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CHAMBRE RÉGIONALE DES COMPTES
DE PROVENCE-ALPES-CÔTE D'AZUR
RAPPORT A FIN D'OBSERVATIONS DÉFINITIVES
sur la gestion
de la commune de Briançon
(Hautes-Alpes)
- Exercices 2007 et suivants -
Rappel de la procédure
La chambre a inscrit à son programme l'examen de la gestion de la commune de Briançon à
partir de l’exercice 2007
. Par lettre en date du 27 mai 2011, la présidente de la chambre en a
informé M. Fromm, maire en fonction, ainsi que M. Bayrou, ancien maire. Les entretiens de
fin de contrôle avec le rapporteur ont eu lieu le 05 octobre 2011. Ce dernier est décédé
accidentellement le 20 octobre 2011.
Lors de sa séance du 21 octobre 2011, la chambre a arrêté ses observations provisoires.
Celles-ci ont été transmises dans leur intégralité à M. Fromm, maire en fonction et, pour les
parties qui les concernent, et aux tiers cités dans le rapport.
M. Fromm a répondu par courrier enregistré au greffe, le 28 février 2012, et a été, à
sademande, auditionné par la chambre le 23 juillet 2012.
La chambre, a arrêté, le 24 juillet 2012, ses observations définitives et les recommandations
auxquelles elles donnent lieu.
Ce rapport d’observations définitives a été communiqué par lettre du
19 décembre 2012 à
M. Fromm, maire en fonction.
M. Fromm a fait parvenir à la chambre une réponse qui, engageant sa seule responsabilité,
est jointe à ce rapport.
Ce rapport, accompagné de la réponse jointe est consultable sur le site des juridictions
financières (
www.ccomptes.fr
) après sa présentation à l’assemblée délibérante.
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S O M M A I R E
1 - INTRODUCTION
...............................................................................................................
8
2 -
L’ANALYSE FIN
ANCIERE
.............................................................................................
9
2-1
LA FIABILITE DES COMPTES
...........................................................................
9
2-1-1
Le rattachement des charges et des produits à l’exercice
.........................................
9
2-1-2
Les amortissements obligatoires
.............................................................................
10
2-1-3
Les comptes d’immobilisations en cours
................................................................
11
2-1-4
La sincérité du bilan
................................................................................................
11
2-2
La section de fonctionnement et la constitution de l’autofinancement
.............
14
2-2-1
L
’évolution des charges de gestion
.........................................................................
14
2-2-2
L’évolution des produits de gestion
........................................................................
15
2-2-3
Les conditions de la formation de l’
épargne
...........................................................
18
2-3
L’investissement et son financement
....................................................................
19
2-3-1
Les dépenses d’équipement
....................................................................................
19
2-3-2
Le financement de l’investissement
........................................................................
20
2-4
La trésorerie
............................................................................................................
22
2-5
La dette
....................................................................................................................
23
2-5-1
L’encours de la dette
...............................................................................................
23
2-5-
2 Les ratios d’endettement
.........................................................................................
23
2-5-3 Les emprunts structurés souscrits par la ville
.........................................................
24
2-6
Le risque financier lié au casino
............................................................................
27
2-6-1
Le contentieux en cours
..........................................................................................
27
2-6-2
Un risque financier important
.................................................................................
28
3 - LA GESTION DU PATRIMOINE
..................................................................................
34
3-1
Le respect des règles et des procédures de gestion du patrimoine
.....................
34
3-1-
1 L’image fidèle des immobilisations à travers l’état de l’actif et le bilan
...............
34
3-1-2
Le respect des procédures en matière de cessions d’actifs
.....................................
36
3-2
Les ressources tirées des cessions d’actifs
............................................................
37
3-3
La cession du bâtiment de la Schappe
..................................................................
38
3-3-1 Le contexte et les conditions de la cession
.............................................................
38
3-3-2 Les problèmes posés par le paiement partiel en dation
..........................................
38
3-3-3 Une pratique réitérée
..............................................................................................
40
3-4
L’acquisition de places de parkings au sein de l’immeuble «
l’Aigle Bleu
»
....
40
3-4-1 Des irrégularités importantes et répétées
................................................................
42
3-4-2
Un équipement dont l’utilité n’a pas été préalablement étudiée et n’apparaît pas
avec évidence
...................................................................................................................
46
3-4-
3 Un équipement dont l’exploitation risque d’être coûteuse pour la commune
........
48
3-4-
4 Le plan de financement de l’opération était artificiellement équilibré
...................
49
3-5
La reprise du chalet de Pralong
............................................................................
50
3-5-1 De nombreuses fragilités juridiques
.......................................................................
52
3-5-2 Une opération coûteuse pour la commune de Briançon
.........................................
54
3-6
La gestion du patrimoine historique
.....................................................................
55
3-6-1 Le patrimoine historique de Briançon
....................................................................
55
3-6-2 Le coût de la gestion du patrimoine
........................................................................
57
4
–
LA GESTION DES RESSOURCES HUMAINES
........................................................
59
3/59
SYNTHÈSE
L’examen de la gestion de la ville de Briançon réalisé par la chambre s’inscrit dans la
continuité des avis budgétaires qu’elle a publiés en 2010 et 2011, à la suite du vote en
déséquilibre des deux budgets primitifs de cette commune. Le contrôle révèle une situation
financière qui demeure fragile, et qui est exposée aux conséquences financières
potentiellement lourdes d’un contentieux et de divers choix de gestion malencontreux.
Le défaut de fiabilité des comptes
La chambre a relevé la comptabilisation par anticipation de recettes qui se rapportaient à
plusieurs exercices (par exemple, la redevance pour la mise à disposition de la microcentrale
électrique du Randon, pour un montant de 1,46
M€ en 2009).
Cette pratique qui majore
artificiellement le résultat d’une année
doit être abandonnée.
La chambre a
également constaté une absence d’amortissement des frais d’études
; si une
démarche d’apurement a été entreprise par la commune pou
r les études antérieures à 1997,
elle doit être étendue aux études plus récentes.
Le bilan au 31 décembre 2010 est entaché de nombreuses incertitudes : un certain nombre
d’actifs qui
y figuraient
n’avaient plus aucune valeur, tandis que d’autres auraient dû donner
lieu à la constitution de provisions.
La commune a procédé en cours d’instruction
à des
régularisations comptables mais il lui reste à apurer sur les cinq prochains exercices des titres
de participation ayant perdu toute valeur. De même, une créance détenue sur la cession
relative au bâtiment de la Schappe d’une valeur de 501
672 € devrait donner lieu à une
admission en non-valeur et non à une provision, compte-tenu de la mise en liquidation de
l
’acquéreur
.
Une situation financière fragile
Les budgets primitifs pour 2010 et 2011, votés en déséquilibre, avaient été transmis à la
chambre par le préfet. Dans son avis du 6 juillet 2010, la chambre avait suggéré «
à titre
exceptionnel, de ne pas chercher à satisfaire pour le budget 2010 à la règle de l’équilibre
budgétaire posée par l’article L.
1612-4 du code général des collectivités territoriales, mais
de projeter sur les deux exercices suivants, 2011 et 2012, les mesures nécessaires au
rétablissement complet de l’équilibre budgétaire de la commune
».
L’
avis du 22 juin 2011
avait rappelé à la commune la nécessité
d’atteindre l’objectif d’
un équilibre global en 2012.
L’
analyse financière réalisée par la chambre
s’appuie sur des données
retraitées, afin de les
mettre en conformité avec les normes comptables, notamment pour étaler sur les années
concernées les recettes qui avaient été comptabilisées à tort sur un seul exercice.
4/59
La situation financière de la commune s’améliore
sous
l’effet croisé de l’augmentation des
produits de gestion, due essentiellement à la progression des bases fiscales, et de la baisse
importante des charges du même type. L
’excédent brut de fonctionnement s’est
ainsi apprécié
de 44 % entre 2007 et 2010, particulièrement en 2010 (+ 18 %). L’effet n’a pas été aussi
rapide au niveau de l’épargne brute en raison du poids des frais financiers liés à un niveau
d’endettement excessif.
Cette amélioration est certes due à la maîtrise des dépenses de
fonctionnement, mais aussi au versement par l’Etat d’une aide d’un montant de 2
M€ dans le
cadre du fonds de soutien aux communes touchées par le redéploiement territorial des armées
(FSCT).
De 2007 à 20
09, en dépit de l’absence d’autofinancement, le volume annuel de dépenses
d’équipement a oscillé entre 4 et 8 M€,
soit un niveau supérieur à la moyenne de la strate qui
résulte
notamment de l’acquisition du quartier Colaud en 2007 (2,1 M€) et du parking de
l’Aigle Bleu en 2009 (4,195 M€). Jusqu’en 2009, les ressources propres, issues notamment de
cessions de biens, n’ont pas permis de couvrir la totalité des dépenses d’investissement. La
commune a alors différé et/ou étalé sur plusieurs années le paiement de certains
investissements et puisé dans son fonds de roulement en 2007 et 2008. Elle a également eu
recours en 2009 à de nouveaux emprunts bancaires pour 3,7 M€, dérogeant ainsi, avec
l’accord de l’Etat, à l’interdiction d’emprunter qui lui était imposée aux termes d’un protocole
de 2002 signé avec les banques. Ces emprunts ont notamment servi au financement du rachat
du restaurant d’altitude de Pralong.
Le ratio de désendettement (qui calcule le nombre d’années qu’il faudrait à la ville pour
rembourser e
n totalité sa dette, si elle y consacrait l’intégralité de sa capacité
d’autofinancement), est passé de 71,7 années en 2007 à 13,6 années en 2010,
selon les
comptes de la commune (mais 107 ans et 21 ans selon les données retraitées par la chambre).
L’encou
rs total de la dette
s’élève
à 76,5
M€ fin 2010, dont 75,4 M€ de dette bancaire,
soit 6
306 € par habitant contre une moyenne de la strate de 958 €.
La partie de cette dette souscrite auprès de Dexia, qui représente environ la moitié de
l’encours total, est aujourd’hui
essentiellement composée de produits structurés, à la suite de
huit renégociations successives intervenues entre février 2003 et juillet 2008. Le choix
d’emprunts structurés
comportant un risque de taux important apparaît particulièrement
inadapté à la situation d’une
commune très endettée comme Briançon, qui devait avant tout
s’a
ttacher à sécuriser son encours.
La banque Dexia, qui était partie aux protocoles de gestion de sa dette dont celui de 2002
s’achevant fin 2007
, et donc parfaitement informée de la situation financière difficile de la
ville, aurait dû l’inciter à rester sur des produits classiques
; elle l’a au contraire conduite à
prendre de nouveaux risques qui avaient en outre pour inconvénient de rigidifier son encours
et lui a même proposé en juillet 2008 un produit manifestement contraire à ses intérêts.
5/59
Le risque financier lié au contentieux avec
la société délégataire de l’exploitation du
casino
L
’exploitation du casino a été confiée le 21 février 2002
à
la société d’exploitation du casino
de Briançon, devenue ensuite la société
d’expansion touristique de Briançon
(SETB). Suite à
l’injonction prononcée
par la cour administrative
d’appel de Marseille
le 26 mars 2007 de
mettre fin à la délégation de service public du casino, la commune et la SETB ont conclu le
26 octobre 2007 un protocole fixant
à 9,33 M€
l’indemnisation à verser à la SETB. Après
annulation par le tribunal administratif de Marseille de la délibération approuvant ce
protocole, un
nouveau protocole d’accord a été signé le 9 septembre 2008
, sur les mêmes
bases.
Le cabinet qui a conseillé la commune pour la préparation de ces deux protocoles
n’a pas
procédé à une évaluation rigoureuse de l’indemnisation du délégataire.
Dans un contexte de
résolution anticipée de
l’exploitation
, il aurait dû en effet effectuer ce calcul en retenant les
seuls biens
rattachés à l’exploitation du casino
et en évaluant poste par poste les charges et
produits d’exploitation ayant
entraîné un
déficit d’exploitation
effectivement nécessaire, dans
le cadre d’une gestion normale, à la bonne exécution du service
.
Des incertitudes pèsent donc sur le calcul du
montant de l’indemnisation
prévue par le
protocole. Elles tiennent
à l’absence de distinction entre les biens de retour,
biens de reprise et
biens
propres, à l’insuffisance de justification des pertes d’expl
oitation avancées par le
délégataire et au caractère prévisionnel du déficit déclaré pour le dernier exercice,
alors qu’il
appartenait au délégataire d’apporter toute précision
au soutien de sa demande indemnitaire.
La commune a fixé le droit d’entrée
dans la nouvelle délégation
, lors de l’appel à candidatures
lancé fin 2008,
à l’exact montant de l’indemnisation mentionnée par le protocole
.
L’hypothèse d’un
calcul de la commune visant à aboutir à une « opération blanche » en
passant la nouvelle délégation parait fort vraisemblable mais a échoué.
En l’absence de
concurrents et compte tenu du contexte économique dégradé à partir de 2008 touchant
particulièrement le secteur des casinos, la commune a conclu le nouveau contrat avec la SETB
à des conditions financières peu avantageuses.
Le recours contentieux de la SETB visant à contraindre la commune à
verser l’indemnisation
de 9,33
M€ prévue par le protocole l’expose donc à un risque financier significatif.
Les imperfections de la gestion du patrimoine
L
’état de l’actif et le bilan
de la commune de Briançon ne donnent pas une image fidèle de
son patrimoine. Elle ne respecte pas, au surplus, les obligations réglementaires en matière de
cessions d’actifs, s’agissant notamment de l’avis préalable du service des
domaines.
La vente de l’ancienne usine de la Schappe à des investisseurs britanniques pour y construire
des logements, réalisée en méconnaissance des règles de la commande publique, s’est soldée
par un échec. Cette vente incluait une disposition de paiement partiel par dation
: l’acquéreur
devait payer comptant 2
M€ et, pour le surplus (0,5 M€), réaliser un
«Espace Musée»
de
459,72 m
2
ainsi qu’un marché couvert de 1
000 m² qui serait loué à la commune. Ce mode de
paiement partiel en nature est contraire aux règles de la commande publique, de la maîtrise
d’ouvrage publique, et de la comptabilité publique.
Mise en liquidation judiciaire peu de temps après l’achat du bâtiment, la société n’a jamais
construit les logements sociaux ni réalisé le marché couvert et le musée, destinés à
redynamiser cette partie du centre-ville ; le bâtiment est toujours en friche.
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L’acquisition de places de parking dans l’immeuble l’Aigle Bleu
: une opération
coûteuse et
d’une utilité très discutable
Un promoteur privé local a récemment achevé la construction
d’une résidence hôtelière
comprenant en sous-sol deux étages de parking, sur un terrain acquis en grande partie auprès
de la commune, et situé à proximité de la gare de départ de la télécabine du Prorel. Le permis
de con
struire précisait dès 2003 qu’il s’agirait de places de parking public. Ce n’est cependant
que fin 2008, alors que ces places étaient quasiment achevées, mais sans avoir jamais été
commandées officiellement par la commune, que le promoteur s’est adressé à
la ville pour
procéder à la vente. Le conseil municipal a approuvé l’achat en 2009 au prix de
4 195 000
€
dans le cadre d’une vente en l’état futur d’achèvement (VEFA).
La chambre constate que si la réglementation et la jurisprudence ne l’interdisent pas
aux
collectivités locales, le recours à la VEFA ne doit pas avoir pour objet de contourner les
obligations de mise en concurrence. Or
même si la commune n’a jamais commandé
officiellement la construction de ce parking, celui-ci a néanmoins été construit selon les
exigences exprimées par la municipalité, sans toutefois que la décision ait été accompagnée à
l’époque d’une étude sérieuse de l’utilité, du financement et du coût de cet investissement.
La
chambre note au surplus que le plan de financement soumis au conseil municipal en 2009
était artificiellement équilibré
: une partie des subventions ou recettes attendues n’était pas
certaine, laissant à la commune un montant à financer de 1,766
M€, au lieu des 0,125 M€
annoncés.
L
’exploitation
de ce parking risque de se révéler coûteuse compte-
tenu de l’existence de
parkings publics à proximité qui sont manifestement sous-utilisés et au regard de la faible
fréquentation de la télécabine du Prorel
qu’il
est censé desservir. De plus, la commune assume
la charge de
l’entretien et du déneigement de la dalle
sans bénéficier des ressources tenant aux
redevances d’occupation versées par des commerçants
, cette dalle ayant été incluse dans
l’acte de vente sans autorisation expresse du conseil municipal.
Le rachat par la
commune du restaurant d’altitude du Pralong
: une opération
financièrement lourde et dont l’utilité n’est pas avérée
Le restaurant d’altitude du Pralong a été construit en 2001 dans le cadre d’une délégation de
service public du domaine skiable datant de 1999. Lors du renouvellement du contrat en 2006,
face au refus du délégataire de maintenir le restaurant dans la délégation, la commune a
accepté son rachat, pour éviter sa fermeture. Le retour du chalet de Pralong dans le patrimoine
communal a donc été décidé en mai 2009 pour un montant de 1,5 M
€,
représentant la valeur
nette comptable du bâtiment et
l’indemnité due par la commune à Serre Chevalier Valley
,
titulaire de la délégation de service public. La commune reprenait également les deux
emprunts en cours souscrits par la société pour la construction du restaurant, pour un montant
de 0,8
M€
.
7/59
La chambre constate l’absence de dispositions claires dans la convention de
délégation de
service public permettant de savoir si le chalet constituait un « bien de retour », ce qui le
faisait alors revenir automatiquement et gratuitement dans le patrimoine la commune, ou un
« bien de reprise
», appelant une indemnisation par la commune de l’exploitant. Il a été
considéré, face à cette imprécision de la conv
ention, que le restaurant d’altitude était un
bien
de retour
au motif que, sa construction ayant été demandée par l’autorité organisatrice, il était
nécessaire au fonctionnement du service public Cette interprétation est en contradiction avec
les faits : le retrait de
l’exploitation du restaurant
de la délégation suivante confirme
qu’il
n’est pas apparu nécessaire au fonctionnement du service public
.
Un patrimoine historique riche
dont l’entretien excède les moyens de
la commune
La ville de Briançon po
ssède un patrimoine historique très riche, qui est pour l’essentiel
classé ou inscrit à l’inventaire des monuments historiques.
Les fortifications érigées par
Vauban,
dont une partie a été acquise récemment auprès de l’Etat qui souhaitait s’en défaire,
ont été
classées dans le patrimoine mondial de l’humanité
par l’Unesco
et présentent un attrait
touristique indéniable. Ces fortifications sont cependant en très mauvais état et nécessitent des
investissements très importants. Des études récentes évaluent les travaux de fortification, de
sauvetage et de mise en sécurité à près de 30
M€
pour le Fort du Randouillet, 40
M€ pour le
Fort des Têtes et 9,6
M€ pour le Fort Dauphin.
Enfin, même s’ils sont en meilleur état, la commune doit également entretenir les remparts
d’enceinte de la ville ainsi que le fort
des Salettes, dont elle est également propriétaire.
Il est évident que,
même avec d’importantes subventions, une commune de la taille de
Briançon n’a pas la capacité budgétaire d’entretenir un tel patrimoine, encore moins dans le
contexte particulier de situation financière dégradée que connaît la ville.
Un plan triennal adopté en juillet 2011 prévoit la réali
sation de 4,5 M€ de travaux de
sauvetage des sites fortifiés de la ville. L’effort financier de 1,5 M€ par an sera réparti entre
l’Etat (50 %), la commune (10 %) et la région et le département (40 %). Ce programme risque
cependant de se révéler rapidement insuffisant face à la dégradation très rapide de certains
forts comme celui du Randouillet.
Recommandation n° 1 :
La chambre recommande à la commune de poursuivre les opérations de régularisation
comptable déjà entreprises en ce qui concerne cette fois l
’amortissement des frais
d’études
et la rectification des comptes d’immobilisations en cours. Elle prend également
acte de l’engagement du maire de procéder à
l’apurement
sur les cinq prochains
exercices des titres de participation ayant perdu toute valeur.
Recommandation n° 2 :
La chambre recommande à la commune
de s’assurer,
en liaison avec le comptable, de la
mise à jour régulière des immobilisations
qu’elle
détient afin de fiabiliser les données
relatives à son patrimoine.
8/59
1 - INTRODUCTION
Sous-préfecture des Hautes-Alpes, la commune de Briançon compte 11 961 habitants. Elle se
situe à une altitude de 1 326 mètres, dans la partie Nord-Est du département, à la confluence
de la Durance et de la Guisane.
Ville à la montagne, Briançon a opté à la fin des années quatre-vingt pour une stratégie de
développement économique centrée sur le tourisme, autour notamment des loisirs sportifs de
montagne. Cette stratégie s’est traduite par l’implantation, en plein centre
-ville, de
la télécabine du Prorel qui relie la ville au domaine skiable de Serre-Chevalier.
Grâce à des conditions d’ensoleillement exceptionnelles et à un taux d’humidité très faible, la
ville a également développé un important secteur lié au climatisme (affections respiratoires et
allergiques, pôle de rééducation fonctionnelle), mais cette activité est désormais touchée par
la fermeture d’établissements.
Si elle bénéficie d’un cadre naturel privilégié, Briançon reste une ville mal desservie en accès
routiers et ferroviaires. Le Briançonnais, et de façon plus générale, le département des Hautes-
Alpes, ne comptent ni aéroport, ni autoroute, ni liaison TGV
1
.
Très longtemps ville de garnison, Briançon
ne bénéficie plus d’une
présence militaire depuis
la fermeture à la fin de l’année 2009 du centre
national d’aguerrissement en montagne
(CNAM), dans le cadre du redéploiement territorial des armées. Un contrat de redynamisation
des sites de défense (CRSD) a été signé avec l’Etat, le département des Hautes
-Alpes et la
région pour mettre en place un cer
tain nombre d’opérations destinées à compenser la
disparition de 122
emplois directs et d’une centaine d’emplois induits.
Au cours de la période récente, la commune a été successivement administrée :
-
par M. Bayrou, de mai 2005 à juillet 2009 ;
-
suite
à l’
annulation des élections municipales par le
Conseil d’Etat, dans le cadre d’
un
intérim assuré par Mme Scotti du 3 au 27 juillet 2009, puis par une délégation spéciale
présidée par M. Mathieu, du 28 juillet au 25 septembre 2009 ;
-
par M. Fromm, depuis le 26 septembre 2009.
Dans la continuité des saisines budgétaires qu’elle a traitées et qui concernaient les budgets
primitifs 2010 puis 2011, la chambre a bien évidemment consacré une partie importante de
ses investigations à l’analyse de la situation financiè
re de la commune, après prise en compte
d’un certain nombre de problèmes de fiabilité de ses comptes.
Il est également apparu nécessaire de s’intéresser à
la gestion du patrimoine de la commune.
La ville de Briançon a en effet obtenu en 2008 le label « p
atrimoine mondial de l’Unesco
»
pour son appartenance au réseau des fortifications de Vauban. Elle souhaite donc
naturellement en
faire un facteur d’attractivité et de développement économique,
mais cet
objectif se heurte aux contraintes financières très importantes qui pèsent sur la commune.
1
Gap est à plus d’une heure par la route nationale et l’accès à Grenoble (115 km) par le Lautaret n’est pas facile,
surtout en hiver. Quant à l’autoroute jusqu’à Grenoble, il est acquis qu’elle ne passera pas à proximité de
Briançon, si elle se fait un jour.
Si la commune est reliée à l’Italie (à 15 km) par le Col du
Montgenèvre, Turin
est à 110 km (1 h 15).
S’agissant du train, il arrive certes jusqu’à Briançon, mais p
ar une voie unique. Dans le
meilleur des cas il faut donc 4 heures pour rejoindre Aix-en-Provence par le train (2 h 30 par la route).
9/59
2 -
L’ANALYSE FINANCIERE
L’analyse de la situation financière de la ville de Briançon porte sur les exercices 2007
à 2010. Elle concerne uniquement le budget principal, le poids des budgets annexes étant peu
significatif
2
.
La période contrôlée n’a pas été marquée par un élargissement majeur des compétences de la
communauté de communes du Briançonnais qui aurait pu entraîner des transferts de charges
et affecter la comparaison des masses budgétaires d’une année sur l’
autre.
