13, rue Cambon
–
75100 Paris cedex 01 -
T
+33.1.42.98.95.00 - www.ccomptes.fr
QUATRIÈME CHAMBRE
-------
Première section
-------
Arrêt n° S2019-1333
Audience publique du 16 mai 2019
Prononcé du 6 juin 2019
COMMUNAUTÉ DE COMMUNES DU
CANTON DE CRIQUETOT-
L’ESNEVAL
(SEINE-MARITIME)
Appel d’un jugement de la chambre
régionale des comptes Normandie
Rapport n° R-2019-0067
République Française,
Au nom du peuple français,
La Cour,
Vu la requête en date du 21 décembre 2017, enregistrée le 27 décembre 2017 au greffe de la
chambre régionale des comptes Normandie, par laquelle M. X, comptable de la communauté
de communes du canton de Criquetot-
L’Esneval
, a élevé appel du jugement n° 2017-16 de
ladite chambre qui
l’a constitué débiteur de la somme de 30 000 €, augmentée des in
térêts de
droit, au titre de pai
ements irréguliers intervenus au cours de l’exercice 2014
;
Vu les pièces de la procédure suivie en première instance et produites en appel ;
Vu le code général des collectivités territoriales, notamment ses articles L. 2311-7 et
D. 1617-19 ;
Vu le code des juridictions financières ;
Vu l’article 60
modifié de la loi de finances n° 63-156 du 23 février 1963 ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec
les administrations, notamment son article 10 ;
Vu le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable
publique ;
Vu le rapport de M. Patrick SITBON, conseiller maître, chargé de l’instr
uction ;
Vu les conclusions du Procureur général n° 270 du 3 mai 2019 ;
Entendu, lors de l’audience publique du
16 mai 2019, M. SITBON, conseiller maître, en son
rapport, et Mme Loguivy ROCHE, avocate générale, en les conclusions du ministère public,
les autres parties, informées de l’audience, n’
étant ni présentes, ni représentées ;
Entendu en délibéré M. Yves ROLLAND, conseiller maître, réviseur, en ses observations ;
1. Attendu que, par le jugement entrepris, la chambre régionale des comptes Normandie a
constitué M. X débiteur de la somme de 30 000
€ augmentée des intérê
ts de droit à compter
2 / 3
S2019-1333
13 rue Cambon - 75100 PARIS CEDEX 01 - T +33 1 42 98 95 00 - www.ccomptes.fr
du 14 janvier 2017 au titre du
paiement d’une subvention à l’Association Développement
Accueil Jeunes Enfants
(ADAJE) en l’absence de convention préalablement signée
avec le
bénéficiaire ;
2.
Attendu que l’app
elant ne conteste pas que le paiement de ladite subvention sans que soit
produite à l’appui
une convention
passée entre la communauté de communes et l’association
bénéficiaire constitue un manquement du comptable à ses obligations de contrôle au sens des
articles 60-I et 60-VI de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 ;
qu’il
soutient, en revanche que
ledit manquement n’a pas causé de préjudice financier à la communauté de communes du
canton de Criquetot-
L’Esneval car il ne lui
a pas fait supporter une charge patrimoniale indue ;
qu’ainsi,
il demande à la Cour d’infirmer le jugement entrepris pour erreur de droit et, par l’effet
dévolutif de l’appel, de prononcer à son encontre une somme non rémissible la plus faible
possible ;
3.
Attendu que, selon l’appelant,
les dispositions de
l’article 10 de la loi du 12 avril 20
00 ont
pour objet
d’imposer la transpar
ence en matière de subventions et que, notamment, ces
dispositions légales
n’impose
nt
pas la signature d’une convention pour l’attribution de
subventions d’un montant inférieur ou égal à 23
000
€, ou de subventions
accordées à certains
organismes mentionnés au livre III du code de la c
onstruction et de l’habitation
; que le
requérant en déduit que
, dans le cas d’espèce,
l’obligation de conclure une convention «
revêt
un caractère contingent
» et que,
l’intention de l’administration étant ici clairement exprimée,
«
La dépense n’est qu’irrégulière et non indue du fait de l’absence d’une pièce
réglementairement exigée mais superfétatoire pour le contrôle du comptable
» ; que, par
ailleurs,
l’appelant soutient qu’
en appli
cation des dispositions de l’article L.
