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Rapport d’observations définitives
SYNDICAT MIXTE MANCHE NUMÉRIQUE
(Manche)
Exercices 2010 et suivants
Observations délibérées le 30 octobre 2015
SOMMAIRE
SYNTHÈSE
...........................................................................................................................
1
OBLIGATIONS DE FAIRE
....................................................................................................
2
PRINCIPALES RECOMMANDATIONS
................................................................................
3
I -
RAPPEL DE LA PROCEDURE
......................................................................................
3
II -
PRÉSENTATION DU SYNDICAT MIXTE MANCHE NUMÉRIQUE
................................
4
A -
Une action inscrite dans un projet régional et départemental
.............................................
5
1 -
La première période d’activité du syndicat (2006/2014) : l’ouverture à la concurrence
..........................
5
2 -
La seconde période d’activité : le déploiement d’un réseau à très haut débit (2014/2020)
....................
6
3 -
Les schémas directeurs territoriaux
........................................................................................................
7
B -
Des compétences bien définies par les statuts et exercées pleinement
............................
8
1 -
Un aménagement numérique du territoire mené par étapes
..................................................................
8
2 -
Une compétence « Informatique de gestion » largement diffusée et récemment évaluée
.....................
8
3 -
Une extension récente des compétences pour la promotion de la formation professionnelle
................
8
4 -
Des activités complémentaires développées régulièrement
...................................................................
9
III -
LA GOUVERNANCE DU SYNDICAT EST PERFECTIBLE SUR CERTAINS POINTS.10
A -
Le fonctionnement des instances syndicales est satisfaisant
...........................................
10
1 -
Le comité syndical
................................................................................................................................
10
2 -
Le bureau
.............................................................................................................................................
10
3 -
Les commissions permanentes et réglementaires
................................................................................
10
B -
Les obligations du domaine des communications électroniques sont respectées
.........
11
1 -
La qualité d’opérateur de communications électroniques
.....................................................................
11
2 -
Le respect du principe de séparation
....................................................................................................
11
3 -
Le respect de l’obligation de transmission du projet au régulateur
.......................................................
11
C -
La gestion de certaines régies n’est pas conforme à la réglementation applicable
........
12
1 -
L’inobservation des obligations préalables à la création d’une régie
....................................................
12
2 -
Le principe d’autonomie financière n’est pas toujours respecté
...........................................................
13
3 -
Les régies ne sont pas dotées des statuts et des organes prévus par le CGCT
..................................
13
4 -
Le règlement intérieur est incomplet
.....................................................................................................
14
IV -
LA QUALITÉ DE L’INFORMATION BUDGÉTAIRE, FINANCIÈRE ET COMPTABLE .14
A -
L’information budgétaire et financière
..................................................................................
15
1 -
Le débat d’orientations budgétaires
......................................................................................................
15
2 -
La programmation pluriannuelle des investissements vient d’être renforcée
........................................
16
3 -
L’inscription des restes à réaliser doit être plus précise
........................................................................
17
4 -
Conclusion sur l’information budgétaire et financière
...........................................................................
18
B -
La fiabilité de l’information comptable
..................................................................................
19
1 -
L’information patrimoniale portée au bilan du budget principal
.............................................................
19
2 -
La comptabilisation du droit d’usage irrévocable (IRU)
.........................................................................
19
C -
Le suivi de l’activité des services publics doit être renforcé
.............................................
20
V -
L’EXERCICE DE LA COMPÉTENCE POUR LE DÉGROUPAGE ET LA MONTÉE EN
DÉBIT SUR LE RESEAU HERTZIEN
...........................................................................
21
A -
Les principes généraux de la DSP attribuée à Manche Télécom
.......................................
21
1 -
Les principales caractéristiques de la délégation de service public
......................................................
21
2 -
Les obligations du délégataire
..............................................................................................................
23
3 -
Le contrôle et le suivi de la délégation par le syndicat
..........................................................................
24
4 -
Les rapports annuels d’activité présentés par le délégataire
................................................................
24
B -
La situation financière de la société délégataire
..................................................................
25
C -
La poursuite des programmes initiaux d’aménagement numérique au budget principal27
1 -
La section de fonctionnement est marquée par l’évolution rapide de la masse salariale
.....................
27
2 -
Des dépenses d’équipement régulières, un encours de la dette réduit
................................................
28
VI -
LE DÉVELOPPEMENT DES SERVICES ET DES USAGES
........................................
29
A -
Le « nuage public départemental »
.......................................................................................
30
1 -
Le financement des investissements du «
nuage public départemental
» est aléatoire
.......................
30
2 -
Le nouveau service n’est pas formalisé
................................................................................................
32
B -
Conclusion sur la mise en oeuvre des services et des usages
..........................................
32
VII -
LE DÉPLOIEMENT DU RÉSEAU À TRÈS HAUT DÉBIT
.............................................
33
A -
Un réseau radio terrestre transitoire, le réseau Très bon débit hertzien
..........................
33
1 -
Les principales caractéristiques de la délégation de service public
......................................................
33
2 -
Un réseau en construction dont le plan de financement est équilibré
...................................................
34
3 -
La situation financière du budget annexe « Très bon débit hertzien (TBDH) »
.....................................
35
B -
Le déploiement du réseau à très haut débit en fibre optique (FTTH)
................................
36
1 -
Une couverture en très haut débit prévue pour l’ensemble du territoire
...............................................
36
2 -
Le plan de financement du réseau en fibre optique de la Manche
.......................................................
36
3 -
Un début de déploiement de la fibre optique marqué par le conflit avec « Manche Télécom »
............
37
4 -
La situation du budget annexe « FTTH » en 2015
................................................................................
39
5 -
La question de l’assujettissement à l’impôt sur les sociétés des budgets annexes « TBDH » et
« FTTH »
..............................................................................................................................................
39
ANNEXES
............................................................................................................................
41
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
1
SYNTHÈSE
Créé en 2004, le syndicat mixte Manche Numérique a été doté de compétences
visant à l’aménagement numérique du département de la Manche.
Durant dix ans, il a consacré son action à l’ouverture des communications
électroniques à la concurrence. Dans le même temps, il a agi pour améliorer la qualité de
l’accès à internet des habitants, dont bon nombre d’entre eux résident dans des communes
où le débit du réseau « cuivre » est faible. Depuis 2013, le syndicat met en oeuvre les axes
du schéma départemental d’aménagement numérique en déployant le réseau à très haut
débit et en développant des usages qu’il propose aux collectivités.
Bien que satisfaisante, la gouvernance de l’établissement doit encore
s’améliorer.
Outre des compétences clairement définies, les statuts de l’établissement lui
permettent d’exercer des activités complémentaires qu’il a développées régulièrement. Le
syndicat peut ainsi intervenir de manière concrète dans les domaines des technologies
numériques et apporter une assistance à ses membres.
Dans une démarche d’anticipation de la réorganisation administrative du
territoire, le comité syndical a décidé, fin 2014, d’étendre le périmètre d’intervention de
l’établissement, tant d’un point de vue territorial qu’institutionnel. Ses statuts lui permettent
désormais d’accueillir des membres situés hors du département de la Manche.
Le fonctionnement des instances de l’établissement n’appelle pas de remarques
particulières. Cependant, la gestion de certaines régies n’est pas conforme à la
réglementation applicable. De même, l’information budgétaire, financière et comptable
fournie par l’établissement aux élus et au public devra être améliorée. Ainsi, il incombe à
l’ordonnateur de garantir l’exactitude des inscriptions budgétaires en restes à réaliser. En
outre, l’information du comité syndical sur l’exploitation des services publics, délégués ou
exploités en régie, doit être complétée.
L’ouverture à la concurrence du réseau à haut débit : un effort
d’équipement à renforcer.
Pour exercer cette compétence, l’établissement a signé une convention de
délégation de service public en 2006 avec la société « Manche Télécom » en vue de la
construction, l’exploitation et la commercialisation d’un réseau de communications
électroniques à haut débit à partir de l’infrastructure remise par le syndicat. Le périmètre de
la délégation a été élargi à la construction de prises optiques à Cherbourg et à Saint-Lô, par
avenants signés depuis 2008.
Jusqu’à fin 2014, l’établissement n’a pas rencontré de difficultés dans l’exécution
du contrat. Depuis lors, un différend oppose le syndicat à son délégataire. Il porte sur le
retard dans l’exécution des obligations contractuelles de ce dernier pour la construction de
prises optiques à Cherbourg et à Saint-Lô.
Les parties devront trouver un accord qui permettra de poursuivre les
déploiements dans des zones parmi les plus peuplées du territoire où la commercialisation
du réseau à très haut débit devra se poursuivre dans de bonnes conditions.
En dépit des efforts d’équipement engagés depuis 2004, plus de 22 % des
logements et locaux professionnels de la Manche équipés en ADSL, soit environ
75 000 abonnés, restent en deçà d’un service de trois mégabits par seconde en juin 2015,
soit un niveau proche de l’inéligibilité ou de la zone blanche.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
2
Le déploiement du réseau à très haut débit : un risque financier porté, pour
l’essentiel, par les collectivités publiques.
Depuis 2013, en l’absence d’initiative privée dans le département, et selon les
prescriptions des schémas territoriaux, le syndicat a entrepris la construction du réseau
départemental à très haut débit en fibre optique.
Menée dans le même temps, l’élaboration du «
nuage public départemental
» a
occasionné des dépenses d’investissement conséquentes (9,5 millions d’euros) et
intégralement financées par l’emprunt. Le budget d’investissement produit par le syndicat
montre que les prévisions des recettes d’exploitation affectées au remboursement de la dette
ne sont pas assurées. Le syndicat explique cette situation par un retard de plus de trois ans
dans la mise en oeuvre de l’organisation, initialement prévue pour développer les services à
commercialiser.
S’agissant de l’accès au très haut débit, le schéma départemental fixe au
syndicat l’objectif de 60 % de la population du territoire dont le logement devra être éligible à
la fibre optique en 2020. Il repose sur la construction simultanée du réseau de collecte en
fibre optique et sur le déploiement d’un réseau hertzien transitoire destiné à améliorer la
qualité de service des foyers qui ne bénéficieront pas de la fibre optique dans les cinq ans à
venir.
Or, la construction du réseau en fibre optique est basée sur un programme
d’équipement de près de 200 millions d’euros (M€), et celle du réseau hertzien devrait
s’établir à 17 M€.
Les entreprises délégataires chargées de l’exploitation et de la commercialisation
du réseau hertzien et du réseau en fibre optique ont été désignées en 2015. Le financement
des réseaux s’appuie majoritairement sur des subventions publiques et sur les redevances
inscrites aux plans d’affaires des conventions. Des emprunts, d’un montant total de l’ordre de
50 M€, complètent les prévisions.
Ainsi, le remboursement des emprunts que le syndicat a souscrits, ou s’apprête à
souscrire dans les mois à venir, repose pour une part importante sur les performances
commerciales desdits réseaux. Ces dernières conditionnent, en effet, fortement le montant
des redevances que percevra le syndicat. Conscient de la situation, le syndicat s’engage
dans la pré-commercialisation de son réseau auprès du public.
Au final, les plans de financement des deux réseaux comportent des risques
largement portés par les collectivités et les établissements publics de coopération
intercommunale (EPCI) dont les finances seront plus contraintes à l’avenir.
Dans ces circonstances, si la situation financière du syndicat est pour l’instant
satisfaisante, celui-ci doit cependant assurer un suivi vigilant des projets d’envergure qu’il
mène actuellement pour le développement du service public local relatif aux réseaux et aux
services de communications électroniques dans le département de la Manche.
OBLIGATIONS DE FAIRE
La chambre rappelle au syndicat mixte qu’il doit :
1. doter les régies dédiées à l’exploitation de ses services publics industriels et commerciaux
(SPIC) « Informatique de gestion », « Fibre jusqu’au domicile (FTTH) » et « Très bon
débit hertzien (TBDH) » de l’autonomie financière conformément aux dispositions de
l’article L. 2221-4 du code général des collectivités territoriales (CGCT) ;
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
3
2. compléter les délibérations par lesquelles il a créé des régies dotées de la seule
autonomie financière en adoptant, pour chacune d’elles, des statuts qui leur soient
propres. Il doit en outre mettre en place l’organisation administrative spécifique prévue par
le CGCT ;
3. respecter l’article L. 1411-3 du CGCT qui prévoit l’examen du rapport annuel du
délégataire par le comité syndical ; observer les dispositions prévues s’agissant du rôle et
des missions de la commission consultative des services publics locaux.
PRINCIPALES RECOMMANDATIONS
La chambre engage le syndicat mixte à :
1. compléter les informations présentées dans la note de synthèse préparatoire au débat
d’orientations budgétaires en ajoutant une présentation de l’équilibre prévisionnel des
opérations financières (équilibre réel) pour chacun des budgets ;
2. poursuivre sa démarche de commercialisation des services d’interconnexion de sites
publics des entités du département, tout en continuant le développement des services
complémentaires ;
3. afin d’assurer l’équilibre financier du budget annexe « Télécommunications » et de
garantir la sécurité juridique des relations avec les utilisateurs du «
nuage public
départemental
»,
promouvoir
ce
dernier
auprès
des
établissements
publics
du
département ;
4. poursuivre la mise en oeuvre de sa politique de sécurité des systèmes d’information afin
que la collecte et le traitement des données personnelles respectent la réglementation
applicable ;
5. exercer la plus grande vigilance lors de l’entrée en phase de commercialisation des
nouveaux réseaux hertziens et en fibre optique, et suivre scrupuleusement la restitution
des indicateurs de qualité de service.
I -
RAPPEL DE LA PROCEDURE
L’examen de la gestion du syndicat mixte Manche Numérique pour les années
2010 et suivantes a été notifié à l’ordonnateur en fonctions jusqu’au 4 mai 2015 par le
président de la chambre en date du 20 janvier 2015.
Suite au renouvellement du conseil départemental, le président de la chambre a
notifié le contrôle par lettre du 13 mai 2015 à l’ordonnateur qui a pris ses fonctions le 4 mai
2015.
L’entretien préalable a eu lieu le 2 juin 2015 avec M. Gilles Quinquenel, président
du syndicat jusqu’au 4 mai 2015 et M. Serge Deslandes, président du syndicat à compter de
cette date.
La chambre a délibéré sur le rapport d’observations provisoires le 26 juin 2015 et
l’a adressé dans son intégralité aux présidents successifs du syndicat le 9 juillet 2015. Ils en
ont accusé réception le 10 juillet 2015.
Un extrait a également été adressé le 9 juillet 2015 à un tiers susceptible d’être
mis en cause. Celui-ci n’a pas apporté de réponse à la chambre.
M. Serge Deslandes a apporté une réponse enregistrée au greffe de la juridiction
le 16 octobre 2015.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
4
Après avoir entendu le rapporteur et pris connaissance des conclusions du
procureur financier, la chambre a arrêté, le 30 octobre 2015, le présent rapport
d'observations définitives.
Le rapport a été communiqué au président en fonctions et à son prédécesseur le
13 novembre 2015. Ce rapport, auquel est jointe la réponse de M. Serge Deslandes,
président en fonctions, enregistrée au greffe de la chambre le 17 décembre 2015, devra être
communiqué par celui-ci à son assemblée délibérante de la plus proche réunion suivant sa
réception. Il fera l'objet d'une inscription à l'ordre du jour, sera joint à la convocation adressée
à chacun de ses membres et donnera lieu à un débat. Ce rapport sera, ensuite,
communicable à toute personne qui en ferait la demande en application des dispositions de
la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978.
L’article R.241-18 du code des juridictions financières dispose également qu’ «
à
réception du rapport d’observations définitives, la collectivité ou l’établissement public
concerné fait connaître à la chambre régionale des comptes la date de la plus proche
réunion de l’assemblée délibérante ou de l’organe collégial de décision et communique, en
temps utile, copie de son ordre du jour. »
La loi n° 2015-991 du 7 août 2015 a introduit un no uvel article du code des
juridictions financières rédigé comme suit :
« Art. L. 243-7.-1- Dans un délai d’un an à
compter de la présentation du rapport d’observations définitives à l’assemblée délibérante,
l’exécutif de la collectivité territoriale ou le président de l’établissement public de coopération
intercommunale à fiscalité propre présente, dans un rapport devant cette même assemblée,
les actions qu’il a entreprises à la suite des observations de la chambre régionale des
comptes. Ce rapport est communiqué à la chambre régionale des comptes, qui fait une
synthèse annuelle des rapports qui lui sont communiqués. Cette synthèse est présentée par
le président de la chambre régionale des comptes devant la conférence territoriale de l’action
publique. Chaque chambre régionale des comptes transmet cette synthèse à la Cour des
comptes en vue de la présentation prescrite à l’article L.143-10-1. »
II -
PRÉSENTATION DU SYNDICAT MIXTE MANCHE NUMÉRIQUE
Jusqu’à fin 2014, les compétences du syndicat s’étendaient au département de
la Manche. La population du territoire est, dans l’ensemble, moins dense et plus rurale que la
moyenne métropolitaine
1
. Elle s’établissait à 499 340 habitants au 1
er
janvier 2015.
En 2012 (dernières données disponibles), l’INSEE recensait 286 205 logements
dont 81 % sont individuels. Le syndicat a recensé un total de 306 206 prises optiques
commercialisables à l’occasion d’une étude réalisée dans le cadre de l’élaboration du
schéma directeur territorial d’aménagement numérique (SDTAN).
Le soutien financier de l’Etat aux projets de déploiements des réseaux en fibre
optique portés par les collectivités territoriales comporte un dispositif de modulation à
l’échelon départemental. Par combinaison des indicateurs de ruralité et de dispersion de
l’habitat qui lui sont propres, la Manche figure parmi les départements qui bénéficient d’un
taux de soutien significatif
2
.
1
Les zones peuplées se concentrent dans les aires urbaines de Cherbourg-Octeville, Saint-Lô, Coutances et autour des pôles
d'Avranches et de Granville sur le littoral. Pour autant, ces territoires ne concentrent que la moitié de la population totale.
2
Par combinaison des deux indicateurs, la Manche occupe le 18
ème
rang des départements par ordre décroissant pour le taux
de soutien maximum du besoin de financement public de ses projets.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
5
Manche Numérique est membre de l’AVICCA
3
, de la FNCCR
4
et de la mission
Ecoter
5
. Le syndicat est représenté dans les instances nationales d’échange et de
concertation entre les parties prenantes à l’aménagement numérique du territoire. Ses
dirigeants participent aux réflexions engagées au plan national.
A -
Une action inscrite dans un projet régional et départemental
Le cadre d’intervention des collectivités territoriales dans le domaine des
communications électroniques est présenté en annexe 1. Les termes utilisés dans le présent
rapport sont ceux recommandés au Journal officiel de la République française. Ils sont
répertoriés dans un glossaire en annexe 2.
Dès 2000, après une consultation publique tendant à identifier les besoins des
opérateurs de télécommunications et des utilisateurs potentiels, le département a déployé
une dorsale
6
haut débit destinée à l’implantation de boucles locales dans une démarche
d’ouverture à la concurrence.
Afin de soutenir et de diversifier le développement économique sur son territoire,
il a décidé de créer un établissement dédié aux technologies numériques.
L’arrêté préfectoral du 23 avril 2004 a ainsi créé le syndicat mixte pour le
développement d’un territoire numérique, dénommé « Manche Numérique ». Ses statuts ont
été votés le 4 décembre 2003 autour des principes de mutualisation et de péréquation
départementale
7
.
Depuis le 1
er
janvier 2013, 27 établissements publics de coopération
intercommunale (EPCI) réunissant les 601 communes du département adhèrent au syndicat
pour la compétence «
aménagement numérique du territoire
».
