion de cette enquête rendent en outre
peu, voire pas du tout, compte de l’activité des professionnels concernés pendant les 10 % de leur temps laissés à
leur initiative. De ce fait, ces activités, pouvant toutefois être très variables selon l’implication de l’agent, sont peu
lisibles pour leurs supérieurs hiérarchiques.
83
Déjà réalisées par les personnels de direction, administratifs, de service et de vie scolaire.
84
Référé S2019-2270 « Le temps de travail des personnels non-enseignants de l’enseignement supérieur ».
85
L’article 48 de la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique dispose que le Gouvernement
doit présenter au Parlement dans un délai d'un an à compter de la publication de la loi un rapport sur les actions
mises en
œ
uvre pour le respect de la durée annuelle de travail effectif de 1607 heures pour les personnels de la
fonction publique, à l’exception des personnels enseignants et de la recherche. Le MENJ doit donc présenter dans
ce délai le rapport attendu précisant les modalités de définition du temps de travail pour les médecins, infirmiers
et PsyEN.
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56
E - Des conditions de travail insatisfaisantes
1 - Un équipement limité, des locaux inadaptés, une prise en compte insuffisante
des tâches administratives et des déplacements
L’enquête de la Cour a conduit aux constats pratiques suivants qui ont une portée assez
générale.
Dans les établissements ou les écoles, les personnels sociaux et de santé peuvent être
amenés à partager à tour de rôle durant la semaine un unique bureau et l’ordinateur fixe qui y
est installé, les locaux peuvent être inadaptés à la présence régulière d’un infirmier
86
, d’un
assistant de service social ou pour des visites médicales. Les bureaux sont parfois petits, sans
fenêtre ou implantés dans un lieu de passage rendant difficile la confidentialité des entretiens.
À l’exception des médecins, ces agents ne sont pas systématiquement dotés d’un téléphone et
d’un ordinateur portables alors que leur service est en partie itinérant. Certains départements
ont procuré aux ASS des ordinateurs portables de seconde main, devenus rapidement obsolètes.
Les équipements informatiques fixes peuvent être insuffisants, voire inexistants, en particulier
dans les écoles. L’accès aux bases élèves de l’établissement peut s’avérer compliqué dans le
second degré, et souvent impossible dans le premier degré. De ce fait, les personnels infirmiers,
par exemple, peuvent être contraints de saisir les informations recueillies durant leur passage
dans une école à leur retour dans leur collège d’affectation.
Certains infirmiers en poste inter-degrés rencontrent des difficultés pour convaincre les
principaux de collège de la nécessité d’acheter du matériel pour les visites dans le premier
degré.
Seuls les médecins scolaires bénéficient d’un secrétariat dans les centres médico-scolaires
quand ceux-ci fonctionnent (cf.
infra
). De façon générale la charge de secrétariat est vécue
comme un frein important à l’investissement dans d’autres actions
87
. Plusieurs professionnels
auditionnés ont en particulier évoqué le temps perdu à chercher à contacter les familles, les
structures ou les spécialistes extérieurs devant suivre les enfants pour savoir si le suivi prescrit
était réalisé.
Pour les agents concernés par cette enquête, les frais de déplacement sont en outre
insuffisamment remboursés dans certains départements, ce qui peut les contraindre à réduire
leurs déplacements après utilisation de l’enveloppe prévue. On observe
88
globalement chaque
année depuis 2017 une sous consommation des crédits budgétés à cet effet pour les infirmiers
et les médecins et une sur consommation pour les ASS et les PsyEN du 2
nd
degré. La procédure
de remboursement est longue et fastidieuse
89
et monopolise inutilement le temps de ces
86
Qui, parfois, ne dispose pas de clé pour entrer dans l’école.
87
Les secrétariats des EPLE peuvent être sollicités par les infirmiers, PsyEN du 2
nd
degré et les ASS pour des
tâches administratives, contacter des familles et prendre des rendez-vous ou envoyer des courriers mais ils sont
davantage mobilisés par les demandes directes des personnels de direction pour l’établissement. Les services
hebdomadaires des PsyEN du 1
er
degré comportent 4 heures consacrées en partie aux tâches administratives, qui
pourraient toutefois utilement être réservées à d’autres missions.
88
Voir tableau annexe n° 22. Les données n’ont pas été communiquées par le ministère pour les PsyEN du
1
er
degré.
89
Chaque déplacement doit faire l’objet d’une saisie d’ordre de mission et d’état de frais dans une application en
ligne.
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professionnels et des services rectoraux ou départementaux. Il conviendrait d’étudier la
possibilité de modifier cette procédure, par exemple par la définition d’un forfait annuel en
fonction du secteur d’affectation, permettant d’économiser le temps de saisie et de traitement
des dossiers.
Ces difficultés ont été maintes fois signalées par les agents et les conseillers techniques
dans leurs rapports annuels et relevées dans le précédent rapport de la Cour. Ces économies se
font aux dépens de la productivité et compromettent l’efficacité de la dépense de masse salariale
consacrée à la santé scolaire. Pour améliorer l’efficience, il faut que des moyens de
fonctionnement courant adaptés soient en place.
2 - Des centres médico-scolaires en déshérence, une absence de volonté politique
Des centres médico-scolaires (CMS) doivent être implantés dans les communes de plus
de 5 000 habitants
90
.
Ils sont destinés à accueillir un ou plusieurs médecins scolaires pour les visites et examens
ainsi que leur secrétariat. Les locaux et le matériel sont fournis par les mairies tandis que les
personnels sont employés par l’Éducation nationale
91
. En 2018, 669 secrétaires (en ETP)
travaillent dans les CMS.
L’absence de politique ministérielle envers les collectivités territoriales conduit à des
situations locales très diverses dans une tendance à la réduction du nombre de CMS et de
secrétaires
92
. Depuis la dernière enquête de la Cour en 2011, les difficultés matérielles relevées
persistent. Les problèmes liés au personnel de secrétariat occasionnent une perte de temps pour
les médecins scolaires déjà surchargés, qui doivent par exemple scanner les dossiers papier
transmis par les PMI à la suite des bilans de santé à 3 ans. La DGESCO a pourtant identifié
l’intérêt de disposer de secrétariats compétents, voire d’assistants médicaux
93
. Pour autant,
aucune mesure n’est encore prise pour améliorer cette situation.
Les infirmiers scolaires, les PsyEN ou les ASS pourraient aussi être accueillis dans les
CMS pour la réalisation d’entretiens, de visites, de bilans ou de suivis pour les élèves du premier
degré, les écoles n’étant pas toujours équipées de locaux adaptés. Il peut être envisagé de les
faire ainsi bénéficier de l’appui d’un secrétariat ; l’accès au matériel informatique leur
90
Ordonnance du 18 octobre 1945, abrogée, mais les articles ayant fondé le service de santé scolaire ont été repris
et codifiés dans le code de l’éducation notamment aux articles L. 541-1 (visites obligatoires) et L. 541-3 (centres
médico-scolaires).
91
Décret du 26 novembre 1946.
92
Cf. annexe n° 23.
93
Dans certaines académies, les médecins scolaires ont pour consigne de réaliser prioritairement les visites
médicales (bilan de la 6
e
année, travaux règlementés) dans les CMS. Les familles doivent alors s’organiser pour
accompagner leur enfant. Cela permet aux médecins, évitant des déplacements d’une école à l’autre, de réaliser
davantage de visites et peut être généralisé. Cette mesure peut toutefois écarter des familles en difficulté sociale
ne pouvant se déplacer facilement, en particulier en milieu rural. Il convient alors d’organiser dans un deuxième
temps des visites dans les écoles pour les élèves concernés, comme cela se fait déjà dans certains départements.
La DGESCO indique dans sa réponse à la Cour au sujet des CMS : «
Leur rôle est essentiel pour dégager du temps
médical aux médecins. Des spécificités sont liées à ce rôle de secrétaire médical scolaire : le secret professionnel,
un vocabulaire spécifique éducation nationale et médical, une mobilité éventuelle pour accompagner le médecin
lors de certaines visites (si leur rôle évolue vers des missions d’assistant médico-scolaire), des compétences en
bureautique (application Esculape), des compétences relationnelles
».
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épargnerait des ressaisies postérieures. Le contexte tendu de la santé scolaire plaiderait pour
une telle solution permettant à ces agents de se concentrer sur leurs missions.
Agir à bon niveau politique pour maintenir l’existence des CMS améliorerait l’efficience
du dispositif de santé scolaire à condition qu’ils soient correctement tenus et équipés par le
ministère. Il appartient à celui-ci de clarifier sa politique sur l’évolution des locaux, de
l’équipement et des secrétariats des CMS et d’engager sans délai avec les collectivités
territoriales une concertation à ce sujet.
F - Des logiciels professionnels obsolètes et séparés, en attente de refonte
Aux difficultés de fonctionnement rencontrées par ces personnels s’ajoutent des
problèmes cruciaux liés à l’usage des logiciels professionnels et des systèmes d’information
pour la transmission de leurs données d’activité, qui sont différents par métiers de la santé
scolaire.