L’analyse budgétaire doit en revanche être précédée d’un examen de la fiabilité des comptes,
de façon à s’assurer que les résultats constatés reflètent exactement la réalité budgétaire et
financière de la commune et son évolution.
Cette analyse est relativement détaillée compte tenu de la situation budgétaire difficile qui a
contraint la commune à voter ses budgets primitifs (BP) 2010 et 2011 en déséquilibre, ce qui
a donc conduit à la saisine de la chambre à deux reprises, dans le cadre de l’artic
le L. 1612-5
du code général des collectivités territoriales (CGCT).
Dans son avis du 6 juillet 2010, la chambre a suggéré «
à titre exceptionnel, de ne pas
chercher à satisfaire pour le budget 2010 à la règle de l’équilibre budgétaire posée par
l’article
L. 1612-4 du CGCT, mais de projeter sur les deux exercices suivants, 2011 et 2012,
les mesures nécessaires au rétablissement complet de l’équilibre budgétaire de la
commune »
. Dans son avis du 22 juin 2011 la chambre a rappelé à la commune la nécessité
d’
atteindre
l’objectif d’
un équilibre global en 2012.
2-1
LA FIABILITE DES COMPTES
L’examen des comptes
, courant 2011, a permis de détecter des anomalies et irrégularités
comptables qui affectent le résultat ainsi que le bilan.
2-1-1
Le rattachement des c
harges et des produits à l’exercice
Le respect du principe de l'indépendance des exercice
s budgétaires instauré par l’instruction
comptable M. 14 applicable aux communes rend obligatoire, pour celles qui comptent plus de
3 500 habitants, le rattachement des char
ges et des produits à l’exercice concerné
.
La procédure de rattachement consiste à intégrer, dans le résultat annuel, tous les produits
correspondant à des droits acquis au cours de l’exercice considéré et toutes les charges
correspondant à des ser
vices faits et qui n’ont pu être comptabilisés en raison notamment,
pour les dépenses, de l’absence de réception de la facture.
Les charges à payer et les produits à recevoir
L’analyse de la comptabilité de la commune de Briançon a montré que le rattache
ment des
charges à payer et des produits à recevoir
ne présentait pas d’anomalie significative.
Il reste
néanmoins perfectible. Le comptable a en effet demandé la réduction (voire la suppression) de
la journée complémentaire afin d’améliorer la gestion et l’information financière de la
collectivité. La commune a indiqué dans sa réponse qu’elle cherchait désormais à
«
développer l’utilisation de la procédure de rattachement des charges et des produits au sens
strict avec mandats et titres émis sur l’exercice
et contre-
passation au cours de l’exercice
suivant »
. La chambre prend acte de cette volonté.
2
Ateliers relais jusqu’en 2009 inclus et régie municipale du stationnement à partir de 2010. Ces budgets annexes
représentent moins de 5 % du budget principal.
10/59
Les produits constatés d’avance
Le compte 487 -
produits constatés d’avance
-
n’a pas été mouvementé de 2006 à 2010
, alors
que la commune a perçu au cours de cette période un certain nombre de recettes dont une
partie ne se rapportait pas à l’exercice afférent à la date d’émission du titre, mais aux
exercices suivants. Ces produits auraient donc dû être enregistrés en produits constatés
d’avance. L’absence d’une
telle écriture a entraîné, pour certains exercices, une majoration
indue du résultat net.
Les produits concernés sont :
-
le loyer relatif au bail emphytéotique passé avec l’association
Aventures 05
d’un montant
de 93
000 €, comptabilisé en 2007 pour la pé
riode allant de janvier 2007 à décembre 2009 ;
-
la redevance de 22
000 € enregistrée en 2008 dans le cadre du contrat de délégation de
service public relatif au cinéma Vauban pour la période allant du 5 décembre 2007 au
3 octobre 2009 ;
-
la redevance pour la mise à disposition de la microcentrale électrique du Randon : la ville
de Briançon a reçu 1 458
071 € sur le compte 7475 «groupement de collectivités
–
autres
dotations» de la part du SIVU de Briançon-Cervières. Cette redevance a été capitalisée sur
le s
eul exercice 2009 alors qu’elle porte sur la période 2009
-2021, ce qui a eu pour effet de
majorer de manière importante et indue le résultat 2009 ;
-
le loyer de la maison de la justice, enregistré en totalité en 2010 pour un montant de
61 560
€, alors qu’il
couvre la période du 18 septembre 2010 au 17 septembre 2013 ; le
maire de Briançon fait toutefois observer que,
face à la demande pressante de l’Etat,
la
commune a dû faire réaliser
dans l’urgence des
travaux pour procéder à
l’accueil
de ce
service public
dans des locaux occupés par son service d’urbanisme
;
La commune doit impérativement renoncer, pour l’avenir, à de telles pratiques qui majorent
artificiellement le résultat d’une année au détriment des autres.
2-1-2
Les amortissements obligatoires
L’examen des comptes révèle que certains amortissements obligatoires n’ont pas été réalisés.
La nomenclature M.
14 prévoit ainsi que les frais d’études suivis de réalisation, figurant au
compte 2031, doivent être imputés au compte de travaux lors du lancemen
t de l’opération.
En revanche, si l’étude n’est pas suivie de travaux, les frais correspondants sont réintégrés à la
section de fonctionnement par le biais de l’amortissement sur une période maximale de
cinq ans.
Ces dotations aux amortissements des fra
is d’études non suivis de réalisation, sont qualifiées
de dépenses obligatoires pour les communes de plus de 3 500 habitants, en vertu de
l’article
L. 2321-2 (28°) du CGCT.
L’examen du compte 2031 au 31 décembre 2009 fait ressortir un montant de 435
924,1
5 €
d’études antérieures à 1997 non amorties, dont certaines datent de plus de 40
ans. Depuis
l’exercice 2007, la commune de Briançon a entrepris d’apurer ce retard, en pratiquant une
dotation annuelle aux amortissements de 87
184,83 €.
Figurent également sur ce compte, pour 57
256 €, les frais d’études relatifs à la réhabilitation
du bâtiment de l’ancienne mairie réalisés en 2007
3
, dont le projet a été abandonné. Aucune
dotation aux amortissements n’a été prévue.
3
Selon l’état de l’actif au 31/12/2009.
11/59
Il en est de même de l’étude de faisabili
té relative au centre de congrès (58
305 €) qui ne sera
pas construit, comme l’indique l’avenant n° 1 au contrat de redynamisation des sites de
défense de décembre 2010. Il devait donc être procédé à son amortissement dès le 1
er
janvier
2011, et non le 1
er
janvier 2012, comme l’a annoncé l’ordonnateur au cours de l’instruction
.
En effet, si aucun délai n’est fixé en la matière par l’instruction comptable, il appartient
cependant à l’ordonnateur de mettre à jour régulièrement ce compte pour que les frais
d’é
tudes immobilisés soient, dans les meilleurs délais, intégrés dans le coût de réalisation
d’un équipement, ou pour qu’ils soient, à défaut, amortis lorsqu’ils ne sont pas suivis d’effet.
La chambre prend acte de la démarche d’apurement entreprise concernant les frais d’études
antérieures à 1997 non amortis et invite la commune à amortir au plus vite l’étude relative à la
réhabilitation de l’ancienne mairie ainsi que celle concernant le centre de congrès.
2-1-3
L
es comptes d’immobilisations en cours
Les immobilisations dites «en cours» concernent les travaux non terminés à la clôture de
l’exercice
. Imputés au compte 23, ils
doivent faire l’objet d’un transfert au compte 21
, dès
leur achèvement,
sur l’exercice suivant.
Ces comptes n’ont
cependant pas été apurés au titre des exercices 2009 et 2010. Les
documents produits au cours de l’instruction font
en outre ressortir des incohérences
concernant les montants qui doivent être transférés aux comptes 21 correspondants. Le
compte 2318 présentait ainsi au 31 décembre 2009 un solde de 1
428 561 € alors que
le
montant à transférer communiqué par l’ordonn
ateur se monte à 4 175
541 €.
La chambre invite la commune à clarifier cette discordance et à réaliser rapidement les
écritures comptables de transfert nécessaires.
2-1-4
La sincérité du bilan
Un certain nombre d’actifs qui figurent
toujours au bilan
n’
ont plus de réalité, tandis que
d’autres
auraient dû donner lieu à la constitution de dotations aux provisions.
Les titres de participations (compte 261)
Le solde débiteur du compte 261 « titres de participation » du compte de gestion de
l’exercice
2009 s’établi
t à 575 943
€. Ce montant
intègre les participations communales
décrites dans le tableau ci-dessous :
Société
Valeur réelle (en €)
Statut
SEMITUB (transports anciens)
53 340
Liquidation judiciaire du 7/03/1997
SEDHA
135 087
Liquidation judiciaire par jugement
du tribunal de GAP du 4/02/1994
SEMS hockey Briançon-Alpes
19 812
Liquidation judiciaire du 10/07/1992
SOCOVAL
1 524
Souscription en 1968, 1969 et 1973
Société Française du Tunnel Routier du Fréjus
1 067
Souscription en 1966 et 1969
SBEA
(1)
237 819
Dissolution du 22/05/2000
SEMS Les diables rouges
127 294
Cession de la totalité des parts
en date du 26/02/2011
TOTAL
575 943
Source
: comptes de gestion et réponses de l’ordonnateur
(1)
: Société Briançonnaise de l’eau et de l’assainissement
.
12/59
Les sociétés SEMITUB, SEDHA et SEMS hockey Briançon-
Alpes ont fait l’objet d’une
liquidation judiciaire il y a plus de dix ans. Dès lors, l’impossibilité de recouvrer ces
participations aurait dû conduire la commune à opérer les régularisations comptables et
patrimoniales correspondantes. De même, la dissolution de la SBEA (Eau et Assainissement)
imposait à la commune de sortir de son bilan le montant des titres de participation qu’elle
détenait sur cette société, ce qu’elle n’a p
as encore fait.
En ne procédant pas à ces opérations, la commune a donc maintenu 446 058
€
d’actifs dans
son bilan alors qu’en réalité ils n’ont plus aucune valeur. Il est dès lors nécessaire que la
commune régularise cette situation par la sortie des titres concernés de son patrimoine. Cette
opération aura nécessairement pour contrepartie une charge (débit du compte 675 et crédit du
compte 261) et donc une incidence sur le résultat dégagé par la commune.
Les autres créances immobilisées (compte 276)
Ce compte a évolué comme suit au 31 décembre des années mentionnées dans le tableau :
En €
2006
2007
2008
2009
2010
2761
–
C
réances pour avances en garantie d’emprunts
258 993
258 993
258 993
258 993
258 993
2763
–
Créances sur collectivités et établissements publics
711 592
1 911 592
1 611 592
1 311 592
711 592
2764
–
Créances sur particuliers
113 270
656 355
656355
656 355
656 355
Source : comptes de gestion
Le compte 2763
–
créances sur collectivités publiques
–
présente un solde d’un montant de
711
592 €, constitué :
-
d’un reliquat (non soldé) de 394,44 € sur le remboursement par l’
Etat des annuités
d’emprunts souscrits par la commune pour des opérations d’équipement judiciaire en
application de l’article 87 de la loi n° 83
-8 du 7 janvier 1983 ;
-
d’un montant de 24
270 € correspondant à la dette en capital due par la commune de Puy
-
Saint-Pierre comptabilisé par erreur comme un emprunt récupérable ;
-
d’une avance à la Régie électrique du Briançonnais (REB) d’un montant de 183
845,31
€
et d’une autre à la SEM du Prorel d’un montant de 503
081,76 €.
Ce compte aurait dû être apuré en tota
lité compte tenu de l’ancienneté et du faible montant de
la créance détenue sur l’Etat, de l’erreur d’imputation comptable de l’emprunt de Puy St
Pierre et de la dissolution de la REB et de la SEM du Prorel.
Par délibération en date du 21 mars 2012, la co
mmune a décidé l’apurement
total des comptes
2761 et 2763 pour un montant de 970 584,85
€
en étalant cette charge sur 5 ans avec des
annuités d’environ 194
000
€
.
Le solde du compte 2764 s’élève à 656
355 € au 31 décembre 2010 et se décompose de la
façon suivante :
Nature
Montant
Créance sur vente à tempérament de la parcelle AL421 à la SCI Central Parc Neige
108 696
Créance sur vente de la maison de l’Education AL57
45 987
Créance sur vente du bâtiment de la Schappe
501 672
TOTAL
656 355
13/59
La créance d’un montant de 108
696 € est relative à la vente à tempérament d’une parcelle
cadastrée AL421 à la
SCI Central Parc Neige
et correspond au dernier acompte que la SCI
aurait dû verser à la commune.
Le 7 juin 2001, la commune de Briançon a en effet cédé à la SCI Central Parc Neige
représentée par M. Dominique Bérard un droit à construire de 4 500 m² de SHON dans la
ZAC du parc Chancel, moyennant le paiement d’un prix de 3,6
millions de francs (soit
environ 550
000 €). L’acte de vente prévoit un paiement échelonné avec règlement de 45
%
du prix la 1
ère
année, le solde devant être versé les trois années suivantes. L’acte
contient
également une «
condition particulière
» par laquelle la commune s
’engage auprès de
l’acquéreur à construire une passerelle reliant le quartier où se trouve ce terrain à la gare de
départ du Prorel.
Depuis la signature de cet acte incluant cet engagement, les travaux lancés par la ville se sont
limités à la destruction
d’une villa située sur l’emprise de la future passerelle, ce qui a
accessoirement permis de libérer une surface utilisée aujourd’hui, après un aménagement
sommaire, comme parking provisoire mis à disposition du casino par convention.
La SCI Central Parc Neige a donc suspendu le paiement de la dernière échéance de règlement
du prix de vente (108
696 €).
Relancée en 2006, la municipalité a confirmé son engagement
dans une lettre de l’adjoint délégué à l’urbanisme en date du 6 avril 2006
, mais la commune a
f
inalement décidé en avril 2009 de retirer ce projet du contrat signé l’année précédente avec le
conseil général qui prévoyait l’octroi d’une subvention de 350
000 € pour la réalisation de la
passerelle.
Les modalités de cette vente appellent
d’autres
observations. Le procédé de la vente
conditionnelle, avec une condition mise à la charge du vendeur, et non de l’acquéreur,
apparaît tout d’abord inhabituel. Par ailleurs, b
ien que qualifiée
d’«
essentielle »
par les
parties dans
l’acte de vente
, cette clause
n’est pas mentionnée dans la délibération qui a
autorisé le maire à effectuer cette vente (aucune mention dans le rapport, ni dans le dispositif).
C
et engagement de réalisation pris par la ville n’a donc pas été formellement appr
ouvé par le
conseil municipal.
Enfin l
e coût de la passerelle (1,2 M€ plus le coût de la démolition d’une maison) apparaît
bien supérieur au prix payé par l’acheteur pour acquéri
r ses droits à construire (0,55
M€)
. Il
est donc difficile d’identifier
l’intérêt pour la ville d’une te
lle vente puisqu
’elle était
largement
déficitaire pour elle. D’ailleurs, en 2009, le maire avait envisagé que la passerelle soit réalisée
par un opérateur
privé, compte tenu de son coût
4
.
Dans son avis budgétaire du 6 juillet 2010, la chambre a estimé qu
’au regard de l’ancienneté
du projet et de la situation financière de la commune, l’inscription en dépense
d’investissement d’une somme de 1,2 M€ au budget 2010 en vue de réaliser la passerelle ne
revêtait pas un caractère prioritaire et pouvait dès lors être différée. Le maire a par ailleurs
indiqué au cours de l’instruction que cet équipement n’était plus une priorité pour la
municipalité. Le risque de ne pas recouvrer la créance que la commune détient encore sur la
SCI apparaît donc élevé.
4
Procès-verbal du conseil municipal du 11 mai 2009 : «
Si demain d’aventure un projet se réalisait, c’est plus
cohérent que ce soit un privé qui paye l’aménagement de la passer
elle du Prorel plutôt que ce soit la ville qui
investisse une somme, si vous avez regardé d’ailleurs il n’y a pas le montant du coût de l’opération car il est
énorme si nous avons à le financer».
14/59
Il convenait par conséquent que la commune constitue une provision à hauteur du montant de
cette créance de 108 696
€
. Par délibération du 21 mars 2012, la commune a procédé au
provisionnement de cette somme.
La créance relative au
bâtiment de la Schappe
d’une valeur de 501
672 € correspond
, pour
sa part, au paiement en dation que la société, qui avait acquis en 2007 cette ancienne usine
textile, doit à la commune (
cf. chapitre 3 sur la gestion du patrimoine)
. Cette société est
cependant en liquidation judiciaire depuis 2008 et le tribunal de commerce a conclu en
septembre 2011 à l’absence de repreneurs.
Les perspectives de recouvrement de cette créance paraissent faibles, le mandataire
liquidateur devant prochainement procéder à une vente aux enchères du bâtiment. Dans ces
conditions la commune devrait donc
, plutôt que de seulement provisionner comme elle l’a
décidé par délibération du 21 mars 2012, procéder à
l’
apurement de cette créance
(par le biais
du compte 654, pertes sur créances irrécouvrables).
Les créances des comptes de tiers (classe 4)
Le compte 4458 reçoit la taxe sur le chiffre d’affaires à régulariser,
soit pour la récupérer, soit
pour la reverser. Le solde de ce compte
s’
élevait à 67
696 € au 31
décembre 2010.
Suite à la clôture du budget annexe de l’eau, la reprise du solde de 104 603 € dans le budget
principal de la commune a été effectuée au 31 décembre 2005 mais l’apurement du compte
n’a pu être réalisé qu’à hauteur de 36
907
€. La différence, soit 67 696 €,
subsistait en débit et
n’a
vait
pas pu être expliquée par l’ordonnateur.
Dans un souci de fiabilité des comptes, il convenait donc de régulariser la situation en
procédant à l’apurement de cette somme par constatation d’un
e charge exceptionnelle au
compte 678. Par délibération du 21 mars 2012, la commune a effectué une telle opération.
Recommandation n° 1 :
La chambre recommande à la commune de poursuivre les opérations de régularisation
comptable déjà entreprises en ce qui concerne cette fois
l’amortissement des frais
d’études
et la rectification des comptes
d’
immobilisations en cours. Elle prend également
acte de l’engagement du maire de procéder à
l’apurement
sur les cinq prochains
exercices des titres de participation ayant perdu toute valeur.
2-2
La section de fonctionnement et la constitution de l’autofinancement
Remarque méthodologique liminaire :
Afin de tenir compte des observations précédentes
relatives à la fiabilité des comptes, les produits et les charges de fonctionnement ont été
retraités en procédant à leur rattachement. Ces retraitements ont un impact important sur
l’exercice 2009.
2-2-1
L’évolution des charges de gestion
Les charges de gestion ont régulièrement diminué depuis 2008, avec une accentuation de cette
tendance en 2010. Pour la période 2007- 2010, la baisse globale est de 9 %.
15/59
Evolution des charges de gestion
En €
2007
2008
2009
2010
Var
2007/2010
Charges de personnel
6 322 431
6 599 857
6 349 115
6 431 491
1,72 %
Charges à caractère général
4 674 963
4 059 248
3 629 208
3 238 523
- 30,73 %
Subventions
2 807 991
2 641 026
2 621 034
2 664 836
- 5,10 %
Autres charges
2 380 153
2 602 629
2 910 931
2 412 436
1,36 %
Total charges de gestion
16 185 538
15 902 760
15 510 287
14 747 287
- 8,89 %
Source
: CRC logiciel d’analyse financière Delphi et retraitements
Après l’importante hausse constatée par la chambre lors de son précédent contrôle sur la
période 2003-
2006, les charges à caractère général ont baissé en moyenne d’environ 11 %
par an (-
1,4 M€ sur la période). En 2010, elles représentent 252 € par habitant et sont donc
désormais comparables à celles des communes appartenant à la même catégorie que Briançon
(moyenne de la strate
: 254 € / habitant), contre 385 € /habitant en 2007 (moyenne à 246 €).
Dans le même temps, les charges de personnel ont été maîtrisées avec une augmentation dans
la période limitée à 1,7 %, en corrélation avec l’évolution des effectifs. Ces derniers affichent
,
en effet, une quasi stabilité (moins 2 équivalents temps plein, soit -1 %). Exprimées en euros
par habitant, les charges de personnel se situaient en 2010 à un niveau inférieur à la moyenne
de la strate (528 €/habitant pour Briançon contre une moyenne de 588
€/habitant).
Les subventions versées ont diminué de 6 % en 2008, puis sont restées globalement stables
jusqu’en 2010 à 2,6 M€, dont 1 M€ versé à l’office du tourisme et plus d’1 M€ aux
associations. Ces dépenses sont deux fois plus importantes que la moyenne de la strate
(223
€/habitant pour Briançon contre 96 € en moyenne). Il existe donc une marge de
manœuvre pour réaliser des économies à ce niveau.
Enfin, après avoir augmenté en 2008 et 2009, les autres charges ont diminué en 2010,
notamment au niveau des postes « charges diverses » et « redevances pour concessions et
brevets
». L’évolution globale est donc stable dans l’ensemble de la période.
2-2-2
L’évolution des produits de gestion
Les produits de gestion ont globalement augmenté de 2,68 % entre 2007 et 2010, passant
de
20,7 M€ à 21,3 M€, grâc
e à la progression des contributions directes.
Evolution des produits de gestion
En €
2007
2008
2009
2010
Var
2007/2010
Contributions directes
8 292 015
8 671 449
9 053 520
9 280 678
11,92 %
Autres impôts et taxes
3 919 159
3 799 800
3 844 852
3 805 417
- 2,90 %
DGF
4 826 241
4 713 878
4 596 214
4 773 886
- 1,08 %
Autres dotations, subv. et participations
1 114 528
1 027 251
771 558
800 513
- 28,17 %
Produits des services et du domaine
1 747 340
1 858 327
1 937 217
1 726 606
- 1,19 %
Autres recettes
861 501
831 555
850 304
930 193
7,97 %
Produits de gestion
20 760 785
20 902 260
21 053 666
21 317 293
2,68 %
Source : CRC Delphi et retraitements
16/59
Les ressources fiscales :
Les produits de la fiscalité directe, qui représentent 43 % des recettes de gestion, ont en effet
augmenté de près de 12 % sur la période (+ 1 M€).
Cette hausse provient uniquement de l’évolution des bases, les taux n’ayant pas été
revalorisés durant toute la période considérée.
Les marges de manœuvre fiscales de Briançon
sont en effet très réduites. Même si la mobilisation du potentiel fiscal a été moins forte en
2010 que dans le reste de la période, elle demeure à un niveau élevé avec un coefficient de
1,45 contre une moyenne qui se situe, par construction, à 1.
Les taux des impôts sont ainsi supérieurs aux moyennes de la strate, et même très nettement
supérieurs s’agissant des taxes foncières.
5
En 2010, le poids de la fiscalité directe représentait
776 € par habitant contre 429 €/habitant pour les communes comparables.
La fiscalité directe
2007
2008
2009
2010
Coefficient de mobilisation du potentiel fiscal 3 taxes
1,73
1,74
1,73
1,45
Briançon
Moyenne strate
Taxe d’
habitation
18,25 %
15,56 %
Taxe foncière sur le bâti
42,62 %
22,69 %
Taxe foncière sur le non bâti
173,26 %
58,30 %
Source : CRC Delphi et ministère des finances
La fiscalité indirecte (autres impôts et taxes) a, de son côté, baissé de près de 3 % entre 2007
et 2010. Si la compensation communautaire est restée inchangée, les produits de la taxe sur
les droits de mutation ont baissé de 20 % au cours de la période, en dépit d’un net
redressement en 2010, après une chute importante en 2009. Mais ce sont surtout les recettes
issues du prélèvement sur les produits des jeux de casino qui ont été divisées par trois entre
2007 et 2010 (passant de 0,36 M€ à 0,11 M€) en application des dispositions de la convention
provisoire de 2010 et de la nouvelle délégation de service public (
cf. § 2-6 Le risque financier
lié au casino).