1 -
La première période d’activité du syndicat (2006/2014) : l’ouverture à la
concurrence
A sa création, le syndicat s’est engagé pour l’amélioration de l’accès à internet à
haut débit pour le plus grand nombre.
Son action s’est d’abord centrée sur l’ouverture à la concurrence par le
dégroupage des centraux téléphoniques. Simultanément, l’établissement a pris en charge
l’augmentation du débit, en vue de couvrir les zones blanches. Il a eu recours aux
technologies du cuivre et, pour les foyers non éligibles à l’ADSL, à l’une des technologies
hertziennes terrestres, le Wifi MAX
8
.
Le syndicat a délégué à la société « Manche Télécom
9
» l’exploitation, la
conception et la complétude du réseau de collecte, en vue de commercialiser des services
auprès des usagers.
3
Association des villes et collectivités pour les communications électroniques et l’audiovisuel (AVICCA).
4
Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR).
5
La mission ECOTER est une association loi 1901 qui rassemble des entités publiques dont les collectivités territoriales et des
entreprises (équipementiers, opérateurs, intégrateurs, services, financiers et juridiques).
6
On entend par « dorsale haut débit », appelée aussi « backbone universel de services (BUS) », la partie principale d'un réseau
de télécommunication caractérisée par un débit élevé, qui concentre et transporte les flux de données entre des réseaux
affluents.
7
L’objectif était de garantir une qualité de service comparable sur l’ensemble du territoire, indépendamment des
caractéristiques locales (densité de population, ruralité, facteurs sociodémographiques).
8
Wifi MAX et Wifi MAX MIMO sont des marques déposées. Il s’agit de Wi-Fi fonctionnant sur grandes distance en extérieur qui
repose sur l’installation d’antennes relais sur les points hauts et d’une antenne chez l’utilisateur final. La technologie Wifi MAX
est exploitable sans licence, contrairement à la technologie WiMax dont l’exploitation nécessite une autorisation accordée par le
régulateur pour l’utilisation de fréquences de la boucle locale radio.
9
Société filiale de SFR-collectivités et de la Caisse des dépôts.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
6
En outre, dès 2008, l’établissement a expérimenté la fibre optique avec un
programme de construction et d’exploitation de 27 000 prises raccordables en très haut débit
à Saint-Lô et à Cherbourg. Sa réalisation a été confiée à « Manche Télécom » par avenant
au contrat précité.
En 2011, un appel à manifestation d’intention d’investissement (AMII) a été lancé
sur le territoire de la Manche afin de recenser les investissements programmés par les
opérateurs pour les cinq années à venir pour le très haut débit. Seul le territoire de
Cherbourg a fait l’objet d’une intention d’investissement, non confirmée par l’opérateur.
En
conséquence,
l’ensemble
des
infrastructures
de
télécommunication
permettant l’accès au très haut débit devait être réalisé sous maîtrise d’ouvrage publique
dans le département.
2 -
La seconde période d’activité : le déploiement d’un réseau à très haut débit
(2014/2020)
Cette période s’ouvre en 2014 par le début de la mise en oeuvre du plan
d’infrastructure prévu au schéma directeur.
L’établissement prévoit de déployer et de renforcer le réseau préexistant de
collecte par un «
plan fibre
» jusqu’à l’abonné (FTTH). La première étape du projet consiste à
remplacer l’ancien réseau hertzien Wifi MAX par un nouveau réseau terrestre s’appuyant sur
la technologie Wifi MAX MIMO. Ce dernier est transitoire, il sera éteint lorsque le
déploiement du réseau en fibre optique sera terminé.
Fin juin 2015, 22,5 % des logements et des locaux professionnels de la Manche
équipés en ADSL, soit environ 75 000 abonnés, restent en deçà d’un service de trois
mégabits par seconde, soit un niveau proche de l’inéligibilité ou de la zone blanche
10
.
Ce résultat, qui peut paraître modeste après plus de dix ans d’existence du
syndicat, peut s’expliquer par les caractéristiques du territoire, à savoir une proportion
d’habitat individuel élevé, un nombre important d’entreprises de très petite taille
11
, des taux
de ruralité et de dispersion de l’habitat
12
parmi les plus élevés de l’ensemble des
départements français.
Source : Observatoire France Très haut débit, novembre ; 2015
10
Selon l’observatoire de la mission « France très haut débit », toutes technologies confondues, la part des logements et locaux
professionnels de la Manche inéligibles à un accès internet est de 2,1 %, celle pour laquelle le service est inférieur à trois Mbps
est de 20,4 %.
11
Selon l’INSEE, la part des établissements n’employant aucun salarié ne représente que 73 % du total des établissements
actifs fin 2012.
12
Dans le cadre du plan « France très haut débit », l’Etat a modulé l’attribution des aides sur chaque département en fonction
du « taux de ruralité » (part relative de la population vivant dans une commune n’appartenant à aucune unité urbaine) et du
« taux de dispersion de l’habitat », qui intègre l’accroissement des coûts lié à un déploiement épars. La Manche bénéficie de
l’une des pondérations les plus fortes, elle se classe au 18
ème
rang des départements français, par ordre décroissant.
2,1%
19%
13,8%
43,9%
15,5%
5,7%
Département de la MANCHE
Pourcentage de logements et locaux
professionnels par classes de débit
Inéligibles
Moins de 3 Mbits/s
3 à 8 Mbit/s
8 à 30 Mbit/s
30 à 100
Mbit/s
100 Mbit/s et plus
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
7
3 -
Les schémas directeurs territoriaux
En matière de pilotage des initiatives, la loi a instauré un document de
planification territoriale de l’aménagement numérique, le schéma directeur territorial
d’aménagement numérique (SDTAN), élaboré à l’échelle du département ou de la région.
Le schéma de cohérence régionale d’aménagement numérique (SCORAN)
prévoit, quant à lui, la définition d’une stratégie conjointe d’aménagement du territoire
régional.
a -
La
stratégie
de
cohérence
régionale
d’aménagement
numérique
(SCORAN) de Basse-Normandie
La stratégie de cohérence d’aménagement numérique (SCORAN) en région
Basse-Normandie a été présentée en octobre 2010.
Le document précise les objectifs et la gouvernance de l’action territoriale. Il
dresse un état des lieux et décrit les grandes orientations retenues en matière d’accès au
haut débit et au très haut débit. Il hiérarchise les actions à engager par les acteurs publics et
les périmètres retenus pour l’élaboration des schémas territoriaux d'aménagement
numérique
13
.
Selon l’étude de l’INSEE parue en 2015
14
, les résultats observés en région
Basse-Normandie en termes d’équipements, d’usages et de compétences sont proches des
moyennes observées en province.
Par décision de la gouvernance numérique de Basse-Normandie, l’élaboration du
schéma directeur territorial d'aménagement a été confiée aux départements.
b -
Le schéma directeur territorial d'aménagement numérique
La loi de 2009 relative à la lutte contre la fracture numérique introduit au CGCT
l’obligation de réaliser un schéma directeur territorial d’aménagement numérique (SDTAN)
15
.
Ce schéma permet de recenser les infrastructures et réseaux, d’identifier les zones
desservies, de relever les carences des territoires et de présenter une stratégie de
développement.
Le conseil syndical de Manche Numérique a ainsi adopté le SDTAN pour le
département de la Manche en 2011 puis en a actualisé les objectifs en juin 2013. Le schéma
se décompose en deux volets. Le premier, intitulé « Infrastructures », présente l’état
d’avancement des déploiements réalisés depuis 2011, les actions prévues pour la période
2013/2020, la description technique et les aspects financiers des travaux, ainsi que le
montage juridique retenu. Le second volet, intitulé « Usages », précise la stratégie de
développement des usages numériques dans le département de la Manche pour la période
2014-2020.
Le SDTAN fixe l’objectif de raccorder en très haut débit 66 % du territoire (soit
environ 200 000 prises) d’ici 2020/2021 et la totalité à l’horizon 2027 (soit 300 000 foyers au
total).
13
Plus précisément, la stratégie régionale se décline en trois grands axes, eux-mêmes déclinés en actions :
-
les infrastructures, dont la réalisation est prévue par les schémas territoriaux d’aménagement numérique ;
-
les usages et les services pour le développement économique et social et pour le développement durable ;
-
la formation par le développement des compétences dans le champ du numérique.
14
INSEE, Dossier Basse-Normandie, «
La Basse-Normandie à l’ère du numérique
», édition 2015.
15
Il s’agit d’un document opérationnel, établi à moyen ou long terme (cinq à vingt ans), qui décrit les objectifs à atteindre pour le
territoire considéré. Le document constitue un outil de cadrage de la montée en débit des territoires et de leur évolution vers le
très haut débit, au moyen, essentiellement, d'une densification de la capillarité des réseaux en fibre optique. Il favorise la
cohérence des actions à mener par les différents acteurs.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
8
B -
Des compétences bien définies par les statuts et exercées pleinement
Le syndicat s’est développé pendant dix ans sur la base de deux objectifs
traduits en autant de compétences : l’aménagement numérique du territoire et l’assistance
apportée à ses membres dans le domaine de l’informatique de gestion.
En 2014, une troisième compétence a été intégrée aux statuts. Elle consiste en
la création et l’exploitation de bâtiments d’intérêt syndical destinés à accueillir un centre de
formation professionnelle aux technologies de l’information et de la communication (TIC).
1 -
Un aménagement numérique du territoire mené par étapes
Le syndicat a mené sa mission par étapes en ayant recours à différentes
technologies. Lors de sa création, l’intervention du syndicat pour l’aménagement du territoire
était limitée au département de la Manche, ainsi qu’aux EPCI et aux communes de périmètre
cantonal adhérentes.
Dans une démarche d’anticipation de la réorganisation administrative du
territoire
16
, l’organe délibérant a décidé, fin 2014, d’étendre le périmètre d’intervention à la
fois d’un point de vue territorial (adhésion de personnes publiques situées en dehors de la
Manche) et institutionnel (possibilité d’adhésion de la région).
2 -
Une compétence « Informatique de gestion » largement diffusée et
récemment évaluée
La compétence « Informatique de gestion » consiste pour le syndicat à apporter
à ses membres une assistance sous la forme de conseil, d’assistance à maîtrise d’oeuvre, de
formation et de maintenance dans les domaines de l’informatique de gestion et de la
communication. Toute commune et tout établissement peut demander à bénéficier de
l’assistance à l’informatique de gestion proposée par le syndicat.
Début 2015, plus de 500 collectivités et établissements (EHPAD
17
, syndicats) du
département bénéficient de l’appui du syndicat. La compétence recouvre également l’activité
d’audit et de conseil pour le renouvellement du parc informatique et la téléphonie sous IP.
Le comité consultatif « Informatique de gestion », prévu par le règlement intérieur
du syndicat, doit se réunir annuellement. Or, sa dernière réunion remonte au 11 octobre
2013.
Le nombre d’organismes adhérents à la compétence est stable depuis plusieurs
années. Le syndicat a mis en oeuvre une démarche d’évaluation de la satisfaction des
adhérents dont la restitution a eu lieu fin 2013. Même si le questionnement reposait sur des
critères d’évaluation larges, les adhérents se sont déclarés satisfaits du service.
La grille tarifaire des services et des prestations proposés dans le cadre de la
compétence « Informatique de gestion » est adoptée chaque année par le comité syndical.
3 -
Une extension récente des compétences pour la promotion de la formation
professionnelle
Le comité syndical a étendu les compétences de l’établissement à l’exploitation
de bâtiments d'intérêt syndical liés à la promotion des usages en matière de technologies de
l'information et de la communication. Le syndicat peut construire des bâtiments ou bénéficier
de mises à disposition par certains membres.
16
Loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles n° 2014-58 du 27 janvier 2014.
17
Etablissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
9
En accord avec le volet « Usages » du SDTAN, le syndicat agit également pour
le développement de la formation professionnelle. La nouvelle compétence se rattache à
l’axe « Formation » développé dans le document de programmation.
« Innovance », le premier projet développé dans le cadre de cette nouvelle
compétence, en association avec la communauté de communes du Mortainais, consiste en
la création d'un pôle de référence des métiers du numérique en lien avec les entreprises de
la filière. Ce projet requiert la construction et la réhabilitation de bâtiments dédiés. Il est
développé en complémentarité avec les actions prévues au contrat de plan régional de
développement des formations professionnelles (CPRDFP).
Compte tenu d’un début de mise en oeuvre récent, le projet ne fait pas l’objet
d’autres développements.
4 -
Des activités complémentaires développées régulièrement
Les compétences structurantes du syndicat ont été régulièrement renforcées par
l’intégration d’activités complémentaires.
Ainsi, depuis 2008, l’établissement est autorisé à assurer des prestations se
rattachant à son objet dans les conditions de l’article L. 5211-56 du code général des
collectivités territoriales (CGCT) et dans le respect du code des marchés publics. Il est
également prévu que le département puisse le mandater pour développer les usages dans le
domaine des TIC. Enfin, le syndicat est coordonnateur de commandes publiques se
rattachant à son objet.
Depuis 2010, il peut également exercer les missions d’une centrale d’achats
18
au
profit de ses membres, pour les catégories d’achat ou de commande publique se rattachant
aux domaines d’activités de ses compétences statutaires.
Débutée en 2012, l’interconnexion des sites de la collectivité « département de la
Manche » constitue la première étape de l’élaboration du «
nuage public départemental
».
Ce service, plus connu sous le vocable anglo-saxon
« cloud computing »
traduit par
«
l’informatique en nuage
19
», a vocation à proposer, à court terme, un ensemble de
prestations aux entités publiques du territoire.
L’ordonnateur précise que ce programme repose sur une organisation mise en
place en 2014, la DUSI, fruit de la mutualisation entre les services du conseil départemental
et les services du syndicat. L’élaboration du nuage a nécessité au préalable le déploiement
et l’activation du réseau ainsi que la création d’un second data center.
Le département bénéficie des services de la DUSI moyennant le versement
d’une contribution. La DUSI est chargée du développement des usages, elle assure à ce titre
la gestion de la compétence « Informatique de gestion » et la promotion du «
nuage public
départemental
».
*
La chambre observe que les statuts de Manche Numérique déclinent chacune
des compétences en les rattachant à l’objet statutaire. Leurs évolutions récentes ont eu lieu
en cohérence avec les documents territoriaux de programmation.
18
L’activité est exercée au titre des missions prévues à l’article 9 du code des marchés publics.
19
L'informatique en nuage est un mode de traitement des données d'un client dont l'exploitation s'effectue par l'internet, sous la
forme de services fournis par un prestataire. Il s’agit d’une forme particulière de gérance de l'informatique, dans laquelle
l'emplacement et le fonctionnement du nuage ne sont pas portés à la connaissance des clients. Source : Journal officiel du
6 juin 2010.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
10
Toutefois, la chambre engage le syndicat à rester vigilant sur l’application des
principes de spécialité et d’exclusivité qui s’imposent à sa structure juridique et à chacun de
ses membres.
Ainsi, les services fournis par le syndicat dans le cadre de sa compétence
« informatique de gestion » pourraient s’assimiler à des prestations de service. Dès lors, il lui
appartient de s’assurer du respect des textes applicables, notamment l’article 17 de
l’ordonnance du 23 juillet 2015
20
, lorsqu’il adresse son catalogue de services à des
établissements publics n’adhérant pas au syndicat, par exemple les EHPAD.
III -
LA
GOUVERNANCE
DU
SYNDICAT
EST
PERFECTIBLE
SUR
CERTAINS POINTS
A -
Le fonctionnement des instances syndicales est satisfaisant
1 -
Le comité syndical
En accord avec l’article L. 5721-2 du CGCT, la répartition des sièges entre les
collectivités locales et les établissements publics membres du syndicat est fixée par les
statuts.
En application de l’article L. 5212-16 du même code, tous les délégués prennent
part au vote pour les affaires présentant un intérêt commun à tous les membres. Dans les
autres cas, ne prennent part au vote que les délégués représentant les membres concernés
par l’affaire soumise à délibération.
La composition du comité syndical est conforme aux dispositions statutaires.
Le règlement intérieur prévoit que l’organe délibérant se réunit au moins une fois
par semestre. Le comité syndical a été réuni au moins cinq fois par an durant la période sous
revue.
2 -
Le bureau
En référence à l’article L. 5211-10 du CGCT, un bureau est instauré. Il est
composé du président, des vice-présidents et de plusieurs autres membres. Le nombre de
vice-présidents est librement déterminé par l’organe délibérant, sans que ce nombre ne
puisse excéder 30 % de l’effectif de celui-ci.
Le 12 juin 2014, le comité syndical a élu son président, fixé le nombre de
vice-présidents (sept) et désigné ces derniers. Les élections départementales de mars
2015 ont amené les membres à se prononcer sur de nouvelles nominations par délibération
du 4 mai 2015.
Lors de la même séance, l’assemblée délibérante a fixé le nombre des membres
du bureau à quinze, soit le président, les vice-présidents et sept autres membres.
Le règlement intérieur précise le fonctionnement et les attributions du bureau.
3 -
Les commissions permanentes et réglementaires
La mise en place et la composition des commissions du syndicat ont été régies
par la délibération du 4 mai 2015, conformément au règlement intérieur en vigueur. Le
document précise également leur rôle, ainsi que leur composition et leur fonctionnement.
20
Ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
11
En mai 2015, le comité syndical a élu les membres des commissions « appel
d’offres » et « délégation de service public (DSP) » dont la composition est identique, suivant
les dispositions de l’article 22 du code des marchés publics. Le comité syndical a également
installé la commission consultative des services publics locaux (CCSPL).
La commission « Informatique de gestion » a été mise en place et ses membres
désignés, le règlement intérieur en précise les attributions.
Les statuts, modifiés en juin 2013, prévoient la création du conseil d’exploitation
de la régie dotée de l’autonomie financière créée pour suivre les activités de la nouvelle
compétence « bâtiments d’intérêt syndical ».
*
En conclusion, la chambre observe que l’organe délibérant est composé
régulièrement et qu’il se réunit selon les modalités prévues par le règlement intérieur. Les
décisions ont été adoptées à la majorité requise. Le fonctionnement institutionnel du syndicat
mixte Manche Numérique est conforme aux dispositions en vigueur.
Les délégations du comité syndical au bureau et au président n’appellent pas de
remarque particulière.
B -
Les obligations du domaine des communications électroniques sont
respectées
1 -
La qualité d’opérateur de communications électroniques
L’article L. 1425-1 du CGCT dispose que :
« lorsqu'ils exercent une activité
d'opérateur de communications électroniques, les collectivités territoriales et leurs
groupements sont soumis à l'ensemble des droits et obligations régissant cette activité »
. Le
code des postes et des communications électroniques (CPCE) précise ces obligations.
En 2011, Manche Numérique s’est déclaré à l’ARCEP
21
en tant qu’opérateur de
réseau. Au regard des activités qu’il exerce présentement, le syndicat est exploitant d’un
réseau fermé, le « nuage public départemental », et maître d’ouvrage d’un réseau ouvert au
public pour lequel il n’est pas exploitant.
2 -
Le respect du principe de séparation
Le deuxième alinéa du II de l’article L. 1425-1 du CGCT dispose qu’«
une même
personne morale ne peut, à la fois, exercer une activité d'opérateur de communications
électroniques et être chargée de l'octroi des droits de passage destinés à permettre
l'établissement de réseaux de communications électroniques ouverts au public.
»
En l’espèce, l’interdiction ne trouve pas à s’appliquer car la compétence
d'octroyer des droits de passage n’a pas été transférée au syndicat.