2311-7 du code
général des collectivités territoriales, seule l’assemblée délibérante, et non l’exécutif de
l’établissement public local, dispose de la compétence pour attribuer une subvention,
et
qu’il
en résulterait que la délibération budgétaire adoptée le 10 mars 2014 vaudrait attribution de la
subvention ;
4. Attendu que, si un objectif de transparence a, effectivement, guidé la volonté du législateur,
la loi susvisée du 12 avril 2000,
ainsi que l’article 1
er
du décret n° 2001-495 du 6 juin 2001 pris
pour son application,
imposent la passation d’une convention avec les attributaires de
subventions
d’un montant supérieur à 23
000
€
, sauf exceptions qui ne se rapportent en rien
à la présente cause ;
qu’au reste,
la production de cette pièce justificative est rendue
obligatoire par le paragraphe 7211
de l’annexe I
du code général des collectivités territoriales,
mentionnée à l’article D
. 1617-19 dudit code ;
qu’ainsi en l’absence de convention conclue
entre le représentant de la communauté de communes du canton de Criquetot-
L’Es
neval et le
bénéficiaire, le pai
ement de la subvention au profit de l’ADAJE doit être considéré comme
indu, car effectué en
l’absence du fondement juridique adéquat
;
qu’il en résulte
que la
chambre régionale n’a commis aucune erreur de droit en
constatant que le manquement du
comptable avait causé un préjudice financier à la communauté de communes et en constituant
M. X débiteur de la somme de 30
000 €
; que le moyen doit donc être écarté comme non fondé
en droit ;
5.
Attendu qu’aux termes de
l’article L.
2311-7 du code général des collectivités territoriales
susvisé, «
L'attribution des subventions donne lieu à une délibération distincte du vote du
budget.
Toutefois, pour les subventions dont l'attribution n'est pas assortie de conditions d'octroi, le
conseil municipal peut décider :
3 / 3
S2019-1333
13 rue Cambon - 75100 PARIS CEDEX 01 - T +33 1 42 98 95 00 - www.ccomptes.fr
1° D'individualiser au budget les crédits par bénéficiaire ;
2° Ou d'établir, dans un état annexé au budget, une liste des bénéficiaires avec, pour chacun
d'eux, l'objet et le montant de la subvention.
L'individualisation des crédits ou la liste établie conformément au 2° vaut décision d'attribution
des subventions en cause.
» ;
6. Attendu que
le moyen présenté par l’appelant qui porte
sur la compétence de l’autorité qui
a engagé la dépense est surabondant dès lors que le jugement entrepris est fondé sur
l’absence de convention permettant de déterminer les conditions d’octroi de la subvention
;
que, par ailleurs,
l’état annexé à la déli
bération du 10 mars 2014 du conseil communautaire
approuvant le budget de l’exercice 2014 ne comportait pas la mention de l’objet de la
subvention et ne répondait donc pas aux conditions posées par
l’article L.
2311-7 du CGCT
invoqué par l’appelant
; qu’il
ne peut donc être considéré que cette délibération suffisait à elle
seule à exprimer la volonté de l’autorité délibérante d’accorder une subvention à l’ADAJE
, en
l’absence de convention expressément prévue par la loi du 12 avril 2000 susvisée
;
7. Attendu qu'il y a lieu, en conséquence, de rejeter la requête de l'appelant ;
Par ces motifs,
DÉCIDE :
Article unique :
La requête de M. X est rejetée.
Fait
et
jugé
en
la
Cour
des
comptes,
quatrième
chambre,
première
section.
Présents : M. Jean-Yves BERTUCCI, président de section, président de séance,
Mme Catherine DÉMIER, conseillère maître, MM. Yves ROLLAND et Etienne CHAMPION,
conseillers maîtres.
En présence de Mme Stéphanie MARION, greffière de séance.
Stéphanie MARION
Jean-Yves BERTUCCI
En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur
ce requis, de mettre ledit arrêt à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la
République près les tribunaux de grande instanc
e d’y tenir la main, à tous commandants et
officiers de la force publique de prêter main-
forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
Conformément aux dispositions de l’article R. 142
-20 du code des juridictions financières, les
arrêts prononcés par la Co
ur des comptes peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation
présenté, sous peine d’irrecevabilité, par le ministère d’un avocat au Conseil d’État dans le
délai de deux mois à compter de la notification de l’acte. La révision d’un arrêt ou d’une
ordonnance peut être demandée après expiration des délais de pourvoi en cassation, et ce
dans les conditions prévues au I de l’article R. 142
-19 du même code.