Les ressources locatives
Les revenus tirés du parc locatif privé de la commune ont augmenté de 50 % en 2010. Le taux
de recouvrement des loyers est élevé puisque seul un dossier a été admis en non-valeur.
Revenus locatifs
En €
2007
2008
2009
2010
Revenus des immeubles
–
compte 752
238 348
206 276
220 183
330 193
Source : comptes administratifs
Le tableau transmis par l’ordonnateur
, et qui figure en page suivante, fait néanmoins
apparaître un certain nombre de locations aux loyers relativement faibles.
5
La prise en considération, entre autres, de cette donnée relative à la mobilisation du potentiel fiscal, a conduit
la chambre, dans son avis budgétaire du 6 juillet 2010 (article L. 1612-5 du CGCT), à proposer de ne pas
recourir à une augmentation de la fiscalité pour rééquilibrer le budget de la commune et à suggérer de ne pas
chercher à satisfaire dès le budget 2010 la règle de l’équilibre budgétaire.
17/59
Local
Surface
m²
Montant
du loyer
en €
Périodicité
Observations
Corps de garde Saint Mars
92
200,00
mensuelle
artisan
Partie de parcelle AX n°106
2 100
215,56
mensuelle
commerçant
ferrailleur
Local (ancienne DDE)
660
220,00
mensuelle
travaux d’installation
d’équipements thermiques
et de climatisation
Local (ancienne DDE)
58
232,00
annuelle
travaux d’installation
électrique
15 logements : immeuble les templiers,
groupes scolaires de Fontchristianne,
des Artaillauds, de la mi-chaussée, de
Sainte Catherine (ancien), de Pont-de-
Cervières, du Prorel (ancien), de
Fortville, foyer Albert Bourges
fourchette
comprise entre
41,82 et 124 (soit
entre 3,7 et 1,2 le
m
2
)
150,00
mensuelle
club de hockey
sur glace
Certains locataires ont une activité artisanale ou commerciale. Les faibles loyers dont ils
bénéficient pourraient donc s’apparenter à une aide économique déguisée qui serait dès lors
irrégulière.
Les joueurs de l’équipe de hockey sur glace de Briançon («
Les diables rouges ») occupent
également des appartements dont les loyers apparaissent très faibles au regard des prix du
marché. Ils se situent en effet entre 2 et 4 € le m
2
alors que, d’
après le site internet
CLAMEUR (Connaître les Loyers et Analyser les Marchés sur les Espaces Urbains et
Ruraux), le montant d’un loyer moyen pratiqué dans les villes des Hautes
-
Alpes s’élève
à
environ 8 € le m
2
.
Ces loyers ont été délibérément réduits pour soutenir le club des Diables Rouges, en difficulté
financière. Alors que cette aide au club de hockey devait être «
momentanée dans une
situation exceptionnelle »
6
, elle a fait l’objet d’u
ne reconduction pour la saison 2011-2012.
La commune pourrait donc améliorer la rentabilité de son parc locatif privé en commençant
par mettre un terme aux aides illégales qu’elle accorde aux Diables rouges, sous forme de
loyer minoré pour certains de ses joueurs, et par limiter sa subvention annuelle au
financement des seules opérations d’intérêt général.
Les autres ressources
La dotation globale de fonctionnement (DGF) est restée pour sa part quasiment stable au
cours de la période. La ville a recouvré en 2010 son éligibilité à une des composantes de la
DGF, la dotation de solidarité urbaine (DSU), qu’elle avait perdue en 2009. Avec 399 € par
habitant en 2010, la ville de Briançon bénéficie ainsi d’une DGF supérieure à la moyenne de
la strate (236 €/hab
itant).
Enfin, si les produits des services et du domaine ont également été marqués par une relative
stabilité, le poste regroupant les autres dotations, subventions et participations a subi une
diminution importante (- 28 %)
7
que n’a pas compensée l’augm
entation des autres recettes
(+ 69 000
€).
6
Extrait du procès-verbal du Conseil municipal du 24/09/2010.
7
La diminution porte principalement sur la participation du groupement de collectivités (cpte 7475), passée de
0,36 M
€ en 2007 et 2008 à
0,12 M
€ en 2009 et 2010 après retraitement de la redevance de 1,4 M€ perçue en
2009 pour la mise à disposition de la centrale microcentrale électrique du Randon sur la période 2009-2021.
18/59
2-2-3
Les conditions de la formation de l’épargne
L’excédent brut de fonctionnement
Sous l’effet direct de l’augmentation des produits de gestion et de la baisse importante des
charges, l’excédent brut de fonctionnement (EBF) a augmenté de plus de 4
4 % entre 2007 et
2010. La progression constatée en première période (+ 10 % en 2008 et 2009) s’est accentuée
en 2010 (+ 18 %).
Le ratio EBF / recettes de fonctionnement est ainsi passé de 18 % en 2007 à près de 27 % en
2010, contre une moyenne de la stra
te à environ 15,7 % sur toute la période. D’un niveau déjà
correct en début de période, l’EBF s’est donc hissé à un niveau très satisfaisant.
L’excédent brut de fonctionnement
2008
2009
2010
Var 2007/2010
Produits de gestion
20 760 785
20 902 260
21 053 666
21 317 293
2,68 %
Charges de gestion
16 185 538
15 902 760
15 510 287
14 747 287
- 8,89 %
Excédent brut de fonctionnement
4 575 247
4 999 500
5 543 378
6 570 006
43,60 %
EBF/ recettes de fonctionnement
18,17 %
22,36 %
22,25 %
26,85 %
Moyenne de la strate
15,70 %
15,41 %
15,79 %
15,79 %
Source : CRC Delphi et retraitements- comparaisons ministère des finances
L’épargne brute dégagée par la section de fonctionnement
L’épargne brute, ou capacité d’autofinancement (CAF) brute, s’obtient en dédu
isant de
l’excédent brut de fonctionnement les charges financières et exceptionnelles et en lui ajoutant
les produits du même type.
Son niveau permet de mesurer la capacité de la commune à couvrir le remboursement de la
dette en capital,
d’une part, et à
dégager un autofinancement disponible (CAF nette) pour ses
investissements, d’autre part.
La formation de l’autofinancement
en
€
2007
2008
2009
2010
Var
2007/2010
Excédent brut de fonctionnement
4 575 247
4 999 500
5 543 378
6 570 006
43,60%
Dotations aux Amortissements et aux Provisions
1 449 279
1 299 849
962 883
3 215 049
dont dotation aux provisions
463 000
350 000
2 000 000
Reprises sur Amortissements et Provisions
900
113 000
1 406 371
Transfert de charges
2 910 000
Résultat courant non financier
3 126 868
3 812 652
8 896 867
3 354 957
7,29 %
Produits financiers
400 050
356 796
255 845
255 834
Charges financières
Intérêts
des emprunts
3 955 614
3 948 651
3 592 757
2 955 300
- 25,29 %
Résultat courant financier
- 3 555 564
- 3 591 855
- 3 336 912
- 2 699 466
Produits exceptionnels
4 013 329
1 100 718
3 609 179
2 895 640
dont différences sur réalisations (cpte 776)
0
201 486
2 760 056
88 815
dont cessions d’immobilisations (cpte 775)
3 897 770
678 384
715 964
618 258
Charges exceptionnelles
3 943 560
937 102
7 985 348
1 057 843
Résultat exceptionnel
69 770
163 616
-4 376 169
1 837 797
Résultat de fonctionnement
-358 926
384 413
1 183 786
2 493 289
Capacité d'autofinancement brute
1 065 301
1 517 814
708 240
5 641 061
429,53 %
Amortissement du capital de la dette
2 393 899
1 719 795
3 158 753
5 292 314
121,08 %
dont dette bancaire
1 550 612
1 607 913
1 728 568
2 059 396
32,81 %
Capacité d'autofinancement disponible
- 1 328 598
- 201 981
- 2 450 513
348 747
Source : CRC Delphi et retraitements
19/59
En 2007 et 2008, malgré un niveau d’excédent brut de fonctionnement sa
tisfaisant et en
augmentation, la CAF brute est restée faible, avec un taux d’épargne respectif de seulement
4,2 % et 6,8 %, contre plus de 12 % pour la moyenne de la strate. Elle se situait ainsi sous le
seuil critique, communément admis, de 7 %.
La capa
cité d’épargne de la commune est en effet très lourdement grevée par la charge de la
dette. En 2008, les intérêts des emprunts ont ainsi représenté 18 % des charges de
fonctionnement (moyenne de la strate
: 3,76 %) et 350 € par habitant (moyenne de la stra
te :
41 €/habitant).
En 2009, malgré la poursuite de la progression de l’excédent brut de fonctionnement et la
baisse de 10 % des intérêts d’emprunt, la CAF brute se trouve divisée par deux en raison
d’une reprise sur provision dans le cadre de l’indemnisation de la SAUR, suite à l’annulation
du contrat de délégation de service public de l’eau et de l’assainissement.
Ainsi, jusqu’en 2009, l’épargne brute dégagée est insuffisante pour couvrir le remboursement
en capital de la dette. La capacité de financement disponible est même très nettement négative
en 2007 et 2009. Il convient cependant de préciser que figuraient parmi les « dettes
assimilées
», en 2007 la première partie du règlement à l’Etat du coût de l’acquisition du
quartier militaire Colaud et, en
2009, une partie du règlement de l’achat des parkings de
«
l’Aigle Bleu
». La CAF nette du seul remboursement des emprunts bancaires reste toutefois
négative.
En 2010, la CAF brute quadruple quasiment par rapport à celle de 2008. Outre l’accélération
de
l’amélioration des conditions de gestion (qui se matérialise au niveau de l’excédent brut de
fonctionnement), cette augmentation résulte pour partie d’éléments conjoncturels. Les intérêts
d’emprunt ont baissé de 18 % sous l’effet de la baisse des taux moné
taires et la commune a
reçu en produit exceptionnel une aide de l’Etat d’un montant de 2
M€ dans le cadre du fonds
de soutien aux communes touchées par le redéploiement territorial des armées (FSCT)
8
. Il
convient de noter que cette recette de fonctionnement a été versée sans contrepartie immédiate
en dépenses, ce qui accentue son caractère exceptionnel.
Sans cette aide exceptionnelle, la CAF brute demeurerait tout de même supérieure à la
moyenne de la strate (16 % des produits de fonctionnement, contre 13 % en moyenne) et la
CAF nette des seuls emprunts bancaires resterait positive, malgré une augmentation du
montant de l’amortissement de la dette bancaire. Comme en 2009, le remboursement des
dettes assimilées comprend le règlement d’une partie de l’acquis
ition du quartier Colaud ainsi
que le solde du prix d’achat des parkings de «
l’Aigle Bleu
».
2-3
L’investissement et son financement
2-3-1
Les dépenses d’équipement
De 2007 à 2009, en dépit de l’absence d’autofinancement, le volume annuel de dépenses
d’équipement a oscillé entre
4 et 8
M€,
soit un niveau supérieur à la moyenne de la strate. En
2007 et 2009 la commune de Briançon affichait même un niveau de dépenses deux fois plus
important. Ces niveaux particulièrement élevés résultent notamment de l’acquisition du
quartier Colaud en 20
07 (2,1 M€) et du parking de «
l’Aigle Bleu
» en 2009 (4,195 M€).
8
Circulaire n° 10C/B/09/24084/C du 12 novembre 2009 relative au fonds de soutien des communes touchées par
le redéploiement territorial des armées.
20/59
Les dépenses d’équipement
En €
2007
2008
2009
2010
Dépenses d'équipement
8 212 876
3 927 413
7 754 048
1 047 348
Dépense par habitant
693
331
654
88
Moyenne de la strate
348
320
309
309
Source : CRC Delphi
Si, en 2010, les dépenses d’équipement se sont limitées à 1 M€, il convient cependant de
préciser que 6,2 M€ de dépenses ont été reportés, pour partie en raison de l’adoption
définitive tardive du budget, suite à la saisine de la chambre régionale des comptes sur le
budget primitif voté en déséquilibre (article L. 1612-
5 du CGCT). Si l’on inclut ces dépenses
restant à réaliser, les dépenses d’équipement atteignent en 2010 le niveau de 2009.
2-3-2
Le financement de l’investissement
Le niveau du financement propre a varié de façon très importante au cours de la période, sous
l’effet de l’évolution contrastée de ses différentes composantes.
Comme il a été exposé précédemment, la capacité d’autofinancement disponible est restée
négativ
e jusqu’en 2009, l’épargne brute de la section de fonctionnement étant absorbée par le
remboursement en capital de la dette.
De 2007 à 2009, le financement disponible de la ville a subi une évolution erratique au gré
des variations des recettes tirées du fonds de compensation de la TVA (FCTVA) et des
cessions.
Il était de 7,1
M€ en 2007
,
grâce à d’importantes cessions du patrimoine communal (3,9 M€
correspondant à la vente du bâtiment de la Schappe et de terrains municipaux), de seulement
2
M€ en 2008, puis 4,
1
M€ en 2009
, en raison, cette fois, du triplement des recettes du
FCTVA et des subventions. La ville a en effet obtenu en 2009 une majoration de FCTVA en
souscrivant au dispositif mis en place par l’Etat dans le cadre du plan de relance et a reçu du
conseil général des Hautes-
Alpes une subvention de 1,1 M€ destinée à financer l’achat des
parkings de «l’Aigle Bleu».
L’évolution du financement propre
2007
2008
2009
2009
avant
retraitement
2010
Capacité d'autofinancement disponible
- 1 328 598
- 201 981
- 2 450 513
- 1 214 843
348 747
FCTVA et subventions (réel)
1 756 704
1 137 987
3 833 733
3 833 733
1 444 674
Subventions (ordre)
1 500 000
7 900
Prod. des cessions et remb. créances (réel)
308 094
300 000
313 780
313 780
1 482 099
Produit des cessions (ordre)
4 634 157
678 384
891 496
891 496
618 258
dont
produit des cessions d'immobilisations
3 897 770
678 384
715 964
715 964
618 258
Variation de stocks (ordre)
Autres recettes (réel)
226 982
107 613
192 638
192 638
80 606
Autres recettes (ordre)
ICNE
- 401
- 384
85 564
85 564
- 17 997
Financement propre disponible
7 096 938
2 021 618
2 866 699
4 102 369
3 964 288
Source : CRC Delphi et retraitements
21/59
Jusqu’en 2009, ces ressources propres n’ont pas permis de couvrir la totalité des dépenses
d’investissement. Ne pouvant recourir à l’emprunt, compte tenu de son niveau d’endettement,
la commune a alors différé et/ou étalé sur plusieurs années le paiement de certains
investissements. Le rachat à l’Etat du Quartier Colaud et du Fort du Randouillet pour 2,1
M€
en 2007 a
ainsi donné lieu à un premier règlement de 0,7 M€ cette année
- là, puis au
versement de 0,3 M€, en 2010 seulement, le solde devant être réglé à raison de 0,3
M€
annuels les années suivantes. De même l’acquisition du parking de «
l’Aigle Bleu
»
pour 4,195
M€ en 2009 a fait l’objet d’un premier règlement à hauteur de 1,3 M€ en 2009,
suivi du versement du solde (2,853 M€) en 2010.
En 2007 et 2008, l’insuffisance des ressources disponibles a également conduit la commune à
puiser de façon importante dans ses réserves pour financer ses investissements. Le fonds de
roulement était ainsi tombé à 0,287 M€ à la fin de l’exercice 2008.
En 2009, la commune a reconstitué son fonds de roulement (+ 1,2 M€). Cependant, sans
l’encaissement anticipé de la redevance
sur 20 ans de la microcentrale électrique du Randon
qui est venu indûment gonfler l’épargne brute, cette augmentation de réserves n’aurait pu être
constatée.
Sur cet exercice, la commune a également eu recours à de nouveaux emprunts bancaires pour
3,7 M€, dérogeant ainsi, avec l’accord de l’Etat, à l’interdiction d’emprunter qui lui était
imposée aux termes d’un protocole de 2002 (
cf. § 2-5 sur la dette)
.
Le retour du restaurant d’altitude (Chalet de Pralong) dans le patrimoine de la ville pour un
montant de 1
,5 M€ a ainsi été financé par la reprise des emprunts en cours (
0,8 M
€) qui
avaient été souscrits par le délégataire de la délégation de service public du domaine skiable.
La commune a en outre emprunté une somme de 2,9 M€ pour pouvoir couvrir, aux côtés
d’une reprise sur provision de 1,4 M€,
l’indemnité de 4,3 M€
due à la SAUR suite à
l’annulation de la délégation de service public de l’eau et de l’assainissement.
Compte tenu des restes à réaliser, le résultat de clôture est cependant excédentaire de 2007 à
2009 (y compris dans le cadre du retraitement, même si, dans ce cas, l’excédent 2009 est
minime).
En 2010, grâce au redressement de l’autofinancement, amplifié par l’aide de l’Etat, les
ressources
propres
ont
très
largement
financé
les
relativement
faibles
dépenses
d’investissement réalisées, alimentant dès lors les
réserves pour plus de 2,7 M€. Le fonds de
roulement s’établissait ainsi à 4,5 M€ à la clôture de l’exercice (3 M€ avec les retraitements).
Cependant, compte tenu des restes à réaliser en investissement (7,3 M€ en dépenses et 2,2
M€
en recettes), le résultat de clôture, toutes sections confondues, a été déficitaire, pour la
première fois au cours de la période, de 0,56 M
€ (2,13 % des produits de fonctionnement). Le
résultat ainsi constaté est certes meilleur que le résultat prévisionnel qui s’établissait à
–
2 M€
au budget primitif. Cette amélioration résulte cependant uniquement des 2 M€ attribués par
l’Etat. Sans cette aide exceptionnelle, le déficit aurait atteint 2,6 M€, soit plus de 10 % des
produits de fonctionnement.
Il convient également de soulig
ner que sans l’encaissement anticipé de la redevance de la
microcentrale électrique et son imputation contestable sur le seul exercice 2009, le déficit de
clôture 2010 se serait in fine établi à
2 M€ (8,13 % des produits).
22/59
Le besoin de financement et l’é
quilibre comptable
En €
2007
2008
2009
2009 avant
retraitement
2010
Dépenses totales d'inv. (hors emp.) (a)
10 268 538
3 985 095
10 717 611
10 717 611
1 297 923
Financement propre disponible (b)
7 096 938
2 021 618
2 866 699
4 102 369
3 964 288
Besoin ou capa. de fint après rbst Dette (c)
3 171 600
1 963 477
7 850 912
6 615 242
- 2 666 365
Emprunts nouveaux de l'année (d)
2 102 092
362 046
7 865 510
7 865 510
1 739
dont engagements liés à acquisition
2 100 000
4 195 000
4 195 000
Besoin ou capa. de fint après rbst Dette (c)
3 171 600
1 963 477
7 850 912
6 615 242
- 2 666 365
Variation du fonds de roulement
- 1 069 508
- 1 601 431
14 598
1 250 268
2 668 104
L’équilibre comptable
après retraitements
2007
2008
2009
2010
Fonds de roulement au 1er Janvier
2 928 089
1 897 312
295 881
310 479
Variation du fonds de roulement
- 1 069 508
- 1 601 431
14 598
2 745 405
Fonds de roulement au 31 Décembre
1 858 581
295 881
310 479
3 055 884
Restes à réaliser en recettes d'investissement
803 813
1 627 232
823 451
2 246 390
Restes à réaliser en dépenses d'investissement
1 750 775
1 127 061
968 990
7 292 487
Résultat après restes à réaliser
911 619
796 052
164 940
- 1 990 213
Résultat avant restes à réaliser / (RF + 110)
7,28 %
1,29 %
4,75 %
10,19 %
Résultat après restes à réaliser / (RF + 110)
3,65 %
3,54 %
0,66 %
- 8,13 %
L’équilibre comptable
avant retraitements
2007
2008
2009
2010
Fonds de roulement au 1
er
janvier
2 928 089
1 897 312
287 175
1 744 672
Variation du fonds de roulement
- 1 030 777
- 1 611 662
1 250 268
2 745 405
Fonds de roulement au 31 Décembre
1 897 312
285 650
1 537 444
4 490 077
Restes à réaliser en recettes d'investissement
803 813
1 627 232
823 451
2 246 390
Restes à réaliser en dépenses d'investissement
1 750 775
1 127 061
968 990
7 292 487
Résultat après restes à réaliser
950 350
785 821
1 391 905
- 556 020
Résultat avant restes à réaliser / (RF + 110)
7,28 %
1,29 %
6,54 %
17,22 %
Résultat après restes à réaliser / (RF + 110)
3,65 %
3,54 %
5,92 %
- 2,13 %
Source : CRC- Logiciel
Delphi et retraitements
2-4
La trésorerie
La trésorerie dont dispose la commune pour faire face à ses échéances s’obtient en déduisant
du fonds de roulement (FDR) le besoin en fonds de roulement (BFR).
Elle est très nettement positive tout au long de la période examinée avec un niveau supérieur à
2,3 M€, hormis en 2008. Elle reste néanmoins proche de 0,8 M€, grâce à un excédent de
fonds de roulement (BFR <0) qui caractérise toute la période jusqu’en 2009. Cet excédent est
li
é notamment au montant relativement élevé des dettes à l’égard des fournisseurs.
En 2010, alors que le BFR devient positif avec la diminution par deux des dettes
fournisseurs, la trésorerie atteint près de 4 M€ sous l’effet de la multiplication par trois
du fonds de roulement. Ce niveau particulièrement élevé de trésorerie est cependant à
relativiser au vu du montant des dépenses d’investissement restant à réaliser sur cet
exercice.
23/59
2-5
La dette
2-5-1
L’encours de la dette
L’interdiction faite à la vi
lle de Briançon de souscrire tout nouvel emprunt, en application du
protocole du 23 décembre 2002 signé entre la ville, l’ensemble des banques créancières et
l’Etat, aurait dû se traduire par un mouvement clair de désendettement. En réalité ce
mouvement s’est limité à une diminution de 2,3 M€ de l’encours entre 2007 et 2010.
L’encours total de la dette se
montait donc encore à
76,5 M€ fin 2010, dont 75,4 M€ de dette
bancaire, soit 6 306 € par habitant contre une moyenne de la strate à 958 €.
Cette persistance
d’un encours élevé s’explique par la souscription des emprunts pour financer l’indemnité due
à la SAUR et le retour du chalet de Pralong, ainsi que par la constitution de dettes non
bancaires (1,1 M€ encore dus à l’Etat fin 2010 pour l’acquisition du qu
artier Colaud).
L’encours de la dette
En €
2007
2008
2009
2010
Var 2007/2010
Encours de dette au 31/12
78 827 274
1
77 109 526
81 816 283
76 526 197
- 2 301 077
dont dette bancaire
77 427 274
75 709 526
77 563 233
75 426 197
- 2 001 077
Variation de l'encours
-291 807
- 1 717 748
4 706 757
- 5 290 574
Variation dette bancaire
- 1 691 807
- 1 717 748
1 853 707
- 2 137 036
Dette totale/ habitant
6 590
6 447
6 840
6 398
Dette bancaire / habitant
6 473
6 330
6 485
6 306
Moyenne strate
931
951
958
958
Source : comptes administratifs et retraitements CRC- Comparaisons ministère des finances
(1)
: Retraitement de la dette liée à l’immobilisation du casino (10,4M€)
L’annuité de la dette a pour sa part diminué de 10 % entre 2007 et 2010 sous l’effet de la
baisse des taux monétaires, mais elle reste à un niveau près de quatre fois plus élevé que celui
de la moyenne de la strate (5,1 M€, soit 426 € par habitant, contre une moyenne
à 121
€/habitant). En 2010, les intérêts représentent encore 60 % de l’annuité, compte tenu du
profil d’extinction de la dette qui fait courir cette dernière jusqu’en 20
33.
2-5-2
Les ratios d’endettement
Le ratio de désendettement (encours de la dette/ CAF), qui calcule le nombre d’années qu’il
faudrait à la ville pour rembourser en totalité sa dette,
si elle y consacrait l’intégralité de sa
capacité d’autofinancement,
est passé de 71,7 années en 2007 à 13,6 années en 2010. Cette
très nette amélioration,
qui est due au redressement de l’épargne brute
, doit néanmoins être
nuancée dans la mesure où, sans la capitalisation de la redevance de la microcentrale
électrique, le
ratio aurait été de 107 ans en 2009. De même en 2010, sans l’aide exceptionnelle
de l’Etat, le ratio aurait atteint 21 ans, soit un niveau supérieur au seuil maximal généralement
admis de 15 ans, qui correspond à la durée de vie moyenne des investissements que la dette
finance.