3 -
Le respect de l’obligation de transmission du projet au régulateur
a -
La complétude du réseau initial
Dans le cadre de ses missions, le régulateur sectoriel doit veiller notamment à
« l’exercice d’une concurrence effective et loyale »
au bénéfice des utilisateurs finaux.
21
Autorité de régulation des communications électroniques et des postes.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
12
L’article L. 1425-1 (I) du CGCT, entré en vigueur le 1
er
août 2004, prévoit que les
collectivités et leurs groupements doivent lui transmettre, préalablement à l’initiation d’un
projet de réseau d’initiative publique, une description dudit projet présentée selon des
éléments déterminés. Elles doivent également faire publier leur intention de déployer un
réseau de communications électroniques dans un journal d’annonces légales
22
.
De surcroît, les collectivités doivent constater l’insuffisance d'initiatives privées
propres à satisfaire les besoins des utilisateurs finaux et en informer le régulateur. Le constat
est établi par un appel d'offres déclaré infructueux.
Aux termes du V de l’article L. 1425-1 du CGCT, les collectivités dont les
infrastructures ont été créées avant la promulgation de la loi de 2004
23
sont dispensées des
formalités prévues à cet article. En revanche, dès lors qu’une collectivité souhaite compléter
ou étendre son intervention initiale, il lui incombe de respecter les conditions de mise en
oeuvre précitées.
En 2006, le syndicat a entrepris de compléter et d’étendre l’infrastructure qui lui a
été remise à sa création, conformément à ses missions. A cette fin, il a signé une convention
de délégation de service public dont les réalisations s’inscrivent parmi les nouvelles activités
autorisées aux collectivités.
La convention prévoit que le délégataire, en sa qualité d’exploitant du réseau
local de communications électroniques, soit tenu de l’ensemble des droits et obligations
afférents. A ce titre, il lui incombait de satisfaire aux obligations de déclarations et aux
demandes d’autorisation exigées pour l’établissement et l’exploitation du réseau. Il n’a pas
été relevé de contentieux sur ce point.
Pour sa part, le syndicat n’a produit ni les pièces attestant du respect des
formalités qui lui incombaient (publicité et transmission du projet au régulateur), ni les
éléments permettant de conclure à l’insuffisance de l’initiative privée (appel d’offre
infructueux).
b -
Les déploiements du réseau à très haut débit à partir de 2011
Le syndicat a déposé un dossier de consultation formelle de son projet à
l’ARCEP qui l’a mis en ligne le 7 novembre 2011, pour une période de deux mois. A l’issue
de cette consultation, l’opérateur « Orange » a indiqué que ce projet n’interférait pas avec
ses zones de déploiement FTTH en fonds propres. Aucun autre opérateur ne s’est
manifesté.
Fin 2011, la commission consultative régionale d’aménagement numérique du
territoire (CCRANT) a constaté qu’aucun opérateur privé n’avait manifesté d’intention de
déployer un réseau en fibre optique jusqu’à l’abonné (FTTH) sur le territoire de la Manche.
C -
La gestion de certaines régies n’est pas conforme à la réglementation
applicable
1 -
L’inobservation des obligations préalables à la création d’une régie
Lorsqu’un syndicat mixte souhaite exploiter directement un service public à
caractère industriel et commercial (SPIC) relevant de sa compétence, l'article L. 1412-1 du
CGCT lui impose la constitution d’une régie dédiée.
22
Selon l’ARCEP, ces dispositions ont pour objectif de garantir l’utilisation partagée du réseau et de respecter le principe
d’égalité et de libre concurrence sur les marchés. Les informations transmises au régulateur doivent comprendre les éléments
suivants : la fiche synthétique de la description du projet, le plan du réseau construit et des réseaux existants interconnectés, le
catalogue des prestations et, le cas échéant, la convention signée entre la collectivité et le co-contractant.
23
La loi n° 2004-575 pour la confiance dans l’économ ie numérique a été promulguée le 22 juin 2004.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
13
Dans le respect de l’article L. 1413-1 du CGCT, l’établissement a créé la
commission consultative des services publics locaux (CCSPL), instance chargée de donner
un avis sur l'ensemble des services publics confiés à un tiers par convention ou exploités en
régie dotée de l'autonomie financière.
Ce même article impose au syndicat de consulter la CCSPL avant la création
d’une régie dotée de l’autonomie financière. Pour autant, cette obligation n’a pas été
respectée lors de la création des cinq régies les plus récentes « Centrale d’achats »,
« Télécommunications », « DUSI », « FTTH » et « TBDH », auxquelles s’ajoute la dernière
régie « Bâtiments d’intérêt syndical » créée en 2015.
La chambre observe qu’en ne consultant pas la CCSPL lors de la création des
régies, le syndicat a méconnu l’article L. 1413-1 du CGCT. Le document transmis en
réponse par l’ordonnateur ne permet pas d’attester du respect de cette obligation.
2 -
Le principe d’autonomie financière n’est pas toujours respecté
Dans le cadre précité, le comité syndical a créé des régies
24
, correspondant aux
budgets annexes précités, chargées de la gestion de services publics à caractère industriel
et commercial.
S’agissant des SPIC, l’article L. 2221-4 du CGCT précise que les régies
concernées doivent nécessairement bénéficier de l’autonomie financière à laquelle le comité
syndical peut ajouter la personnalité morale. Aucune des régies n’en a été dotée.
En l’espèce, seules trois des SPIC sont effectivement autonomes sur le plan
financier, « Télécommunications », « Centrale d’achats » et « Bâtiments d’intérêt syndical ».
Les autres régies chargées de l’exploitation d’un SPIC, « Informatique de gestion »,
« FTTH » et « TDBH » sont, quant à elles, rattachées à la comptabilité principale.
Selon l’ordonnateur, l’assemblée délibérante a doté certains budgets annexes de
l’autonomie financière afin qu’une éventuelle dégradation de leur situation n’affecte pas le
budget principal. Il ajoute que les autres budgets sont la traduction des compétences
"historiques" de Manche Numérique et qu’ils n’ont pas fait l’objet de la même précaution. La
chambre rappelle cependant l’intérêt d’une régularisation rapide de cette situation et prend
acte de l’engagement de l’ordonnateur à régulariser cette situation dans les meilleurs délais.
3 -
Les régies ne sont pas dotées des statuts et des organes prévus par le
CGCT
L’article L. 2221-14 du CGCT dispose que les régies dotées de la seule
autonomie financière sont administrées sous l’autorité de l’ordonnateur par un conseil
d’exploitation et un directeur. L’organisation et le fonctionnement de ces régies sont prévus
aux articles R. 2221-3 à 17 et R. 2221-63 à 94 du CGCT.
Selon les dispositions applicables, la délibération créant une régie doit en fixer
les statuts et le montant de la dotation initiale. Le comité syndical doit également désigner
les membres du conseil d’exploitation et déterminer les tarifs du service.
Le directeur dispose de prérogatives lui permettant d’assurer le fonctionnement
des services de la régie. Ainsi, il prépare le budget et peut recevoir de l’ordonnateur une
délégation de signature pour toutes les affaires intéressant le fonctionnement de la régie.
24
La gestion du service public à caractère administratif « DUSI » n’appelle pas de remarque particulière.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
14
En outre, l’article R. 2221-94 du CGCT dispose qu’un relevé provisoire des
résultats d’exploitation doit être arrêté tous les six mois par le directeur et présenté par
l’ordonnateur à l’assemblée délibérante
25
.
Il ressort de l’instruction que les délibérations de création de ces régies n’étaient
pas accompagnées des statuts propres et ne précisaient pas leur dotation initiale. Les
statuts du syndicat mentionnent uniquement les conseils d’exploitation des régies « DUSI »
et « Bâtiments d’intérêt syndical ».
Aucune des régies dotées de la seule autonomie financière créées par le
syndicat ne dispose ni de statuts, ni d’un règlement intérieur.
4 -
Le règlement intérieur est incomplet
Au cours de la période sous revue, le syndicat s’est doté d’un règlement intérieur
qu’il a actualisé après chaque renouvellement des membres de son comité, conformément
aux articles L. 2121-8 et L. 5211-1 du CGCT.
Il encadre correctement le fonctionnement interne du syndicat. Le document de
2015 se décompose en six parties organisant le fonctionnement de l’établissement
26
.
Cependant, la chambre observe que l’organisation administrative des régies n’y
est abordée que de manière parcellaire. En outre, la mention d’une régie « Innovance » est
erronée dans la mesure où il s’agit de l’intitulé d’un projet rattaché au budget annexe de la
régie créée sous l’intitulé « Bâtiments d’intérêt syndical ».
*
En conclusion, la chambre observe que le cadre légal qui s’applique aux régies
chargées de l’exploitation d’un service à caractère industriel et commercial n’est pas
totalement respecté. En conséquence, elle engage le syndicat à procéder sans délai aux
régularisations qui s’imposent comme il s’y est engagé.
IV -
LA QUALITÉ DE L’INFORMATION BUDGÉTAIRE, FINANCIÈRE ET
COMPTABLE
Outre le fonctionnement général du syndicat, le budget principal retrace les
opérations d’aménagement numérique qui ne relèvent pas d’une activité industrielle ou
commerciale. Il enregistre également les flux financiers avec « Manche Télécom »,
délégataire depuis 2006.
Le budget principal est complété par sept budgets annexes :
-
le budget « Informatique de gestion », créé en 2004 ;
-
le budget « Centrale d’achats », créé en 2010 ;
-
le budget « Télécommunications », créé en 2011 a pour objet d’individualiser
les travaux d’interconnexions des sites publics du département (nuage
public) ;
25
Le même article prévoit :
« Lorsqu’il résulte de ce relevé que l’exploitation est en déficit, le conseil municipal est
immédiatement incité par le maire à prendre les mesures nécessaires pour rétablir l’équilibre, soit en modifiant les tarifs ou les
prix de vente, soit en réalisant des économies dans l’organisation des services. »
26
Le comité syndical (dont les conditions d’organisation du débat d’orientations budgétaires), le bureau, le président, les
commissions et comités consultatifs, les conditions d’exercice du mandat de délégué, les dispositions diverses.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
15
-
les budgets « DUSI », « FTTH », et « TBDH » créés en 2013 : le premier
individualise les activités de service et les usages. Les deux autres budgets
retracent le déploiement, par étapes, d’un réseau de communications
électroniques à très haut débit. Leurs activités se rattachent à la compétence
d’aménagement numérique du territoire ;
-
le budget « Bâtiment d’intérêt syndical » créé en mars 2015.
Fin 2014, l’exécution budgétaire consolidée, hors restes à réaliser, s’établissait à
28,3 M€ en dépenses et à 29,6 M€ en recettes (opérations réelles et d’ordre) pour un
résultat cumulé de 7,9 M€
27
. L’encours de la dette auprès des établissements de crédit
s’élevait à 13,6 M€
28
. Le syndicat était également engagé envers d’autres prêteurs pour
7,9 M€
29
.
L’établissement dispose de deux sources de financement principales :
-
les contributions du département de la Manche et des EPCI membres pour
l’aménagement numérique du territoire ;
-
les contributions des communes et des autres membres en contrepartie de
l’assistance à l’informatique de gestion.
Le syndicat perçoit également les produits de l’exploitation de ses infrastructures,
que celle-ci soit déléguée ou assurée en régie.
L’examen de l’application des dispositions relatives à la présentation des
annexes obligatoires aux documents budgétaires et financiers, au respect de l’autonomie
financière des services à comptabilité distincte et à l’affectation du résultat ne révèle pas
d’anomalies.
A -
L’information budgétaire et financière
1 -
Le débat d’orientations budgétaires
Le débat d’orientations budgétaires (DOB) a été organisé à l'intérieur du délai
légal, sans être intervenu à une échéance trop proche du vote du budget primitif, dans le
respect de l’article susvisé et des dispositions jurisprudentielles.
Durant la période sous revue, les éléments suivants sont constatés :
-
la note de synthèse remise aux membres de l’assemblée délibérante, portant
sur le budget principal et les budgets annexes, fait régulièrement référence
aux orientations du SDTAN. Une présentation détaillée de l’avancement des
projets et des travaux accomplis l’année précédente est également produite.
Cette présentation est particulièrement exhaustive dans la note de synthèse
réalisée pour le DOB 2015 ;
-
il est régulièrement fait mention de l’évolution de la participation des
adhérents ;
27
L’exécution budgétaire totale s’est partagée entre les réalisations des budgets annexes portant les opérations
d’infrastructures, « Télécommunications », « FTTH » et « TBDH », pour 42 %, celles du budget principal à hauteur de 33 % et
celles des budgets qui recensent les activités de services, « Informatique de gestion », « centrale d’achats » et « DUSI », pour
25 %.
28
Le stock de dette auprès des établissements de crédit s’établissait à 9,6 M€ au budget principal et à 4 M€ au budget annexe
« Télécommunications » à la clôture de l’exercice 2014.
29
Le syndicat était engagé auprès du délégataire « Manche Télécom » au budget annexe « Télécommunications » pour
5,4 M€ et auprès de la communauté de communes de La Hague au budget annexe « FTTH » pour 2,5 M€ à la clôture de
l’exercice 2014.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
16
-
le comité syndical a adopté plusieurs documents de programmation des
dépenses d’investissement durant la période. Le premier plan pluriannuel date
de mai 2012. En outre, la note de synthèse pour le budget 2012 présente le
plan de financement du projet « infrastructures » jusqu’en 2016. Ce projet est
rattaché au volet « infrastructures » du SDTAN ;
-
depuis 2012, le document servant de base au DOB sépare les prévisions
budgétaires liées aux activités courantes du syndicat de celles liées à la
réalisation de projet. En revanche, les documents évoquent succinctement les
informations financières de l’exercice écoulé qui restent limitées au budget
principal ;
-
en 2012, le budget annexe « Télécommunications » a enregistré l’acquisition
d’un droit d’usage irrévocable (IRU
30
) d’un montant de 9,525 M€, dont le
financement a été intégralement assuré par l’emprunt. Pour autant, les
informations relatives à cette opération, d’un montant pourtant significatif pour
le syndicat, étaient très succinctes dans la note de synthèse 2012 et
inexistantes pour les exercices suivants ;
-
dans la note réalisée pour le DOB 2013, les projets d’équipement les plus
importants (projets d’infrastructure portés par les budgets annexes FTTH et
TBDH)
sont
accompagnés
d’un
plan
de
financement
sur
la
durée
prévisionnelle des travaux ;
-
les notes de synthèse de 2013 à 2015 expriment la montée en puissance des
dépenses d’équipement du syndicat. Pour autant, sa capacité à faire face au
remboursement du capital des emprunts souscrits ou à souscrire n’est pas
présentée. L’information des élus devrait être complétée par la présentation
de l’équilibre prévisionnel des opérations financières (équilibre réel)
31
pour
chacun des budgets.
*
En conclusion, la chambre observe que l’organe délibérant a disposé d’une
information suffisante pour pouvoir utilement débattre des orientations générales du budget
du syndicat jusqu’en 2012. Depuis 2013, le syndicat est entré dans une nouvelle phase
d’investissement dont les montants engagés rendent nécessaires une information renforcée
de l’assemblée délibérante, notamment en ce qui concerne sa capacité à faire face à ses
engagements financiers.
Selon l’ordonnateur, des informations prospectives seront intégrées à la note de
synthèse, support des futurs débats d’orientations budgétaires du syndicat.
2 -
La programmation pluriannuelle des investissements vient d’être renforcée
Au cours des trois derniers exercices, les prévisions budgétaires totales
concernant les dépenses d’équipement du syndicat se sont élevées à 175 M€. Les
réalisations, restes à réaliser inclus, se sont élevées à 61,5 M€.
Le taux d’exécution budgétaire s’est établi en moyenne durant la période à
35 % en dépenses et à 38 % en recettes. Il est faible mais peut s’expliquer par l’entrée du
syndicat dans une phase d’investissement qui porte sur des montants importants et qui a
connu des décalages dans sa mise en oeuvre par rapport aux prévisions initiales.
30
IRU est l’acronyme de
« indefeasible right of use »
qui se traduit par
« droit irrévocable d’usage »
Il s’agit d’un contrat qui
confère à son détenteur un droit permanent, irrévocable et exclusif d’usage de longue durée. Les contrats d’IRU sont très
utilisés par les acteurs des télécommunications comme moyen privilégié de préfinancement et de commercialisation de fibres
optiques.
31
L’équilibre réel du budget est défini à l’article L. 1612-4 du CGCT.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
17
En 2013 et 2014, les prévisions inscrites aux budgets annexes FTTH et TBDH
étaient cohérentes avec les informations contenues au plan pluriannuel d’investissement
(PPI) pour le développement des infrastructures. Les budgets primitifs 2015 reprenaient
également les informations figurant aux documents de programmation pluriannuelle.
Depuis 2015, le comité syndical a adopté la procédure des autorisations de
programme et de crédits de paiement (AP/CP) pour le budget annexe FTTH, ce que la
chambre reconnaît comme une mesure de bonne gestion.
3 -
L’inscription des restes à réaliser doit être plus précise
Le budget annexe FTTH porte le plan de financement du déploiement du réseau
départemental en fibre optique (au-delà des zones de Cherbourg et de Saint-Lô). Le plan
d’investissement prévisionnel, dont l’essentiel des travaux doit se dérouler entre 2014 et
2020, est établi à 196 M€ TTC. Le projet est présenté
infra
(titre VII Le déploiement du
réseau à très haut débit).
Fin 2014, le budget FTTH présentait des restes à réaliser pour 19 M€ en
dépenses et 15 M€ en recettes. L’état signé le 30 janvier 2015 par l’ordonnateur montrait :
-
des dépenses d’installations en cours pour 17 M€ et des frais d’études pour
1,7 M€. Ces inscriptions sont régulières ;
-
des recettes d’un montant de 15 M€, uniquement composées d’un emprunt.
Cette inscription se rattache à un contrat de prêt d’un montant de 29,82 M€,
consenti par la Caisse de dépôts.
Le document prévoit un échéancier de versements correspondant au rythme
prévisionnel des paiements à effectuer pour la réalisation des opérations financées. Au cours
de l’exercice 2014, le syndicat avait inscrit un montant d’emprunt de 26,6 M€, qui n’a pas été
réalisé. Le montant de 15 M€, porté en restes à réaliser, correspond au financement du
programme de travaux en 2015.
L’article 7 du contrat de prêt recense les conditions suspensives de nature
financière et juridique que l’établissement devra lever pour obtenir les versements du
prêteur. La date limite de réalisation des conditions est fixée au 31 décembre 2015
32
.
L’emprunt est garanti par le département de la Manche.
En juin 2015, l’état des réalisations était le suivant :
Conditions suspensives au versement
de la ligne de prêt
Nature
Etat des réalisations
en juin 2015
Date
Pièces produites
(1)
Attribution définitive de la subvention
FSN (étape 2)
Financière
Non
(liée à 5)
(2)
Justification du financement par la
Banque Postale (7,6 et 9,5 M€)
Financière
Oui
27/11/2014
Contrats de prêt
(3) Conventions de financement des
travaux de déploiement du réseau
FTTH pour la CU de Cherbourg et la
CA de Saint-Lô
Financière
Oui
02/02/2015
et 04/05/2015
Convention CUC,
convention Saint-Lô
non produite
(4)
Justification de la cession du réseau
[FTTH] Manche Télécom au nouveau
délégataire [prises construites à
Cherbourg et à Saint-Lô]
Juridique
Non
(5)
Justification du contrat de délégation
de service public (DSP affermage)
purgé de tous recours
Juridique
Non (en cours)
32
L’article 7 du contrat de prêt indique :
« A défaut de réalisation des conditions précitées avant la date souhaitée pour le
premier versement, le prêteur ne sera pas tenu de verser les fonds de chaque ligne de prêt et pourra considérer le contrat
comme nul et non avenu. »
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
18
S’agissant de l’exploitation d’un réseau de communications électroniques à très
haut débit sur le territoire du département, la procédure d’attribution de la délégation du
service public n’était pas encore notifiée.
