Sort by *
CERTIFICATION DES COMPTES DE L’ÉTAT – EXERCICE 2015
Synthèse
Les comptes de l’État et l’acte de certification de la Cour sont joints au projet de loi de règlement pour l’exercice écoulé.
Ces documents permettent d’assurer une information transparente sur la situation comptable et financière de l’État afin
d’éclairer l’administration sur sa gestion et le Parlement chargé d’approuver les lois de finances. Ils s’adressent, plus
largement, aux citoyens, aux investisseurs et aux observateurs des finances publiques.
Les comptes de l’État en quelques chiffres
La mission de la Cour
Conformément à l’article 27 de la loi organique
relative aux lois de finances (LOLF) du 1
er
août
2001, l’État tient depuis l’exercice 2006 une
comptabilité générale de ses opérations, fondée
sur des règles qui ne se distinguent de celles
applicables aux entreprises qu’en raison des
spécificités de son action.
L’État présente ainsi chaque année ses états
financiers dans un document intitulé « Compte
général de l’État », qui comprend un bilan,
un compte de résultat, un tableau des flux de
trésorerie,
une
liste
de
ses
principaux
engagements hors bilan et une annexe explicative.
Fin 2015, cet ensemble représente :
-
953 Md€ d’actifs, 1 861 Md€ de dettes et 72 Md€
de trésorerie nette négative (dépôts de fonds
d’entités publiques) ;
-
135 Md€ de provisions, pour l’essentiel relatives
aux interventions économiques et sociales de
l’État et à des litiges fiscaux ;
-
491 Md€ de charges brutes et 408 Md€ de
produits bruts, soit un résultat négatif de 83 Md€.
Au final, un passif qui excède l’actif de 1 115 Md€.
Par ailleurs, les engagements hors bilan s’élèvent
à environ 3 300 Md€, dont la moitié au titre des
retraites civiles et militaires et le quart au titre de
garanties.
Le 5° de l’article 58 de la LOLF confie à la Cour
des comptes la mission de certifier la régularité,
la sincérité et la fidélité des comptes de l’État.
La certification est une opinion écrite et motivée
que la Cour formule sous sa propre responsabilité.
Elle consiste à collecter les éléments nécessaires à
l’obtention d’une assurance raisonnable sur la
conformité des comptes aux règles et principes
applicables.
Les normes professionnelles en matière d’audit
financier prévoient qu’une opinion sans réserve ne
peut être exprimée si des difficultés significatives
sont identifiées et non résolues à l’issue des
vérifications.
Évolution des réserves formulées par la Cour sur les comptes de l’État
Le système d'information financière
Le contrôle interne et l'audit interne ministériels
Les produits régaliens
Les immobilisations et les stocks du ministère de la défense
Les immobilisations financières
Le patrimoine immobilier
Les passifs non financiers
Le réseau routier
Les immobilisations spécifiques
Les autres immo.
financières
Les contrats
d'échanges de taux
Les comptes de trésorerie
Les comptes des
Pouvoirs publics
Les provisions pour
risques
Exercices 2013 à 2015
Exercices 2009 à 2012
Réserves maintenues
Réserves progressivement levées
Les autres immobilisations
et stocks des ministères civils
Le compte des opérations de la COFACE
La Caisse d’amortissement
de la dette sociale
Les fonds d'épargne centralisés
à la Caisse des dépôts
Exercices 2006 à 2008
Depuis l'exercice 2013, la
dynamique d'amélioration
de la
fiabilité des comptes est
relancée avec la mise en place
de chantiers pluriannuels.
Exercices 2009-2012 : préparation
et passage au 1
er
janvier 2012 de la
comptabilité générale dans le
progiciel Chorus.
Exercice 2006 : comptes de
l'État établis pour la première
fois et certifiés avec treize
réserves.
Depuis l’entrée en vigueur de la LOLF en 2006, des
progrès significatifs ont été régulièrement réalisés dans
la tenue d’une comptabilité des opérations de l’État en
droits constatés.
Ces progrès ont conduit, en neuf ans, à la levée de
treize réserves.
Les comptes de 2015, certifiés avec
cinq réserves substantielles, reflètent de nouvelles
avancées.