Ce constat est confirmé par l’analyse du ratio qui compare le stock de dette (numérateur) aux
recettes de fonctionnement (dénominateur). Le ratio demeure en effet supérieur à 300 % en
2010, contre une moyenne de la strate à 80 %.
24/59
Les ratios d’endettement
2007
2008
2009
2010
Ratio de désendettement
(en années)
71,66
51,36
38,95
13,56
Ratio retraité
(en années)
106,90
20,86
Encours/produits de fonctionnement
315,91 %
347,60 %
249,91 %
317,44 %
Moyenne de la strate
77,78 %
79,28 %
78,52 %
78,52 %
Source : Comptes administratifs et retraitements CRC- Comparaisons ministère des finances
Malgré le redressement récent de l’épargne, l’encours de la dette demeure donc
disproportionné au regard des moyens de remboursement dont dispose la ville.
Elle présente en outre un degré de risque relativement élevé.
2-5-3 Les emprunts structurés souscrits par la ville
Chronologie de la restructuration de la dette de la commune :
Suite à une politiqu
e d’investissements massifs centrés sur la création d’une station de sports
d’hiver et destinés à assurer à Briançon un développement économique qui, finalement, n’a
pas été à la hauteur des sommes dépensées, la ville s’est trouvée confrontée
, au début des
années quatre-vingt-dix, à de graves difficultés financières liées à un lourd endettement.
Plusieurs protocoles furent alors signés entre la commune, l’Etat et l’ensemble des banques,
visant notamment à reprofiler la dette et à différer le versement de
15 M€ d’intérêts (1993), à
prendre en compte les conséquences de la liquidation de la SEM SEDHA dont la ville
récupérait le passif et l’actif (1997), puis à reprofiler à nouveau la dette et à capitaliser environ
12 M€ d’intérêts différés (2002
).
En décemb
re 2002, et en application du protocole qui venait d’être conclu, Dexia, principal
prêteur de la commune, a restructuré les contrats d’emprunt en cours signés avec Briançon,
sous la forme de 5 lignes de crédit en fixe ferme (5,95 %) ou en Euribor + 0,85 %.
Par jugement du tribunal administratif de Marseille du 16 mai 2006, confirmé par un arrêt de
la cour administrative d’appel de Marseille du 17 mars 2008, la délibération du 18 décembre
2002 approuvant le protocole de réaménagement des emprunts et autorisant son maire à la
signer et à procéder aux opérations en découlant a été annulée au motif que l’information des
conseillers municipaux avait été insuffisante en raison notamment de
l’absence de mention du
coût total du réaménagement envisagé des emprunts communaux. Toutefois,
l’annulation de
l’acte détachable du contrat n’emporte pas par elle
-même la nullité dudit contrat : le protocole
de 2002
n’a
yant fait, lui-même,
l’objet d’
aucun recours à ce jour, il reste donc opposable aux
parties signataires malgr
é l’annulation de la délibération qui l’a approuvé
. Aussi,
contrairement à ce que prétend Dexia, la chambre peut valablement procéder à un bilan du
protocole conclu le 23 décembre 2002 pour cinq ans et
s’achevant donc au 23 décembre 2007,
et examiner à ce titre les contrats passés à la suite de ce protocole.
25/59
Des renégociations qui débouchent sur une situation critiquable en termes
d’équilibre et de souplesse de gestion de l’encours
Le protocole de 2002 avait pour objet de restructurer l’ensemble de la
dette sur des bases
homogènes pour l’ensemble des banquiers, en l’espèce un taux fixe
ou un taux variable ou
révisable avec des marges ne devant pas dépasser certaines limites
. Or il n’existe
plus
aujourd’hui
,
dans l’encours de la commune auprès de Dexia
, aucun prêt répondant à ces
conditions strictement entendues.
De février 2003 à juillet 2008, huit renégociations sont en effet intervenues avec Dexia
portant sur l’ensemble de la dette détenue auprès de cette banque.
Au terme de ces
renégociations succe
ssives, l’encours de la commune vis
-à-vis de Dexia est presque
intégralement composé de produits structurés pour un montant global de 44 622 491,06
€
, soit
91,4 % d’un encours de
48 823 233,56
€
qui représente lui-même environ la moitié de
l’encours total
de la ville.
La volonté de la commune de lisser les échéances de remboursement ne nécessitait pas un
changement aussi général d’indexation qui a entraîné la ville dans une logique de
renégociations répétées vers des produits de pente ou à barrière.
Par
ailleurs, la souscription d’emprunts structurés a, par nature,
pour effet de rigidifier
l’encours
alors que le protocole incitait la commune à se désendetter de manière anticipée. Il
est en effet
difficile de sortir d’un produit structuré, sauf
généralement au prix du paiement
d’une soulte élevée ou de l’augmentation du risque et du paiement d’une nouvelle marge
9
.
La solution de passer au tout structuré apparaît en outre peu cohérente avec le souci
d’équilibre des composantes de l’encours de la dette qui
doit, par principe, toujours être
recherché, surtout pour une commune très endettée comme Briançon qui aurait dû avant tout
s’attacher
à sécuriser son encours.
Or, même si les emprunts structurés souscrits par la ville de Briançon auprès de Dexia ne
comptent pas toujours parmi les plus risqués du marché,
leur poids dans l’encours (environ la
moitié) et
leur profil d’extinction (jusqu’en 2033, avec une part d’intérêts importante jusqu’en
2025), exposent la commune à un risque non négligeable.
Certains produits structurés exposent la commune à un risque de taux
important
La majeure partie des produits Dexia souscrits par Briançon désactive un taux fixe en fonction
de l’évolution de l’inflation ou de l’Euribor
.
Ces produits ont pour inconvénient majeur de faire courir un risque de taux sans possibilité de
profiter des baisses. Le solde de l’encours structuré
avec Dexia est composé de produits dits
de pente qui jouent sur l’évolution de la courbe des taux avec un multiplicateur important
(ici 5) qui augmente leur caractère déjà intrinsèquement risqué.
Les renégociations ayant abouti à cet encours presque totalement structuré appellent plusieurs
observations.
9
Rapport public de la Cour des comptes sur la gestion de la dette publique locale, juillet 2011.
26/59
Il convient plus particulièrement de s’interroger sur les motivations qui ont conduit
la
commune à mettre fin en 2003 et 2004 à trois contrats en Euribor + 0,85 % en leur substituant
des taux fixes, désactivés au profit d’un Euribor, lorsque ce dernier passe au
-
dessus d’un seuil
prédéfini. Ce type d’indexation s’analyse comme un Euribor à plancher (
plancher égal au taux
fixe retenu dans la formule d’indexation),
qui expose toujours la commune, comme avec
l’Euribor et sans rien lui faire gagner, au risque de hausse des taux en cas de franchissement
de la barrière mais qui la prive, en revanche, des évolutions à la baisse des taux. En outre, le
plancher fixé était deux fois supérieur au niveau de l’Euribor de l’époque (les planchers
variaient selon les contrats entre 5 et 6 %, alors que l’Euribor 3 mois
se situait à 2,5 %
fin 2004).
Une renégociation opérée en mai 2006 pose également problème
en termes d’appréhension
des risques qu’elle induisait
. Les arguments écrits avancés à cette époque par Dexia pour
renégocier les contrats d’emprunt n° MON 224652 et MON 207913 (tous deux en fixe à
barrière sur Euribor
10
) en produits de pente (contrats n° MPH 984001 et MPH 984003) étaient
ainsi, entre autres, les suivants :
«
Les avantages
:
o
Absence de risque additif
(au regard de l’analyse des courbes passées)
o
Plus de sécurité : le produit de refinancement en trois phases avec deux phases taux fixe
classique permet de limiter la part structurée à la différence du produit actuel où la partie
structurée est sur la durée totale (27 années)».
Ces arguments sont surprenants. Il peut en effet difficilement être affirmé, comme le fait
pourtant Dexia, qu’un produit de pente à multiplicateur, même avec une durée en partie en
fixe, est moins risqué qu’un produit à taux fixe à barrière sur Euribor. En outre, en usant d’un
tel argument, Dexia admet paradoxalement la nocivité des produits structurés à barrière sur
Euribor qu’elle avait pourtant elle
-même proposés avec succès à la commune en février 2003
et septembre 2004.
Ces informations ont donc pu être trompeuses pour la ville de Briançon, d’autant que, comme
l’a indiqué M. Bayrou en cours d’instruction, «
les différentes renégociations intervenues à
partir de 2003 ont été conduites par le directeur général des services de l’époque,
(…)
lui-
même en détachement de Dexia auprès de la ville de Briançon »
.
Une opération financièrement peu judicieuse pour les intérêts de la commune
Une autre opération de renégociation apparaît manifestement contraire aux intérêts de la
commune, ce qui est particulièrement rare car, en règle générale, le risque supplémentaire pris
lors d’une renégociation d’un produit structuré est partiellement compensé par un avantage
plus ou moins important, mais relativement certain.
En juillet 2008, Dexia a ainsi écrit à la commune pour lui indiquer que la courbe des taux
risquait de faire évoluer défavorab
lement le taux d’un des produits de pente que possédait la
commune depuis mai 2006 et pour lui proposer une renégociation que la commune a
acceptée. Cette renégociation lui a fait échanger :
10
Le taux fixe est désactivé au profi
t d’un Euribor lorsque ce dernier passe au
-
dessus d’un seuil prédéfini
27/59
Contrat n° MPH 984003 (12 156
986 €) :
o
première période de juin 2006 jusqu’au 1/09/2007
: 4,39 %
o
deuxième période de 20 ans :
- si CMS 20- CMS 2 > ou égal à 0,20 % : 4,39 %
- si CMS 20
–
CMS 2 < à 0,20 % : 5,39 % - 5* (CMS 20- CMS 2)
o
troisième période de 5,25 ans : 4,39 %
contre :
Contrat MPH 261698 (11 683 961
€
) :
o
première période d
’août 2008 jusqu’en septembre 2009
: 4,39 %
o
deuxième période de 23,25 ans :
- si CMS 20 - CMS 2 > ou égal à 0,20 % : 4,57 %
- si CMS 20- CMS 2 < 0,20 % : 5,57 % - 5* (CMS 20- CMS 2)
Or, ce nouvea
u produit était à coup sûr perdant pour la commune puisqu’en échange d’un
petit gain grâce au retour à un taux fixe garanti sur 2008 et une partie de 2009, la commune
perdait le bénéfice du fixe sur les 5 dernières années et, sur la période d’application d
u CMS,
elle était assurée de payer plus cher que l’ancien produit puisque le taux de 4,39 % passait
à 4,57 % et le taux de 5,39 % à 5,57 %.
Interrogée en cours d’instruction sur les raisons pour lesquelles elle avait proposé à la
commune une option aussi
défavorable aux intérêts de Briançon, la banque n’a pas répondu
sur ce point précis.
L’attitude de la banque Dexia apparaît donc particulièrement critiquable. Partie aux
protocoles de gestion de sa dette, elle était en effet parfaitement informée de la situation
financière difficile de Briançon et
aurait donc dû l’inciter à sécuriser son encours, plutôt que
de lui proposer de prendre de nouveaux risques.
2-6
Le risque financier lié au casino
2-6-1
Le contentieux en cours
Par arrêt du 26 mars 2007, la cour administrative de Marseille a annulé la délibération du
24
juillet 2001 approuvant l’attribution
de
l’exploitation d’un casino
municipal à la société
d’exploitation du casino de Briançon
, filiale du groupe Barrière devenue par la suite Société
d’Expan
sion Touristique de Briançon (SETB), et a enjoint à la commune de Briançon de
saisir le cas échéant le juge du contrat afin que celui-ci constate la nullité de la délégation
passée le 21 février 2002 «
si elle ne peut obtenir de la Société d’Exploitation d
u Casino de
Briançon un accord par lequel les cocontractants renoncent à se prévaloir de l’existence et
des clauses de la convention litigieuse
».
A la suite de cet arrêt, la commune et la SETB ont passé le 26 octobre 2007 un protocole
d’accord de résolu
tion amiable du contrat de délégation du service public (DSP) du casino
municipal ainsi qu’une convention de gestion provisoire du casino dans l’attente
de la
passation
d’une nouvelle
DSP. Toutefois, par jugement du tribunal administratif de Marseille
du 2
1 mai 2008, la délibération du 9 octobre 2007 approuvant le protocole d’accord et la
délégation de service public provisoire a été annulée et il a été enjoint à la commune de saisir
le juge du contrat pour constater sa nullité «
à défaut d’obtenir de la Société d’exploitation du
casino de Briançon un accord sur la résolution du protocole litigieux dans le délai
de 3 mois
». La commune et la SETB ont alors
passé un nouveau protocole d’accord le
9 septembre 2008, avec effet au 1
er
novembre 2007 ; ce protocole prévoit notamment que la
commune indemnisera la SETB à hauteur de 9 330
000 €
, somme majorée de la TVA à
reverser, selon des modalités de calcul jointes.
28/59
A la suite de
l’échec des démarches entreprises pour faire appliquer le protocole et
en
l’absence de
règlement de l’indemnité par la commune,
la SETB a saisi la chambre le
26 mai 2010
, en application de l’article L. 1612
-15 du code général des collectivités
territoriales. La chambre a rendu le 6 juillet 2010 un avis n° 2010-0320, dans lequel elle
déclare
la dépense non obligatoire au motif qu’elle n’
est ni certaine,
ni exigible, qu’elle n’est
pas liquide, et qu’elle apparaît en outre sérieusement contestée.
La SETB a attaqué cet avis
devant le tribunal administratif de Marseille qui a annulé
l’avis de la
chambre, par jugement
du 2 octobre 2012.
2-6-2
Un risque financier important
Si la chambre a déclaré non obligatoire la dépense correspondant aux indemnités dues par la
ville de Briançon à la SETB dans le cadre du protocole de 2008, elle a cependant également
demandé à la commune
de mieux prendre en compte financièrement le risque lié à l’existence
de ce protocole et
d’amplifier
à cette fin
la démarche de provisionnement qu’elle avait
engagée avec la constitution d’une provision d’1
M€ au budget primitif 2010, en la portant à
un montant plus significatif de 2 M€ pendant trois ans.
Cette provision a bien été constituée en 2010 et en 2011. Il convient cependant de rappeler
qu’il s’agit d’une provision budgétaire puisque c’est l’option
générale qui a été retenue en
matière de provisions par la commune et qu’elle ne peut en changer
pendant le mandat. Ce
mode de provision engendre
certes des recettes d’investissement, mais ne constitue pas des
mises en réserves au bilan, contrairement aux provisions semi-budgétaires.
Le règlement d’une éventuelle indemnité à la SETB risque par conséquent de placer la
commune, malgré ces provisions, dans une situation très voisine de celle à laquelle elle a été
confrontée lorsqu’elle a dû indemniser la SAU
R en 2009. Dans cette affaire, la ville avait en
effet dû emprunter, de façon tout à fait dérogatoire, pour pouvoir indemniser la société
délégataire du service public de l’eau et de l’assainissement, en application du jugement du
tribunal administratif.
C’est donc un risque financier potentiellement lourd qui pèse sur la situation financière déjà
préoccupante de la commune. L’enjeu financier de cette affaire appelle plusieurs
observations.
L’évaluation du montant de l’indemnité décidée dans le cadre du p
rotocole
d’accord de 2008
et fondée sur
l’
expertise du cabinet Financial Audit apparaît
insuffisante et imprécise
Dans le cadre de la résolution amiable du contrat de délégation de service public, le groupe
Barrière demandait initialement une indemnité de
11,9 M€ dont 6,4 M€ au titre de la valeur
nette comptable des immobilisations (VNC) et 5,5 M€ au titre des pertes d’exploitation.
Par
délibération du 4 mai 2007, la ville de Briançon avait alors confié au cabinet Financial Audit
«
une mission d’audit des s
ommes à devoir par la ville de Briançon au Casino Lucien
Barrière »
.
Dans son rapport remis en juillet 2007, l’expert
mandaté par la commune
concluait à une indemnité totale ramenée à 9,33 M€
(hors TVA) suite au retraitement des
économies fiscales engendrées
par l’imputation du déficit d’exploitation du casino de
Briançon au niveau des comptes du Groupe Barrière
et à l’exclusion
des dotations aux
amortissements déjà pris en compte dans les valeurs nettes comptables des immobilisations.
Cette évaluation fut
retenue comme valeur d’indemnisation dans le 1
er
protocole signé entre la
ville et la SETB le 26 octobre 2007.
29/59
Le 21 mai 2008, le tribunal administratif annulait cependant la délibération du conseil
municipal du 9 octobre 2007 portant approbation de ce protocole au regard du caractère
injustifié de la procédure d’urgence et de l’information insuffisante du conseil municipal. Le
jugement mettait directement en cause le contenu même du rapport de Financial Audit :
«
Considérant qu’il ressort des pièces du
dossier que la note de synthèse qui accompagne le
projet de délibération reprend pour 9,33 M€ le montant des conclusions du rapport du
commissaire aux comptes chargé par la commune de procéder à l’évaluation de
la valeur
d’indemnisation de résolution du contrat de concession
; que le rapport du commissaire aux
comptes n’apporte aucune explication sur l’origine du déficit d’exploitation de la concession
qui s’élève à 4,68 M€
; qu’il ne fait notamment aucun rapprochement avec le bilan
pluriannuel
prévisionnel
d’exploitation
;
que
le
rapport
n’apporte
pas
davantage
d’explications sur des points aussi techniques que les réductions de capitaux par
incorporation de réserves ; que le commissaire aux comptes ne discute pas la valeur
résiduelle comptable des immobilisations, se bornant à indiquer l’accord des
parties sur leur
montant, alors même que la Cour administrative d’appel de Marseille avait soulevé le
problème de la valorisation comptable des actifs dans son arrêt du 26 mars 2007 ; que, dès
lors, la note de synthèse soumise aux conseillers municipaux, qui ne comble pas les lacunes
du rapport d’expertise, traduit imparfaitement la complexité de la situation comptable
actuelle de la concession
(…)»
.
Suite à cette annulation, et eu égard à sa motivation, la commune a donc commandé un
second rapport à l’expert qui l’a produit en juillet 2008. Ce second rapport ne
répond
cependant pas aux critiques formulées par le juge administratif à propos du premier rapport.
Les faiblesses du premier
rapport d’expertise
de 2007
Le cabinet Financial Audit a fait valoir en réponse aux observations provisoires de la chambre
que sa mission initiale était limitée
à l’analyse comptable des principaux chefs de préjudice
réclamés par la SETB, à savoir la valeur nette comptable du bâtiment et des équipements et
les pertes cumulées au 31 octobre 2006 puis au 31 octobre 2007. La chambre constate
toutefois que la délibération du 4 mai 2007
qui missionne l’expert
indique qu’il s’agit
d’estimer «
avec justesse et pertinence, tant dans leur principe que dans leur montant
» les
sommes prises en charge par la commune. Si la définition des besoins de la commune était
certes imprécise
en l’absence de cahier des charges
, la mission confiée à un expert-comptable
dans le cadre
d’un
différend
découlant de la résiliation anticipée d’une délé
gation de service
public consistait donc clairement et assez classiquement à déterminer le niveau et la nature de
l’indemnisation versée au délégataire
conformément aux règles jurisprudentielles applicables
en la matière.
Sur la valeur nette comptable du bâtiment et des équipements
, le cabinet Financial Audit a fait
état auprès de la chambre de ses diligences qui ont consisté essentiellement à se faire
communiquer le fichier d’immobilisation
s de la société et à calculer les dotations aux
amortissements po
ur l’exercice 2007, le fichier ayant été arrêté par la SETB au 31 octobre
2006. Ainsi, le poste des immobilisations a été diminué de 600 000
€
correspondant à
l’annuité d’amortissement omise.
30/59
La chambre constate toutefois que cette opération de retraitement comptable est fort limitée
car elle ne concerne que le montant global de la valeur nette comptable des immobilisations et
non le principe
même de l’indemnisation apprécié pour chaque actif
. Pour procéder à une
évaluation correcte l’expert
aurait donc dû préalablement établir la liste des biens de retour ou
de reprise qui devaient
d’ailleurs faire l’objet d’un procès
-
verbal prévu par l’artic
le 2 du
protocole. Cette détermination des équipements indispensables ou utiles pour la concession de
service public n’a
vait déjà pas été faite lors de sa passation en 2002. Or, le fichier
d’immobilisation
s ne permet pas de distinguer clairement parmi les meubles, les biens de
retour, les biens de reprise et les
biens propres devant rester au délégataire. L’absence
d’analyse de l’expert
sur ce point est confirmée par son rapport qui indique : «
Nous avons
donc circonscrit nos contrôles de cohérences au retraitement éventuel des pertes cumulées
(…)
». La chambre constate en outre
qu’un
procès-verbal de remise des biens a été dressé le
7 octobre 2008, démontrant ainsi
que l’établissement d’une telle liste était
réalisable.
Dans sa réponse aux observations provisoires de la chambre, la SETB part, de son côté, du
principe que l’ensemble des biens meubles et immeubles du casino répondent nécessairement
au critère d’utilité des dépenses d’investissement car ils étaient prévus par le cahier des
charges de la concession de service public
: toutefois, l’article 8 de ce cahier des charges
qu’elle cite ne définit qu’un programme très sommaire sur les locaux prévus. Si l’article 9
prévoit que l’
avant-projet détaillé du projet de casino est soumis pour approbation à la
collectivité,
la SETB ne soutient pas qu’une
telle délibération a été prise. En tout état de
cause, seul le caractère utile de la construction du bâtiment pour l’exploitation du casino est
concerné par cette démonstration et non celui des équipements qui le meublent. Or, la
chambre rappelle que
l’incertitude pèse uniquement sur ces biens meubles, comme
cela vient
d’être démontré
.
Sur les pertes cumulées au 31 octobre 2006 puis au 31 octobre 2007
, le cabinet Financial
Audit a fait valoir auprès de la chambre
qu’il a
vait obtenu une réduction significative des
prétentions de la SETB en déduisant l’avantage fiscal pour le groupe Barrière découlant des
pertes de sa filiale de Briançon et en enlevant une créance de la commune sur la société SETB
concernant des pré
lèvements pour dépenses d’intérêt public. Mais pour autant l’expert ne met
en avant aucune recherche
en vue d’évaluer le
montant global et la nature des pertes ; or la
jurisprudence
estime que le déficit d’exploitation indemnisable dans le cadre d’une
délégation
de service public doit avoir été
effectivement nécessaire, dans le cadre d’une gestion normale,
à la bonne exécution du service (CE 16 novembre 2005 Auguste et commune de Nogent-sur-
Marne). La corrélation des pertes d’exploitation avec le plan pluri
annuel de financement
produit lors de la passation peut être un bon indicateur comme l’a relevé le
tribunal
administratif de Marseille. Il convenait donc bien
de vérifier l’un après l’autre les charges et
produits d’exploitation. Le cabinet Financial Audit
soutient certes
qu’il a reçu toute la
« documentation utile » pour ce faire mais celle produite en annexe de son rapport ne
concerne que les relations entre la filiale SETB et le groupe Barrière.
Ce premier rapport était donc effectivement insuffisant pour déterminer précisément
l’indemnisation consécutive à
la résolution amiable de la délégation de service publique.
Le rapport complémentaire de 2008 présente les mêmes insuffisances
Le second
rapport d’expertise
produit en juillet 2008 était censé répondre aux griefs du
jugement du tribunal administratif de Marseille du 21 mai 2008. En réalité il ne le fait pas. Le
cabinet Financial Audit y voit
davantage l’occasion de commenter son
premier rapport pour
une meilleure information des conseillers municipaux, qu
’un
e opportunité
de l’approfondir
.
Pourtant, le juge administratif, en
retenant l’insuffisance d’information des conseillers
municipaux, critiquait clairement
l’insuffisance du rapport lui
-même au regard de son
objectif.