L’accord préalable de principe au financement du nouveau réseau de fibre
optique par le FSN adressé au syndicat le 31 juillet 2014 précise :
« Afin de garantir la
cohérence de l’exploitation et de la commercialisation sur l’ensemble du département,
Manche Numérique envisage de reprendre les lignes FTTH déjà déployées par « Manche
Télécom » à Cherbourg et à Saint-Lô (27 000 lignes)
[prises]
et de les confier au futur
fermier du réseau FTTH départemental. Un avenant à la DSP conclue avec « Manche
Télécom » est en cours de négociation. »
Lors d’une réunion qui a eu lieu le 7 janvier 2015, le délégataire « Manche
Télécom » a fait connaître au syndicat son refus de signer l’avenant qui devait organiser la
cession des prises déjà construites à Cherbourg et à Saint-Lô. La société a confirmé sa
position lors d’une nouvelle réunion qui s’est tenue le 22 mai 2015.
Il découle de ce qui précède qu’une seule des conditions suspensives inscrites
au contrat de prêt de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) était réalisée au moment
de l’inscription de l’emprunt en restes à réaliser en recettes à la section d’investissement du
budget annexe FTTH (accord de prêt de la Banque postale).
Il ressort des informations produites par l’ordonnateur dans sa réponse qu’en
octobre 2015 seules deux conditions suspensives sur cinq étaient effectivement réalisées.
*
Selon l’article R. 2311-11 du CGCT, les restes à réaliser en recettes
d’investissement correspondent aux recettes certaines n’ayant pas donné lieu à l’émission
d’un titre. Or, le syndicat détenait un contrat de prêt dûment signé contenant cinq conditions
suspensives dont seule l’une d’entre elles était réalisée, à la clôture de l’exercice 2014.
Compte tenu de la nature substantielle des conditions suspensives figurant au
contrat de prêt de la Caisse des dépôts, la chambre observe que l’inscription des restes à
réaliser en recettes d’investissement au budget annexe FTTH 2015, pour un montant de
15 M€, n’était pas conforme à la définition donnée par l’article susvisé.
4 -
Conclusion sur l’information budgétaire et financière
Eu égard à l’importance des projets d’équipement engagés depuis 2013, la note
de synthèse préparatoire au débat d’orientations budgétaires doit être complétée par la
présentation de l’équilibre prévisionnel des opérations financières pour les budgets dont le
bilan affiche une dette à long terme.
De même, le syndicat doit respecter l’ensemble des dispositions applicables aux
régies que le comité syndical a dotées de l’autonomie financière.
En 2015, le comité syndical a adopté la procédure budgétaire des AP/CP pour le
budget annexe « FFTH ». Il s’agit d’une décision de bonne gestion qui améliorera le suivi
pluriannuel des investissements structurants.
Il incombe au syndicat de respecter la définition des restes à réaliser à la section
d’investissement telle qu’elle figure à l’article R. 2311-11 du CGCT.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
19
B -
La fiabilité de l’information comptable
L’examen du bilan porte sur le budget principal et sur le budget annexe
« Télécommunications » dont le montant de l’actif immobilisé net s’élevait respectivement à
46 M€ et à 10 M€ au 31 décembre 2014. Par consolidation, le montant total des bilans des
autres budgets annexes s’élevait à 7 M€.
1 -
L’information patrimoniale portée au bilan du budget principal
Les
subventions
d’équipement
versées,
inscrites
au
bilan
pour
12 M€ (18 M€ brut), correspondent aux engagements contractuels du syndicat
33
pour le
financement des dépenses de premier établissement que le délégataire a dû réaliser pour le
déploiement du réseau.
Comme le prévoit l’instruction budgétaire et comptable applicable, le syndicat
procède à l’amortissement desdites subventions qui n’ont pas vocation à rester durablement
à son bilan.
Le bilan fait également apparaître un montant de 20,3 M€ au titre des
immobilisations mises à disposition de tiers. Il s’agit des éléments de la dorsale, c’est-à-dire
de l’infrastructure de transport et de collecte conçue et constituée par Manche Numérique et
mise à la disposition du délégataire.
Les comptes du bilan du budget principal ne présentent pas d’anomalies.
2 -
La comptabilisation du droit d’usage irrévocable (IRU)
Fin 2011, par la signature d’un avenant à la convention de DSP signée avec
« Manche Télécom »
34
, le syndicat a acquis un droit d’usage irrévocable d’un montant de
9,525 M€ sur une paire de fibres noires, c’est-à-dire un lien de fibres optiques non activées
de 1 500 kilomètres (km) sur l’ensemble du réseau local. L’infrastructure, livrée par étape, a
été mise en service en 2013.
Selon l’ARCEP, l’opération peut être décrite comme un mécanisme de
cofinancement par le partage des coûts en échange de droits pérennes sur l’infrastructure
déployée. Cette forme de contrat est fréquente dans le secteur des télécommunications.
En 2013, le syndicat a procédé à l’enregistrement comptable de l’IRU à la section
d’investissement
au
compte
d’immobilisations
incorporelles
« concessions
et
droits
assimilés ».
Interrogé sur les modalités d’enregistrement comptable de l’IRU lors de la saisine
budgétaire de la chambre en avril 2014, le comptable public a produit à la chambre la
réponse apportée par la direction générale des finances publiques (DGFiP) à un cas
d’espèce.
33
Le contrat de DSP de février 2006 prévoyait :
« Le montant maximum de la subvention d’équipement versée par Manche
Numérique a été arrêté à un montant de dix-neuf millions et quatre cent quatre-vingt-cinq mille (19 485 000) euros (€)
représentant 58,95 % du coût total prévisionnel des investissements de premier établissement réalisés par le délégataire. »
34
Les modalités de l’octroi de l’IRU de « Manche Télécom » à Manche Numérique sont précisées à l’avenant
n° 5 au contrat de DSP conclu entre Manche Numériqu e et la société « Manche Télécom ». L’avenant a été signé le
23 novembre 2011 pour une application au 1
er
janvier 2012. La durée du droit d’usage s’étend de 2012 à 2021, terme de la
convention de DSP.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
20
Dans sa réponse datée du 21 février 2014, la DGFiP
35
a d’abord rappelé que
« le
contrat d’IRU est une création de la pratique apparue en droit américain et n’a pas
d’équivalent en droit français. »
Elle a ensuite considéré que, du point de vue comptable,
l’IRU ne constitue pas une immobilisation,
« en ce qu’il ne confère à son bénéficiaire qu’un
droit d’usage et pas de droits réels sur le bien, objet du contrat. »
En conséquence, selon la
DGFiP, la somme versée en contrepartie de l’obtention d’un IRU portant sur un réseau de
fibres optiques (frais d’accès et de mise à disposition) doit être imputée à un compte de
charges de la section de fonctionnement
36
.
Lorsqu’il a inscrit l’IRU à la section d’investissement en 2013, le syndicat s’était
appuyé sur :
-
la décision n° 2010-1312 de l’ARCEP du 14 décembr e 2010
37
, qui qualifie
l’IRU d’
« offre d’accès pérenne
[sur l’infrastructure déployée]
susceptible
d’être intégrée dans
[…]
bilans respectifs
[des opérateurs] ; »
-
l’étude commandée par l’ARCEP
38
au cabinet Baker et McKenzie qui relève
que le ministère de l’économie et de l’emploi qualifie l’IRU d’immobilisation ;
-
l’avis du Conseil national de comptabilité sur la définition des actifs
39
: l’IRU
est identifiable, il procure un avantage économique et sa valeur peut être
évaluée de façon fiable ;
-
la décision du tribunal administratif de Montreuil du 9 février 2012
40
qui précise
que, dès lors que le bénéficiaire d’un droit d’usage peut en tirer régulièrement
des revenus et que celui-ci est
« doté d’une pérennité suffisante »
, celui-ci est
« un élément d’immobilisation incorporelle. »
Le syndicat a conclu que la durée contractuelle de neuf ans lui conférait une
pérennité «
suffisante
» de l’usage. En outre, les câbles contenant la paire de fibres noires
figurent à la liste des biens de retour de la DSP.
Dans son avis budgétaire rendu en juin 2014, la chambre a considéré que les
modalités contractuelles de l’achat de l’IRU avaient été prévues par une délibération
exécutoire et par un avenant à la convention de délégation de service public dont la
traduction budgétaire s’imposait à elle.
Pour autant, la question de l’enregistrement comptable de l’IRU n’est toujours
pas tranchée dans la mesure où l’instruction budgétaire et comptable qui s’applique aux
régies chargées de l’exploitation d’un SPIC ne le prévoit pas expressément.
Une certaine prudence s’impose donc en la matière.
C -
Le suivi de l’activité des services publics doit être renforcé
Depuis le 10 février 2006, le syndicat a délégué l’établissement, la mise à
disposition et l’exploitation de son réseau de communications électroniques.
35
Base documentaire du centre national de documentation des finances publiques, fiche question-réponse n° 14-0205 du
21 février 2014.
36
Le compte 6132 « Locations immobilières ». Dans le cas d’espèce soumis à la DGFiP par l’un des comptables publics du
réseau, la direction précisait :
« L’usage du réseau de fibres optiques étant, au cas d’espèce, accordé pour une durée
contractuelle de 10 ans, il y a lieu d’assimiler la somme versée en une fois en début de contrat à un loyer versé d’avance. En
conséquence, la charge doit être étalée sur la durée du contrat et donc rattachée à l’exercice auquel elle se rapporte […] ».
37
Décision n° 2010-1312 de l’ARCEP, en date du 14 dé cembre 2010, précisant les modalités de l’accès aux lignes de
communications électroniques à très haut débit en fibre optique sur l’ensemble du territoire, à l’exception des zones très
denses.
38
Les actes de l’ARCEP, mars 2011 «
Etude des caractéristiques de l’indefeasible right of use
».
39
Avis n° 2004-15 du 23 juin 2004 du Conseil nationa l de la comptabilité relatif à la définition, la comptabilisation et l’évaluation
des actifs.
40
Tribunal administratif de Montreuil, n° 1000879.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
21
L’article L. 1411-3 du CGCT précise que
« Le délégataire produit chaque année,
avant le 1
er
juin, à l’autorité délégante, un rapport comportant notamment les comptes
retraçant la totalité des opérations afférentes à l’exécution de la délégation de service public
et une analyse de la qualité de service…. Dès la communication de ce rapport, son examen
est mis à l’ordre du jour de la prochaine réunion de l’assemblée délibérante qui en prend
acte. »
Selon le même article, l’examen du rapport annuel établi par les délégataires et
le bilan d’activité des services exploités en régie dotée de l’autonomie financière incombent à
la CCSPL. Le règlement intérieur du syndicat mentionne cette obligation.
La chambre observe que les rapports annuels du délégataire n’ont pas été
présentés au comité syndical par le président. De surcroît, leur examen n’a pas fait l’objet
d’une présentation formalisée en commission consultative des services publics locaux. De
même, le syndicat n’ayant pas établi le bilan de l’activité des services exploités en régie
dotée de l’autonomie financière, aucune présentation n’a pu en être faite devant la
commission.
La chambre prend acte de l’engagement de l’ordonnateur de se conformer à ses
obligations s’agissant de la présentation du rapport annuel des délégataires et des bilans
d’activité des régies.
V -
L’EXERCICE DE LA COMPÉTENCE POUR LE DÉGROUPAGE ET LA
MONTÉE EN DÉBIT SUR LE RESEAU HERTZIEN
A -
Les principes généraux de la DSP attribuée à Manche Télécom
1 -
Les principales caractéristiques de la délégation de service public
a -
La mission d’ouverture à la concurrence par le dégroupage de la boucle
locale
Le 27 janvier 2006, le syndicat a délégué l’établissement, la mise à disposition et
l’exploitation de son réseau local de communications électroniques à un groupement
d’entreprises solidaires
41
, fondateur de la société ad ’hoc « Manche Télécom ».
La délégation consiste en la conception, la construction, le financement,
l’exploitation et la commercialisation du réseau à haut débit par le réseau « cuivre », à partir
de l’infrastructure de transport et de collecte (dorsale) mise à disposition par le syndicat. Son
périmètre couvre le territoire, sa durée est de 15 ans. Il s’agit d’un contrat d’affermage pour
l’exploitation des biens préexistants complété par la réalisation de nouveaux équipements
cofinancés par les parties.
Le réseau local répond aux objectifs d’aménagement du territoire et de
développement économique assignés à la délégation. Le projet repose sur :
-
la mise en place et les conditions d’une péréquation départementale au
moyen d’un tarif de base unique par service fourni aux usagers du réseau
local de communications électroniques ;
-
le développement durable des offres haut débit à des tarifs attractifs, sur
l’ensemble du territoire délégué ;
-
la résorption de l’ensemble des "zones blanches" du haut débit sur le
territoire ;
-
la cohérence du déploiement des réseaux d’aménagement.
41
Axia France, Vinci networks et LD Collectivités (SFR Collectivités).
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
22
La convention prévoit l’adoption par le délégataire d’une architecture permettant
l’adaptation du réseau aux évolutions futures. A cette fin, ce dernier s’oblige aux
renouvellements et réinvestissements nécessaires.
Compte tenu de la participation du syndicat au financement des ouvrages à
réaliser, le délégataire s’est engagé à intéresser financièrement le délégant à une
amélioration de la rentabilité du service par rapport au compte d’exploitation prévisionnel
42
par la création d’un compte de réserve.
Les biens nécessaires à la délégation sont clairement recensés dans la
convention et leur régime pendant et à l’issue du contrat est prévu.
Afin d’évaluer la position tarifaire du réseau et des prestations fournies, le contrat
instaure un indicateur de compétitivité. Ce dernier est constitué de la moyenne des tarifs
pratiqués par offre de service de référence sur quatre territoires identifiés. Le délégataire
s’engage à en produire une communication annuelle.
Pour offrir une couverture optimale du territoire, les parties conviennent de la
création d’une architecture radio qui intervient en complément du DSL déployé sur le
territoire. Le délégataire s’obligeait à privilégier la technologie Wifi MAX.
Le syndicat a régulièrement bénéficié d’une assistance à maîtrise d’ouvrage par
différents cabinets spécialisés.
Fin 2014, l’état de réseau était le suivant :
-
un réseau de collecte de 1 200 km, dont 900 km traités en génie civil ;
-
le dégroupage DSL de 138 centraux téléphoniques (NRA) sur 146
43
auquel
s’est ajouté l’équipement des NRA en ADSL2+ (jusqu’à 20 Mbps) ;
-
la couverture des zones blanches par l’installation de 230 stations de base
Wifi MAX pour environ 2 800 clients recensés fin 2014 ;
-
le raccordement des sites remarquables : 205 entreprises ou sites publics
raccordés en fibre optique au réseau.
b -
Les principales évolutions du contrat
Le contrat de délégation a connu cinq avenants. Ils ont notamment apporté les
modifications suivantes :
-
en 2008, le délégataire a été chargé de déployer et d’exploiter des réseaux de
desserte en fibre optique jusqu’à l’abonné de 4 000 prises à Saint-Lô
44
, de
22 000 prises à Cherbourg et dans deux communes limitrophes (avenants
n° 3 et n° 4) ;
-
la sortie de l’exploitation du réseau hertzien Wifi MAX du périmètre de la
délégation et sa reprise en régie par le syndicat à compter du 1
er
janvier
2012 (avenant n° 5);
-
la révision des tarifs et l’acquisition, fin 2011, du droit d’usage auprès du
délégataire d’une paire de fibres noires destinées à la réalisation du «
nuage
public départemental
» (avenant n° 5).
42
La convention prévoit les sommes affectées au compte de réserve dans les comptes de résultat prévisionnels, sous réserve
que l’excédent brut d’exploitation réalisé au cours de l’exercice précédent soit au moins égal à celui prévisionnel pour l’année
considérée. Le compte sera pleinement libéré au bénéfice du syndicat à l’expiration normale ou anticipée de la convention.
43
Les NRA représentaient 245 378 lignes adressables sur lesquelles le délégataire comptait 49 217 clients DSL, soit un taux de
pénétration global de 20,1 %.
44
Le délégataire a réalisé 1 000 prises supplémentaires à Saint-Lô dans le cadre d’une expérimentation subventionnée par
l’Etat.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
23
Durant la période sous revue, l’exécution du contrat sur son volet «
ouverture à la
concurrence
» n’a pas fait l’objet d’un recours contentieux. En revanche, le syndicat a émis
un titre de recette à l’encontre du délégataire le 13 avril 2015, en application des dispositions
des avenants n° 3 et n° 4, relatifs à la constructi on des prises optiques à Cherbourg et à
Saint-Lô.
Les effets produits par la convention pour la mise en oeuvre du «
nuage public
départemental
» et le déploiement du réseau de fibre optique sont traités dans d’autres
parties du rapport.
2 -
Les obligations du délégataire
La convention distingue les obligations du délégataire en deux phases : la phase
de conception du réseau et la phase d’exploitation qui comprend la gestion et la supervision,
la maintenance et la commercialisation dudit réseau.
a -
La conception du réseau à partir de l’infrastructure remise
Le
délégataire
a
pris
à
sa
charge
l’infrastructure
de
communications
électroniques remise par le syndicat, ainsi que les contrats afférents. Celle-ci était constituée
d’infrastructures existantes pour lesquelles le syndicat disposait de droits d’usage ou de
propriété et d’infrastructures déployées par le syndicat sous sa maîtrise d’ouvrage, pour le
transport et la collecte
45
.
Le contrat précise également les sites à raccorder par l’interconnexion du réseau
avec les réseaux ouverts au public, ainsi que les raccordements dits «
a minima »
46
.
Conformément à son engagement, le délégataire remet chaque année au
syndicat le «
dossier des ouvrages exécutés et des équipements installés
» qui contient,
notamment, l’inventaire des équipements mis en place, la valeur des ouvrages exécutés au
bilan de la société
ad’ hoc
et l’intégralité des plans.
La chambre engage le syndicat à rester vigilant sur la production d’une
information exhaustive sur l’état de son réseau.
b -
La commercialisation
Le délégataire est chargé de la commercialisation d’un catalogue de services
décrits à la convention auprès des usagers du réseau. Il doit, en outre, faire évoluer
régulièrement son offre commerciale de façon à répondre aux besoins des usagers. Le
catalogue de services comprend :
-
des services de connectivité optique proposés sous forme de location
annuelle et/ou d’IRU, de paires de fibres noires ;
-
une prestation d’hébergement et un service de longueurs d’ondes (WDM) sur
la fibre optique ;
-
un service de bande passante ou de liaisons intersites ;
-
des services de transport sur la boucle locale ;
-
des services de mises à disposition de fourreaux dans les zones d’activité.
45
La conception du réseau prenait en compte, notamment, l’intégration de l’infrastructure remise, la capacité à délivrer les
services, objet de la convention, l’évolutivité du réseau et la modularité de l’architecture, la capacité à atteindre les objectifs de
la délégation de service public, la capacité du réseau à être utilisé par tous les opérateurs, le raccordement du réseau à
d’autres réseaux existants.
46
NRA, les points hauts où sont implantés les équipements radio, les sites remarquables (collèges, grandes entreprises) et les
zones d’activité.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
24
Par un avenant signé le 23 novembre 2011, les co-contractants ont fait évoluer
les services, la grille tarifaire a été modifiée en conséquence.