Plus largement, la Cour s’attache à accompagner
l’amélioration continue de la fiabilité des comptes de
l’État en identifiant dans son acte de certification les
axes sur lesquels des progrès doivent être réalisés par
l’administration pour que cette dernière parvienne,
par étapes successives, à une certification sans
réserve.
En détail : les cinq réserves substantielles sur les comptes de l’exercice 2015
Sur quels sujets portent les réserves ?
Qu’est-ce qui motive les réserves ?
Le système d’information
financière
Au moins 300 applications réparties sur l’ensemble des ministères
forment le système d’information qui permet d’assurer la gestion de
l’État dans de nombreux domaines (comptabilité, fiscalité, paie,
dépenses de fonctionnement, immobilier, trésorerie, etc.).
Parmi celles-ci, le progiciel de gestion intégrée Chorus occupe une
place centrale puisque c’est l’application unique de tenue des
comptabilités générale et budgétaire de l’État, utilisée par plus de
55 000 agents des administrations centrales et déconcentrées.
Depuis l’achèvement réussi de la mise en place de Chorus fin 2011, le
système d’information financière s’est stabilisé. Un projet de
dématérialisation des factures et des frais de déplacement a été lancé
et se poursuivra jusqu’en 2017.
Les fonctionnalités offertes par Chorus ne sont pas assez utilisées pour
fiabiliser les enregistrements et des pratiques inappropriées, antérieures à
sa mise en place, sont encore trop souvent possibles, et font obstacle à
l’audit des comptes.
Les modalités de son raccordement avec les applications qui lui
transmettent des écritures comptables, restées au format de l’ancien plan
de comptes, obligent à des traitements intermédiaires nombreux et
complexes qui sont, de ce fait, source d’un risque significatif d’erreurs.
Les autres applications qui ne lui transmettent pas directement d’écritures
comptables, mais qui portent néanmoins des données de gestion,
présentent également des limites importantes qui empêchent ou rendent
très difficile la justification des comptes.
Le contrôle interne et l’audit
interne ministériels
Le fonctionnement de l’État fait intervenir de nombreux acteurs et
systèmes d’informations dans le cadre de multiples processus. Ceux-ci
peuvent présenter des défauts de conception ou des erreurs peuvent
se produire dans leur mise en oeuvre, entraînant, dans certains cas,
des enregistrements comptables erronés ou incomplets.
Pour empêcher la survenance de ces risques ou, à défaut, la détecter
et en corriger les effets, un ensemble de procédures et d’actions,
dénommé « contrôle interne », doit être défini, formalisé et mis en
oeuvre par les ministères, à partir d’une description des processus de
gestion concernés et d’une analyse des risques qui s’y attachent.
Des services d’audit interne doivent également être mis en place afin
de vérifier la réalité du contrôle interne et son efficacité.
La capacité des ministères à organiser leur contrôle interne et à le piloter
est encore insuffisante : le recensement des risques s’appuie rarement sur
une carte des processus de gestion formalisée et, lorsque c’est le cas,
celle-ci est en général circonscrite aux seules opérations des comptables ;
les outils de
reporting
sont trop limités pour mesurer l’efficacité des
contrôles. Par ailleurs, l’audit interne est inégalement structuré et mis en
oeuvre.
Cette situation est d’autant plus problématique que, dans le cas de
nombreux processus à enjeux, tels que par exemple la trésorerie ou les
charges de personnel, le contrôle interne n’est pas assez efficace, ce qui,
d’une part, empêche de s’appuyer sur celui-ci pour les besoins de l’audit et,
d’autre part, fait peser un risque sur la fiabilité des comptes de l’État.
Les produits régaliens
Hors le prélèvement au titre du budget de l’Union européenne
(18 Md€), les produits régaliens s’élèvent à 300 Md€ en 2015, dont :
-
143 Md€ de TVA, soit près de la moitié des produits fiscaux ;
-
71 Md€ au titre de l’impôt sur le revenu et 28 Md€ au titre de l’impôt
sur les sociétés.
Par ailleurs, fin 2015, les créances sur les redevables s’élèvent à
65 Md€, tandis que les acomptes ou les remboursements dus
s’établissent à 102 Md€. En hors bilan, le montant des déficits
susceptibles d’être imputés par les contribuables représente 195 Md€
pour l’IS et 17 Md€ pour l’IR, soit une moindre imposition potentielle
d’environ, respectivement, 65 Md€ et 3 Md€.