Les médecins scolaires doivent utiliser l’application ESCULAPE dont le déploiement est
sur le point de s’achever. Certains médecins en refusent l’usage, invoquant l’absence d’interface
avec les logiciels utilisés par les PMI pour les bilans de santé à 3 ans, ou encore des questions
de respect des droits des familles. Il convient que la DGESCO et la Direction du numérique
pour l’éducation (DNE) apportent une réponse claire et précise sur ces points, d’autant que la
continuité entre PMI et médecine scolaire est renforcée en raison de l’abaissement de l’âge
d’entrée dans la scolarité obligatoire.
Les infirmiers doivent utiliser le logiciel SAGESSE actuellement obsolète et ne pouvant
être utilisé sur tous les ordinateurs. Certaines académies développent de ce fait des applications
spécifiques, en lien notamment avec les ARS, créant parfois pour les infirmiers des problèmes
de double saisie et de perte de temps. Les infirmiers ont également signalé des difficultés
d’accès aux bases élèves, en particulier dans le 1
er
degré
Les PsyEN et les assistants de service social ne disposent pas d’un logiciel professionnel.
Les informations destinées à l’enquête « santé-social » de la DGESCO sont recueillies à l’aide
de tableurs.
Aussi aucun logiciel ou application ne permet à tous les professionnels concernés de
connaître la situation et les actions déjà réalisées pour chaque enfant. La nécessité de concevoir
un socle commun ouvert à tous les personnels médico-sociaux, avec des accès réservés selon
leur profil et des données partagées, n’est apparue qu’après le développement d’ESCULAPE
débuté en 2013. La DNE travaille actuellement, avec la DGESCO, à la conception de de
l’application DIAPASON qui sera partagée entre tous ces agents. Pour assurer le suivi avec la
médecine de ville et les PMI, il est envisagé de créer une interface ESCULAPE/dossier médical
partagé de l’enfant (DMP), en lien avec le ministère chargé de la santé. Néanmoins, le DMP ne
sera pas opérationnel avant plusieurs années et n’offre donc pas de réponse à court ou moyen
terme.
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UN PILOTAGE DISTENDU A L’ORIGINE D’UNE PERTE D’EFFICIENCE
59
La livraison de la première version de DIAPASON n’est prévue qu’en juin 2020, avec un
déploiement en académies devant s’achever
fin décembre 2022
94
, en revanche les personnels
ASS conserveront une application spécifique AMETISSE, prête seulement en juin 2021.
G - Une formation continue insuffisante
La formation continue figure parmi les points les plus faibles de la gestion des personnels
de santé du MENJ. Le ministère lui-même dispose de peu de données à cet égard
95
. Il ne suit
pas les formations continues pour chaque métier, les médecins scolaires, infirmiers et ASS étant
regroupés en trois catégories : personnels médico-sociaux titulaires de catégorie A, de catégorie
B et personnels contractuels.
le ministère indique qu’en 2018, 54 % des personnels médico-sociaux titulaires de
catégorie A et B seulement ont participé à un stage, la durée moyenne annuelle de formation
était d’environ 2,19 jours pour les catégories A et 1,30 pour les catégories B, soit une formation
continue plus réduite encore que celle des enseignants, fort limitée
96
.
La formation médicale continue est une obligation pour les médecins en activité
97
.
Plusieurs médecins scolaires auditionnés ont témoigné de leurs difficultés : certaines formations
payantes ne sont pas remboursées par les rectorats, qui leur attribuent pourtant des autorisations
d’absence pour y participer ; d’autres médecins indiquent qu’ils ne peuvent suivre des
formations par manque de temps.
Pour les PsyEN suivis dans la statistique, la situation est encore plus critique : le ministère
précise que seuls 6 % ont été convoqués à un stage de formation continue en 2017-2018. La
durée moyenne annuelle de formation par agent était de 0,08 jours.
III - Une unité de vue déficiente au plan national
et en académies
A - Le cloisonnement des métiers de santé scolaire répliqué au sein
de la DGESCO
Le pilotage de la santé scolaire n’est pas unifié dans la direction centrale du MENJ qui en
a la charge ; l’organigramme de la DGESCO rend compte d’une réalité sociologique par métiers
94
Les difficultés avancées par la DNE sont la préalable refonte des applications scolarité (BE1D transformé en
ONDE et SCONET transformé en SIECLE), le temps de conception des applications avec les différents
professionnels concernés et
« dans un contexte de plan de charge important, la difficulté d’être en mesure
d’affecter le niveau de ressources satisfaisant
».
95
Les données de la formation continue des plans académiques de formation (PAF) recensent les stagiaires et
journées stagiaires, via les remontées par l’application EGIDE. La DGESCO précise que «
ces données sont d’une
fiabilité limitée du fait des imperfections de la saisie dans l’application Gaia par les services académiques
».
96
En 2017-2018, les personnels enseignants ont réalisé en moyenne environ 2,5 jours de formation dans le premier
degré public, 2,1 dans le second degré public et près de 38,7 % des enseignants n’ont pas suivi de formation dans
le premier degré, 42,4 % dans le second. Source : DEPP. RERS 2019.
97
Serment de l’ordre français des médecins.
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60
qui s’est progressivement instaurée au sein du système éducatif au détriment qu’une vision
d’ensemble.
Au sein du service de l’accompagnement des politiques éducatives, les médecins scolaires
sont suivis par une conseillère technique placée auprès du chef de service tandis que les
conseillères techniques infirmière et de service social sont placées dans le bureau de la santé et
de l’action sociale de la sous-direction de l’action éducative, la gestion des PsyEN relève d’un
autre service, celui de l’instruction publique et de l’action pédagogique et en son sein de deux
bureaux différents selon le niveau d’enseignement au sein duquel ils interviennent
98
.
Cet éparpillement des responsabilités ne permet ni d’appréhender globalement
l’importance de la promotion de la santé, ni de définir une politique unifiée et cohérente. Une
unification de la gouvernance d’ensemble au sein de la DGESCO permettrait d’améliorer la
visibilité et la performance de la politique de santé en faveur des élèves.
Le pilotage de cette politique est fortement déconcentré. L’administration centrale en
vérifie la mise en
œ
uvre par un contrôle et un dialogue de gestion. Le contrôle de gestion est
notamment fondé sur la réalisation stricte du schéma d’emplois et sur le respect des volumes
d’emplois. Le dialogue de gestion piloté par le DGESCO réunit une fois par an chaque académie
et les directions du MENJ. L’évolution des ETP de médecins, infirmiers et ASS y sont
systématiquement relevés, contrairement à la situation des PsyEN, du 1
er
comme du 2
nd
degré,
qui n’est pas étudiée, ces personnels étant incorporés dans la masse des enseignants des 1
er
et
2
nd
degrés. L’activité des PsyEN du 2
nd
degré n’est observée que sous l’aspect des résultats
d’orientation des élèves, relevés chaque année. La promotion de la santé a fait l’objet d’un focus
en 2017 au titre de la conduite des objectifs interministériels arrêtés avec le ministère chargé de
la santé, examinant en particulier la signature des conventions académiques avec les ARS et le
recrutement des médecins.
L’insuffisance des évaluations permettant d’apprécier la performance des académies ne
permet pas d’optimiser la portée de ce dialogue de gestion. En particulier, les disparités
départementales et la situation des élèves de l’enseignement privé sous contrat ne sont pas
étudiées.
B - Une coordination académique préconisée par le ministère,
non mise en
œ
uvre ou sans effets probants
La circulaire du 20 mai 2014, qui précise les modalités de gouvernance académique de la
politique éducative sociale et de santé en faveur des élèves, prévoit notamment la mise en place
d'une cellule académique, réunissant les différents « conseillers techniques » des recteurs. Cette
cellule doit définir les actions de promotion de la santé des élèves selon trois axes : l'éducation,
la prévention et la protection.
Si le ministère a perçu depuis 2014 la nécessité de renforcer le pilotage de la politique de
santé dans les rectorats par la création de ces cellules académiques, l’enquête de la Cour montre
qu’elles n’ont pas été mises en place dans toutes les académies. Des recteurs se contentent de
réunir ou de rencontrer individuellement leurs conseillers techniques ou de prendre
98
Bureau des écoles maternelles et élémentaires pour les PsyEN du 1
er
degré et bureau de l’orientation et de la
lutte contre le décrochage scolaire pour les PsyEN du 2
nd
degré.
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61
connaissance des notes qu’ils peuvent rédiger. Le travail académique sur la promotion de la
santé et la mise en
œ
uvre du partenariat avec les ARS repose majoritairement sur les conseillers
techniques infirmiers, relayés dans les DSDEN et les établissements par leurs collègues
infirmiers, même si ponctuellement certains médecins conseillers techniques peuvent s’investir.
Les conseillers techniques et le CSAIO sont associés aux processus de répartition des moyens,
souvent uniquement pour la catégorie de personnel qu’ils représentent.
La circulaire n° 2016-114 du 10 août 2016, « Orientations générales pour les comités
d'éducation à la santé et à la citoyenneté », dans l’objectif d’unifier les politiques académiques
et départementales, a instauré des comités d’éducation à la santé et à la citoyenneté au niveau
académique (CAESC) et départemental (CDESC), s’ajoutant aux comités d’éducation à la santé
et à la citoyenneté (CESC) qui préexistaient (en principe) dans les établissements du second
degré. L’objectif, à la suite de la création du « parcours éducatif de santé », est « de donner
cohérence et lisibilité à la politique éducative, sur la base des diagnostics de territoires et grâce
à une construction des partenariats nécessaires dans une démarche globale et fédératrice ». Ces
comités ont pour vocation de réunir les acteurs concernés de l’éducation nationale mais aussi
les partenaires extérieurs locaux (ARS, police, justice, associations…).