La convention prévoit que la révision des tarifs doit emporter l’accord exprès et
préalable du syndicat. Ceux-ci n’ont pas été modifiés depuis lors, en dehors de l’indexation
annuelle prévue au contrat.
3 -
Le contrôle et le suivi de la délégation par le syndicat
La convention prévoit la constitution d’un comité de suivi paritaire comprenant
deux représentants des parties au contrat. L’instance a pour objet de suivre l’exécution des
différentes phases d’études, de construction et d’exploitation du réseau local afin de
s’assurer du respect de la convention, de proposer des améliorations des conditions
d’exploitation du réseau et échanger les informations entre les parties au contrat.
Le comité est réuni en principe chaque mois, six réunions ont eu lieu en 2014.
L’ordre du jour aborde les clauses principales du contrat.
Le contrat prévoit des mesures coercitives assorties de pénalités. Ces clauses
n’ont pas trouvé à s’appliquer s'agissant de la conception du réseau à haut débit
(dégroupage et DSL). En revanche, comme évoqué plus haut, le syndicat vient d’appliquer à
son délégataire les pénalités prévues au contrat pour l’inobservation de ses engagements
pour la construction des prises FTTH à Cherbourg-Octeville et à Saint-Lô.
*
En conclusion, la chambre observe que la convention de délégation de service
public signée en 2006 a été encadrée conventionnellement de manière satisfaisante et a
évolué en fonction des besoins de ce dernier.
Les principaux objectifs du contrat ont été respectés par le délégataire,
s’agissant de la conception du réseau à haut débit. Les obligations en matière de
commercialisation du réseau sont également respectées.
L’instance de contrôle prévue au contrat a été créée. Son fonctionnement est
effectif durant la période sous revue, des comptes rendus sont réalisés.
4 -
Les rapports annuels d’activité présentés par le délégataire
La convention définit le contenu du rapport annuel d’activité du délégataire en
application de l’article L. 1411-3 du CGCT. L’article R. 1411-7 du même code recense les
informations obligatoires relatives aux données comptables de la délégation et à l’analyse de
la qualité du service. Le document doit, en outre, comprendre un compte rendu technique et
financier comportant les informations utiles relatives à l’exécution du service.
Les rapports sont élaborés sur un modèle unique et présentent clairement les
réalisations commerciales, techniques et financières de l’année.
Le dernier rapport examiné (2013) comprend les états financiers de la délégation
assortis de la présentation des méthodes comptables et d’évaluation des immobilisations. La
liasse fiscale de la société
ad’ hoc
est annexée au rapport
47
.
Le compte rendu financier est conforme à la convention. Il contient le compte de
résultat prévisionnel pour 2014. Toutefois, l’annexe relative au plan de financement et au
bilan prévisionnel actualisé sur la durée résiduelle du contrat est absente.
47
La déclaration d’impôt sur les sociétés et les 18 tableaux annexes 2050 à 2059 G sont produits.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
25
En outre, le document ne fait pas état des dépenses de renouvellement des
ouvrages et équipements réalisées durant l’année. Par conséquent, la consultation du
rapport annuel ne permet pas de disposer d’une vision d’ensemble du réseau, pourtant
nécessaire à l’appréciation de la performance de ce dernier à l’égard des usagers.
Le rapport ne mentionne pas non plus l’état du compte de réserve prévu à la
convention dans le cadre de la clause d’intéressement du délégant.
Le compte rendu technique contient un tableau de bord
48
qui recense les
évènements susceptibles d’affecter la qualité de service mais cette partie ne comporte aucun
commentaire. Dès lors, il est difficile d’apprécier le respect des engagements du délégataire,
alors même que cette obligation, prévue par le CGCT, fait l’objet de développements
spécifiques dans la convention
49
.
Le compte rendu d’exploitation contient les indications mentionnées au contrat, à
l’exception du résultat de l’enquête de satisfaction menée auprès des usagers du réseau.
S’agissant du volet commercial de l’activité, les résultats sont présentés par
services (avec et hors activités DSL). L’état des raccordements au réseau des sites déclarés
remarquables à la convention est présenté.
Le rapport annuel restitue le
benchmark
tarifaire des catalogues de services des
opérateurs présentant une infrastructure
a minima
départementale
50
. Ces informations
permettent de situer la grille tarifaire du syndicat dans un ensemble homogène et d’évaluer
l’étendue du catalogue de services.
*
En conclusion, la chambre observe que les rapports annuels produits par le
délégataire sont conformes aux dispositions du CGCT. Leur présentation doit, toutefois, être
complétée par les informations recensées.
La chambre prend en compte l’engagement de l’ordonnateur à exiger du
délégataire la production de l’ensemble des informations devant figurer à son rapport annuel
d’activité.
B -
La situation financière de la société délégataire
La convention prévoit de manière classique les modalités de rémunération du
délégataire
51
, ainsi que la redevance
52
qu’il s’engage à verser au délégant.
Bien que le délégataire ait en charge le financement des nouveaux ouvrages, le
syndicat s’est engagé à assumer le surcoût des investissements induits par l’obligation de
service public
53
. La subvention d’équipement, d’un montant de 20,1 M€, était limitée au
financement des biens de retour de la délégation.
Le capital social de la société s’élève à 1 M€ et est détenu à 70 % par SFR
Collectivités et à 30 % par la Caisse des dépôts et consignations (CDC).
48
Le document traite de l’historique des incidents par niveau de sévérité et de la responsabilité de résolution des incidents.
49
La qualité de service est traitée dans les dispositions particulières et dans l’annexe 6.8 «
Exploitation technique du réseau
».
50
Les services étudiés sont la location ou l’IRU de fibre optique noire, l’hébergement, la bande passante Ethernet et l’accès
internet DSL grand public et entreprises. Les entreprises titulaires des délégations sont Axione, Covage, SFR, Altitude.
51
La rémunération est composée des recettes liées à la fourniture aux usagers du réseau de l’ensemble des services objets de
la délégation de service public.
52
La redevance versée par le délégataire est destinée à couvrir les frais d’amortissement de la dorsale supportés par Manche
Numérique.
53
Selon le principe de péréquation, le territoire bénéficie d’une même tarification.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
26
Au bilan au 31 décembre 2013, le montant de l’actif immobilisé brut s’élevait à
53,5 M€ (31,5 M€ net). Les montants par type de biens sont concordants avec ceux indiqués
au rapport annuel 2013 produit par le délégataire.
A la clôture 2013, les capitaux propres sont négatifs au bilan d’un montant de
5,8 M€
54
, situation essentiellement imputable au report à nouveau négatif de 15,5 M€.
Les dettes financières correspondent uniquement aux comptes courants
d’actionnaires, leur montant s’élevait à 29,8 M€. A titre de comparaison, leur montant était de
17,6 M€ à la clôture de l’exercice 2010. Le montant des charges financières s’établissait à
0,8 M€ en 2013.
L’examen des comptes de la société délégataire montre que les écarts constatés
entre les prévisions et les réalisations au niveau du résultat d’exploitation s’expliquent à la
fois par un montant de produits inférieur aux prévisions et par des charges plus importantes
entre 2010 et 2013. Les dotations aux amortissements ont également été supérieures aux
prévisions.
L’excédent brut d’exploitation
55
(EBE) s’élevait à 3,3 M€ en 2013, les prévisions
du délégataire pour 2014 étaient de 3,4 M€. Les charges financières consacrées à la
rémunération des comptes courants devraient s’élever à 1 M€ en 2014.
Le chiffre d’affaires de 2013 était conforme au plan d’affaires initial. Les
réalisations sont supérieures aux prévisions pour l’ensemble des services proposés excepté
sur le segment des entreprises, sans que le délégataire n’apporte d’explication à cette
situation dans son rapport annuel.
Le taux de pénétration commerciale du réseau en fibre optique sur les zones de
Cherbourg et de Saint-Lô s’établissait à 20 % fin 2013, soit environ 3 700 clients finaux,
effectifs répartis à 60 % entre l’opérateur « SFR » et 40 % pour l’opérateur « Orange ».
La commercialisation du réseau en fibre optique connait une croissance qualifiée
par l’ordonnateur
« d’intéressante »
, alors même que le réseau a connu un taux d’échec des
raccordements significatif, de l’ordre de 25 %
56
.
Dans son rapport annuel, le délégataire évoque la
« dynamique commerciale
initialisée depuis 2011 »
acquise, notamment, par une plus forte densité du réseau et une
nouvelle politique commerciale. Il fait état de la maîtrise des coûts qu’il assure afin de ne pas
dégrader les résultats financiers et invoque la nécessité de faire évoluer à nouveau la grille
tarifaire. Les prévisions 2014 établissaient un résultat net négatif de 1,2 M€.
Le syndicat a émis un titre de recette d’un montant de 3,162 M€ à l’encontre du
délégataire, en application des pénalités prévues au contrat pour le retard d’exécution dans
la construction des prises optiques prévue à Cherbourg et à Saint-Lô.
La chambre constate qu’en 2013, pour la première fois, le chiffre d’affaires
réalisé était supérieur aux prévisions du plan d’affaires annexé à la convention. Le résultat
d’exploitation reste toutefois sensiblement inférieur aux prévisions. Cette situation s’explique
par un niveau de charges encore élevé et une dotation aux amortissements supérieure aux
prévisions.
54
En 2013, les capitaux propres sont formés du capital social (1 M€), du report à nouveau négatif (15,5 M€), du résultat net
négatif (0,3 M€) et des subventions d’investissement (9 M€). Les capitaux propres étaient négatifs de 3,9 M€ en 2012 et de
2 M€ en 2011.
55
L’EBE représente la ressource générée par l’exploitation de l’entreprise, abstraction faite de la politique d’amortissement et
de financement.
56
L’ordonnateur n’a pas précisé l’origine des échecs des raccordements (délégataire, opérateur-usager, intervenant tiers,
utilisateur final), ni leurs causes.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
27
Elle observe que la situation financière actuelle de la délégation ne remet pas en
cause les programmes d’investissement menés, par ailleurs, par le syndicat pour le
déploiement du réseau très haut débit, tels que prévus dans le SDTAN.
C -
La poursuite des programmes initiaux d’aménagement numérique au
budget principal
Au budget principal, le syndicat répartit les charges et les produits selon trois
activités : la gestion des affaires communes à la section de fonctionnement et le financement
des infrastructures et des usages développés hors d’un contexte industriel et commercial, à
la section d’investissement.
1 -
La section de fonctionnement est marquée par l’évolution rapide de la
masse salariale
A la section de fonctionnement, les recettes réelles, de l’ordre de 4 M€ en
moyenne annuelle au cours de la période, proviennent essentiellement :
-
des participations statutaires des membres
57
aux charges administratives
(291 000 € par an) et au développement des réseaux et usages (1,734 M€ par
an dont 1,64 M€ du département de la Manche) ;
-
de la redevance versée par le délégataire « Manche Télécom », dont le
produit s’est élevé à 1,327 M€ en 2014. Son évolution est déterminée par le
plan d’affaires annexé au contrat.
S’agissant des dépenses, le budget principal a supporté les charges de structure
du syndicat pour une moyenne annuelle de 2,5 M€. Il s’agit majoritairement des charges de
personnel et des achats.
La progression la plus significative concerne les dépenses nettes de personnel,
dont la variation moyenne annuelle s’est élevée à 12 %. L’évolution s’explique par les
recrutements qui ont accompagné le développement des compétences et des services
proposés aux membres, durant la période sous revue. L’effectif a ainsi été porté de 18 à 35
agents entre 2010 et 2014
58
. La catégorie des cadres est majoritaire au sein de
l’établissement, la structure de l’effectif est cohérente avec les spécificités de ses missions.
Depuis 2013, l’arrivée de nouveaux projets a été portée au travers d’actions de
mutualisation de services avec le département
59
. Ces évolutions ont également conduit à la
mutualisation des fonctions support dont les ressources humaines et, pour partie, la fonction
financière.
C’est dans ce cadre que se met en place la réflexion stratégique en matière de
ressources humaines, passant notamment par la classification des emplois. La DUSI a été le
premier périmètre fonctionnel concerné par la mise en place d’un référentiel d’emploi et des
compétences
60
, en cours d’extension à l’ensemble du syndicat.
Le respect du temps de travail n’appelle pas d’observations particulières.
*
57
Durant la période, le périmètre du syndicat s’est élargi et il n’a pas augmenté le montant des participations.
58
Les derniers recrutements concernaient les postes d’architecte de système d’information (un), de chefs de projet (deux) et de
technicien support en infrastructures (un).
59
A titre d’exemples, la maîtrise d’oeuvre du déploiement du réseau en fibre optique est assurée par la direction des
infrastructures du département. Pour les services et les usages, la création de la DUSI repose également sur une démarche de
mutualisation avec la collectivité.
60
Les fiches de poste des agents affectés à la DUSI ont été révisées, conformément au référentiel métier. La démarche permet
d’optimiser les recrutements, ainsi que la détermination des besoins de formation.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
28
En conclusion, la chambre engage le syndicat à se montrer vigilant sur
l’augmentation de la masse salariale qui explique, pour l’essentiel, la progression des
charges.
Dans sa réponse à la chambre, l’ordonnateur a souligné que, depuis 2010,
Manche Numérique avait développé les infrastructures et initié des projets dans le domaine
des usages, nécessitant le renforcement des équipes concernées et le recrutement de
nouveaux profils. Il a également souligné les efforts de mutualisation entre le syndicat et le
département, pour les systèmes d’information et le suivi budgétaire et financier, ce qui devra
être poursuivi.
2 -
Des dépenses d’équipement régulières, un encours de la dette réduit
A la section d’investissement, le budget principal a principalement poursuivi la
mise en oeuvre du projet « Zones numériques multiservices
61
» dont l’objectif est de faire
bénéficier les entreprises d’un pré-raccordement gratuit à la fibre optique, sans engagement
auprès d’un opérateur, et de les accompagner dans l’appropriation des usages du très haut
débit.
L’année 2012 a été marquée par le développement des activités du syndicat
dans le cadre du SDTAN adopté l’année précédente. Afin de contribuer aux dépenses, le
département de la Manche a majoré sa contribution statutaire de 3,8 M€.
Entre 2010 et 2014, l’écart entre les ressources cumulées et les emplois cumulés
a généré un besoin de financement de 1,3 M€.
Le syndicat a eu recours à des emprunts
nouveaux pour un montant total de 2,8 M€ durant la période. Le solde, soit 1,5 M€, a abondé
le fonds de roulement comptable qui se situait, fin 2014, à 4,6 M€
62
, hors restes à réaliser
réinscrits au budget 2015.
Durant la période, la moitié de l’autofinancement brut a été consacrée au
remboursement du capital de la dette, ce qui a permis de dégager des marges de manoeuvre
pour autofinancer la réalisation des projets.
Le stock de la dette a été réduit de 3,6 M€
63
, passant de 13,2 M€ fin 2009 à
9,6 M€ à la clôture 2014. Les dépenses d’équipement ont été majoritairement financées par
les ressources internes de l’établissement, par les subventions et, dans une moindre
mesure, par l’emprunt.
Le budget primitif 2015 prévoit des dépenses réelles augmentées de 13 % par
rapport aux prévisions 2014. Cette évolution s’explique par l’augmentation des dépenses de
personnel en prévision des recrutements à venir, et celle des charges d’intérêt générées par
les emprunts en cours et les nouveaux emprunts prévus.
L’équilibre de la section de fonctionnement est assuré par une augmentation des
produits qui trouve son origine dans les contributions aux charges apportées par les budgets
annexes.
La section d’investissement comprend le versement des subventions au
délégataire du réseau hertzien
64
auquel s’ajoute le remboursement des emprunts. L’équilibre
budgétaire de la section est obtenu principalement par l’inscription de nouveaux emprunts et
par des subventions d’équipement.
61
Ce programme, qui répartit le département en neuf territoires, consiste essentiellement à équiper les zones d’activités pour
favoriser l’accueil des entreprises.
62
Le fonds de roulement fin 2009 s’établissait à 3,1 M€, auquel s’est ajouté l’abondement de 1,5 M€ au cours de la période.
63
Il s’agit de l’endettement net du syndicat au cours de la période, qui correspond à la différence entre le montant des emprunts
nouveaux (2,8 M€) diminué du remboursement du capital de la dette au cours de la période (2,3 M€).
64
L’octroi de la subvention d’équipement au délégataire s’inscrit dans le cadre du contrat de délégation de service public
« TBDH » présenté ci-après.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
29
Les inscriptions au budget primitif 2015 du budget principal n’appellent pas de
remarques particulières.
*
La chambre constate qu’au cours de la période, les recettes de fonctionnement
du syndicat ont accompagné l’évolution des dépenses, notamment les dépenses de
personnel. Leur augmentation s’explique par les recrutements rendus nécessaires par
l’exercice de ses missions. Pour autant, une vigilance en la matière s’impose.
Si le syndicat n’a pas augmenté la participation de ses membres, le département
de la Manche l’a accompagné régulièrement dans le financement de ses projets.
La redevance versée par le délégataire « Manche Télécom » a permis au
syndicat de remplir ses obligations concernant l’amortissement des immobilisations et le
remboursement des emprunts.
L’équilibre financier du budget principal n’a pas été remis en cause : les
dépenses d’équipement du budget principal ont été majoritairement financées par les
ressources internes, dont le niveau a permis la réduction de l’encours de la dette au cours de
la période.
VI -
LE DÉVELOPPEMENT DES SERVICES ET DES USAGES
En complément des infrastructures, le syndicat s’est attaché à constituer une
offre de services destinée aussi bien aux collectivités qu’aux citoyens et aux entreprises pour
favoriser le développement de l’économie du réseau :
-
les visio-relais de service public
65
consistent à offrir des services de proximité
aux habitants où qu’ils se trouvent ;
-
les Zones Numériques Multiservices ;
-
le réseau de visio-enseignement, qui compte une vingtaine d’équipements
répartis dans les collèges, et le développement des environnements
numériques de travail (ENT), permettent la diffusion des usages numériques
et l’évolution des pratiques pédagogiques dans les établissements scolaires ;
-
le « Manchelab »
66
est le résultat de la participation du syndicat à l’appel à
projets lancé par l’État en 2013 portant sur le développement des ateliers de
fabrication numérique, les « FabLabs », afin de les promouvoir auprès du
grand public et des entreprises.
-
le centre de réalité virtuelle
67
réunit des acteurs économiques et des
universitaires spécialisés dans l’imagerie 3D et la réalité virtuelle.
65
Les partenaires sont la Caisse d’allocations familiales (CAF), la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM), l’Union de
recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF), la
mutuelle sociale agricole (MSA), la
chambre de commerce et d’industrie (CCI) Cherbourg Cotentin, le tribunal de grande instance de Coutances, le conseil
départemental d’accès au droit, la
s
ociété d'aménagement urbain et rural (SAUR).
66
Il s’agit d’un atelier permettant d’utiliser des équipements numériques (découpeuse laser, imprimante 3D, fraiseuse à
commande numérique).
67
La mise en place d’outils facilitant la formation des maintenances industrielles à risques est l’une des applications des
technologies de la réalité virtuelle ou du 3D.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
30
Le SDTAN prévoit également, à court terme, la mise en oeuvre des projets
suivants :
-
le «
nuage public départemental
» destiné à relier les sites publics du territoire
est constitué d’un réseau de 1 500 km de fibres dédiées et d’un centre de
traitement de données (
« data center »
). Ces équipements permettent aux
collèges, aux sites du département, aux communes et aux EPCI de bénéficier
de services mutualisés (hébergement, sécurisation des données…) ;
-
la plateforme de données ouvertes («
open data »)
qui permettra d’ouvrir les
données publiques et de les centraliser ;
-
le centre de formation d’intérêt national
autour des infrastructures et des
usages numériques, dont le premier projet s’intitule « Innovance ».