Les insuffisances du contrôle des données fiscales et des traitements qui
leur sont appliqués empêchent de se prononcer sur la fiabilité des
enregistrements comptables en matière de produits régaliens.
Une incertitude significative affecte en particulier l’exhaustivité du
recensement des créances fiscales et leur correcte évaluation à la clôture
de l’exercice.
Les comptes de l’État ne présentent pas, par ailleurs, de manière
satisfaisante ses contentieux fiscaux ou les impôts et taxes affectés à
d’autres bénéficiaires (régime de sécurité sociale, par exemple).
Le recensement et l’évaluation des engagements hors bilan de nature
fiscale reçus par l’État accusent un retard important par rapport aux autres
domaines des comptes.
Les immobilisations et les
stocks de la défense
Le ministère de la défense gère principalement trois catégories de
biens pour les besoins de ses missions :
-
des stocks (34 Md€), notamment des rechanges et des munitions,
qui représentent la quasi-totalité des stocks de l’État ;
-
des matériels (78 Md€), tels que des aéronefs, des bâtiments de
surface ou sous-marins, des engins terrestres, des armements, etc. ;
-
des terrains et des constructions (16 Md€), dont certains de nature
très particulière (arsenaux, bases aériennes, par exemple).
Des engagements de démantèlement ou de dépollution s’attachent à
certains de ces biens et doivent être évalués puis comptabilisés.
Les
vérifications
réalisées
conduisent
à
relever
des
incertitudes
significatives, s’agissant notamment :
-
des inventaires physiques de stocks et de matériels, incomplets ou mal
retranscrits dans les comptes de l’État ;
-
des évaluations de ces mêmes biens, non systématiquement justifiées,
qui reposent sur des politiques de dépréciation hétérogènes et
déterminées en appliquant des méthodes comptables incorrectes ;
-
du recensement réalisé par le ministère de ses actifs immobiliers,
discordant avec celui qui ressort de Chorus, et l’évaluation de ceux-ci, qui
ne tient pas compte des dégradations et autres pertes de valeur.
Les immobilisations
financières
L’État détient des participations dans 1 958 entités, qu’il contrôle de
manière exclusive pour un peu plus d’un tiers d’entre elles.
Elles représentent à l’actif de son bilan une valeur totale de 248 Md€.
La Caisse des dépôts, Électricité de France, la Banque de France et
GDF Suez forment à elles seules 40 % de ce montant.
D’autres actifs financiers s’ajoutent à ces participations :
-
des créances directement rattachées (41 Md€ au total, dont 29 Md€
au titre des investissements d’avenir) ;
-
des prêts et avances (19 Md€), des droits sur plusieurs fonds sans
personnalité juridique (15 Md€) et des créances diverses (2 Md€).
Il n’est pas possible de se prononcer sur la fiabilité de l’évaluation d’un
grand nombre de participations financières, faute de disposer d’éléments
suffisants (rapports d’audit, notamment). Lorsque ces éléments peuvent
être obtenus, ils font fréquemment apparaître des anomalies en matière de
contrôle interne, dans le recensement et l’évaluation des actifs, notamment
corporels, et dans la comptabilisation des provisions et des engagements
hors bilan.
Il est également relevé depuis plusieurs exercices que les établissements
publics de santé, le Fonds d’épargne géré par la Caisse des dépôts ou
encore certains prêts accordés à des conditions préférentielles ne sont pas
correctement évalués dans les comptes de l’État.
Ailleurs dans le monde
Au sein de la zone euro,
la France fait partie des
pays qui font certifier les
comptes de leur État établis
en droits constatés.
Les comptes de l’État britannique sont
certifiés avec six réserves.
Les comptes de l’État fédéral font l’objet
d’une impossibilité de certifier.
Outre les comptes de l’État, la loi confie à la
Cour la mission de certifier ceux du régime
général de sécurité sociale.
La Cour certifie par ailleurs à leur demande
les comptes de l’Assemblée nationale et
du Sénat. Elle détient également plusieurs
mandats d’audit des comptes d’organisations
internationales.