L’enquête de la Cour a montré que tous les CAESC et les CDESC n’étaient pas actifs,
voire pas mis en place, malgré le contrôle exercé en 2017 dans le cadre du dialogue de gestion
avec la DGESCO. 12 académies sur 30 seulement ont été en mesure de présenter à la Cour le
compte rendu d’une réunion du CAESC en 2018-2019. La situation est la même dans les
DSDEN, ces dernières tardant à mettre en place les CDESC.
La circulaire de 2016, outre la création des CAESC et des CDESC, étend la possibilité,
sans la rendre obligatoire, de création des CESC inter-degrés au niveau d’un collège et des
écoles primaires de recrutement, ainsi que de CESC inter-établissements.
L’atomisation et le manque de visibilité et d’homogénéité des actions de promotion de la
santé devraient inciter à aller plus loin et supprimer l’obligation de créer le CESC dans les
établissements du second degré au profit de CESC de bassin inter-degrés
99
. Le bassin
d’éducation paraît désormais le meilleur échelon permettant de définir une politique de
promotion de la santé en fonction des besoins locaux et un « parcours éducatif de santé »
cohérent pour chaque élève pendant sa scolarité de l’école maternelle jusqu’au lycée. Pour les
partenaires extérieurs à l’éducation nationale, l’attractivité des réunions serait accrue par la
présence des représentants de toutes les écoles et établissements du secteur.
Cette redéfinition de la politique au niveau des bassins ne devrait toutefois pas éclipser le
nécessaire partenariat des personnels sociaux et de santé avec les enseignants de chaque
établissement ou école. La création d’un CESC de bassin peut s’accompagner d’une souplesse
laissée aux établissements pour maintenir un CESC s’ils le souhaitent.
99
Dans le cadre du bassin d’éducation, regroupant plusieurs écoles, lycées et collèges d’un même secteur
géographique, les IEN, les chefs d’établissements, le directeur de CIO et le conseiller technique de service social
du bassin se réunissent régulièrement et peuvent accueillir occasionnellement les conseillers techniques
départementaux des infirmiers et des médecins.
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COUR DES COMPTES
62
C - La pluralité confuse des organisations académiques
pour les visites obligatoires
Après l’arrêté interministériel du 3 novembre 2015 qui a marqué un coup d’arrêt à la
collaboration entre personnels infirmiers et médecins pour la visite de la 6
e
année et confrontée
à cette difficulté, la DGESCO a adressé le 18 décembre 2015 un courrier aux recteurs indiquant
que les visites de la 6
e
et 12
e
années, « systématiquement réalisées auprès de tous les enfants »
nécessitent, pour être effectives, la collaboration des personnels de santé.
L’administration, au niveau central comme académique, a tenté de préserver les
collaborations qui existaient entre médecins et infirmiers sur le terrain et optimisaient le nombre
de visites de la 6
e
année : le bilan infirmier (biométrie, dépistage sensoriel, bucco-dentaire,
contrôle des vaccinations) associé à la visite médicale permettait au médecin de voir beaucoup
plus d’enfants, en se concentrant sur les troubles des apprentissages ou des pathologies
particulières. Faute de collaboration entre les deux professionnels de santé, la visite par le
médecin prend désormais 45 minutes.
Le courrier de la DGESCO a été mis en cause pour non-conformité à l’arrêté du
3 novembre 2015, certains personnels sollicitant l’analyse de services juridiques. Deux mois
plus tard, un nouveau courrier a été adressé aux recteurs par le directeur du cabinet du ministre,
tentant d’apaiser la situation, en reprenant une formulation plus proche de l’arrêté de 2015 :
« La visite médicale à 6 ans est réalisée par les médecins et celle de dépistage à 12 ans, par les
infirmiers ».
Pour autant cette dernière lettre ne fermait pas complètement la porte à une intervention
des infirmiers à 6 ans : […] « outre les deux visites médicales et de dépistage obligatoires, les
infirmiers peuvent être amenés à effectuer des visites de dépistage supplémentaires pour
répondre aux besoins de certains élèves, notamment dans le premier degré ». Une liberté de
détermination est laissée à chaque professionnel de santé : « Chaque professionnel de santé,
dans le cadre de ses compétences, poursuivra les examens en fonction des constatations qu’il
aura effectuées ».
Les services académiques ont ainsi reçu ordre et contrordre sur l’organisation des visites
médicales obligatoires de la 6
e
année. Dans ce contexte confus, les recteurs ont pris à leur niveau
des dispositions, par circulaire.
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UN PILOTAGE DISTENDU A L’ORIGINE D’UNE PERTE D’EFFICIENCE
63
Nombreux sont ceux qui ont organisé un ciblage des enfants ayant le plus besoin de la
visite par le médecin. Cette doctrine du ciblage a fini par s’imposer en référence à
« l’universalisme proportionné »
100
. La réalité est néanmoins plus proche du simple ciblage que
de la mise en
œ
uvre de l’universalisme proportionné, car beaucoup d’enfants qui auraient
besoin de cet examen médical n’en bénéficient pas, soit faute de médecin scolaire disponible,
soit parce qu’ils sont élèves de l’enseignement privé, soit parce que, élèves du public, ils ne
figurent pas parmi les élèves ciblés.
Les circulaires rectorales sont diverses et diversement prescriptives.
Celle de la région académique Auvergne-Rhône-Alpes (15 décembre 2016) indique que
le bilan de la 6
e
année
«
sera réalisé selon le principe d’universalisme proportionné afin de
privilégier les interventions des médecins auprès des populations d’élèves les plus en
difficulté… une vigilance accrue des personnels de santé sera portée aux élèves scolarisés dans
les zones d’éducation prioritaire, les zones rurales, et à ceux présentant des besoins éducatifs
particuliers
».
Sur cette base, l’académie de Lyon a précisé à son niveau son ciblage : « élèves
pour lesquels le milieu socio-éducatif est défavorisé (dont REP-REP+) ; les enseignants
repèrent une problématique d’apprentissage ou de comportement, la famille signale un
problème de santé encore non évalué, les services de PMI ont dépisté un problème et la prise
en charge n’est pas effective, aucun bilan de 3-4 ans n’a été transmis par la PMI
»
. Pour les
autres élèves, on conseille aux familles de faire pratiquer ce bilan par le médecin de leur choix.
La méthode de ciblage est moins précise dans d’autres circulaires académiques laissant
une grande initiative aux autorités locales ou directement aux médecins. La méthode de la
sélection sur dossier, à l’aide des éléments du dossier de PMI de l’enfant, de la fiche de liaison
établie par les enseignants (qui leur permet de transmettre leurs observations sur la manière
dont l’enfant aborde les apprentissages en grande section de maternelle), d’éléments recueillis
par le psychologue scolaire, et éventuellement du carnet de santé de l’enfant, s’il est
communiqué (académies de Lille, Toulouse), est parfois retenue.
Certaines académies ont réussi à réinstaurer une collaboration entre les personnels en
confiant aux personnels infirmiers le repérage des élèves qui doivent prioritairement être vus
par un médecin scolaire. Ainsi l’académie de Nantes prévoit que le médecin réalise un ciblage
à la fois sur dossier et en « échange en présentiel » avec l’infirmier, pour identifier « les enfants
nécessitant une visite médicale en complément du dépistage infirmier » qui reste ainsi d’usage.
La plupart des circulaires tentent de ménager un dépistage infirmier au cours de la 6
e
année,
quitte à le déconnecter de la visite du médecin, pour réduire le nombre d’enfants qui ne sont
100
L'universalisme proportionné est né du constat que ni les approches universelles ni les approches ciblées ne
parvenaient à réduire les inégalités sociales de santé. Selon Julie Poissant, de l’Institut National de Santé Publique
du Québec
: « Les interventions universelles négligent une tranche importante de la population, c’est-à-dire ceux
qui ont besoin d’un soutien accru et qui sont plus difficiles à rejoindre. [...] Et par l'approche ciblée, le fait d’offrir
l’intervention uniquement à certaines clientèles contribue à les stigmatiser et néglige les besoins de ceux non
éligibles. »
Sir Michael Marmot a défini le concept d’Universalisme proportionné en 2010, à la demande du Ministère de la
santé britannique, dans le but d’aplanir la pente du gradient social. Julie Poissant (INSPQ) en donne la définition
suivante :
- mettre en
œ
uvre des actions de prévention universelle / promotion de la santé s’adressant à l’ensemble de la
population = universalisme
- et agir sur chaque catégorie de la population selon ses besoins = proportionné.
Source : Promosanté, ARS Île-de-France.
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COUR DES COMPTES
64
vus par aucun professionnel de santé à ce moment crucial d’entrée dans les apprentissages à la
veille de l’accès au cours préparatoire.
De surcroît ces modalités d’organisation sélective de la visite médicale se déclinent avec
des variantes à l’échelle de telle ou telle inspection d’académie.