31/59
Le cabinet Financial Audit a cependant répondu à la chambre
qu’il a
vait procédé à une
analyse des
charges et produits d’exploitation
au regard notamment du prévisionnel : il avait
constaté ainsi que les machines à sous avaient apporté moins
de chiffre d’affaires que prévu
alors que les gains issus des jeux traditionnels et des activités annexes (restauration, bar et
spectacles) étaient plus conformes aux prévisions. Le rapport révélait également que la SETB
avait enregistré
des pertes d’exploitation dès son premier exercice comptab
le 1999-2000. La
chambre constate cependant que l’expert s’abstenait sur ce point de
relever que la SETB
n’était alors pas concessionnaire du casino
ce qui n’était pas neutre puisque
les frais exposés
avant la passation le 21 février 2002 ne sauraient être retenus comme pertes indemnisables.
A propos des charges, le cabinet Financial Audit affirmait que le niveau de personnel était
conforme au ratio des autres casinos de jeux mais sans communiquer celui-ci. Sur les charges
à caractère général, il se contentait
d’indiquer
: «
notre mission ne consistait pas à un audit
des états comptables, la cabinet de commissariat aux comptes de la société SETB n’a pas
relevé dans ses rapports généraux de certification d’anomalies ou de charges non rattachées
à l’exploitation attendue d’un casinotier.
» s’émancipant
ainsi
d’une de ses
missions
concernant une rubrique pour laquelle il aurait pu éventuellement relever des dépenses non
exposées dans l’intérêt du servi
ce public délégué.
En outre,
l’expert en est resté
, dans son second rapport,
au déficit d’exploitation
prévisionnel
fourni par la SETB début 2007 et
n’a pas cherché à évaluer
le déficit réel alors que
l’information était accessible, l’exercice éta
nt cette fois clos
.
La SETB indique dans sa
réponse que son déficit réel pour
2007 a été supérieur au déficit prévisionnel et qu’elle a en
outre consenti à des retraitements fiscaux qu’elle n’était pas tenue d’accepter.
La chambre
maintient cependant
qu’
il appartenait
à la SETB dans le cadre d’une procédure
d’indemnisation amiable qu’elle avait acceptée
,
d’apporter en temps opportun tout justificatif
à l’appui de sa demande d’indemnisation lors de la résolution ou constat de nullité de la
convention (CE 19 décembre 2007 société Sogeparc-CGJ) ; dès lors en ne communiquant pas
à l’expert ses états comptables 2007 comme celui
-ci indique le lui avoir demandé par lettre du
26 juin 2008, et quand bien même la liasse fiscale aurait été disponible au greffe du
tribunal
de commerce,
la SETB s’est sciemment exposé
e au risque de contestation de ces montants par
la commune et a ainsi contribué à alimenter
l’
incertitude sur le niveau exact de
l’indemnisation auquel elle a
vait droit.
Le second rapport a donc maintenu
à l’identique (9,33 M€) la valeur d’indemnisation
de la
SETB telle que retenue dans le premier rapport. Cette deuxième étude sans réelle valeur
ajoutée a néanmoins été facturée, comme la précédente, environ 18
000 € à la ville de
Briançon, selon les pièces comptables détenues par la chambre.
Malgré son manque de précisi
on persistant, c’est pourtant sur la base de ce second rapport
qu’a été signé le 9 septembre 2008 le second protocole d’accord entre la ville et la SETB qui
est aujourd’hui source du litige entre les deux parties.
32/59
Les conditions de lancement fin 2008 de la nouvelle procédure de délégation de
l’exploitation du casino
confirment les incertitudes pesant sur
l’
indemnisation
de la SETB
La commune a lancé fin 2008 une nouvelle procédure de passation de la délégation de service
public concernant l’exploitat
ion de son casino municipal.
L’avis d’appel à co
ncurrence pour
la convention d’exploitation
du casino du 19 décembre 2008 précise que «
conformément aux
dispositions de l’article L. 1411
-
2 du CGCT, un droit d’entrée sera exigé. Il est aujourd’hui
évalué à 9
,3 M€
».
Dans sa réponse à la chambre du 28 septembre 2011, l’expert indique lui
-
même que son expertise devait aussi servir à déterminer le montant du droit d’entrée de la
prochaine DSP. Cette identité parfaite entre le montant du
droit d’entrée qu’il étai
t prévu de
demander au futur concessionnaire et le montant de
l’indemnité consentie à l’ancien
montre
que la commune a visiblement cru pouvoir solder ainsi
sa dette à l’égard de la SETB et ne l’
a
pas incitée à négocier au mieux de ses intérêts et au plus près de la réalité une indemnité
qu’elle considérait par avance, et fort imprudemment, comme remboursée
.
La SETB récuse pour sa part, dans sa réponse,
l’
hypothèse selon laquelle la commune de
Briançon pensait réaliser « une opération blanche »
en imposant
un droit d’entrée du même
montant dans le cadre de la prochaine délégation de service public ;
c’est pourtant l’opinion
qui s’est
exprimée lors de la séance du conseil municipal du 22 juillet 2008 au cours de
laquelle il
a été décidé d’approuver le nouveau
protocole avec la SETB : un conseiller
municipal a ainsi déclaré : «
nous avons eu l’engagement ferme, et nous veillerons à ce qu’il
soit respecté, que les contribuables briançonnais ne supporteraient pas le coût de la dette du
casino, cette nouvelle délégation de service public devant intégrer une opération blanche
pour Briançon
».
Ce
scénario d’une compensation de l’
indemnité
due à l’ancien délégataire
par un droit
d’entrée de même montant
a débouché sur un échec pour la ville. En effet, le seul candidat à
cette nouvelle convention, le groupe Barrière, a
retiré fin 2009 la candidature qu’il avait
déposée, au motif que sa société, compte tenu de la «
situation très critique à l’heure
actuelle
» ne pouvait assumer ce droit d’entrée
.
Une nouvelle convention provisoire a alors été
signée dans l’attente du lancement d’une
nouvelle concession au printemps 2010 avec un nouveau cahier des charges. Le groupe
Barrière a, de nouveau, été le seul candidat à cette délégation de service public
, ce qui l’a mis
en situa
tion de pouvoir refuser le paiement de tout droit d’entrée et d’obtenir des conditions
financières d’exploitation beaucoup plus favorables.
De nouvelles conditions beaucoup moins favorables pour la commune que celles de
la précédente délégation.
Le 15 septembre 2010 un nouveau contrat de délégation de service public
d’une durée de
20 ans a donc été signé avec le groupe Barrière, seul candidat. Ce contrat ne prévoit pas de
droit d’entrée. En outre, alors que le prélèvement sur le produit des jeux au profi
t de la
commune était dans la première convention de 10 % jusqu’à 7
337
000 €, puis de 15 %
au-delà, les taux sont désormais très sensiblement réduits et sont mêmes divisés par cinq
jusqu’à 3,5 M€ de produits
11
.
11
2 %
jusqu’à
3 500
000 € inclus
4 %
de 3 500
000 € à 4
000
000 € inclus
6 %
de 4 000
000 € à
4 600
000 €
8 %
de 4 600
000 € à 5
000
000 €
12 %
de 5 000
000 € à 7
000
000 €
15 %
au-delà de 7 000
000 €
11
33/59
En outre, la redevance versée par la SETB au
titre de l’occupation du domaine public est
de 50 000
€ annuels, contre 360
000
€ dans les conventions provisoires de 2007 et 2009.
La
SETB estime pour sa part
que cette révision des conditions d’exploitation du casino
s’explique par le contexte économique
peu favorable au secteur des casinos et par la
persistance de déficits d’exploitation du casino de Briançon.
La gestion globale de ce dossier a donc été très défavorable aux intérêts de la ville qui se voit
réclamer par la SETB une somme particulièrement élevée au regard de ses capacités
financières, sans pouvoir compter en contrepartie sur l’encaissement d’un droit d’entrée. Pour
conserver un casino sur son territoire, la ville a en outre dû revoir sérieusement à la baisse ses
prétentions financières en termes de redevances.
CONCLUSION
SUR L’ANALYSE FINANC
IERE
S’il convient de remarquer les efforts réalisés depuis 2007, et accentués en 2010, en matière
de réduction des charges de gestion, le budget et les finances de la ville de Briançon sont
toujours lourdement handicapés par la dette communale.
Outre la poursuite de l’amélioration des conditions de gestion, le retour à une capacité
d’autofinancement disponible positive en 2010 tient aussi pour beaucoup à la baisse des taux
d’intérêts sur les marchés
et à l’aide exceptionnelle versée par l’Etat, dont il faut souligner le
caractère conjoncturel.
La situation financière globale reste dégradée et très préoccupante avec un encours de dette
au-delà du seuil de surendettement communément admis et des perspectives qui doivent
inciter à la prudence.
Un programme
d’
investissements très important a en effet été lancé en 2009 dans le cadre du
contrat de redynamisation des sites de défense (CRSD)
12
qui, s’agissant de Briançon, port
ait
sur des réalisations à haute
ur de 11 M€ sur trois ans, dont 3,4 M€ financés par la commune
.
Ce contrat a toutefois
fait l’objet de deux avenants, le dernier
en date de mars 2012 prorogeant
la durée du contrat de deux ans
et modifiant le programme pour un total de 7,5 M€
dont
2,5
M€ f
inancés par la commune. Les incidences budgétaires de ce programme se feront donc
ressentir
jusqu’en 2014
. La commune de Briançon devra alors être en mesure de dégager un
autofinancement supplémentaire tout en assurant
l’équilibre budgétaire global.
Par ailleurs,
certaines actions de ce contrat, comme par exemple la construction d’un espace
muséographique, auront un impact en fonctionnement qui n’a pas encore été évalué mais dont
la ville de Briançon devra également tenir compte.
Enfin, la commune demeure exposée au risque lié à la signature
d’un protocole
particulièrement mal négocié avec la société qui exploite en son nom le casino.
12
Contrat signé le 2 juillet 2009 entre la ville de Briançon, l’Etat, le département des Hautes
-Alpes, le Conseil
régional ainsi que la communauté de communes de Briançon et les communes de Névache et Aiguilles,
également concernées par le redéploiement territorial des
armées. Les opérations prévues au CRSD doivent
être
réalisées dans un délai de 3 ans à compter de sa signature, soit juillet 2012, reconductible jusqu’en juillet 2014.
34/59
3 - LA GESTION DU PATRIMOINE
La gestion du patrimoine présente pour la ville de Briançon un enjeu budgétaire et
économi
que important. Alors qu’elle est très lourdement endettée, la commune s’est en effet
fixé pour objectif d’optimiser les ressources qu’elle peut tirer de cessions d’actifs. La richesse
du patrimoine historique de Briançon constitue par ailleurs un facteur d
’attractivité sur lequel
la ville, affectée par le redéploiement territorial des armées, entend notamment se fonder pour
accélérer son développement économique.
3-1
Le respect des règles et des procédures de gestion du patrimoine
L’examen des procédures
liées à la gestion du patrimoine par la commune de Briançon a
montré
que l’état de l’actif et le bilan ne
donnaient pas une image totalement fidèle du
patrimoine et que les obligations réglementaires en matière de cessions d’actifs n’étaient pas
toujours respectées.
3-1-1
L’image fidèle des immobilisations à travers l’état de l’actif et le bilan
Le caractère perfectible de l’ajustement entre l’état de l’actif et l’inventaire
L’instruction comptable M
.
14 prévoit que l’évaluation du patrimoine d’une coll
ectivité
nécessite un inventaire des biens réalisé par l’ordonnateur et un état de l’actif établi par le
comptable.
L’examen de l’état de l’actif au 31 décembre 2009 montre que certains biens ne sont pas
numérotés. Les corrections nécessaires à la mise à jour de cet état ont cependant été
transmises par l’ordonnateur en cours d’instruction.
La direction du patrimoine et des archives de la ville a fourni, de son côté, une liste qui classe
le patrimoine en plusieurs catégories : militaire, religieux, judiciaire, urbain et commémoratif.
Certains biens mobiliers du patrimoine urbain qui figurent sur cette liste, tels que les tableaux
de l’ancien hôtel de ville, n’apparaissent cependant pas à l’état de l’actif (compte 2168 –
œuvres d’art).
De plus, le fichier
de liaison de l’inventaire «INDIGO INVENTAIRE» entre l’ordonnateur et
le comptable n’est pas utilisé. Ce fichier, dont l’objet est l’enregistrement et le suivi des
immobilisations de la collectivité sous un numéro d’inventaire, permet pourtant de produire
en cohérence l’inventaire et l’état de l’actif. La comptable a indiqué que les différentes
tentatives faites avec l’ordonnateur pour son utilisation n’avaient pu aboutir en raison de
problèmes techniques et informatiques. La tenue de l’actif et sa mise à j
our ont été assurées
jusqu’au 31 décembre 2010 sur un programme distinct de la comptabilité, tenu sous
ACCESS. Les informations de cessions et d’acquisitions sont transmises seulement en fin
d’année au vu des titres de recettes et mandats de sortie d’actif
, ainsi que des mandats de
paiement comptabilisés tout au long de l’année. Aucune fiche de liaison n’existe.
Recommandation n° 2 :
La chambre recommande à la commune de
s’assurer,
en liaison avec le comptable, de la
mise à jour régulière des immobilisations
qu’elle
détient afin de fiabiliser les données
relatives à son patrimoine.
35/59
Des immobilisations qui n’ont pas été retranscrites au bilan
Dans les années quatre-vingt
, la commune a concédé à la Société d’Equipement
des Hautes-
Alpes (SEDHA) la réali
sation de plusieurs opérations dans différentes zones d’aménagement
concerté (ZAC Chazal, Chancel, Durance, du Cros, des Cailles, Fontenil). A la suite de
l’échec de certaines opérations, la SEDHA a été liquidée. La commune est alors devenue en
1998 propri
étaire des terrains et d’un immeuble appartenant à la SEDHA, en contrepartie de
la reprise de son passif pour un montant de 42 MF (6 402
859 €). L’acte de rétrocession des
27 et 29 septembre 1999 a validé le transfert de propriété des parcelles concernées
13
.
Un courrier du comptable en date du 27 mars 2001 indique cependant qu’aucun terrain n’a été
imputé en immobilisations (compte de classe 2) lors de l’intégration des comptes de la
société.
Par ailleurs il apparaît que le compte 1021 a été utilisé de façon inadéquate. Il a en effet été
débité au moment des opérations de rétrocessions à la commune par le crédit du compte 1641
pour 6 402
859 €. Or l’instruction comptable prévoit que ce compte a vocation à être crédité.
Au crédit de ce compte est normalement inscrite la valeur des biens reçus par la collectivité à
titre de dotation avec pour contrepartie comptable le débit du compte de la classe intéressée.
Dans le cas présent, le compte de la classe 2 aurait dû être débité.
L’ordonnateur n’a pu expliquer ni retrouver aucun document dans les archives explicitant le
choix de cette écriture comptable inadéquate.
Il en résu
lte que les comptes d’immobilisations ne sont pas fiables. Cette anomalie se
répercute sur les cessions ultérieures de ces biens par la commune. Le calcul des plus ou
moins-values de cession est alors erroné
14
, les valeurs nettes comptables de tous les terrains
appartenant à la SEDHA lors de sa liquidation ayant été comptabilisées pour un montant nul
15
(
cf. §3-2 sur les recettes de cessions)
.
13
Il s’agit
: - des parcelles de terre section AX 268-77-245-246-103-158-244-176-180-181-182-261-262-241-
259-260-194-205-206-208-213-214-215-221-230-247-270, AK 71-165-166-199-200, AL 136-183-185-187-277-
283-284-300-301-309-311-313-318-320-321-333-337-342-343-345-346-348-351,
AR
94-119
pour
une
superficie totale de 8 hectares et 528 m2 ;
-
d’un ensemble immobilier cadastré section AL 334, 11 rue Alphand constitué
de 11 lots
.
14
Sont concernées les ventes à la Communauté de Communes du Briançonnais (CCB) :
-
du 18/06/2009 des terrains section AX 103-245 et 247 pour un montant de 101
500 €
;
-
des 3 et 10/11/2009, des terrains section AX 77-270 pour un montant de 443
155,24 €
;
-
du 24/11/2009, des terrains AX 176-181-206-246-283-308 (ex 270)-392 pour un montant de 101
238 €. De
plus, il est à noter que l’origine
de propriété fait référence aux parcelles 283 et 392 comme faisant partie de
l’ensemble de l’actif restitué de la SEDHA. Or l’acte notarié de rétrocession des 27 et 29/09/1999 ne
mentionne pas ces parcelles. Le rapprochement des deux actes notariés qui ne
permet pas d’assurer la
traçabilité de ces deux terrains traduit aussi l’absence de fiabilité du patrimoine de la commune
;
-
l
a vente d’une parcelle section AR n°119 à la SARL Rowback Durance pour un montant de 300 K€ le
28/09/2007.
15
Le mode de comptabi
lisation préconisé par le comptable et utilisé par l’ordonnateur pour toutes les cessions
issues de la reprise de la dette de la SEDHA est alors le suivant : crédit du compte 775 (opération réelle)
–
crédit
du compte 192 par le débit du compte 676 (opérati
ons d’ordre budgétaire).
36/59
3-1-2
Le respect des procédures en matière de cessions d’actifs
Des anomalies dans le respect des procédures ont été relevées concernant les cessions
intervenues entre 2007 et 2009.
La consultation obligatoire du service des domaines
L’article L. 2241
-
1 du code général des collectivités territoriales (CGCT) dispose qu’il
appartient aux collectivités territoriales d
e recueillir l’avis du service des domaines sur les
cessions d’immeubles et droits réels immobiliers. Pour les communes de plus de
2 000
habitants, l’avis doit être recueilli quelle que soit la valeur du bien.
Pourtant, certaines cessions
d’immeubles de l
a ville de Briançon
n’ont pas été précédées du
recueil de l’avis des
domaines alors que celui-ci était obligatoire.
Il en est ainsi pour :
-
la vente d’un terrain section E n° 2110 d’une surface de 94 m² lieudit Subeyran, pour un
montant de 6
580 €, le 28/08/2009
;
-
la cession
d’un terrain à bâtir de 1
157 m
2
(parcelles AX n° 412-413-416-418)
16
par acte
notarié du 22/05/2008.
-
les ateliers relais cédés par actes notariés le 17 janvier 2008 et les 3 et 10 novembre 2009 à
la communauté de communes du Briançonnais.
De même
aucun nouvel avis n’a été demandé pour
plusieurs ventes réalisées 3 ou 4 ans, voire
8 ans après la consultation du service des domaines. Dans de tels cas, et compte tenu du délai
important qui s’était écoulé depuis l’
estimation initiale, ce service était pourtant le seul
habilité pour réactualiser son estimation, afin de tenir compte de changements qui s’étaient
produits depuis et singulièrement de l’évolution du marché immobilier.
L’information du conseil municipal
L’article L. 2241
-1 du code général des collectivités territoriales indique que toute cession
d’immeubles ou de droits réels immobiliers par une commune de plus de 2
000 habitants
donne lieu à délibération motivée du conseil municipal portant sur les conditions de la vente
et ses caractéristiques essentielles (référence cadastrale, description physique et juridique -
situation locative- du bien, prix, droits et obligations respectifs du cédant et du cessionnaire).
L’information du conseil municipal de Bria
nçon concernant les cessions immobilières
n’apparaît pas toujours
aussi claire
que l’exigerait ce texte.
Des contradictions ont ainsi été relevées entre les délibérations et les actes de vente dans
plusieurs dossiers
en ce qui concerne les surfaces, l’identité de l’acquéreur ou la consistance
du bien.
16
La parcelle vendue est issue d’un ensemble immobilier des bâtiments 3TF d’une superficie de 2
003,50 m², qui
avait fait l’objet d’un crédit
-bail. Par délibération du 17/12/2007, les 1 157 m² ont été soustraits de ce lot pour
être vendus.
37/59
3-2
Les ressources tirées
des cessions d’actifs
Compte tenu
d’un autofinancement disponible restreint en raison du poids de la dette, les
deux municipalités qui se sont succédé au cours de la période contrôlée ont eu pour objectif
d’utiliser les produits de cessions d’immobilisations comme source de financement
complémentaire des investissements de la commune.
Le bilan apparaît cependant relativement modeste, les cessions
immobilières n’ayant pas été
à
la hauteur des prévisions. Sur un montant de recettes prévues aux budgets primitifs de près
de
12 M€ pendant la période 2007 à 2010, seulement 50 % ont ainsi été réalisés
(6
M€).
Seules les réalisations de l’année 2007 ont été à peu près conformes aux prévisions.
Cessions immobilières
En €
2007
2008
2009
2010
Total période
Cessions prévues
4 124 122
4 933 012
1 550 364
1 362 258
11 969 756
Cessions réalisées
3 897 770
678 383
715 964
618 258
5 910 375
Source : Budgets primitifs et comptes administratifs
Après les recettes particulièrement élevées enregistrées en 2007 (3,9 M€)
, le montant des
ce
ssions a plafonné entre 600 et 700 K€ les trois années suivantes. Il convient cependant de
préciser que figurait, parmi les cessions de 2007, la vente pour 2,5 M€ du bâtiment de
l’ancienne usine textile de la Schappe, après son rachat la même année par la
commune au
conseil général des Hautes-
Alpes pour un montant de 1,3 M€.
Il apparaît par ailleurs que, pendant la période 2007 à 2010, le montant des acquisitions de
terrains nus et bâtis et de bâtiments non publics (10 M€) a été très nettement supérieur au
montant des cessions de terrains ou de bâtiments appartenant à la commune (moins de 6 M€).
Bilan des cessions et des acquisitions immobilières
2007
2008
2009
2010
Total
Cessions (cpte 775)
3 897 770
678 383
715 964
618 258
5 910 375
Acquisitions
3 673 501
386 472
5 954 325
63 800
10 078 098
Dont cpte 2111et 2115
180 372
6 472
2 592
1 500
190 936
Dont comptes 2138*
3 493 129
380 000
5 951 733
62 300
9 887 162
Source : comptes administratifs
(*) et en 2007, le cpte 21318 pour l'acquisition du quartier
Colaud
Enfin, les gains en termes de plus-values tirées de ces cessions ont été très limités. Sur
l’ensemble de la période, le solde de plus
-value est de 0,329 M
€ sur un volume de cessions
de 5,91 M
€, soit un taux de plus
-value de 5,6 % qui apparaît relativement faible au regard de
l’ancienneté des biens concernés dans l’actif de la commune.
Bilan des plus ou moins-values de cessions
2007
2008
2009
2010
Total
Produits des cessions (cpte 775)
3 897 770
678 383
715 964
618 258
5 910 375
Valeur nette comptable (cpte 675)
1 378 277
315 110
3 222 940
665 361
5 581 688
Moins-values (cpte 776)
0
201 486
2 760 056
88 815
3 050 357
Plus-values (cpte 676)
2 519 493
564 760
253 080
41 713
3 379 046
Total plus ou moins-values
2 519 493
363 274
- 2 506 976
- 47 102
328 689
Source : comptes administratifs
38/59
Certaines opérations ont entraîné des moins-values surprenantes, comme la cession le
10 novembre 2009 de certains des bâtiments 3TF (Le Chazal et La Sagne) à la communauté
de communes qui fait apparaître une moins-
value de 2,7 M€. Outre le fait que le prix de
cession a été fixé, comme cela a déjà été souligné, en fonction des loyers de crédit-bail restant
dus, avec pour conséquence une valeur résiduelle ainsi calculée, différente de la valeur vénale
des bâtiments, cette importante moins-
value s’explique également par l’absence de dotations
aux amortissements. La valeur nette comptable au moment de la cession était alors celle
d’origine.
A l’inverse, l’absence d’enregistrement en compte de classe 2 des terrains des ZAC acquis en
contrepartie de la reprise du passif de la SEDHA a conduit à surestimer les plus-values.
Le niveau de plus ou moins-values calculé est donc profondément affecté par le défaut de
fiabilité des comptes d’immobilisations.
Plusieurs opérations immobilières, de cession ou d’acquisition, retiennent
particulièrement
l’attention.