Les travaux menés en commun d’abord avec le département de la Manche puis
avec les autres collectivités et EPCI ont abouti à la création de services dont les activités
sont individualisées dans des budgets annexes.
A -
Le « nuage public départemental »
L’interconnexion d’environ 80 sites de la collectivité « département de la
Manche » constitue la première étape de l’élaboration du «
nuage public départemental
68
».
Le projet est présenté dans le volet « Usages » du SDTAN. Le budget annexe
« Télécommunications » retrace ces activités
69
.
1 -
Le financement des investissements du «
nuage public départemental
» est
aléatoire
En acquérant un droit d’usage d’une durée de neuf ans auprès de son
délégataire, Manche Numérique est devenu usager du réseau remis à l’entreprise par
convention. Dès lors, le syndicat peut utiliser l’infrastructure pour proposer à ses membres
des services numériques mutualisés qui font l’objet d’une tarification.
L’avenant n° 5 à la convention de délégation de ser vice public prévoit le
règlement du délégataire « Manche Télécom » par un paiement échelonné sur une durée de
sept ans, soit 1 360 714 € par an à compter de 2012. L’échéance du paiement intégral est
fixée à 2018.
La consultation des tarifs d’IRU de fibres noires en 2011 montre que la signature
de l’avenant a permis à Manche Numérique de bénéficier de conditions financières plus
favorables que celles appliquées aux usagers du réseau et d’un paiement échelonné.
Le financement des échéances repose sur la souscription d’un emprunt bancaire
d’un montant identique. Chaque emprunt est à son tour remboursé par le syndicat sur une
durée de 15 ans. L’échéance du dernier emprunt à souscrire en 2018 devrait ainsi être fixée
à 2033. Faute de proposition d’un financement global, le syndicat s’est vu contraint de
solliciter la place bancaire chaque année.
A la date de souscription, le taux des trois premiers emprunts
70
s’est établi
respectivement à 2,786 % (septembre 2013) ; 2,011 % (juillet 2014) et 2,590 % (novembre
2014).
68
Les termes «
nuage public manchois
» ou «
nuage public départemental
» sont ceux utilisés dans le schéma directeur
d’aménagement numérique pour le département de la Manche.
69
Entre janvier 2012 et décembre 2014, ce budget individualisait également les opérations d’exploitation du réseau Wifi Max.
70
A l’annexe A1.4 «
Typologie de la répartition de l’encours
» du budget primitif 2015, les trois emprunts sont classés « D »
pour leur structure (multiplicateur jusqu’à 3 ; multiplicateur jusqu’à 5 capé) et « 1 » pour leur indice sous-jacent (indices zone
euro).
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
31
Sur le plan comptable, le contrat a été enregistré en 2013 à l’actif du bilan au
compte « concessions et droits assimilés » pour son montant total. L’amortissement
technique de l’immobilisation est d’une durée de 30 ans, ce qui correspond à une dotation
annuelle aux amortissements de 317 500 €. La première dotation a été inscrite dans les
comptes du budget annexe en 2014.
La dette envers la société « Manche Télécom » a été constatée au passif du
bilan au compte « autres dettes financières » pour le montant total de l’IRU. Celle-ci se solde
chaque année d’un septième par l’augmentation du compte « emprunts auprès des
établissements de crédit ». La dette bancaire diminue elle-même du montant du capital
remboursé, selon le plan d’amortissement des emprunts souscrits.
Le syndicat a commencé à rembourser le premier emprunt bancaire souscrit en
2013, la première échéance en capital s’élevait à 74 316 €.
A la clôture de l’exercice 2014, l’encours des dettes auprès de « Manche
Télécom » et de l’établissement bancaire s’établissait respectivement à 5,4 M€ et 4 M€.
En 2014, la section d’exploitation a enregistré le paiement des intérêts de la dette
(37 458 €) et la première dotation aux amortissements de l’IRU (317 500 €). Les produits des
services se sont élevés à 1,3 M€ et sont composés des prestations facturées au
département de la Manche pour 0,565 M€ et de recettes perçues sur les usagers du réseau
Wifi MAX.
Selon les prévisions du syndicat, les produits cumulés de l’exploitation de l’IRU
s’élèveraient entre 2015 et 2018 à 4,2 M€. Selon les estimations de la chambre, les recettes
d’exploitation cumulées nécessaires à la couverture de l’ensemble des dépenses
d’exploitation et d’investissement du budget
71
devront s’élever à 7 M€ fin 2018.
Ainsi, l’écart constaté entre les recettes nécessaires à l’équilibre du budget et les
prévisions de l’ordonnateur pour les quatre exercices à venir s’établirait à 2,8 M€.
Dans sa réponse, l’ordonnateur indique que les recettes attendues par le
syndicat en période de croisière devraient couvrir l’ensemble des coûts. Néanmoins, la
chambre souligne qu’il s’agit de prévisions qu’il ne justifie pas.
Le budget primitif 2015 fait apparaître des dépenses réelles de 0,56 M€,
auxquelles s’ajoutent le report du résultat négatif de 2014 de 0,25 M€ et les opérations
d’ordre. L’équilibre est assuré par des recettes réelles d’exploitation d’un montant de
1,1 M€, uniquement composées de prestations de services, dont 0,75 M€ au titre des
interconnexions via les infrastructures de service rendues disponibles par l’IRU.
La section d’investissement prévoit le paiement d’un septième de l’IRU à
« Manche Télécom » et le remboursement du capital des emprunts déjà souscrits. Les
recettes réelles se limitent à l’encaissement d’un nouvel emprunt d’un même montant.
L’équilibre de la section est assuré par le report positif de 2014.
Les
inscriptions
au
budget
primitif
2015
du
budget
annexe
« Télécommunications » n’appellent pas de remarques particulières.
*
En conclusion, la chambre constate que les recettes nécessaires à la couverture
des emprunts contractés par le syndicat pour le développement du «
nuage public
départemental
» ne sont pas entièrement établies, ce qui doit inciter à une certaine
prudence.
71
Les dépenses annuelles d’exploitation (réelles et d’ordre) retenues pour élaborer la prévision sont celles de 2014 (soit environ
1,2 M€), sauf pour les intérêts des emprunts qui évolueront.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
32
Elle rappelle au syndicat qu’aux termes de l’article L. 2224-1 du CGCT, le budget
d’un service public à caractère industriel et commercial doit être équilibré en recettes et en
dépenses, sauf exceptions dûment motivées.
Enfin, la chambre engage l’ordonnateur à respecter l’ensemble des dispositions
du CGCT concourant à l’information du comité syndical et de la CCSPL sur la situation
financière de la régie.
2 -
Le nouveau service n’est pas formalisé
En 2012, la CNIL
72
a élaboré des recommandations à destination des entreprises
qui souhaiteraient souscrire à des services d’informatique en nuage. Elle relevait à cette
occasion :
« d’un point de vue juridique, la CNIL constate que le Cloud computing soulève un
certain nombre de difficultés au regard du respect de la législation relative à la protection des
données personnelles, en particulier dans le cas du Cloud public… »
La commission a
également recensé les éléments essentiels devant figurer dans un contrat de prestation de
services d’informatique en nuage.
Les relations avec le département, premier usager du nuage à venir, n’ont pas
fait l’objet d’une convention. Selon l’ordonnateur, celle-ci serait en cours de rédaction.
La partie technique du contrat en préparation soulève des difficultés parmi
lesquelles la nécessité de concilier les caractéristiques de l'exploitation professionnelle d'un
réseau (garanties de temps d'intervention et de rétablissement notamment) et les possibilités
statutaires en matière de gestion de personnel.
Afin de lever l’une de ces difficultés, le comité syndical vient de prendre une
délibération portant sur le régime d’astreinte pour l’exploitation et la sécurité du réseau
composant le nuage public.
*
La chambre engage le syndicat à exercer la plus grande vigilance sur la politique
de sécurité des systèmes d’information qu’il met en oeuvre. Cette observation est d’autant
plus importante que les membres de l’établissement, dont le département, collectent et
traitent des données sensibles et/ou à risque
73
.
Dans sa réponse, l’ordonnateur fait état des mesures qu’il a prises en la matière.
La chambre l’engage cependant à poursuivre les efforts entrepris en vue de la sécurisation
de la collecte et du traitement des données, notamment dans le cadre du nuage
informatique.
B -
Conclusion sur la mise en oeuvre des services et des usages
L’élaboration du «
nuage public départemental
», nouvel usage proposé par le
syndicat depuis 2013, a reposé sur l’achat d’une infrastructure de service d’un montant de
9,5 M€ intégralement financée par des emprunts successifs.
Le syndicat a commencé à rembourser le premier emprunt en 2014. Pour autant,
les prévisions de recettes du service ne sont pas clairement établies.
72
Commission nationale de l'informatique et des libertés.
73
Les dispositions propres à certaines catégories de données sont fixées par la loi n° 78-17 du 6 janvi er 1978 modifiée relative
à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
33
Compte tenu du plan de financement de l’immobilisation et de l’obligation
d’équilibre qui s’applique à la régie qui porte le projet, il est indispensable que le syndicat
mène une action volontariste pour augmenter les recettes d’exploitation du budget annexe.
De plus, le comité syndical doit être régulièrement informé de la situation financière de la
régie.
En outre, la politique de sécurité des systèmes d’information doit garantir le
respect de l’ensemble des dispositions relatives à la protection des données personnelles.
VII -
LE DÉPLOIEMENT DU RÉSEAU À TRÈS HAUT DÉBIT
Le SDTAN prévoit que les travaux de construction du réseau en fibre optique se
répartissent en trois phases de cinq ans dont la première a débuté en 2014.
Les budgets annexes « TDBH » et « FTTH » portent les projets structurants et
les plans d’investissement les plus importants.
A -
Un réseau radio terrestre transitoire, le réseau Très bon débit hertzien
Le déploiement de la technologie radio a pour but de répondre aux besoins des
foyers mal desservis en ADSL et non inclus dans le programme de déploiement du réseau
en fibre optique dans les cinq ans.
Le 5 décembre 2014, le comité syndical a décidé de retenir l’entreprise
« Nomotech », dont émane la société
ad ‘hoc
« Manche Haut débit ». Conformément aux
dispositions de l’article L. 1425-I du CGCT, la description du projet a été transmise à
l’ARCEP le 10 mars 2015.
La chambre observe que les règles de publicité et de mise en concurrence ont
été respectées lors de la passation de la délégation de service public pour l’établissement et
l’exploitation d’un réseau de communications électroniques à Très bon débit hertzien.
1 -
Les principales caractéristiques de la délégation de service public
Comme indiqué plus haut, la construction du nouveau réseau Wifi MAX MIMO
est l’une des étapes qui accompagnent le déploiement du réseau FTTH sur le territoire.
L’audit du réseau Wifi MAX, mené en 2013, mettait à jour plusieurs difficultés
74
.
L’enquête réalisée par le syndicat auprès des abonnés révélait un taux de satisfaction faible.
La situation a poussé le syndicat à agir afin de sécuriser la collecte et d’améliorer
la qualité de service, la priorité de couverture complète du territoire en haut débit restant
d’actualité.
La durée de la convention est de 15 ans. L’objectif du nouveau réseau est
d’obtenir un débit minimum descendant de 10 mégabits par seconde et montant de trois
mégabits par seconde. Il offrira un service « dual-play »
75
.
Des obligations de service public sont assignées au délégataire. Elles sont
relatives aux investissements à réaliser concernant les équipements actifs destinés à
assurer le fonctionnement complet du réseau. En contrepartie, la convention prévoit le
versement d’une subvention de construction au délégataire.
74
Les liens de collecte étaient saturés, il apparaissait des situations de brouillage et une surcharge des abonnés sur certains
secteurs.
75
Une offre « dual-play » est limitée au service de téléphonie fixe sur IP et à un accès internet à haut débit. Une offre
« triple-play » intègre l’accès à la TNT. Le syndicat précise que réseau hertzien déployé «
ne supporterait pas
» le service de la
TNT. Source : Avis de la CCSPL du 6 décembre 2012.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
34
Le périmètre de la délégation est composé des zones du territoire du syndicat
desservies par le réseau, soit 163 208 locaux sur un total d’environ 300 000.
Le déploiement simultané du réseau en fibre optique (FTTH) devrait entraîner
l’extinction des sites du réseau Très bon débit hertzien, à raison d’un septième chaque
année à compter de 2022. En conséquence, le périmètre de la délégation sera réduit
d’autant.
Les travaux de construction du réseau ont débuté en 2014. Ils se déroulent en
deux phases menées conjointement par le syndicat et par le délégataire de la manière
suivante :
-
Manche Numérique assure la première phase du programme d’équipement
par la construction des pylônes, sous sa propre maîtrise d’ouvrage. Les
installations,
poursuivies
en
2015,
sont
remises
progressivement
au
délégataire ;
-
« Manche Haut débit » construit les équipements actifs nécessaires au
déploiement. Il installe les terminaux chez les utilisateurs finaux lorsqu’ils
rejoignent le réseau. Dans le même temps, le délégataire doit assurer la
migration vers le nouveau réseau MIMO et la gestion et la commercialisation
du réseau MIMO auprès des usagers.
L’offre commerciale du délégataire propose des services à des tarifs encadrés
par la convention aux usagers, lesquels fournissent des abonnements aux utilisateurs finaux,
particuliers ou professionnels
76
.
Au-delà du respect des délais et des obligations à caractère technique, la
convention formalise des indicateurs en lien avec la commercialisation du réseau,
notamment par un nombre minimal de fournisseurs d’accès à internet devant être présents
sur le réseau dans un délai de 18 mois (trois opérateurs) et un niveau de satisfaction des
utilisateurs finaux évalué par le syndicat annuellement.
Selon l’ordonnateur, le projet se déroule conformément aux prévisions, puisque
le démontage du réseau Wifi MAX reste programmé pour la fin 2015.
2 -
Un réseau en construction dont le plan de financement est équilibré
Globalement, le programme de travaux et d’équipements s’élève à 21,3 M€ HT
dont 20,2 M€ au titre des investissements initiaux.
Leur réalisation est prévue en grande partie en 2015. Elle se partage entre les
travaux réalisés sous la maîtrise d'ouvrage du syndicat pour 5,2 M€ et ceux assurés par
« Manche Haut débit » pour 15 M€. Le solde de 1,1 M€ est à la charge du délégataire et
correspond aux dépenses de rafraîchissement du réseau prévues à mi-parcours.
Les travaux débutés en 2014 par le syndicat sont intégralement financés par des
subventions du département de la Manche pour 2,7 M€, de la région Basse-Normandie pour
1,5 M€ et de l’Union européenne sur fonds FEADER
77
pour 1 M€.
Les dispositions financières de la convention recensent clairement les
investissements à réaliser par les parties, ainsi que l’ensemble des coûts liés à l’exploitation
technique et commerciale de l’infrastructure. Les recettes seront perçues par le délégataire.
76
Après engagement, ces derniers utilisent les équipements mis à destination des utilisateurs finaux. Ceux-ci sont liés à
l’opérateur de leur choix par un contrat de droit privé dans lequel le syndicat ou son délégataire n’interviennent pas.
77
Fonds européen agricole pour le développement rural.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
35
En contrepartie des obligations de service public assignées au délégataire, le
contrat prévoit la participation échelonnée du syndicat d’un montant total de 11,6 M€ dont
5,2 M€ au titre d’une subvention de construction à verser en 2015. Le premier versement est
financé par l’emprunt et par des subventions à recevoir du fonds national pour la société
numérique
78
(FSN) pour 3,2 M€, de la région et du département.
Par ailleurs, le délégataire s’est engagé à verser une redevance au syndicat au
titre de sa participation au coût d’investissement du réseau dont l’usage lui est délégué. Son
montant cumulé est estimé à 9,8 M€
79
à l’échéance de la convention en 2030.
La redevance cumulée se compose d’une part fixe de 2,3 M€ et d’une part
variable évaluée à 7,5 M€
80
, dont l’indexation repose principalement sur le nombre de clients
finaux du réseau.
Le réseau est financé par la participation publique à hauteur de 50 %. Ce taux
est cohérent avec le taux de soutien
81
maximum fixé à 52,7 % pour le département de la
Manche, pour l’attribution des aides prévue par le plan « France Très haut débit » aux
projets de déploiements des RIP.
3 -
La situation financière du budget annexe « Très bon débit hertzien
(TBDH) »
En 2014, les comptes ont enregistré la première partie des dépenses
d’équipement du nouveau réseau pour un montant de 2,8 M€ sur le montant de
5,2 M€ à réaliser. Le résultat de clôture ressortait à l’équilibre en intégrant les restes à
réaliser inscrits à la section d’investissement.
Au budget primitif 2015, les recettes réelles d’exploitation sont composées de la
redevance à percevoir du délégataire, comme le prévoient les dispositions contractuelles.
Outre le report négatif, les prévisions inscrites à la section d’investissement en
dépenses ont pour objet de solder le programme de travaux pour 2,4 M€. L’équilibre
budgétaire est assuré par la reprise des restes à réaliser et des subventions
d’investissement à recevoir du département.
Les inscriptions au budget primitif 2015 du budget annexe « TBDH » n’appellent
pas de remarques particulières.
La chambre observe que le plan d’affaires annexé à la convention de délégation
de service public pour l’établissement et l’exploitation du nouveau réseau hertzien devrait
permettre au syndicat d’équilibrer financièrement les comptes du projet durant l’exploitation
du réseau.
Cependant, la redevance à recevoir du délégataire est composée d’une part
variable importante, de l’ordre de 80 %, qui dépend directement des performances
commerciales du réseau.
78
Le FSN est un fonds créé par l’Etat dont les ressources sont notamment affectées au développement des réseaux à très haut
débit.
79
Le délégataire s’est engagé à verser une redevance supplémentaire d’un montant total de 0,4 M€ au titre des frais de
contrôle de la délégation engagés par le syndicat. En outre, une clause dite de retour à meilleure fortune a été insérée au
contrat afin de permettre le remboursement d'une partie de la participation publique, dès lors que les résultats d'exploitation
seraient plus importants que prévu.
80
La seconde composante variable est indexée sur l’excédent brut d’exploitation réalisé par la société
ad ’hoc
.
81
Le taux de soutien correspond à une modulation de l’aide publique qui prend en compte les disparités des territoires, selon
des critères de ruralité et de dispersion de l’habitat.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
36
B -
Le déploiement du réseau à très haut débit en fibre optique (FTTH)
1 -
Une couverture en très haut débit prévue pour l’ensemble du territoire
Dans le cadre du plan national destiné à favoriser le déploiement des réseaux en
fibre optique et conformément au volet infrastructure du SDTAN intitulé «
100 % FTTH en
2027 »
, le syndicat a pour mission de planifier et de financer le programme de travaux prévu
sur une durée de 15 ans, dans le cadre d’une délégation de service public d’une durée de
20 ans (échéance 2035). Le syndicat fixe une étape intermédiaire à 60 % en 2020.
L’établissement dispose déjà d’un réseau de collecte en fibre optique dont
l’exploitation et la commercialisation ont été confiées à « Manche Télécom » jusqu’en 2021.
Le projet prévoit la construction des compléments de collecte afin d’interconnecter les
noeuds de raccordement optique (NRO) du futur réseau départemental en fibre optique. La
construction du réseau, réalisée sous la maîtrise d’ouvrage du syndicat par marchés de
travaux à bons de commande, a commencé en 2014.