Force est de constater qu’avec le partage des tâches tracé dans l’arrêté de 2015 entre
personnels infirmiers et médecins scolaires, le ministère s’est mis dans une grande difficulté
qui l’a ensuite conduit à contourner sa propre réglementation par des instructions d’application
très confuses et mal étayées. Dans ces conditions, les personnels infirmiers qui ont souhaité
continuer leur collaboration avec les médecins l’ont fait, bravant parfois des consignes
syndicales, tandis que ceux qui souscrivaient à une complète autonomie des activités
respectives des médecins et des infirmiers ont pu s’en tenir à la lettre de l’arrêté de 2015,
s’agissant de la visite de la 6
e
année, principal dépistage de santé des élèves.
Quoiqu’il en soit l’universalité de ce bilan, maintenue par la loi de refondation de l’école
de 2013, a été mise à mal sans qu’un cadrage national de son resserrement, peut-être inévitable
et opportun au vu des autres dispositifs de suivi de l’état sanitaire des enfants, n’ait été arrêté.
Par ailleurs, tant pour les visites de la 6
e
année que pour les bilans infirmiers de la
12
e
année, les modalités de prise en compte des élèves de l’enseignement privé sont, dans la
confusion des consignes nationales, laissées à l’appréciation des autorités académiques.
Le taux de dépistage de la 6
e
année par les médecins scolaires a chuté de 17 % environ en
2013-2014 à 4 % en 2018-2019, avec une majorité de départements ne couvrant pas
l’enseignement privé sous contrat. Les dépistages infirmiers de la 12
e
année par les personnels
de l’éducation nationale sont pratiquement inexistants dans les établissements privés.
Ce constat est d’autant plus préoccupant au regard des importants effectifs scolarisés dans
l’enseignement privé dans certaines académies ou départements, comme le montre le tableau
ci-après.
Tableau n° 7 : taux de réalisation des visites de santé obligatoires dans les
10 départements où la part des élèves scolarisés dans le privé est la plus élevée
Départements
Part du privé
(1
er
+ 2
nd
degrés)
Part du privé
dans le 1
er
degré
Tx VM de la 6
e
année dans le
privé
Part du privé
dans le 2
nd
degré
Tx bilan infirmier de
la 12
e
année dans le
privé
Vendée
51,5 %
50,7 %
21,4 %
52,5 %
0 %
Morbihan
49,9 %
49,4 %
ND
50,5 %
0 %
Maine-et-Loire
42,3 %
38,9 %
4,9 %
46,5 %
0 %
Finistère
40,2 %
37,2 %
ND
43,7 %
0 %
Ille-et-Vilaine
38,2 %
36,9 %
4,5 %
39,8 %
0 %
Haute-Loire
37,5 %
33,2 %
0,0 %
42,4 %
0 %
Lozère
36,8 %
33,6 %
0,0 %
40,0 %
0 %
Mayenne
36,4 %
34,0 %
0,0 %
39,3 %
0 %
Loire-Atlantique
36,3 %
33,5 %
ND
39,7 %
0 %
Côtes-d'Armor
32,1 %
30,8 %
ND
33,5 %
0 %
Moyenne nationale
17,3 %
14,0 %
4,0 %
21,2 %
1,2 %
Source : Calcul Cour des comptes d’après données du RERS et réponses des académies
ND : Départements pour lesquels les académies n’ont pas été en mesure de ventiler par secteur d’enseignement les visites
réalisées
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UN PILOTAGE DISTENDU A L’ORIGINE D’UNE PERTE D’EFFICIENCE
65
La DGESCO indique que «
dans les départements bénéficiant d’effectifs suffisants, les
visites de la 6
e
année sont effectuées dans le privé sous contrat par les médecins de l’éducation
nationale, seuls personnels de la vie scolaire à y intervenir (les infirmiers, psychologues et
assistants de service social n’y interviennent qu’exceptionnellement, en cas d’événement grave
par exemple) ; Le bilan infirmier de la 12
e
année est effectué dans les établissements privés
sous contrat qui emploient eux-mêmes un infirmier
».
La direction des affaires financières du ministère, chargée de l’enseignement privé sous
contrat, procède de son côté à un abattement de 10 % sur la part infirmier du forfait d’externat
versé à ces établissements, au motif que ceux-ci supportent de moindres dépenses car le bilan
infirmier de la 12
e
année doit être effectué par les personnels infirmiers de l’éducation nationale,
selon les termes de l’arrêté du 3 novembre 2015. En contrepartie, la DGESCO, chargée de
l’exécution de l’arrêté de 2015, doit s’assurer de la réalisation du bilan de santé de la 12
e
année
dans l’enseignement privé.
Or l’enquête menée par la Cour a montré que les personnels infirmiers, assistants de
service social et psychologues n’interviennent dans l’enseignement privé que rarement et à la
demande, notamment pour des élèves à besoins particuliers, surtout porteurs de maladie ou
handicap.
Ainsi près du cinquième des élèves, en raison de leur scolarisation dans des écoles et
établissements privés, ne bénéficient pas ou très rarement de l’intervention des personnels de
santé scolaire alors que les financements correspondants ne sont pas non plus alloués, ce qui
compromet l’universalité du dispositif.
_______________________________ CONCLUSION ______________________________
Responsable du pilotage des personnels et des services, le ministère chargé de
l’éducation nationale n’a pas imposé des modes de leur gestion qui garantissent la cohérence
de la conduite des dispositifs de santé scolaire et ceci à tous les échelons de son organisation.
La gestion des ressources humaines de ces personnels, très déconcentrée, est assurée en
« silos », tant dans les rectorats qu’en administration centrale, les instructions pour créer des
instances collaboratives locales entre ces personnels sont diversement appliquées et leurs effets
demeurent marginaux, les applications informatiques sont encore distinctes entre les différents
métiers.
Dans les académies, l’encadrement opérationnel est inopérant, éclaté entre une chaîne
hiérarchique et une chaîne fonctionnelle ce qui laisse de facto aux agents une large autonomie
individuelle dans l’organisation de leur travail et la détermination des priorités. D’autant que
le service de ces personnels est souvent fragmenté entre plusieurs missions et structures
éducatives ou sociales, voire compétentes en matière d’orientation, et que le temps de travail
est à la fois mal cerné et trop calqué sur le cadre enseignant.
D’une manière générale, les outils classiques de management manquent: absence de
fiches de poste, lettres de mission à titre exceptionnel (pour des missions particulières), peu de
rapports d’activité, tableaux de bord de suivi de l’activité des personnels incomplets, défaut de
rendez-vous annuels d’évaluation, formation continue indigente.
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COUR DES COMPTES
66
La prise de conscience du ministère de certaines difficultés et carences est réelle : l’effort
de revalorisation des rémunérations des médecins déjà entrepris, doit être poursuivi, les
applications informatiques sont en cours de rénovation et d’unification et ce processus doit être
accéléré, les instances de concertation créées sont utiles mais elles doivent être effectives; le
périmètre du bassin d’éducation serait plus pertinent pour assurer un continuum de suivi de la
santé des élèves.
Cependant ces actions souhaitables resteront des palliatifs aux effets limités, faute d’une
structuration en services de santé scolaire et d’un pilotage national vigoureux. Les
atermoiements nombreux pour réorganiser après 2015 la prise en charge des bilans de santé
de la 6° année en témoignent ; aujourd’hui la situation est d’une grande confusion et de facto
non maîtrisée par le ministère qui a la charge de leur mise en
œ
uvre.
Cette situation, due en partie à une excessive prise en compte de revendications
catégorielles, constitue une cause majeure de perte d’efficience, d’autant plus dommageable
que le service public est fragilisé par une pénurie de médecins qui ne pourra être surmontée
qu’à moyen-long terme. Aussi l’organisation des services est-elle à revoir.
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Chapitre III
Une organisation à revoir
Tant les constats sur la performance de la santé scolaire à l’aune des visites et dépistages
obligatoires que les observations sur l’organisation des services et la gestion des personnels
conduisent à préconiser une refonte profonde de la conduite de la santé scolaire, à l’instar des
nombreux rapports publiés sur le sujet et rappelés précédemment.
Ne méconnaissant pas les obstacles sociaux et culturels à surmonter pour conduire cette
transformation, le rapport recommande de mettre en place une instance d’appui qui garantira la
prise en compte des aspects déontologiques propres aux métiers de la santé scolaire.
I - Créer un service académique de la vie et de la santé de l’élève
La difficulté majeure à laquelle se heurte la santé scolaire est l’absence de service social
et de santé scolaire au niveau déconcentré.
A - Restaurer une unité d’action et de management
Les organigrammes de certains rectorats font apparaître une superposition de services :
par exemple, au sein du rectorat de Paris, un pôle « Élèves et politiques éducatives » comprend
entre autres un service médical en faveur des élèves, un service infirmier en faveur des élèves,
un service social en faveur des élèves, sans compter une mission académique pour la
scolarisation des élèves handicapés, autant de petites cellules autour de chacun des conseillers
techniques du recteur ; dans d’autres rectorats, seuls les conseillers techniques figurent dans
l’organigramme. Tous les rectorats ont un service académique d’information et d’orientation,
qui pilote les centres d’information et d’orientation, et les psychologues du second degré, tandis
que ceux du premier degré relèvent de l’inspecteur de l’éducation nationale de leur
circonscription.