L’une d’entre elle (
ventes des droits à construire à la SCI « Central ParcNeige ») a déjà été
évoquée dans la partie relative à la fiabilité des comptes. Les autres opérations ont en
commun des modalités de réalisation complexes, souvent risquées, voire pour certaines
irrégulières. En outre, l
es intérêts de la commune n’y ont pa
s été suffisamment préservés ou
n’apparaissent pas avec évidence. Dans un cas il s’agit d’une cession
(ventes du bâtiment de
La Schappe) et dans deux autres
cas d’acquisitions (le parking de l’Aigle Bleu et le chalet
de Pralong).
3-3 La cession du bâtiment de la Schappe
3-3-1 Le contexte et les conditions de la cession
Le 5 décembre 2006, la ville de Briançon a acheté au conseil général des Hautes-Alpes le
bâtiment de La Schappe, ancienne usine textile, pour un montant
de 1,34 M€, en dessous de
l’estimation du service des Domaines qui avait évalué le bien entre 1,8 et 2,2 M€. Ce bâtiment
avait été vendu en 2001 par la commune au conseil général pour 1,1 M€, au
-delà cette fois de
l’estimation des domaines (0,7 à 0,85 M€).
M.
Bayrou était à l’époque maire de Briançon et
président du conseil général.
Quelques mois après ce rachat au conseil général, la ville de Briançon a revendu le bâtiment à
un promoteur privé anglais pour y construire des logements, pour un montant de 2,
5 M€, soit
dans la fourchette haute de l’estimation des domaines (entre 2,15 et 2,6 M€) et avec une
plus-
value
de 1,2 M€.
L’acte de vente du 12 décembre 2007 prévoit un paiement comptant de 2 M€. Quant au
surplus, soit la somme de 501 000
€, il est indiqué que l’acquéreur livrera un local dénommé
«Espace Musée» de 459,72 m
2
livré brut de béton fluides en attente et isolation phonique
posée »
, ainsi qu’un marché couvert de 1
000 m² qui serait loué à la commune pour le prix
de
999 € par mois pendant 30 ans.
3-3-2 Les problèmes posés par le paiement partiel en dation
Le paiement partiel en nature, par dation, auquel l’ordonnateur a choisi de recourir pour cette
opération apparaît particulièrement risqué à la fois d’un point de vue juridique et stratégique.
39/59
Un risque juridique très important
En cherchant à obtenir en contrepartie de la cession d’un bâtiment, la construction d’un
espace muséal et d’un marché couvert sans mesure de publicité ou de mise en concurrence,
l’ordonnateur a détourné les règles de la
commande publique. Une telle délégation de
programme à un opérateur privé apparaît également contraire à la réglementation sur la
maîtrise d’ouvrage publique.
Les paiements en nature sont par ailleurs susceptibles d’être regardés comme contraires aux
règles de la comptabilité publique, plus particulièrement aux modes de règlement des
dépenses et aux modes de recouvrement des recettes définis par le décret n° 62-1587 du
29 décembre 1962.
Il apparaît enfin que le conseil municipal n’a pas été suffisamment
informé de ce volet du
projet puisque le montant de la dation n’a été spécifié, ni dans la délibération, ni dans le
rapport.
Un risque stratégique
Du fait de la mise en liquidation judiciaire de la société peu de temps après l’achat du
bâtiment, la créa
nce en nature au profit de la commune n’a jamais été honorée.
Le paiement en nature n’a donc pas permis de préserver les intérêts de la commune. Au
31 septembre 2011, le bâtiment était toujours en friche. Non seulement le programme de
construction de loge
ments privés et sociaux n’a pas abouti, mais la commune attend toujours
son marché couvert ainsi que son musée destinés à redynamiser cette partie du centre-ville.
Le procès-
verbal du conseil municipal du 11 mai 2009 fournit un élément d’explication du
recours à cette modalité de paiement inhabituelle. Le maire, M. Bayrou, indique sa préférence
pour un financement privé plutôt que public, compte tenu du coût d’une telle opération, qu’il
estime à un minimum de
1,5 M à 2 M€
, et que la commune ne peut pas assumer.
Il apparaît donc clairement que le procédé de la dation par construction d’ouvrages publics a
été utilisé comme un moyen de réaliser des investissements que la ville n’avait pas les
moyens de financer.
Il convient cependant de noter que le coût évoqué par le maire pour la construction d’un
marché couvert (1,5 à 2 M€)
est quatre fois supérieur au montant total du loyer prévu sur
toute la période (999
€ par mois sur 30 ans, soit 360
000 €).
Il est dès lors légitime de
s’interroger sur l’intérêt que pouvait tirer l’acquéreur privé de cette opération. La délibération
du 20 novembre 2006, votée à l’unanimité moins une abstention, fournit un début de réponse
à cette question puisqu’elle prévoit que «
le group
e d’investisseurs britannique bénéficie d’un
pacte de préférence sur les terrains propriétés de la ville incluses dans la ZAC Durance aux
conditions et charges exposées dans le compromis ci-joint »
.
Le compromis indique à ce propos que «
ce pacte aura une durée de validité égale à celle de
la présente convention »
alors que cette convention préparatoire à la vente ne mentionne
aucune durée ni d’ailleurs l’acte notarié dans lequel a finalement été inscrit le pacte.
Une telle clause de préférence
n’apparaît
pas en tout état de cause de nature à favoriser au
mieux les intérêts financiers et stratégiques de la commune.
40/59
3-3-3 Une pratique réitérée
Bien que la pratique du paiement en dation soit risquée, d’un intérêt financier discutable, et
peu usitée, il convient de remarquer que la commune de Briançon y a recouru, ou a envisagé
d’y recourir, à plusieurs reprises.
Il avait ainsi été question de paiement en nature pour la vente de l’ancien bâtiment de la
direction départementale de l’équipement (DDE) situé
dans la ZAC Durance, que la commune
avait racheté à l’Etat
en janvier 2008. Il est également évoqué dans deux procès-verbaux de
conseil municipal que la société anglaise bénéficiaire du pacte de préférence pourrait réaliser
la passerelle du Prorel
17
en lien
avec l’acquisition du bâtiment de la DDE.
Si ce projet ne s’est pas concrétisé en raison de la défaillance de la société pressentie, le
paiement en nature a de nouveau été utilisé, cette fois dans le cadre de la cession de la maison
de l’éducation à la SCI du Centre, pour y construire un immeuble d’habitation.
Il a ainsi été
décidé par délibération du conseil municipal du 19 décembre 2006 que la société acquéreuse
du bien règlerait une partie du prix de vente par la réalisation de 15 parkings. Or, l
’acte
de
vente n’en prévoyait que 11 et au final il n’y
aura que 9 places de parking pour la commune et
elles seront livrées avec plusieurs mois de retard.
Dans cette dernière opération, la ville a cependant réussi à mieux sauvegarder ses intérêts que
pour La Schappe, car elle a pu finalement être indemnisée des parkings manquants dans le
cadre d’une transaction avec l’acquéreur
.
3-4
L’acquisition de places de parkings au sein de l’immeuble «
l’Aigle Bleu
»
Cette opération remonte à 2003. Le 23 juillet 2003 un
opérateur immobilier d’envergure
nationale signe en effet un compromis avec un propriétaire privé
en vue de l’achat d’une
parcelle de terrain de 1 660 m² située en bordure de la rivière la Guisane et à proximité de la
télécabine du Prorel.
Cet opérateur obtient en septembre 2003, un permis pour construire, en partie sur ce terrain
privé, mais aussi sur un terrain mitoyen, propriété de la ville, un immeuble en R + 5 de
59 logements développant au total une SHON de 4 412,85 m².
La demande de permis précise que cet immeuble comprendra deux étages «
en sous-sol
»
incluant 219 places de «
parking public
» (plus 19 places en surface).
En avril 2004, la société Bérard-Abelli, entreprise briançonnaise de construction et de
promotion immobilière, qui était associée depuis le départ au projet, achète le terrain privé en
se substituant ainsi à l’opérateur initial, puis le revend à la SCI l’Aigle Bleu représentée
par M. Bérard.
La SCI l’Aigle Bleu obtient en août 2006 le transfert du permis de construire à son
profit.
17
Procès-verbal du 11 février 2008 et procès-verbal du 11 mai 2009 : «
La réhabilitation de la passerelle
du
Prorel, on est parti après dans une hypothèse dans laquelle c’était un aménagement privé qui pouvait la
réaliser
».
41/59
Le 23 juillet 2007, le conseil municipal décide
de vendre à la SCI l’Aigle Bleu le terrain
municipal, voisin du terrain privé déjà acquis par la SCI,
d’une surface de 2 460 m²
,
moyennant le paiement d’un prix de 450
000
€. Il convient de pr
éciser que ce terrain
municipal servait jusque-là de parking pour les utilisateurs de la télécabine du Prorel,
et qu’il
constituait un élément
d’un ensemble plus vaste dont une partie avait été mise
à la disposition,
par la commune, de l’exploitant du
casino, pour la construction de ce bâtiment.
Les 26 et 28 décembre 2007,
l’acte de vente du terrain municipal à la SCI l’Aigle Bleu
est
effectivement signé. Cette dernière propose par écrit à la commune le 13 août 2008, de lui
vendre 174 emplacements de stationnement (25 en surface ; 87 au niveau n-1 ; 62 au niveau
n-2)
situés dans l’ensemble immobilier construit en partie sur le terrain municipal acquis fin
2007, et ce pour un prix de 4 330
000 € TTC
18
.
Le 3 décembre 2008 le maire écrit une lettre à M. Bérard dans laquelle il lui «
confirme la
volonté de la commune
de Briançon
d’acquérir
à cet emplacement stratégique (Casino de
Jeux, Gare de départ de la télécabine du Prorel, Centre-Ville)
les places de parking
que vous
me proposez
» (passages soulignés par la chambre).
Le 6 février 2009 un entrepreneur local, ancien conseiller municipal, remet au maire, à sa
demande,
un rapport d’
«
évaluation »
du «
coût de construction à prix coûtant
» de ces
emplacements de parking. Il conclut dans son rapport à «
un coût entreprises TTC des
parkings souterrains des niveaux R-1 et R-2 et de surface, avec traitement de surface de
l’esplanade pour les 174 emplacements de 4
191
598,31 € TTC, soit un prix à l’emplacement
de 23
744,82 € TTC.
Que nous pouvons comparer à des prix moyens qui sont relevés en
région PACA pour ce type d’ouvrage avec fondations spéciales et berlinoises, qui se situent
entre 21 528
€ et 23
920 € TTC au même niveau de finition
».
En mars 2009, M. Bérard écrit à nouveau à la
mairie pour indiquer qu’il r
amène le prix
proposé à 4 195
000 € TTC. Le 11 mai 2009 le conseil municipal
autorise par une délibération
n° 71-
09 l’acquisition de 174 emplacements de stationnement au sein de l’ensemble
immobilier
l’Aigle Bleu au prix forfaitaire de 4
195 000
€ TTC. Le
même jour le conseil
municipal adopte une autre délibération (n° 65-
09) sur les parkings de l’Aigle Bleu
arrêtant
«
le plan de financement permettant l’acquisition projetée
».
Enfin, le 29 juin 2009, le maire de Briançon, M. Bayrou, et M. Bérard, pour la
SCI l’Aigle
Bleu, signent
l’acte de vente en état futur d’achèvement (VEFA) à la ville de différents
volumes de l’immeuble l’Aigle Bleu comprenant notamment 174 emplacements de parking
19
mais aussi l’esplanade située en bordure de l’artère principale moyennant le paiement d’un
prix de 4 195
000 €
.
Cette opération à la chronologie longue et complexe appelle de nombreuses remarques.
18
Sollicitée par la
chambre, la ville n’a pas pu retrouver une copie de cette lettre pourtant très importante.
19
A savoir 62 emplacements au niveau n- 2 (faisant partie du volume 2000), 87 emplacements au niveau n- 1
(faisant partie du volume 3000) et 25 places de stationnement en surface (faisant partie du volume 5000).
42/59
3-4-1 Des irrégularités importantes et répétées
Le problème posé par le recours à un contrat de VEFA
La VEFA à des personnes publiques
La vente en l’état futur d’achèvement
(VEFA) est un contrat par lequel un tiers construit un
ouvrage dont il revend une partie à un client au fur et à mesure de la construction de cet
ouvrage (art. 1601-3 du code civil).
Dans ce type d’opérat
ion, le vendeur conserve les
pouvoirs de maître de l’ouvrage jusqu’à la réception des travaux.
Le juge administratif a encadré le recours à la VEFA par les personnes publiques. Dans son
arrêt
Région Midi Pyrénées
, de 1991
20
,
le Conseil d’Etat indique ains
i que les personnes
publiques sont libres d’utiliser des formules alternatives aux marchés publics
,
sauf s’il s’avère
qu’en l’
utilisant elles commettent un détournement de procédure. Ainsi, ces dernières sont
libres de procéder à l’acquisition de biens imm
obiliers au moyen de contrats de VEFA.
Toutefois, il y aura détou
rnement de procédure lorsque, comme dans l’espèce en cause dans
l’arrêt, 1°)
l’objet de l’opération consiste en la construction même d’un immeuble pour le
compte de la collectivité publique, 2°)
l’immeuble est entièrement destiné
à devenir sa
propriété et 3°) il a été conçu en fonction des besoins propres de la personne publique.
Dans un arrêt postérieur, du 14 mai 2008,
Communauté de communes de Millau-Grands
Causses
,
le Conseil d’Etat
semble énoncer
qu’une s
eule des trois circonstances suffirait à
écarter la qualification de VEFA :
«
Considérant que pour juger illégal le recours à la vente en
l'état futur d'achèvement, la Cour administrative d'appel a énoncé que l'immeuble était dans
son ensemble destiné à devenir la propriété du district et que les travaux décidés par la
délibération attaquée étaient conçus pour les besoins propres de celui-ci ; qu'ainsi la
communauté de communes n'est pas fondée à soutenir que la Cour aurait commis une erreur
de droit faute d'avoir fait application de l'ensemble des critères dont dépend l'illicéité du
recours, par les collectivités publiques à la vente en l'état futur d'achèvement
».
Par ailleurs,
selon le Conseil d’Etat,
le caractère substantiel des modifications demandées par
la communauté de communes concernée a confirmé
le fait que l’immeuble était bien conçu en
fonction des besoins propres de la collectivité publique et a conduit à rétablir la réalité de la
maîtrise d’ouvrage
,
entraînant l’illégalité du r
ecours à la VEFA.
Analyse des circonstances de la construction et de l’acquisition des
parkings de l’Aigle Bleu
Dans un courrier du 6 février 2009 adressé à la personne chargée d’évaluer le prix des
parkings, M. Bérard apportait des précisions sur les ci
rconstances qui l’avaient conduit à les
construire. Il indiquait ainsi (les passages soulignés le sont par la chambre, les majuscules
sont dans le texte) que «
depuis 2003, la commune de Briançon
(lui)
demande d’étudier la
possibilité de réaliser un MAXIMUM de parkings sur le terrain mitoyen du casino de jeux
3,
rue René Froger en utilisant au maximum le terrain jusqu’à ses limites.
La volonté de la commune au départ était de pouvoir obtenir 100 places au niveau n-1 mises
à disposition du public et 60 places au niveau n-2 pour mise à disposition des clients du
casino, suivant convention en vigueur à l’époque, plus 20 à 25 places de surfaces.
C’est lors d’une réunion, le 07/09/2006, en présence du directeur des Services Techniques,
des responsables du casino de jeux, des responsables de la SEREP (gestionnaire des
parkings)
que l’on m’a demandé de prendre les places restantes pour la résidence au
niveau n - 2.
20
CE, Sect., 8 février 1991.
Région Midi Pyrénées c/ syndicat de l’architecture de Haute Garonne
.
43/59
Cette demande me gên
(ait)
car cela m’oblige
(ait)
à descendre les escaliers et l’ascenseur du
bâtiment au niveau n -
2 alors que j’aurais pu me contenter de les arrêter au niveau
n - 1 ; il
en est de même pour les alimentations et réseaux.
Il faut savoir que, lors d’une réunion le 02/09/2004, alors que le maire de la commune de
BRIANCON était Monsieur Samuel PETERMAN,
la mairie me demandait d’étudier un
troisième niveau de parking sous le niveau de la rivière la GUISANE.
J’avais alors posé une
seule question : qui paye ?
Dès le départ (2004/2005), le maire de BRIANÇON souhaitait à cet emplacement un hôtel ou
une résidence de tourisme (lits chauds). Après plusieurs études, devant le refus des groupes
hôteliers de prendre en charge un hôtel ou une résidence de tourisme à cet emplacement
(ACCOR
–
Claude FOUSSE, ODALYS, G.F.H, LAGRANGE, OCEANIS, etc.) nous avons
décidé de réaliser une résidence d’appartements classiques pour résidences principales ou
secondaires.
D’où la dénomination initiale du permis de construire.
Nous avons commencé à commercialiser le projet et douze (12) contrats de réservation ont
été signés.
Puis, début 2007, on me présente le groupe anglais SPACE avec qui je commence à travailler
(ADRET Chantemerle, SCHAPPE, JULLIEN, etc.).
Nous parlons ensemble de l’Aigle bleu, ils se montrent intéressés par une résidence de
tourisme à cet emplacement et se font forts de la commercialiser et de la gérer.
La mairie est très intéressée par cette nouvelle proposition et envisage de faciliter la chose en
insérant dans le règlement du PLU des mesures incitatives pour les résidences de tourisme
dans certaines
zones dont celle dans laquelle est implantée l’Aigle Bleu. Ces mesures sont
notamment le nombre de places de parkings nécessaires par appartement en résidence de
tourisme.
Décision est alors prise de réaliser une résidence de tourisme incluant tous les appartements
prévus.
Je casse à ce moment-là les douze compromis de vente signés et rends les chèques de
réservation aux clients (pari audacieux !).
Enfin, je vous rappelle que si la résidence de tourisme avait été réalisée avec uniquement les
places de stationnement nécessaires à celle-ci en fonction des règlements en vigueur, il
suffisait que je réalise un seul sous-
sol sous l’immeuble
conformément à la simulation établie
par le bureau d’études et économiste SETOR à Marseille. Dans ce cas, 33 places de
stationnement en sous-
sol pouvaient être créées, plus autant de places à l’air libre
!
(…)
Il est évident, et la simulation fournie le démontre, qu’avec les mêmes prix unitaires au
départ, le coût de la place de parking dans les deux cas n’est pas du tout le
même et varie
quasiment du simple au double.
Mais sachez que ce n’est pas du tout moi qui ai tenu à
réaliser ce grand parking
».
Si l’on en croit M. Bérard, et son courrier très circonstancié, les caractéristiques du parking
ont donc été très fortement dé
terminées par la commune, qu’il s’agisse du nombre de places,
de la création d’un 2
ème
sous-
sol, et jusqu’au changement de destination de l’immeuble en
résidence de tourisme ainsi qu’à la modification du PLU qui permettaient de consacrer
davantage de places de stationnement publiques. Selon M. Bérard, le parking a donc été
conçu avant tout selon les besoins de la commune.
M. Bayrou laissait
au contraire entendre, dans le courrier de demande d’évaluation du prix des
parkings du 1
er
décembre 2008, qu’il aur
ait reçu une proposition de vente une fois les
parkings quasiment achevés («
La commune de Briançon a été approchée par le constructeur
d’un immeuble d’habitation qui compte en sous
-sol les espaces nécessaires à la réalisation
d’environ 200 places de statio
nnement non boxées
.
Le constructeur propose de vendre ces
places à la commune à prix coûtant»
)
.
On notera cependant que le maire pouvait difficilement
demander une expertise et reconnaître, dans le même temps, que ces places avaient été
commandées par la commune elle-même, et depuis plusieurs années
44/59
Interrogé
au cours de l’instruction, M. Bayrou a d’ailleurs quelque peu modifié sa
présentation de la chronologie en indiquant à la chambre que la commune avait été sollicitée
avant que les parkings ne soient
construits, mais en ajoutant qu’elle avait renvoyé sa réponse
après les élections municipales de 2008, et que «
le p
étitionnaire s’
(était)
engagé seul dans cet
aménagement avec l’engagement que si nous étions intéressés, il nous les vendrait
à prix
coûtant
»
21
.
Cette explication apparaît cependant peu crédible, même si elle se rapproche de la
présentation des choses faite par M. Bérard. Il est en effet difficilement imaginable, du point
de vue de la rationalité micro économique de l’entrepreneur, que ce pro
moteur privé se soit
engagé seul dans la réalisation d’un équipement aussi co
ûteux, à Briançon, sans avoir la
certitude de trouver un acquéreur qui lui permettrait de rentabiliser l’opération.
De même, on comprend mal la motivation du promoteur lorsqu’il s’engage à céder les
parkings à prix coûtant, sans chercher à dégager de marge sur l’opération.
Il convient en outre de relever que la commune était, au minimum, informée de la
construction, sur un terrain qu’elle avait elle
-même vendu au promoteur et qui tenait lieu
jusque-là de parking, de places de stationnement en sous-sol, puisque le permis de construire
accordé en 2003 par le maire, avant même la vente du terrain municipal, le précisait
expressément.
De même, un courrier de juin 2006 des services f
iscaux chargés d’évaluer le prix du terrain
municipal à vendre indiquait déjà clairement que celui-ci était notamment destiné à construire
des emplacements de parking souterrains qui devaient ensuite être rachetés par la commune.
Ce courrier rappelle en ef
fet au maire qu’il a «
demandé une nouvelle évaluation d’un terrain
de 2 407 m
2
situé dans la ZAC des Cros, avec le droit de construire un bâtiment à usage
d’habitation et garages d’un SHON de 2
000 m
2
et
160 places de stationnement souterrain
destinées à être acquises par la commune dans le cadre de la
création d’un
parking public
(souligné par la chambre). C
ompte tenu de la situation très favorable du terrain et des droits
à construire qui lui sont attachés, sa valeur vénale actuelle ne paraît pas inférieure
à 450 000
€
»
.
En tout état de cause, q
ue l’on se
situ
e dans l’hypothèse où ces places auraient été
commandées dès le départ (2003) par la ville à un promoteur auquel M. Bérard a succédé,
hypothèse la plus probable au vu de ce qui précède, ou que ces places aient été construites à la
seule initiative du promoteur, qui aurait attendu août 2008 pour les proposer officiellement à
la ville, et mai 2009 pour les vendre effectivement,
alors qu’elles étaient à cette époque
pratiquement réalisées, la procédure
retenue de l’achat direct n’est acceptable
dans aucun de
ces deux cas. Elle contourne en effet, dans les deux hypothèses, les obligations qui pèsent en
matière de commande publique sur les collectivités locales et notamment la nécessité de
procéder à une
mise en concurrence lorsqu’elles décident de construire ou d’acheter un bien.
La ville a en effet, dans le meilleur des cas, laissé un promoteur-constructeur bâtir un
équipement complexe et coûteux, dont elle était la seule à avoir l’utilité,
et qu’il a a
insi pu lui
vendre sans être mis en concurrence avec d’autres prestataires potentiels. Dans
le pire et le
plus probable des cas, elle a commandé elle-même directement à un promoteur-constructeur
un équipement public, sans le mettre en concurrence et de surcroît sans négocier
préalablement son prix,
qui n’a été défini qu’une fois l’équipement réalisé, dans le cadre d’un
accord de gré à gré.
21
Réponse de M. Bayrou du 12/09/2011.
45/59
Le maire a certes pris la précaution de demander
des évaluations et notamment celle d’un
professionnel qui a joué un r
ôle d’expert,
avant de faire délibérer le conseil municipal, mais
elles sont intervenues a posteriori, une fois les emplacements de stationnement construits, ce
qui en relativise singulièrement la portée et l’intérêt et qui, en tout état de cause, n’est pa
s de
nature à couvrir l’irrégularité majeure qui entache, à sa base, cette opération, et qui peut en
expliquer le coût particulièrement élevé.
M. Bérard
soutient certes que ce coût élevé est uniquement dû à la situation de l’immeuble et
au fait que la construction de deux étages de parking en sous-
sol, dont il n’avait pas l’utilité
pour sa résidence, à proximité immédiate d’une rivière, a nécessité des travaux
supplémentaires importants (fondations spéciales, cuvelage du n - 2, notamment) par rapport à
un parking classique.