La maîtrise d’oeuvre est assurée par le département de la Manche. La
construction du réseau s’appuie sur les cinq agences techniques de la direction des
infrastructures de la collectivité, réparties sur le territoire. La participation du département a
fait l’objet d’une convention signée entre les parties prenantes en août 2014.
L’exploitation et la commercialisation des ouvrages seront réalisées dans le
cadre d’une délégation de service public attribuée à Altitude Infrastructure par délibération du
comité syndical du 29 septembre 2015. La remise des ouvrages au délégataire aura lieu au
fur et à mesure de leur construction.
Afin de garantir la cohérence de l’exploitation et de la commercialisation sur
l’ensemble du territoire, le syndicat a conçu son projet en reprenant les prises FTTH déjà
déployées par « Manche Télécom » à Saint-Lô et à Cherbourg et en les confiant au
délégataire du réseau départemental.
2 -
Le plan de financement du réseau en fibre optique de la Manche
Les données chiffrées sont issues du plan de financement remis par
l’ordonnateur au cours de l’instruction.
Le projet de RIP porte sur la construction et l’affermage de 306 206 prises d’ici
2031. La première phase concerne la construction de 175 456 prises prévue d’ici 2019.
Les
dépenses
d’équipement
prévisionnelles
s’élèvent
à
196
M€
TTC
(163 M€ HT) et devraient se dérouler principalement entre 2015 et 2018. Les travaux de
desserte représentent plus de 80 % des dépenses totales, les travaux de raccordements
13 %.
Le plan de financement est prévu sur 20 ans et repose principalement sur des
contributions publiques pour 106 M€, qui devraient couvrir 65 % des dépenses totales.
Les subventions versées par les collectivités territoriales (région et département)
et les EPCI représentent 43 % de l’ensemble des contributions publiques. La part de l’Etat,
via le FSN, s’élève à 40 %. Prise isolément, la contribution du département représente
13 % des contributions publiques et 8,5 % des dépenses totales hors taxes.
Le besoin de financement est couvert par un emprunt conclu avec la Caisse des
dépôts pour 28,3 M€, complété par des emprunts bancaires pour un total de 19 M€, soit un
total d’emprunts de 47,3 M€. Le syndicat prévoit la récupération totale de la TVA (32 M€).
L’équilibre prévisionnel est présenté par le syndicat comme suit :
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
37
DEPENSES
PREVISIONNELLES
(en millions d’euros)
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
à
2034
Total
Investissements TTC
0,18
7,91
32,51
61,08
41,68
34,62
5,50
11,98
195,46
Capital amorti des
dettes
(CDC, emprunts
bancaires)
-
-
-
-
0,17
0,88
2,60
43,65
47,30
Frais financiers
-
-
-
0,78
0,84
1,07
1,32
10,87
14,88
TOTAL ANNUEL
0,18
7,91
32,51
61,86
42,70
36,57
9,41
66,50
257,65
RECETTES
PREVISIONNELLES
(en millions d’euros)
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
à
2034
Total
Contributions
publiques
1,63
2,21
16,20
36,82
20,92
15,40
7,99
5,25
106,42
TVA récupérée sur les
investissements
0,01
0,66
2,71
7,80
8,56
6,36
3,34
2,30
31,75
Emprunts mis en
place
(CDC et Banque
Postale)
-
-
28,30
2,00
8,00
9,00
-
-
47,30
Redevance
d'affermage
et FAS raccordements
clients
-
-
0,90
3,40
5,56
5,38
5,50
95,86
116,60
TOTAL ANNUEL
1,65
2,87
48,11
50,02
43,04
36,14
16,83
103,41
302,07
S’agissant du modèle de redevance du contrat, les fournisseurs d’accès à
internet doivent co-investir dans la construction des prises FTTH en payant un droit d’usage
par prise construite. Le paiement de cet IRU leur permet de commercialiser leurs offres aux
particuliers
82
. Le co-investissement s’élève à 400 € par prise construite.
Manche Numérique, maître d’ouvrage des travaux, prévoit de récupérer le
produit du co-investissement via son délégataire, exploitant du réseau et donc en charge de
sa commercialisation auprès des fournisseurs d’accès.
*
En conclusion, la chambre observe que le risque d’exploitation du service public
est élevé et que le financement repose largement sur les collectivités territoriales et les
EPCI, alors même que leurs finances seront plus contraintes à l’avenir. A cet égard, elle
souligne que le syndicat s’implique de manière active dans la commercialisation des services
afin d’optimiser les recettes d’exploitation.
3 -
Un début de déploiement de la fibre optique marqué par le conflit avec
« Manche Télécom »
Comme évoqué plus haut, l’obtention du prêt de la CDC, d’un montant de
29,82 M€, fait l’objet de conditions suspensives de nature financière et juridique.
82
Le cahier des charges du programme national Très haut débit prévoit : «
L'investissement des opérateurs de communications
électroniques
peut
prendre
deux
formes
:
le
déploiement
en
propre
d'un
réseau
à
très
haut
débit
ou
le
co-investissement dans un réseau à très haut débit déployé par un opérateur privé de communications électroniques ou à
l'initiative d'une collectivité territoriale. Par co-investissement, on entend, notamment, l'acquisition de droit d'usages de long
terme de tout ou partie d'un réseau à très haut débit. Ces deux formes d'investissement des opérateurs seront éligibles à un
financement en prêt du FSN.
»
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
38
S’agissant des conditions de nature financière, l’état des réalisations était le
suivant en octobre 2015 :
-
en réponse à sa demande de subvention dans le cadre du déploiement du
réseau départemental, le syndicat a reçu le 31 juillet 2014 l’accord préalable
de principe du FSN
83
, pour un montant plafonné à 38,82 M€. ;
-
le syndicat a obtenu deux prêts d’un montant total de 17,1 M€ accordés par la
Banque postale ;
-
les conventions de financement des travaux de déploiement du réseau
FTTH
84
ont
été signées avec les EPCI concernés.
En ce qui concerne la réalisation des conditions suspensives de nature juridique,
le syndicat fait face à un litige s’agissant du réseau FTTH déployé par « Manche Télécom ».
a -
Le retard sur la construction des prises programmées à la convention de
délégation de service public
Le contrat signé avec « Manche Télécom » prévoyait la construction de
4 000 prises optiques à Saint-Lô et 22 000 à Cherbourg
85
. L’avenant n° 5 de la convention
prévoyait, quant à lui, la mise en service complète du bassin n° 12 au 1
er
août 2012.
L’inobservation de la contrainte était assortie de l’application d’une pénalité de 250 € par
prise non mise en service à la date fixée.
Selon l’ordonnateur, la mise en service des prises accuse un retard important
imputable au délégataire. Le syndicat a ainsi établi le constat qu’au 1
er
août 2012,
12 648 prises n’avaient pas été mises en service.
La responsabilité du délégataire semble en effet engagée, car dans son rapport
annuel 2013, il indique :
« le déploiement du bassin n° 12 se poursuivra en 2 014, c’est-à-dire
en dépassement des dates prévues à la convention de délégation. »
Il fournit ensuite
plusieurs explications à ce retard.
Selon l’ordonnateur, le délégataire a interrompu les travaux de construction des
prises prévues au contrat depuis avril 2015.
b -
La nécessité de compléter le réseau déjà construit
Le syndicat a confié à « Manche Télécom » la construction des prises optiques à
Cherbourg et à Saint-Lô par l’avenant n° 3 signé le 1
er
février 2008.
En 2010, l’ARCEP a élaboré une règle
86
permettant de s’assurer que l’intégralité
des logements devienne raccordable à court ou moyen terme. Le régulateur a ainsi prévu
que «
tout opérateur qui déploie des réseaux FTTH en dehors des zones très denses
[doit]
assurer la complétude de tout déploiement engagé sur une zone.
87
» La modification des
réseaux devait avoir lieu dans un délai
« raisonnable »
suivant la décision (trois à cinq ans).
83
Pour donner son accord définitif, le FSN exige la production de la convention de délégation de service public en vue de
l’exploitation du réseau, purgée de tous recours. En outre, la conformité du réseau avec la décision n° 2010-1312 de l’ARCEP
évoquée ci-après, doit être établie.
84
Cette condition suspensive concerne la part contributive des deux EPCI les plus importants du département au plan de
financement global. Manche Numérique ne disposait pas des conventions au moment du dépôt de sa demande de financement
auprès de la CDC.
85
Le programme total porte sur 27 000 prises, dont 1 000 à Saint-Lô s’inscrivaient dans le cadre d’une expérimentation pilote
subventionnée par le FSN. Fin 2014, 902 prises avaient été construites sur les 1 000 prévues.
86
Décision n° 2010-1312 en date du 14 décembre 2010 précisant les modalités de l’accès aux lignes de communications
électroniques à très haut débit en fibre optique sur l’ensemble du territoire, à l’exception des zones très denses. Le régulateur a
précisé que l’application de la règle de complétude permettait de s’assurer que l’intégralité des logements situés dans les zones
arrière des points de mutualisation devienne raccordable à court ou moyen terme.
87
Il a précisé que
« Ces obligations sont nécessaires en vue d’une couverture totale et homogène à terme du territoire en
réseaux en fibre optique et afin de garantir un nombre de clients adressables suffisant pour le raccordement des opérateurs
tiers dans des conditions économiques raisonnables. »
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
39
Selon l’ordonnateur, « Manche Télécom » n'a pas construit les prises situées
dans les zones concernées par la décision de l’ARCEP, mais uniquement celles dont la
rentabilité était la plus immédiate. Le nombre de prises restant à construire en complétude
du réseau était d’environ 29 950.
Pour se conformer à la décision de l’ARCEP, le syndicat a choisi d’extraire les
prises FTTH déjà construites du périmètre de la délégation et de les intégrer à la future
délégation portant sur l’exploitation du nouveau réseau FTTH
88
.
Par lettre du 13 juin 2014, le délégataire a donné son accord de principe pour la
résiliation conventionnelle de la mission FTTH et la cession des prises construites, sous
certaines conditions. Fin 2014, le délégataire a modifié sa position. Selon l’ordonnateur,
celui-ci l’en a informé oralement, lors d’une réunion qui s’est tenue le 7 janvier 2015 à Paris.
En réponse, le syndicat a adressé au délégataire, le 13 février 2015, une mise en
demeure pour obtenir l’exécution des obligations contractuelles dans un délai de quatre
mois. Par le même courrier, il l’a informé de l’émission d’un titre de recette de 3,162 M€ à
son encontre, en application des pénalités prévues pour le retard constaté.
Le financement des prises devant être affermées dans la nouvelle délégation de
service public est intégré dans le plan présenté plus haut.
S’agissant des prises en complétude, la construction de celles-ci ne pourra
bénéficier d’une aide du FSN. Le syndicat prévoit de couvrir leur financement par
l’encaissement des pénalités qu’il vient de présenter à son délégataire.
4 -
La situation du budget annexe « FTTH » en 2015
Le budget a été créé en 2013. Durant cet exercice, le syndicat a encaissé la
subvention d’investissement du département de la Manche prévue au plan de financement
pour 1,63 M€. En 2014, la section d’investissement a enregistré des dépenses d’équipement
pour 3,6 M€ financées par des subventions pour 3,3 M€.
Le budget primitif 2015 prévoyait des dépenses d’investissement d’un montant
de 56,6 M€. L’équilibre était obtenu par des subventions d’investissement pour 21 M€, des
emprunts d’un montant de 32 M€ et le report du solde de l’exercice antérieur, soit 3,6 M€.
S’agissant des emprunts, les prévisions budgétaires du syndicat sont réalisées
pour le financement obtenu auprès de la Banque postale pour un montant total de 17,1 M€.
En revanche, la tranche de 15 M€ inscrite sur le prêt de la CDC (d’un total de 30 M€) reste
soumise à la levée des conditions suspensives déjà évoquées.
5 -
La question de l’assujettissement à l’impôt sur les sociétés des budgets
annexes « TBDH » et « FTTH »
En octobre 2014, le syndicat a formé une demande de rescrit fiscal portant sur
son assujettissement à l’impôt sur les sociétés. A l’appui de sa demande, il a rappelé la
nature des ressources à percevoir par les budgets annexes « TBDH »
89
et « FTTH »
90
.
88
La volonté de Manche Numérique de sortir les prises FTTH de la convention actuelle s'explique par les règles du plan
national : le FSN conditionne l’octroi de la subvention à la mise en concurrence de la construction et de l'exploitation des prises
subventionnées.
89
Les ressources du budget annexe « TBDH » sont composées de la redevance annuelle du délégataire au titre de
l’exploitation des infrastructures et des contributions des membres en fonction du volume des investissements.
90
Les ressources du budget annexe « FTTH » sont composées de la redevance annuelle du délégataire au titre de l’exploitation
des infrastructures, d’une participation du client final aux frais d’accès au service de 50 € contre son raccordement au réseau
Très haut débit, permettant ainsi sa souscription auprès des opérateurs et des fournisseurs d’accès à internet et des
contributions des membres en fonction du volume des investissements.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
40
La direction départementale des finances publiques de la Manche considère que
l’activité d’aménagement numérique du territoire et d’exploitation des réseaux est de nature
concurrentielle et qu’elle présente un caractère lucratif
91
. En conséquence, la direction
conclut sur le fait que l’activité exercée par le syndicat doit être soumise à l’impôt sur les
sociétés.
Par courrier du 6 février 2015, le syndicat a formulé une demande de second
examen. En octobre 2015, l’ordonnateur ne disposait pas de la réponse de l’administration.
*
La chambre observe en octobre 2015 que le syndicat lève progressivement les
conditions suspensives qui figurent au contrat de prêt de la Caisse des dépôts. Toutefois, si
la réalisation des conditions de nature financière est avancée, le syndicat et son délégataire
n’ont toujours pas trouvé d’accord concernant les prises construites et restant à construire.
Leur financement repose sur l’encaissement des pénalités appliquées par le
syndicat au délégataire. Compte tenu de la contestation de ce dernier, le syndicat devra à la
fois provisionner le montant de la recette et trouver une nouvelle source de financement des
équipements.
Comme évoqué précédemment, l’établissement se montre attentif à l’entrée en
phase de commercialisation du nouveau réseau en fibre optique, ce que la chambre
encourage. En effet, les recettes prévisionnelles de la redevance à verser par le délégataire
entrent pour une part importante dans l’équilibre du budget de financement, et ce dès 2016.
Enfin, la chambre observe que le plan de financement du déploiement du réseau
en fibre optique comporte des risques pour les collectivités et leurs établissements, dans un
contexte budgétaire plus contraint. Une certaine prudence s’impose donc en la matière.
En réponse, l’ordonnateur a précisé qu’en cas de difficultés financières survenant
en cours de déploiement, des ajustements du nombre de prises seraient envisagés à court
terme pour tenir compte des financements effectivement disponibles et de l’évolution du
contexte commercial.
91
Aux termes des dispositions combinées des articles 206-1, 207-6°, 1654 du code général des impôts, et 165 de l’annexe IV à
ce même code, les syndicats mixtes qui réalisent des opérations à caractère lucratif sont passibles de l’impôt sur les sociétés.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
41
ANNEXES
Annexe n° 1 : Cadre d’intervention des collectivité s territoriales dans le domaine des
communications électroniques.
1 - Le rôle déterminant des réseaux d’initiative publique en complément de
l’initiative privée
Le Très haut débit (THD) correspond à un débit descendant supérieur à
30 Mbps. Il s’agit du seuil fixé par la Commission Européenne et repris en France par
l’ARCEP.
En 2004, la loi de confiance dans l’économie numérique a donné aux collectivités
territoriales de plein exercice la possibilité de contribuer à l’aménagement numérique de leur
territoire par l’article L. 1425-1 du CGCT qui dispose que :
« Les collectivités territoriales et
leurs groupements peuvent … établir et exploiter sur leur territoire des infrastructures et des
réseaux de communications électroniques au sens du 3°
92
et du 15°
93
de l'article L. 32
du
code des postes et communications électroniques, acquérir des droits d'usage à cette fin ou
acheter des infrastructures ou réseaux existants. Ils peuvent mettre de telles infrastructures
ou réseaux à disposition d'opérateurs ou d'utilisateurs de réseaux indépendants.
L'intervention des collectivités territoriales et de leurs groupements se fait en cohérence avec
les réseaux d'initiative publique (
RIP)…
».
L’article L. 1425-1 du CGCT crée un service public local relatif aux réseaux et
aux services locaux de communications électroniques. Il permet, en outre, aux collectivités
territoriales de devenir opérateurs dotés, sous certaines conditions, des mêmes droits et
obligations que tout opérateur de réseaux de communications électroniques.
Les plans nationaux successifs pour le développement de l’accès au THD en
France ont établi un zonage du territoire, selon la densité de population, distinguant les
zones de concurrence : les zones dites «
très denses
» (106 communes), les zones
conventionnées (dites «
moins denses
», de l’ordre de 3 500 communes) et les zones
d’initiative publique où sont déployés les RIP.
Les RIP sont des réseaux physiques de fibre optique construits par les
collectivités pour pallier l’absence des opérateurs privés dans les territoires jugés
insuffisamment rentables. Ainsi, l’investissement dans les zones denses est assuré par des
opérateurs privés (57 % des foyers) et complété par un investissement public dans les zones
moins denses, à l’initiative des collectivités (43 % des foyers).
En 2008, la loi de modernisation de l’économie
94
a instauré le cadre juridique
pour favoriser le déploiement de la fibre optique dans les immeubles jusqu’à l’utilisateur final
et sa mutualisation entre les opérateurs. Ces mesures ont encouragé le développement des
RIP des collectivités et de leurs groupements.
L'intervention des collectivités doit garantir l'utilisation partagée du réseau, ainsi
que le respect des principes d'égalité entre opérateurs et de libre concurrence sur les
marchés.
92
Article 32, 3° Réseau ouvert au public :
« On entend par réseau ouvert au public, tout réseau de communications
électroniques établi ou utilisé pour la fourniture au public de services de communications électroniques ou de services de
communication au public par voie électronique. »
93
Article 32, 15° Opérateur :
« On entend par opérateur, toute personne physique ou morale exploitant un réseau de
communications électroniques ouvert au public ou fournissant au public un service de communications électroniques. »
94
Loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
42
Peuvent être ainsi chargés d’une mission de service public pour l’aménagement
numérique du territoire :
-
les collectivités territoriales exploitant en régie les RIP qu’elles ont déployés
ou engagées dans un partenariat public-privé ;
-
les opérateurs délégataires de service public exploitant un RIP pour le
compte de la collectivité par contrat de concession ou d’affermage. Dans ce
cas, la collectivité n’est pas opérateur et ne se déclare pas à l’ARCEP.
Les
avancées
technologiques
dans
le
domaine
des
communications
électroniques se sont inscrites dans un cadre politique et juridique, européen et national,
visant au développement de l’aménagement numérique des territoires.
2 - Le cadre européen et national de l’aménagement numérique des territoires
Dans une démarche de sortie de la crise de 2008, la Commission européenne a
proposé en 2010 la «
Stratégie Europe 2020
» dont l’une des initiatives phares, «
Une
stratégie numérique pour l’Europe
»
95
, a pour finalité de combler le retard du territoire dans
les technologies de l’information et de la communication, ainsi que dans les activités
économiques afférentes.
Cette stratégie a été déclinée en France par le Programme national Très haut
débit en 2010, suivi du Plan France Très haut débit lancé en février 2013. Ce dernier pose
comme objectif final le déploiement de la fibre sur l’ensemble du territoire en procédant par
étapes.