Des dispositions sont prises dans des notes rectorales, autant que dans les circulaires
ministérielles, pour organiser la collaboration pluri-professionnelle que tous jugent
indispensable pour prendre en charge les besoins de santé des élèves, et pour assurer une
coordination des quatre métiers qui contribuent le plus directement à la santé scolaire. Elles
sont peu efficaces.
La chaîne fonctionnelle qui relie le conseiller technique du recteur (médecin, infirmier,
assistant social) au conseiller technique de l’Inspecteur d'Académie – Directeur Académique
des Services de l'Education Nationale (IA-Dasen) et aux médecins de secteur, assistants sociaux
et infirmiers n’est pas hiérarchique, et la chaîne hiérarchique peut toujours être contournée en
s’abritant derrière les instructions fonctionnelles. Les psychologues quant à eux, exercent dans
une sphère séparée, alors que leur intervention est fondamentale pour diagnostiquer les troubles
des apprentissages et répondre aux problèmes de mal-être des élèves. Les collaborations,
lorsqu’elles existent entre les différents services, reposent sur la bonne volonté des personnes,
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COUR DES COMPTES
68
et sont donc fragiles, faute de l’organisation structurée d’un service qui garantisse par des
procédures et méthodes partagées une coordination et une collaboration en toute situation.
Le cloisonnement des services et une conception trop autocentrée sur l’exercice des
métiers prédominent, et constituent un obstacle majeur à l’efficacité et à l’efficience des
services, situation d’autant plus paradoxale qu’il y a une tension sur les moyens humains.
Aussi la Cour préconise-t-elle de réformer l’organisation des services déconcentrés, à la
fois au sein des rectorats et des directions des services départementaux de l’éducation nationale,
pour remédier à l’éclatement des services et à la dilution des responsabilités.
La création, à ces deux niveaux, d’un service social et de santé, incluant aussi les
fonctions des psychologues qui exercent en circonscription ou en établissement ne peut aboutir,
que ce soit dans les rectorats ou les DSDEN, que si les quatre métiers qui doivent collaborer
sont traités à égale dignité, chacun ayant des compétences propres qu’il doit continuer d’exercer
dans ce cadre commun coordonné : les fonctions des uns et des autres ne sont pas
interchangeables et il convient d’en tenir compte.
Pour respecter ces équilibres entre métiers, la direction de ces services devrait être confiée
à des inspecteurs d’académie chevronnés. Un tel service permettrait en premier lieu à tous ces
personnels de bâtir ensemble, dans une approche pluri-professionnelle, un projet de service à
proposer selon le cas au directeur départemental ou au recteur, à partir d’une analyse partagée
des besoins de santé des élèves du département ou de l’académie, en faisant des propositions
communes d’articulation et de priorisation de leurs interventions. Une programmation fine et
collective de ces interventions doit permettre d’améliorer les résultats. Il s’agit aussi de redéfinir
la politique locale de promotion de la santé par la création de CESC de bassin pilotés par un
inspecteur (IEN) ou un chef d’établissement missionné par ce service, en lieu et place des CESC
actuellement développés dans les EPLE dont le caractère obligatoire serait supprimé.
La qualité du management apparaît comme un facteur clé de succès de tels services : il
s’agit à la fois de préserver l’autonomie de décision professionnelle de chaque agent dans
l’exercice de ses compétences métier, et de faire basculer l’ensemble de ces agents dans un
fonctionnement en mode projet, avec des objectifs partagés de résultats collectifs en termes de
service rendu aux élèves.
La création de ces services doit être l’occasion de réajuster au profit du premier degré les
moyens en personnels infirmiers et d’assistance sociale, trop concentrés comme on l’a vu
ci-dessus sur les élèves du second degré.
C’est dans le cadre de cette réorganisation que pourra être prévue la revalorisation
indemnitaire des médecins de l’éducation nationale, qui en améliorant l’attractivité du
métier,permettrait au ministère de pourvoir les postes vacants afin de doter ces services unifiés
des médecins indispensables.
Corollaire de ce regroupement des services, l’unité budgétaire doit être réalisée en
réunissant dans le programme 230,
Vie de l’élève
, l’ensemble des moyens et personnels de la
santé scolaire, y compris les psychologues de l’éducation nationale.
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UNE ORGANISATION À REVOIR
69
B - Améliorer les conditions courantes d’exercice des métiers
de santé scolaire
La création de tels services permettra d’optimiser les moyens support nécessaires au bon
fonctionnement de la santé scolaire, ce qui n’est pas le cas à l’heure actuelle, par défaut
d’identification d’un responsable unique et d’une mutualisation des procédures et moyens.
La question des centres médico-scolaires, ou, à défaut, de locaux appropriés pour les
visites médicales, pour les bilans infirmiers, les bilans ou entretiens avec le psychologue
scolaire ou l’assistant social, qui nécessitent un aménagement et une garantie de confidentialité,
doit être traitée par ce service avec les collectivités territoriales. Celles-ci manquent en l’état
actuel d’un interlocuteur identifié.
Les secrétariats médico-scolaires sont indispensables, pour permettre à ces professionnels
de se concentrer sur les élèves, au lieu de consacrer une part trop importante de leur temps à
des tâches administratives (comme par exemple la saisie dans le logiciel ESCULAPE des
données du dossier papier de PMI de l’enfant). La création de ce service permettra là aussi une
meilleure identification et mutualisation des besoins.
Des progrès décisifs et rapides doivent être faits sur les systèmes d’information à la
disposition de ces services, en organisant les accès partagés à un dossier élève, chaque
professionnel devant pouvoir accéder à la partie qui le concerne.
Les déplacements doivent être facilités en simplifiant les procédures et en prévoyant, dans
le cadre de la gestion déconcentrée, des moyens de fonctionnement qui permettent d’optimiser
la couverture des différents sites d’intervention.
II - Revoir le partage des tâches entre médecins et infirmiers
Quelques données fondamentales doivent être rappelées pour comprendre l’enjeu d’une
restauration de la collaboration entre les personnels de santé scolaire.
Une cohorte de grande section de maternelle représente un effectif d’environ
800 000 enfants. Il n’est pas réaliste de prévoir une visite par le médecin scolaire pour la totalité
de ces enfants avec des effectifs de médecins autour d’un millier de praticiens. Et quand bien
même le ministère ouvrirait des centaines de postes de médecins scolaires, il ne parviendrait
pas à les recruter.
Si on proportionne la charge de dépistage de la 6
e
année au nombre de médecins, en tenant
nécessairement compte de la charge des consultations à la demande et de leurs autres activités
(comme le suivi des élèves porteurs de handicap, atteints de pathologie chronique ou les visites
d’aptitude des mineurs aux travaux réglementés), alors une grande majorité d’enfants risquent
de n’être vus par aucun professionnel de santé dans le cadre de la santé scolaire. Comme
l’enquête l’a démontré, ce nombre augmente et les ciblages effectués sont désordonnés.
Or, la loi fait jusqu’à à présent du bilan systématique de la 6
e
année la mesure phare de la
santé scolaire. Il paraît donc nécessaire de mobiliser pour répondre à cet objectif les
compétences disponibles qui sont aussi celles d’environ 9 000 personnels infirmiers et
3 900 psychologues du premier degré.
Les médecins et les personnels de santé scolaire - mai 2020
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COUR DES COMPTES
70
Pour ce faire il est impératif de revoir le partage des tâches entre les uns et les autres,
surtout entre médecins et infirmiers.
Les dispositions prises par l’arrêté de 2015, séparant les domaines d’intervention des
médecins et infirmiers dans les dépistages, se sont inscrites à contre-courant des évolutions
récentes de la politique sanitaire, qui aujourd’hui, compte tenu de l’évolution des métiers, des
connaissances et des formations, redistribue en partie les missions entre professionnels de santé,
confiant, hors de l’école, de nouvelles tâches aux professionnels de proximité que sont les
infirmiers et les pharmaciens. Au sein même de l’école, les infirmiers se sont vu confier la
délivrance de la contraception d’urgence, le renouvellement de la prescription de contraceptifs,
et la prescription de substituts nicotiniques.
Les enjeux de dépistage mériteraient d’envisager une demande d’avis de la Haute autorité
de santé (HAS) sur la faisabilité d’un protocole de coopération entre médecins de l’éducation
nationale et infirmiers scolaires pour les bilans de santé de la 6
e
année, dès lors que la HAS est
déjà saisie de la même question pour la coopération entre médecins et infirmières puéricultrices
de la PMI. Une coopération de même nature pourrait être étudiée pour la visite préalable à
l’affectation des mineurs aux travaux réglementés, sur le modèle de la nouvelle réglementation
relative à la santé au travail qui ménage une coopération entre médecin du travail et infirmier
en santé au travail
101
.