Cette explication est sans doute en partie exacte. I
l convient cependant de relever qu’en
décidant d’acheter les parkings une fois qu’ils étaient
déjà en très grande partie construits, la
ville ne s’est pas mise dans une situation lui permettant d’étudier objectivement, avant de
prendre sa décision,
l’opportunité d’un investissement de
cette taille, à cet emplacement, sa
compatibilité avec les moyens financiers de la commune et de s’assurer qu’il serait réalisé au
meilleur coût.
L
’étud
e de
l’expert
sollicité par la commune mentionne
d’ailleurs que le gros œuvre a été
réalisé sans mise en concurrence. Or,
l’entreprise concernée app
artient au groupe de
M. Bérard. Il apparaît dans ces conditions par principe assez difficile de déterminer a
posteriori si le coût de cette prestation était conforme aux prix du marché. Il aurait en outre
été sans doute préférable pour réaliser cette étude très délicate de choisir un expert qui soit
moins impliqué dans la vie publique locale
22
.
De nombreuses autres irrégularités
Il convient de relever
d’autres irrégularités dont l’accumulation pose problème. Il apparaît
ainsi :
-
qu’une
prorogation du permis de construire a été accordé
e sur la base d’une demande
qui a
été antidatée pour échapper à des contraintes de délais qui avaient expiré, comme en atteste
une note du responsable du service de l’urbanisme en date du 1
er
septembre 2005 ;
-
que le promoteur a démarré son chantier
23
avant d’être propriétaire du terrain municipal
24
,
ce qui démontre une grande confianc
e en l’avenir
;
-
l’esplanade, ayant vocation à devenir publique, et qui est située sur une partie de la dalle
des parkings, côté rue principale, a été incluse dans l’acte de vente des parkings, alors que
le conseil municipal n’a jamais autorisé cette acqui
sition
qui n’était en rien indispensable
;
-
comme le souligne le rapport
de l’expert
en pages 4 et 5, une demande de modification du
permis de construire aurait dû être déposée pour acter, d’une part, le changement
d’affectation de l’immeuble en résidence de tourisme et, d’autre part, la réduction du
nombre de places de parking (203 places de stationnement réalisées au total, contre 238
prévues dans le permis de construire) ;
22
Ce conseiller municipal jusqu’en 2008 s’est présenté aux élections m
unicipales de 2008 et de 2009.
23
Le 14 août 2006 si l’on en croit la déclaration d’ouverture de chantier déposée par le promoteur
.
24
L’acte de vente n’a été signé que les 26 et 28 décembre 2007
.
46/59
-
selon le rapport
de l’expert
, le PAZ de la ZAC sur laquelle ce bâtiment est construit
imposait au promoteur la réalisation de 57 places pour les
besoins propres de l’immeuble
;
u
ne note du directeur de l’urbanisme
de la commune en date du 16 janvier 2004, qui prend
la même base juridique, arrive à un résultat très proche (55 places)
; si l’on retire du
nombre de places effectivement réalisées (203) le nombre de places cédées à la ville (174),
la résidence ne dispose donc pour ses besoins propres que de 29 places ; il manque donc au
minimum 26 places ; la non réalisation de places de stationnement imposées par des règles
d’urbanisme débouche
normalement
sur le versement à la commune d’une participation
pour non réalisation de places de stationnement ;
-
de manière plus anecdotique, il apparaît que la ville a cédé, parmi les terrains vendus à la
SCI
l’Aigle Bleu, une parcelle d’une surface de 55 m
²
qu’elle ne pouvait pas vendre
puisqu’elle l’avait déjà mise à disposition du casino pour la construction de son bâtiment.
3-4-2
Un équipement dont l’utilité n’a pas été préalablement étudiée et n’apparaît pas
avec évidence
La décision d’acquérir ce parking, particulièrement coûteux pour le budget de la commune
(plus de 50 % des dépenses d’équipement de l’exercice 2009) n’a reposé sur aucune étude de
besoins. Dans sa réponse à la chambre, M. Bayrou le justifiait en expliquant que :
«
Le terrain nu permettait le stationnement d’une petite centaine de voitures dans des conditions
précaires (parking non goudronné, non balisé et non délimité). Avant de commencer à construire, le
pétitionnaire nous a demandé si nous étions intéressés pour acheter éventuellement un certain nombre
de places de parking. Nous n’avons pas eu besoin d’effectuer une étude puisqu’il ne s’agissait pas de
créer des places supplémentaires mais d’éviter que l’on ne supprime la c
entaine de places existantes.
Notre réponse fut de renvoyer la décision après les élections municipales de 2008 et le pétitionnaire
s’est engagé seul dans cet aménagement avec l’engagement que si nous étions intéressés, il nous les
vendrait à prix coûtant.
Toutes les stations de sports d’hiver, sans exception, construisent aujourd’hui
des parkings souterrains à proximité immédiate de leur gare de départ de remontées mécaniques. Je
ne voulais pas que l’on me reproche d’avoir contribué à créer des difficultés
supplémentaires au
Prorel qui comporte suffisamment de handicaps par lui-même et il est de notoriété publique que
j’étais opposé à sa construction dans le contexte où il avait été réalisé.
Il y a dans cette décision un principe de continuité républicaine pour essayer de faire un peu fructifier
un investissement public décidé par d’autres (dont l’actuel maire) et auquel j’étais opposé à
l’origine»
.
Ces arguments apparaissent peu convaincants au regard de la sous-occupation des parkings
déjà existants et du
faible niveau d’activité de la télécabine du Prorel.
Le «
plan de gestion, de conservation et de développement durable
» établi par la commune
elle-même en juillet 2007 dans le cadre de la candidature du réseau Vauban au patrimoine
mondial de l’humanité
mentionnait ainsi que «
l’offre en stationnement public
(à Briançon)
est abondante et bien implantée. (…) Certains parkings restent sous occupés malgré leur
proximité du centre (Colaud, Durance)
».
Deux parkings souterrains étaient ainsi déjà en service à cette époque à Briançon, le parking
Val Chancel et le Silo du Prorel et tous les deux étaient manifestement sous-occupés, comme
l’indiquait le rapport
du délégataire de la concession de stationnement
25
qui soulignait que
«
les deux parcs n’ont pas la fréqu
entation souhaitée
».
25
Rapport de la SEREP en 2008.
47/59
Il convient surtout de noter que le nouveau parking de l’Aigle Bleu se situe à moins de
100 mètres du parking Silo du Prorel. Ce dernier, qui comprend 188 places, dont seulement
173 en exploitation, affichait un taux d’occupation trè
s faible avec, en 2008, un chiffre
d’affaires mensuel par place de 5,75 €. Même en février, période de fréquentation la plus
forte, le nombre de passages par jour (mesuré par le nombre de sorties) était de
seulement
60,2, soit un taux d’occupation d’enviro
n 35 % sur la base de 173 places
26
. Ainsi,
ce parking pouvait absorber, même en très haute saison, la centaine de véhicules qui
stationnait auparavant sur le terrain de l’Aigle Bleu.
Pour compléter ce point, il est nécessaire de préciser que la construction de la passerelle du
Prorel
, à l’époque toujours à l’état de projet,
devait permettre de relier la station de départ de
la télécabine avec l
’autre
parking public du Val Chancel, lui aussi sous-utilisé
27
.
Par ailleurs, Briançon ne peut pas être comparée au
x stations de sports d’hiver classiques
puisqu’il s’agit d’une ville et non d’une station. La gare de départ de la télécabine du Prorel
présente en outre, depuis son ouverture, au début des années 90
, un faible niveau d’activité
qui ne pouvait raisonnablem
ent justifier la construction d’un parking de 174 places destiné
aux usagers de cette remontée mécanique.
Il ressort ainsi des rapports de la délégation de service public de gestion du domaine skiable,
que le taux de remplissage hebdomadaire de la télécabine du Prorel est globalement inférieur
à 15 % et que Briançon représente moins de 10 % des passages de l’ensemble du domaine
skiable de Serre Chevalier
28
.
Fréquentation de la télécabine du Prorel
Appareil
Passage potentiel
Passage réel 2005/2006
Passage réel 2008/2009
TC PROREL 1
117 600
18 866
16,04 %
12 696
10,80 %
TC PROREL 1 NOCTURNE
7 200
1 333
18,51 %
NC
NC
TC PROREL 2
117 600
20 276
17,24 %
20 145
17,13 %
Source : Rapport de délégation de service public du domaine skiable de Serre chevalier
P
art des passages à Briançon par rapport à l’ensemble du domaine skiable
de Serre Chevalier
Année
2003/2004
2004/2005
2005/2006
en %
9,41
7,66
8,92
Source : Rapport de délégation de service public du domaine skiable de Serre chevalier
Dans ce contexte, la réalisation de ce parking souterrain par respect du «
principe de
continuité républicaine
(…)
pour faire fructifier un investissement public
», comme le
soutenait
M. Bayrou, alors que cet investissement n’avait pas atteint les objectifs fixés,
s’apparen
te en réalité à une fuite en avant.
La construction du parking de l’Aigle Bleu ne s’imposait donc pas avec évidence, surtout au
regard de son coût. A tel point que, outre l’argument de la
dimension « stratégique » de
l’équipement, d’autres arguments, de p
ure circonstance, ont été mis sur le même plan pour
obtenir du conseil municipal un vote favorable
29
à cette acquisition, le 11 mai 2009.
26
Rapport d’activité SEREP 2
008 : 1
806 sorties en février, soit 60,2 par jour et donc un taux d’occupation
d’environ 35 % apprécié de façon large ne faisant pas intervenir la durée du stationnement.
27
Le chiffre d’affaire mensuel par stationnement n’était que de 15,86 € en 2008.
28
Le domaine skiable de Serre Chevalier regroupe Briançon, Monetiers, Chantemerle et Villeneuve- données
2005/2006.
29
Délibération du 11 mai 2009 : 26 POUR ; 0 CONTRE ; 6 ABSTENTIONS.
48/59
La délibération relative à l’acquisition du parking a ainsi été liée à celle relative au
reversement anticipé du fond de compensation de la TVA (FCTVA) dans le cadre du plan
national de relance de l’économie. Le dispositif prévoyait en effet le versement en 2009 des
attributions du fonds au titre des dépenses réalisées en 2008 pour les collectivités qui
s’engageaient, par convention avec le représentant de l’Etat, à accroître leurs dépenses
d’investissement en 2009. L’acquisition des parkings (ainsi d’ailleurs que la reprise du
restaurant d’altitude, évoquée plus loin dans le présent rapport) a donc été présentée comme
pe
rmettant d’accroître les dépenses d’investissement de la commune et d’être éligible au
versement anticipé du FCTVA.
L’avenant n° 3 au contrat de ville signé
avec le département, qui consistait à réaffecter des
subventions ne pouvant être utilisées sur les opérations initialement prévues en raison du
retard pris sur les investissements concernés, a également été voté au cours de cette même
séance du conseil municipal. La nouvelle affectation des subventions sur le parking de l’Aigle
Bleu, qui supposait don
c l’acquisition de cet équipement, a alors été présentée comme le seul
moyen de ne pas définitivement perdre ces subventions.
Enfin, l’argument, assez surprenant, selon lequel la résidence hôtelière construite
au-dessus
du parking ne pourrait voir le jour
, si la commune ne se mettait pas en mesure d’acheter ces
places de parking, fut également avancé par le maire au cours du débat.
3-4-3 U
n équipement dont l’exploitation risque d’être coûteuse
pour la commune
L’exploitation de cet équipement va
entraîner des coûts certains avec, en revanche, des
perspectives de recettes très aléatoires.
Au niveau des coûts,
on relèvera notamment que :
-
l’avis de la DDE sur la base duquel le permis de construire a été accordé impose la
présence permanente
d’un agent
pour surveiller le parking pendant toute la durée de son
ouverture au public ;
-
l’acte de vente des parkings prévoit page 55 que le lot volume 4000 (esplanade publique)
dont la commune est propriétaire «
prend en charge en totalité l’entretien de cette
esplanade (déneigement, nettoyage, entretien de la surface, barrière, escaliers,
éclairage…)
»
; or le déneigement sera d’autant plus complexe à effectuer que la dalle ne
supporte pas le passage d’engins mécaniques
; quant aux escaliers, leur nécessité
s’explique
par le fait que cette esplanade,
réalisée pour la ville, sans qu’elle ne l’ait jamais
expressément demandé, est surélevée par rapport au niveau de la voie publique.
Les recettes
pouvant être tirées de l’exploitation du parking sont en revanche beaucoup p
lus
incertaines :
-
Si la ville supporte donc
une partie des coûts d’aménagement final et d’entretien de
l’esplanade, en revanche elle n’encaisse pa
s
les recettes tirées de l’exploitation de cette
esplanade puisque l’acte de vente prévoit une servitude d’occupation de l’esplanade au
profit du lot 1
000, lot qui n’
a pas été vendu à la ville. Cette dernière ne bénéficiera donc
pas des recettes versées par les commerçants qui occuperont éventuellement l’esplanade
;
49/59
-
S’agissant des recettes tirées de l’explo
itation du parking lui-même, il convient de noter
que le contrat de redynamisation du site de défense (CRSD) de Briançon signé par l’Etat,
la commune, la communauté de communes, le conseil général et le conseil régional, en
juillet 2009, inclut l’acquisition et l’aménagement de ce parking dans la liste des opérati
ons
soutenues ; la fiche n° 8 relative à ce projet indique par ailleurs
qu’il a pour «
objectif de
proposer un produit packagé «remontées mécaniques + stationnement» (gratuité du
parking pour les titulaires du ticket des remontées mécaniques)
». Cette disposition qui
peut se comprendre en théorie, apparaît absurde en
l’espèce,
dans la mesure où les
remontées mécaniques sont exploitées par une société privée qui n’a rien à
voir avec la
ville ; on ne comprend donc pas pourquoi la ville devrait accorder la gratuité du parking au
seul bénéfice des usagers d’un autre équipement purement privé. Les arrêtés attributifs des
subventions et les conventions ne reprennent heureusement pas cette disposition dont
l’
applicabilité juridique est donc incertaine. Si la ville décidait finalement de rendre ce
parking payant, il resterait en tout état de cause à régler la question de la cohabitation
d’usagers payants avec des usagers gratuits, à savoir les habitants de la r
ésidence, mais
aussi les usagers du casino, puisque la ville s’est engagée à rétrocéder gratuitement
l
’utilisation de 50 à 60
places au casino pour ses clients. Il est donc peu probable que
l’exploitation de ce parking
produise des recettes substantielles,
même s’il
était décidé de
le rendre payant.
3-4-4 L
e plan de financement de l’opération était artificiellement équilibré
Selon la
délibération en date du 11 mai 2009, le plan de financement de l’opération se
présentait ainsi :
-
Conseil régional de PACA
701
505,02 €
-
Conseil général des Hautes-Alpes
1 181
113,48 €
-
Autofinancement ville :
- Redevance capitalisée DSP stationnement
1 000
000,00 €
- Prise en charge stationnement Etat
500
000,00 €
- Complément autofinancement
124
906,58 €
TVA (autofinancement)
687
474,92 €
Total TTC
4 195
000,00 €
Cet équilibre n’était
cependant
qu’apparen
t. Ainsi :
-
la subvention attendue du c
onseil régional pour la seule acquisition du parking (puisqu’il
s’agit bien seulement de cela
,
si l’on évoque un montant de 4
195
000 €
à financer) est de
560 700
€ et non pas
de 701
505 €
;
-
la subvention de l’Etat était
uniquement prévue pour l’aménagement du parking et non
pour son acquisition ;
-
l’inscription d’une redevance capitalisée de 1 M€ dans le cadre de l’attribution d’une
délégation de service public sur le stationnement ne repose sur aucun élément concret
puisqu’aucun exploitant n’avait pris un tel engagement
30
, d’ailleurs fort peu crédible
lorsque l’on sait que les parkings existants
étaient globalement déficitaires et que les
recettes qui pouvaient être attendues de l’exploitation de ce nouveau parking
étaient
particulièrement incertaines (voir plus haut) ;
30
Alors que dans sa réponse du 12/09/2011, Mr Bayrou indique que «
les délégataires ont répondu avec des
propositions intéressantes
», aucune offre n’a été retrouvée en
mairie.
50/59
Dans un courrier en date du 30 septembre 2009 adressé à M. Bérard, le maire a pourtant cru
opportun de «
confirme
(r)
que le financement de cette opération ne requiert pas de prêt
bancaire puisque nous avons décidé de l’inscrire au titre du Contrat de Redynamisation des
Sites de Défense, prévoyant des subventions régionale et départementale significatives
».
Au final, l’au
tofinancement mobilisé par la commune pour la seule acquisition du parking a
été de 1,766 M
€ au lieu des
0,125 M
€ annoncés dans la délibération
31
.
Dans ces conditions, il n’est pas étonnant que la commune ait rencontré des difficultés à
régler le prix de c
et équipement coûteux, qui n’était pas
intégralement financé, pour une part
significative de ce montage.
Sur un plan budgétaire et comptable, la commune a inscrit fin 2009 à son bilan cette dette
pour un montant de 4 153
050 €. Elle
en a réglé, fin 2009, une partie, à hauteur de 1 300
000 €
en utilisant les subventions encaissées du conseil général et du conseil régional. Le budget
primitif 2009 ne prévoyait cependant aucun crédit pour cette opération pourtant très
importante, envisagée de longue date, et qui était devenue certaine à la fin de 2008 (voir le
courrier du maire en date 3 décembre 2008 qui «
confirme
(à M. Bérard)
la volonté de la
Commune de Briançon d’acquérir (…)
les places de parking que vous me proposez
»). Cette
absence d’inscription confi
rme
l’insincérité du budget 2009.
Le solde de cette dette
(2 853
050 €) a été inscrit et payé sur le budget 2010.
L
’acquisition des parkings de l’Aigle Bleu s’est
donc accompagnée de nombreuses
irrégularités, au niveau du
procédé d’achat ainsi que
de différentes étapes de la
procédure, et a été mise en œuvre en dehors de tous
les principes de bonne gestion
(absence, notamment,
d’étude de besoins, de mise en concurrence
et de plan de
financement crédible en amont).
La ville se retrouve aujourd’hui
à devoir gérer et entretenir un nouvel
équipement
particulièrement coû
teux, qu’elle n’avait pas
en réalité les moyens de payer, dont
l’utilité n’est pas démontrée et dont l’exploitation sera très probablement déficitaire.
3-5 La reprise du chalet de Pralong
En
2009, soit la même année que l’acquisition du parking de l’Aigle bleu, la commune de
Briançon a repris dans son patrimoine le restaurant d’altitude, connu sous le nom du chalet
de «Pralong», qui était auparavant exploité dans le cadre de la délégation de service public du
domaine skiable.
Pour comprendre comment la commune de Briançon a été amenée à acquérir cet équipement,
il convient de préciser que le 8 août 1989, elle avait signé en qualité de délégataire avec la
commune de Puy Saint-Pierre, autorité organisatrice, une convention «
de construction et
d’exploitation de remontées mécaniques et d’aménagements destinés à la pratique du ski
alpin sur le territoire de la commune de Puy Saint-Pierre
» ayant notamment pour objet «
la
construction et l’exploit
ation du télésiège de Puy St Pierre ainsi que la construction et
l’exploitation des ouvrages annexes (alimentation en énergie,
restaurant d’altitude
…)
(souligné par la chambre)
nécessaires au fonctionnement normal et à l’exploitation du
domaine skiable
».
31
Réponse de la mairie au questionnaire n°5.
51/59
En 1993, une procédure d’appel d’offres fut lancée par la commune de Briançon pour la
construction d’un restaurant, dans le cadre d’un bail à construction, à proximité de
la gare
intermédiaire d’arrivée de la télécabine du Prorel, sur un terrain situé su
r le territoire de
Puy-Saint-Pierre, mais qui appartenait néanmoins à la commune de Briançon. Cette procédure
fut déclarée infructueuse pour des raisons qui n’ont pu être explicitées par la municipalité
actuelle.
En 1998, un contrat de délégation de service public (DSP) des remontées mécaniques
du Prorel fut conclu entre la ville de Briançon et la SEML Serre Chevalier Remontées
Mécaniques
jusqu’au 31
octobre 2006. Il prévoyait l’exploitation et la maintenance de zones
skiables ainsi que différents investissements, dont un télésiège, mais le coût de ces
investissement n’était
détaillé, ni dans le contrat de DSP, ni dans le cahier des charges.
L’article 8 du contrat précis
ait seulement que ces «
investissements sont portés à l’inventaire
B. L’autorité organisatrice s’engage à reprendre à son compte les annuités restant à courir et
remboursera au prestataire la partie non amortie de son autofinancement »
.
Le 26 janvier 2000, un avenant n° 3 à ce contrat de DSP fut conclu. Il avait pour objet de
substituer à la construction du télésiège prévue initialement,
la réalisation d’un restaurant
d’altitude dit de «Pralong».
Pour justifier cette modification, le préambule indiquait, d’une
part que les projets d’investissements initiaux n’avaient pu aboutir en raison d’u
ne absence
d’autorisation des communes propriétaires des terrains et que, d’autre part, «
le 3 août 1999,
la commission d’appel d’offres
(avait)
déclaré la consultation pour la construction du
restaurant d’altitude infructueuse
». Il s’agissait donc de la deuxième procédure d’appel
d’offres infructueuse relative à la construction du restaurant. Un procès
-verbal de carence
explique cette fois l’absence d’aboutissement de la procédure mais les éléments relatifs à cette
procédure d’appel d’offres n’ont pu être
retrouvés par la municipalité actuelle.
L’avenant
n° 3 prévoyait la réalisation du restaurant sur la base du cahier des charges de la
consultation de 1999 et chiffrait son coût à 1 067
143 €
, porté à 1 448
266 € par
un
avenant n° 5 du 4 mars 2003.
Le c
halet, d’une superficie de 1
845 m² sur 3 niveaux, fut mis en service le 1
er
décembre 2001
dans le cadre d’une exploitation en bail commercial.
Le 18 avril 2006 un arrêté préfectoral créa le SIVU (Syndicat Intercommunal à Vocation
Unique) du Prorel chargé de la construction
, du renouvellement, de l’entretien et
de la gestion
des remontées mécaniques et des aménagements et équipements destinés ou liés à la pratique
du ski sur le territoire des communes membres. Le SIVU devi
nt donc l’autorité organisatrice
du domaine skiable du Prorel en lieu et place de la commune de Briançon. Cet établissement
nouvellement créé procéda au renouvellement de la DSP d’exploitation du domaine skiable
qui arrivait à échéance, mais aucun des candidats ne souhaita, apparemment, reprendre
l’exploitation du restaurant d’altitude. Une nouvelle
DSP
n’intégrant pas le restaurant fut
alors signée avec la société Serre chevalier Valley SA (ex SCSD) qui appartient désormais au
groupe Compagnie des Alpes.
Il convenait dès lors de régler le sort du chalet qui était sorti de la DSP. Dans un courrier
du 7 décembre 2006, le sous-préfet de Briançon indiqua à la commune que le restaurant
devait être repris par l’entité organisatrice,
à savoir le SIVU du Prorel. Il confirma cette
analyse dans un nouveau courrier du 12 mars 2007. Il revint cependant dans un courrier du 8
août 2007 sur sa position initiale en indiquant que le restaurant était construit sur des parcelles
appartenant à la commune de Briançon et que, dès lors, «
il n’
(était)
pas impossi
ble qu’elle en
demeure propriétaire
». Il ajouta que ce chalet «
sembl
(ait)
emprunter aux deux régimes. Il
serait la propriété initiale de la commune au vu de la propriété des parcelles mais il est rangé
dans l’inventaire B des biens apportés par le concessionnaire et dont le transfert à l’autorité
organisatrice peut se faire par le moyen d’un rachat
».
52/59
Le 17 avril 2008 Serre Chevalier Valley adressa à la commune de Briançon une facture
de 1 506
018,35 € correspondant à la valeur nette comptable (VNC) du res
taurant et
constituant le montant de l’indemnité demandée.