Ce plan confirme la responsabilité des collectivités dans la mutation vers le TDH
et a pour objectif la couverture intégrale du territoire en 2022
96
. Il accorde la priorité à la fibre
mais mobilise l’ensemble des technologies capables d’apporter le THD pour la réalisation de
son objectif intermédiaire en 2017. Enfin, il recense des sites prioritaires pour le
déploiement : les zones d’activités économiques et les services publics (établissements
d’enseignement, hôpitaux, maisons de santé).
Selon l’ARCEP, le nombre total de logements éligibles aux offres à très haut
débit (supérieur ou égal à 30 Mbit/s), toutes technologies confondues, s'élevait au
31 décembre 2014 à environ 13,3 millions de logements. Ce nombre est à rapprocher des
30,4 millions de lignes du réseau cuivre et des 28,5 millions de foyers recensés par
l’INSEE
97
.
Haut débit
Très haut débit
Au moins 30
Mbps
Au moins100
Mbps
Nombre total de logements
éligibles
30,4 millions de
lignes « cuivre »
13,3 millions
7,8 millions
dont câble
8 707 000
6 080 000
dont fibre jusqu’à l’abonné
4 064 000
4 064 000
dont VDSL2 THD
4 903 000
Source : ARCEP, 31 décembre 2014
95
Dans le prolongement de cette initiative, l’Agenda numérique pour l’Europe de la Commission européenne a défini une
stratégie de déploiement du très haut débit fixant pour objectif une couverture de l’ensemble des ménages en 2020.
96
Le plan prévoit de généraliser le déploiement de réseaux fibre jusqu’à l’abonné, ce qui consiste à déployer la fibre optique
jusqu’au logement, en remplaçant progressivement le cuivre du réseau téléphonique par de la fibre optique. En 2022, il est
prévu que 80 % des logements soient éligibles au FttH. Le plan pose également l’objectif intermédiaire de THD pour 50 % des
foyers en 2017.
97
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
43
Fin décembre 2014, le taux d'abonnement
98
au très haut débit via une offre fibre
jusqu’à l’abonné atteignait 23 % (+ 4 points en un an).
3 - Un environnement technologique en transition
La performance des réseaux de communications électroniques s’évalue
notamment au regard du débit
99
qui mesure la vitesse à laquelle les données peuvent être
envoyées et reçues depuis/sur un équipement terminal connecté à internet.
Le débit est exprimé en « bits » échangés par seconde (bps) et peut se
décomposer en trois classes (selon les valeurs actuellement en vigueur) :
Classes de débit
Seuils
Très haut débit
Débit descendant supérieur à 30 Mbps
Haut débit
Débit descendant compris entre 2 Mbps et 30 Mbps
Bas débit
Débit descendant compris entre 128 Kbps et 2 Mbps
Dans les années 90, les réseaux de fibre optique sont apparus en France. Leur
déploiement a contribué à développer l’architecture physique d’internet : des «
autoroutes
optiques
» ont structuré le territoire national, complétées par des réseaux intermédiaires dits
«
de collecte »
initiés notamment par les collectivités territoriales. Enfin le réseau de
desserte, appelé «
boucle locale
», a rendu les logements éligibles jusqu’à l’abonné
(FTTH)
100
, l’utilisateur final, via un opérateur commercial, lui-même usager du réseau.
Dans les années 2000, la France a fait le choix du développement des
technologies dites de «
haut débit
», en réutilisant le réseau cuivre déployé pour le
téléphone, par la mise en place à grande échelle des technologies DSL, dont l’ADSL
101
. Il
s’agit de l’offre internet dominante en France aujourd’hui.
Trois types de technologies sont aujourd’hui disponibles pour proposer un accès
internet à très haut débit en France, le câble (environ 70 % de l’offre), la fibre optique (22 %)
et le VDSL2 (8 %) qui s’appuie sur le réseau cuivre téléphonique. Le déploiement du THD
via le câble et la fibre optique nécessite la construction ou la modernisation d’un réseau
spécifique distinct du réseau cuivre.
La fibre optique présente des atouts par rapport aux technologies « cuivre » :
-
elle augmente la quantité de données pouvant transiter par le réseau à un
moment donné ;
-
elle permet d’atteindre la symétrie entre les débits montants et ascendants ;
-
elle est insensible aux émissions électriques des autres équipements.
98
Le taux d’abonnement correspond au nombre de logements abonnés sur le nombre de logements éligibles pour une
technologie
donnée :
cHash=289756391d18a7da9be44d845b015acf
99
Selon la méthode retenue par l’opérateur, la qualité du service peut varier de manière sensible. Les débits mesurés par
l’autorité de régulation sont des débits moyens IP («
Internet protocole
»), ce qui signifie qu’il s’agit d’une vitesse moyenne (et
non d’une vitesse maximale) réellement disponible pour l’utilisateur. La vitesse mesurée par ce protocole ne correspond donc
pas au débit crête (débit maximal), ni à la capacité de la ligne.
100
Il s’agit de l’acronyme anglo-saxon «
Fiber to the home
» traduit par «
fibre jusqu’à l’abonné
».
101
La faiblesse de la technologie ADSL réside dans le fait que le débit qu’elle procure est d’autant plus faible que le client final
est éloigné du central téléphonique dont il dépend. Des technologies de complément doivent donc être utilisées pour raccorder
à l’internet des clients finaux situés dans des zones non desservies (notamment par recours aux réseaux hertziens terrestres).
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
44
Enfin, si les réseaux mobiles connaissent une montée en puissance
102
, ils ne
représentent pas à ce jour une alternative aux réseaux filaires. En effet, les licences
accordées auxdits opérateurs ne créent d’obligations significatives, en étendue de
couverture par département, qu’à partir de 2024. De surcroît, les nouvelles normes de
réseaux mobiles (4G, 5G et 6G) nécessitent de raccorder les antennes de téléphonie à un
central de réseau en fibre optique.
102
La 4G, quatrième génération de téléphonie mobile, commence à être déployée par l’ensemble des opérateurs mobiles. Les
utilisateurs devraient pouvoir, en pratique, disposer de débits pouvant atteindre plusieurs dizaines de Mbit/s.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
45
Annexe n° 2 : Glossaire
Les définitions sont issues du code des postes et des communications électroniques, de
l’ARCEP et du point d’appui national à l’aménagement numérique du territoire (PAN ANT).
Terme
Définition
ADSL
(Asymmetric Digital Subscriber Line) - Service d'accès à internet
utilisant les lignes téléphoniques classiques, sur une bande de
fréquence plus élevée que celle utilisée pour la téléphonie. Le
débit descendant est plus élevé que le débit ascendant.
ARCEP
L’ARCEP est une autorité indépendante chargée de réguler les
communications électroniques et les postes en France. Créée en
1997
sous
le
nom
d'autorité
de
régulation
des
télécommunications (ART), ses compétences ont été étendues
en 2005 avec l'entrée en vigueur de la loi de régulation des
activités postales. Les dispositions législatives encadrant le
statut et le rôle de l’ARCEP figurent dans le code des postes et
des communications électroniques (CPCE). Dans le secteur des
télécommunications, son rôle est de veiller à l’exercice d’une
concurrence effective et loyale au bénéfice des consommateurs
sur le marché des communications électroniques.
Architecture physique
d'internet
L'architecture physique d'internet repose sur trois niveaux : le
transport, à l'échelle des continents et des pays, la collecte, à
l'échelle des régions et des départements, et la desserte (ou
boucle locale), à l'échelle des villes et des quartiers. Dans un
département, les réseaux de collecte servent à relier les
agglomérations, territoires intercommunaux ou communaux à un
point du réseau de transport. Source : Point d’appui national à
l’aménagement numérique des territoires (PAN ANT).
Bassin*
Chaque Bassin regroupe les territoires d’un ensemble de
membres du syndicat adhérent à la compétence d’aménagement
numérique du territoire, homogènes en termes de déploiement
du réseau ; la liste des Bassins figure en annexe à la convention.
Bit
Le terme « bit » est la contraction des termes anglais « binary
digit » qui signifie « chiffre binaire ». Le débit binaire est exprimé
en bits par seconde (bps) ou par un de ses multiples en
employant les préfixes du système international : Kbps : kilobits
par seconde = 10
3
bps ; Mbps : mégabits par seconde =
10
6
bps ; Gbps : gigabits par seconde = 10
9
bps …).
Boucle locale
La boucle locale cuivre désigne la partie du réseau située entre
les répartiteurs et la terminaison chez les abonnés. Outre le
téléphone, la boucle locale cuivre apporte des accès internet
haut débit par ADSL. Les opérateurs s’appuient sur la boucle
locale, propriété d’Orange. Ils y accèdent par le biais du
dégroupage. Toutefois, en raison des caractéristiques des lignes
de cuivre, la qualité de service est variable suivant les endroits.
Les usages nouveaux d’internet, plus consommateurs de débit,
rendent nécessaires le déploiement de la boucle locale optique.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
46
Câble
Initialement conçu pour distribuer les services de télévision, le
câble est aujourd’hui également une technologie filaire de
transmission de données. Grâce à une rénovation des réseaux, il
permet des débits de 100 Mbit/s et plus. Très présents dans
certaines régions, les réseaux câblés constituent un patrimoine
qui pourrait permettre de contribuer à l’objectif de couverture du
territoire national en très haut débit d’ici à 2022.
Client final*
Désigne toute personne physique ou morale, cliente d'un
opérateur.
Communications
électroniques
On entend par communications électroniques les émissions,
transmissions
ou
réceptions
de
signes,
de
signaux,
d'écrits, d'images ou de sons, par voie électromagnétique.
Débit
Le débit d’une connexion est la quantité de données transmise
pendant une unité de temps. On l’exprime en bits par seconde.
Le débit montant mesure la quantité de données envoyées
depuis un ordinateur, un téléphone ou tout autre équipement
terminal connecté à internet. La quantité de données reçues sur
ces mêmes équipements s’apprécie par le débit descendant.
Dégroupage
Le dégroupage peut être défini comme la séparation de la ligne
de l'internaute et de l'abonnement au téléphone pour permettre
aux opérateurs ADSL alternatifs (concurrents de l’opérateur
historique) de proposer leurs propres services.
DSL
Le «
Digital subscriber line
» se traduit par «
ligne numérique
d’abonné
» et concerne les techniques mises en place pour
un transport numérique de l'information sur une ligne de
raccordement filaire téléphonique.
Fibre noire
Fibre non activée.
Fibre optique
La fibre optique est un fil de verre très fin qui conduit la lumière.
Elle permet de transporter d'immenses quantités de données sur
plusieurs centaines, voire milliers de kilomètres.
FTTx
Jusqu’à ce jour, surtout utilisée dans les réseaux de transport et
de collecte, la fibre optique entre dans la partie desserte,
s’approchant progressivement de l’usager final. Le FttX (Fiber to
the..., la fibre jusqu’à...) permet d’augmenter le débit, la diversité
et la qualité des services offerts aux abonnés tout en
affranchissant du réseau téléphonique cuivre.
Le réseau FTTx peut être point-à-point ou point-multipoint, actif
ou passif. Des solutions associant optique et cuivre favorisent un
déploiement progressif de l’infrastructure optique. Pour les
collectivités
qui
construisent
leur
propres
réseaux,
les
équipements
déployés
(génie
civil,
câbles
optiques
voire
matériels actifs) doivent être neutres et mutualisables, afin de
favoriser une concurrence locale effective.
FTTH pour «
fibre jusqu’à l’abonné
».
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
47
Infrastructure*
Désigne l’infrastructure de transport et de collecte (dorsale ou
BUS), conçue et constituée par Manche Numérique et qui est
mise à la disposition du délégataire dans les conditions définies
dans la convention de délégation de service public ; elle se
compose de fourreaux, de câbles de fibre optique et de locaux
techniques ; cette infrastructure est constituée, pour partie,
d’infrastructures réalisées sous la maîtrise d’ouvrage de Manche
Numérique et, pour partie, d’infrastructures pour lesquelles
Manche Numérique dispose d’un droit d’usage ou de propriété.
Logement éligible
Logement pour lequel au moins un opérateur
a relié le point de
mutualisation (PM) à son noeud de raccordement optique (NRO),
et pour lequel il manque seulement le raccordement final et un
éventuel brassage au PM pour avoir une continuité optique entre
le NRO de l’opérateur et la prise terminale optique (PTO).
Logement raccordable
Logement pour lequel il existe une continuité optique entre le
point
de
mutualisation
(PM)
et
le
point
de
branchement optique, ou entre le PM et la prise terminale
optique si le point de branchement optique est absent.
Logement raccordé
Logement pour lequel il existe une continuité optique entre le
point de mutualisation et la prise terminale optique.
Montée en débit
Concept visant l’amélioration des accès haut débit en utilisant
différentes technologies filaires ou hertziennes.
Mutualisation
Lors
de
l’établissement
d’un
réseau
de
communications
électroniques, la mutualisation, dans le sens d’une utilisation
partagée d’une infrastructure est essentielle : elle répond aux
enjeux de couverture et de concurrence tout en diminuant les
coûts, notamment ceux du génie civil.
Neutralité technologique du
réseau
La neutralité technologique est l’un des principes fondamentaux
de
la
réglementation
communautaire
et
nationale
des
communications électroniques, comme l'indique l'article L. 32-1
du code des postes et des communications électroniques. Une
partie du réseau doit pouvoir être «
mutualisée
», c’est-à-dire
partagée entre les opérateurs et permettant aux habitants de
bénéficier de la concurrence en choisissant librement leur
opérateur.
Noeud de raccordement
optique (NRO)
Point de concentration d'un réseau de fibre optique où sont
installés
les
équipements
actifs
à
partir
desquels
l'opérateur active les accès de ses abonnés.
Nuage
Le nuage est une offre de services hébergés par des serveurs
localisés quelque part (d’où le terme « cloud », nuage) en France
ou à l’étranger, proposée à des entreprises. Cette offre concerne
des usages (stockage) ou des applications (téléphonie, paie)
qu’elles géraient en interne.
Opérateur
On entend par opérateur toute personne physique ou morale
exploitant
un
réseau
de
communications
électroniques
ouvert au public ou fournissant au public un service de
communications électroniques.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
48
Opérateur commercial
Opérateur pouvant être choisi par l’utilisateur final pour la
fourniture d’un service de communications électroniques ou par
un fournisseur d'accès au service pour la fourniture d'un service
de communications électroniques à son propre client final.
Point de branchement optique
(PBO)
Equipement qui permet de raccorder le câblage installé en amont
dans le réseau avec le câble de branchement.
Point de mutualisation (PM)
Point d'extrémité d'une ou de plusieurs lignes au niveau duquel
la personne établissant ou ayant établi dans un immeuble bâti ou
exploitant une ligne de communications électroniques à très haut
débit en fibre optique donne accès à des opérateurs à ces lignes
en vue de fournir des services de communications électroniques
aux utilisateurs finaux correspondants, conformément à l'article
L.
34-8-3
du
code
des
postes
et
des
communications
électroniques.
Réseau de communications
électroniques
On entend par réseau de communications électroniques toute
installation ou tout ensemble d'installations de transport ou de
diffusion ainsi que, le cas échéant, les autres moyens assurant
l'acheminement de communications électroniques…
Réseau indépendant
Un réseau indépendant est un réseau de communications
électroniques réservé à l'usage d'une ou plusieurs personnes
constituant un groupe fermé d'utilisateurs (GFU), en vue
d'échanger des communications internes au sein de ce groupe.
Réseau d'initiative publique
Réseaux de communications électroniques établis et exploités
par
des
collectivités
territoriales
et
leurs
groupements,
dans le cadre de l’article L. 1425-1 du code général des
collectivités territoriales.
Schéma directeur territorial
d’aménagement numérique
(SDTAN)
L’article L. 1425-2 du CGCT inséré au code par l’article 23 de la
loi n° 2009-1572 du 17 décembre 2009 relative à la lutte contre
la fracture numérique (dite loi Pintat) dispose que : «
Les
schémas
directeurs
territoriaux
d'aménagement
numérique
recensent les infrastructures et réseaux de communications
électroniques existants, identifient les zones qu'ils desservent et
présentent une stratégie de développement de ces réseaux,
concernant prioritairement les réseaux à très haut débit fixe et
mobile, y compris satellitaire, permettant d'assurer la couverture
du territoire concerné. Ces schémas, qui ont une valeur
indicative, visent à favoriser la cohérence des initiatives
publiques et leur bonne articulation avec l'investissement privé.
»
Usager du réseau*
Désigne
tout
opérateur
ou
tout
utilisateur
de
réseaux
indépendants au sens du premier alinéa du I de l'article
L. 1425-1 du CGCT, souscrivant ou demandant à souscrire un
contrat de service avec le délégataire en vue de la fourniture
d’un des services objet de la convention.
Utilisateur final*
Désigne toute personne physique ou morale, cliente d'un
opérateur usager, qui ne fournit pas elle-même de réseaux de
communications
électroniques
ou
de
services
de
communications électroniques, accessibles au public.
Rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes de Normandie sur la gestion du syndicat mixte Manche
Numérique
49
VDSL2
Avec une bande de fréquence plus large que l’ADSL, le VDSL
(very high bitrate DSL) et le VDSL2 (portée et débit supérieurs)
offrent des débits plus élevés, ainsi qu’une possibilité de
symétrie.
Zonage du territoire Plan
France Très haut débit
En dehors des exceptions prévues dans les zones très denses
(106 communes), conformément au cadre règlementaire de
l'ARCEP, les réseaux sont mutualisés. Ainsi, un seul réseau est
déployé puis partagé entre l’ensemble des opérateurs. Les
zones conventionnées (auparavant nommées « zones AMII »
pour zones d’appel à manifestation d’intérêt d’investissement)
sont celles dans lesquelles les opérateurs privés ont manifesté
leurs intentions d’investissement, le Plan France Très haut débit
prévoit qu’ils s’engagent à déployer des réseaux de fibre optique
jusqu’à l’abonné d’ici 2020 par des conventions tripartites
signées
avec
les
collectivités
territoriales
et
l’Etat.
Ces
conventions permettent aux élus de définir des zones prioritaires
de raccordement et d’effectuer un suivi des déploiements.
Les zones dites «
conventionnées
» concernent 57 % de la
population.
En
dehors
des
zones
conventionnées,
les
collectivités
territoriales déploient des réseaux d’initiative publique (RIP) -
43 % de la population. La moitié de l’investissement public sera
financée
par
les
recettes
d’exploitation
des
RIP
et
le
cofinancement des opérateurs privés.
Zone arrière du point de
mutualisation
Ensemble de logements ou locaux à usage professionnel ayant
vocation à être raccordés au point de mutualisation.
Zone blanche
Il s’agit d’une zone du territoire non desservie par un réseau
donné (téléphonie ou internet). La moindre densité de population
de ces zones a souvent été un facteur de moindre qualité de
service.
Les
évolutions
technologiques
augmentent
progressivement le seuil en deçà duquel un territoire est
considéré en zone blanche (de 512 Kbps à 2 Mbps, voire 8 Mbps
actuellement).
Zone grise
Il s’agit de zones desservies en haut débit, mais non
concurrentielles : un seul opérateur y est présent.
Une zone peut être considérée comme concurrentielle quand elle
remplit au moins l’une des conditions suivantes :
plusieurs technologies offrant des niveaux de service et des
tarifs comparables y coexistent ;
la zone est éligible au DSL et le répartiteur est dégroupé. Le
dégroupage, qui ouvre la possibilité aux opérateurs alternatifs de
poser leurs propres équipements à l’intérieur du répartiteur, est
une condition indispensable à la concurrence du marché DSL.
*
Définition issue du contrat de DSP avec Manche Télécom