La direction générale de l’offre de soins précise que « le dispositif des protocoles de
coopération entre professionnels de santé a été substantiellement rénové par la loi du 24 juillet
2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé : il instaure la notion
de protocole national, constitué dans des conditions respectant des exigences essentielles
définies par décret et auquel l’adhésion des équipes est facilitée. Dans ce cadre, un projet de
rédaction d’un protocole national entre médecins scolaires et infirmières puéricultrices de PMI
est en cours d’étude avec la direction générale de la santé (DGS). » Si ce projet concerne
l’examen de santé de 4 ans, il pourrait être étendu à celui de 6 ans. En revanche, « pour traiter
la question relative aux élèves mineurs du secteur professionnel, il conviendrait d’envisager un
autre protocole national qui pourrait répondre au besoin constaté. » Cette direction considère
que « l’implication des infirmiers scolaires dans de tels protocoles de coopération est
souhaitable ».
III - Doter le ministère d’un conseil de la santé scolaire,
rendre compte des résultats du service public
Le pilotage ministériel doit s’appuyer sur une instance qui puisse mobiliser des
évaluations externes et jouer le rôle d’un conseil scientifique, assurant aussi une interface avec
l’écosystème de santé publique. Un tel appui est indispensable pour mener à bien au sein du
ministère la nouvelle articulation des métiers de la santé scolaire.
Les professionnels de ces métiers ont besoin de référents de haut niveau dans leur
domaine, qui aident le ministère à prendre en compte l’évolution des connaissances
101
Plusieurs décrets d’application de la loi n° 2011-867 de juillet 2011 relative à l’organisation de la médecine du
travail ont été publiés en 2012 : le décret 2012-135 précise la formation et le rôle des infirmiers au sein de cette
nouvelle organisation de la santé au travail. L’infirmier recruté est diplômé d’État.
S’il n’a pas de formation en
santé au travail, il doit bénéficier d’une formation au plus tard dans les 12 mois qui suivent son recrutement.
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71
scientifiques et soient en capacité de produire des avis sur les mesures les plus efficaces pour
permettre à l’éducation nationale de faire face aux besoins de santé croissants liés à l’école.
Il est proposé de créer un Conseil de la santé scolaire, instance consultative placée auprès
du ministre, et composée de personnalités reconnues pour leur expertise et leur expérience dans
le domaine de la santé de l’enfant et de l’adolescent, de la santé publique, et de la formation des
médecins, des psychologues, et des personnels infirmiers et d’assistance sociale. Il serait utile
qu’y siègent également un spécialiste d’évaluation des politiques publiques, un recteur et un
directeur d’ARS (ou un directeur de la prévention au sein d’une ARS), ainsi que la direction
générale de la santé et la direction générale de l’offre de soins. Le secrétariat pourrait en être
assuré conjointement par la DGESCO et la DEPP.
Ce Conseil aurait notamment vocation à examiner une fois par an un rapport annuel sur
la santé scolaire établi par la DGESCO, responsable de cette politique, avec l’aide de la DEPP,
car l’enquête santé-social doit être reprise en main, recadrée et supervisée par les services
statistiques du ministère, pour en fiabiliser la méthodologie et la déployer de manière
obligatoire pour les services. La santé des élèves est une préoccupation importante des pouvoirs
publics, comme des familles ; elle est l’objet d’une politique interministérielle ; elle a donné
lieu à de multiples commandes d’expertises et de rapports et mobilise une grande attention du
Parlement, les élus étant alertés sur ses difficultés et ses insuffisances. Autant de raisons
d’assurer la transparence sur sa mise en
œ
uvre, et de rendre compte annuellement de ses
résultats et de sa situation (y compris en termes de moyens et collaborations mobilisables) dans
un rapport public.
Pour le ministère, cette publication annuelle constituerait un point d’appui pour doter les
services sociaux et de santé, tels que préconisés ci-dessus, d’une feuille de route intégrant une
démarche de progrès dans la prise en compte des besoins de santé des élèves, avec un calendrier
pluriannuel visant à atteindre des résultats cibles, par exemple en matière de dépistages, ou
encore d’amélioration de l’accès aux soins en aval.
Le Conseil pourrait également être saisi de demandes d’avis, émanant du Ministre ou du
DGESCO, sur tout texte ou dispositif concernant la santé scolaire. Il aurait la faculté, en lien
avec la DEPP, de demander des évaluations externes et d’en examiner les résultats.
IV - Développer la complémentarité avec la médecine libérale
Actuellement, 20 consultations de dépistage concernant les enfants et adolescents sont
prises en charge par l’assurance maladie
102
.La médecine de ville est couramment sollicitée pour
les examens obligatoires. Dans un certain nombre de cas, lorsque l’enfant a été suivi en PMI ou
par un médecin généraliste, un pédiatre de ville ou en service hospitalier, il a un carnet de santé
à jour, et la visite médicale scolaire de la 6
e
année vient doublonner le suivi opéré en dehors de
l’école.
L’articulation du parcours de l’enfant entre la médecine de PMI, la médecine de ville et
la médecine scolaire est ainsi déjà effective. Aussi l’éducation nationale pourrait organiser
autrement le processus de dépistage de la 6
e
année en s’appuyant sur la communication
systématique par les familles du carnet de santé. Cette combinaison de moyens, d’une part grâce
102
Cf. annexe n° 25
: Arrêté du 26 février 2019 relatif au calendrier des examens médicaux obligatoires de l'enfant.
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COUR DES COMPTES
72
à un nouveau partage des tâches avec les personnels infirmiers, d’autre part par la collaboration
avec la médecine de ville, assurerait un rehaussement des cas vus ainsi qu’un ciblage pertinent
à partir des informations recueillies.
En effet, le dépistage de la 6
e
année par le médecin scolaire devrait alors être programmé
pour tous les enfants pour lesquels une visite de la 6
e
année n’est pas déjà attestée par la
présentation du carnet de santé, ou pour lesquels cette visite a conduit à un signalement de
problèmes nécessitant un suivi médical en aval, ou encore dont les difficultés repérées dans le
contexte scolaire appellent un examen plus approfondi et/ou la mise en place d’une prise en
charge.
V - Systématiser la contractualisation avec les partenaires
de la santé publique
L’éducation nationale est engagée dans des partenariats institutionnels susceptibles de
compléter l’action de la médecine scolaire, pour peu que les acteurs académiques et locaux s’en
emparent de manière proactive, après une première phase, indispensable, d’expression des
besoins. Des actions sont mises en place avec des collectivités territoriales : villes de santé
scolaire, mais aussi d’autres collectivités. À titre d’exemple, les enfants des écoles de Rupt- sur-
Moselle, visitées au cours de l’enquête, ont bénéficié en maternelle d’un repérage et d’une
correction des troubles visuels par un orthoptiste, à l’initiative du département des Vosges. De
nombreux réseaux associatifs de professionnels de santé (dentistes, praticiens parfois retraités)
entourent l’école et peuvent être mobilisés pour la prévention ou le dépistage.
Néanmoins les partenaires les plus importants sont les agences régionales de santé (ARS)
et l’assurance maladie.
A - Avec les ARS, étendre des contractualisations fructueuses
La convention cadre de partenariat en santé publique de 2016 a donné lieu à une
déclinaison régionale entre chaque ARS et les rectorats de la région considérée
103
. Les
conventions s’appuient sur le diagnostic des besoins de santé des élèves et conduisent à des
actions de prévention et de promotion de la santé menées en partenariat avec les services de
l’éducation nationale.
Les ARS soutiennent la mise en
œ
uvre d’actions collectives de promotion de la santé
portant sur les axes prioritaires d’intervention définis dans les conventions. Il résulte de leurs
réponses au questionnaire de la Cour qu’elles y consacrent annuellement environ 17 millions
d’euros. Les données communiquées par les ARS révèlent que les actions menées dans les
établissements scolaires sont très diverses, mais peuvent être regroupées en grandes
thématiques. Les actions de prévention des conduites addictives (tabac, alcool, cannabis, etc. )
et des conduites à risques au sens large (risques liés aux écrans, risques auditifs, etc.) sont de
loin les plus nombreuses ; viennent ensuite les actions liées à la vie affective et sexuelle ; les
actions de développement des compétences psychosociales et les actions liées à la nutrition,
l’équilibre alimentaire et l’activité physique, ainsi que la santé mentale. La santé
103
Cf. annexe n° 26.
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73
environnementale et l’hygiène bucco-dentaire constituent des thématiques un peu moins
fréquentes.
Ces actions se fondent souvent sur des programmes probants labellisés par l’agence Santé
publique France (SpF) tels que le programme
Unplugged
, programme européen de prévention
de la consommation de substances psychoactives en milieu scolaire ; les programmes
TABADO et ASSIST de lutte contre le tabagisme ou encore le programme ICAPS (intervention
auprès des collégiens, centrée sur l'activité physique et la sédentarité). D’autres sont en cours
d’expérimentation comme le dispositif « Ecout’émoi » déployé dans les régions Île-de-France,
Grand Est et Pays-de-Loire auprès des jeunes de 11 à 21 ans en détresse psychologique. Les
ARS n’interviennent pas directement dans les établissements scolaires mais financent des
opérateurs chargés d’accompagner les équipes éducatives dans le cadre de projets de
prévention : l’IREPS, l’ANPAA, Oppelia sont quelques-uns des plus représentatifs parmi un
panel très large de structures associatives.