Cette évaluation fut confirmée par un
cabinet
d’expertise comptable le 11 avril 2009.
Par délibération du 11 mai 2009, le conseil municipal prit acte du retour du chalet de Pralong
dans le patrimoine communal et fixa à 1 506
018,35 €, dont 212
733 € de régularisation de
TVA, le montant de la valeur nette comptable dudit bâtiment représentant l’indemnité due par
la commune à Serre-Chevalier Valley. Il décida également de reprendre les deux emprunts en
cours souscrits par la société pour la construction du restaurant, pour un montant
de 800 637
€.
3-5-1 De nombreuses fragilités juridiques
Une durée de convention de DSP anormalement courte au regard de
l’investissement réalisé et un contrat lacunair
e
Le rapport public annuel de la Cour des comptes publié en février 2011 relatif à la gestion du
domaine skiable en Rhône-Alpes souligne la durée excessive de conventions signées pour une
période de 30 ans et faisant l’objet, pour la plupart, de prolongat
ions de dix ans. La durée de
la DSP du Prorel, qui n’est que de 8 ans, contraste donc avec celle de ces DSP et apparaît de
ce fait particulièrement atypique.
Cette conclusion est confirmée par l’article L. 1411
-2 du code général des collectivités
territoriales (CGCT) qui prévoit que la durée des DSP ne doit pas «
dépasser la durée
normale d'amortissement des installations mises en œuvre
». On peut donc en déduire, a
contrario, qu’une durée de DSP largement inférieure aux durées habituelles d’amortissement
de remontées mécaniques, qui sont en moyenne de 22,5 ans, est anormalement courte. C’est
en effet ce type d’équipement qui doit être pris en compte en l’espèce, puisque le restaurant
d’altitude a été construit en substitution du télésiège prévu initialemen
t.
Par ailleurs, le cahier des charges de la DSP ne contenait aucune indication sur les modalités,
et notamment sur la durée, d’amortissement des biens construits par le délégataire
32
. Ce n’est
qu’au moment de déterminer la valeur nette comptable, à la fin de la délégation, qu’il a été
constaté que le délégataire avait notamment choisi d’amortir le restaurant sur 30 ans alors
même que la durée de la DSP n’était donc que de 8 ans.
Le contrat initial ne chiffrait pas, non plus, le montant des investissements à réaliser et ne
permettait donc pas d’évaluer l’équilibre économique général de la délégation.
En conclusion
, l’imprécision des conditions d’amortissement dans le cadre d’une durée
anormalement courte de la délégation n’a pas permis de sécuriser les co
nditions de
sortie de la DSP. Aussi, à l’issue de celle
-ci, la commune a-t-elle dû reprendre le chalet à
une valeur nette comptable très élevée dans la mesure où seulement quatre années de
dotations aux amortissements sur 30 avaient été réalisées.
Des clauses mal définies
La contradiction entre la rédaction de l’article 8 et celle de l’article 31
-1 de la convention de
DSP a rendu difficile la classification du chalet de Pralong soit dans les biens de retour soit
dans les biens de reprise. Or, le sort de c
es biens n’est pas identique à la fin de la délégation
de service public.
32
Paragraphe 8-22 du cahier des charges : «
Cet investissement, à la charge du prestataire, avec autofinancement
de 20 % et emprunt sur 15 ans sera inscrit à l’inventaire B. Il précisera le mode d’amortissement du bien».
Or,
l’inventaire n’a jamais été établi et la durée d’amortissement ne figure dans aucun document.
53/59
Les biens de retour
correspondent aux biens indispensables à l’exploitation du service public
qui font partie intégrante de la délégation et qui reviennent de plein droit et gratuitement à la
personne publique en fin de contrat. Les biens de retour étant considérés comme relevant de la
propriété publique « ab initio », leur transfert ne donne donc lieu à aucune indemnité au
bénéfice du délégataire en fin de contrat.
Ce principe de g
ratuité s’impose comme un principe central en matière de DSP dans la
mesure où l’exploitation de la délégation doit permettre au prestataire d’amortir son
investissement sur la durée du contrat, sous réserve que la durée initialement stipulée soit
respectée sans résiliation anticipée.
Les biens de reprise
sont, quant à eux, des biens qui, tout en faisant partie intégrante de la
délégation, ne sont pas indispensables à son exploitation. En conséquence, ils restent la
propriété du délégataire pendant toute
la durée du contrat et n’entrent dans la propriété de la
personne publique que si cette dernière en décide le rachat, au terme de la convention. La
collectivité délégante exerce do
nc un droit facultatif de rachat, l’évaluation des biens au terme
du contrat
s’effectue le plus souvent dans les termes d’une évaluation réelle lorsque la
convention n’en dispose pas autrement.
L’identification
des différents biens utilisés dans le cadre de la délégation de service public
fait en principe l’objet d’un inventaire
contractuel qui doit être complété tout au long de
l’exécution de la convention. Dans le silence du contrat, le juge administratif recourt à
l’interprétation commune des parties en tenant compte également du caractère indispensable
ou non de l’ouvrage pour
l’exploitation du service public.
Au regard de cette distinction fondamentale, la convention de délégation de gestion du
domaine skiable du Prorel contient des clauses contradictoires.
L’article 8 est en effet ainsi rédigé
: «
Investissements portés à l
’inventaire B
(biens fournis
par le prestataire) :
l’autorité organisatrice
s’engage à l’expiration de la convention
à
reprendre à son compte les annuités restantes à courir et remboursera au prestataire la
partie non amortie de son autofinancement
».
L’a
rticle 31-
1, relatif à l’expiration de la convention, indique, pour sa part, que «
les biens
fournis par le prestataire (inventaire B) pourront être repris par l’Autorité organisatrice à la
demande du prestataire, rachat à la valeur nette comptable ou à dé
faut à dire d’exper
t ».
La convention fait donc apparaître des incohérences en mélangeant les deux régimes des
« biens de retour » et des « biens de reprise », sans de surcroît avoir défini au préalable les
biens de retour et les biens de reprise de la délégation.
En effet, l’inventaire B auquel il est fait référence n’a, dans les faits, jamais été dressé. Et
même s’il l’avait été, le critère retenu («
biens fournis par le prestataire »
), n’aurait pas
permis de classer les biens entre ceux de retour et ceux de reprise, les biens de retour pouvant
être apportés par le délégant ou financés par le délégataire.
Par ailleurs, alors que l’article 31
-1 de la convention prévoit une simple faculté de rachat par
l’autorité organisatrice, l’article 8 mentionne un en
gagement de reprise par cette autorité
organisatrice.
En raison de ces difficultés juridiques, plus de deux ans de négociation ont été nécessaires
pour déterminer qui devait reprendre le restaurant d’altitude et selon quelles modalités.
54/59
Au final, suivant
l’analyse d’une deuxième expertise sollicitée par la commune (la première
ayant seulement vérifié le montant de la valeur nette comptable), il a été décidé de classer le
restaurant d’altitude parmi les biens de retour et d’indemniser le délégataire à la v
aleur nette
comptable, en considérant:
-
«
Que les aménagements de piste et le bâtiment de Pralong, réalisés par le délégataire ont
fait l’objet d’une commande expresse de
la
ville à travers les clauses de l’article 8 du
contrat initial et de l’avenant de 2
000, la ville étant autorité organisatrice, a priori seule
juge des aménagements nécessaires au fonctionnement du service : ils peuvent à ce titre
être considérés comme nécessaires au fonctionnement du service en ce que participant au
confort des usagers d
u service et permettant un stockage du matériel de l’exploitant.
-
que ces aménagements ont été réalisés sur les propriétés communales de Briançon ou sur
des propriétés privées grâce à la servitude prévue aux articles L. 342-20 du code du
tourisme ;
-
que si u
ne clause d’indemnisation de ces investissements a été prévue, cette clause ne
contrevient pas au principe du retour gratuit des biens dans le patrimoine de l’autorité
organisatrice, cette exigence du Conseil d’Etat n’étant a priori applicable qu’autant qu
e le
délégataire a eu le temps d’amortir son investissement, ce qui n’est évidemment pas le cas
ici, compte tenu de la très faible durée du contrat. Nous ne sommes donc pas ici dans une
hypothèse de rachat de biens mais d’indemnisation de leur valeur non a
mortie».
Ces fragilités juridiques du contrat initial, ont été particulièrement pénalisantes sur le plan
financier pour la commune de Briançon.
L’absence de distinction initiale formelle entre biens de retour et biens de reprise a en effet
conduit à cons
idérer que le restaurant d’altitude était un bien de retour au motif que, sa
construction ayant été demandée par l’autorité organisatrice, il était nécessaire au
fonctionnement du service public, ce qui est loin d’être démontré. Le fait que l’exploitation
du
restaurant n’ait pas pu être imposée dans la délégation suivante confirme le doute que l’on
peut avoir sur le caractère nécessaire de cet investissement.
La très faible durée du contrat initial a par ailleurs obligé la commune à indemniser le
délégata
ire à hauteur de la valeur nette comptable du restaurant, alors que, s’il s’agissait d’un
bien de retour en fin de délégation, le principe de gratuité aurait dû s’appliquer.
Le manque de lisibilité du contrat pouvait en outre exposer la commune à un risque fiscal
important qui
n’a jamais été évalué. En effet, le mode de
taxation du transfert est déterminé
par la qualification juridique du bien. Si l’opération avait été considérée comme une reprise, il
s’agissait alors d’un transfert de propriété qui aurait
fait l’objet d’un acte notarié et aurait donc
été soumis aux droits d’enregistrement, le bien étant achevé depuis plus de 5 ans
33
. La
commune ayant justifié le transfert comme étant un retour dans son patrimoine, elle a obtenu
de la direction générale des finances publiques le remboursement de la TVA sur le montant de
l’indemnisation dans le cadre du transfert des droits à déduction du délégant au délégataire.
3-5-2 Une opération coûteuse pour la commune de Briançon
Au final, la commune a dû reprendre dans son patrimoine ce restaurant pour le montant non
négligeable de 1,5 M€.
33
Le comptable avait d’ailleurs
, dans un courrier du 30/12/2009, assimilé cette opération à une acquisition et
demandé les justificatifs obligatoires tels que
l’avis des domaines
et
l’état hypothécaire
; il avait dans l’attente
suspendu le paiement du mandat.
55/59
Cette opération a pesé lourdement sur le programme d’investissement de l’année, même si
elle fut présentée au moment du vote par le conseil municipal comme une aubaine permettant
à la ville d’émarger au remboursement anticipé du FCTVA,
34
et a augmenté d’autant
l’encours de dette de la commune de Briançon dont le niveau se situait déjà très largement au
-
dessus de ses capacités de remboursement.
De plus, l’exploitation de ce restaurant d’altitude se révèle déficitaire. Les loyers perçus au
titre du bail commercial sont très inférieurs aux charges de gestion, comme il ressort du
tableau ci-dessous :
Résultat d’exploitation du restaurant d’altitude
CHARGES
(en €)
-
Eau Assainissement
-
Impôts et taxes
-
Assurances
-
Maintenance et gros entretien
-
Intérêts d’emprunt
-
ICNE
-
Dotation aux amortissements
2 760*
16 480
564
0
17 373
-4 690
51 731
RECETTES
(en €)
-
Loyer
57 280*
RESULTAT
- 26 938
Source : Direction des finances ville de Briançon et retraitements CRC
(*) Uniquement les charges et recettes afférentes à 2010
Ainsi, en 2010, le déficit d’exploitation du restaurant, à la charge de la commune, se monte à
27 000
€ pour 57
000
€ de recettes.
3-6 La gestion du patrimoine historique
3-6-1 Le patrimoine historique de Briançon
La ville de Briançon possède un patrimoine historique très riche qui est pour l’essentiel classé
ou inscrit à l’inventaire des monuments historiques. Un nombre important de fortifications
érigées par Vauban figure dans ce patrimoine :
Liste des monuments historiques de Briançon
Les édifices classés parmi les monuments historiques
-
Fort Dauphin (arrêté du 6 juillet 2007)
-
Fort des Salettes (arrêté du 14 février 1989)
-
Fort des Trois-Têtes (arrêté du 8 juin 1989)
-
Fort du Randouillet (arrêté du 26 janvier 1989)
-
Communication Y (arrêté du 8 juin 1989)
-
Pont d’Asfeld sur la Durance (arrêté du 5 décembre 1988)
-
Eglise (ancienne collégiale) (arrêté du 14 octobre 1931)
-
Eglise des Cordeliers (ancienne) (arrêté du 21 septembre 1982)
-
Immeuble dit ancienne maison du Roi, actuellement Palais de Justice (arrêté du 18/10/1994)
-
Maison des Têtes (arrêté du 18 février 1998)
-
Fortifications de la Ville Haute (arrêté du 13 août 1990)
34
Procès-verbal du conseil municipal du 11 mai 2009.
56/59
Les édifices
inscrits à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques
-
Chapelle des Pénitents Noirs : clocher (arrêté du 30 juillet 1973)
-
Fontaine des Soupirs (arrêté du 18 mars 1930)
-
Maison dite maison du Temple (arrêté du 5 février 1982)
-
Fort d’Anjou et ense
mble des terrains nus attenants (arrêté du 21 octobre 1986)
-
Redoute du Point du Jour et ensemble des terrains nus attenants (arrêté du 21 octobre 1986)
-
Couvent des Récollets (ancien) ou ancienne caserne du Muy (arrêté du 7 septembre 1978) :
vendu le 8 décembre 2008
-
Téléphérique militaire de Terre Rouge ou des Gondrans (arrêté du 1
er
octobre 2003)
-
Maison (37, Grande rue) (arrêté du 3 juin 1932)
Parmi ces édifices, seul le Fort des Têtes n’appartient pas à la commune mais à l’Etat.
La commune a cherché à valoriser ce patrimoine sur le plan touristique et économique. Elle
détient ainsi le label des villes d’art et d’histoire depuis 1990 et fait partie depuis juillet 2008
du réseau Vauban
35
.
Cet effort de valorisation a eu des conséquences positives sur la fréquentation. Le nombre de
visites, tous sites confondus, est en augmentation globale de 12 % pendant la période 2007
à 2010, avec une hausse très nette sur cette dernière année. Les visites individuelles et de
groupe, directement liées au tourisme et révéla
trices de l’attractivité du patrimoine, ont plus
particulièrement augmenté de 32 % :
Nombre de visites du patrimoine historique
2007
2008
2009
2010
var2007/2010
Visites individuelles adultes
6 368
6 006
6 171
8 804
38,25 %
Visites groupes adultes
3 610
2 766
3 575
4 406
22,05 %
Service éducatif
6 172
5 340
5 409
4 867
- 1,14 %
Total
16 150
14 112
15 155
18 077
11,93 %
Source : Direction du patrimoine et des archives de Briançon
Cette évolution est cohérente avec les statistiques de l’Unesco qui m
ontrent que le classement
au patrimoine mondial de l’humanité permet d’accroître en moyenne d’environ 25
% l’afflux
touristique dans l’ensemble des sites agréés
36
.
Toutefois
l’augmentation de
la fréquentation
n’a pas suivi immédiatement l’inscription au
pa
trimoine mondial de l’Unesco en 2008, puisque cette année
-
là, ainsi qu’en 2009, une baisse
a même été constatée par rapport à 2007.
Si la fréquentation du patrimoine apparaît donc dynamique cette dernière année, elle reste
néanmoins relativement modeste.
A titre d’exemples, le nombre d’entrées à la citadelle de
Besançon, qui fait également partie du réseau Vauban, était de 233 000 en 2010
37
. A Arles,
les monuments historiques inscrits au patrimoine mondial de l’humanité ont enregistré, tous
sites confondus, 400 000 entrées payantes
38
.
35
Le réseau Vauban a été constitué en 2007 dans le cadre de la candidature à l’inscription au patrimoine mondial
de l’humanité
; il comprend 13 sites, dont Briançon. Le label de l’Unesco a été attribué en juillet 2008 au réseau
dans son ensemble.
36
Article du Nouvel Economiste du 28 avril 2011, pages 19-20 : « Le label Unesco : une valeur universelle
exceptionnelle ».
37
Source : site internet de la citadelle de Besançon.
38
Source : article de La Provence, 20 juillet 2011
57/59
3-6-2 Le coût de la gestion du patrimoine
Le coût de fonctionnement
La gestion
du patrimoine historique relève d’une direction du patrimoine et des archives. Un
conservateur est à la tête de ce service qui comprend par ailleurs 9 agents (5,83 TP) :
Effectifs de la direction du patrimoine
Grade
ETP
1 Conservateur en chef
1
1 Adjoint administratif
1
8 guides conférenciers
3,83
Source : Direction du patrimoine et des archives
Malgré l’augmentation de ces dépenses de perso
nnel (+ 20 %), les charges ont baissé de 14 %
entre 2007 et 2010, sous l’effet de la nette diminution des charges générales.
Les recettes tirées des visites, qui représentent environ la moitié des recettes totales, se sont,
de leur côté, accrues de 23 %
sur la période. Bien qu’en augmentation, les ventes de produits,
sources de marges importantes, restent limitées (7 % des recettes).
Dépenses et recettes de fonctionnement liées à la gestion du patrimoine
2007
2008
2009
2010
Var
2007/2010
DEPENSES
-
Personnel (salaires, charges, primes…)
256 696
269 125
293 074
308 100
20,03 %
- Autres dépenses de fonctionnement
335 112
257 924
243 342
203 563
-39,26 %
Total
591 808
527 049
536 416
511 663
-13,54 %
RECETTES
- Subventions de fonctionnement
34 000
81 735
74 400
47 960
41,06 %
- Visites
49 664
46 688
60 902
61 269
23,37 %
- Vente de produits
5 609
8 385
3 196
9 214
64,27 %
- Autres
4 348
3 569
3 102
6 161
41,70 %
- Mise à disposition du conservateur à la CCB
0
0
7 590
0
Total
93 621
140 377
149 190
124 604
33,09 %
Ecart
- 498 187
- 386 672
- 387 226
- 387 059
Taux d'autofinancement
15,82 %
26,63 %
27,81 %
24,35 %
Source : Direction des finances de la ville de Briançon
Au final, malgré une évolution favorable de la fréquentation, le coût de fonctionnement net de
la gestion de ce patrimoine
s’élève à environ
400
000 € par an
pour la commune.
Le coût en investissement
Pour la période 2007 à
2010, les dépenses d’investissement liées au patrimoine historique
(travaux, équipements, études) se sont montées au total à près d’1,5 M€
39
, financées à 50 %
par des subventions.
Elles n’ont représenté qu’un peu plus de 7 % des dépenses totales
d’équipemen
ts de la commune au cours de cette même période.
39
Cette somme inclut le
montant du rachat du Fort du Randouillet à l’Etat en 2007 (20 K€) mais ne comprend
pas le quartier Colaud qui n’est pas assimilé au patrimoine historique.
58/59
Dépenses d’investissement liées au patrimoine historique
2007
2008
2009
2010
Total
Dépenses d'inv. patrimoine
190 389
599 554
589 435
100 172
1 479 550
% des dep. d'équip. total
2,32 %
7,30 %
7,18 %
1,22 %
7,07 %
Recettes (subventions)
7 475
116 908
367 438
232 707
724 528
Source : comptes administratifs et direction des finances de la ville de Briançon
Cette situation pourrait ne pas perdurer. L’entretien du patrimoine historique représente en
effet un risque important pour les finances de la ville de Briançon du fait de sa dégradation
très rapide qui nécessite d’importants travaux de sauvegarde.
2,2 M€ de dépenses d’investissements liées au patrimoine historique, ont ainsi été inscrites au
budge
t primitif 2011, dont plus de 93 % de restes à réaliser (RAR) de l’exercice 2010. Ces
dépenses, financées également à 50 % par des subventions, représentent cette fois près
de 22
% des dépenses totales d’équipement de l’année.
Dépenses d’investissement 20
11 liées au patrimoine historique
Dépenses RAR 2010
2 085 669
Recettes RAR 2010
1 101 486
Dépenses BP 2011
158 920
Recettes BP 2011
28 000
Total dépenses
2 244 589
Total recettes
1 129 486
Autofinancement
- 1 115 103
Source : Budget primitif 2011
Ces dépenses sont cependant sans commune mesure avec le montant total de travaux que
nécessiterait l’état sanitaire des fortifications Vauban.
Une étude actualisée réalisée en avril 2011 par l’architecte des monuments historiques évalue
ainsi à 28,6 M€ ou
30,5 M€, selon les options retenues, le coût des travaux de fortification et
de sauvetage de l’ensemble des bâtiments du seul Fort du Randouillet.
S’agissant du Fort des Têtes, une autre étude récente du ministère de la culture a estimé les
travaux de sa
uvetage à 20 M€ HT et les travaux de mise en sécurité et de conservation à
20
M€ HT supplémentaires.
Même s’ils sont en meilleur état, Briançon doit par ailleurs entretenir les remparts d’enceinte
de la ville ainsi que le fort des Salettes et le fort Dauphin, dont elle est également propriétaire.
Pour le Fort Dauphin, la dernière étude sanitaire fait ainsi état d’un besoin de 9,6
M€ de
travaux de sauvetage et de mise en sécurité
40
.
Il est évident que même avec d’importantes subventions, une commune de la t
aille de
Briançon n’a pas la capacité budgétaire d’entretenir un tel patrimoine, encore moins dans le
contexte particulier de situation financière dégradée que connaît la ville.
La commune
a toutefois pu récemment se désengager de l’acquisition du Fort de
s Têtes. Dans
le cadre du contrat de redynamisation des sites de défense
(CRSD), l’Etat avait en effet
proposé à la commune de lui vendre le quartier militaire Berwick pour un euro symbolique
mais avait lié cette vente à la reprise du Fort des Têtes.
40
Relevé de conclusions de la réunion de programme pluriannuel de sauvetage des fortifications du
20 avril 2011.
59/59
La ville de Briançon reste néanmoins engagée, dans le cadre du réseau Vauban, à la mise en
œuvre
d’un plan de gestion
destiné à préserver et valoriser les fortifications classées au
patrimoine mondial. Le non-respect de ce plan de gestion par un seul des membres du réseau
pourrait faire perdre le label attribué par l’Unesco à l’ensemble du réseau.
Un plan triennal adopté en juillet 2011 prévoit la réalisation de 4,5 M€ de travaux de
sauvetage des sites fortifiés de la ville. L’effort financier de 1,5 M€ par
an sera réparti entre
l’Etat (50 %), la commune (10 %) et la région et le département (40 %). Ce programme risque
cependant de se révéler rapidement insuffisant face à la dégradation très rapide de certains
forts comme le Randouillet.
CONCLUSION SUR LA GESTION DU PATRIMOINE
Le patrimoine constitue pour la ville de Briançon une richesse. Les cessions et les acquisitions
réalisées ces dernières années
montrent cependant qu’il n’
a pas toujours été géré dans le
respect des textes légaux et réglementaires et au mieux des intérêts de la commune.
Déjà contrainte par le coût de la gestion de son patrimoine historique, la commune est
désormais confrontée à la problématique de la reconversion des friches militaires
41
. Si le
foncier rendu disponible en cœur de ville
par suite du départ de l’armée constitue pour
Briançon une opportunité de réaliser un projet urbain cohérent, ce projet devra reposer, le plus
en amont possible, sur un plan de financement précis, réaliste, et régulièrement actualisé, de
façon à prévenir toutes difficultés liées à des investissements que la ville ne pourrait assumer
.
4
–
LA GESTION DES RESSOURCES HUMAINES
La chambre a réalisé un certain nombre de vérifications qui ont porté principalement sur la
régularité formelle des procédures. A la
suite de ces vérifications, la chambre n’a pas
d’observation à formuler sur ce sujet.
41
La ville de Briançon a racheté à l’Etat le quartier Colaud en 2007 pour 2,1 M€. Il était envisagé d’acquérir le
quartier Berwick pour 1 €. Dans le cadre du CRSD, une procédure d’appel d’offres pour assistance à maîtrise
d’ouvrage pour ce projet urbain a été lancée fin 2010. La commune travaille sur ce dossier avec l’appui de
l’AREA (agence régionale d’équipement et d’aménagement).