Les actions de prévention et de promotion de la santé sont sélectionnées sur appels à
projets lancés auprès des établissements scolaires. Les dossiers sont choisis en concertation
avec les services de l’éducation nationale après instruction par les directions départementales
des ARS. Les projets doivent répondre à certains critères d’éligibilité. Les ARS exigent
généralement qu’ils soient co-construits avec les équipes éducatives, qu’ils s’inscrivent en
complément des objectifs du Comité d’éducation à la santé et à la citoyenneté (CESC), ou du
projet de l’établissement, et qu’ils contribuent à la réduction des inégalités territoriales, sociales
et de santé. Les ARS n’ont pas toujours une visibilité sur l’ensemble des actions qui peuvent
être menées dans les établissements scolaires. D’une part, des chefs d’établissement peuvent
s’emparer de sujets sans solliciter de financement et peuvent être aidés en ce sens par les
étudiants du service sanitaire, d’autre part, des actions peuvent être financées par d’autres
opérateurs (MILDECA, conseils départementaux, etc. ).
Les ARS reconnaissent la nécessité d’évaluer les actions menées dans les établissements
scolaires, toutefois cette évaluation n’est pas systématique ni homogène sur tous les territoires.
Si les programmes les plus importants menés sur le long terme font l’objet d’évaluations
externes, l’évaluation des actions locales relève plus généralement d’une auto-évaluation
assortie d’un bilan quantitatif (nombre d’élèves concernés, satisfaction des élèves et des
enseignants, etc.) et d’un compte-rendu financier.
Au-delà du financement d’actions de prévention, certaines ARS apportent leur soutien
aux services de santé scolaire pour aider à la réalisation des bilans de santé dans les zones à
démographie médicale défavorable ou pour procéder à des dépistages des troubles sensoriels
ou des troubles du langage afin d’accompagner les élèves vers des professionnels. Elles peuvent
intervenir également dans la prise en charge de la couverture vaccinale en lien avec des
médecins libéraux. Ces initiatives locales sont souvent à un stade expérimental, voire à l’état
de réflexion, et ne relèvent pas d’une stratégie globale. Elles se heurtent parfois à l’absence de
diagnostic sur les besoins non couverts par les services de l’éducation nationale.
B - Avec l’assurance maladie, renforcer le partenariat opérationnel
Une convention nationale a été conclue pour 3 ans en août 2019 entre la DGESCO et la
CNAM. Très générale, elle offre un cadre de coopération aux partenaires qui peuvent s’en saisir
en académies pour la mise en place de protocoles opérationnels.
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COUR DES COMPTES
74
Elle prévoit des actions de prévention :
-
prévention bucco-dentaire avec la poursuite de l’important programme « M’T Dents »,
initié en 2008, avec un renforcement du déploiement du programme auprès des enfants de
6 ans en CP, en éducation prioritaire ; depuis 2016, en complément de la sensibilisation
collective, des actions de dépistage individuel sur place sont conduites par des dentistes
avec l’autorisation des parents. En amont, une éducation à l’hygiène bucco-dentaire se fait
auprès des enfants de grande section de maternelle et, depuis le printemps 2019, ces actions
sont même mises en place à partir de 3 ans ;
-
une clause très générale « développement du parcours santé-éducation entre 0 et 6 ans »
peut servir de cadre à des collaborations en académies et avec les DSDEN, puisqu’elle
prévoit l’accompagnement des acteurs de la santé scolaire, de la PMI, et de la médecine de
ville ;
-
un dépistage, un repérage et une prise en charge précoce des troubles visuels, du langage et
de la communication, à compter de septembre 2019, ciblés sur les enfants de 1
ère
année de
maternelle, de 2 ans et demi à 3 ans et demi, dans le cadre d’une expérimentation dans les
écoles de La Roche-sur-Yon, Nîmes et Bobigny. Le dépistage est réalisé par des
orthoptistes et des orthophonistes ;
-
une expérimentation de prévention de l’obésité de l’enfant est menée dans le Nord,
le Pas-de-Calais, la Seine-Saint-Denis et à La Réunion, proposant une prise en charge
pluridisciplinaire pour des enfants de 3 à 8 ans ;
-
d’autres volets portent sur la promotion de l’activité physique et de la santé du dos
(interventions de masseurs-kinésithérapeutes), sur la prévention et la lutte contre le
tabagisme (remboursement par l’assurance maladie des substituts nicotiniques prescrits par
les infirmiers et médecins de l’éducation nationale), sur la prévention et la lutte contre les
conduites
addictives,
un
repérage
des
souffrances
psychiques
(Ecout’émoi,
expérimentation en Île-de-France, Pays-de-la-Loire et Grand-Est, donnant accès à des
consultations de psychologues prises en charge par l’assurance maladie), la prévention des
grossesses précoces (achat gratuit des contraceptifs d’urgence dans les pharmacies pour les
établissements scolaires, les infirmiers scolaires pouvant les délivrer, renouvellement pour
6 mois par les infirmiers scolaires des prescriptions de contraceptifs oraux datant de moins
d’un an, avec prise en charge par l’assurance maladie).
Il appartient maintenant au ministère d’inciter les services de santé scolaire à s’emparer
de ce cadre pour mettre en
œ
uvre des coopérations en fonction des besoins de santé des écoles
et établissements du territoire, pour la mise en
œ
uvre de partenariats d’éducation à la santé ou
pour des dépistages par des professionnels de santé, et pour favoriser l’accès des élèves aux
soins en aval.
Les rectorats se sont saisis des conventions avec les ARS, mais les discussions ont été
dans certains cas complexes, et les acteurs locaux de l’éducation nationale ne s’inscrivent pas
tous spontanément dans ces logiques de coopération interministérielle ou interinstitutionnelle :
c’est encore souvent une culture à acquérir que la création de service de santé scolaire peut
contribuer à forger en devenant l’interlocuteur institutionnel des partenaires.
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75
___________________CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS __________________
Ainsi est-il présenté au terme de l’enquête de la Cour un corpus de mesures qui forme
une approche systémique, dont la Cour estime qu’elle constitue la condition sine qua non du
maintien d’un dispositif autonome et efficace de santé scolaire.
La Cour formule les recommandations suivantes :
1.
dans les directions départementales des services de l’éducation nationale (DSDEN),
regrouper au sein d’un service de santé scolaire les médecins, les personnels infirmiers et
d’assistance sociale et les psychologues de l’éducation nationale. Créer un service de
pilotage dans les rectorats, sous la direction d’un inspecteur d’académie (MENJ) ;
2.
créer des comités d’éducation à la santé et la citoyenneté (CESC) de bassin et supprimer
le caractère obligatoire des CESC d'établissement (MENJ) ;
3.
dans le cadre de la réorganisation souhaitée par la Cour, revaloriser la rémunération des
médecins de l’éducation nationale (MENJ, MACP/Fonction publique) ;
4.
transférer la charge budgétaire des psychologues de l’éducation nationale, inscrite aux
programmes 140 et 141 vers le programme 230,
Vie de l’élève
(MENJ).
5.
développer et déployer dans les meilleurs délais les applications métier de la santé scolaire
et de DIAPASON (MENJ) ;
6.
revoir le partage des tâches entre médecins de l’éducation nationale et personnels
infirmiers, notamment pour les visites médicales de la 6e année de l’enfant et des élèves
mineurs des filières de l’enseignement professionnel (MENJ, MSS) ;
7.
doter le ministère d’un Conseil de la santé scolaire, publier un rapport annuel sur la santé
scolaire (MENJ) ;
8.
articuler les dépistages obligatoires de la 6e année de l’enfant avec les dépistages réalisés
par la médecine de ville ou hospitalière retracés dans le carnet de santé de l’enfant et à
l’avenir dans son dossier médical partagé (DMP) (MENJ, MSS) ;
9.
engager une concertation avec les collectivités territoriales pour la rénovation des centres
médico-scolaires, et les doter d’un socle de moyens en personnels de secrétariat (MENJ).
10. contractualiser au niveau académique avec les institutions partenaires (collectivités
territoriales, ARS, assurance maladie) les modes de collaboration avec les services de santé
scolaire (MENJ).
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Conclusion générale
Les difficultés du dispositif de santé scolaire pour remplir ses missions et les inégalités
devant le service public mises en lumière par l’enquête sont si importantes qu’une
réorganisation complète du dispositif, assortie d’une révision des méthodes de travail, s’avère
indispensable. À cet égard la dernière partie de ce rapport présente un corps de mesures propres
à conduire cette rénovation.
Le décret en préparation pour l’application de l’article 13 de la
loi du 26 juillet 2019 pour
une école de la confiance
devrait déterminer les missions prioritaires des personnels et revoir
le partage des tâches entre les différents professionnels. S’offre ainsi l’opportunité de bien
répartir l’effort de dépistage et de suivi des enfants aux différents âges en tenant compte des
besoins propres de la santé scolaire.
Une action en complément de la PMI qui ne doit pas monopoliser
les personnels de santé scolaire au détriment de leurs autres missions
La loi pour une école de la confiance a tiré les conséquences de l’abaissement à trois ans
de l’âge de la scolarité obligatoire, en confiant aux professionnels de santé de l’éducation
nationale les visites de dépistage des enfants de trois à quatre ans lorsque le service
départemental de PMI n’est pas en mesure de les réaliser. Ces examens de santé dès la première
année de scolarité sont considérés par le ministère de la santé comme une priorité cruciale dans
une politique de santé publique axée sur la prévention. Ils constitueront aussi la première étape
du parcours de santé de l’élève.
Pour autant, les dépistages ultérieurs ne sauraient être négligés, en particulier celui de la
6
e
année, à la veille de l’entrée au cours préparatoire, où l’enfant aborde les apprentissages
fondamentaux. Les difficultés qui peuvent apparaître chez certains élèves postérieurement à la
visite de la 4
e
année justifient ce dépistage axé, selon les termes de la loi, sur « les troubles
spécifiques du langage et des apprentissages ».
Aussi la Cour appelle-t-elle à maintenir les ambitions en matière de dépistages et de suivi
des difficultés de santé repérées. La réorganisation de la santé scolaire dans les services
académiques et départementaux, sa structuration en services pluri-professionnels sous la
responsabilité d’un inspecteur d’académie chevronné, devraient améliorer les performances
trop souvent médiocres relevées par l’enquête sans qu’il soit besoin d’accroître les moyens.
Puisque doivent être fixées par voie réglementaire les conditions de la visite de la 4
e
année
mais aussi de la 6
e
année, et « la périodicité et le contenu de l’examen médical de prévention et
de dépistage, ainsi que les modalités de coordination avec les missions particulières des
médecins traitants », la Cour estime que l’opportunité de revoir en profondeur l’arrêté de 2015
doit être saisie.
Un rattachement de la santé scolaire à l’éducation nationale à préserver pour
autant que ce ministère procède à une réforme indispensable
L’option d’une décentralisation de la santé scolaire, souvent évoquée, est de nouveau à
l’étude à la demande du Premier ministre : il s’agirait d’en confier la compétence aux
départements, déjà chargés de la PMI et de l’aide sociale à l’enfance. Cette orientation ne
devrait pas être arrêtée sans que soit au préalable menée une étude approfondie.
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COUR DES COMPTES
78
Les difficultés de la PMI, dont le service rendu est très inégal selon les départements,
tributaire de moyens très variables et souvent insuffisants, alertent quant aux effets de cette
voie.
En outre le pilotage des services de santé scolaire est complexe et délicat, compte tenu de
la pluralité des métiers engagés, d’un historique compliqué et de cultures professionnelles
spécifiques à l’éducation nationale, dont il faut tenir compte. Les trois niveaux scolaires : école,
collège et lycée, relèvent de collectivités différentes, si bien que les départements prendraient
en charge des interventions dans des écoles et établissements relevant d’autres niveaux
territoriaux, ajoutant à l’enchevêtrement des responsabilités.
Un pilotage national de la politique de santé à l’école apporte aussi des garanties aux
familles et pour les enfants scolarisés : en cas de péril sanitaire, il est souhaitable que l’État
conserve l’unité de décision et de commandement au sein du système éducatif. Cela se vérifie
dans le contexte actuel de l’épidémie de covid-19.
Pour autant le maintien d’un dispositif national sous la responsabilité du ministère chargé
de l’éducation ne se justifie que s’il est assorti d’un pilotage résolu pour apporter une réponse
de qualité aux besoins de santé des élèves, et d’une articulation renforcée avec le système
général de santé publique. La santé scolaire est un dispositif crucial dans la stratégie de santé
publique parce qu’il permet une politique de prévention pour l’ensemble d’une classe d’âge ; il
est aussi indispensable pour le c
œ
ur de métier de l’école, qui doit traiter des difficultés et
handicaps d’apprentissage de nature très diverse ; sans le concours des professionnels des
métiers de la santé scolaire, l’école inclusive n’est pas possible.
Ce dispositif de santé au sein de l’école mérite pour ces raisons d’être préservé à
l’impérative condition d’être rénové. Dans cette perspective, la Cour entend ultérieurement
élargir son analyse dans le cadre d’une enquête plus générale sur la politique de santé en faveur
des enfants.
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Liste des abréviations
AESH :
.........
accompagnants d'élèves en situation de handicap
ARS :
............
agence régionale de santé
ASH :
............
adaptation scolaire et scolarisation des élèves handicapés
ASS :
............
assistant de service social
BSEDS :
.......
bilan de santé et d’évaluation du développement pour la scolarité à 5/6 ans
CAESC :
.......
comité académique d'éducation à la santé et à la citoyenneté
CAFFA :
.......
certificat d’aptitude aux formations de formateur académique
CDESC :
.......
comité départemental d'éducation à la santé et à la citoyenneté
CESC :
..........
comité d’éducation à la santé et à la citoyenneté
CIO :
.............
centre d’information et d’orientation
CIS :
.............
comité interministériel pour la santé
CLS :
............
contrat local de santé
CMPP :
.........
centres-médico-psycho-pédagogiques
CMS :
...........
centre médico-scolaire
CNOM :
........
conseil national de l’ordre des médecins
CPAM :
........
caisse primaire d’assurance maladie
CPE :
............
conseiller principal d’éducation
CPS :
............
compétences psychosociales
CSAIO :
........
chef du service académique de l'information et de l'orientation
CTSS :
..........
conseiller technique de service social
DAF :
............
direction des affaires financières
DASEN :
......
directeur académique des services de l’éducation nationale
DCIO :
..........
directeur de CIO
DEPP :
..........
direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance
DES :
............
diplôme d’études spécialisées
DGESCO :
....
direction générale de l’enseignement scolaire
DGRH :
........
direction générale des ressources humaines
DGS :
............
direction générale de la santé
DGOS :
..........
direction générale de l’offre de soins
DMP :
...........
dossier médical personnel
DNE :
...........
direction numérique pour l’éducation
DOM :
...........
département d’outre-mer
DSDEN :
......
direction des services départementaux
EHESP :
.......
école des hautes études en santé publique
EPLE :
..........
établissement public local d’enseignement
ESPAD :
.......
european schoolsurvey project on alcohol and other drugs
ESPE :
..........
écoles supérieures du professorat et de l'éducation
ETP :
............
équivalent temps plein
ETPT :
..........
équivalent temps plein travaillé
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COUR DES COMPTES
80
FST :
.............
formation de spécialité transversale
GRH :
...........
gestion des ressources humaines
GSM :
...........
grande section de maternelle
HAS :
............
haute autorité de santé
HBSC :
.........
health behaviour in school-aged children
IA-IPR :
........
inspecteur d’académie-inspecteur pédagogique régional
IA-DASEN :
. inspecteur d’académie - Directeur académique des services de l’éducation nationale
IEN :
.............
inspecteur de l’éducation nationale
IEN-ASH :
....
inspecteur d’académie-adaptation scolaire et scolarisation des élèves handicapés
IGEN :
..........
inspection générale de l’éducation nationale
IGAENR :
.....
inspection générale de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche
IGAS :
..........
inspection générale interministérielle du secteur social
IH2EF :
.........
institut des hautes études de l'éducation et de la formation
INSPQ :
........
institut national de santé publique du Québec
IP :
................
information préoccupante
IREPS :
.........
instance régionale d’éducation et de promotion de la santé
LIEN :
...........
logiciel infirmier de l'éducation nationale
LP :
...............
lycée professionnel
LPO :
............
lycée polyvalent
MDPH :
........
maison départementale des personnes handicapées
MENJ :
.........
ministère de l’éducation nationale et de la jeunesse
MILDECA :
. mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives
MISP :
..........
médecin inspecteur de santé publique
MSS :
............
ministère des solidarités et de la santé
OMS :
...........
organisation mondiale de la santé
ORS :
............
obligations réglementaires de service
ORS :
............
observatoire régional de santé
PAI :
.............
projet d’accueil individualisé
PAP :
............
plan d’accompagnement personnalisé
PIAL :
...........
pôle inclusif d'accompagnement localisé
PJJ :
..............
protection judiciaire de la jeunesse
PPCR :
..........
parcours professionnels, carrières et rémunérations
PMI :
............
protection maternelle et infantile
PPS :
.............
projet personnalisé de scolarisation
PSC1 :
..........
prévention et secours civiques de niveau 1
PsyEN EDA : psychologue de l’éducation nationale spécialité « éducation, développement et conseil en
orientation scolaire et professionnelle »
PsyEN EDO : psychologue de l’éducation nationale spécialité « éducation, développement et conseil en
orientation scolaire et professionnelle »
PRS :
............
plan régional de santé
RAP :
............
rapport annuel de performance
RASED :
.......
réseau d'aides spécialisées aux élèves en difficulté
REP :
............
réseau d’éducation prioritaire
RERS :
..........
repères et références statistiques sur les enseignements, la formation et la recherche
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LISTE DES ABREVIATIONS
81
RIFSEEP :
....
régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de
l'engagement professionnel
SAGESSE :
.. système automatisé gestion santé
SEGPA :
.......
section d'enseignement général et professionnel adapté
SESSAD :
.....
services d'éducation et de soins spécialisés à domicile
SGEC :
.........
secrétariat général de l’enseignement catholique
SSFE :
..........
service social en faveur des élèves
SST :
.............
sauveteur secouriste du travail
SGMAS :
......
secrétariat général des ministères sociaux
SMSS :
.........
service municipal de santé scolaire
SPF :
.............
Santé publique France
UFSBD :
.......
union française pour la santé bucco-dentaire
ULIS :
...........
unité localisée pour l’inclusion scolaire
UP2A :
..........
unité pédagogique pour élèves allophones
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